• Aucun résultat trouvé

La Révolution. au P ays de Châteaubriant

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "La Révolution. au P ays de Châteaubriant"

Copied!
27
0
0

Texte intégral

(1)
(2)
(3)

L a R é v o l u t i o n

a u P a y s d e

C h â t e a u b r i a n t

(4)
(5)

ALFRED GERNOUX

La Révolution au Pays de Châteaubriant

Illustrations de Jacques POHIER

19 3 6 IMPRIMERIE LEMARRE C H A T E A U B R I A N T

(6)
(7)

AVANT-PROPOS

La période de 1789 à 1799 a été évoquée dans beaucoup de régions de France. Ces études ont fait l'ob- jet de nombreuses thèses, qui éclairent la grande His- toire.

Depuis longtemps, nous assemblons des notes sur ces dix années de l'époque révolutionnaire. Nous ne prendrons que l'essentiel. L'abondance des documents nous oblige à mettre en plusieurs chapitres ce que nous avons pu recueillir. Nous nous efforcerons d'être clair.

Puisque l'histoire est la résurrection du passé — et ce passé est peu éloigné de nous — quel plus beau roman que celui de la vie de nos ancêtres, de ceux qui nous ont précédés dans les lieux que nous habitons ?

Après une présentation des personnages, comme dans toute pièce théâtrale, nous assisterons à l'action des héros et héroïnes, qui nous seront devenus familiers ; si leur vie fut intense certains jours, nous verrons que la mort les guettait de près, et beaucoup seront happés en pleine force. Ce n'est pas sans émotion que l'on suit toutes les péripéties de cette période agitée, où la France passa d'un état à un autre brusquement.

Des réformes étaient en l'air bien avant 1789, et Louis XVI avait été contraint d'en consentir plusieurs ;

(8)

Bonaparte de son côté sera forcé d'en réaliser d'autres ; il n'en est pas moins vrai que les dix années centrales qui se dérouleront, restent les plus marquantes, et c'est pourquoi nous avons été attiré tout spécialement vers elles.

La Révolution ! c'est si vaste à étudier, que la bien suivre dans sa propre région, ce serait déjà beau- coup.

Tous les faits s'enchaînent et quand on a com- pris leur suite logique sur un petit territoire connu, c'est alors qu'on peut goûter des épisodes détachés de la grande Histoire.

Même dans l'histoire régionale, certains récits, comme l'exécution d'un chef royaliste à Châteaubriant ; le retour si touchant d'Angélique de Renac au château natal " Les Fougerays " ; la liaison de Sophie Trébuchet avec le capitaine Hugo, et plusieurs autres passages, ne laisseront pas le lecteur indifférent. A côté d'actes de sauvagerie, nous rencontrerons des exemples d'humanité réconfortants.

(9)

L'ADMINISTRATION CIVILE

Le rôle des Administrations fut de percevoir les contributions, de préparer les réquisitions d'hommes, de blé, d'animaux, de bois pour la marine, de faire garder les forges de Moisdon, la Hunaudière, Martigné, ainsi que la verrerie de Javardan, puis d'assurer la sécurité pu- blique à un moment où Bleus et Blancs se dressèrent les uns contre les autres.

Les administrateurs étaient évidemment secondés par les autorités militaires. Cette dernière eut même par- fois plein pouvoir.

Les principales autorités à connaître sont le Maire de Châteaubriant avec sa municipalité ; et surtout le Sous-Préfet ou commissaire du district, avec son conseil de district ou directoire ; un agent national ;

(10)

Les membres du tribunal ; Le juge de paix.

Pour la période de la Terreur, nous présenterons les Comités ou Clubs.

Enfin, nous parlerons du député MÉAULLE.

La Mairie était à l'emplacement de la cure ac- tuelle, au sud de l'église Saint-Nicolas.

Les Maires furent : MARGAT Louis (1790 à 1794) ; Ballais ; Lejeune Benjamin ; Guy BAIN DE LA COQUERIE, de 1795 à 1797 ; RÉGNIER Jean-Baptiste (1797), et Dauf- fy du Jarrier.

Louis-Joseph-Julien MARGAT était le représentant d'une vieille famille de bourgeois castelbriantais, qui s'é- taient. enrichis dans l'industrie de la tannerie, industrie locale prospère alors. Né en 1751, à Châteaubriant, il était fils de Joseph Margat, sieur de la Plaisière, et d'An- ne-Marie Baguet de la Rolandière (du château de la Noë en Rougé).

Il épousa Marie-Anne Ballais, dont le père, hom- me de loi, fut un des malheureux 132 nantais.

La sœur de ce maire, Jeanne Margat, épousa en 1783 Pierre-Anne Guérin, encore une des vieilles famil- les du pays, et toujours représentée au château de la Noë en Rougé, par le conseiller général actuel de ce canton, M. Julien Lanoë.

