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GATE

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EDITO N° 1 - 2013 GATE

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SOMMAIRE

N° 1 - 2013

Nous avons le plaisir de vous adresser le premier numéro de la Newsletter du Groupe d’Analyse et de Théorie Economique Lyon St Etienne. L’objectif de cette lettre est de vous familiariser avec nos travaux, nos projets de recherche et nos coopérations.

Il ne s’agit bien évidemment pas ici de faire un bilan des thématiques traitées dans notre centre. Cette newsletter cherche plutôt à offrir une vision impressionniste des activités de recherche conduites dans nos quatre spécialités : l’économie comportementale, la théorie des jeux et les marchés, les politiques publiques et l’économie spatiale, la macroéconomie et la finance. Dans ce numéro, nous vous donnons ainsi un aperçu des travaux sur la production des normes sociales, la communication des banques centrales, les restrictions verticales et l’économie des réseaux de distribution, les nouveaux mécanismes de pilotage de la consommation d’électricité.

Nous vous présentons également deux dossiers spéciaux, l’un sur la neuroéconomie, l’autre sur l’espace dans la théorie économique. Le GATE fait en effet partie de deux Laboratoires d’Excellence liés à ces domaines et soutenus par le programme Investissements d’Avenir : Construction, Fonction Cognitive, Réhabilitation et Réparation du Cortex (CORTEX) et Intelligence des Mondes Urbains (IMU).

Le GATE, c’est aussi un réseau de coopération avec plus de 60 universités à l’étranger situées sur tous les continents. Dans ce numéro, nous mettons l’accent sur notre - déjà !- longue et fructueuse coopération de recherche et de formation avec Beijing Normal University.

Qu’il nous soit à cette occasion permis de remercier nos tutelles pour leur soutien : le CNRS, l’Université Lumière Lyon 2, l’Université Claude Bernard Lyon 1, l’Université Jean Monnet St Etienne et l’ENS de Lyon. Nous espérons que cette Newsletter vous donnera envie de mieux connaître notre laboratoire et, pourquoi pas, de venir nous y rejoindre !

Marie Claire Villeval, directrice du GATE Stéphane Riou, directeur-adjoint

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

SOMMAIRE

RECHERCHE

4 Camille Cornand Communication des banques centrales : lorsque la transparence n’est pas optimale

6 Nikos Nikoforakis Implémenter les normes sociales

8 Muriel Fadairo

Restrictions verticales et économie des réseaux de distribution : un champ fertile de recherche

COOPÉRATIONS

10 Sylvie Démurger

Lyon-Pékin : un développement durable

12 Stéphane Robin Les smart grids : les consommateurs sont-ils prêts ? Analyse comportementale des

mécanismes de pilotage de la demande d’électricité

DOSSIERS SPÉCIAUX

14 Marie Claire Villeval

Economie comportementale et neuroéconomie : Repenser les frontières

18 Stéphane Riou L’espace n’est plus le grand oublié de la théorie économique

PUBLICATIONS 2012/2013 NOUVEAUX MEMBRES

Photos : CNRS DR7/Vanessa Cusimano

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ZOOM SUR UNE RECHERCHE N° 1 - 2013 GATE

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ZOOM SUR UNE RECHERCHE

N° 1 - 2013

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epuis quelques années, les banques centrales développent leur communication vis-à-vis du public. La transparence est généralement définie comme l’absence d’asymétrie d’information entre la banque centrale et le secteur privé à propos des fondamentaux de l’économie. On considère généralement que la discipline de marché et l’efficacité de la politique monétaire seraient améliorées si les autorités diffusaient davantage d’information. Si un tel raisonnement est, dans de nombreux cas, fondé, il existe des situations dans lesquelles la transparence peut être préjudiciable.

Dans les termes de Morris et Shin (2002), en situation de complémentarité stratégique, l’information publique représente un instrument à double tranchant  : elle réduit l’incertitude fondamentale en donnant une indication sur les fondamentaux, mais elle réduit également l’incertitude stratégique, en informant sur

les croyances des autres. En servant de point focal aux agents, une annonce publique affecte davantage le comportement des agents que ne le justifierait son contenu informationnel. L’information publique peut alors déstabiliser l’économie en engendrant une sur- réaction.

En dépassant le point de vue consensuel pour une transparence accrue, la prise en compte de ce rôle dual permet de porter un regard nouveau sur les limites potentielles de la transparence. Ainsi, plusieurs publications (Cornand et Heinemann, 2008, 2013, Baeriswyl et Cornand, 2013) ont examiné la meilleure façon de communiquer pour une banque centrale permettant d’éviter la sur-réaction aux annonces. On peut également montrer que la politique monétaire optimale de la banque centrale est une fonction de sa stratégie de communication (Baeriswyl et Cornand, 2010).

Camille Cornand

Communication des banques centrales : lorsque la

transparence n’est pas optimale

Chargée de recherche au CNRS, Camille Cornand est co-responsable de l’axe « Macroéconomie, finance et histoire » du GATE.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

Il convient par ailleurs de relier trois facettes de la politique monétaire : observation du marché, communication et stabilisation (Baeriswyl, Cornand et Ziliotto, 2013). Une banque centrale évalue la situation conjoncturelle en analysant de nombreuses variables économiques. Or, ces variables sont directement influencées par la politique monétaire de la banque centrale. Dès lors, l’action des agents sur les marchés risque de refléter davantage les croyances de la banque sur les fondamentaux que les fondamentaux eux-mêmes (Ehrmann et Fratzscher, 2005). Dans cette recherche en cours, il s’agit d’évaluer comment la banque centrale doit conduire sa politique monétaire et sa politique de communication lorsque ces dernières sont susceptibles de détériorer la valeur informative des prix.

