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DEMANDEZ À UN ÉTHICIEN : Le fardeau du soignant

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Academic year: 2022

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Canadian OnCOlOgy nursing JOurnal • VOlume 25, issue 4, Fall 2015 reVue Canadienne de sOins inFirmiers en OnCOlOgie

FEA TUR ES /R U bR iq UE S

DemAnDeZ À un étHicien

Le fardeau du soignant

par Blair Henry et Spencer Livingstone

question

« J’ai beaucoup de mal avec les situations où un patient semble poussé dans un traitement musclé qui n’est pas forcément dans son meil- leur intérêt. Ça me déboussole. Même quand le patient emboîte le pas, je continue de me demander si c’est vraiment la meilleure chose pour lui. Et ça ne me semble pas toujours être le cas. C’est vraiment difficile à vivre.

Je pense alors qu’il y a pourtant d’autres voies possibles. Est-ce que quelqu’un l’a dit au patient? Mais on pousse plutôt pour aller de l’avant et traiter les gens. Très souvent, ils meurent et on se sent alors terriblement mal, car on a contribué à cette décision agressive.

On a fait subir ça au patient et à sa famille alors qu’ils auraient mérité d’être chez eux ou dans un lieu plus calme pour vivre ces derniers moments ensemble. À la place, on bouscule ces patients et on se sent tout croche.

Hier soir, par exemple, il a été décidé qu’une vieille femme recevrait son trai- tement sur-le-champ. Elle était déjà hos- pitalisée et devait être envoyée en radio.

Pourtant, elle pouvait à peine sortir de son lit. En essayant, elle a vomi. Sa douleur était sous contrôle grâce à un narcotique;

elle n’avait pas vraiment besoin de ce traite- ment pour mieux contrôler la douleur. J’ai pensé qu’on aurait pu repousser le traite- ment à un autre jour et la laisser se reposer, d’autant plus qu’il était déjà six heures du soir. Mais il en avait été décidé autrement.

C’était incontournable  : il fallait l’envoyer se faire traiter. C’était vraiment dur.

S’agit-il d’une question d’éthique?

Comment aborder cette situation la pro- chaine fois? Je suis sûre qu’elle se repro- duira avec d’autres patients. »

réPonse De blAir

Merci de nous partager cette histoire.

Ces situations sont difficiles sur le plan émotionnel, autant pour les prestataires de soins que pour les patients et leur famille. D’après mon expérience, les radiothérapeutes et les infirmières des cliniques se heurtent régulièrement à ce genre de difficulté.

Des messages conflictuels circulent dans le système de soins de santé  :

« On peut vaincre le cancer! », « Il faut centrer les soins sur les patients!  »,

«  Les soins palliatifs sont un droit!  ».

Décider d’abandonner le combat est-il perçu comme un échec par le patient, sa famille ou les prestataires de soins?

Ça peut fort bien être le cas lorsque le consensus n’est pas au rendez-vous.

À la base, le meilleur intérêt d’une personne ayant encore ses capacités, c’est ce qu’elle dit vouloir. Cela dit, les intérêts d’une même personne peuvent être multiples et divergents : on veut se montrer fort, on souhaite éviter la dou- leur, on est prêt à supporter temporaire- ment une douleur si elle nous apporte des gains à long terme, on recherche la qualité au-delà de la quantité, on veut une mort paisible. Cela va aussi au-delà de l’individu même. Certains patients qui auraient eux-mêmes arrêté depuis longtemps un traitement acceptent par- fois de le poursuivre pour leurs proches.

À mon avis, votre histoire se rapporte à la notion de consentement éclairé et à l’idée que ce consentement peut changer et devrait être revu tout au long de la tra- jectoire de soins. La vieille dame dont vous parlez aurait normalement dû connaître

les conséquences d’un traitement man- qué et savoir qu’elle pouvait décider d’ar- rêter en tout temps si c’était trop pour elle, à condition de bien comprendre les consé- quences de sa décision. Est-ce possible de vérifier auprès du patient qu’il est bien conscient de tout ça? Un patient qui com- prend bien ce qui se passe est dans une toute autre situation que celui qui se sent dépassé par les événements.

Notre rôle à titre de représentant du patient nous pousse à agir dans ce genre de situation. Toutefois, à moins de faire preuve d’une grande sensibi- lité et de tact, toute action comporte un risque. Si le patient est poussé par sa famille, le fait de s’immiscer pourrait inutilement nuire à la relation qu’en- tretient ce patient avec ses proches, ou encore altérer votre relation avec cette famille. Je conseille dans ce cas d’éviter à tout prix les relations triangulaires, à même de dégénérer rapidement (et qui vous coinceraient entre un patient et sa famille, ou encore entre un patient et l’oncologue lorsque les objectifs préa- lablement établis du plan de soin sont simplement suivis). Bien sûr, il peut être nécessaire parfois d’intervenir, mais une intervention axée sur les processus aura plus de chances de faire long cours.

L’idéal, c’est que ce soit le patient et lui seul qui décide quand il a atteint ses limites et si son meilleur intérêt réside avant toute chose dans sa qualité de vie.

Le patient peut ensuite informer toutes les parties en jeu de sa décision.

Le point de départ serait donc la communication. Cherchez à discerner ce qui se passe vraiment et, si possible, impliquez dans ce processus la famille et les autres intervenants. Les gens malades sont souvent plus sensibles aux opinions des autres. Il faut alors s’assu- rer de leur transmettre des renseigne- ments impartiaux et utiles.

Dans une clinique comme au sein d’un groupe de professionnels de tous hori- zons, les collègues devraient parler de ces difficultés et établir en amont un plan pour aborder ce genre de situation.

Je vous encourage à ouvrir cette conver- sation avec votre équipe.

Au suJet De l’Auteur

Blair Henry, Centre des sciences de la santé Sunnybrook

Spencer Livingstone, étudiant au baccalauréat en philosophie et en éthique

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