Pour une sociologie politique du supportérisme. Penser le militantisme et la partisanerie des supporters de football en Europe

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penser le militantisme et la partisanerie des supporters de football en Europe

-HDQ&KDUOHVB ASSON et Ludovic L ESTRELIN

Manifestations de rue, pétitions, prises de position dans le débat public, grèves des chants et des encouragements, création et développement de UpVHDX[DVVRFLDWLIVOREE\LQJWRXVD]LPXWVLQYRFDWLRQGHODGpIHQVHGHVOL - EHUWpVSXEOLTXHVIRQGDPHQWDOHVDI¿UPDWLRQGHUHYHQGLFDWLRQVFLWR\HQQHV actions en justice… les mobilisations des supporters de football em- pruntent dorénavant au répertoire classique de l’action collective. Tant et VLELHQTXHQRPEUHX[VRQWOHVFRPPHQWDWHXUVGHODVFqQHXOWUDjVXFFRP - ber à la tentation de voir dans cette effervescence militante le ferment d’un renouveau démocratique propre à réformer nos vieilles sociétés occiden- tales

¹

. Sans verser dans la prophétie, il convient de prendre la mesure de la contribution du supportérisme au gouvernement des pratiques sociales d’une partie de la jeunesse européenne qui trouve là une opportunité, par- mi d’autres, de se construire progressivement comme catégorie politique SHUWLQHQWH&RQIURQWDQWOD VRFLRORJLHGH O¶DFWLRQSXEOLTXH +DVVHQWHXIHO /DVFRXPHVHW/H*DOqVGHFRQWU{OHGXVXSSRUWpULVPHG¶XQH part, à la sociologie de la mobilisation des supporters de football d’autre part, la proposition programmatique vise à dégager les conditions d’une VRFLRORJLHSROLWLTXHGHVPHPEUHVOHVSOXVIHUYHQWVHWOHVPLHX[RUJDQL- sés des tribunes des stades permettant de penser, par-delà l’usage méta- SKRULTXHOH©PLOLWDQWLVPHªHWOD©SDUWLVDQHULHªGHVVXSSRUWHUVHQ(XURSH (Bromberger 1995).

Si, après une phase d’ajustement et de coordination de mesures diverses PDUTXpHVSDUOHVGLVSDULWpVQDWLRQDOHVXQRUGUHVXSpULHXUGp¿QLWXQHVSDFH public européen d’encadrement du supportérisme (1) (Basson 2004), une OLPLWHOHFDUDFWpULVHLOPpVHVWLPHOHV©EpQp¿FLDLUHVªDX[TXHOVLOHVWGHV -

1 Associatif et militant, festif et démonstratif, indéfectible et radical, le supportérisme ul-

WUDHVWFRQVWLWXpGHJURXSHVGHMHXQHVDPDWHXUVGHIRRWEDOOLVVXVGHVFODVVHVPR\HQQHV

HWSRSXODLUHVVHSURFODPDQWLQGpSHQGDQWVGHVFOXEV%DVVRQHW1X\WHQV

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WLQp &RQVLGpUpV HQ WDQW TXH FLEOHV OHV JURXSHV RUJDQLVpV GH VXSSRUWHUV VRQWHQHIIHWPDLQWHQXVDX[PDUJHVGXSURFHVVXVG¶pODERUDWLRQHWGHPLVH HQ°XYUHG¶XQHDFWLRQSXEOLTXHGRQWLOVVRQWSRXUWDQWOHVSUHPLHUV©UHVVRU - WLVVDQWVª:DULQ)DLVDQWYDORLUVDSUpWHQWLRQjrWUHFRQVLGpUpFRPPH

©OLHXGXSROLWLTXHªOHVXSSRUWpULVPHXOWUDV¶DSSOLTXHDORUVjXVHUGH O¶RULJLQDOLWpGHVRQUpSHUWRLUHG¶DFWLRQFROOHFWLYHD¿QGHWHQWHUGHPRGL¿HU OHVGLVSRVLWLIVG¶DFWLRQSXEOLTXHTXLHQWUDYHQWVRQGpYHORSSHPHQW'RQQHU corps à notre proposition d’œuvrer à une sociologie politique du suppor- WpULVPHVXSSRVHDLQVLGHPHVXUHU©O¶LQWpUrWGHVPRQRJUDSKLHVªWHOOHFHOOH GX3URJHWWRXOWUjGH%RORJQHHQ,WDOLHSURSUHVjLOOXVWUHUODG\QDPLTXH du processus de légitimation politique du supportérisme.

Un espace public européen d’encadrement du supportérisme

Prenant appui sur un référentiel d’action publique partagé (Muller 2000), XQHVSDFHSXEOLFG¶HQFDGUHPHQWGXVXSSRUWpULVPHHVWHQFRXUVGHFRGL¿ - FDWLRQjO¶pFKHOOHHXURSpHQQH1XOGRXWHTXHODTXHVWLRQ

VHSUpVHQWHGLIIpUHPPHQWHQIRQFWLRQGHVOLJQHVGHIUDFWXUHSURSUHVjFKDTXHSD\V(Q Angleterre, ce sont les inégalités, les disparités sociales et régionales qui comptent; en (FRVVHHWHQ,UODQGHGX1RUGOHVHFWDULVPHUHOLJLHX[HQ(VSDJQHOHVQDWLRQDOLVPHV en partie fondés sur les différences linguistiques, entre catalans, castillans, galiciens et EDVTXHVHQ,WDOLHOHVSDUWLFXODULVPHVOLpVDX[YLOOHVHWSHXWrWUHODGLYLVLRQQRUGVXG

>«@ HQ¿Q HQ$OOHPDJQH OHV UHODWLRQV HQWUH OHV JpQpUDWLRQV HW FHOOHV HQWUH O¶HVW HW O¶RXHVW'XQQLQJ

²

.

7RXWHIRLVXQSULQFLSHXQL¿FDWHXUMRXHjSOHLQOHSURSUHGXVXSSRUWHUpWDQW G¶DFFRPSDJQHU©VRQªpTXLSHGDQVWRXVVHVGpSODFHPHQWVLOHVWSOXVHQ - FRUHVROOLFLWpV¶LOUpVLGH©jGLVWDQFHªGXFOXEVXSSRUWpYRLU/HVWUHOLQHW al. 2006, Lestrelin et Basson 2009, Lestrelin 2010), et ainsi de franchir les frontières, l’hétérogénéité originelle des politiques publiques mises en

°XYUH SDU OHV SD\V FRQFHUQpV VH YRLW UpGXLWH SDU O¶LPSRVLWLRQ GX FDUDF - WqUH WUDQVQDWLRQDO GX SKpQRPqQH &HWWH FRQWUDLQWH WUDYDLOOH j XQH IRUPH

2 L’auteur ne s’encombre pas du cas français: caractère dérisoire (en dépit des drames

UpFHQWVHQUHJDUGGHVVLWXDWLRQVGHVSD\VYRLVLQVUHWHQXVRXGLI¿FXOWpjGpJDJHUGHV

SULQFLSHVH[SOLFDWLIVjVRQVXMHW0LJQRQ"

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d’accommodation des actions engagées par les différents Etats et concourt à façonner un cadre d’interprétation légitime susceptible d’orienter l’ac- tion publique communautaire en ce domaine. Par le jeu de la porosité des FDGUHV QDWLRQDX[ HW GH OD FRQYHUJHQFH GHV ¿QDOLWpV SRXUVXLYLHV SDU OHV Etats concernés, tous en viennent à adopter un corpus de normes et de dispositions relativement proches.