• Baeriswyl, R. ; Cornand, C. (2010), "The Signaling Role of Policy Actions", Journal of Monetary Economics, 57(6), 682–695.

• Baeriswyl, R. ; Cornand, C. (2013),

"Reducing overreaction to central banks disclosure: theory and experiment", A paraître dans Journal of the European Economic Association.

• Baeriswyl, R. ; Cornand, C. ; Ziliotto, B.

(2013), "Central bank communication, stabilization policy and endogenous information", Mimeo.

• Cornand, C. ; Heinemann, F. (2008),

"Optimal Degree of Public Information Dissemination", Economic Journal, 118, 718–742.

• Cornand, C. ; Heinemann, F. (2013),

"Measuring agents’ overreaction to public information in games with strategic complementarities", A paraître dans Experimental Economics.

• Ehrmann, M. ; Fratzscher, M. (2005),

"Transparency, disclosure and the Federal Reserve", ECB Working Paper 457.

• Morris, S. ; Shin, H.S. (2002), "Social value of public information", American Economic Review, 92(5), 1521–1534.

Avant 1994, la Réserve Fédérale Américaine ne divulguait même pas sa cible de taux d’intérêt.

Sous la direction d’Alan Greenspan, la Fed a progressivement diffusé de plus en plus d’informations économiques. Désormais, les débats et comptes-rendus des FOMC (Federal Open Market Committee) sont publics. De son côté, la Banque Centrale Européenne tient une conférence de presse après chaque décision importante.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

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ZOOM SUR UNE RECHERCHE N° 1 - 2013 GATE

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ZOOM SUR UNE RECHERCHE

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Nikos Nikiforakis

Implémenter les normes sociales

Chargé de recherche au CNRS, Nikos Nikiforakis est membre de l’axe « Economie comportementale » du GATE.

L

es normes sociales se définissent comme des règles coutumières qui gouvernent les comportements et les interactions entre les individus. Ces règles sont omniprésentes dans la vie quotidienne et influencent un très grand nombre de situations allant de la définition des droits de propriété, de nos obligations envers les collègues et membres de la famille, et de notre comportement dans les lieux publics. L'existence de normes sociales dépend de la volonté des individus d’y adhérer.

Cependant, malgré l’importance de ces normes, il n’existe pas de réponse évidente à la question suivante : pourquoi les individus obéissent-ils aux normes sociales ? Une des raisons qui peut conduire les individus à respecter les normes sociales (bien qu´une incitation privée puisse les pousser à ne pas le faire : par exemple, ils préfèreront ne pas respecter une longue file d’attente) est la crainte d'être punis.

Bien que cette peur soit souvent invoquée par les sociologues pour expliquer la coopération sociale,

la question de savoir pourquoi les gens punissent parfois ceux qui ne respectent pas la norme subsiste.

Typiquement, l'application de la norme est coûteuse car elle peut conduire à des représailles par les contrevenants (Nikiforakis, 2008 ; Nikiforakis, Noussair et Wilkening, 2012). En outre, les bénéfices individuels sont généralement négligeables lorsque les gens interagissent de façon anonyme et ne sont pas susceptibles de se rencontrer à nouveau. Pourquoi punir un contrevenant dans un tel cas ? Des résultats d´expériences de laboratoire suggèrent que les individus peuvent tout simplement aimer l'acte de punir (Fehr et Gächter, 2002 ; Masclet et al.

2003), mais il existe peu de preuves de ce comportement sur le terrain. En effet, des études anthropologiques indiquent que punir de façon coûteuse est rarement utilisé pour l'application des normes (Guala, 2012). Bien entendu, les interactions dans des petites sociétés ne sont pas aussi anonymes que dans les villes modernes peuplées de millions

d´habitants. Par conséquent, les individus peuvent préférer punir de manière à éviter les représailles telles que le commérage par exemple (Nikiforakis et Engelmann, 2011 ; Nikiforakis et Mitchell, sous presse). Il est donc important de tester si la possibilité de punir ceux qui violent les normes sociales permet d’expliquer le respect de ces normes quand les interactions sociales sont anonymes en dehors du laboratoire.

Pour explorer les déterminants de la punition dans un contexte d´interactions anonymes, nous avons mené une expérience sur le terrain (Balafoutas et Nikiforakis, 2012). Nous avons enfreint deux normes sociales d'une manière contrôlée et enregistré le comportement des observateurs.

L’expérience a été menée dans la station de métro principale d’Athènes, en Grèce. La station est utilisée quotidiennement par des centaines de milliers de passagers, ce qui implique très peu de motivations stratégiques pour punir les personnes ne

• Balafoutas, L., Nikiforakis, N., 2012. "Norm Enforcement in the City: A Natural Field Experiment", European Economic Review, 56, 1773- 1785.

• Fehr, E., Gächter, S., 2002.

"Altruistic Punishment in Humans", Nature, 415, 137- 140.

• Guala, F., 2012. "Reciprocity:

Weak or Strong ? What Punishment Experiments Do (and Do Not) Demonstrate", Behavioral and Brain Sciences, 35, 1-15.

• Masclet, D., Noussair, C., Tucker, S., Villeval, M. C., 2003,

"Monetary and Non-Monetary Punishment in the Voluntary Contribution Mechanism", American EconomicReview, 93, 366-380.

• Nikiforakis, N., 2008.

"Punishment and Counter- punishment in Public Good Games: Can we Really Govern Ourselves ? ", Journal of Public Economics, 92, 91.112.

• Nikiforakis, N., Engelmann, D., 2011. "Altruistic Punishment and the Threat of Feuds", Journal of Economic Behavior and Organization, 78, 319.332.

• Nikiforakis, N., Mitchell, H., 2013. "Mixing the Carrots with the Sticks: Third Party Punishment and Reward", Forthcoming Experimental Economics.

