• Aucun résultat trouvé

Le concept de culture du Rhône : repères pour un historique

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Le concept de culture du Rhône : repères pour un historique"

Copied!
17
0
0

Texte intégral

(1)

Proceedings Chapter

Reference

Le concept de culture du Rhône : repères pour un historique

GALLAY, Alain

Abstract

L'approche historique du concept de civilisation du Rhône passe par la distinction entre deux sphères de réflexions. La première (A) touche le haut bassin rhodanien et l'est de la France et se rattache plus ou moins directement à l'école allemande. La seconde (B) aborde essentiellement les problèmes liés à l'identification du Bronze ancien du Midi; son développement est essentiellement français. On distingue cinq grandes périodes. 1, 1910-1938: Individualisation de la civilisation du Rhône; 2, 1945-1962: sources centre-européennes de la métallurgie et la persistance du Chalcolithique méridional; 3, 1963-1967: extension du concept de civilisation du Rhône à la France; 4, 1968-1982:

enracinement campaniforme local de la civilisation du Rhône; 5, 1983-1990: remises en question. Cet exposé historique montre qu'il est actuellement impérieusement nécessaire de redéfinir le concept de civilisation du Rhône. Le système chronologique de référence doit être revu au profit d'une partition par siècles faisant table rase des anciens systèmes chronologiques. Il est nécessaire de redéfinir le poids [...]

GALLAY, Alain. Le concept de culture du Rhône : repères pour un historique. In: Mordant, C. et Gaiffe, O. Cultures et sociétés du Bronze ancien en Europe . Paris : Ed. du CTHS, 1996. p.

271-286

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:99192

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

(2)

REPÈRES POUR UN HISTORIQUE

par Alain Gallay *

Résumé. - L' approche historique du concept de civilisation du Rhône passe par la distinction entre deux sphères de réflexions. La première (A) touche le haut bassin rhodanien et l'est de la France et se rattache plus ou moins directement à l'école allemande. La seconde (B) aborde essentiellement les problèmes liés à l'identification du Bronze ancien du Midi;

son développement est essentiellement français. On distingue cinq grandes périodes.

1. 1910-1938. Individualisation de la civilisation du Rhône;

2. 1945-1962. Sources centre-européennes de la métallurgie et la persistance du Chalcolithique méridional;

3. 1963-1967. Extension du concept de civilisation du Rhône à la France;

4. 1968-1982. Enracinement campaniforme local de la civilisation du Rhône;

5. 1983-1990. Remises en question.

Cet exposé historique montre qu'il est actuellement impérieusement nécessaire de redéfinir le concept de civilisation du Rhône. Le système chronologique de référence doit être revu au profit d'une partition par siècles faisant table rase des anciens systèmes chronologiques. Il est nécessaire de redéfinir le poids relatif du substrat local campaniforme décelable dans la céramique et des apports centre-européens visibles dans la métallurgique du bronze. Il convient enfin de se demander si nous avons actuellement les moyens de proposer des explications de rang élevé (d'ordre historique ou anthropologique) des faits matériels mis en évidence.

Zusammenfassung. - Der Rhonekulturbegriff: historische Perspektive.

Die historische Anniiherung des Rhonekulturbegriffes geht durch die Unterscheidung zwischen zwei Ueberlegungen.

Die erste (A) streckt sich über den hohen Rhonebecken und Ost-Frankreich und ist mehr oder weniger direkt mit der deutschen Schule verbunden. Die Zweite (B) niihert sich zum wesentlichen der Problemen der Identifizierung der Altbronzezeit im franzosichen Midi ; ihre Entwicklung ist wesentlich franzosich. Man unterscheidet hier fünf grosse Zeitabschnitte.

1. 1910-1938. Individualisierung der Rhonekultur.

2. 1945-1962. Mitteleuropiiische Quelle der Metallurgie und Bestiindigkeit des südlichen Chalcolithikum.

3. 1963-1967. Erweiterung des Rhonekulturbegriffes in Frankreich.

4. 1968-1982. Oertliches Einwurzeln der Rhonekultur in der Glockenbecherkultur.

5. 1983-1990. Neue Fragen.

Diese historische Anniiherung zeigt die Notwendigkeit den Rhonekultur begriffneu zu definieren. Das chronologische Referenzsystem muss wieder bestimmt werden, und das zum Besten einer Jahrhundertpartition die die alten chronologische Systeme ausschalten kann. Es ist notwendig, das relative Gewicht der ortlichen Glockenbecher­

kulturgrundlage das in der Keramik zum Vorschein kommt, und der mitteleuropiiischen Hinterlegungen die in der Bronzemetallurgie sichtbar sind, neu zu definieren. Letztendlich sollte man sich fragen, ob wir heutzutage die Mittel besitzen hochrangige Erkliirungen (historischen oder anthropologischen Ranges) über die geborgenen Fakten vorzuschlagen.

L'approche historique de concept de Civili­

sation du Rhône ou de Culture du Rhône passe par la distinction de deux sphères de ré­

flexions. La première (A) touche le haut bassin rhodanien et l'est de la France et se rattache plus ou moins directement aux travaux des

chercheurs de langue allemande. La seconde (B) aborde essentiellement les problèmes liés à l'identification du Bronze ancien dans le Midi.

Son développement est essentiellement fran­

çais. Nous distinguerons ici cinq grandes pé­

riodes (fig. 1) :

* Professeur, Département d'Anthropologie et d'Écologie de l'Université de Genève, 12, rue Gustave-Révilliod, 1227 Carouge-Genève.

(3)

LE CONCEPT DE CIVILISATION DU RHONE

MEDITERRANEE HAUT BASSIN RHODANIEN 1910 Déchelette 191 o

Œ)

1920 1930

1940 1950

®

Bailloud

1955 Mieg de Boofzheim 1955 Amal Audibert 1956 Hatt 1956

1960

®

1965

©

1970

1975

1980

®

1985

1990

Audibert Bousquet 1957 Riquet 1958

Charles 1963 Guilaine Abelanet 1964 j Bailloud 1966 j Guilaine 1967

Roudil1972 Guilaine 1972

Duday Guilaine 1975

Gasco 1986 Loison-Weinstein 1988

Vital 1990 Gasco1990

e

remise en question ::, w 0 :,:

..J 0 Manuel

j Kraft 1927 j Vogt 1936 Uenze 1938

Walliser Kultur

Frühbronzezeitliche Keramik Rhônetypus, Rh6negebiet

� 5i�::::::-;::?0:--:-�47-=-::::-;7-::,:---:-:-:-c-:":"-:"-,---

� � -- ..;..;---+---����--��..,...-­

() ::, 0 w z () <

Cl) Cl) a: w o.