La domination du modèle répressif et proactif développé en Angleterre 'HIDLWFHSURFHVVXVGHFRQVROLGDWLRQGXUpIpUHQWLHOHXURSpHQSUpVHQWHGHV HIIHWVGHGLVWRUVLRQ/HSULQFLSDOWLHQWDX[FDSDFLWpVGHVGLYHUVHVLQVWLWX- WLRQVQDWLRQDOHVjpSURXYHUGDQVOHXUFRQWH[WHSURSUHGHERQQHVSUDWLTXHV GHJHVWLRQGXVXSSRUWpULVPHVXVFHSWLEOHVG¶rWUHH[SRUWpHVYHUVOHVDXWUHV SD\VHXURSpHQV,QpJDOHPHQWGRWpVFHVGHUQLHUVYRLHQWOHPRGqOHSULQ - cipalement répressif et proactif, développé en Angleterre assurer un rôle central dans la production du référentiel dominant. Incarnation du hooli- JDQOD¿JXUHGXVXSSRUWHUDQJODLVYLHQWFRPPHMXVWL¿HUOHGpSDVVHPHQW des mesures traditionnelles de gestion des foules et de maintien de l’ordre HWFDXWLRQQHUOHUHFRXUVDX[RSWLRQVVpFXULWDLUHVWHQGDQWDXFRQWU{OHGHOD déviance (Tsoukala 2001 et 2010). Présenté comme une menace sociale, ODUpSUHVVLRQGXKRROLJDQLVPHDGPHWGHVHQWRUVHVDX[OLEHUWpVSXEOLTXHV fondamentales et impose le déploiement de mesures inspirées des procé- dures de lutte contre les organisations terroristes et la grande criminalité.

En retour, les dispositions radicales prises par les forces de l’ordre les

cantonnent dans une opposition frontale avec les groupes de supporters

HWHQJHQGUHQWXQHVXUHQFKqUHHQWUHGHX[SDUWLHVWHQWpHVGHV¶HQJDJHUGDQV

XQH OXWWH VDQV ¿Q &¶HVW DLQVL TXH IDFH j GHV VWDGHV YpFXV FRPPH GHV

VDQFWXDLUHV LQYLRODEOHV %DVVRQ D OHV H[DFWLRQV VH GpSODFHQW GDQV

O¶HVSDFHHWOHWHPSVjODUHFKHUFKHGHFRQWH[WHVSURSLFHVjGHVPDQLIHVWD-

tions de violence que l’intervention des forces de l’ordre ne viendrait pas

interrompre: la pratique des ¿JKWV (combats de rue ritualisés) organisés

en marge des matchs de football, sur les aires d’autoroute ou au cœur des

YLOOHVVHJpQpUDOLVH'HPrPHYRLWRQGHVJURXSHVGHVXSSRUWHUVDQWDJR-

nistes s’allier pour organiser l’assaut des positions policières. L’actualité

italienne (en Sicile et à Rome notamment) fournit des illustrations tra-

giques des effets de contournement du dispositif répressif mis en place

/HVWUHOLQ

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Les limites du modèle sociopréventif développé en Belgique

Si l’empreinte anglaise marque le processus d’européanisation de l’action SXEOLTXHGHOXWWHFRQWUHOHVXSSRUWpULVPHHOOHQ¶H[FOXWSDVG¶DXWUHVPRGD- lités d’intervention. Ainsi la prévention offensive entend-elle s’attaquer DX[UDFLQHVVRFLDOHVGXSUREOqPH&RPHURQ

³

. Elaboré en Belgique HQUpDFWLRQDXGUDPHGX+H\VHOOHSURJUDPPHGH fan coaching est ima- JLQpDXFRXUVGHVDQQpHVHWJpQpUDOLVpjWRXVOHVFOXEVGHIRRWEDOO GX5R\DXPH,OUHSRVHVXUOHFRQVWDWTXHVLOHKRROLJDQLVPHYRLWGDQVOHV tribunes des stades l’opportunité de se donner libre cours, il est le fait de VXSSRUWHUVWURXYDQWOHXUVPRWLYDWLRQVGDQVXQDXWUHHVSDFHWHPSV&¶HVW DORUVOHVIDFWHXUVVRFLDX[GXSDVVDJHjO¶DFWHTXLVRQWSULVHQFRPSWHVLWXD- WLRQVIDPLOLDOHVGLI¿FLOHVVFRODULWpGpIDLOODQWHFK{PDJHSHUVLVWDQWKDELWDW dégradé, perspectives individuelles sans lendemain… rendent nécessaires l’éducation, la responsabilisation, l’accompagnement et l’encadrement GHVVXSSRUWHUVOHVSOXVGDQJHUHX[$SSUpKHQGpHQWDQWTXHPDQLIHVWDWLRQ d’un dérèglement social, le hooliganisme appelle un mode de prise en charge total. Partageant leur vie, des éducateurs spécialisés assurent une présence quasi continue auprès des jeunes et s’appliquent à développer de nombreuses activités socioéducatives et socioculturelles susceptibles de FDQDOLVHUOHXUpQHUJLHUpGDFWLRQHWSXEOLFDWLRQGXIDQ]LQHPDJD]LQHGX groupe), création et organisation d’un site électronique propre, gestion du fan home ©VLqJHVRFLDOªGXJURXSHGHVWLQpjGHYHQLUOHSRLQWGHUHQFRQWUH des acteurs publics et privés intéressés par le bon déroulement des matchs.

$PELWLHXVHFHWWHRSWLRQVRFLRSUpYHQWLYHDI¿FKHXQELODQGLYHUVHPHQW apprécié. Les acteurs supportéristes insistent sur les limites et les contre- SDUWLHVTXLDIIHFWHQWOHGLVSRVLWLI©/H fan coaching n’est pas une réussite [disent les supporters du Standard de Liège]. Ils veulent édulcorer l’es- VHQFHPrPHGHVXOWUDV>«@&¶HVWXQFHQWUHDpUpSRXUDGXOWHVª5L]]LWHOOLHW -HDQQHV/HVFULWLTXHVWRXFKHQWDX[IRQGHPHQWVGXSURJUDPPH auquel il est reproché d’opérer le détournement et l’instrumentalisation du supportérisme. Sous le couvert de reconnaissance de l’engagement militant envers les équipes, le fan coaching serait une forme de contrôle réservé à une population qui échappe à l’encadrement social traditionnel. Plus en- core, par sa forte dimension occupationnelle, il génèrerait la passivité des jeunes qui se comporteraient en consommateurs de spectacles sportifs et

