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Christel Demey. Stimuler. le cerveau de l enfant. Le préserver des dangers du stress et l aider à s épanouir

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Academic year: 2022

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Christel Demey

Le préserver des dangers du stress et l’aider à s’épanouir

Le préserver des dangers du stress et l’aider à s’épanouir

Stimuler

le cerveau de l’enfant

Stimuler

le cerveau de l’enfant

St imu ler le c er ve au d e l ’e nf an t

Comment stimuler le cerveau d’un jeune enfant ?

Le cerveau d’un bébé est très sensible aux effets de son environnement, qu’il soit protecteur et stimulant ou au contraire perturbateur.

Très malléable, le jeune cerveau humain est également vulnérable.

Il subit négativement les effets du stress. Mais pas n’importe quel stress.

Comment le stress agit-il chez l’enfant ? Quelles sont les différences entre enfants ? Y-a-t-il des enfants génétiquement prédisposés à ressentir davantage les effets du stress? Comment les parents peuvent-ils préserver leurs enfants ou mieux les « armer »?

Chaque enfant est différent et va œuvrer inégalement en fonction de sa singularité. Le style émotionnel et comportemental d’un bébé est bel et bien présent dès la naissance. Il peut s’avérer rassurant pour certains, inquiétant pour d’autres. Il existe des bébés faciles, paisibles et d’autres qui le sont moins, voire pas du tout. Les repérer est essentiel. C’est en s’accordant au tempérament d’un enfant, en comprenant ses besoins et aussi sa propre histoire et spécifi cité en marche dans la dyade parent-enfant que l’aiguillage cérébral sera optimisé au départ de la vie. Les adultes assumeront au mieux cette tâche développementale en créant d’abord un LIEN sécurisant et ensuite, à partir de ce lien, en faisant de leur autorité, la LOI, une force d’appui permettant au jeune enfant de poursuivre sa croissance.

Christel Demey est thérapeute et médiatrice scolaire. Elle exerce en cabinet privé et dans un service de prévention. Elle travaille avec des ados et des adultes qui présentent des diffi cultés relationnelles, une perte d’estime de soi et d’élan vital.

Elle s’est spécialisée dans l’aide aux familles éprouvant des problèmes avec leur bébé ou jeune enfant. Elle donne également des formations et conférences pour les parents et professionnels.

ISBN : 978-2-343-02452-3

28 €

Chr is te l D em ey

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Stimuler le cerveau de l’enfant

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Psycho - logiques

Collection fondée par Philippe Brenot et dirigée par Alain Brun

Sans exclusives ni frontières, les logiques président au fonctionnement psychique comme à la vie relationnelle. Toutes les pratiques, toutes les écoles ont leur place dans Psycho - logiques.

Déjà parus

Jean-Luc ALLIER, La Fragilité en pratique clinique, 2013.

Stéphane VEDEL, Nos désirs font désordre, Lire L’Anti-Œdipe, 2013.

Sliman BOUFERDA, Le symptôme en tous sens, 2012.

René SOULAYROL, La spiritualité de l’enfant. Entre l’illusion, le magique et le religieux (nouvelle édition), 2012.

Bernard GANGLOFF et Daniel PASQUIER, Décrire et évaluer la personnalité : mythes et réalité, 2011.

Mady FERNAGUT, Yolande GOVINDAMA et Christiane ROSENBLAT, Itinéraires des victimes d’agressions sexuelles, 2011.

Louise TASSE, Les oripeaux des ados, 2011.

Anick LASALMONIE, Du procès social à l’eugénisme moral, 2010.

Jean-Max FEREY, Parents à louer pour enfants fous. Récits des « Familles-Thérapeutiques », 2010.

Patrick PIPET, Sauter une classe, Entre mythe social et faille narcissique, 2010.

Jean CASSANAS, Les descriptions du processus thérapeutique, 2010.

Michel LEMONNIER, Le Psychologue du travail. Un agent du changement dans la société, 2010.

Samuel GONZALES-PUELL, L'Approche thérapeutique des déficiences intellectuelles sévères et profondes. Perspectives institutionnelles, 2010.

Huguette CAGLAR, Les familles monoparentales, 2010.

Frédéric BRISSAUD, Pour un renouveau de la psychothérapie.

Mutations, 2010.

Ahmed CHANNOUF, Les freins invisibles à l’égalité des chances, 2010.

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Christel D EMEY

Stimuler le cerveau de l’enfant

Le préserver des dangers du stress et l’aider à s’épanouir

L’HARMATTAN

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© L’HARMATTAN, 2013

5-7, rue de l’École-Polytechnique ; 75005 Paris www.harmattan.fr

diffusion.harmattan@wanadoo.fr harmattan1@wanadoo.fr ISBN : 978-2-343-02452-3

EAN : 9782343024523

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À Cyril, Ta réactivité a donné matière à penser ce livre

Estelle, Ta sérénité m’a encouragée à le finaliser

À mes patients, Sans qui, toutes mes recherches n’auraient pu s’approfondir

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Introduction

« Tout se joue avant 6 ans » tel est le titre du best-seller du Docteur Fitzhugh Dodson dont l’ouvrage a été traduit en français en 1972. Avec les progrès des neurosciences, on se rend compte que le stress toxique précoce exerce un impact sur le cerveau du petit de l’homme. Comme l’avait observé Sigmund Freud il y a plus d’un siècle, les traumatismes psychologiques laissent une trace impérissable. Cette empreinte n’a pas que des effets dans le corps de l’enfant : elle atteint aussi l’activité des gènes et des neurones, oriente la croissance cérébrale et modifie, par-delà même, le fonctionnement individuel et l’adaptation.

Désormais, l’expérience stressante qui pousse à agir peut, dans ses excès, faire sombrer le jeune enfant dans l’abîme des flots obscurs dont on saisit plus amplement les mécanismes physiologiques qui en découlent.

Mais justement ce stress qu’en est-il réellement ? Comment opère-t-il et quels sont ses effets démontrés sur le cerveau humain, sur les neurones et sur les gènes qui les régentent ? Comment des expériences négatives peuvent-elles s’inscrire dans l’organisme au point d’affecter durablement le comportement et la santé ?

Dans la première partie, nous observerons que le sexe de l’enfant, son tempérament, ses conditions de naissance, son environnement post et anténatal peuvent rendre compte de la nature de l’expérience stressante et de ses manifestations sur le devenir infantile. Au cours des chapitres de cette première partie, il conviendra de démontrer, à la lumière de l’expérimentation animale et des données récoltées sur l’Homme, que le stress, par l’intermédiaire d’une cascade d’événements neurochimiques, altère le microenvironnement du système cérébral et concourt au risque de l’avènement d’un trouble psychopathologique (anxiété chronique, dépression, troubles de conduites, hyperactivité, etc.) et autres affections systémiques.

Chaque enfant est cependant différent. Certains vont œuvrer efficacement sans subir trop lourdement les effets de l’adversité alors que d’autres vont déclarer une maladie sérieuse. La constitution interne de l’enfant a pu agir comme modérateur ou amplificateur des effets du stress.

Au-delà de toute contribution biologique, tout un chacun reconnaîtra que des traumatismes impérieux sont générateurs d’une profonde détresse chez l’enfant. Mais les expériences défavorables de l’enfance ne concernent pas que les événements tragiques ; les interactions quotidiennes dans la vie de l’enfant sont plus importantes que ce que nous estimons. En effet, les tensions sournoises, répétées et durables, les situations conflictuelles, l’épuisement psychique de l’un ou de l’autre parent, les facteurs pénibles (maladie, isolement, etc.) peuvent stresser l’enfant de manière chronique et insidieuse. La mission du parentage rendue plus ardue de nos jours peut fragiliser la force du lien entre le donneur de soins et sa progéniture. Cette fragilisation du lien a-t-elle pu générer un climat d’insécurité relationnel prolongé lequel a été source de stress évident chez l’enfant, et ce, avant même son entrée en garderie ?