• Nikiforakis, N., Noussair, C.N., Wilkening, T., 2012. "Normative Con.ict & Feuds: The Limits of Self-Enforcement", Journal of Public Economics, 96, 797.807.

Taux d’application de la norme dans l’expérience respectant pas la norme sociale.

Par conséquent, à moins que les individus jouissent de l'acte de punir, il subsiste peu de raisons de confronter un contrevenant à la norme.

La première norme violée est l´interdiction de jeter des détritus dans les lieux publics. Toutes les stations de métro à Athènes sont remarquablement exemptes de détritus. Dans notre expérience, les expérimentateurs devant jouer le rôle des contrevenants jetaient une bouteille d'eau en plastique dans un couloir menant aux quais du métro. La deuxième norme enfreinte consiste à se tenir debout, statique, sur le côté gauche, au lieu du côté droit des escaliers mécaniques comme il est d’usage, pour libérer le passage à ceux qui souhaitent monter plus rapidement en doublant par la gauche. L'un des expérimentateurs se tenait donc sur le côté gauche. Dans le cas où une personne demandait au contrevenant de respecter la norme, le contrevenant devait ignorer la demande. Cela impliquait pour les personnes voulant faire respecter la norme un coût personnel dans la mesure où elles devaient insister et éventuellement élever la voix ou pousser le contrevenant de côté.

En phase avec les expériences de laboratoire, nous avons trouvé que certaines personnes étaient prêtes à utiliser la punition coûteuse pour le respect des normes dans les interactions anonymes et sans répétitions. Toutefois, ces personnes sont une petite minorité.

Sur 300 cas de violation de la norme, la punition a été observée dans seulement 35 cas (11,7 %).

Les données du questionnaire indiquent que la principale raison de la réticence des personnes à sanctionner les contrevenants est la crainte d´être puni en retour par ces derniers. Le taux d'intervention pour faire respecter la norme n´est globalement pas affecté par la taille et le genre du contrevenant, mais les hommes sont plus susceptibles que les femmes d’imposer des normes.

Un résultat surprenant est le taux sensiblement différent des interventions pour faire respecter la norme selon les contextes.

Comme on peut le voir sur la figure 1, les contrevenants à la norme de propreté sont punis dans seulement 4 % des cas, tandis que les contrevenants à la norme dans les escaliers mécaniques le sont dans 19,3 % des cas. Ceci malgré le fait que plus de personnes déclarent être gênées par la violation de la norme de propreté. Nos données suggèrent que les observateurs considèrent les personnes jetant des détritus sur la voie publique comme étant plus susceptibles de punir en retour que ceux ne respectant pas la règle dans les escaliers mécaniques. Tout le monde sait qu'ils ne devraient pas jeter les déchets. S'ils le font, c´est peut-être délibérément afin de provoquer une confrontation.

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ZOOM SUR UNE RECHERCHE N° 1 - 2013 GATE

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ZOOM SUR UNE RECHERCHE

N° 1 - 2013

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es restrictions verticales occupent une place croissante dans la configuration des relations industrielles où les réseaux représentent une part significative. Ces restrictions sont des clauses contractuelles liant des entreprises situées à des niveaux différents de la chaîne de distribution : fournisseur et distributeur ou grossiste et détaillant.

Le terme "restriction" s’explique par le caractère contraignant de ces dispositifs généralement imposés par l’entreprise amont pour limiter la liberté d’action d’une ou plusieurs entreprises en aval. Ces formes contractuelles diverses se distinguent des prix linéaires de la théorie traditionnelle où le distributeur paye au fournisseur une somme proportionnelle aux quantités achetées.

Les restrictions verticales constituent l’un des sujets actuels les plus controversés en matière

de politique de la concurrence. Elles sont en effet tantôt perçues comme les instruments d’un contrôle monopolistique, tantôt comme des mécanismes permettant d’améliorer l’efficacité économique. Ces clauses sont ainsi l’objet d’un débat récurrent aux niveaux académique et juridique. Dans ce débat, les théories de l’organisation industrielle, et plus précisément la théorie des contrats qui étudie les situations d’asymétries informationnelles et les réponses contractuelles des acteurs, apportent un éclairage important.

Pour tester les prédictions des théories de l’organisation industrielle concernant l’utilisation des restrictions verticales, l’économétrie des contrats offre une voie de recherche fructueuse. Elle permet en effet de traiter des bases de données riches et complexes compilant les caractéristiques des

Muriel Fadairo

Restrictions verticales et économie des réseaux de distribution : un champ fertile de recherche

Maitre de conférences à l’Université de Saint-Etienne, Muriel Fadairo est membre de l’axe « Théorie des jeux, choix collectifs et marchés » du GATE.

• Chaudey, M. ; Fadairo, M.,

"Contractual design and networks performance:

empirical evidence from franchising", Applied Economics, 2010, 42, 529- 533.

• Chaudey, M. ; Fadairo, M. ; Solard, G., "Network integration through franchised and company-owned chains:

evidence from French distribution networks", Managerial and Decision Economics, 2013, 34, 3-5, 195-203.

• Fadairo, M. ; Lanchimba, C.,

"Performance in distribution systems: What is the influence of the upstream firm‘s organizational choices ? ", 27th Annual Conference of the International Society of Franchising (ISoF), Beijing Normal University, Zhuhai, China, March 13-16, 2013a.

• Fadairo, M. ; Lanchimba, C., "Signaling the value of a business concept; Evidence from a structural equations model with Brazilian data", 40th Annual Conference of the European Association for Research in Industrial Economics (EARIE), Évora, Portugal, August-September 30-1, 2013b.

Montée en puissance des réseaux de distribution ;

Ici : réseaux de franchise au niveau mondial (histogramme) et pour le cas français (courbes)

D’après : Fédération européenne de la franchise, Banque Mondiale, Association internationale de la franchise, Fédération française de la franchise (2011).

