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Prise en charge de la carcinose péritonéale par chirurgie cytoréductive et chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale

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Academic year: 2022

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Prise en charge de la carcinose péritonéale par chirurgie cytoréductive et chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale

BALAPHAS, Alexandre, et al.

Abstract

In 2016, peritoneal carcinomatosis can be considered as a chronic disease that can be treated and sometimes cured. Hyperthermic Intra PEritoneal Chemotherapy (HIPEC) is a procedure developed in the eighties. Combined with CytoReductive (CR) surgery, this protocol underwent a considerable expansion in Washington Cancer Institute. CR combined with HIPEC was demonstrated to be the only curative treatment for PseudoMyxoma Peritonei syndrome (PMP). It is actually approved in the management of peritoneal carcinomatosis of ovarian, colorectal, or peritoneal primitive (mesothelioma) origin but is still studied for gastric cancer. CR/HIPEC is associated with an important mortality and morbidity. This article takes stock of indications to CR/HIPEC.

BALAPHAS, Alexandre, et al . Prise en charge de la carcinose péritonéale par chirurgie cytoréductive et chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale. Revue médicale suisse , 2016, vol. 12, no. 523, p. 1190-1194

PMID : 27487625

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Prise en charge de la carcinose

péritonéale par chirurgie cytoréductive et chimiothérapie hyperthermique

intrapéritonéale

En 2016, la carcinose péritonéale peut être considérée comme une maladie chronique qui peut être traitée et parfois guérie. La chimio­

thérapie hyperthermique intrapéritonéale (CHIP) est une procé­

dure développée dans les années 80. Combinée à une chirurgie cytoréductive (CCR), ce protocole a connu par la suite un essor important au Washington Cancer Institute. La CCR, combinée à une CHIP, a été démontrée comme seul traitement curatif du syn­

drome de pseudomyxome péritonéal (PMP). Elle est actuellement validée dans la prise en charge de la carcinose péritonéale d’ori­

gines ovarienne, colorectale, ou péritonéale primitive (mésothé­

liome) mais reste à l’étude pour le cancer gastrique. La CCR / CHIP est associée à une mortalité et une morbidité conséquentes. Cet article fait le point sur les indications à la CCR / CHIP.

Management of peritoneal carcinomatosis with cytoreductive surgery and hyperthermic

intraperitoneal chemotherapy

In 2016, peritoneal carcinomatosis can be considered as a chronic disease that can be treated and sometimes cured. Hyperthermic Intra PEritoneal Chemotherapy (HIPEC) is a procedure developed in the eighties. Combined with CytoReductive (CR) surgery, this protocol underwent a considerable expansion in Washington Cancer Institute.

CR combined with HIPEC was demonstrated to be the only curative treatment for PseudoMyxoma Peritonei syndrome (PMP). It is ac- tually approved in the management of peritoneal carcinomatosis of ovarian, colorectal, or peritoneal primitive (mesothelioma) origin but is still studied for gastric cancer. CR / HIPEC is associated with an important mortality and morbidity. This article takes stock of indi- cations to CR / HIPEC.

IntroductIon Généralités

La carcinose péritonéale (CP) est définie par une diffusion métastatique de la maladie primaire au péritoine. Sans inter­

vention, le pronostic d’une CP, toutes étiologies confondues, est sombre avec une survie de seulement quelques mois.1 La CP a été longtemps synonyme de sentence de mort et abordée par une prise en charge palliative. A l’heure actuelle, l’objectif est de prolonger la survie, voire de guérir le patient lorsque la maladie n’est pas trop avancée. Malheureusement, cette atti­

tude n’est pas encore rentrée dans les mœurs. Souvent, des patients avec des maladies limitées et initialement résécables sont fina lement référés au chirurgien en raison d’une progres­

sion après de multiples lignes de chimiothérapie.2 Seul un petit pourcentage de cas avec une CP sont finalement présentés à un chirurgien et peuvent bénéficier d’une prise en charge adaptée.

La chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale (CHIP) est une technique développée initialement comme traitement expé­

rimental de la CP dans le cadre du pseudomyxome péritonéal (PMP) (figure 1). Elle fut utilisée pour la première fois en combinaison à une chirurgie cytoréductive (CCR) par Spratt et coll. en 1980.3 Ce protocole a connu par la suite un grand essor sous l’impulsion de Sugarbaker au Washington Cancer Institute. La CCR, combinée à une CHIP, est le seul traitement curatif du syndrome de PMP 4 et reste actuellement étudiée dans le traitement de la CP d’autres origines. L’objectif de cet article est de présenter la prise en charge moderne de la CP et les approches curatives et palliatives que peut offrir la CCR / CHIP.