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Dans la deuxième partie, nous verrons que la spécificité du lien parent- enfant va servir de tampon aux vulnérabilités biologiques singulières de certains enfants ou au contraire cristalliser, voire accentuer leurs difficultés « naturelles ».

Le milieu protège ou au contraire agresse l’enfant plus fragile qui, dans ce dernier cas, endurera plus lourdement encore les effets du stress.

L’environnement parental offre à l’enfant une base de développement neuro-anatomique essentielle. La qualité des moments passés en famille et le temps investi sont d’une importance cruciale pour l’ontogenèse cérébrale. Le cerveau est d’une étonnante plasticité, les neurones se régénèrent toute une vie mais il existe des périodes sensibles durant lesquelles le marquage parental est de la plus haute importance. Ce marquage correspond aux trois, quatre premières années de vie. Trois à quatre ans pour permettre au cerveau de se développer harmonieusement. Trois à quatre années d’évolution maximale, c’est beaucoup et peu à la fois. Beaucoup quand les parents sont stressés et épuisés. Peu quand on y réfléchit avec raison, discernement et maturité. Cette prudence et cette réflexion peuvent s’acquérir avec l’accroissement des connaissances, avec la volonté, le courage de chercher des appuis, des aides qui ouvriront la voie à un meilleur possible, à un meilleur échange interactionnel, à un lien relationnel plus solide qui renforcera cette détermination.

En référence aux travaux du psychanalyste John Bowlby et de la psychologue Mary Ainsworth, nous observerons ce qu’est un lien relationnel consistant et sécurisant, qui est l’acteur privilégié de ce lien et qui garantit son tissage. Un environnement familial rassurant modère l’extrême réactivité et équilibre le fonctionnement physiologique de la réponse au stress des jeunes enfants. En soi, cet espace familial-là donne à chacun des armes incomparables pour surmonter plus facilement par la suite les épreuves de vie. Lorsque le jeune enfant bénéficie précocement du soutien et de l’encouragement des adultes, il apprend à s’adapter plus promptement aux difficultés de tous les jours car son système qui régit la réaction au stress se stabilise assez rapidement.

À l’image d’une palissade, la sécurité du lien confère à la forteresse et à l’hôte qui l’habite des moyens insoupçonnables qui lui permettent de faire face aux tirs multiples et inattendus des ennemis que représentent le stress et l’adversité.

Quels sont, en conséquence, les facteurs singuliers qui favorisent la qualité du maillage relationnel et ceux qui l’altèrent ? Que représente un lien fragile ou insécurisant pour l’enfant ? Un lien affectif inconsistant et distant, voire ambivalent génère-t-il un climat d’inquiétude pour l’enfant qui, trop jeune, n’a pas la capacité de cerner les causes des réactions parentales ou le climat difficile dans lequel il baigne ? Un lien solide et confiant a-t-il, au contraire, le pouvoir d’amortir l’effet des stresseurs singuliers et d’éviter que des inquiétudes impérieuses ne gravent durablement le psychisme de l’enfant ? C’est de la constitution du lien relationnel précoce entre l’enfant et son parent dont il sera question.

Nous terminerons la lecture par une troisième partie qui tentera de montrer

« comment » faire pour bâtir un lien sécure et pour le préserver. Ceci passera

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par une compréhension des étapes de développement de l’enfant : ses angoisses, ses peurs aux différents âges. Nous montrerons aussi que si ce lien est la condition obligatoire pour la construction psychique et neurologique du petit d’homme, il ne doit pas demeurer la condition exclusive. Les règles, les valeurs, les limites qui habitent chaque famille, non seulement pérennisent l’intensité et la durée du lien, mais modèlent tout autant les circuits mentaux permettant au jeune enfant d’accéder à son humanisation et in fine d’augmenter ses chances de réussir sa propre vie.

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Première partie : les bébés sensibles au stress

Plus que n’importe quelle autre espèce, les bébés humains sont très sensibles au stress. Le bébé et le tout-petit qui ne parlent pas ne peuvent faire appel au langage et aux jeux symboliques pour évacuer les tensions.

Le stress toxique précoce rend problématique l’adaptation du sujet aux challenges environnementaux qui se manifesteront indubitablement au cours de l’existence. Le stress toxique semble favoriser l’émergence de divers états pathologiques en s’attaquant entre autres choses au cerveau d’un enfant.

Mais qu’est-ce que le stress et quelles sont ses principales influences nocives sur la santé ? D’où peut provenir le stress chez le jeune enfant ? Quel est son système de réponse et la régulation génétique de celui-ci ? Comment agit-il et quels sont ses principaux effets sur l’architecture cérébrale du tout-petit ? Existe-t-il une plus grande vulnérabilité biologique au stress chez certains enfants et quelles en sont les conséquences ?

I : QU’EST-CE QUE LE STRESS ?

Le stress est une réaction de l’organisme et du psychisme aux facteurs d’agression physiologique et psychologique qui nécessitent la mise en œuvre de processus d’adaptation et qui amènent le sujet à se battre ou à fuir, réactions décrites par Hans Seyle1 dans les années 50. Le stress est évoqué par les chercheurs comme une expérience subjective qui se traduit par des réactions neurochimiques dans différentes zones du cerveau. Les recherches ont démontré le rôle important du système nerveux central dans la capacité à « faire face » au stress et l’implication du système limbique dans les fonctions de gestion du stress2.

Le stress est inévitable chez l’enfant. Ses effets sont même positifs en cas de stress modéré et momentané, comme par exemple passer un concours, réussir un travail difficile, faire face à des conflits mesurés, etc. Des stress légers semblent même augmenter certaines fonctions organiques comme l’immunité, la vigilance, la mémorisation. Comme nous le verrons ultérieurement, le stress est bel et bien nécessaire à l’activité des fonctions cérébrales et à l’apprentissage.

Mais il y a des stress qui constituent une menace pour le bien-être physique ou psychologique et qui amènent des changements dans le corps et dans le cerveau de l’enfant. Par son intensité, le stress devient nuisible. Mais la durée d’un stress peut également avoir des effets désastreux.

Stress transitoire, grave ou chronique

Pour qu’une situation soit identifiée comme stressante, une des quatre caractéristiques doit être présente : la nouveauté, l’imprévisibilité, l’absence de contrôle de la situation et les menaces à l’ego du sujet3.

Le stress transitoire, momentané constitue une réaction brève à un stimulus stressant (un examen oral, l’entrée à la nouvelle école, l’annonce des résultats scolaires, etc.). Lorsqu’une personne se heurte à des stresseurs transitoires et évalue qu’elle maîtrise la situation, ou qu’elle dispose de supports ou stratégies

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efficaces lui permettant de se tirer d’affaire, son organisme s’adapte puis revient à la normale.Sous la menace, le corps a des réactions physiologiques diverses comme l’augmentation du rythme cardiaque, de la pression artérielle et des hormones du stress. Le stress transitoire est positif lorsque l’enfant se sent récompensé d’avoir relevé un défi avec succès. Ce type de stress augmente la confiance en soi car l’enfant gère non seulement le problème qui cause sa détresse, régule ses émotions, et ce faisant, renforce son adaptation et ses stratégies ultérieures pour faire face à un nouveau challenge.

Un stress peut être aigu et grave, de nature traumatique lorsqu’il met en péril l’ego de l’enfant ou sa sécurité (une agression physique, des menaces, une violente dispute parentale où l’enfant est témoin de faits graves, etc.), qu’il le glisse dans un état d’impuissance et induit une réaction prolongée de l’organisme et du psychisme à l’amplitude du stress. Tout autre traumatisme qui touche intensément l’enfant de manière inattendue comme une catastrophe, la perte ou le départ d’un parent, un accident correspond à un stress aigu excessif.