Comme maire, Louis Margat eut à faire preuve de beaucoup d'initiative et d'énergie, par exemple lors d'une assemblée des nobles en mars 1791, lors de la fuite du roi, lors de la grande semaine électorale à Châteaubriant, en août 1792, puis au moment du soulèvement de mars 1793, et surtout durant le passage des troupes de Mar- ceau et de Kléber en fin de 93 et début de 94.

Les souvenirs de Louis Margat, ou ceux de sa sœur madame Pierre Guérin, auraient été très intéressants à

(11)

lire. Cette famille connaissait celle de tous les autres bourgeois libéraux du pays : Régnier de Longuenoë, De- lourmel de la Picardière, Trébuchet d'Auverné, Lejeune du Chalonge, Daniel du Mortier, Ernoult de la Chêne- lière, Cocault, Ripaud, Lheureux, etc.

Louis Margat est mort à Châteaubriant, en 1801, âgé seulement de cinquante ans, sa femme, Marie Ballais, fut trouvée un soir d'hiver, en 1811, à moitié carbonisée au coin de son feu. Leur fils unique devint greffier du tribunal. Il est mort tard en notre ville.

LEJEUNE Benjamin, qui ne fut que trois mois mai- re, s'était signalé par son ardeur à combattre les royalis- tes.

Voici ce qu'il écrivait de Nort-sur-Erdre, le 29 mars 1793 :

« Au citoyen Lejeune François, homme de loi à Châteaubriant.

« Nos ennemis sont retranchés dans les bois du Pont-Hus ; ils ont manqué hier d'un coup de fusil, le citoyen Meslein qui s'était approché pour reconnaître leur position.

« Nous allons, à l'instant, donner l'attaque. Je me suis mis avec les fusilliers, ne me croyant pas assez bien monté pour tenir dans la cavalerie. Je me suis procuré un fusil d'ordonnance.

« Toute notre troupe brûle d'en venir aux mains à la première occasion. Je t'annoncerai j'espère une vic- toire.

« J'embrasse ma sœur, et vous souhaite joie et santé, ainsi qu'à la maison Chénelière.

Benjamin LEJEUNE ».

— Guy BAIN DE LA COQUERIE était un noble dont le séjour à la mairie correspond à la période de réaction thermidorienne. Sa fille, qui avait été emprisonnée à

(12)

Nantes, pendant la Terreur, épousa Martin Connesson, un officier d'Intendance des Armées républicaines, futur Maire de Châteaubriant sous l'Empire et la Restauration.

— Jean-Baptiste RÉGNIER fut la terreur des Blancs, et ceux-ci en ont fait, avec beaucoup d'exagéra- tion, le type du Jacobin inculte et sanguinaire. Je revois toujours un castelbriantais, de droite, me contant avec des jeux de physionomie, marquant une réelle exaltation:

« — Régnier, un bandit, un assassin, un ignorant,

« crevant de faim dans sa région de Retiers, content de

« venir tyranniser Châteaubriant... ! »

C'est absolument faux. Jean-Baptiste Régnier, sieur de Longuenoë était de tout à fait bonne famille bourgeoise. Il naquit à la Guerche, en 1764 ; sa grand' mère était une du Gallivier, et il eut pour parrain à son baptême un sien parent : Anne Lambert de Lorgerie, sei- gneur de Soulvache.

Contrôleur des deniers à Châteaubriant, en 1787, il y épousa Adélaïde Delourmel de la Picardière, d'au- thentique famille bourgeoise elle aussi. Famille qui après avoir admiré les idées de Voltaire, accepta celles de Volney de Craon. D'ailleurs, la fille de Régnier s'allia aux ancêtres des propriétaires actuels de la Haie-Bes- nou : les de Pontbriand.

Il est exact que ce sont les bourgeois intelligents, instruits et actifs qui ont fait la Révolution, et Régnier fut un de ces bourgeois.

Jean-Baptiste Régnier fut, avec son beau-frère Pierre-Julien Lelièvre, (sorte de premier sous-préfet du district, pendant la Convention et le Directoire) et avec Jean-Nicoles Méaulle (le député conventionnel), l'âme de la Révolution dans la région. Son beau-frère, Pierre Chauvin, fut également un animateur politique au pays de la Guerche.

Très instruit, Régnier écrivait et parlait avec dis-

(13)

tinction. Sa femme aimait la musique. Ils furent en rela- tion d'amitié avec Volney, Defermon, Gourlay, Boulay- Paty père, Hoche, Carrier, et le représentant Boursault.