/DSUpYHQWLRQVLWXDWLRQQHOOHSRXUVXLWTXDQWjHOOHG¶DXWUHVREMHFWLIV%DVVRQ/H1Rp

HW'LD]/DQGDXHU

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seraient ainsi maintenus dans une logique de paternalisme social. A cette ambiguïté originelle, viendrait s’ajouter une suspicion envers les éduca- WHXUVVRXSoRQQpVGHVHUYLULQGLUHFWHPHQWOHVLQWpUrWVGHVVHUYLFHVGHSROLFH Moins controversée, une dernière appréciation est partagée par les suppor- WHUVHWOHVDFWHXUVSXEOLFVHQFKDUJHGXSURJUDPPHO¶HVVRXIÀHPHQWYRLUH l’obsolescence, de ce dernier serait le fait du renouvellement conjugué des JpQpUDWLRQVGHVXSSRUWHUVHWG¶pGXFDWHXUVVRFLDX[$FHMRXUOHGLVSRVLWLI GHPHXUHXQLTXHPHQWj&KDUOHURLHW/LqJH)LQFRHXU

Le supportérisme ultra comme lieu du politique

(QYHUWXGXSULQFLSHVHORQOHTXHO©O¶DFWLRQGHVGHVWLQDWDLUHVEpQp¿FLDLUHV de la politique ou du programme est aussi structurante» (Lascoumes et Le

*DOqVOHVDFWHXUVVXSSRUWpULVWHVHQWHQGHQWDFFpGHUDX[UpVHDX[

SXEOLFVD¿QG¶\IDLUHYDORLUOHXUUpSHUWRLUHG¶DFWLRQFROOHFWLYH/¶DPELWLRQ de pénétrer les arcanes de l’action publique en train de se faire repose VXUO¶DI¿UPDWLRQGHVUHVVRXUFHVSURSUHPHQWSROLWLTXHVGRQWGLVSRVHQWOHV groupes de supporters.

Tribune(s) politique(s)

3UHQGUH OHXU SDUW GH OD Gp¿QLWLRQ HW GH OD PLVH HQ °XYUH GHV SROLWLTXHV

publiques qui leur sont destinées suppose, en premier lieu, de dépasser

ODUHFRQQDLVVDQFHGHOHXUFDSDFLWpjSROLWLVHUPrPHGHIDoRQ©OLPLWpHHW

VRPPDLUHª+RXUFDGHOHVWULEXQHVGHVVWDGHV'HPrPHTXH

0DXULFH 'XYHUJHU QRWDLW TXH ©OD SOXSDUW GHV pWXGHV UHODWLYHV DX[ SDUWLV

SROLWLTXHVV¶DWWDFKHQWVXUWRXWjO¶DQDO\VHGHOHXUVGRFWULQHVª

OHV PDQLIHVWDWLRQV GHV LGpHV HW FUR\DQFHV SUpVHQWpHV FRPPH UXGLPHQ-

taires et peu structurées, portées par la nébuleuse des associations sup-

portéristes retiennent principalement l’attention des chercheurs. Ainsi les

débats se focalisent-ils sur la situation respective des différents groupes

VXUXQD[HGURLWHJDXFKHVXUO¶LQ¿OWUDWLRQHWO¶HQWULVPHUpHOVRXVXSSRVpV

GRQW FHUWDLQV VRQW O¶REMHW RX VXU O¶XVDJH HW OD VLJQL¿FDWLRQ GH OD UKpWR -

ULTXHGHVVORJDQVGpQRPLQDWLRQVFKDQWVUpIpUHQFHVV\PEROHVPDUTXHV

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HPEOqPHVHWVLJQHVFDEDOLVWLTXHVOHVSOXVGLYHUVDWWHVWDQWODSUR[LPLWpOH UDOOLHPHQWYRLUHO¶DI¿OLDWLRQRULJLQHOOHjWHOOHRXWHOOHUDPL¿FDWLRQVXOIX- reuse débordant le cadre des tribunes et les frontières nationales (Bodin et DO%XVVHWHWDO6LFHWWHOHFWXUHDFFRUGHXQH©IRQFWLRQ WULEXQLWLHQQHª /DYDX DX[ JURXSHV VXSSRUWpULVWHV HOOH UHSRVH VXU une conception idéaliste de la politique entendue comme combat pour les JUDQGHV FDXVHV 6RQW FRQVLGpUpHV j FHWWH DXQH FRPPH ©SROLWLTXHVª OHV DVVRFLDWLRQVGHVXSSRUWHUVTXLSDUYLHQQHQWjGpSDVVHUOHVFRQÀLWVG¶LQWp- UrWVSDUWLFXOLHUVQpFHVVDLUHPHQWFRUSRUDWLVWHVYRLUHWULYLDX[HWPHVTXLQV telles les revendications de suppression des places assises dans les virages des stades ou de modération des tarifs des abonnements) et à s’inscrire dans la recherche d’une cause commune guidée par un mobile éthique WpPRLJQDQWG¶XQHLQFOLQDLVRQSRXUOHVSURMHWVGHVRFLpWpJOREDX[IXVVHQW LOV G¶LQVSLUDWLRQ QpRIDVFLVWH 2U OH UDSSRUW GH FHUWDLQV VXSSRUWHUV ©j OD SROLWLTXHª HW SOXV IRQGDPHQWDOHPHQW ©DX SROLWLTXHª VHPEOH GpSDVVHU O¶HPSUXQWSOXVRXPRLQVUHWUDYDLOOpGH¿JXUHVHWFUR\DQFHVLGpRORJLTXHV importées des cadres traditionnels.

Les échelles de la participation politique des supporters

$XGHOjGHFHSUHPLHUUHOHYpSRXUTXRLQHSDVFRQFpGHUDX[JURXSHVGH VXSSRUWHUVODFDSDFLWpjV¶RUJDQLVHUVHORQGHVSULQFLSHVSROLWLTXHV'pFUL - YDQWGDQVXQGpYHORSSHPHQWLQWLWXOp©ODPRELOLVDWLRQªOHVPHPEUHVGX

&RPPDQGRXOWUD&XUYD%GXVWDGHGH1DSOHVFRPPHGHVDFWLYLVWHVPR - GHUQHV SURIHVVLRQQHOV HW SDUIDLWHPHQW RUJDQLVpV &KULVWLDQ %URPEHUJHU ouvre la voie en ce sens (1995: 29-37). Son investigation du monde des

©PLOLWDQWVªVXSSRUWpULVWHVVHORQOHWLWUHGHVRQFKDSLWUHOXL SHUPHWGHGUHVVHUOHXUVFDUDFWpULVWLTXHVHVVHQWLHOOHV¿GqOHV

LOVDI¿FKHQWGHVDWWLWXGHV>«@DYDQWJDUGLVWHVFXOWLYHQWXQVHQVDLJXGHODVSHFWDFX- larité médiatique, organisent souvent leurs associations sur un mode managérial et recherchent, à travers leurs pratiques, tout autant à défendre une cause commune qu’à s’accomplir personnellement (Bromberger 1995: 241).