Physiopathologie

La genèse de la CP débute lorsque le cancer accède au péri­

toine, le plus souvent, par effraction séreuse (ou son équiva­

lent) ou migration. Ce n’est que dans de rares cas que l’on retrouve un mécanisme de dissémination lymphatique ou hé­

matogène. Suite à une intervention chirurgicale, il peut y avoir une dissémination traumatique de cellules ou d’emboles tumo­

raux lymphatiques.5 Les cellules tumorales devront ensuite survivre, proliférer, échapper au système immunitaire puis s’implanter, après recirculation, sur un site propice où la néoangiogenèse assurera leur survie.5 La circulation du fluide péritonéal se fait dans le sens caudal à crânial, en empruntant les gouttières pariétocoliques en direction du diaphragme et du grand épiploon où des lacunes lymphatiques pour le pre­

mier et des amas lymphatiques pour le second, contribuent à réabsorber les fluides.5 Ce mouvement explique la localisation préférentielle de la carcinose dans les deux gouttières parié­

Drs ALEXANDRE BALAPHAS a,*, VALENTINA BELFONTALI a,*, FRÉDÉRIC RIS a, ANDREAS LANITIS a, RAPHAEL P. H. MEIER a, MARIE­LAURE AMRAM b, Pr ARNAUD ROTH b, Dr OLIVIER HUBER a, Prs THIERRY BERNEY a et PHILIPPE MORELa

Rev Med Suisse 2016 ; 12 : 1190-4

a Services de chirurgie viscérale et de transplantation, Département de chirurgie,

b Service d’oncologie, Département des spécialités de médecine, HUG, 1211 Genève 14

alexandre.balaphas@hcuge.ch | valentina.belfontali@hcuge.ch

frédéric.ris@hcuge.ch | andreas.lanitis@hcuge.ch | raphael.meier@hcuge.ch laure.amram@hcuge.ch | arnaud.roth@hcuge.ch | olivier.huber@hcuge.ch thierry.berney@hcuge.ch | philippe.morel@hcuge.ch

* Ces deux auteurs ont contribué de manière équivalente à la rédaction de cet article.

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tocoliques mais aussi sur le diaphragme où elle peut bloquer la résorption liqui dienne et contribuer à la formation d’une ascite carcinomateuse.5 Par ailleurs, il a été démontré que les amas lymphati ques (milky spot) du grand épiploon contribuent à la survie des cellules tumorales en fournissant une niche où elles bénéficient de facteurs de croissance sécrétés.5 De sur­

croît, la carcinose a également tendance à se développer à proxi­

mité des sites chirurgicaux et des adhérences, où les cellules tumorales sont à la fois stimulées par les cytokines sécrétées par le processus de cicatrisation et protégées du système im­

munitaire par la fibrine qui les engaine.5

Principes de la ccr / cHIP

La CCR / CHIP comporte deux temps. Le premier temps est chirurgical et débute par une exploration minutieuse de la ca­

vité abdominale et le calcul du peritoneal cancer index (PCI) de Sugarbaker, qui selon sa valeur, et en l’absence de contre­indi­

cation (cf. infra), confirmera l’indication à poursuivre l’inter­

vention. En effet, selon les pathologies, il existe une valeur­

seuil au­delà de laquelle la survie n’est pas améliorée par la procédure. On passe ensuite à la phase dite de cytoréduction.

Cette chirurgie, souvent lourde, emportera la lésion primaire ainsi que toute la CP visible par une résection du péritoine pa­

riétal ainsi que de tout organe atteint par contiguïté. Parfois, lorsque les lésions sont trop petites et étendues, elles seront traitées par fulguration. Les lésions du péritoine viscéral se­

ront enlevées par résection segmentaire ou atypique. Il sera

également possible d’enlever des nodules sur la capsule de Glisson. Dans notre pratique, nous enlevons également le grand épiploon, le ligament rond et la vésicule biliaire de fa­