Le 3 janvier 1798, Gourlay, membre des Cinq- Cents, écrit à son ami Bongérard Louis, de Château- briant :

« Tu aurais dû me prévenir de la destitution,

« comme Maire de Châteaubriant, de notre ami Régnier.

« Il n'y aura pour moi de relâche, que Régnier

« n'obtienne la satisfaction qu'il mérite ;

« Que le gouvernement enfin, ne le connaisse pour

« un de ceux auxquels, dans notre département de la

« Loire-Inférieure, il peut accorder sa confiance.

« Tu peux, mon cher Bongérard, l'en assurer. Je

« lui écris aujourd'hui dans le même sens...

GOURLAY,

(Membre des Cinq-Cents) ».

Nous devons dire aussi que, lorsqu'en août 1792, toutes les notabilités du département se réunirent à Châ- teaubriant pour une semaine d'élection, c'est autour du ménage Régnier que se groupa l'élite. Il y eut là des dé- jeuners et dîners, suivis de causeries philosophiques et politiques, et des séances de musique que nous aimerions à ressusciter. — Non, le salon des Régnier n'avait rien d'une assemblée de bandits, d'assassins, d'ignorants.

Nous savons qu'avant 1789, ces Régnier, ces De- lourmel, ces Trébuchet, ces Méaulle, ces Ernoult... s'as- semblaient pour jouer la comédie, chanter, discuter, faire des vers. De tels cénacles existent-ils si nombreux à Châteaubriant ?

Jean-Baptiste Régnier, la " terreur des Royalis- tes ", était hélas très sensible aux charmes du beau sexe.

Il vivait trop en artiste. Ce n'est pas Musset qui aurait

(14)

pu l'en blâmer ni beaucoup de ses amis de l'époque (1).

Il mourut à la suite d'un drame passionnel, qui occupa fort les méchantes langues de Châteaubriant. Un matin, après avoir enfoncé les portes de la demeure de la ci- toyenne Cocault, on la trouva, elle et son amant, étendus sur le parquet d'une chambre, baignant dans le sang.

Régnier, regretté par ses amis, fut naturellement ridiculisé par ses adversaires. On alla même jusqu'à dire, sous la Restauration, qu'on l'avait enterré, assis, devant sa maison, dans la rue de Rigalle, où il demeurait !

L'enterrement libre du citoyen Régnier fit évidem- ment jaser les esprits bornés, et notre personnage entra dans la légende ; on le chargea de tous les maux.

Quant à DAUFFY DU JARRIER, dernier maire de l'époque révolutionnaire, ce fut un bon bourgeois mo- déré, paisible, qui demeurait rue de Vitré. Il avait été, avant 89, fonctionnaire de la seigneurie de la Jonchère, et résidant en ce château, puis les Blancs devenant maî- tres de presque toute la campagne, il s'était sagement ré- fugié en la citadelle de Châteaubriant, encore entourée de ses murs, et gardée par la " milice " et la troupe. Les Franco, les Lacombe, les Caron, les Puybaraud sont des descendants et alliés de cette honorable famille, dont le berceau fut Soudan.

Nous ne pouvons songer à donner dans l'ordre, les noms des divers conseillers municipaux pour cette époque ; ce serait trop fastidieux. On y rencontre les Jamain, Guiet, Laumaillé, Peuriot Louis (père), Lorieux, Jallot, Morisseau, Errien (qui était poète), Davy, Car- pentier, Cocault du Verger...

Un curieux secrétaire de la Municipalité, ce fut Yves NOLET, ex-moine du couvent de Saint-Martin de

(1) Voir le début de la Confession d'un enfant du siècle.

(15)

Teillay (1). Il devint un moment curé constitutionnel d'Is- sé, puis se déprêtrisa solennellement en 1793. Il se maria à Châteaubriant, en 1794, à l'âge de 40 ans, avec Sainte- Esnault qui accepta les fonctions d'institutrice.

C'est Nolet qui aida la déesse Raison (Julie P a - tard, dame Ernoult de la Chênelière), à gravir les mar- ches de la Montagne, érigée sur la place Saint-Nicolas, en 1794. En 1800, il devint greffier du Tribunal de Châ- teaubriant. Ses ennemis de l'époque révolutionnaire ont reconnu qu'il était actif, intelligent, mais nous croyons que cette bonne appréciation est due surtout au fait que, Nolet " se convertit ". Nous avons souvent entendu dire qu'il devint, aux environs de 1830, le grand ami du pieux et charitable docteur Verger, qui a laissé un excellent souvenir à Châteaubriant.

Yves Nolet avait été moine " cordelier " à Saint- Martin de Teillay, avec Vannier, Pineau, Leboucher, Pierre Paillard et Poissard, qui tous se déprêtrisèrent.