0DLVLO\DSOXV5HOHYDQWTX¶HQ©,WDOLHHWHQ)UDQFHOHVXOWUDVIRUPHQW

fréquemment des associations rigoureusement structurées, disposant d’un

local, distribuant des cartes d’adhérents, encaissant des cotisations, pla-

QL¿DQW VRXUFLOOHXVHPHQW OD GLYLVLRQ GHV WkFKHV PLOLWDQWHVª %URPEHUJHU

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1995: 242-243), VRQpFKHOOHGHSDUWLFLSDWLRQDXJURXSHGLVWLQJXDQWV\PSD - WKLVDQWVDGKpUHQWVPLOLWDQWVHWOHDGHUVUHQYRLHjODWD[LQRPLHFODVVLTXHHQ VFLHQFHSROLWLTXHpODERUpHSDU0DXULFH'XYHUJHUSRXUFODVVL¿HUOHVVWUXF - WXUHVRUJDQLVDWLRQQHOOHVGHVSDUWLVSROLWLTXHVHWGHVV\QGLFDWV$QGROIDWWR HW/DEEp6HORQODW\SRORJLHGUHVVpHSDUFHGHUQLHUVLOHVRUJD - QLVDWLRQV RI¿FLHOOHV GH VXSSRUWHUV SDUWDJHQW GH QRPEUHX[ WUDLWV DYHF OHV

©SDUWLVGHFDGUHVª%DVVRQHW1X\WHQVOHVJURXSHVRUJDQLVpVG¶XOWUDV SHXYHQWrWUHUDSSURFKpVGHV©SDUWLVGHPDVVHª2UJDQLVDWLRQVFHQWUDOLVpHV SUHQDQWDSSXLVXUXQHFHOOXOHGHEDVHFHVGHUQLHUVGHVVLQHQWGHV©FHUFOHV FRQFHQWULTXHVª DOODQW VH UHVVHUUDQW HW FRUUHVSRQGDQW j TXDWUH ©GHJUpV GH participation» distincts qui comprennent, respectivement, les électeurs, OHVV\PSDWKLVDQWVOHVDGKpUHQWVHWOHVPLOLWDQWV'X©VSHFWDWHXUpOHFWHXUª DX ©VXSSRUWHUPLOLWDQWª HQ SDVVDQW SDU O¶©DPDWHXUV\PSDWKLVDQWª HW O¶©DERQQpDGKpUHQWªWHOOHsocio espagnol), nul doute que les tribunes des VWDGHVSUpVHQWHQWXQHODUJHJDPPHGHPRGDOLWpVGHPRELOLVDWLRQUHQYR\DQW au monde du politique. Attester la diversité de la composition des publics GHV VWDGHV HVW XQH FKRVH 0LJQRQ +RXUFDGH %RGLQ 1X\WHQV%URPEHUJHUHW/HVWUHOLQ 129, Hourcade 2010a: 164-165), dégager les différents degrés de participa- tion structurant les organisations supportéristes en est une autre.

Le supportérisme ultra comme mouvement social

5HFRQQDvWUH©TX¶RQQHVHVDLWSDVVLO¶pWDWGXVXSSRUWpULVPHDXWRQRPHGp - pend de facteurs organisationnels» implique de discuter l’assertion selon ODTXHOOH©OHVXSSRUWpULVPHLQGpSHQGDQWQHV¶DFFRPPRGHSDVG¶XQHGLYL - VLRQGHO¶HQJDJHPHQWªHWGHUpFXVHU©TX¶LOQHVRLWSDVTXHVWLRQLFLG¶XQ PRXYHPHQWVRFLDOGHW\SHFRQWHVWDWDLUHG¶XQHDFWLRQFROOHFWLYHVWUXFWXUpH DXWRXUG¶XQHVLWXDWLRQFRQÀLFWXHOOHª1X\WHQVHW1H pensant pas

pouvoir comparer le militantisme sportif […] à d’autres participations individuelles classiques à l’action collective […], comme celles d’agents des partis politiques ou G¶DFWHXUV UpXQLV SDU H[HPSOH GDQV GHV FROOHFWLIV RX GDQV GHV JURXSHV FRQWHVWDWDLUHV 1X\WHQV

ODUpWLFHQFHjDGPHWWUHOHSURFHVVXVGHTXDOL¿FDWLRQSROLWLTXHGXVXSSRUWp-

ULVPHXOWUDV¶H[SOLTXHDLVpPHQW0DLQWHQXDX[PDUJHVGHVDUqQHVSXEOLTXHV

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DXSUpWH[WHTX¶LOUHOqYHGXGRPDLQHVSRUWLIFRQoXFRPPH©XQHVSDFHDXWR - nome doté de ses propres règles et de ses propres organes d’arbitrage entre LQWpUrWVGLYHUJHQWVª'HIUDQFH'HIUDQFHLOHVWHQWDFKpGH O¶DIIURQWTX¶LODGUHVVHDX[YHUWXVFDUGLQDOHVSUrWpHVDXVSRUW©8QHYDOHXU GXUDEOHGHODFXOWXUHVSRUWLYH>pWDQW@O¶DSROLWLVPHª'HIUDQFH lui consentir l’apposition d’un sens politique revient, de fait, à remettre en FDXVHOD©YRORQWpGHUpVRXGUHO¶DQWDJRQLVPHGHVFODVVHVSDUXQHUpFRQFL - OLDWLRQVXUOHWHUUDLQGHVORLVLUVª'HIUDQFH&¶HVWDLQVLTX¶LOHVW tentant de ne retenir que la dimension ludique et délassante du suppor- WpULVPHHWGH©UDLVRQQDEOHPHQWHQYLVDJHUGH>OH@SHQVHUHQFRQFXUUHQFH avec la pratique muséale, la visite d’autres sites culturels et touristiques, OHVSURPHQDGHVGDQVOHVSDUFVHWOHVEDVHVQDXWLTXHV«ª1X\WHQV 160-161).

Le passage du supportérisme organisé au politique emprunte pourtant des formes traditionnelles

⁴

. Ainsi participe-t-il activement à l’alimentation GX V\VWqPH SROLWLTXH ,O HVW HQ SUHPLHU OLHX XQ HVSDFH GH VRFLDOLVDWLRQ politique et d’encadrement d’une jeunesse trouvant là l’occasion de se IRUPHUDX[URXDJHVGHODYLHFROOHFWLYH%URPEHUJHU(WLHQQHHW*XpULQ (Q HIIHW QRPEUHX[ VRQW OHV H[HPSOHV TXL DWWHVWHQW TX¶LO HVW XQH instance d’éducation populaire, d’apprentissage de l’action collective, de construction d’une vision du monde, de façonnement d’une identité VRFLDOHGHSDUWDJHG¶H[SpULHQFHVGHUHFUXWHPHQWSDUFRRSWDWLRQHWSDU- rainage), de sélection (par rites d’initiation et rites de passage) et de circu- ODWLRQG¶pOLWHVPLOLWDQWHVFKDULVPDWLTXHVLQYHVWLVVDQWjWHUPHOHVUpVHDX[

d’action publique. Il travaille également à l’agrégation des demandes et GHVUHYHQGLFDWLRQVjO¶DUWLFXODWLRQGHVLQWpUrWVjODPRELOLVDWLRQGHVVRX- tiens ainsi qu’à la formulation publique et à la traduction politique des revendications d’une partie de la jeunesse; le tout à l’échelle européenne, territoire pertinent de la géographie politique du football, qui apparaît de SOXVHQSOXVFRPPH©OHOLHXRVRQWIRUPXOpHVHWRV¶DIIURQWHQWOHVGLIIp- UHQWHVTXDOL¿FDWLRQVGHVSUREOqPHVHWRHVWGp¿QLHODSDOHWWHGHVVROXWLRQV VXUOHVTXHOOHVOHVGLIIpUHQWVDFWHXUVYRQWHQWUHUHQFRQÀLWRXHQQpJRFLD- WLRQª0XOOHUHW6XUHO