1 1 1

'

1

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

1 1

1 1

1 1 1 1 1 1 1 1 1

Orcet 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

Civilisation rhodanienne 1 1 1

1 1 1 1 1 1 1 1

C�ramique rhodanienne 1 Extension S 1 Epicampanifonme 1

1 1 1 1 1 1 1

� Affinités , Campanlfonme -Bronze ancien

Peuplement

Peuplement

Continuité Campanifonme­

Bronze ancien 1 1 1 1

• Influence Italie 1 CALIBRATION

Junghans 1951 Junghans et alii 1951-53

Sauter Bocksberger 1959

Millotte 1963 Christlein 1964 Sangmeister 1966 Bocksberger 1966-1 et 2 A. et G. Gallay 1968

Strahm 1969 G.Gallay 1971

Spindler 1972 Bill 1973 Gallay 1975 Gallay 1976

Bill 1976

AM. et P.Pétrequin 1978

Gallay 1981 G.Gallay 1981 Gallay et alii 1983

Gallay 1986 Krause 1988

Gallay (1985) 1988,1988 Pétrequin 1988 Strahm 1988 Strahm et Wolf 1990

w o.

o. ::, a: (!l :,: () ..J w (D

: Hiatus Néolithique- Bronze 1 1 1

: Découverte Petit-Chasseur 1 Extension W

w ::;;

a: 0 u..

z if.

::;;

<

() 1 w 0 a: 0 () w ::;;

Cl)

z

0 a:

() :,:

z

Cl)

CALIBRATION 1 '

' '

' '

1 '

'

' 1

1 1 1 1 ' 1

1 1

' 1 1 1 1 1 1

• •

1 1

'

' 1 1 a: ::, Cl) w Cl) <

:,: ()

È n

w Peuplement o. ::,

0 w () z w

i5

Peuplement w Cl)

'

' 1

1 '

Figure 1 - Les grandes étapes de l'individualisation du concept de Civilisation du Rhône.

(4)

1 - De 1910 à 1938, la Culture du Rhône fait l'objet d'une première individualisation;

2 - De 1945 à 1962, l'accent est mis sur les sources centre-européennes de la métallurgie du bronze et sur l'analyse de la diffusion de cette nouvelle technologie. On admet par contre une large persistance des cultures chal­

colithiques dans le Midi ;

3 - De 1963 à 1967, le concept de Culture du Rhône est étendu à l'ensemble du bassin rho­

danien;

4 - De 1968 à 1982, on insiste notamment sur l'enracinement local de la culture du Rhône dans le Campaniforme ;

5 - La période 1983-1992 voit naître de nom­

breuses remises en question des modèles anciens.

I. PÉRIODE 1 (1910-1938). L'INDIVIDUALISATION DE LA CULTURE DU RHÔNE Dans un contexte scientifique dominé par

les systèmes chronologiques de Déchelette (1910), inspiré de Montelius, et de Reinecke (1924), les archéologues allemands identifient pour la première fois des objets de métal propres au domaine rhodanien, soit au niveau valaisan (Kraft 1927), soit au niveau de l'en­

semble du bassin fluvial (Uenze 1938), alors que les stations palafittiques du Plateau suisse (Meilen-Schellen, Obermeilen, Morges-Les Ro­

seaux) permettent de définir une céramique ca­

ractéristique de cette période sans spécificités géographiques reconnues (Vogt 1936). En Fran­

ce, la recherche est longtemps dominée par le Manuel de Déchelette (1910). Dans cette syn­

thèse, les objets proprement Bronze ancien sont ventilés dans deux phases successives: le Bron­

ze I et le Bronze II, dont la plus ancienne re­

groupe des composantes proprement néoli­

thiques comme le Campaniforme et des objets métalliques typiquement rhodaniens. Cette confusion va longtemps retarder en France l'identification d'un vrai Bronze ancien.

Sphère A

G. Kraft (1927) donne une première défini­

tion de ce qui sera appelé par la suite Culture du Rhône, mais emploie le terme de Civilisa­

tion du Valais. Son travail repose essentielle-

ment sur le regroupement d'objets métalliques provenant de tombes rattachées aux phases A et B de la chronologie de Reinecke.

E. Vogt (1936) identifie une céramique ratta­

chable au Bronze ancien sur la base des décou­

vertes effectuées dans les stations palafittiques de Morges-Les Roseaux, Meilen-Schellen et Obermeilen, mais ne propose pas de distinction entre l'Est et l'Ouest de la Suisse.

O. Uenze (1938) dresse un bilan des poi­

gnards à manche métallique de l'Europe et isole un type proprement rhodanien répandu sur l'ensemble du bassin de ce fleuve. Le poi­

gnard de type Rhône a une lame étroite et plate à nombre pair de rivets; sa garde semi­

circulaire présente une échancrure refermée ; le fût du manche est droit et possède un pom­

meau plat; un décor incisé orne l'échancrure.

Sphère B

J. Déchelette (1910) propose dans son Ma­

nuel une bipartition des premières phases de l'Âge du Bronze, dont la première englobe éga­

lement des composantes considérées aujour­

d'hui comme chalcolithiques. Son Bronze I (2500-1900 av. J.-C.) associe haches plates, céra­

mique campaniforme, poignards à manche mas­

sif et épingles tréfflées. Le vrai bronze et les haches à rebords apparaissent au Bronze II.

II. PÉRIODE 2 (1945-1962). LES SOURCES CENTRE-EUROPÉENNES

DE LA MÉTALLURGIE ET LA PERSISTANCE DU CHALCOLITHIQUE MÉRIDIONAL Une culture rhodanienne du Bronze ancien

à part entière est identifiée en Suisse dans le haut bassin rhodanien. Vogt (1948) la rattache à un

«

groupe de la tôle»

(Blechkreis)

rassem­

blant les cultures du Rhône, de Staubing et de Kisapostag. Ce complexe est désormais calé de façon plus précise grâce aux chronologies alle-

mandes (Junghans et al. 1951-53) qui recon­

naissent l'apparition tardive du vrai bronze.

En 1957, Sandars étendra le concept de Civili­

sation du Rhône à l'est de la France, mais ne

franchira pas le pas pour le Midi. L'origine de

ce Bronze ancien reste mal comprise faute de

séquences de transition bien établies. C'est

(5)

ainsi qu'en 1959 encore, Sauter et Bocksberger admettent pour le Valais une séquence Cor­

taillod et Bronze ancien sans hiatus chronolo­

gique. La nécropole du Petit-Chasseur, décou­

verte en 1962, permettra de réfuter ce modèle de transition.