L a Maison du district, qu'on appellerait sous-pré- fecture aujourd'hui, cette maison hantée où se tinrent quelques séances du tribunal révolutionnaire, est située dans la grand'rue ; le ruisseau du Rollard passe dessous;

elle a une tourelle haute à l'intérieur de la cour. Elle sert présentement au Clergé pour des expositions au profit des bonnes œuvres. Elle appartenait avant la Révolution aux de la Houssaye, et leur exil la donna à la Nation, temporairement.

Les membres du Directoire ou Conseil du district furent : Châtelier (de Saint-Vincent), Cordeau et Chas- saing (de Saint-Julien) Taillandier (de Sion), Paul Le- foux, Jallot, Duval, Jamain, Jambu, Delafosse. Un secré- taire du district célèbre : Palierne René-Marie-François

(1) Des ruines de ce couvent r e s t e n t en la f o r ê t de Teillay.

(16)

qui devint lieutenant-colonel sous les ordres de Hoche, en 1795.

Le plus influent de ce conseil fut bientôt Pierre- Julien LELIÈVRE, sur lequel voici une notice faite par lui- même, en mars 1798, pour répondre aux questions du Préfet de Nantes :

« Je suis né en 1749 à Orgères, canton de Corps- Nuds.

« J'ai fait mes études au collège de Rennes, et y ai étudié mon droit.

En 1765, j'ai commencé la science des lois et de la jurisprudence.

« En 1773, j'ai été mandaté procureur et notaire de la ci-devant baronnie de Châteaugiron(Ille-et-Vilaine).

« En 1783, je me suis marié à Châteaubriant à Mlle Victoire Pollier de la Bouvrays, fille de maître Pol- lier, notaire à Châteaubriant, originaire de Vritz.

« J'ai cinq enfants de mon mariage, et un neveu à ma charge.

« Je possède environ 2.000 francs de rente.

« J'ai été nommé par le Directoire, commissaire de ce district, le 28 novembre 1795.

« Ma correspondance avec vous et votre prédé- cesseur vous apprendra quels sont mes principes.

« Vous demandez, quelles sont mes occupations habituelles et mes goûts ?

« Comme avocat, homme de loi gradué, je m'ap- plique à l'étude des lois, à concilier les nouvelles avec les anciennes, à en faire une juste application, à consulter gratuitement les pauvres et les affaires légères, à re- cevoir de faibles honoraires des avis que je donne par écrit aux gens aisés.

« L'hydre de la chicane me fit, en 1788, désirer des lois meilleures dans l'ordre judiciaire, aussi je fus

(17)

nommé député à l'assemblée des coutumes et corpora- tions de Bretagne. J'y assistai tant qu'elle dura. J'y fi- gurai comme secrétaire par l'absence de Lequinio.

« A Châteaubriant, je fus nommé procureur de la commune, poste que j'ai rempli jusqu'en novembre 1792. A cette date, je devins administrateur du district.

C'est le 7 frimaire, an IV, que je reçus la commission du Directoire.

« Dans toutes ces places, je n'ai connu que la loi et l'ordre. J'ai été l'ennemi des factions et des fac- tieux. Et je n'en ai pas moins subi des pertes de toutes espèces pendant la guerre civile.

« Voilà ma confession, je désire qu'elle remplisse le but que vous vous êtes proposé en m'écrivant,

Salut et Fraternité.

LELIÈVRE ».

En 1800, lors de la réorganisation des services publics par Bonaparte, Lelièvre fut nommé juge au Tri- bunal de Châteaubriant, poste qu'il occupa durant tout l'Empire, avec ses amis Bongérard et Lesage.

Il est mort en notre ville, le 17 août 1820, restant toujours " libéral ".

La dernière de ses filles décéda à Châteaubriant, le 3 juillet 1877, laissant tout un lot de livres et de pa- piers fort intéressants, qui furent achetés par M. DE LA SICOTIÈRE (1). A la mort de ce dernier, ils ont été vendus à un libraire de Paris. Peut-être un jour, quelques ache- teur avisé, pourra-t-il les faire entrer à la bibliothèque

(1) M. de la Sicotière, qui est l'historien de la Chouan- nerie en Normandie, venait p a s s e r ses vacances à C h â t e a u - briant, c o m m e héritier des B a l l a i s - M a r g a t d o n t nous avons parlé.

(18)

de Nantes ou mieux au Musée de Châteaubriant, où un dépôt d'archives vient de s'ouvrir.

Les membres du tribunal furent : Jean-Nicolas Méaulle, Louis-Joseph Baguet, Benjamin Lejeune, Pier- re-Jean-Olivier Bonaventure Le Minihy.

Le juge Pierre Lesage était né à Rennes, en 1753.

Au début de la Révolution, il fit partie du comité d'ad- ministration de la garde nationale de Rennes.