çon systématique. Le deuxième temps consiste en la CHIP à proprement parler. Il existe deux techniques : les techniques fermée et ouverte, dite du « Colisée ». La techni que du « Coli­

sée » consiste à placer un écarteur en plastique circulaire dé­

plié dans l’incision qui permettra de protéger la paroi, et de verser la chimiothérapie dans la cavité abdominale. Le chirur­

gien pourra passer sa main afin de brasser le liquide et assurer une bonne diffusion. La technique fermée, que nous réalisons aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG) (figu re 2), consiste en la fermeture de l’abdomen et en la mise en place de canules qui permettront de faire circuler la chimiothéra­

pie. Ces deux techniques semblent être équivalentes. Il existe peu d’évidences pour affirmer la supériorité de l’une sur l’autre.6

Le pronostic de la CCR / CHIP est fortement dépendant de la qualité de la cytoréduction. Il a été démontré que lorsque la CCR est incomplète, il n’y a plus de bénéfice du geste sur la survie.2 Dans notre pratique, outre un PCI trop élevé, l’enva­

hissement de certains sites contre­indique également la CCR / CHIP. Il s’agit : de la racine du mésentère, du pédicule hépa­

tique, du rétropéritoine et de la vessie. Une atteinte majeure du grêle, qui potentiellement pourrait induire un syndrome de l’intestin court, est également une contre­indication.

Au final, la CCR permettra d’enlever le plus de tumeurs pos­

sible alors que la CHIP associée permettra de « stériliser » les résidus tumoraux non visibles à l’œil nu. Le but de la CHIP est d’obtenir une haute concentration locale du produit de chimiothérapie et une faible concentration systémique.7 Cette forte concentration assure la pénétration de la chimiothérapie en profondeur. L’hyperthermie, quant à elle, dénature les pro­

téines et permet de détruire les cellules tumorales, mais a également un effet synergique avec la chimiothérapie admi­

nistrée.7 Il existe une variété importante de molécules utili­

sées pour la CHIP. A l’heure actuelle, nous utilisons, dans notre pratique, la mitomycine C ou l’oxaliplatine associée à une perfusion intraveineuse de 5­FU et de leucovirine.

fig 1 Carcinose péritonéale de pseudomyxome péritonéal d’origine appendiculaire avant

(A) et après (B) cytoréduction A

B

fig 2 Exemple de CHIP fermée comme nous la pratiquons aux HUG après une

cytoréduction complète

Une canule est placée dans l’hypochondre droit (derrière le foie), une autre dans l’hypochondre gauche (derrière la rate) et une troisième dans le pelvis / cul-de-sac de Douglas. CHIP : chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale.

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La CCR / CHIP est une procédure associée à d’importantes morbidité et mortalité qui, toutes pathologies confondues, vont de 0 à 50 % pour ce qui est de la morbidité et de 0 à 6 % pour la mortalité.2 La CHIP seule est également étudiée chez les patients avec cancers du côlon et gastrique à haut risque de développer une CP de façon systématique (prophylac­

tique) ou lors d’une chirurgie de second look.2 Enfin, la CHIP seule peut être également indiquée en cas d’ascite carcinoma­

teuse réfractaire, chez des patients sélectionnés.2 Dans les paragraphes qui suivent, nous détaillerons les indications à la CCR / CHIP. Le tableau 1 résume les évidences de la littéra­

ture en faveur de cette procédure.

IndIcAtIonS À LA cHIP cancer gastrique

Dans le cancer gastrique (CG) de type adénocarcinome, la CP est très fréquente, ceci même après une chirurgie radicale.8

Coccolini et coll. ont présenté une méta­analyse, portant sur vingt essais randomisés contrôlés et plus de 2000 patients, comparant la CCR seule à la CCR associée à une CHIP. Les in­

dications retenues étaient soit un CG avancé (T4a ou b) de lo­

calisation gastrique ou de la jonction œsogastrique, soit un envahissement de la séreuse, avec ou sans CP, mais sans mé­

tastase à distance. La mortalité à un, deux et trois ans était significativement diminuée dans le groupe CCR / CHIP par rapport à la chirurgie. En revanche, la différence était non signi ficative à cinq ans. En analyse de sous­groupe, chez les patients avec une CP établie, cette réduction était significa­

tive à un, deux et trois ans mais non significative sur le long terme. Des résultats identi ques étaient retrouvés chez les pa­

tients sans carcinose (CHIP prophylactique). La CCR / CHIP se compliquait d’une plus forte morbidité comparée à la chi­

rurgie seule. Cette analyse doit être nuancée par le fait que la plupart des études incluses portaient sur des patients asia­

tiques dont la biologie tumorale est clairement différente de celle des populations occidentales.