/HUpSHUWRLUHG¶DFWLRQFROOHFWLYHGHVXOWUDVHXURSpHQVFRPSUHQGHQ¿Q des modalités de représentation, des formes de mobilisation, des registres G¶H[SUHVVLRQ HW GHV VFKpPDV G¶LQWHUYHQWLRQ UHQRXYHOpV OXL SUrWDQW OHV

/DSDUWLFLSDWLRQDFWLYHGHVVXSSRUWHUVXOWUDVVXUFHUWDLQHVVFqQHVGX©SULQWHPSVDUDEHª

atteste que le processus n’est pas propre au cadre européen.

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caractéristiques d’un mouvement social à part entière

⁵

. Il constitue ain- VLXQHIRUPHRULJLQDOHGHV©QRXYHDX[106ª%DVVRQE 1pV GDQV OH VLOODJH GH PDL OHV ©QRXYHDX[ PRXYHPHQWV VRFLDX[ª 106VRQWGRWpVG¶XQHIRUWHDVSLUDWLRQLGHQWLWDLUHHWFXOWXUHOOH6¶LQVFUL- YDQWGDQVODUHOqYHGXPRXYHPHQWRXYULHU7RXUDLQHHWDOLOVVH GpYHORSSHQWKRUVGHVPLOLHX[SURIHVVLRQQHOVGpERUGHQWOHUpSHUWRLUHGHV thèmes traditionnels, rassemblent (parfois de façon éphémère) des acteurs VRFLDX[pFKDSSDQWHQJUDQGHSDUWLHDX[RUJDQLVDWLRQVSDUWLVDQHVHWV\QGL- FDOHVQ¶REpLVVHQWSDVDX[PRGDOLWpVG¶DFWLRQGHFHVGHUQLqUHVHWUHFRXUHQW à des formes singulières de mise en scène. Inspirés de ces derniers, la liste HVWORQJXHGHV©QRXYHDX[106ªLQWHUYHQDQWDFWXHOOHPHQWWDQWDXQLYHDX QDWLRQDOTX¶jO¶pFKHOOHHXURSpHQQHHWLQWHUQDWLRQDOH&UHWWLH]HW6RPPLHU 2006). Luttant contre le racisme, prônant la défense de l’environnement, le développement durable ou la redistribution des ressources selon une vi- VLRQDOWHUPRQGLDOLVWH$JULNROLDQVN\HWDORX©LQGLJQpHªLOVFRQVWL - tuent des facteurs de transformation des modes routinisés d’engagement dans la sphère publique. Adoptant des formes réticulaires d’organisation, pODUJLVVDQWODSRUWpHGHVPRELOLVDWLRQVMXVTX¶jO¶pFKHOOHJOREDOH3OH\HUV IDYRULVDQWO¶pPHUJHQFHGHQRXYHDX[DFWHXUVGpYHORSSDQWXQXVDJH intensif des nouvelles technologies de la communication (Granjon 2001), RUFKHVWUDQWODPpGLDWLVDWLRQGHODGUDPDWXUJLHGHVFRQÀLWVLOVGHVVLQHQW les contours d’un mouvement social publicisé et transnational d’un genre nouveau auquel le supportérisme ultra contribue par les ressources poli- tiques qu’il recèle. Sa capacité à dépasser les revendications des tribunes pour les ouvrir à des causes générales (telles la valorisation de la culture populaire, la défense des libertés individuelles et la lutte contre les usages technologiques du contrôle social qui opèrent dans les stades), sa faculté à entretenir une forme de résistance à l’uniformisation et à la marchandisa- tion de ce bien commun qu’est le sport (telles qu’illustrées par le spectacle mondialisé du football) en mettant en œuvre des manifestations festives KDXWHPHQWGpPRQVWUDWLYHVHWH[SUHVVLYHVYRLUHYLROHQWHVHWGHVWUXFWULFHV prennent place dans l’espace public perçu comme un territoire à recon- quérir.

Si ce mouvement social n’advient pas à ce jour c’est que le cadre d’in- terprétation dominant du supportérisme emprunte à une perception socio- FRJQLWLYHQpJDWLYHGXSKpQRPqQH5HSUpVHQWpQRPPpTXDOL¿pHWGp¿QL

6XUO¶DQDO\VHGHVWUDQVIRUPDWLRQVGXV\VWqPHHXURSpHQGHUHSUpVHQWDWLRQGHVLQWpUrWV

YRLU%DOPHHWDO*UHHQZRRGHW$VSLQZDOO

(10)

HQXQPRWFDWpJRULVpHQWDQWTXHULVTXHVRFLDOVSpFL¿TXHVRQLQVFULSWLRQ dans le débat public opère par la médiatisation des faits divers (l’usage GHVLPDJHVHWGHVWpPRLJQDJHVHVWVLJQL¿FDWLISDUODSUDWLTXHGHO¶DPDO - JDPHDYHFKRROLJDQLVPH©YLROHQFHVXUEDLQHVªRXWHUURULVPHHWSDUOD VXUHQFKqUH VXU VRQ DPSOHXU VHV UDPL¿FDWLRQV HW VD GDQJHURVLWp +RXU - cade 2010b, Lestrelin 2012). La sauvegarde de l’ordre public, la défense GH O¶LQWpUrW JpQpUDO HW OD SUpVHUYDWLRQ GH ©O¶pWKLTXH VSRUWLYHª VRQW DORUV FRQYRTXpHVSRXUMXVWL¿HUXQHLQWHUYHQWLRQUDGLFDOHHQYXHGHUpSULPHUOH SKpQRPqQH8QHVpULHGHJHVWHVV\PEROLTXHVHWG¶HIIHWVG¶DQQRQFHDFFp - lèrent la mise sur agenda et autorisent le déploiement d’un large dispositif (réglementaire, législatif, judiciaire et policier) de répression du supporté- ULVPHWDQWjO¶pFKHOOHQDWLRQDOHTXHFRPPXQDXWDLUHHWLQWHUQDWLRQDOH'LV- TXDOL¿pHVSDUOHVPRGDOLWpVGHFRQVWUXFWLRQGXVXSSRUWpULVPHHQWDQWTXH SUREOqPHSXEOLF3DGLROHDXOHVRUJDQLVDWLRQVGHVXSSRUWHUVQ¶RQW G¶DXWUHFKRL[TXHV¶LQWHUURJHUVXUOHVFRQGLWLRQVGHODPLVHHQSROLWLTXHGH ODFDXVHVXSSRUWpULVWHTXLjFHMRXUGHPHXUH©RUSKHOLQHª/DPHLOOHXUH façon d’en rendre compte consiste à multiplier les investigations empi- ULTXHVGHWHUUDLQD¿QGHUHVWLWXHUOD©¿EUHPLOLWDQWHªTXLVHGRQQHjYRLU ici et là et l’ambition politique qui l’anime.