« Establisments » = nombre d’unités franchisées contrats notamment dans les réseaux de distribution.

Le thème des réseaux de distribution constitue aujourd’hui un champ fertile de recherche, ainsi qu’en témoignent les articles publiés dans le Journal of Law, Economics and Organization, l’International Journal of Industrial Organization, le Journal of Industrial Economics, le Journal of Economic Perspectives, ou encore le RAND Journal of Economics.

Au sein de l’axe « Théorie des jeux, choix collectifs et marchés » du GATE, trois chercheurs étudient l’impact des restrictions verticales sur la performance des réseaux (Chaudey et Fadairo, 2010 ; Fadairo et Lanchimba, 2013a) et sur la motivation des choix contractuels dans divers contextes d’asymétrie informationnelle (Fadairo et Lanchimba 2013b, Chaudey, Fadairo, Solard, 2013).

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COOPÉRATION INTERNATIONALE N° 1 - 2013 GATE

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COOPÉRATION INTERNATIONALE

N° 1 - 2013

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e GATE Lyon-Saint Etienne a établi depuis plusieurs années une coopération étroite avec la School of Economics & Business Administration (SEBA) de l’Université Normale de Pékin. Articulée initialement autour de travaux en économie du travail et sur la distribution des revenus en Chine, la coopération s’est étendue plus récemment à l’économie urbaine et à l’économie expérimentale. Premier aboutissement de cette coopération, un Projet International de Coopération Scientifique (PICS) soutenu par le CNRS a démarré en 2011 avec pour objectif de renforcer et d’étendre les collaborations de recherche et de formation par la recherche entre les deux équipes.

Les activités de recherche menées dans le cadre du PICS portent sur la formation des processus de décision individuelle et leurs implications économiques et sociales. La plupart ont pour champ d’application la Chine.

La spécificité de notre approche est de proposer des travaux utilisant à la fois des données d’observation (enquêtes micro-économiques) et des données expérimentales (par le biais d’expériences conduites dans le Laboratoire Expérimental BNU-GATE inauguré à Pékin en 2009).

Sylvie Démurger

Lyon-Pékin : un développement durable

Directrice de recherche au CNRS, Sylvie Démurger est membre de l’axe « Politiques publiques et

espace » du GATE.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

Workshop SEBA-GATE : Ecully, avril 2013. © CNRS DR7/Vanessa Cusimano

Cette collaboration franco-chinoise active et fructueuse a donné lieu à des travaux communs sur l’évolution de la segmentation du marché du travail urbain, les incitations et contraintes aux choix migratoires, l’impact de la migration interne sur les communautés d’origine et sur les villes de destination, les liens entre migration et attitudes face au risque et à l’incertitude, ou encore la performance du mécanisme d’admission dans les universités chinoises.

Venant en appui à ces recherches, le GATE et SEBA organisent depuis 2010 un workshop annuel alternativement à Pékin et à Ecully, afin de favoriser le développement des échanges entre les membres des deux équipes, qu’ils soient permanents ou doctorants. En matière de formation, le GATE accueille également depuis 2009 des étudiants issus de la formation de Master de BNU au niveau Master 2 recherche et au niveau doctorat. Une première thèse en cotutelle a été soutenue en avril 2012.

Pour plus d’information sur cette coopération, voir : http://www.gate.cnrs.fr/pics.

• Démurger, S. ; Li, S. (2013), "Migration, Remittances, and Rural Employment Patterns: Evidence from China", In C. Giulietti, K. Tatsiramos, K. F.

Zimmermann (ed.) Labor Market Issues in China (Research in Labor Economics, Volume 37), Emerald Group Publishing Limited, 31-63.

• Démurger, S. ; Xu, H. (2013), "Left- behind children and return decisions of rural migrants in China", Mimeo.

• Démurger, S. ; Li, S. ; Xu, H. (2013),

"Internal migration, family living arrangements and happiness in China", Mimeo.

• Chen, Y. ; Jiang, M. ; Kesten, O. ; Robin, S. ; Zhu, M. (2013), "A Large Scale School Choice Experiment", Mimeo.

• Helitim, M. (2013), "Reciprocity in Group-Individual interactions: Fairness VS Evenness", Mimeo.

• Démurger, S. ; Wan, H. (2012),

"Payments for ecological restoration and internal migration in China: The Sloping Land Conversion Program in Ningxia", IZA Journal of Migration, 1:10.

• Nguyen, Q. ; Villeval, M.C. ; Xu, H.

(2012), "Trust and Trustworthiness under the Prospect Theory: A field experiment in Vietnam", GATE Working paper 2012-26.

• Démurger, S. ; Li, S. ; Yang, J. (2012),

"Earnings differentials between the public and private sectors in China: Exploring changes for urban local residents in the 2000s", China Economic Review, 23(1), 138-153.

• Démurger, S. ; Xu, H. (2011), "Return migrants: The rise of new entrepreneurs in rural China", World Development, 39(10), 1847-1861.

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PROJET DE RECHERCHE N° 1 - 2013 GATE

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PROJET DE RECHERCHE

N° 1 - 2013

Stéphane Robin

Les smart grids : les consomma- teurs sont-ils prêts ?

Analyse comportementale des mécanismes de pilotage de la demande d’électricité

Chargé de recherche au CNRS, Stéphane Robin est responsable de l’axe « ^ Économie comportementale » du GATE et coordinateur scientifique de la discipline économie pour la partie évaluation du projet de Smart Electrique Lyon.

L

a demande d’électricité des foyers est la résultante complexe de choix individuels décentralisés et non coordonnés. En France, cette demande représente un tiers de la consommation finale d’électricité. Les contraintes techniques propres à la filière, les enjeux environnementaux et sociaux appellent à une meilleure coordination de ces choix. On parle de pilotage de la demande.