Dans les suites immédiates d’un accident ou d’une agression par exemple, l’enfant peut présenter diverses réactions normales : trouble du sommeil, hypersensibilité à certains stimuli, peurs, etc. Dans bon nombre de cas, l’enfant surmonte l’épreuve et la blessure se cicatrise. Dans d’autres (25 % des cas dans les 12 mois qui suivent le traumatisme), l’anxiété dure et est sans cesse ranimée par les événements les plus banals de la vie de tous les jours4. Lorsque l’événement est majeur et qu’il perturbe ensuite durablement l’enfant, on parle de stress post-traumatique (PTSD) avec diverses réactions observées : difficultés alimentaires, craintes excessives lors de séparation, fréquentation de lieux divers, tristesse, honte, régressions, évitement, trouble du sommeil, conduites phobiques, hypervigilance ou au contraire émoussement total, etc.

Chez le jeune enfant, plus encore chez un bébé, les possibilités de gestion du stress sont très réduites. Un tout-petit est déjà très sensible au changement, à l’imprévu. Il ne possède pas la capacité de contrôler les événements dans le but de diminuer la nouveauté, l’imprévisibilité encore moins les menaces à son identité, celle-ci étant en construction.

En dehors des situations traumatisantes, si le stress perdure ou se reproduit trop fréquemment, un état d’hypermobilisation est maintenu et on parle de stress chronique ou prolongé. Pour l’enfant, il peut s’agir de situations conflictuelles modérées mais qui se chronicisent et dont il finit par demeurer impuissant : disputes conjugales répétées, conflits réguliers et intenses entre frères (ou sœurs), relation laborieuse avec un parent, un enseignant, un autre élève, etc.

Ou de contextes difficiles : mal-être d’un parent, maladie ou blessure d’un proche ou de l’enfant, stress familial, secrets et tabous familiaux, pressions et exigences élevées, surmenage ou difficultés scolaires, insertion socio-scolaire compliquée, problème d’image de soi, défauts physiques, impression d’isolement, d’exclusion, sentiment d’être différent, manque de routine, de repères, changement d’habitude ou de lieu de vie, naissance d’un petit frère, etc.

Lorsque la sensation de stress persiste et que l’enfant anticipe le danger ou la difficulté qui l’inquiète, on parle d’anxiété. L’expérience d’une première

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sensation négative résultant d’un stress aigu ou modéré peut être mal vécue et s’accompagner d’importants doutes sur soi, d’un sentiment de manque de contrôle qui persisteront dans le temps. Par exemple, l’écolier peut craindre continuellement d’échouer et afficher un état de tension permanent sans déclencheur quotidien particulier. Il peut encore appréhender le rejet ou le jugement d’autrui dans divers contextes sociaux. Plus l’anxiété est forte et perturbe le fonctionnement, alimente les pensées quotidiennement, plus l’enfant a besoin d’aide pour dépasser ses peurs et l’anxiété qu’il éprouve.

Principaux effets toxiques du stress sur la santé

La synthèse des expertises de l’Inserm5,6 sur le stress chez l’adulte et chez l’adolescent a montré que les épreuves stressantes prolongées sont associées à des perturbations de la fonction digestive, thyroïdienne, circadienne, gonadotrope. Chez l’adulte, différents organes vitaux comme le foie, les surrénales, le pancréas, les poumons, les reins et le cœur peuvent subir négativement les effets du stress. Il est également reconnu que le stress potentialise les effets des sursollicitations musculaires et squelettiques. Le stress est associé à de multiples facteurs de comorbidités et peut générer diverses maladies ou perturbations (diabète insulino-résistant, dyslipidémie, hypertension, affections cardio-vasculaires, pathologies de la peau, obésité viscérale, problèmes de fertilité, troubles musculosquelettiques, douleurs chroniques, etc.).

Chez l’enfant et chez l’adolescent, le stress augmente le risque d’apparition de troubles du comportement alimentaire (anorexie psychogène ou augmentation de la faim avec appétence marquée pour une nourriture hypercalorique). Il perturbe la digestion et le sommeil du sujet, et peut induire une puberté retardée. Il est bien connu pour fragiliser la minéralisation osseuse, le système immunitaire et dans des cas extrêmes, la croissance de l’enfant ou de l’adolescent. Par exemple, le stress arrête, entre mille autres choses, la sécrétion de l’hormone de croissance (hormone GH), abaisse la sensibilité des cellules cibles à celle-ci et réduit également le métabolisme des protéines dans les cellules en division. Il bloque aussi l’interféron (agent immunitaire capital) et diminue la réactivité des lymphocytes, les globules blancs chargés d’attaquer les envahisseurs potentiels. On ne sera donc pas surpris d’entendre que les individus trop souvent stressés sont généralement plus malades, beaucoup plus souvent et parfois très sérieusement. Il en est de même pour les enfants.

Nous retiendrons ici que, le stress toxique, par sa chronicité ou son intensité, peut frapper tous les âges de vie. Ce fardeau de stress appelé surcharge allostatique7 provoque une usure de l’organisme et vient générer divers problèmes sérieux.

La période anténatale et post-natale semble toutefois déterminante dans la programmation de l’axe de réponse au stress (axe HHS). Comme nous le verrons, une perturbation de cet axe se maintiendra à l’échelle de toute une vie et sera reliée à des altérations du fonctionnement neurochimique du cerveau et de ses structures. Les désordres qui en résulteront vont se manifester plus tard

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au cours de l’existence, particulièrement dans la sphère des comportements émotionnels et des capacités cognitives.

Le jeune enfant et le fœtus sont également très sensibles aux influences de leur milieu de développement qui peuvent agir comme modérateurs, créateurs ou amplificateurs de la réponse au stress.

Comme l’adaptation d’un enfant stressé est généralement plus difficile, si on n’y prend pas garde, un cercle vicieux peut rapidement se constituer : l’enfant stressé court un plus grand risque que les autres d’interpréter négativement la charge des événements et expériences de vie futures, qu’elle soit réellement stressante ou non. Ce même enfant peut susciter ou bénéficier de réponses environnementales inadéquates, ce qui alimentera ou confortera ses perceptions négatives et maintiendra son éventuelle inadaptation. L’escalade développementale s’en trouve ainsi formée.

L’empreinte laissée par le stress sur l’organisme est particulièrement saillante lorsqu’il est subi tôt dans l’enfance. Les effets des événements vécus précocement peuvent se surajouter au « stress du moment » et complexifier plus tard dans la vie le processus de régulation adaptative.

Un bon départ nous semble donc essentiel pour mieux affronter les nuages qui assombrissent de temps à autre la traversée d’un enfant.

Quand le stress devient tolérable

Les situations de stress transitoires sont nombreuses durant l’enfance. La possibilité pour un enfant d’être entendu, réconforté et soutenu durant l’épreuve par un adulte protecteur va souvent permettre à son organisme de s’accommoder aux stress fréquents qu’il rencontre et même aux stresseurs intenses. Dans ce cas, le stress devient tolérable car ses répercussions sur l’organisme sont amoindries par des adultes bienveillants qui aident l’enfant à s’adapter8. Autrement dit, les enfants peuvent se remettre d’un divorce, de la naissance d’un petit frère, d’un décès dans la famille si l’enfant bénéficie d’un bon système de soutien, comme par exemple un lien de qualité avec le parent (cf. infra).

Les adultes sont reconnus dans pratiquement toutes les études mesurant le stress chez l’enfant comme les acteurs privilégiés pour gérer les difficultés émotionnelles de leur progéniture. Le soutien social de la famille est éminemment capital pour adoucir les effets du stress aigu ou même chronique et l’empêcher de devenir toxique9.

Chez un petit enfant, les adultes agissent de manière à diminuer l’imprévisibilité des événements, tempèrent les répercussions des nouvelles données et tentent d’empêcher l’apparition d’événements graves ou la pérennisation de situations nébuleuses. À défaut de cessation des turbulences ou en cas de persistance de l’anxiété chez l’enfant, ils chercheront les aides (un psychologue, un médecin…) et soutiens nécessaires de manière à soigner l’enfant, à orienter la qualité de leurs actions ou réactions et à tenir le coup dans l’assistance léguée à l’enfant.