On pense alors que le développement du Bronze ancien n'affecte pratiquement pas le Midi méditerranéen où l'on croit à une longue persistance des cultures chalcolithiques. Tous les préhistoriens français admettent que l'Âge du Bronze ne débute dans ces régions qu'avec l'apparition des influences Polada, considérées comme Bronze moyen. Les rares objets métal­

liques Bronze ancien découverts dans le Midi sont considérés comme des importations limi­

tées dans un contexte néolithique apparem­

ment attardé. Ce décalage dans les conceptions est à l'origine d'un modèle diffusionniste de l'apparition du Bronze ancien largement accepté. La France accuse un certain retard dans son développement par rapport à l'Eu­

rope centrale. On postule l'équivalence entre diffusion de la métallurgie et apparition de l'Âge du Bronze originaire d'Europe centrale;

les nouvelles technologies vont se répandre progressivement du nord-est en direction du sud-ouest. Elles n'atteindront le Midi qu'au Bronze moyen.

Sphère A

E. Vogt (1948) sépare clairement les produc­

tion métalliques de l'est et de l'ouest de la Suis­

se appartenant aux phases A et B de Reinecke.

Les productions de la sphère orientale, caracté­

risées par la présence de haches de type Salez, se rattachent à la Culture d'Aunjetitz. Les pro­

ductions proprement rhodaniennes, caractéri­

sées par les haches de type Roseaux, appartien­

nent par contre à un vaste ensemble de productions métalliques en tôle de bronze, ap­

pelé Cercle de la tôle

(Blechstil

ou

Blechgruppe).

Ce dernier englobe les cultures du Rhône, de Straubing et de Kisapostag. Vogt place, à tort, le terme de

Rhônekultur

dans la bouche de Kraft et se révèle ainsi le premier auteur à uti­

liser explicitement cette dénomination.

S. Junghans, H Klein et E. Scheufele (1951- 53) lancent un ambitieux programme d'ana­

lyses chimiques des objets métalliques et affi­

nent la chronologie du Bronze ancien de l'Allemagne du sud-ouest en proposant les dis­

tinctions suivantes :

l

-Aeneolithikum

(Altheim, Cordé, Campa­

niforme);

2 -

Süddeutsche Kupferzeit ou

Reinecke Al (Adlerberg, Singen, puis phase d'importations de productions métalliques de Bohême);

3 -

Süddeutsche Frühbronzezeit ou

Reinecke A2 (Horizon Trassem-Langquaid);

4 -

Frühe Mittelbronzezeit

(Reinecke B).

M.-R. Sauter et O. Bocksberger (1965, col­

loque de Monaco 1959) constatent l'existence en Valais d'un hiatus important séparant le Cor­

taillod du Bronze ancien et envisagent une per­

sistance locale du Cortaillod. Une note, ajoutée après la parution de l'article, fait pourtant men­

tion pour la première fois de la découverte de la nécropole du Petit-Chasseur (1962), dont la sé­

quence permettra de combler la lacune observée.

Sphère B

G. Bailloud et P. Mieg de Boofzheim (1955) constatent le retard affectant l'ensemble de la France par rapport au développement du Bronze ancien en Europe centrale. Dans le

Figure 2 - Bailloud et Mieg de Boofzheim 1955. L'Europe occidentale en période IV de Childe. Les zones pointillées, qui soulignent les régions témoi­

gnant d'un développement précoce du Bronze ancien, ont été ajoutées.

(6)

Midi, les civilisations de type Chalcolithique évolué persistent largement et ce n'est guère qu'au Bronze moyen que la plus grande partie du pays entrera véritablement dans l'Âge du Bronze (fig. 2).

J. Arnal et J. Audibert (1956) présentent un modèle de développement du Midi de la France qui sera largement repris par la suite sans changement notable (Audibert 1957, Audibert et Bousquet 1957, Guilaine 1958, Audibert et Delord 1959, Audibert 1962). L'économie et les traditions néolithiques persistent pendant tout le Bronze ancien. L'Âge du Bronze n'apparaît qu'au Bronze moyen avec la diffusion de la céramique de type Polada.

J.-J. Hatt (1956) tente d'établir le pont entre la recherche allemande et française en proposant un classement du Bronze ancien en trois phases tenant compte des travaux de Junghans

et al.

(1951-53) et Vogt (1948) (ta­

bleau 1 et fig. 3). Il reste néanmoins partisan d'un large empiétement du Néolithique tardif sur le Bronze ancien.

J. Audibert et J. Bousquet (1957) admettent que le Bronze ancien apparaît dans le Bas-Lan­

guedoc comme une période confuse, difficile

à

décrire. Au Bronze ancien, seuls quelques ob­

jets métalliques isolés importés apparaissent en milieu chalcolithique.

J. Guilaine (1958) synchronise Chalcoli­

thique et Bronze ancien I et II de Déche­

lette.

R.

Riquet (1958) reconnaît pour la première fois dans le Midi l'importance du stimulus de la Civilisation rhodanienne qui précède immédia­

tement l'arrivée de la poterie de type Polada.

N.

K.

Sandars (1957) occupe une place

à

part dans la recherche de l'époque par son point de vue extérieur. La Culture du Rhône occupe les phases II et III de la chronologie de Hatt. Pour la première fois, la présence de la Culture du Rhône dans le Jura et en Bour­

gogne est explicitement mentionnée.

BRONZE. ANCIEN I BRONZE. ANCIEN I

u

BRONZE ANCIEN Il

BRONZE ANCIEN Ill

Figure 3 - Hatt 1956. Sériation des types métalliques du Bronze ancien reprise de l'article de Junghans, Klein et Scheufele 1951-53.

HATT JUNGHANS et alii VOGT

Bronze ancien I Kupferzeit (Reinecke Al) Horizon à haches de type Neyruz

Bronze ancien II Importations de Bohême et de Groupes oriental (Aunjetitz) Hongrie (Reinecke Al) et occidental (Blechsti[) Bronze ancien m Frühbronzezeit Groupe occidental

(Rcinecke A2) (Blechstil)

Tableau 1- Correspondances entre les classements de Hatt 1956, Junghans et al. 1951-53 et Vogt 1948.

III. PÉRIODE 3 (1963-1967). L'EXTENSION DU CONCEPT DE CIVILISATION DU RHÔNE À L'ENSEMBLE DU BASSIN RHODANIEN

Dans les années soixante, le concept de Civilisation du Rhône est étendu

à

l'ensemble du bassin rhodanien, d'abord par Millotte (1963) qui confirme l'interprétation de Sandars proposée pour l'est de la France, puis par Bailloud (1966) pour le Midi de la France.

Désormais une vraie culture du Bronze ancien s'intercale partout entre le Chalcolithique et le Bronze moyen. On suggère pour la première fois une origine campaniforme de cette civili­

sation qui aurait pris naissance en Valais, puis se serait étendue sur l'ensemble du bassin.

(7)

Cette conception s'appuie, entre autres, sur les fouilles de Bocksberger dans la nécropole du Petit-Chasseur à Sion. L'interprétation de la séquence de ce site reste néanmoins incer­

taine. L'inventeur du site considère en effet que les Campaniformes n'ont fait que réutili­

ser les tombes mégalithiques et hésite quant à l'attribution chronologique des grandes jarres à cordons rhodaniennes (Gallay 1990). Dans le Midi, Guilaine (1967) propose sa chronologie du Campaniforme qui reste encore aujourd'hui d'actualité. La présence d'une phase épicampa­

niforme contemporaine du Bronze ancien constitue un acquis important pour la compré­

hension de l'origine du Bronze ancien.