L’objectif est d’effacer les pics de consommation dont la satisfaction est coûteuse en termes économiques et environnementaux et, d’une manière plus générale, de réduire la consommation d’énergie électrique.

Les réseaux électriques intelligents (smart grids)

constituent un outil prometteur pour la mise en place d'un pilotage de la demande efficace.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

Consommation électrique le 8 février 2012 (jour du record de consommation en France) - Source RTE

Les compteurs

c o m m u n i c a n t s permettront d’informer les consommateurs sur l’impact de leur choix de consommation en temps réel et d’adapter leur consommation de manière réactive dans le cadre d’une tarification incitative. Partant des possibilités offertes par ces nouveaux dispositifs, quel mécanisme incitatif faut-il mettre en œuvre ? Il existe de nombreuses solutions. Ces solutions peuvent être informatives : affichage de la consommation en temps réel indiquant le dépassement d’une limite fixée à l’avance ou une comparaison de la consommation de son foyer avec des foyers de même type. Elles peuvent aussi être tarifaires avec des différentiels de prix selon le moment de la consommation ou le versement d’un bonus récompensant la réduction de consommation pendant les périodes de pointe.

Ces mécanismes peuvent être évalués en termes d’efficacité et d’acceptabilité de manière théorique mais un enjeu est d’évaluer leurs performances avec des agents réels. L’économie expérimentale constitue une méthode privilégiée pour effectuer de tels tests. Une partie de l’analyse peut être conduite en laboratoire. Il s’agit de construire une maquette simplifiée de la réalité qui capture l’ensemble des variables importantes pour la question traitée et d’analyser le comportement d’individus réels dans cette maquette. Ces expériences permettent, sans les coûts d’un déploiement complet sur le terrain, de tester une nouvelle tarification, d’en mesurer l’efficacité, l’équité ou encore l’acceptabilité. Il s’agit d’une étape préalable à l’expérience de terrain, test ultime avant de pouvoir proposer de nouvelles formules d’abonnement à l’ensemble des foyers.

Compteur communicant Linky

Le GATE est partenaire du projet Smart Electrique Lyon. Ce projet vise à tester plusieurs solutions techniques et différents mécanismes de pilotage de la demande auprès de plusieurs milliers de clients sur le territoire du Grand Lyon. La contribution du GATE porte sur l’étude de l’impact de ces mécanismes sur le comportement des consommateurs en combinant des expériences conduites en laboratoire et le suivi de l’expérience de terrain.

• P. L. Joskow et C. D. Wolfram [2012]: Dynamic Pricing of Electricity, American Economic Review, 102(3), pp. 381-85.

• A. Faruqui et S. Sergici [2010]:

Household Response to Dynamic Pricing of Electricity: A Survey of 15 Experiments, Journal of Regulatory Economics, 38(2), pp.

193-225.

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DOSSIER SPÉCIAL : NEUROÉCONOMIE N° 1 - 2013 GATE

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DOSSIER SPÉCIAL : NEUROÉCONOMIE

N° 1 - 2013

La neuroéconomie, entre économie comportementale et neurosciences

L

’économie comportementale s’est développée autour de la mise en évidence de la violation systématique de certains axiomes de l’approche standard en économie. Elle cherche à mêler "les résultats expérimentaux et la psychologie dans une théorie mathématique du comportement stratégique normal" (Camerer, 2003). Elle a ainsi produit de nouvelles théories qui intègrent les notions de biais cognitifs et d’heuristiques. En particulier, au lieu de supposer que les individus sont capables de se contrôler, ces modèles intègrent la dépendance à des points de référence et l’existence de préférences temporelles hyperboliques. Ils admettent que les préférences ne sont pas stables et cohérentes. Enfin, l’économie comportementale modélise l’existence de

préférences morales et sociales qui rendent les choix économiques sensibles aux inégalités, à l’image de soi, à la souffrance de l’autre ou au coût moral du mensonge. A côté de ces préférences non standard, l’économie expérimentale étudie également des mécanismes non-standard de formation et révision des croyances (surconfiance, loi des petits nombres, ...) et de prise de décision (utilisation d’heuristiques, sensibilité aux effets de pairs, ...).

Le développement de ces nouveaux modèles théoriques s’est fait en symbiose avec l’accumulation de preuves expérimentales recueillies en laboratoire ou sur le terrain. Depuis les années quatre-vingts, on assiste à une très forte croissance de l’expérimentation accompagnée d’une diversification des méthodes d’investigation. La neuroéconomie s’est développée quant à elle comme un effort pluridisciplinaire entre économie et neurosciences pour explorer les bases

Marie Claire Villeval

Economie comportementale et neuroéconomie : Repenser les frontières

Marie Claire Villeval est Directrice de recherche au CNRS et Directrice du GATE Lyon Saint-Etienne.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

neuronales de la prise de décision et produire des théories de la décision économique incorporant des mécanismes neuronaux et psychologiques (Sanfey, 2007). Elle n’aurait sans doute pas pu s’épanouir sans la percée préalable de l’économie comportementale et une évolution parallèle au sein des neurosciences cognitives.

Utilité et controverses

Les économistes peuvent apporter aux neuroscientifiques des modèles et des formalisations des comportements stratégiques qui peuvent guider les processus d’investigation. La question de l’apport des neurosciences à l’économie soulève quant à elle des débats passionnés. Du côté des "pro", on met en avant la possibilité qu’offrent les neurosciences d’expliciter les interactions entre les multiples systèmes d’évaluation engagés par la prise de décision. Une meilleure compréhension des processus de décision est permise par l’identification de corrélats neuraux des arbitrages imposés par les choix économiques et l’explicitation d’anomalies de la rationalité. Camerer, Loewenstein et Prelec (2005) insistent sur les apports de la dissociation du rôle des processus contrôlés et de celui des processus automatiques qui n’accèdent pas à notre conscience. Les théories économiques, en se focalisant sur les choix délibérés, tendent à ignorer les mécanismes automatiques et intuitifs et à sous-estimer les processus émotionnels. Par l’examen de l’activité du cerveau lors de la délibération, la neuroéconomie éclaire les arbitrages entre processus affectifs et processus cognitifs engagés lors de la prise de décision. Par l’examen du rôle des hormones ou la mesure de réactions physiologiques, elle aide à caractériser la fonction des émotions dans le raisonnement économique.