Etudes Caractéristiques Survie médiane 1 an 2 ans 3 ans 5 ans

Pseudomyxome péritonéal CCR + CHIP ou CCR + CIPP ou CCR +

CHIP + CIPP Chua et coll.18

2012 Rétrospective, n = 2298 16,3 ans NC NC NC NC

Cancer de l’ovaire CCR + CHIP puis chimiothérapie

systémique Ryu et coll.19

2004 Maladie primaire,

comparative, n = 92 / 99 NC NC NC NC 63,4 %

CCR puis chimiothérapie systémique NC NC NC NC 52,8 %

CCR + CHIP puis chimiothérapie

systémique Spiliotis et coll.20

2014 Récidive, RCT, n = 60 / 60 26,7 mois 88 %

(survie) 77 %

(survie) 75 %

(survie) NC

CCR puis chimiothérapie systémique 13,4 mois 70 %

(survie) 65 %

(survie) 18 %

(survie) NC

CCR + CHIP + chimiothérapie systémique vs CCR + chimiothérapie systémique

Huo et coll.9

2015 Méta-analyse, 8 études,

n = 253 / 297 NC 4,24

(OR survie) 2,57

(OR survie) 4,.31

(OR survie) 2,53 (OR survie) Cancer gastrique

Gastrectomie + CCR + CHIP Glehen et coll.21

2010 CG avec CP, rétro-

spective, multicen- trique, n = 159

9,2 mois 43 %

(survie) NC 18 %

(survie) 13 %

(survie)

CCR + CHIP Yang et coll.22

2011 CG avec CP, RCT,

n = 34 / 34 11 mois 41,2 %

(survie) 14,7 %

(survie) 5,9 %

(survie) NC

CCR 6,5 mois 29,4 %

(survie) 5,9 %

(survie) 0 %

(survie) NC

Cancer colorectal CCR + CHIP + chimiothérapie

systémique Verwaal et coll.23

2003 CCR avec CP, RCT,

n = 54 / 51 22,3 mois NC NC NC NC

Chimiothérapie systémique

± chirurgie 12,6 mois NC NC NC NC

CCR + CHIP + chimiothérapie

systémique Elias et coll.24

2009 Rétrospective, n = 48 NC NC 81 %

(survie) NC 51 %

(survie) Chimiothérapie systémique

± chirurgie Rétrospective, n = 48 NC NC 65 %

(survie) NC 13 %

(survie) Mésothéliome

CCR / CHIP Yan et coll.25

2009 Rétrospective, multi-

centrique, n = 405 53 mois 81 %

(survie) 60 %

(survie) 47 %

(survie)

Tableau 1 Récapitulatif non exhaustif des données de la littérature par pathologie

CCR : chirurgie cytoréductive ; CHIP : chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale ; OR : odds ratio ; NC : non calculé ; RCT : randomized controlled trial – étude randomisée contrôlée ; CG : cancer gastrique ; CCR : cancer colorectal ; CP : carcinose péritonéale ; CIPP : chimiothérapie intrapéritonéale postopératoire précoce.

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Le traitement du CG s’inscrit dans un modèle multimodal. La CCR / CHIP semble retarder l’évolution oncologique sans avoir un effet sur la survie à long terme. Cet effet palliatif est à contrebalancer avec une morbidité augmentée par rapport à la chirurgie seule. En ce qui concerne le CG avec CP, la procé­

dure reste dans le domaine expérimental et devrait être réser­

vée à des jeunes patients de moins de 60 ans, actifs, avec un PCI < 10 et de petits nodules permettant une résection en R0, sans ascite ni métastase extrapéritonéale ou envahissement hépatique et ayant bien répondu à la chimiothérapie néoadju­

vante.7 Le pronostic est plus sombre avec un score PCI au­

delà de 13 prédisant à la fois une survie nulle à trois ans après CCR / CHIP et une probabilité faible de cytoréduction com­

plète.7 Dans notre pratique, nous opérons des patients avec un score PCI allant jusqu’à 9.

cancer ovarien

Pendant longtemps, la prise en charge de la CP ovarienne (can­

cers épithéliaux) fut basée sur une cytoréduction partielle (debulking) associée à une chimiothérapie adjuvante précoce.