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Face aux stresseurs mesurés chez l’enfant plus âgé, les adultes l’encouragent à un engagement plus actif. La résilience au stress s’acquiert par une exposition préalable à des niveaux de stress modérés ou tolérables pour l’enfant. De la sorte, les adultes renforcent son sens du contrôle, sa confiance en lui, et par extension diminuent son stress. Le fait de pouvoir rester dans une position active, de disposer d'un contrôle, même partiel et, mieux encore, de relever un défi constitue un facteur majeur de préservation de la santé et de renforcement de la confiance et de l’image de soi. La différence entre stress tolérable et stress toxique dépend effectivement du degré de contrôle perçu par un enfant. Ce sentiment de maîtrise est étroitement relié à l’image qu’il a de lui-même et des ressources dont il dispose pour faire face à l’événement. Une mauvaise confiance en ses capacités, une piètre estime de soi exacerbent le sentiment d’impuissance et de manque de contrôle. Dans d’autres cas où l’action n’est pas possible ou pas efficace, les adultes peuvent enseigner à l’enfant une interprétation différente de l’événement ou en amortir la charge émotionnelle car ils ont pu d’abord entendre ses souffrances et les reconnaître. Favoriser la verbalisation émotionnelle d’un enfant d’âge scolaire ou préscolaire, lui offrir ensuite un soutien, une compréhension et une reconnaissance est essentiel lorsque le problème ne peut être résolu concrètement ou qu’il est irréversible (un changement de domicile, une rupture relationnelle). Cela apaise l’enfant et lui certifie en même temps que son message, ses émotions, et par conséquent sa propre personne, sont importants pour ses écoutants. Et que s’il ne peut agir sur l’événement, il pourra, avec l’aide du temps, agir sur ses pensées et émotions pour arriver au fondamental : un mieux-être par acceptation des choses telles qu’elles sont, compréhension de ces choses-là rendues possibles par l’écoute émotionnelle et l’empathie d’un adulte non-jugeant.

Les adultes, par leur communication proche et positive, leur fiabilité et, parfois, leurs actions concrètes, aident ainsi l’enfant à faire face aux stresseurs qui se répètent ou qui apparaissent comme plus sournois et pour lesquels une résolution par l’action est difficile, sinon impossible. Aussi, en donnant confiance à l’enfant, en favorisant sa santé, ses efforts, ses apprentissages, son épanouissement socio-relationnel, son estime personnelle, ils lui permettront de relativiser, voire même d’éviter certains stresseurs en stimulant les fonctions cérébrales essentielles à cette prévention. Chez un bébé et un tout-petit, c’est exclusivement le sentiment de sécurité regagné par le rapprochement et les réactions cohérentes des adultes qui vont servir à diminuer l’intensité de la réponse au stress Nous verrons précisément dans la partie deux et trois comment ils y arriveront.

Pour être soulagé, le stress a donc besoin d’une réponse cohérente.

L’absence de réponse adaptée fait que les hormones du stress se retournent contre l’organisme et deviennent alors nuisibles.

Mais il arrive parfois que l’adulte ne sécurise pas son enfant, ne le protège pas, la cellule familiale étant elle-même anxiogène. Le stress que ressent l’enfant se transforme en anxiété qui dépasse ses possibilités d’adaptation et devient un véritable poison qui l’empêche de poursuivre son développement10. Si l’enfant

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doit surmonter sans l’aide d’un adulte des expériences préjudiciables intenses ou modérées mais répétitives, voire permanentes ou si celles-ci trouvent leur point d’ancrage dans l’unité familiale, le stress devient toxique et perturbe le développement. Comparativement à l’adulte, l’enfant a beaucoup moins d’outils pour faire face au stress, voire aucun s’il s’agit d’un bébé, d’un tout-petit. Il risque davantage de subir les effets du stress toxique.

Stress objectif versus stress subjectif

Le stress objectif se rapporte à une quantité mesurable d’épreuves difficiles auxquelles doit faire face un enfant comme par exemple des changements dans la vie quotidienne (changement d’école, séparation des parents, etc.). Il peut devenir trop fréquent et se chroniciser. Un stress objectif sévère renvoie à un événement grave qui risque d’engendrer une réponse prolongée de l’organisme à l’agent stressant (cf. supra).

Le stress subjectif dépend de l’interprétation que l’enfant réalise des faits qu’il rencontre et de l’estimation de ses propres capacités à y faire face. Un stress subjectif élevé peut résulter de diverses expériences antérieures négatives ou d’une seule mésaventure objective qui aura rendu l’enfant aux aguets pour éviter la moindre menace ou démuni en sa présence. Ce stress correspond à la réactivation de la mémoire d’un stress ayant dépassé les ressources d’un sujet et généré des ressentis désastreux. Ainsi, un événement ultérieur peut a priori ne pas être stressant pour tout un chacun mais résulter d’une interprétation déformée lorsqu’une personne a subi les effets d’une situation antérieure qui a été évaluée comme dépassant ses capacités d’adaptation, son pouvoir de maîtrise et qu’elle a mis en péril son bien-être. Par exemple, un enfant ayant été maltraité à l’école par des pairs peut craindre la résurgence de l’événement et être tétanisé lorsque, bien plus tard, un camarade de classe lui adresse une critique anodine. Un enfant peut aussi éprouver un niveau élevé de stress objectif, mais un niveau faible de stress subjectif. Il peut, par exemple, sentir qu’il maîtrise la situation ou se trouver rassuré par la présence de l’adulte et percevoir l’épreuve avec moins d’inquiétude. Certains enfants – et certains adultes d’ailleurs – peuvent encore imaginer des données angoissantes ou pénibles à vivre. Croire par exemple qu’une catastrophe ou un étrange phénomène va se produire (un attentat, la mort d’un parent, la venue du diable, etc.), entrevoir constamment les malveillances d’autrui ou ses propres défaillances inexorables. Quelques-uns de ces enfants auront cependant connu une vie sans nuage, et éprouveront du stress à la moindre contrariété. Ils accuseront d’emblée des difficultés émotionnelles lors d’événements, parfois anodins, mais évalués négativement.

Aussi, la manière dont on perçoit un stress modifie les réactions physiologiques au stress. Ces dernières vont s’archiver dans la mémoire émotionnelle et retentir également sur les perceptions. La souvenance d’un sujet peut-être formulée comme suit : « De cet événement, je retiens mon emballement émotionnel ; mon cœur a palpité, ma voix a tremblé, ma transpiration a augmenté, des rougeurs sont apparues sur mon visage. Je redoute que cela se reproduise » La façon dont un sujet apprend à gérer le stress en concevant par exemple que ses réactions

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corporelles n’ont causé ni sa mort, ni sa terreur ou sa honte et en les acceptant va également modifier sa perception individuelle face aux stresseurs ultérieurs et ses actions futures. Épictète n’a-t-il pas grandement souligné : « Ce n’est pas l’événement qui trouble l’Homme mais l’idée qu’il s’en fait » !

II : RÉPONSE PHYSIOLOGIQUE AU STRESS

Le stress est créé par le cerveau, en réponse à des stimuli réels ou imaginaires. Les nombreuses réponses physiologiques associées au stress contribuent à protéger le corps et le cerveau des dangers qui sont à l'origine du stress.

Le stress est une stimulation, normalement ponctuelle, qui déclenche un ensemble de réactions non spécifiques de l'organisme impliquant des réponses neuronales, neuroendocrines, métaboliques et comportementales. Ces réponses se rassemblent dans le syndrome général d'adaptation au stress qui permet à un individu de faire face au stress de manière plus ou moins adaptée.

Que se passe-t-il lorsqu’un sujet subit un stress d’abord soudain, immédiat et ponctuel et qu’il semblerait pouvoir y faire face dans un premier temps ? La première étape consiste en l'interprétation du facteur stressant. Cette étape correspond à l’alarme.