'HO¶LQWpUrWGHVPRQRJUDSKLHVOH3URJHWWRXOWUjGH%RORJQH (Italie)

([SORUHUO¶(XURSH>GHVVXSSRUWHUV@©SDUOHEDVª>«@>UHYLHQWj@HQGRQQHUjYRLUOD G\QDPLTXHGHFRQVWUXFWLRQGDQVVDSURIRQGHXUHWGXSRLQWGHYXHGHVDFWHXUVVRFLDX[

TXL\VRQWFRQIURQWpVRXTXLHQIRQWXVDJH3DVTXLHUHW:HLVEHLQ

A ce titre, le Progetto ultrà présente des ressources qui lui permettent de

UHMRLQGUHOHJLURQGHV©HQWUHSULVHVG¶DFWLRQFROOHFWLYHª&HIDw

PRELOLVpHV HQ FH GRPDLQH &UppH j %RORJQH HQ O¶DVVRFLDWLRQ LQ -

YRTXHODGp¿FLHQFHGHVSROLWLTXHVSXEOLTXHVQDWLRQDOHVHWHXURSpHQQHVHW

VHSURSRVHGHOHVVXSSOpHU%DVVRQHW/HVWUHOLQ$LQVLUHOqYHWHOOH

que le processus d’européanisation de l’action publique tend à normaliser

les modalités de prise en charge du supportérisme et en vient à nier les

H[SpULHQFHVQpHVGHODSULVHHQFRPSWHGHVVLQJXODULWpVORFDOHV$FHWLWUH

(11)

le supportérisme ultra, majoritaire en Italie (Bromberger 1995, Roversi et Balestri 2000, Louis 2006), repose sur des pratiques associatives et mili- WDQWHVGHUpJXODWLRQLQWHUQHDX[JURXSHVGH tifosi peu compatibles avec un référentiel d’action publique inspiré du principe de gestion des risques.

3DUDGR[DOHPHQWODOLWDQLHGHVGUDPHVPDUTXDQWO¶DFWXDOLWpGXIRRWEDOOLWD - lien renforce cette conviction dans la mesure où l’atomisation du mouve- ment supportériste organisé est rendue responsable de la banalisation du UHFRXUVjODYLROHQFH'DQVFHFRQWH[WHOH3URJHWWRXOWUjLQFDUQHXQS{OH GH VWDELOLWp j PrPH G¶XQH SDUW GH ¿OWUHU HW G¶DJUpJHU OHV GHPDQGHV HW G¶DXWUHSDUWG¶DVVXUHUXQPRGHG¶H[SUHVVLRQHWGHVGpERXFKpVDX[UHYHQ- dications des supporters.

Rejetant un modèle répressif inadapté à la réalité italienne, les res-

ponsables associatifs de Bologne ne retiennent pas davantage les options

sociopréventives promues par la Belgique. Ils insistent sur l’ambiguïté

IRQGDPHQWDOHTXLOHVFDUDFWpULVH%DVVRQHW/HVWUHOLQ©3RXUPRL

le fan coaching n’a rien à voir avec ce que nous faisons. En Belgique,

ce n’est rien d’autre qu’un travail avec la police: il faudrait appeler ça

du police coaching /H WUDYDLO VRFLDO HQ SkWLW /¶DSSURFKH JpQpUDOH HVW

VXVSHFWHª H[SOLTXH$VKOH\ *UHHQ XQ GHV SHUPDQHQWV /H UHMHW GX SUR -

JUDPPH LQLWLp HQ %HOJLTXH V¶DFFRPSDJQH G¶XQH ¿OLDWLRQ V\PEROLTXH j

XQH PRELOLVDWLRQ DVVRFLDWLYH GX PrPH RUGUH RULJLQDLUH G¶XQ DXWUH SD\V

HXURSpHQ 8QLYHUVLWDLUH FRIRQGDWHXU GH O¶DVVRFLDWLRQ GH %RORJQH &DUOR

Balestri reconnaît que l’organisation italienne a pris le nom de Progetto

XOWUj HQ UpIpUHQFH DX[ Fanprojekte allemands. Les responsables italiens

SUrWHQWGHX[YHUWXVGLVWLQFWLYHVjFHVRUJDQLVDWLRQV$QWpULHXUHVDX[DVVR -

FLDWLRQVEHOJHVHOOHVVRQWOLEpUpHVGHO¶HPSULVHSROLFLqUH©(Q$OOHPDJQH

un universitaire, un sociologue, un éducateur ou un supporter respecté

SHXYHQWrWUHjODWrWHGHV FanprojekteªVSpFL¿H$VKOH\UHHQ'DQVOHV*

IDLWVOH3URJHWWRXOWUjSU{QHXQH©DSSURFKHSUpYHQWLYHSURFKHGXWUDYDLO

de rue et du social work» soucieuse d’éviter la stigmatisation et associant

les groupes de supporters à l’élaboration et à la mise en œuvre des pro-

JUDPPHV TXL OHXU VRQW GHVWLQpV ,O V¶DJLW GLW HQFRUH$VKOH\ *UHHQ ©GH

respecter et de valoriser la culture populaire» dont ils sont porteurs. Ainsi

OHVORFDX[GHO¶DVVRFLDWLRQIRQWLOVRI¿FHGHFHQWUHGHGRFXPHQWDWLRQVXU

les supporters et de conservatoire de la culture ultra présentant ouvrages

HWWUDYDX[XQLYHUVLWDLUHVG¶XQHSDUWHWIDQ]LQHVpFKDUSHVSKRWRJUDSKLHV

DI¿FKHVWUDFWVWDPERXUVRXHQFRUHEDQQLqUHVG¶DXWUHSDUW

(12)

Expertise militante et citoyenneté ordinaire

1LFDVVRFLDX[QLGpYLDQWVOH3URJHWWRXOWUjHQWHQGFRQVLGpUHUOHVVXSSRU - ters pour ce qu’ils sont et ne pas les inviter à la conversion. L’entreprise se garde des tentations normatives et compassionnelles et s’applique, dans OHUHVSHFWGXGURLWjSUpVHUYHUDI¿UPHUHWVSpFL¿HUOHXULGHQWLWp/¶DVVR- ciation de Bologne propose ainsi d’opérer un changement de la perception publique du supportérisme et de rompre avec la logique de sauvegarde FRQWUHOHULVTXHTX¶LOLQFDUQHUDLW'HSOXVOH3URJHWWRXOWUjHQWHQGIDLUHSUp - YDORLUTXH©OHVPRELOLVDWLRQVFROOHFWLYHVFRQVWLWXHQWGHVODERUDWRLUHVG¶DF- WLRQSXEOLTXHª&HIDw6LODFLWR\HQQHWpRUGLQDLUHH[SULPpHSDU OHVVXSSRUWHUVHWOHVVDYRLUVSURIDQHVQHYDOHQWSDVGHIDLWH[SHUWLVHVLOV contribuent à la construction de l’ordre social supportériste et orientent les conduites et les comportements. Maîtrisant ainsi les conditions sociales de mise en œuvre de l’action publique concernant les supporters, les cadres associatifs de Bologne aspirent à peser sur les actes de gouvernement.