En effet, contrairement à d’autres étiologies, la CP ovarienne répond très bien à la chimiothérapie systémique.5 Cependant, environ la moitié des patients traités de cette façon présente­

ront une récidive.9 Une récente revue de la littérature et méta­

analyse s’est penchée sur le sujet.9 Les auteurs ont extrait les données de huit études comparatives dont une randomisée contrôlée, comparant la CCR / CHIP puis la chimiothérapie sys­

tématique à la CCR associée à une seule chimiothérapie systé­

mique. Globalement, la méta­analyse démontre que, comparée à l’alternative, la CCR / CHIP prolonge la survie globale, et ceci jusqu’à huit ans après le geste. Ceci est d’autant plus vrai pour la carcinose ovarienne traitée en première intention. Dans les cas de récidives en revanche, on retrouve un gain dans les première et troisième années. Il est intéressant de relever que la morbi­

dité et la mortalité avec ou sans CHIP étaient similaires.

Cette même étude démontre que les taux de survie globale à 1, 2, 3 et 5 ans sont fonction de l’importance de la cytoréduc­

tion dans le bras CCR / CHIP. Cette observation va à l’encon­

tre du principe de cytoréduction où on laisse une partie de la maladie, en espérant éradiquer le reste par chimiothérapie systémique.

cancer colorectal

Dans le cancer colorectal, le péritoine est le deuxième site métastatique le plus fréquent après le foie. Environ 7 à 15 % des patients atteints d’un cancer colorectal ont une CP syn­

chrone, et 4 à 19 % en développeront une par la suite. Des études récentes ont démontré que chez 17 % des patients, la CP s’inscrit dans le cadre d’une maladie multi métastatique, et seulement dans 2,1 % des cas, elle est la seule localisation métastatique.10,11

La CP a été longtemps considérée comme un stade terminal du cancer colorectal, avec une espérance de vie de moins de six mois après chimiothérapie systémique par 5­FU.10 Depuis l’introduction de la CCR / CHIP et les régimes de chimiothéra­

pie modernes (capécitabine, oxaliplatine, irinotécan) combi­

née à l’immunothérapie (bévacizumab, cétuximab, panitumu­

mab), nous avons assisté à une amélioration du pronostic.10

Une étude randomisée conduite par Verwaal et coll.12 a mis en évidence une augmentation de la survie médiane de dix mois dans le groupe CCR / CHIP puis chimiothérapie systémique adjuvante (survie médiane 22,3 mois) par rapport au groupe traité par chimiothérapie systémique seule (survie médiane 12,6 mois). Les limites de cette étude sont son inhomogénéité en termes d’extension et d’origine de la carcinose ainsi que de son ancienneté. Elle a été conduite avant d’avoir à disposition les régimes de chimiothérapie modernes. Ces résultats en­

courageants ont été corroborés par trois études non randomi­

sées avec des résultats similaires ou supérieurs, en faveur de la CCR / CHIP et de la chimiothérapie systémique.13

La valeur­seuil du score PCI, pour réaliser une CCR / CHIP dans la CP d’origine colorectale, est de 20. En effet, la survie globale à cinq ans est pratiquement nulle pour les patients ayant un PCI excédant 20, comparée à 35 % pour les scores PCI in­

férieurs ou égaux à 20.14 Une valeur limite à 10 est proposée par d’autres auteurs, en raison de taux de survie significative­

ment meilleurs pour les scores PCI inférieurs à 10.13 Dans notre centre, la valeur limite retenue est de 20. Une étude ré­

cente de Elias et coll.15 a démontré que l’extension de la carci­

nose aux zones 9­12 (intestin grêle) exerce un impact négatif sur le pronostic, en particulier l’invasion de la zone 12 (iléon distal). A l’avenir, ces éléments pourraient potentiellement être utilisés comme facteurs additionnels au PCI.