La phase d’alarme

Ce sont les régions les plus primitives du cerveau – les structures dites limbiques – comme l'amygdale, l’hypothalamus et l’hippocampe, impliquées notamment dans la formation des émotions et de la mémoire qui déclenchent l'alarme. Aussitôt, le système nerveux sympathique s'active. Il libère les catécholamines : l’adrénaline et la noradrénaline produites par les glandes surrénales. Ces deux hormones vont alors agir sur de nombreux organes : le cœur pour élever le débit cardiaque, les vaisseaux sanguins pour augmenter la pression artérielle et favoriser les muscles ; le cerveau pour accroître la vigilance ; les poumons pour dilater les bronches et élever le rythme respiratoire ; le foie pour activer la formation de glucose à partir des stocks énergétiques. En phase d’alarme, on note encore l’augmentation de la sudation et la dilatation des pupilles menant à l’amélioration de la vision. La coagulation sanguine se renforce également pour protéger l’organisme d’une blessure éventuelle.

Toutes ces réactions rapides n'ont qu'un but : préparer le sujet à affronter (situation d’examen, de compétition) ou à fuir un événement stressant et soudain. C’est la célèbre fight or flight response.

Phase de résistance : intervention de l’axe HHS

Lorsque le stress dure et qu’il reflète une réponse prolongée de l’organisme à des stimuli nocifs, les structures limbiques du cerveau vont mettre en action un axe hormonal fondamental : l’axe corticotrope ou axe hypotalamo-hypophyso-surrénalien (HHS), qui est le principal système contrôlant la réponse de l’organisme aux stresseurs durables.

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FIGURE 1.1 : Axe corticotrope ou hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HHS)

En phase de résistance, l’hypothalamus et les autres régions du cerveau sécrètent l’hormone de libération corticolibérine (CRH). La sécrétion de CRH par l’hypothalamus stimule la production d’ACTH (hormone adrénocorticotrope) par l’hypophyse. La corticosurrénale détecte les concentrations sanguines d’ACTH et, en réponse à cette activation de l’hypophyse, sécrète du cortisol, principal glucocorticoïde chez l’humain, communément appelée hormone du stress. Le cortisol est sécrété environ 10 minutes après l’alarme pour, entre autres, aider l’adrénaline à maintenir un niveau d’énergie suffisamment élevé pour permettre à l’organisme de maintenir le cap. Le rythme cardiaque reste donc élevé de même que la pression artérielle, le taux de sucre sanguin et les fonctions intellectuelles. Corps et cerveau maintiennent leur potentiel afin de se défendre durablement. Il s’ensuit que certaines autres activités consommatrices d’énergie sont mises en veilleuse pour faciliter l’action du cortisol (comme la croissance, la reproduction, la digestion, etc.). Cette hormone est très liposoluble et traverse facilement la barrière hémato-encéphalique. Autrement dit, le cortisol rejoint aisément le cerveau où il trouve ses récepteurs : récepteurs des glucocorticoïdes de type II surtout dans le cortex préfrontal et récepteurs de type I et II dans l’hippocampe, deux structures cérébrales de haute importance impliquées dans la réponse au stress.

L’excès de cortisol active les récepteurs du cerveau qui envoient un message à l’hypothalamus pour supprimer la production de CRH, ce qui va in fine réduire les taux de cortisol. En bloquant la sécrétion hormonale, le cortisol et les hormones apparentées limitent leur propre production. Cette boucle, dite de rétrocontrôle, permet tout simplement d'éviter l'emballement du système en ramenant à une valeur basale les concentrations sanguines de cortisol après un

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événement. Le cortisol facilite ainsi l’adaptation au stress et rétablit l’homéostasie en modifiant les dynamiques internes.

Phase d’épuisement : perturbation de l’axe HHS Excès de cortisol ou hypercotisolémie

Comme nous venons de le voir, les hormones de stress sont vite détectées par le cerveau pour être aussitôt vite freinées. Cependant de nos jours, le stress ne parvient plus à être évacué comme c’était le cas du temps des chasseurs- cueilleurs au cours duquel hommes et adolescents traquaient les bêtes énormes et, victoire remportée, évacuaient leur stress. Des stress mineurs se répètent trop souvent et/ou ne trouvent plus aussi facilement d’exutoire dans l’action.

Actuellement, les substances qui sont produites par le corps s’accumulent et ne sont pas consommées puisqu’il n’y a, soit plus assez de temps de récupération en raison de la répétition des événements stressants, soit plus assez d’efforts physiques comme pratiqués jadis. Les substances deviennent alors toxiques, le sujet entre dans une phase d’épuisement potentiellement dangereuse pour sa santé.

Concrètement, sur le plan physiologique, qu’en est-il si le stress se prolonge ou s’intensifie ? La boucle de rétroaction du cortisol risque de ne plus bien fonctionner. À force d'être trop sollicité, le système finit par se dérégler.

C'est à ce moment-là qu'apparaissent les signes délétères, physiques et psychiques d’un stress toxique. Les réserves énergétiques de l'organisme vont s'épuiser, la fatigue, le désinvestissement ou l’irritabilité vont s'installer. Et plus le stress durera, moins il sera contrôlable par l'organisme et d’autres altérations peuvent apparaître au niveau de divers systèmes (digestifs, rythmes circadiens, etc.). Lorsque le stress persiste trop longtemps, se répète ou augmente, lorsque le sujet perd le contrôle et se retrouve en situation d’impuissance1, il y a maintien de l'hypercortisolémie avec production élevée de CRH et d’ACTH.

Face à des taux élevés de glucocorticoïdes et de CRH, on assiste à une désensibilisation des récepteurs aux glucocorticoïdes ou à une diminution de leur nombre. Ceci a une conséquence : les glucocorticoïdes n'exercent plus leur fonction de rétrocontrôle du stress, l’excès de cortisol se pérennise. Les études cliniques de ces dernières années ont d’ailleurs relié les traumatismes dans l’enfance aux risques de maladie à l’âge adulte avec les perturbations de l’axe HHS. Cet axe de réponse aux stresseurs est donc un thème central de la recherche sur le stress toxique.

Insuffisance de cortisol ou hypocortisolémie

Si l’on sait qu’une hypercotisolémie s’observe dans de nombreuses situations d’exposition continue au stress, on pourrait aussi s’attendre à trouver un taux élevé de cortisol à la suite d’événements marquants qui ont entraîné un état de sidération, d’incompréhension et de terreur chez des sujets qui ont développé un syndrome de stress post-traumatique (par exemple chez les enfants victimes de viol, témoins de fusillades, etc.). Or, ce n’est pas le cas. Dans de tels états, il

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existe une hausse du CRH hypothalamique qui n'active plus normalement l'axe HHS. On retrouve aussi une élévation d’ACTH et une hypersensibilité des récepteurs aux glucocorticoïdes ce qui semblerait engendrer des taux anormalement bas de cortisol. Cependant, les taux bas de cortisol au moment d'un événement traumatique ont été corrélés à une expérience antérieure de trauma : il se pourrait que ce soit un traumatisme antérieur qui déterminerait les cortisolémies basses observées après un autre événement traumatique à l'âge adulte. Une des hypothèses suggérées est qu’un traumatisme inaugural lors d'une période critique de la maturation du système nerveux dans la petite enfance, aurait pu produire une augmentation massive de cortisol, et cette augmentation massive initiale de cortisol aurait mené à un dérèglement de l’axe HHS avec hypersensibilité permanente de certains groupes de récepteurs aux corticoïdes dans le cerveau2. Aussi, d’autres schémas de cortisol émoussés ont pu indiquer la présence d’un stress chronique vécu en bas âge (par exemple les conflits parentaux importants et persistants, la négligence affective, etc.) menant à une régulation amoindrie de l’axe du stress avec le temps.