Les premiers modèles « anthropologiques » se précisent. La culture rhodanienne est l'œuvre de métallurgistes d'origine centre­

européenne qui se seraient établis, en Valais, au sein des populations locales (Bailloud 1966). À la même époque, Christlein (1964) rejette la chronologie de Reinecke et propose une nouvelle périodisation du Bronze ancien du Sud de l'Allemagne en quatre phases qui sera étendue à la Suisse par Sangmeister (1966), puis par son élève, Gretel Gallay. Cette sériation reste néanmoins fondée uniquement sur des mobiliers funéraires essentiellement métalliques. Les datations Cl4 sont, à cette époque, encore trop rares pour donner lieu à un véritable débat sur la chronologie absolue.

Sphère A

J.-P. Millotte (1963) admet que la Culture du Rhône est présente dans le Jura et les plaines de la Saône et qu'elle se rattache au Blechgruppe de Vogt. Cette présence n'est pourtant réellement attestée qu'à la phase Rei­

necke A2 sous l'influence des centres de pro­

duction suisses.

R. Christlein (1964) remet en question le système chronologique de Reinecke fondé sur des trouvailles considérées comme hétérogènes et reprend à son compte toute une série de cri­

tiques formulées par d'autres chercheurs alle­

mands. Il propose une nouvelle sériation des objets métalliques, des parures d'os et de coquilles présents en contexte funéraire basée sur le cimetière de Gemeinlebarn en A�triche.

E. Sangmeister (1966) étend le système chro­

nologique de Christlein à la Suisse dans un article consacré à la composition chimique des objets métalliques de ce pays.

O. Bocksberger (1966a et b) publie les pre­

mières synthèses sur la chronologie de la né­

cropole du Petit-Chasseur à Sion en Valais. Il met en évidence une phase campaniforme pré­

cédant l'occupation Bronze ancien du site.

Sphère B

R.-P. Charles (1963) admet la présence de la Culture du Rhône dans le Midi, mais utilise un cadre terminologique qui restera sans avenir.

J. Guilaine et J. Abelanet (1964) remettent en question la perduration du Chalcolithique méridional. Malgré la persistance des parures et de l'industrie lithique, le Bronze ancien se ca­

ractérise par la présence de deux composantes radicalement nouvelles: des importations d'ob­

jets métalliques et une céramique à fonds plats décorée de cordons, impressionnés ou non, com­

parable à la céramique de la Culture du Rhône.

G. Bailloud (1966) précise la mesure de l'in­

fluence rhodanienne dans le Midi et englobe explicitement, pour la première fois, cette région dans l'aire d'extension de la Culture du Rhône.

1 - L'ensemble du bassin rhodanien est caractérisé par la présence conjointe de formes caractéristiques, tant au niveau céramique (fig. 4) qu'au niveau du métal et de la parure.

2 - Trois centres géographiquement diver­

sifiés peuvent être distingués : la Suisse, le Jura et le Midi.

Figure 4 - Bailloud 1966. Carte de répartition de la céra­

mique rhodanienne.

(8)

3 - « L'ensemble culturel rhodanien ainsi conçu prend naissance dans le Valais, par suite de l'arrivée de métallurgistes d'origine centre­

européenne au sein de populations locales ap­

partenant vraisemblablement au complexe

à

cé­

ramique campaniforme » (Bailloud 1966, p. 163).

4 - La Culture du Rhône comporte un déve­

loppement en trois phases (référence à la chro-

nologie Christlein-Sangmeister), et s'étend pro­

gressivement

à

partir de son centre d'origine.

J. Guilaine (1967) propose une évaluation du Campaniforme méridional en quatre phases qui conserve encore actuellement sa pertinence.

La liaison avec le Bronze ancien s'effectue

à

tra­

vers les mobiliers caractéristiques de la phase 4 définissant une phase épicampaniforme.

N. PÉRIODE 4 (1968-1982) - L'ENRACINEMENT CAMPANIFORME LOCAL DE LA CIVILISATION DU RHÔNE

De 1968

à

1982, les études sur la Civilisation du Rhône se multiplient. En Suisse, l'achève­

ment des fouilles du Petit-Chasseur, dont nous assurons la responsabilité de 1971

à

1973, et la publication des résultats, va renforcer l'intérêt porté à cette période. La périodisation retenue est alors celle de Christlein ; mais ce cadre chro­

nologique ne fait pas l'unanimité, puisque Bill (1973) ne le retient pas dans sa thèse. En France, les thèses de Roudil (1972) et de Gui­

laine (1972) consacrées

à

l'Âge du Bronze per­

mettent d'avoir enfin une vue synthétique des matériaux disponibles. Une certaine unanimité s'établit

à

propos de l'influence campaniforme sur la Civilisation du Rhône, mais le cadre chro­

nologique reste encore mal maîtrisé, situation qui entraîne d'importantes divergences dans l'interprétation du phénomène.

En Suisse, nous développons dès 1968 un modèle de type : Campaniforme puis Bronze an­

cien/Cordé où l'on oppose une séquence ter­

restre dans laquelle le Bronze ancien dérive du Campaniforme et une séquence lacustre, large­

ment contemporaine, occupée par la Civilisation de la Céramique Cordée

(A.

et G. Gallay 1968).

En France, au contraire, le scénario retenu est de type : Chalcolithique puis Bronze ancien/Campaniforme. Le Bronze ancien est considéré comme un ensemble intrusif origi­

naire du nord dans un milieu chalcolithique décadent. Les affinités Campaniforme-Bronze ancien résultent dans ce cas de simples contacts.

Les modèles « anthropologiques » proposés pour rendre compte de ce phénomène portent la marque de cette divergence de conception bien qu'ils soient formellement identiques.

Tous font en effet intervenir un processus de rupture coïncidant avec l'arrivée d'individus peu nombreux originaires d'Europe centrale et

s'installant dans les populations locales, mais cette transition n'est pas placée par tous les auteurs

à

la même époque.

Nous considérons nous-même que la rup­

ture principale R a lieu au début du Campani­

forme. Roudil (1972) et Guilaine (1972) la situent au contraire au début du Bronze ancien proprement dit, d'où, schématiquement, deux modèles concurrents « expliquant » l'ori­

gine de la Civilisation du Rhône :

Modèle 1 : R Campaniforme -? Bronze an­

cien/Cordé

Modèle 2 : Chalcolithique -? R Bronze an­

cien/Campaniforme

Sphère A

A.

et G. Gallay (1968) approfondissent la périodisation des types métalliques de la Cul­

ture du Rhône et proposent une sériation en quatre phases conformes

à

la chronologie de Christlein (fig. 5). Un modèle de développe­

ment est proposé, qui oppose séquence lacus­

tre et séquence terrestre. Dans les sites ter­

restres de Suisse romande, de Bourgogne et du Jura, le Campaniforme est

à

l'origine du développement du Bronze ancien, tandis que le Cordé persiste largement au bord des lacs nord­

alpins.