Du côté des « anti », Gul et Pesendorfer adressent aux neuroéoconomistes une critique fondamentale en remettant en question la pertinence d’expliciter les processus associés à la prise de décision pour rendre les modèles économiques davantage prédictifs. Dans la mesure où l’économie ne fait pas de prédictions sur les processus neuraux impliqués

par ces choix, la neuroéconomie ne peut pas réfuter les modèles standard. Harrisson ou Rubinstein pour leur part contestent que la neuroéconomie puisse délivrer des résultats comportementaux qui ne soient pas prédictibles par les modèles économiques.

Au delà de ces critiques fondamentales, la neuroéconomie offre une illustration intéressante de la possibilité de repousser les frontières de la connaissance en déplaçant les murs de nos disciplines. Par ailleurs, il convient de rappeler combien les positions peuvent évoluer au cours du temps. Dans la 12e édition de 1985, les "Principles of Economics" de Samuelson affirmaient que "les économistes ne peuvent (malheureusement) pas réaliser des expériences contrôlées en laboratoire, comme les chimistes ou les biologistes". Dans sa 14e édition en1992, le même manuel notait que "l’économie expérimentale est un nouveau développement prometteur"….

Quelques thématiques éclairées par la neuroéconomie

Au delà des controverses, la recherche en neuroéconomie commence à délivrer des clés de compréhension de la manière dont nous valorisons un objet ou un acte. Notre cerveau peut donner une valeur neurale commune à un gain monétaire, un gain en termes d’image de soi ou une action généreuse.

Ces travaux ont identifié des bases biologiques à la confiance. Ils permettent de mieux comprendre comment nous arbitrons nos conflits entre motivations affectives et délibératives et comment nos émotions peuvent servir à améliorer nos choix économiques.

Les travaux en neuroéconomie du GATE s’appuient sur des études en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) sur le rôle de l’image de soi dans les comportements pro-sociaux, la formation dynamique des liens sociaux lors de la contribution aux biens publics, les comportements anti-sociaux.

Par des mesures physiologiques (conductance de la peau), des travaux analysent le rôle des émotions dans l’évasion fiscale, la coopération et les sanctions

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DOSSIER SPÉCIAL : NEUROÉCONOMIE N° 1 - 2013 GATE

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DOSSIER SPÉCIAL : NEUROÉCONOMIE

N° 1 - 2013

dans les jeux de biens publics ou la gestion de l’effort en compétition. S’ajoutent à cela des travaux sur l’impact d’interventions physiologiques sur les préférences temporelles.

Au delà, nos travaux en économie comportementale portent sur des domaines variés allant des préférences individuelles face au risque, à l’incertitude ou au temps, aux préférences sociales. Les travaux sur ces dernières traitent de l’aversion à l’inégalité, les effets de pairs, l’image de soi et la recherche de statut, les comportements de tricherie et l’hypocrisie morale.

Des recherches portent également sur le design institutionnel, notamment sur les marchés électriques ou bancaires, et les comportements sur les marchés face à l’information.

IRMf

L’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permet de visualiser l'activité du cerveau à partir de l’enregistrement des variations hémodynamiques du flux sanguin dans les zones stimulées. La localisation des zones cérébrales activées est mesurée par le signal BOLD (Blood Oxygen Level Dependant) qui reflète les variations de la quantité d'oxygène transporté par l'hémoglobine contenue dans les globules rouges du sang.

Quelques références

• Bault, N. ; Coricelli, G. ; Joffily, M. ; Rustichini, A. (2011), "Medial prefrontal cortex and striatum mediate the influence of social comparison on the decision process", PNAS, 108(38), 16044-16049.

• Camerer, C. 2003, "Behavioral Game Theory: Experiments in Strategic Interaction", Princeton University Press.

• Camerer, C. ; Loewenstein, G. ; Prelec, D. 2005, "Neuroeconomics: How neuroscience can inform economics", Journal of Economic Literature, 34(1).

• Caplin, A. ; Dean, M. (2008), "Dopamine, Reward Prediction Error, and Economics", Quarterly Journal of Economics, 123(2), 663-701.

• Fehr, E. ; Rangel, A. (2011), "Neuroeconomic foundations of economic choice - Recent advances", Journal of Economic Perspectives, 25(4), 3-30.

• Frydman, C. ; Barberis, N. ; Camerer, C. ; Bossaerts, P. ; Rangel, A, "Testing theories of investor behavior using neural data", Journal of Finance, A paraître.

• Glimcher, P. ; Camerer, C. ; Fehr, E. ; Poldrack, R. eds., "Neuroeconomics: Decision Making and the Brain", London: Elsevier.

• Gul, F. ; Pesendorfer, W. (2008), "The case for mindless economics", In A. Caplin and A. Schotter, eds., The Foundations of Positive and Normative Economics: A Handbook, 3-39. Oxford: Oxford University Press.

• Harrison, G.W. (2008), "Neuroeconomics: A critical reconsideration", Economics and Philosophy, 24, 303-344.

• McClure, S. ; Laibson, D. ; Loewenstein, G. ; Cohen, J. (2004), "Separate neural systems value immediate and delayed monetary rewards", Science, 306, 503-507.

• Sanfey, A.G. (2007), "Social Decision-Making: Insights from Game Theory and Neuroscience", Science, 318(5850), 598-602.