Il arriva à Châteaubriant en décembre 1790, par son mariage avec Elisabeth Lelarge, une proche parente du maire Louis Margat.

Pierre Lesage fut un grand ami de Méaulle, à Châteaubriant, et la famille Lesage possédait des lettres de ce député dans lesquelles étaient dépeintes les séan- ces orageuses de la Convention.

Voici ce que le fils Méaulle (Hyacinthe (1) de Ren- nes) écrivait en 1829: « Le père Lesage est mort depuis 8

« jours, âgé de 76 ans. C'était un grand ami de notre

« père. Il est mort sans maladie comme une lampe qui

« s'éteint quand il n'y a plus d'huile. Son fils Joseph

« nous a appris cette triste nouvelle ».

Le juge de paix Ernoult de la Chénelière mérite une mention spéciale, à cause de sa femme, Julie Patard, (de Fougères) sorte de muse de la Révolution ; très belle, très charitable, très cultivée et qui fut très liée avec Mus- car et par suite avec Léopold-Sigisbert Hugo, pendant le séjour de ceux-ci à Châteaubriant. Les salons de Mme Régnier, de Mme de la Chénelière, des citoyennes Martin, Bontemps (2), Lejeune furent des plus en relief pendant la période qui nous occupe.

(1) Bon orateur, on le s u r n o m m a bouche d'or.

( 2 ) Ces Bontemps, fonctionnaires des Condés, é t a i e n t p r o p r i é t a i r e s en L u s a n g e r . Ils é t a i e n t p a r e n t s des Ripaud.

(19)

La famille Ernoult de la Chénelière était alliée à celle de Boulay-Paty, et peu de temps avant la Révolu- tion, une partie des biens des Boulay-Paty d'Abbaretz et de Louisfert passèrent aux Ernoult de la Chénelière.

Ces Ernoult voyaient Volney et lui écrivaient ; ils s'en allèrent demeurer après la tourmente à Savenay, ils redevinrent voisins de leur parent, Sébastien Boulay- Paty, marié à Donges avec une demoiselle Rose Halgan, sœur d'un officier de marine, le futur amiral Emmanuel Halgan, l'intime ami de Jérôme Bonaparte.

Et maintenant, passons au député conventionnel, de Châteaubriant : Jean-Nicolas MÉAULLE (1757 à 1826).

Jean-Nicolas Méaulle, fils d'un riche cultivateur, naquit à Saint-Aubin du Cormier (Ille-et-Vilaine) en 1757. Il fit de bonnes études à Rennes, et comme beau- coup d'hommes de son temps, il se nourrit de la philoso- phie émancipatrice du XVIII siècle.

Il vint à Châteaubriant comme avocat vers 1783.

Grâce à son talent, son affabilité, son activité, il se rendit populaire dans la région.

Il épousa, en 1787, Félicité Peuriot (1763-1842), fille d'un maître des Postes de Châteaubriant. Il demeura au château avec Jean-Baptiste Lefebvre, et Ernoult de la Chènelière... tous fonctionnaires de la baronnie des Condés.

Par son beau-père, Louis Peuriot, Méaulle eut vite des attaches profondes avec la région de Château- briant. Depuis un siècle, les Peuriot étaient barbiers de père en fils. On sait que les barbiers pratiquaient la sai- gnée, et les titres les qualifiaient de « chirurgiens, nom- més par le roi ». Louis Peuriot, maître de Poste et chi- rurgien, était très populaire. Il sifflait et chantait à ravir.

On le connaissait avantageusement, loin a la ronde.

C'était un vrai Figaro local. Il avait épousé Marie Mar- gat, encore une parente du maire Louis Margat. Ces Peu-

(20)

riot étaient propriétaires en Saint-Vincent des Landes et très avantageusement connus.

Au début de la Révolution, Méaulle eut à lutter contre un autre avocat de talent : GUIBOURG René-Jean, qui se fit le champion des droites. Au conseil municipal il y eut des joutes oratoires où Méaulle triompha. (Ce Guibourg est le père du Guibourg-Berry de 1832).

Méaulle fonda avec d'autres réformateurs qu'il animait de sa foi ardente, la " Société des Amis de la Révolution qui devint la " Société populaire et compta en moyenne 150 membres actifs. Par sa parole, plus tard par ses lettres, écrites de Paris, Méaulle com- muniqua son zèle à ce Comité qui fit de Châteaubriant une forteresse du parti républicain, capable de tenir tête à toutes les vagues d'assaut du parti royaliste de 1792 à 1800.