Espace non savant de production, d’accumulation, d’usages et de circu- ODWLRQGHVDYRLUVHWGHFRPSpWHQFHVVSpFL¿TXHVOH3URJHWWRXOWUjWUDGXLW par un travail de transmutation, la contre-culture protestataire incarnée par les supporters en un levier original de modernisation de l’action publique 5REHUW&RQWULEXDQWjODFRQVWUXFWLRQVRFLDOHGXVXSSRUWpULVPHHQ tant que problème public, l’ambition suppose d’attester un fort ancrage VRFLDOHWXQHFRQQDLVVDQFHLQWLPHGXPLOLHXXOWUDWRXWHQDI¿FKDQWODFDSD - FLWpjV¶HQH[WUDLUHSRXUrWUHjPrPHGHVRXPHWWUHODYXOJDWHVXSSRUWpULVWH DX[ IRUPHV HW DX[ H[LJHQFHV GHV SROLWLTXHV SXEOLTXHV 5pVHDX K\EULGH O¶DVVRFLDWLRQLWDOLHQQHV¶DI¿FKHWDQW{WFRPPHXQ©REVHUYDWRLUHVRFLDOGX supportérisme», tantôt comme la garde avancée d’un mouvement social FULWLTXHHWSURGXFWHXUG¶XQHFRQWUHH[SHUWLVHPLOLWDQWH/H3URJHWWRXOWUj HVWDLQVLjPrPHG¶HQWUHUHQSROLWLTXHHWGHFRQWULEXHUjEkWLUGHV©FRDOL - WLRQVGHFDXVHª6DEDWLHUHW-HQNLQV6PLWKGRQWOH©PLOLWDQWLVPHGHV tribunes» est un des tenants.

©3DUWHQDLUH VRFLDOª GH OD QpJRFLDWLRQ HW ©HQWUHSUHQHXUª GH OD FDXVH

VXSSRUWpULVWH O¶DVVRFLDWLRQ LWDOLHQQH HVW j OD UHFKHUFKH GHV ©VWUXFWXUHV

d’opportunités» lui permettant de faire aboutir ses options. Malaisée, la

IRQFWLRQ GH V\QWKqVH GH VpOHFWLRQ HW GH WUDQVSRVLWLRQ SROLWLTXH GHV PRWV

d’ordre et des revendications des supporters est le propre de l’organisation

LWDOLHQQH TXL HQWHQG WURXYHU Oj XQ JDJH GH OpJLWLPLWp WDQW DX[ \HX[ GHV

DVVRFLDWLRQVXOWUDVTXHGHVSRXYRLUVSXEOLFV/¶H[HUFLFHHVWGpOLFDWWDQWOH

(13)

risque est grand de ne satisfaire ni les unes ni les autres et de se trouver GLVFUpGLWpHSDUGHX[HQWLWpVDX[LQWpUrWVVRXYHQWLQFRQFLOLDEOHV/¶H[SHUWLVH associative et militante du Progetto ultrà tient alors à sa capacité à rappro- cher ou, si besoin, à arbitrer les différentes options en présence. A ce titre, VRQDWRXWSULQFLSDOFRQVLVWHjIDLUHYDORLUTXHOHVH[SpULHQFHVDOWHUQDWLYHV et les réalisations concrètes nées de la confrontation directe au terrain sup- portériste ne viennent pas concurrencer l’action publique mais compléter, YRLUHSDOOLHUGHVURXWLQHVLQVWLWXWLRQQHOOHVGp¿FLHQWHVHWJpQpUDQWGHVHIIHWV pervers. Testées localement, ces bonnes pratiques sont susceptibles de faire SUHXYHG¶DGDSWDWLRQjG¶DXWUHVHQYLURQQHPHQWVHWGHVHSUrWHUjXQHIRUPH de généralisation que les acteurs publics peuvent reprendre à leur compte pour réinvestir un espace social qui leur échappe grandement.

Ennoblissement de la cause supportériste: l’antiracisme

&RXUDPPHQWVRXSoRQQpGHWUDYDLOOHUjODWUDGXFWLRQSROLWLTXHG¶LQWpUrWV SDUWLFXOLHUVOH3URJHWWRXOWUjGRLWIRXUQLUODSUHXYHTXHO¶H[SHUWLVHGRQWLO HVWSRUWHXUVHUWXQHODUJHDPELWLRQ,OOXLIDXWDORUV©PRQWHUHQJpQpUDOLWpª HWDWWHVWHUTXH©OHVPRXYHPHQWVVRFLDX[QHVHOLPLWHQWSDVjGHVUHYHQGL- FDWLRQVSDUWLFXODULVWHVPDLVSUpWHQGHQWYLVHUGHVELHQVTXLVRQWSUR¿WDEOHV DXSOXVJUDQGQRPEUHVLQRQjWRXVª&HIDw,OWURXYHDORUVXQ motif d’ennoblissement de la cause supportériste dans son inscription dans ODOXWWHFRQWUHOHUDFLVPH&KDUJpHGHSURMHWVjODGLUHFWLRQQDWLRQDOHGH l’Unione italiano sport per tutti (une fédération multisports à forte conno- tation éducative qui accueille en son sein les activités du Progetto ultrà), 'DQLHOD&RQWLGpFODUH©/H3URJHWWRXOWUjDGHX[SULQFLSDX[REMHFWLIVOXW - ter contre la violence et lutter contre le racisme. Etre antiraciste, ce n’est pas faire de la politique: ce sont les droits humains qui sont directement FRQFHUQpVª6LO¶DUJXPHQWDLUHQHVXI¿WSDVjOHYHUOHVFULWLTXHVGHFHUWDLQV groupes ultras reprochant à l’association son orientation socialisante, le supportérisme se voit ainsi reconnu cause générale de mobilisation par les buts ultimes qu’il poursuit. Qui plus est, il assure une fonction stratégique d’alerte publique.