La mesure du cortisol

Pour objectiver le degré de stress d’un sujet, le cortisol est souvent l’indicateur le plus utilisé car l’analyse des autres hormones de stress (CRH, ACTH entre autres) nécessite des moyens plus sophistiqués et est invasive chez les enfants3. Une simple prise de sang ou un prélèvement salivaire permet le dosage du cortisol. En cas de stress, son taux de l’ordre d’un millionième de gramme par millilitre, peut être multiplié par cinq ou par dix.

Les taux extrêmes de cortisol et de CRH ou les taux anormalement bas de cortisol4 sont associés à des dégâts des structures et de fonctionnement de certaines régions cérébrales.

Notons ici que d’autres hormones interviennent également en cas de stress (endorphines entre autres) et bon nombre sont encore régulièrement découvertes même si leur fonction n’est pas encore totalement élucidée.

III : DES DIFFERENCES GÉNÉTIQUES ET BIOLOGIQUES AU STRESS?

On a vu que la réaction au stress dépendait de la perception individuelle de l’événement. Existerait-il une égalité d’ordre biologique dans la manière de percevoir les choses ? De même, y aurait-il une similitude entre tous dans le domaine de la réactivité physiologique face au stress impliquant les réponses hormonales et neurochimiques? Sans doute que non.

Par ailleurs, si l’on est de « nature » stressée, risque-t-on de donner naissance plus facilement à un enfant stressé ? Les études sur les jumeaux tendent à montrer qu’il existe une part génétique dans l’explication de la sensibilité face au stress et des réactions en conséquence.

Le tempérament est la composante du caractère qui apparaît à la naissance en partie sous l’influence de l’héritage de la biologie. L’autre influence renvoie

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aux expériences prénatales qui vont peser sur la constitution tempéramentale d’un nouveau-né (cf. p. 64).

En tout état de cause, le tempérament peut amplifier la réaction psychophysiologique sur l’organisme de l’enfant aux agents stressants et rendre compte des différences de perceptions, de comportements et de capacités à faire face au stress.

Le tempérament de l’enfant

Des enfants de tempérament différent

Prenons l’exemple de 3 enfants, frères et sœurs, Tom, Lou et Nelle, et retraçons quelques- unes de leurs manifestations lorsqu’ils étaient bébés. Lorsque Tom avait 5 mois, il criait très souvent, et surtout très intensément, à la moindre contrariété, et ce depuis ses premiers instants de vie. Le matin, il se réveillait à l’aube, en hurlant, et refusait de se rendormir, malgré la fatigue. Il lui fallait du temps pour que son humeur soit meilleure et lui permette de se tranquilliser. Les premiers mois, il était difficile de le contenter, son irritabilité accrue en était le principal témoin. À peine sa mère le posait-elle sur ses genoux avec un hochet à la main qu’il se contorsionnait aussitôt pour s’échapper, puis crier pour retourner auprès d’elle. Le garçonnet n’aimait pas le changement ; impossible pour lui de s’endormir dans un lieu autre que sa chambre, ni d’accepter de jouer seul lorsque sa mère était absente de son regard. En effet, quand elle quittait la pièce pour vaquer à quelques occupations, l’enfant manifestait beaucoup de contrariété ; tout son petit corps devenait tendu, ses poings étaient serrés et il extériorisait tant de la colère qu’une détresse évidente. Lors du change, Tom se raidissait, se cambrait et donnait des coups de pieds. Il était bien difficile pour sa mère de lui faire sa toilette. À l’heure du coucher, il luttait jusqu’à épuisement et ne parvenait à trouver son sommeil qu’après avoir été bercé de nombreuses fois. Au moment où l’enfant s’est mis à trébucher lors de ses multiples déplacements, il criait si fortement qu’on aurait imaginé une blessure sérieuse. Or, il n’en était jamais rien. Tom exprimait intensément ses petits maux, comme tout autre malaise d’ailleurs. Il paraissait être un enfant impatient ayant du mal à tolérer les frustrations et à réagir modérément aux situations plus éprouvantes. Sa sœur Lou, au même âge passait de longs instants à observer les petits mobiles de son portique ou à jouer avec ses petites peluches sans s’occuper des nuisances sonores de l’extérieur ou des bruyants déplacements de son frère. Les pleurs n’arrivaient que lorsque la fatigue ou la faim se faisaient sentir. Lou prenait un plaisir évident à rester blottie de longs moments dans le creux des bras de sa mère, plaisir au cours duquel elle affichait un sourire irrésistible. L’ouverture de ses petites mains détendues, le flottement de ses bras le long de son corps traduisaient son sentiment de plénitude. Quand il était l’heure d’aller dormir, elle pleurait de brèves minutes puis finissait par s’endormir. Quand sa mère quittait la pièce où elle jouait, Lou manifestait son embarras par des petits cris à peine audibles. La vue du visage maternel déclenchait chez l’enfant l’expression d’une joie intense. Lorsque les parents invitaient des amis à dîner, elle prenait un plaisir amusé à attirer l’attention des convives et à les divertir. Enfin, Nelle est une fillette qui, bébé suivait sa mère des yeux, craignant la moindre séparation d’avec elle. Elle réagissait, à l’inverse de Tom, favorablement lors de l’imposition des contraintes (sortie du bain, changement de couches, placement dans un siège-auto, voyage en voiture, etc.), patientait dans de nombreux moments mais était clairement inquiète face à la nouveauté et aux absences

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de sa mère. Une fois qu’un inconnu l’abordait, elle s’agrippait à sa mère et pleurait sans détourner la tête. Âgée de quelques mois, tout changement mineur l’effrayait (changement de lieu entre autres). Son adaptation à la garderie prit un temps plus long que pour sa sœur Lou.

Nelle ne dormait pas et mangeait très mal. Cela a duré plusieurs mois jusqu’à ce que tout soit enfin rentré dans l’ordre. Aussi, la présence de nouveaux objets dans son environnement familier engendrait chez Nelle une grande appréhension ; elle n’osait s’en approcher qu’après une longue observation attentive.

L’expérience des parents nous montre combien chaque enfant réagit différemment et que l’on peut très tôt détecter chez lui un tempérament. Le tempérament est la manière dont le nourrisson se comporte et réagit face à son environnement. Il reflète le style émotionnel et comportemental du bébé et est un paramètre repérable à la naissance.

Le tempérament a souvent été évoqué pour expliquer des différences individuelles dans la régulation émotionnelle chez les enfants.

Déjà in utero (dès la 26ième semaine de grossesse), on note des profils d’activité1 différents d’un fœtus à l’autre : certains bébés sont très actifs (956 mouvements par jour), d’autres très calmes (56 mouvements par jour), d’autres très suceurs, d’autres pas.

L’échelle de Thomas Berry Brazelton2 (1995) (Neonatal Behavioral Assessment Scale) s’est révélée être l’outil le plus précieux en matière d’observation des différences interindividuelles chez le nouveau-né. Cette échelle évalue les caractéristiques émotionnelles et comportementales individuelles des nourrissons âgés de 0 à 2 mois. L’échelle de Brazelton permet de décrire le bébé sur des dimensions telles que l’irritabilité, la tonicité, l’éveil, le seuil de réaction.

Elle est l’examen le plus compréhensif du comportement néonatal disponible et est utilisée à la fois pour la recherche et la clinique dans le monde entier.

Alexander Thomas et Stella Chess3,4, véritables pionniers du courant tempéramental, ont déterminé neuf dimensions du tempérament : (1) niveau d'activité, (2) rythmicité, (3) approche-retrait face à la nouveauté, (4) adaptabilité, (5) intensité des réactions, (6) seuil de sensibilité, (7) qualité de l’humeur (affects positifs ou négatifs), (8) distractibilité et (9) capacité d'attention et de persistance attentionnelle. La liste a été révisée par des recherches postérieures et comprend l'extraversion qui est reliée à l’affect positif, au niveau d'activité, à l’impulsivité et à la prise de risques; l'affectivité négative qui est liée à la peur, à la colère, à la tristesse et au malaise; et le contrôle exigeant de l'effort qui est associé, entre autres à la fluctuation de l'attention et à la concentration.