C'est le 2 septembre 1792, lors de la tenue du col- lège électoral à Ancenis, que Méaulle fut élu député à la Convention. C'est lui qui obtint le plus de voix. On ra- conte qu'il dit à ce collège : « Votez pour le professeur

« Fouché, il est instruit, intelligent ; il fera un bon dé-

« puté à la Convention ». Fouché fut élu grâce aux re- commandations de Méaulle.

Mme Méaulle resta au château de Châteaubriant, avec ses enfants, jusqu'à la fin de 1793, puis demeura surtout à Paris. Elle était cependant à Châteaubriant en juillet 1797, car elle signe sur les registres d'état-civil, pour la naissance d'une nièce : Marie Peuriot, Le por- trait de cette castelbriantaise existe à Châtillon-en-Ven- delais (Ille-et-Vilaine), chez M. de Montluc, arrière petit- fils de J.-N. Méaulle. Ce portrait sur toile constituerait pour le Musée de Châteaubriant une pièce importante.

Tout le rôle de J.-N. Méaulle, à la Convention, et aux Cinq-Cents serait trop long à conter présentement ; nous le verrons plus tard au fur et à mesure des évènements.

Il suffit de savoir que jusqu'à sa mort, survenue

(21)

en exil, à Gand, sous la Restauration, Méaulle resta fi- dèle à sa foi républicaine.

Son descendant, M. de Montluc, homme éminent, nous a conté qu'en 1815, Méaulle se trouva à Paris avec un groupe d'anciens députés conventionnels. Lanjuinais de Rennes traita Méaulle " d'anarchiste " ! Méaulle qui était très fort, prit son compatriote par les épaules, le retourna et lui administra, devant tous, un vigoureux coup de pied, en ajoutant : tiens, canaille, voilà ce que tu mérites !

Lanjuinais garda le coup et ne demanda pas ré- paration.

La science juridique de J.-N. Méaulle en impo- sait. Il eut des ennemis parce que républicain, mais on s'accordait à reconnaître et son savoir et son talent ora- toire. Sa sincérité et sa fermeté furent appréciées par t o u s . .

Nous avons fait placer au Musée de Château- briant un médaillon, de l'artiste Chinard, — représentant Jean-Nicolas Méaulle, — donné par M. Léon de Montluc.

Ceci dans le but de rapprocher de nous un personnage que nous ne devons pas oublier. Nos ancêtres l'avaient surnommé " le fondateur de la liberté en ce pays ".

Un animateur des Comités républicains de Châ- teaubriant, et qui devint " agent national ", fut Louis BONGÉRARD (1765-1830). Il était originaire de Saint- Julien de Vouvantes, comme son ami Dominique Gic- queau. Ensemble ils firent leurs études de droit à Rennes et à Nantes.

Louis BONGÉRARD fut même élu, en 1790, prési- dent des jeunes étudiants de la judicature de Nantes, ce qui le mit en relation avec Moreau Jean-Victor, de Ren-

(1) Gourlay s ' a t t a c h a t o u t particulièrement à la région de Savenay, p a r la suite. Il s'y m a r i a e n 1794.

(22)

n e s , a v e c G o u r l a y J e a n - M a r i e ( C ô t e s - d u - N o r d ) , . . . (1) a u - t r e s é t u d i a n t s en d r o i t , c h e f s d e file, d a n s l e u r s d é p a r t e - m e n t s r e s p e c t i f s . U n e m o i n s h a u t e d e s t i n é e q u e celle d u g é n é r a l M o r e a u , et d u s é n a t e u r G o u r l a y , a t t e n d a i t B o n - g é r a r d , q u i r e s t a t o u j o u r s m o d e s t e m e n t d a n s la L o i r e - I n f é r i e u r e , c o m m e n o t a i r e , j u g e o u a v o u é .

D u r a n t la R é v o l u t i o n , il n ' e n o c c u p a p a s m o i n s les c h a r g e s s u i v a n t e s :

C a p i t a i n e d u b a t a i l l o n d ' A n c e n i s et C h â t e a u b r i a n t ( 9 Cie) e n 1 7 9 3 . S o n c o m m a n d a n t é t a i t R e n é P a l i e r n e , s e c r é t a i r e d u d i s t r i c t d e C h â t e a u b r i a n t .

A g e n t n a t i o n a l e n 1 7 9 3 - 9 4 . G a r d e - m a g a s i n e n 1 7 9 5 - 9 6 .

A d m i n i s t r a t e u r à N a n t e s ( s o r t e d e c o n s e i l l e r d e P r é f e c t u r e ) e n 1 7 9 7 , 9 8 , 9 9 .

J u g e à C h â t e a u b r i a n t , e n 1 8 0 0 .