Laboratoire d’Excellence CORTEX

Construction, Fonction Cognitive et Réhabilitation du Cerveau

CORTEX est le fruit d’un regroupement multidisciplinaire unique visant à comprendre le cerveau et la cognition humaine. Il s’appuie sur une approche intégrative, fondée sur une étude systémique des réseaux et des interactions à des échelles multiples, depuis la cellule jusqu’à l’individu.

CORTEX vise aussi à permettre le développement de nouvelles procédures thérapeutiques.

CORTEX fonctionne autour de 4 axes :

• Cellules souches et développement du cortex

• Dynamique des réseaux à large-échelle sous- tendant la perception

• Comportement et neuroéconomie

• Réparation, remédiation et apprentissage Directeur : Henry Kennedy, INSERM

Membres de CORTEX : 6 laboratoires, 15 équipes : Stem cell and Brain Research Institute, Centre de Neurosciences Cognitives, Lyon Neuroscience Research Center, Centre de Génétique et de Physiologie Moléculaire et Cellulaire, Laboratoire d’Étude des Mécanismes Cognitifs, Groupe d’Analyse et de Théorie Economique.

Budget : 11,5 M d’Euros.

Activités : CORTEX International Meeting, Lyon, 3-5 juin 2013 ; séminaires hebdomadaires CORTEX.

Moyens et équipements

• Le GATE est membre du Laboratoire d’Excellence CORTEX labellisé par le programme Investissements d’Avenir (voir ci-contre)

• Il coordonne deux contrats ANR dans le cadre du programme EMCO (Emotions, Cognition, Comportements) :

- HEIDI (How Emotions Influence Decision- making: an Interdisciplinary perspective (behavioral economics and neuroscience)

- FREMO (The Free Energy Theory of Emotions)

• Le GATE gère une chaire en finance industrielle expérimentale soutenue par l’AFTI (Agence Française des Titres).

• La plateforme expérimentale comporte :

- deux laboratoires expérimentaux de 30 ordinateurs

- 12 équipements de mesures physiologiques (BIOPAC)

- Un laboratoire mobile de 20 ordinateurs portables

• Un scanner pour les expériences en IRMf est accessible au CERMEP.

• Le GATE a organisé la 4ème conférence de l’ASFEE (Association Française d’Economie Expérimentale) à Lyon les 20 et 21 juin 2013, avec notamment une session invitée en neuroéconomie CORTEX (http://

www.gate.cnrs.fr/asfee2013). Il organise un workshop annuel CORTEX en économie comportementale (http://

www.labex-cortex.com) et un cours en neuroéconomie et économie comportementale les lundis.

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DOSSIER SPÉCIAL : ÉCONOMIE GÉOGRAPHIQUE

GATE

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N° 1 - 2013 DOSSIER SPÉCIAL : ÉCONOMIE GÉOGRAPHIQUE GATE

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D

epuis l’article pionnier de Krugman (1991), l’économie géographique a profondément renouvelé la façon dont on perçoit le rôle de l’espace en économie. En introduction de leur ouvrage, Fujita, Krugman et Venables (1999) en rappellent l’objectif initial. A diverses échelles spatiales, l’agglomération est caractéristique de l’organisation spatiale des activités et des hommes. Si elle peut être le produit d’avantages comparatifs, il arrive aussi que des territoires, a priori identiques, empruntent des trajectoires de développement fortement divergentes;

certains devenant des centres économiques, d’autres des périphéries. Il s’agit donc d’analyser les phénomènes d’agglomération au travers des forces endogènes et cumulatives qu’ils renferment.

L’analyse repose alors quasi-invariablement sur trois ingrédients : le rôle des rendements croissants, des externalités pécuniaires et des coûts d’échange.

Plus de vingt ans après la publication de l’article fondateur de Krugman, il convient de noter à quel point l’économie géographique est venue alimenter divers débats de politiques économiques et s’est progressivement émancipée de sa problématique de départ.

Coïncidant avec la période de mise en oeuvre du marché unique, le modèle de Krugman (1991) a grandement contribué au débat sur ses bienfaits attendus ou supposés. Il est vrai que transposées sans précaution au contexte européen, ses conclusions pouvaient sembler alarmistes. La réduction des coûts d’échange, couplée à l’existence de rendements croissants, pouvait engendrer des forces d’agglomération susceptibles de déstabiliser la géographie économique européenne. En réalité, du fait de certaines spécificités européennes dont

Stéphane Riou

L’espace n’est plus le grand oublié de la théorie économique

Stéphane Riou est Professeur à l’Université de Saint-Etienne et Directeur adjoint du GATE Lyon Saint-Etienne.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

celle relative à la faible mobilité géographique du travail un tel mouvement d’agglomération n’a pas eu lieu. Le croisement entre la théorie de la croissance endogène et l’économie géographique a aussi permis d’éclairer d’un jour nouveau le processus de convergence de certains pays périphériques qui, tout en rattrapant la moyenne européenne, voient leurs disparités régionales se creuser (Baldwin, Forslid, Martin, Ottaviano et Robert-Nicoud, 2003). Les économies d’agglomération sont facteurs de croissance de sorte que l’intégration économique, qui donne davantage de possibilité de les exploiter, produit des gains d’efficacité au prix de déséquilibres spatiaux plus intenses. Quel objectif doit-on alors assigner à la politique régionale européenne ? Est-elle en mesure de rechercher à la fois plus de cohésion interrégionale et d’efficacité macroéconomique ? Deux questions sur lesquelles l’économie géographique offre aussi un éclairage intéressant (Martin, 1999).

L’autre grand terrain récent d’application de l’économie géographique est celui de la concurrence fiscale. L’évolution des taux nominaux d’imposition sur les bénéfices en Europe sur les 20 dernières années indique une tendance claire à la baisse.