C. Strahm (1969) propose également un schéma chronologique où Cordé, Campaniforme et Bronze ancien sont largement contemporains et où le Campaniforme se développe parallèle­

ment aux trois premières phases du Bronze an­

cien.

A. Gallay (1971) affine le modèle proposé en 1968 en présentant un tableau général des contacts entre Cordé, Campaniforme et Bronze ancien.

277

(9)

A U T R I C H E JURA E T SUISSE OCCIO J U R A

I @ 0 � 8: l ) 0

·1-·-1-·�·-rr-r·--\

HI u{îfy

m

- - -

lY - - -- i ·f r "'

E T S U 1 5 S E O C C I D E N T A L E

llllD s � . � 2

o (

·-·----r---9F- -T

l

i

î ·- y

J w·î f ,y .,"1"

.. •: 2<

Œ

.

PHASE

I HI

m

rl

�,

Figure 5 - A. et G. Gallay 1968. Sériation des types métalliques du Bronze ancien de Suisse occidentale et du Jura com­

parée à celle du Bronze ancien autrichien (Gemeinlebarn).

G. Gallay ( 1971) complète la sériation des types métalliques proposés en 1968 et admet que la phase IV, présente dans les palafittes, est contemporaine de la première phase du développement des tumulus du Bronze moyen (Bronze B de Reinecke).

A. Gallay 1972 propose une nouvelle inter­

prétation de la nécropole du Petit-Chasseur, dont il convient de souligner trois aspects :

- les Campaniformes ont érigé certaines cistes ;

- l'horizon de violation des sépultures cam­

paniformes permet d'isoler une phase Bronze ancien I - II ;

- la céramique rhodanienne à cordons se développe à partir de cet horizon.

La séquence du Petit-Chasseur donne lieu à de nombreux articles dont on trouvera l'histo­

rique dans l'ouvrage dédié à Jean Arnal (Gallay 1990).

K. Spindler (1972-73) publie une révision des épingles à ailettes (ou épingles tréfflées) et propose une datation relativement tardive pour ce type, dont l'origine se situe en Suisse occidentale et dans l'est de la France.

J. Bill ( 1976) dresse un bilan du Campani­

forme et du Bronze ancien du bassin rhoda­

nien dont le cadre chronologique s'écarte de la chronologie de Christlein.

A. Gallay ( 1975) propose une première interprétation « anthropologique » de l'origine et du développement de la Culture du Rhône construite sur la base de la séquence du Petit­

Chasseur et formellement identique au modèle Bailloud ( 1966). La rupture constatée est par contre située au début du Campaniforme et non au début du Bronze ancien.

Origine du Campaniforme valaisan

« On a donc l'impression que les nouveaux envahisseurs, probablement peu nombreux, n'ont pas fait disparaître l'ancienne population de tradition méditerranéenne, mais ont peut­

être simplement pris le contrôle politique du groupe et récupéré pour leur compte l'ancienne idéologie représentée par les stèles » (Gallay 1975, p. 15).

Cette hypothèse est illustrée de façon « lit­

téraire » par la bande dessinée Le Soleil des

Morts (Houot et Gallay 1992).

(10)

Origine et développement de la Culture rhodanienne

« La céramique

gr

ossière du Bronze ancien, qui suit immédiatement l'occupation campaniforme ( dolmen M Xl notamment) est en effet directement dans la tradition des céramiques du Néolithique récent. Le Bronze ancien rhodanien trouve donc son origine dans un substrat indigène stable de­

puis longtemps (céramique grossière) fécondé par l'apport extérieur campaniforme. La nouvelle mé­

tallurgie du Bronze gagnera le Plateau suisse pen­

dant les premières phases du Bronze ancien (1900- 1700 av. J.-C.) et se heurtera aux populations de la Céramique cordée. Son expansion restera donc li­

mitée à la partie orientale du Léman et au pied des Préalpes vaudoises et fribourgeoises dans la partie haute du Plateau. C'est seulement vers la fin du Bronze ancien, au moment où l'Allemagne du sud­

ouest voit déjà fleurir la Civilisation des Tumulus du Bronze moyen, que la Civilisation du Rhône oc­

cupera les stations littorales des

gr

ands lacs du Plateau vers 1500-1400 av. J.-C mettant fin aux dernières manifestations des civilisations néoli­

thiques (Morges-Les Roseaux, Auvernier, Baldegg, Arbon-Bleiche) » (Gallay 1975, p. 15).

A. Gallay (1976) étend le modèle valaisan à l'ensemble du bassin rhodanien. L'unité de la Culture du Rhône découle de l'unité de peuple­

ment campaniforme et non d'un phénomène de diffusion contemporain du début du Bronze an­

cien. La Suisse occidentale, le bassin de la Saône et le Midi constituent les trois centres d'émergence de la Culture du Rhône à une époque contemporaine de la fin du Néolithique lacustre (fig. 6).

J. Bill (1976) rassemble quelques matériaux Bronze ancien inédits et fait pour la première fois référence à la possibilité de calibrer les datations Carbone 14.

A.-M. et P. Pétrequin (1978) adoptent pour le Jura le modèle d'une dérivation Campaniforme­

Bronze ancien avec rupture de peuplement si­

tuée au moment de l'arrivée du Campaniforme.

Ils admettent une large contemporanéité entre Civilisation Saône-Rhône et Campaniforme.

A. Gallay (1981) explore les diverses inter­

prétations proposées pour expliquer l'origine du Bronze ancien dans les Alpes et montre qu'il n'est pas possible de choisir entre certains mo­

dèles concurrents de

«

rangs élevés ». L'inter­

prétation proposée reste néanmoins identique à celle de 1975.

G. Gallay (1981) propose une compilation complète des poignards du Bronze ancien français.

Sphère B

J.-L. Roudil (1972) rassemble dans sa thèse les données du Bronze ancien du Languedoc oriental. Le concept de Polada est évacué de la Protohistoire du Midi et limité au Bronze an­

cien italien. La Culture rhodanienne est envisa­

gée comme un

gr

oupe originaire du Nord, intru­

sif en milieu chalcolithique. Le Campaniforme, largement contemporain du Chalcolithique est par contre situé en marge de cette transition.

Des contacts synchroniques expliquent les ana­

logies constatées entre céramiques campani­

formes et Bronze ancien.