Une réactivité émotionnelle différente aux stresseurs

Dans une situation de frustration (déception, interdits) ou face à des situations ou stimuli visuels, olfactifs, auditifs inconnus, certains bébés vont réagir par une détresse émotionnelle élevée, d’autres présenteront une faiblesse des réactions, d’autres encore vont trouver un stimulus apaisant (prendre leur doudou par exemple, sucer leur pouce) et se tranquilliser rapidement. Nous présentons ici trois types de tempérament souvent décrits dans la littérature : le

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tempérament faiblement réactif ; le tempérament hautement réactif ; le tempérament « lent au démarrage ». Il est évident qu’entre ces extrêmes, il existe des nuances qui caractérisent la complexité et la diversité des réactions humaines.

L’enfant de tempérament « lent au démarrage » présente une faiblesse et lenteur des réactions et un retrait face à la nouveauté. Il peut présenter une humeur négative et maussade en cas de perturbation.

Le tempérament « faiblement réactif » et d’humeur positive regroupe les enfants dits « faciles ». Ils manifestent comme Lou, non seulement plus d’affects positifs mais aussi une moindre réactivité émotionnelle en cas de stress. Ils sont plus ouverts et peu irritables.

Le tempérament « hautement réactif » regroupe deux types d’enfants : les premiers dits « difficiles » et irritables, comme Tom, qui s’enflamment très vite, supportent mal la frustration, le stress et le changement, sont d’un tempérament actif et excité, d’humeur négative et coléreuse, présentent une faible persévérance et patience, pleurent plus souvent et mettent du temps pour se calmer ; les seconds moins actifs et plus patients, comme Nelle, mais qui réagissent mal à la nouveauté ou aux changements, prennent vite peur et démontrent une réactivité émotionnelle élevée, un temps plus long à s’apaiser en cas de stress. En somme, les enfants hautement réactifs montrent beaucoup plus de détresse que les enfants faiblement réactifs dans des situations qu’ils ressentent comme alarmantes, comme par exemple la séparation temporaire d’avec leur mère. À l’inverse des enfants faciles, les tout-petits irritables et vite perturbés, outre leur réactivité élevée, peuvent exprimer plus de difficultés sur les plans alimentaires, digestifs et dans la régulation de leur sommeil.

Une interprétation différente des stresseurs environnementaux et des réactions en conséquence

Les enfants interprètent différemment les expériences environnementales selon leur tempérament. Le tempérament peut même augmenter les réactions physiologiques et comportementales envers des événements stressants ou en amortir l’effet5. Les différents tempéraments sont susceptibles d'être impliqués dans l'exacerbation ou au contraire dans la diminution des effets du stress.

Des enfants au tempérament différent les rendent différemment sensibles à des circonstances stressantes similaires. Par exemple, ceux qui sont vite perturbés ont tendance à percevoir les événements difficiles comme plus menaçants ou plus négatifs que ceux dont le niveau d'émotion négative est plus faible. La perception du stress, de son intensité et les réactions qui s’ensuivent sont déjà précocement des phénomènes hautement individuels.

Les travaux sur la gestion des émotions ont montré que les enfants âgés de 6 mois qui supportent mal la frustration utilisent des stratégies de régulation émotionnelle différentes; on observe qu'ils sont moins attentifs et patients, plus actifs dans différentes tâches en laboratoire que les enfants qui supportent mieux la frustration. Ces premiers semblent moins aptes à réguler leur réactivité physiologique6 (fréquence cardiaque, pression artérielle, hormones du stress).

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Dans une situation inconnue, là aussi on observe des différences en matière de réaction comportementale. Vers l’âge de six mois, certains bébés, quand on leur présente un objet, tentent de s’en approcher rapidement en l’attrapant et en le touchant, alors que d’autres le feront plus lentement7 ou pas du tout. Plusieurs recherches concluent l’existence d’une prédisposition biologique à l’insécurité chez les enfants qui présentent un tempérament hautement réactif après la naissance8,9.

Les habiletés précoces de régulation émotionnelle comprennent le contrôle et la réorientation attentionnelle vers d’autres stimuli. En fait, les enfants qui dirigent leur attention vers autre chose, comme par exemple prendre un objet, sucer son pouce, aller chercher son doudou, etc., apparaissent moins vite frustrés et contrariés. L’orientation de l’attention vers d’autres stimuli est donc efficace pour diminuer l'activation émotionnelle10. Ainsi, les habiletés d’orientation aident à gérer les émotions négatives (et positives), et contribuent au développement du contrôle adaptatif de l’émotion et du comportement. À l’inverse, les bébés vite frustrés, de même que ceux qui s’inquiètent intensément et rapidement, semblent ne pas être capables d’orienter leur attention vers autre chose. C’est comme s’ils demeuraient prisonniers de leur état émotionnel. La gestion du stress n’est donc pas la même pour tous.

Jerome Kagan11 a quant à lui montré un lien entre le tempérament hautement réactif de détresse face à l’inconnu à 4 mois, l’inhibition comportementale à 2 ans et la survenue de l’anxiété en âge scolaire. L’enfant inhibé est timide, prudent, évitant, craintif et en retrait lorsqu’il est exposé à des situations, des objets, des lieux, des personnes étrangers. Bébé, il a pu réagir intensément et présenter des niveaux élevés d’activité émotionnelle, et s’agripper comme Nelle, à sa mère lorsqu’il était confronté à des contextes inconnus. Après une épreuve stressante, son taux de cortisol est supérieur à celui des enfants non inhibés. L’enfant non inhibé et d’humeur agréable a été faiblement réactif au début de sa vie et apparaît sociable, spontané et extraverti face à la nouveauté. Kagan a suivi les enfants au cours de leur enfance de 21 mois à 7 ans ½. L’auteur a retrouvé une proportion plus élevée d’inhibition comportementale chez les enfants anxieux.

La question demeure : aurez-vous un bébé facile, c’est-à-dire calme, patient, capable de se recentrer sur autre chose en cas de stress et d’humeur positive ? Ou un bébé actif et intrépide voire encore irritable et difficile à consoler ? A la naissance, sur cinq bébés, un fait partie des craintifs, deux possèdent un tempérament intrépide. D’après les estimations de Thomas et Chess, 40 % des nourrissons auraient un tempérament facile, entre 5 et 15 % seraient lents à réchauffer. Et 5 à 10 % des bébés naîtraient avec un tempérament difficile à calmer, d’humeur négative et intense, mais ce pourcentage varie suivant les études, sans doute parce que le degré d’expression du tempérament se modifie au fil des expériences et selon le milieu dans lequel vit l’enfant mais aussi parce qu’il est lié à l’interprétation que les adultes en font et à leurs ressentis. (cf. p.

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Une hypothèse neurochimique à l’origine des différences ?

La source importante de la base biologique des différences de style émotionnel et d’interprétation des événement éprouvants est la variation de la concentration et la densité des récepteurs d’un grand nombre de molécules sous contrôle génétique qui peuvent affecter le fonctionnement du cerveau, comme la dopamine, la noradrénaline, la sérotonine, les opioïdes, l’acétylcholine, la CRH, la vasopressine et l’ocytocine12. On a en effet trouvé une correspondance entre les neurotransmetteurs du cerveau et le fonctionnement émotionnel d’un sujet. Néanmoins, il ne s’agit pas de réduire la vie affective d’un enfant et son expression émotionnelle/comportementale au taux des différents médiateurs chimiques cérébraux car une quantité d’autres molécules interviennent et interagissent entre elles. Pensons aux hormones thyroïdiennes, qui lorsqu’elles sont déréglées, entraînent agitation et anxiété. Néanmoins, on ne peut pas non plus ignorer que les médiateurs chimiques du cerveau sont sans effet sur les émotions et les réactions d’un sujet, et plus essentiel en ce qui nous concerne, sur sa « sensibilité » au stress.