Pseudomyxome péritonéal et tumeurs mucineuses de l’appendice

Le pseudomyxome péritonéal (PMP) est défini par l’implanta­

tion péritonéale (figure 1) de cellules épithéliales cancéreu­

ses de type adénomucineuse, produisant une ascite mucineuse et dont l’origine peut être appendiculaire (plus fréquemment) ou ovarienne.16 Les tumeurs mucineuses de l’appendice for­

ment un groupe hétérogène de pathologie allant des formes les plus bénignes à des formes malignes et qui peuvent être classifiées d’après le grade histologique, mais aussi selon l’at­

teinte péritonéale, d’après la classification de Ronnett,17 DPAM (disseminated peritoneal adenomucinosis) qui est plutôt de bon pronostic, PMCA (peritoneal mucinous carcinomatosis) qui est plutôt de mauvais pronostic et PMP avec caractéristiques in­

termédiaires. La CCR / CHIP a été bien établie comme seul traitement des tumeurs mucineuses avec dissémination péri­

tonéale, sur la base d’études rétrospectives et comparatives.

L’étude de Chua et coll.,18 qui a revu rétrospectivement plus de 2000 patients ayant bénéficié de CRS / CHIP, CRS / chimiothé­

rapie intrapéritonéale postopératoire précoce (CIPP) ou CRS / CHIP montre une survie médiane de 16,3 ans, sans différen ce entre les trois groupes sur la survie finale. Il a été démontré que les facteurs déterminant un bon pronostic sont : la qualité de la cytoréduction, le grade initial selon Ronnett ainsi que la présence de métastases ganglionnaires (mauvais pronostic).1,16 Par ailleurs, la procédure est indiquée jusqu’à des valeurs PCI même très élevées.

Mésothléliome

Le mésothliome est une tumeur d’origine péritonéale rare qui, avec une chimiothérapie systémique, permet une survie mé­

diane de 12 à 26,8 mois.1 En raison de la rareté de cette patho­

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La chirurgie cytoréductive combinée à une chimiothérapie hyperthermique intrapéritonéale (CCR / CHIP) se positionne comme une vraie option thérapeutique dans les cas de carcinose péritonéale (CP) ; les patients doivent être référés précocement chez un chirurgien pour évaluer sa faisabilité

La CCR / CHIP permet le plus souvent la guérison des patients atteints d’un pseudomyxome péritonéal

Dans le cas de la CP d’origine ovarienne, la CCR / CHIP semble supérieure à la chimiothérapie systémique seule avec cytoréduc- tion (debulking)

Une CP d’origine colorectale semble être une bonne indication à la CCR / CHIP

implicAtions prAtiques

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25 * Yan td, et al. cytoreductive surgery and hyperthermic intraperitoneal chemo­

therapy for malignant peritoneal meso­

thelioma : Multi­institutional experience. J clin oncol 2009;27:6237­42.

* à lire

** à lire absolument logie, il n’existe à l’heure actuelle aucune étude randomisée

contrôlée évaluant la CCR / CHIP mais uniquement des séries prospectives et des études rétrospectives. La plus grande sé­

rie, comprenant 401 patients, rapporte une survie moyenne de 53 mois1 avec CCR / CHIP. Il n’y a pas de consensus sur l’indi­

cation au geste. La maladie restant souvent localisée, les pa­

tients peuvent bénéficier de CCR / CHIP répétées.

concLuSIon

A l’heure actuelle, la CCR / CHIP permet de guérir ou de pro­

longer significativement la survie des patients atteints de CP.

Cette approche est grevée d’une morbi­mortalité conséquente.

L’indication principale reste le PMP pour lequel la procédure est hautement recommandée. Pour les autres étiologies, la décision doit être prise au cas par cas, d’autant plus pour le cancer gastrique pour lequel la procédure reste expérimen­

tale. Outre les valeurs limites du score PCI et les contre­indi­

cations évoquées, la décision de réaliser ce geste doit tenir compte aussi de l’âge du patient, de ses comorbidités, du nom­

bre d’anastomoses nécessaire, ainsi que de la réponse de la tumeur à une éventuelle chimiothérapie néoadjuvante.

A l’avenir, d’autres facteurs pronostiques pourraient s’ajouter dans la sélection préopératoire des patients. Notamment, l’éva­

luation de certaines caractéristiques moléculaires de la tumeur, par exemple la mutation KRAS ou l’instabilité microsatellitaire, en ce qui concerne les carcinoses d’origine colorectale. Des

études permettant d’avancer sur ces problématiques sont né­

cessaires.

Par ailleurs, l’émergence d’approche comme la chimiothérapie intrapéritonéale en aérosols (pressurized intraperitoneal aerosol chemotherapy, PIPAC) ou de nouvelles chimiothérapies semble réserver un bel avenir au traitement de la CP.

Conflit d’intérêts : Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

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