J. Guilaine (1972) publie dans sa thèse les données du Bronze ancien du Languedoc occi­

dental et, mal

gr

é certaines divergences, pro­

pose un modèle explicatif très proche de celui de Roudil : « Au début du Bronze ancien, sub­

sistent dans nos régions, les campaniformes pyrénéens. Au même moment, se constitue en Suisse, une civilisation originale dont l'in­

fluence va se faire sentir très tôt sur les civili- ,@

1· h·

s, néo ,t 1que récent et final

• campaniforme

• bronze ancien 1·11 ... -- bassin rhodanien

\ \

1 I 1 I

'-,

1

I I I I 1

(/

< / 1 ---">

Figure 6 - A. Gallay 1976. Centres d'origine de la culture rhodanienne et zone occupée par les cultures palafittiques locales traditionnelles (Civilisa­

tion Saône-Rhône et Cordé)

279

(11)

sations indigènes du Midi de la France » (Gui­

laine 1972, p. 103).

«

La Civilisation du Rhône va divulguer par colportage, par descente de groupuscules ou parfois peut-être par l'intermédiaire de noyaux plus importants, les produits de son industrie.

Ces migrants n'apparaissent guère comme des colonisateurs, à tel point que dans le Midi leur influence se mêlera à celle des peuplades indi­

gènes pour donner l'ensemble très métissé dont nous avons parlé plus haut » (Guilaine 1972, p. 103-104).

H. Duday et J. Guilaine (1975) reprennent la thèse d'une origine du Bronze ancien causée

par une immigration rhodanienne démogra­

phiquement peu importante, et mettent en parallèle les rares sépultures individuelles sous tumulus du Languedoc oriental et cer­

taines tombes individuelles plus septentrio­

nales.

« L'analogie qui existe entre ces ensembles et ceux que l'on connaît en Suisse a fait considérer les sujets inhumés comme les por­

teurs, parfois belliqueux (Le Lébous), des influences rhodaniennes qui commencent effectivement à marquer la civilisation lan­

guedocienne » (Duday et Guilaine 1975, p. 147).

V. PÉRIODE 5 (1983-1990). LES REMISES EN QUESTION Depuis 1983, de nombreuses remises en

question débouchent sur les incertitudes et les interrogations actuelles.

Sur le plan chronologique, les sériations is­

sues des travaux de Christlein sont progressi­

vement abandonnées et l'on assiste à un regain d'intérêt pour la t

yp

ologie de Reinecke, malgré les critiques adressées depuis longtemps à cette dernière et l'absence de toute nouvelle rééva­

luation. L'introduction de la calibration et les références fournies par la dendrochronologie permettent enfin de travailler en temps réel.

L'allongement de l'échelle chronologique rend caducs, tout au moins en Suisse, les modèles basés sur la contemporanéité des divers groupes culturels. La situation reste néanmoins confuse en France, notamment dans le Midi, où les datations C14 ne permettent pas encore d'obtenir une bonne ségrégation chronologique des civilisations chalcolithiques (Ferrières, Fontbouisse), Campaniforme et Bronze ancien.

Sur le plan typologique, l'importance du sub­

strat campaniforme dans la genèse de la céra­

mique rhodanienne est désormais reconnue.

Certains auteurs, comme Vital (1990a et b), contestent néanmoins pour la première fois l'unité de la Culture du Rhône en insistant sur l'importance des influences italiennes.

Enfin, force est de constater que les modèles anthropologiques proposés pour rendre compte de l'apparition du Bronze ancien reposent sur des bases bien légères et résultent plus de l'imaginaire inconscient des préhistoriens que de véritables démonstra­

tions.

Sphère A

A. Gallay, P. Olive et R. Carazzetti (1983) pro­

posent une première application systématique de la calibration à la chronologie du Néolithique­

Bronze ancien valaisan. La Culture du Rhône se trouve calée entre 2350 et 1750 av. J.-C.

A. Gallay (1986) propose une analyse logi­

ciste de son article de 1981 et démontre la fra­

gilité des explications historiques proposées jusqu'alors (fig. 7).

R. Krause (1988) publie le cimetière de Sin­

gen et discute la chronologie du Bronze ancien en Europe sur la base de la courbe de calibra­

tion de Pearson 1983. La chronologie de Christ­

lein est abandonnée au profit de l'ancienne sé­

riation de Reinecke.

A. Gallay (1988a) propose, au Colloque de Lons-le-Saunier en 1985, une première remise en question de la contemporanéité entre Cam­

paniforme et Cordé suisses sur la base des datations C14 calibrées et des références den­

drochronologiques. La séquence lacustre n'est pas complète et comprend un hiatus important entre 2400 et 1650 av. J.-C. correspondant au minimum au début du Bronze ancien. L'ana­

lyse tente néanmoins de sauvegarder l'h

yp

thèse de deux séquences parallèles : le peuple­

ment palafittique cordé et le peuplement campaniforme terrestre (fig. 8).

A. Gallay (1988b) se fait l'écho des difficul­

tés liées à l'interprétation du phénomène cam­

paniforme :

- l. Sur le plan temporel, le Campaniforme

occupe une tranche chronologique spécifique

(12)

évolution sociale

chefferies commerçants

N IV 4 ----­

P05

prospecteurs

forgerons guerriers P11

PO?

pasteurs P8

P7 populations

mouvements migratoires

--NIV. 1 --- P3 apports extérieurs

P01 P02

P1

O R IG I N E DU CHANGEM ENT CULTU REL BRONZE ANCIEN

è

Figure 7 - A. Gallay 1986. Arbre de dérivation des constructions interprétatives expliquant la nature des changements historiques et culturels situés à l'origine de l'Âge du Bronze dans les Alpes. Réinterprétation logiciste des hypothèses présentées dans les articles de 1975 et 1981.

0

sequence lacustre

1500 BC

BA IV

i

1700 BC

CORDÉ

PHASE UTOQUAI Vinelz

1850 av. J - C

séquence terrestre

BA IV

BA I I I

BA:· 1 - 1 1

2000 BC CORDÉ

HORIZO N COH ÉR ENT Auvernier - Saunerie

CAMPAN I FO R M E Petit - Chasseur

2200 BC

CIVI LISATION D . AUVE R N I E R

2400 se CORTAI LLOD

2150 BC

®

1500 av J C 1650 av J C

2400 av. J - C 1 CO R D É 2650 av J - C

2950 av. J-C HORGEN 3300 av. J-C

sëquem.e lacustre

BA IV @A

tlh'..11

1 1

hiatus

? /\ 1 1 1 1 1 1

sequencc terrestre

BA IV A

BA I i !

BA 1 - 11

2300 av J - C CAM PAN IFORME Rances / Petit- Chasseur

2500 av. J-C GOBELETS AAO-AOC 2900 av. J - C

3500 a v J - C CORTAI LLOD

Figure 8 - A. Gallay 1988. Séquences lacustre et terrestre de la transition Néolithique-Bronze ancien en Suisse romande.