Le problème du racisme est apparu dans le football avant que nous ne le rencontrions

GDQVQRWUHVRFLpWp/HVVWDGHVDQWLFLSHQWFHUWDLQVSUREOqPHVVRFLDX[6LYRXVrWHVELHQ

LQIRUPpVVXUFHTXLVHSDVVHGDQVOHVVWDGHVYRXVrWHVG¶DXWDQWPLHX[SUpSDUpVjJpUHU

ces problèmes dans l’ensemble de la société

(14)

SRXUVXLW'DQLHOD&RQWL(WG¶pJUHQHUOHVQRPEUHXVHVH[SpULHQFHVUHOD\pHV par le Progetto ultrà qui, sur l’ensemble du territoire italien, témoignent d’une forme d’intervention sociale avant-gardiste:

A Pérouse, ils ont entendu, en 2000, des cris de singe dans le stade. Ils ont distribué des WUDFWVGHPDQGDQWDX[VSHFWDWHXUVGHFRXYULUFHVPDQLIHVWDWLRQVUDFLVWHVSDUGHVFKDQWV HWGHVDSSODXGLVVHPHQWV$SUqVWURLVVHPDLQHVF¶pWDLW¿QL'HPrPHOHVVXSSRUWHUVGH 0RGqQHSURSRVHQWHQOLHQDYHFODPXQLFLSDOLWpGHVSURMHWVDQWLUDFLVWHVDX[pFROHVHW ont créé un centre de documentation sur ce thème. A Ancône, les supporters ont ouvert une hot line à destination des immigrés et font un gros travail social avec les différentes FRPPXQDXWpVGHODYLOOH(Q¿QLO\DGHVH[SpULHQFHVGXPrPHRUGUHj(PSROLHWj Pise, notamment…

/D P\ULDGH G¶LQLWLDWLYHV GpYHORSSpHV ORFDOHPHQW VHORQ OH UpVHDX GHV JURXSHV GH VXSSRUWHUV VHQVLEOHV DX[ YLVpHV GH O¶DVVRFLDWLRQ QDWLRQDOH trouvent une forme de parachèvement, une fois l’an, à l’occasion de la tenue du Mondial antiraciste organisé depuis 1997 par le Progetto ultrà, assisté de l’Institut d’histoire de la résistance et des sociétés contempo- raines. Evènement phare et ressource emblématique de l’organisation, le Mondiali antirazzisti autorise, tous les étés dans les environs de Bologne, OD PLVH HQ VFqQH GHV DFWLYLWpV GH O¶DVVRFLDWLRQ HW SHUPHW G¶DI¿FKHU OH UD\RQQHPHQWORFDOQDWLRQDOHWLQWHUQDWLRQDOGHVHVPXOWLSOHVSDUWHQDLUHV FRQWDFWV HW UHODLV ©/¶LGpH LQLWLDOH pWDLW VLPSOH UDVVHPEOHU GHV JURXSHV de supporters et des communautés immigrées perçues comme crimino- JqQHVDXWRXUGHPDWFKVGHIRRWEDOOªH[SOLTXH$VKOH\UHHQ$FFXHLOODQW plusieurs milliers de participants, la manifestation est devenue un véri- WDEOHIHVWLYDOSROLWLFRFXOWXUHOGRQW©OHIRRWEDOOQ¶HVWSOXVTX¶XQSUpWH[WHª VHORQ$VKOH\UHHQGpEDWVFRQIpUHQFHVDWHOLHUVGHUpÀH[LRQIRUXPV concerts, présentation de livres et de vidéos, rencontres sportives, cuisine LQWHUQDWLRQDOHFDPSLQJIrWHV«UpXQLVVHQWGHVVXSSRUWHUVGHVPLOLWDQWV DVVRFLDWLIVV\QGLFDOLVWHVHWSROLWLTXHVYHQXVGHWRXWHO¶(XURSH

&RQFOXVLRQ

Sous différentes formes et avec des succès divers, le Progetto ultrà italien,

les Fanprojekte allemands, le fan coaching belge, le Fanarbeit suisse,

(15)

PDLV pJDOHPHQW OH &ROHFWLYR GH SUHYHQFLyQ LQVHUFLyQ VRFLDO $QGDOXFLj GH &iGL] HQ (VSDJQH OH 6YHQVND )RWEROOVVXSSRUWHUXQLRQHQ VXpGRLV RX bien encore, à leurs manières, les socios des penyas espagnoles (abonnés au stade, adhérents du club, ils sont électeurs du président), la fédération )RRWEDOO6XSSRUWHUV(XURSHHWOHVIDQVDQJODLVTXLYLD6XSSRUWHUV'LUHFW tentent de prendre une part minoritaire dans le capital de leur club en fail- OLWHV¶HPSORLHQWjSpQpWUHUOHVDUqQHVSXEOLTXHVD¿QG¶\IDLUHSUpYDORLU leur conception d’un football populaire en voie de disparition. Les mili- tants français ne sont pas en reste: en janvier 2010, le premier congrès national des associations de supporters débouche sur la rédaction du Livre vert du supportérisme (Hourcade et al. 2010); l’association A la nantaise revendique le développement d’un actionnariat populaire inspiré du mo- GqOH DQJODLV OH &ROOHFWLI 626 /LJXH SpWLWLRQQH FRQWUH OH FKDQJHPHQW des horaires des matchs imposé par les télévisions sans tenir compte des disponibilités des spectateurs se rendant dans les stades… Le 13 octobre XQPLOOLHUGHVXSSRUWHUVXOWUDVYHQXVGHWRXWHOD)UDQFHGp¿OHQWGDQV OHV UXHV GH 0RQWSHOOLHU SRXU GpQRQFHU OD ©UpSUHVVLRQ DEXVLYHª GRQW LOV V¶HVWLPHQWYLFWLPHV©1RWUHSDVVLRQOHIRRWEDOO9RWUHSDVVLRQOHÀDVK ball» proclame la bannière des toulousains. A l’occasion d’une série de prises de parole précédant le départ de la manifestation, les organisateurs PRQWSHOOLpUDLQVDQQRQFHQW©1RXVVRPPHVOjSRXUUHYHQGLTXHUOHVGURLWV des supporters, des ultras». Les responsables de l’association parisienne /LEHUWp SRXU OHV DERQQpV SUpFLVHQW ©2Q HVW GHV VXSSRUWHUV RQ HVW GHV XOWUDVRQHVWGHVSDVVLRQQpVPDLVRQHVWGpMjGHVFLWR\HQVª

&HVTXHOTXHVH[HPSOHVGXYDVWHUHJLVWUHG¶DFWLRQVSUpYHQWLYHVTXHOHV RUJDQLVDWLRQV GH VXSSRUWHUV GpYHORSSHQW DFWXHOOHPHQW VRQW j PrPH GH FRQWUDULHUOHVVFKpPDVG¶LQWHUYHQWLRQSXEOLTXHSHXVRXFLHX[GHV©UHVVRU - WLVVDQWVª DX[TXHOV LOV VRQW GHVWLQpV$ FH WLWUH LOV FRPSWHQW SDUPL ©OHV mobilisations associatives constitutives de la genèse d’une société civile HXURSpHQQHTXLVHUDLWjODIRLVXQFRQWUHSRXYRLUDX[LQVWLWXWLRQVHWXQH onction démocratique pour l’Europe» (Pasquier et Weisbein 2004: 9).

Œuvrer à une sociologie politique du supportérisme conjuguant une so-

FLRORJLHGHO¶DFWLRQSXEOLTXH*LUDXGHW:DULQHWXQHVRFLRORJLHGHV

PRELOLVDWLRQV)LOOLHXOHHWDOWRXWHVGHX[VHQVLEOHVjODPLVHDXMRXU

des fondements du processus démocratique contemporain, suppose inves-

WLUFHVGLIIpUHQWVWHUUDLQVHPSLULTXHVD¿QG¶HQPHVXUHUODVSpFL¿FLWpSROL-

(Mathieu 2007).

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