A v e c d e l ' a m b i t i o n , d e l ' a l l a n t , il est p r o b a b l e q u e c e s p l a c e s d e c a p i t a i n e , o u d ' a d m i n i s t r a t e u r a u d é p a r - t e m e n t a u r a i e n t p u l a n c e r n o t r e h o m m e d a n s la c a r r i è r e m i l i t a i r e o u d a n s la c a r r i è r e p o l i t i q u e ; B o n g é r a r d é t a i t u n m o d e s t e a u x g o û t s s i m p l e s . L e 2 0 d é c e m b r e 1 7 9 9 , il é c r i t à s o n a m i G o u r l a y , q u i a v a i t p a r t i c i p é a u c o u p d ' E t a t d e b r u m a i r e , p o u r lui d e m a n d e r s i m p l e m e n t u n e p l a c e d e j u g e a u T r i b u n a l d e C h â t e a u b r i a n t . Il l ' o b t i n t . E n 1 8 2 7 , d e N a n t e s , s o n a m i d ' e n f a n c e , D o m i - n i q u e G i c q u e a u , é c r i v a i t à B o n g é r a r d , q u i v e n a i t d e v e n d r e s o n é t u d e d ' a v o u é à A n c e n i s :

« T a n t m i e u x , n o u s a l l o n s n o u s r é u n i r ( à N a n t e s )

« A u n a n p r è s , q u i e s t la d i f f é r e n c e d e n o s â g e s , n o u s

« j o u i r o n s d u r e p o s . N o u s p o u r r o n s r é a l i s e r les r ê v e s d e

« n o t r e j e u n e s s e . ( T o u s les d e u x é t a i e n t n é s à S t - J u l i e n ) .

« D ' a v a n c e je s a v o u r e le p l a i s i r d e t ' a v o i r a u

« P l e s s i x , et d ' a l l e r a v e c toi à L a N œ l l e T i z o n n i è r e , etc...

« V i v o n s e n c o r e q u e l q u e s a n n é e s , e t n o s d e r n i e r s

(23)

« m o m e n t s n e s e r o n t p a s s a n s j o u i s s a n c e s . N o u s v o u s

« e m b r a s s o n s t o u s d a n s l ' e f f u s i o n d e la j o i e la p l u s vive.

T o n a m i ,

D o m i n i q u e GICQUEAU ».

A i n s i , p e u à p e u , n o u s d e v i e n n e n t f a m i l i è r e s les p r i n c i p a l e s t ê t e s r é p u b l i c a i n e s l o c a l e s .

J a l o u s i e , a n i m o s i t é , h a i n e , s ' é l e v è r e n t b i e n t ô t c o n - t r e c e s n o u v e a u x a d m i n i s t r a t e u r s . .

L e u r s a n t a g o n i s t e s ? Il s e r a i t b o n d e les p r é s e n t e r si n o u s n ' a v i o n s p e u r d e s o r t i r d e n o t r e c h a p i t r e . N o u s p o u v o n s d u m o i n s les é v o q u e r r a p i d e m e n t :

GUIBOURG R e n é (1), s y n d i c , a v o c a t a u réel t a l e n t , rival d e M é a u l l e , a v a i t s o n b u r e a u d e c o n s u l t a t i o n s d a n s la m a i r i e m ê m e , e n m a r s 1 7 8 9 . L e s a m i s d e M é a u l l e p r o - t e s t è r e n t ; u n g r a n d p r o c è s r é g i o n a l s ' e n g a g e a et G u i - b o u r g d u t q u i t t e r la M a i r i e .

P e u d e t e m p s a p r è s , il y e u t g r a n d e r é u n i o n d e s p a r t i s a n s d e G u i b o u r g , à la T r i n i t é ( s i è g e d e l ' a n c i e n n e a b b a y e ) .

L e s p a r t i s a n s d e M é a u l l e s ' a s s e m b l è r e n t à l ' H ô - t e l - d e - V i l l e . D e s é l e c t i o n s d o n n è r e n t r a i s o n à M é a u l l e , et G u i b o u r g n e f u t p a s r é é l u m e m b r e d e l a m u n i c i p a l i t é c a s t e l b r i a n t a i s e .

E n m a r s 1 7 9 1 , les n o b l e s s u i v a n t s s ' a s s e m b l è r e n t à C h â t e a u b r i a n t , à l ' H ô t e l B a n c e l i n , p o u r u n d î n e r a v e c b a l ; ils n a r g u è r e n t la n o u v e l l e a d m i n i s t r a t i o n , et p a r t i c u - l i è r e m e n t l a G a r d e n a t i o n a l e . L e s n o b l e s t i r è r e n t d e u x c o u p s d e f e u s u r celle-ci, et le c h a p e a u d e J . - B . R é g n i e r , a i d e - m a j o r , f u t m ê m e t r a v e r s é .