Modèle A proposé dès 1968 et modèle B tenant compte des nouvelles données de chronologie absolue.

(13)

GOURGA S

SAINT PONS GRANDS

CAUSSES - - -- - - - -- • soo--- - - --

--- -- -- -- 5000 ---- --- -- --

CHASSEEN

---- -- - -- ssoo --- -- -- - -

FONT BOUISSE

-m-

CA MPA N/FORMES

- W -Avencas __

FERRIERES

LANGUEDOC MEDITERRANEEN C 1/. DA TA TIONS avant J. C

f,oo••, '50

100 50 0 5 lO 16 D ,o.t{S

Principe de construction

Figure 9 - Gasc6 1986. Chroniques des dates C14 calibrées du Néolithique moyen et final en Langue­

doc méditerranéen.

D

A G E DU BRONZE

HOYEN

D

--- 2000

---2500 CAL BC

PREHIER AGE DU FER - -- - 1000

Figure 10 - Gasc6 1990. Histograll);mes cumulés de l'ensemble des dates C14 calibrées de l'Âge du Bronze et du Premier Age du Fer en France méditerranéenne et en Catalogne.

(14)

de trois siècles au moins soit la période 2450- 2150 av. J.-C.

- 2. La présence d'une céramique domes­

tique et l'origine probablement locale des gobe­

lets décorés rend caduque l'interprétation d'un

package

campaniforme de biens de prestige, s'insérant dans les cultures locales.

- 3. On peut formuler de nombreuses objec­

tions à l'utilisation des données de l'anthropo­

logie physique dans l'élaboration de modèles historiques.

- 4. Les explications de rangs élevés repo­

sent la plupart du temps sur des bases bien incertaines.

A.-M. et P. Pétrequin (1988) admettent éga­

lement que le Campaniforme constitue une civilisation

à

part entière. Cette dernière a complètement remplacé les civilisations néoli­

thiques locales dans le Jura vers 2300 av. J.-C.

C. Strahm (1988) insiste sur la filiation Campaniforme-Bronze ancien sur la base de sites de transition comme Bodman-Schachen (1900 av. J.-C.), dont le matériel présente des affinités avec la

Begleitkeramik.

Il laisse ouverte par contre la question d'une éventuelle persistance du Cordé, car les phases les plus récentes de cette civilisation

(Einstichkeramik)

ne sont pas représentées au bords des lacs dont la séquence s'arrête vers 2400 av. J.-C. La chronologie de Reinecke est à nouveau utilisée.

C. Strahm et K. Wolf (1990) admettent que le hiatus présent entre la phase Clendy (Cordé de type

Einstichkeramik)

d'Yverdon et le début du Bronze ancien peut être comblé par le Cam­

paniforme vers 2400-2200 av. J.-C. La présence d'un décor

à

la cordelette sur la céramique du

Bronze ancien tardif d'Yverdon-Garage Martin pose néanmoins le problème de la persistance des traditions cordées.

Sphère B

J. Gasc6 (1986) dresse un bilan des dates C14 calibrées du Chalcolithique méridional selon la table de calibration de Tucson 1982. Ferrières, Fontbouisse et Campaniforme apparaissent comme largement contemporains (fig. 9).

G. Loison-Weinstein (1988) présente une pre­

mière publication des matériaux du cimetière d'Orcet qui confirme l'importance du complexe Rhin-Rhône dans la genèse de la Culture du Rhône.

J. Gasc6 (1990) rassemble les dates C14 cali­

brées de l'Âge du Bronze dans le Midi et admet un large recouvrement chronologique entre Chalcolithique et Bronze ancien (fig. 10). « On évoque ainsi des hybridations Fontbouisse­

Bronze ancien rhodanien ou des contacts entre Tardivéraziens et groupes du Bronze ancien ; les perdurations campaniformes sont les plus fréquentes » (Gasc6 1990, p. 390).

J. Vital (1990a et b) étudie la céramique du Bronze ancien du défilé de Donzère et insiste sur les connexions existant entre ce matériel et le Bronze ancien italien. Pour la première fois, l'unité même de la Culture du Rhône est remise en question. « L'indépendance du Centre concer­

ne notamment le Plateau suisse et, malgré les comparaisons s'y référant, jette un voile sur la prééminence de la « Civilisation du Rhône » dont l'unité et l'impact durant tout le Bronze ancien doivent être révisés » (Vital 1990a,

p. 118).

CONCLUSIONS

Ce rapide tour d'horizon du développement historique du concept de Culture du Rhône laisse apparaître plusieurs problèmes concer­

nant les racines de ce groupe culturel et la per­

tinence des concepts utilisés pour le qualifier.

Trois types de questions se posent à ce propos : - Questions chronologiques

La périodisation interne des composantes culturelles, tant au niveau de la céramique que des objets métalliques ou de la parure, doit être entièrement revue, car ni la chronologie de Rei­

necke, ni les sériations issues des travaux de Christlein ne sont actuellement adéquates. Il nous semblerait utile que l'on puisse s'entendre

à ce sujet, tout en distinguant évolution de la céramique et évolution des types métalliques.

On peut se demander dans ce domaine s'il n'y a pas avantage

à

jeter la base d'une chronologie par siècles. Une telle approche est désormais possible pour le nord-est du Bassin rhodanien, elle présente néanmoins quelques difficultés d'application dans le Midi.

- Questions typologiques

Il conviendrait de reprendre

à

l'avenir l'évo­

lution du poids relatif du substrat campani­

forme local et de la métallurgie d'origine centre-européenne dans la genèse des compo­

santes culturelles de la Civilisation du Rhône.

(15)

Cette évaluation nécessite que l'on s'intéresse également à ce qui se passe en Italie à la même époque.

La résurgence des décors à la cordelette sur les céramiques de la fin du Bronze ancien devrait pouvoir trouver explication, car elle pose la question d'une éventuelle persistance des traditions issues de la céramique cordée.

- Questions explicatives

Nous devons enfin nous demander si nous avons aujourd'hui les moyens de proposer des explications de rang élevé des faits matériels observés et des structures spatio-temporelles dégagées. La simplicité, sinon l'extrême pau­

vreté conceptuelle, des scénarios proposés a de quoi nous inquiéter. En effet, le tour d'horizon proposé montre curieusement l'existence d'un

unique stéréotype explicatif, celui de la migra­

tion restreinte, utilisé pour rendre compte des transitions culturelles situées tant à l'origine du Campaniforme qu'à l'origine du Bronze ancien. La réalité historique a certainement été plus complexe, encore faut-il se donner les moyens d'aborder les questions de ce type, et d'avoir la volonté d'explorer un secteur de notre activité d'archéologue qui relève plus de l'imaginaire et du fantasme individuel que de la démonstration scientifique.

REMERCIEMENT

Mireille David-El Biali a contribué à réunir la docu­

mentation utilisée et a bien voulu accepter de se charger de la mise au point de cet article, qu'elle en soit ici très sin­

cèrement remerciée.