Pour autant, les écarts entre pays restent significatifs. Cette persistance d’écarts rappelle que d’autres facteurs influencent

la position concurrentielle des économies européennes en fonction desquels celles-ci ont une capacité plus ou moins grande à résister au jeu de moins- disant fiscal. Rendre compte théoriquement de ce fait stylisé nécessite un cadre d’analyse où les entreprises ne réagissent pas à la marge à des écarts de taux d’imposition, mais où d’autres facteurs comme le niveau d’infrastructures ou l’accès au marché atténuent l’élasticité de la base fiscale. Comme le soulignent Baldwin et Krugman (2004), le modèle standard de concurrence fiscale en concurrence parfaite, sans commerce et coût d’échange, n’est alors pas le plus adapté.

Dans une certaine mesure, l’économie géographique offre un cadre plus approprié et permet d’analyser sous un angle nouveau les politiques de taxation entre des économies imparfaitement intégrées. Baldwin et Krugman (2004), Ottaviano et van Ypersele

(2004) ou Haufler et Wooton (2010), s’inscrivent dans cette perspective et démontrent, d’une part, qu’en présence d’économies d’agglomération la course au moins disant fiscal n’est pas inéluctable et, d’autre part, que le niveau des coûts d’échange influence fortement les comportements de taxation.

Les perspectives de déploiement de l’économie géographique tant théorique qu’empirique sont aujourd’hui nombreuses.

En particulier, son croisement avec l’économie urbaine ouvre sur de nombreuses questions relatives à la transformation des villes sous l’effet du commerce international (Cavailhès, Gaigné, Tabuchi et Thisse, 2007), aux effets de mobilité des politiques de densification urbaine (Gaigné, Riou et Thisse, 2012). L’espace n’est plus le grand oublié de la théorie économique.

© CNRS DR7/Vanessa Cusimano

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• Le GATE est membre du Laboratoire d’excellence

« Intelligence des Mondes Urbain » labellisé par le Programme « Investissements d’Avenir ».

• Les membres de l’axe « Politiques publiques et espace » entretiennent de nombreuses relations d’expertise et contractuelles avec l’Europe, les collectivités territoriales et ministères (CAE, DATAR, Région Rhône-Alpes, Grand Lyon, Ministère de l’Economie et des Finances, Ministère du Travail…).

• Il a accueilli les Journées de l’Association Française de Sciences Economiques à Saint- Etienne sur le thème « Economie Géographique et Politiques Publiques » et est à l’origine de plusieurs manifestations sur cette thématique dont l’organisation régulière de sessions lors des Journées de l’Economie.

• Il héberge la structure de valorisation EuroLIO, Observatoire Européen des Données Localisées de l’Innovation (www.eurolio.eu).

Quelques références

• Baldwin, R. ; Forslid, R. ; Martin, Ph. ; Ottaviano, G.  ; Robert-Nicoud, F. (2003), "Economic geography and public policy", MIT Press.

• Baldwin, R.E. ; Krugman, P. (2004), "Agglomeration, integration and tax harmonisation", European Economic Review, 48, 1-23.

• Cavailhès, J. ; Gaigné, C. ; Tabuchi, T. ; Thisse, J-F (2007), "Trade and the structure of cities", Journal of Urban Economics, vol. 62(3), 383-404.

• Fujita, M. ; Krugman, P. ; Venables, A. (1999), "The spatial economy: cities, regions and international trade", Cambridge MIT PRESS.

• Gaigné, C. ; Riou, S. ; Thisse, J-F (2012), "Are compact cities environmentally friendly ? ", Journal of Urban Economics, vol. 72(2), 123-136.

• Haufler, A. ; Wooton, I. (2010), "Competition for firms in an oligopolistic industry: The impact of economic integration", Journal of International Economics, vol. 80(2), 239-248.

• Krugman, P. (1991), "Increasing returns and economic geography", Journal of Political Economy, 99, 483-99.

• Martin, P. (1999), "Public Policies, regional inequalities and growth", Journal of Public Economics, vol. 73(1), pp. 85-105.

• Ottaviano, G. ; van Ypersele, T. (2005), "Market size and tax competition", Journal of International Economics, 67, 25-46.

Laboratoire d’Excellence IMU

Intelligence des Mondes Urbains

IMU a pour objectif d’intensifier la recherche urbaine au sein de l’Université de Lyon en favorisant la pluridisciplinarité à l’échelle de la métropole Lyon Saint-Etienne. Cette dernière constitue un terrain d’études privilégié et un laboratoire d’expériences unique pour des recherches novatrices.

IMU est organisé autour de 6 thèmes de recherche :

• Récits, numérisation, projections

• Résilience, risque, sécurité, vulnérabilité, santé

• Ingénieries, savoirs, créations

• Sociétés, temporalités, modes de vie, normes

• Environnements, natures, écotechnologies

• Urbanisations, mondialisations, capitalismes

Les échanges avec les praticiens sont structurés autour de cinq ateliers :

• Transformations urbaines, vies quotidiennes, usages, fabrications

• Environnements, territoires, sociétés

• Mondes possibles, écotechnologies, mutations sociales et économiques

• Formations et expérimentations pédagogiques

• Controverses, débats, transfert, valorisation

Comité de pilotage : J.Y. Toussaint, A. Baskurt, C. Morel-Journel, G. Pinson.

Membres d’IMU : 440 chercheurs issus de 26 laboratoires (http://imu.universite-lyon.fr/presentation/

laboratoires-173295.kjsp ? RH=1328617373508&RF=1322648495852) représentant 29 disciplines.

Budget : 9 M d’€ sur 10 ans (2011- 2019)

Activités : Animation de séminaires, financement de projets de recherche (doctorats et post-docs) et stages de M2.

Références

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