L a G a r d e n a t i o n a l e r i p o s t a p a r t r o i s c o u p s d e f e u , et u n e r i x e g é n é r a l e s ' e n suivit.

(1) Guibourg Jean-René, époux Ballais, père et m è r e de Achille Guibourg, l'ami de la Duchesse de Berry, en 1832.

(24)

Les nobles frondeurs présents étaient :

les trois frères DUHAMEL de la Bothelière,. tous officiers ;

DUFRESNE DE VIREL, GARDIN DE CLASSÉ, DE CASTE L LAN,

LE PAYS DE LA RIBOISIÈRE, DE LA PILORGERIE,

DE LA PORTE-PORTIN, gendre de Mme du Boisa- dam ;

BAIN DE LA COQUERIE, DUPIN DE LA FERRIÈRE, HOCHEDÉ DE LA GUÉMERAIS.

Des femmes nobles étaient également présentes ; elles ne se montrèrent pas les moins excitées par leurs cris et leurs gestes ; certaines prirent part à la bagarre.

Les prêtres, bénéficiaires de l'ancien régime, et qui refusèrent d'accepter le nouveau, lors du serment à la constitution civile du clergé (janvier 1791), furent : Bédard Aimé, curé de Béré, Châteaubriant, qui s'exila en Espagne.

François-Lambert DEFERMON, qui se cachait sur- tout dans les bois de Gastines en Issé, et fut en relation suivie avec son ami et ancien condisciple au séminaire : Terrien Cœur de Lion, le chef des chouans d u district.

Etienne LE MÉTAYER, ex-curé de Saint-Aubin- des-Châteaux qui se cacha à Châteaubriant, Rennes, Vi- tré, Fougères, puis surtout au Petit-Auverné. C'était un cousin de Sophie Trébuchet.

Antoine BELLANGER, de la Meilleraye, qui vécut caché dans les bois des environs, et devint curé des de la Ferronnays, à Saint-Mars-la-Jaille, sitôt la tourmente

(25)

passée. Bellanger était ami de l'abbé Souffrant de Mau- musson, une sorte de prophète du césarisme et du roya- lisme pour la région d'Ancenis.

Citons aussi, l'abbé MOUTEL Jacques, curé de St- Sulpice des Landes, qui souvent se cacha dans la région de Saint-Julien. J. Lemarié bourgeois de la Barre-David dénonça sa présence, son esprit. Clément-Louis-René Daniel du Mortier se fit au contraire son défenseur. Ce Clément Daniel, habitait Nantes. Il devint le beau-fils de Volney. D'autre part, Clément Daniel était cousin des Trébuchet.

(26)
(27)

L'ADMINISTRATION MILITAIRE

Châteaubriant qui, de tous temps, n'avait connu que des passages de troupes, prit l'aspect d'une ville de garnison, de 1793 à 1800.

Les églises et le château devinrent des casernes.

Il y eut un hôpital militaire ; un service d'intendance.

En plus de la garde nationale, presque constam- ment dirigée par le commandant Germer-Suin ; il y eut des cantonnements de militaires plus ou moins impor- tants, suivant les mois de crise.

Généralement, l'état-major logea dans l'Hôtel de la Bothelière, rue de la Poterne. Kléber et Marceau y demeurèrent en 1793 et début de 1794, alors qu'ils poursuivaient les Vendéens. Marceau y resta malade

Références

Documents relatifs

C’est un travail minutieux et considérable, récompensé par l’Académie des Sciences, et qui vaut probablement à Biot d’être appelé à la chaire d’astronomie de la Faculté

15h10 Florian M ICHEL (Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, SIRICE) Les réseaux catholiques et atlantiques de Jean-Baptiste Duroselle 15h30 Frédéric A TTAL (Université

et soit avant, soit après les premiers éclats du tonnerre, une grêle, quelquefois terrible par sa quantité et sa grosseur, se précipite avec une rapidité et un fracas

En avril 1914, ses démarches auprès du président de la Confédération Arthur Hoffmann aboutissent à une entente verbale selon laquelle la France s'engage en cas de guerre

» Or Mgr de Castro Mayer, Mgr Lefebvre, Mgr Fellay et les prêtres de Campos nous ont toujours enseigné qu’il y a plusieurs ensei- gnements du concile Vatican II qui sont en rupture

Mais malgré le progrès et la multiplication des produits cosmétiques qui promettent des cheveux sains et vivants, on constate de plus en plus de chutes de cheveux, de cuirs

En regardant de plus près les configurations, il semble que couper un lien dans une région où toutes les cellules sont dans l’état 0, qui est l’état absorbant pour cette

Ainsi, le phénomène de l'irritabilité, éminemment distinctif du corps animal ; qui est, en effet, général pour tous les animaux de quelque classe qu'ils soient ; qui ne se