BIBLIOGRAPHIE

Arnal et Audibert 1956 : ARNAL (J.) et AUDIBERT (J.),

" Enquête sur la répartition des vases de "La Polada" en France », Bulletin du Musée d'Anthropologie préhisto­

rique de Monaco, 3, 1956, p. 241-283.

Audibert 1957 : AUDIBERT (J.), " La céramique de " La Po­

lada " dans le Midi de la France », Rivista di studi ligu­

ri, 23, 3-4, 1957, p. 197-222.

Audibert 1962 : AUDIBERT (J.), " Essai sur le Chalcolithique et l'Âge du Bronze en Italie du Nord, et leurs rapports avec les civilisations du sud de la France », Cahiers ligures de préhistoire et d'archéologie, 11, 2, 1962, p. 239-248.

Audibert et Bousquet 1957 : AUDIBERT (J.) et BOUS­

QUET (J.), " Essai chronologique sur l'Âge du Bronze bas-languedocien », Bulletin du Musée d'Anthropologie préhistorique de Monaco, 4, 1957, p. 249-282.

Audibert et Delord 1959 : AUDIBERT (J.) et DELORD (L.),

" Essai de synchronisation entre l'Âge du Bronze du Midi et celui du nord-est de la France », Revue archéo­

logique de l'est et du centre-est, 10, 1, 1959, p. 7-23.

Bailloud 1966 : BAILLOUD (G.), « La civilisation du Rhône et le Bronze ancien du Midi de la France », Revue archéo­

logique de l'est et du centre-est, 17, 3-4, 1966, p. 131-164.

Bailloud et Mieg de Boofzheim 1955 : BAILLOUD CG.) et MIEG DE BOOFZHEIM (P.), Les civilisations néoli­

thiques de la France dans leur contexte européen, Paris, A. et J. Picard, 1955, réed. 1976.

Bill 1973 : BILL (J.), Die Glockenbecherkultur und die frühe Bronzezeit im franzosischen Rhonebecken und ihre Be­

ziehungen zur Südwestschweiz, Bâle, Société suisse de Préhistoire et d'Archéologie, Antiqua, 1, 1973.

Bill 1976 : BILL (J.), " Beitrage zur Frühbronzezeitforschung in der Schweiz », Zeitschrift für schweizerische Altertums­

kunde und Kunstgeschichte, 33, 2, 1976, p. 77-93.

Bocksberger 1966a : BOCKSBERGER (0.-J.), " Le site pré­

historique du Petit-Chasseur à Sion, 1962-1964 », Val­

lesia, 21, 1966, p. 1-28.

Bocksberger 1966b : BOCKSBERGER (0.-J.), " Mise au point sur les découvertes préhistoriques du Petit-Chas­

seur à Sion (Valais) », La Suisse primitive, 30, 2-3, 1966, p. 21-35.

Charles 1963 : CHARLES (R.-P.), " Problèmes de chronolo­

gie méditerranéenne », Cahiers ligures de Préhistoire et d'Archéologie, 12, 2, 1963, p. 181-204.

Christlein 1964 : CHRISTLEIN CR.), " Beitrage zur Stu­

fengliederung der frühbronzezeitlichen Flachgriiberfel­

der in Süddeutschland », Bayerische Vorgeschichtsbliit­

ter, 29, 1964, p. 26-63.

Déchelette 1910 : DÉCHELETTE (J.), Manuel d'archéolo­

gie préhistorique, celtique et gallo-romaine, II : archéo­

logie celtique ou protohistorique, première partie : Âge du Bronze, Paris, A. Picard, 1910.

Duday et Guilaine 1975 : DUDAY (H.) et GUILAINE (J.),

" Les rites funéraires en Languedoc et Roussillon du Néolithique à l'Âge du Fer », Cahiers ligures de Pré­

histoire et d'Archéologie, 24, 1975, p. 141-151.

Gallay (A.) 1971 : GALLAY (A.), " Die Begrabnisstatte

" Petit-Chasseur " in Sitten (Wallis, Schweiz) : chrono­

logische Probleme und Fragen weiterer Forschung », Archaologisches Korrespondenzblatt, 1, 3, 1971,

p. 155-160.

Gallay (A.) 1972 : GALLAY (A.), " Recherches préhisto­

riques au Petit-Chasseur à Sion », Helvetia archeolo­

gica, 3, 10-11, 1972, p. 35-61.

Gallay (A.) 1975 : GALLAY (A.), " La dynamique du peu­

plement néolithique suisse », Bulletin d'études préhis­

toriques alpines, Aoste, 7, 1975, p. 5-20.

Gallay (A.) 1976 : GALLAY (A.), " Origine et expansion de la civilisation du Rhône », dans BOCQUET (A.), éd., Les Âges des Métaux dans les Alpes, 9e Congrès de l'Union internationale des Sciences préhistoriques et protohistoriques, 9, Nice, 1976, Colloque 26, p. 5-26.

Gallay (A.) 1981 : GALLAY (A.), " The Western Alps from 2500 to 1500 b.c. (3400-2500 BC) : traditions and cul­

tural changes », dans GIMBUTAS (M.), éd., The trans­

tormation of European and Anatolian culture c. 4500- 2500 BC. and its legacy, 3rd International Conference, Dubrovnik 1979, Journal of Indo-European studies, 9, 1-2, 1981, p. 33-55.

Gallay (A.) 1986 : GALLAY (A.), L: archéologie demain, Paris, Belfond, Belfond-Sciences, 1986.

Références

Documents relatifs

Deuxième raison, quand la Terre tourne sur elle- même autour de son axe, l'angle de rotation que l'on notera b se mesure dans le plan de l'équateur alors que l'angle

En faisant tourner le premier prisme et en maintenant fixes les diaphragmes et le deuxième prisme, Newton peut observer les images des différentes couleurs

Les indicateurs suisses concernent les rasoirs à tranchant uni- latéral, la parure annulaire (types Corcelettes, Mörigen), les faucilles (types Corcelettes, Herrnbaumgarten) et les

-Web : Le Web est un système hypertexte public fonctionnant sur Internet. Le Web permet de consulter, avec un navigateur, des pages accessibles sur des sites.. -Internet :

-Web : Le Web est un système hypertexte public fonctionnant sur Internet. Le Web permet de consulter, avec un navigateur, des pages accessibles sur des

Institut National de la Statistique et des Études Économiques Taux de croissance, sondages, simulations météorologiques : la statistique moderne donne forme à la réalité

en apparence « insolubles » : pour les enseignants de lettres, il faudrait inventer une nouvelle culture générale littéraire qui tendrait à disparaître, une nouvelle «

Les métadonnées EXIF sont des données relatives à la prise de vue qui sont enregistrées dans le fichier correspondant à l’image numérique. Parmi ces métadonnées EXIF, on