De nombreuses études se sont particulièrement penchées sur le rôle de certains médiateurs chimiques dans la propension ou non à l’anxiété, à la détente et au bien-être. Nous en citons quelques principaux.

La dopamine a été associée à la recherche de la nouveauté, aux émotions de plaisir, à l’énergie, à la motivation, au contrôle des mouvements. Un taux faible est corrélé à l’anxiété, aux désordres moteurs, à la chute du plaisir et de la motivation.

Le GABA permet de maintenir le cerveau sous contrôle. Il favorise le calme et la relaxation, diminue la tonicité musculaire, ralentit le rythme cardiaque, ainsi que les spasmes musculaires. Il joue un rôle clé dans le contrôle de l’anxiété.

La sérotonine favorise la transmission synaptique, stimule le désir, la motricité, le traitement des fonctions cognitives, la rapidité des apprentissages.

Elle intervient dans la régulation du comportement alimentaire et dans la régularisation des stades de sommeil lent, de l’agressivité, de l’évitement du danger et de la punition. C’est d’ailleurs la sérotonine qui est utilisée comme molécule chimique dans les antidépresseurs. Des quantités basses de sérotonine sont corrélées à l’anxiété mais aussi à l’impulsivité/l’irritabilité. Des taux élevés sont reliés au bien-être, aux sensations de calme, de relaxation, de confiance, d’humeur positive.

D’autres recherches très récentes ont encore établi des liens entre le récepteur de l’ocytocine (OXTR) et les ressources psychologiques des sujets adultes13. Des valeurs basses de l’ocytocine se retrouvent chez des sujets qui présentent un degré d’optimisme, de maîtrise et d’estime de soi plus faible que chez ceux qui possèdent des valeurs élevées. Ils sont également plus sensibles au stress. Des taux faibles ont été également reliés à une symptomatologie dépressive.

La neurochimie sous contrôle génétique peut donc avoir une influence sur la susceptibilité aux stresseurs et sur d’autres réponses neurohormonales (repensons aux bébés anxieux observés par Kagan dont les niveaux de cortisol

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basal étaient augmentés), et sans doute le plus important encore, sur la manière de percevoir le Monde. Mais cette perception du Monde et réactivité associée, bien que gouvernées en partie par la biologie, peuvent être bouleversées et modifiées par l’environnement. Nous verrons que la valeur des différents neurotransmetteurs du cerveau dont la sérotonine, l’ocytocine, la dopamine et autres peut changer en fonction de l’environnement et des soins reçus précocement.

Une évolution du tempérament avec le temps et au travers des interactions

En grandissant, Nelle est parvenue à mieux gérer ses peurs et à les dépasser. À travers le temps, la fillette est apparue très consciencieuse, qualité qui l’a amenée à réussir sa scolarité et à en retirer une meilleure assurance. Elle redoute encore les contextes nouveaux et trop éprouvants (situation de compétition, de défis, prises de risques, festivités, nouvelles rencontres, etc.), mais ne panique plus comme avant. Son frère, Tom, est aussi parvenu à mieux réguler ses humeurs et sa réactivité explosive en cas de contrariété. Dès 7 mois, il pleurait déjà moins une fois rassuré par la présence de sa mère et encouragé par elle à découvrir des objets stimulants dans son environnement. C’est vers cet âge que de nombreux sourires et éclats de rire sont venus illuminer son visage et que la nouveauté a commencé à l’intéresser vivement.

Grâce à cette nouvelle découverte, il s’est empressé d’explorer le monde sous le regard bienveillant et en présence de sa mère. Lors d’un stress, il a compris qu’il pouvait faire appel à un adulte attentionné, son père ou sa mère et s’en est retrouvé rapidement soulagé. Plus tard, le sport est aussi devenu un moyen essentiel d’apaisement des tensions.

Fort heureusement, les enfants évoluent : ceux qui pleuraient beaucoup à la naissance et qui affichaient de l’irritabilité ou une très forte anxiété au début de leur vie voient, pour une bonne proportion d’entre eux, leurs émotions se régulariser et leur humeur se stabiliser14, souvent une ou deux années après leur naissance. Les enfants observés par Kagan qui présentent un tempérament plus anxieux ne deviendront pas forcément inhibés, apeurés et introvertis, même s’ils présentent un risque plus élevé que les autres. Bien entendu, ils ne seront pas forcément téméraires, jamais stressés et hypersociables dans l’enfance et puis plus tard. Les nourrissons irritables, vite frustrés et agités ne deviendront pas, a fortiori, des adolescents caractériels ou des adultes mal intégrés socialement. Ils sont, heureusement, eux aussi, très susceptibles de suivre un cheminement positif même s’ils ne seront probablement jamais d’un calme olympien ! Des études comme celles menées par Kagan et autres confrères, aboutissent à des conclusions sur des tendances et non des destinées. Tout dépend de la manière dont le milieu s’adapte au tempérament de l’enfant et des expériences qu’il rencontre. Comme nous le verrons dans la partie deux et trois, ce sont davantage les interactions entre les parents et l’enfant, la réponse du milieu et les représentations de l’enfant qui sont stables, et qui peuvent aménager ou, au contraire, entretenir, sinon, amplifier les « biais naturels » des quelques enfants. En bref, si le style de réponse semble s’agencer précocement, il continue néanmoins d’évoluer pendant la scolarité de l’enfant en fonction de multiples aspects existentiels.

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IV : LES CONDITIONS DE NAISSANCE ET LE SEXE DE L’ENFANT

Que les nourrissons soient nés un peu en avance, avec difficulté ou non, qu’ils soient garçons ou filles, quelques mois après leur naissance, rien ne permettrait de distinguer d’un point de vue physique s’ils ont vécu telle ou telle épreuve des suites immédiates de l’accouchement, voire même de situer la nature de leur sexe à moins de les vêtir en bleu ou en rose. Et pourtant, en matière d’expression et de réactivité aux épreuves, il existe des différences entre les sexes comme il semble y avoir des différences selon qu’un enfant soit né avant terme ou selon qu’il ait vécu une naissance plus difficile. En clair, la résistance émotionnelle ne semblerait pas la même selon ces particularités.

Ces différences, si on n’y prend pas garde, influencent sans doute davantage encore le démarrage de chaque enfant dans la vie.

Les accouchements difficiles

Les accouchements difficiles tant d’un point de vue technique que du point de vue du vécu émotionnel de la mère semblent associés à une plus grande réactivité de l’axe HHS.

À deux mois, les chercheurs ont constaté une élévation du cortisol et une hausse de la durée des pleurs chez les bébés nés par voie basse avec assistance (forceps, ventouse) par comparaison à ceux nés par césarienne1. D’autres études ont montré par la suite que l’état émotionnel de la mère au moment de l’accouchement importait autant que les modalités de la naissance sur la réponse du bébé au stress ultérieur2.

La prématurité

Les grands prématurés nés avant la 30ième semaine de grossesse présentent un manque de maturation de l’axe HHS et une insuffisance surrénalienne. Des études ont montré que les enfants nés avant 35 semaines de grossesse et de poids inférieur à 1500 grammes ont davantage de difficultés pour gérer leurs émotions et ajuster leur comportement, sont plus anxieux et plus agressifs pendant la prime enfance3, plus à risque de développer des désordres de l’attention avec hyperactivité4. Les parents et les enseignants ont confirmé que, durant l’enfance, ils présentaient davantage de problèmes comportementaux.

On a par ailleurs mentionné une prévalence de troubles anxieux à l’adolescence et une réponse au stress plus élevée lorsque les enfants ont été confrontés à un stress important pendant les premières semaines de l’existence5. Or, les enfants prématurés ont rencontré différentes épreuves du fait de leur fragilité (hospitalisations fréquentes et prolongées, soins douloureux divers, séparation d’avec la mère). Comparativement aux enfants nés à terme, ils présentent à 8 mois et à 18 mois d’âge corrigé un taux plus élevé de glucocorticoïdes suggérant une dysrégulation possible de l’axe HHS.

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