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La loi du 7 décembre 1988, dite de << réforme fiscale >> (*)

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(1)

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ANNEE - N° 5510

~H~

~JOIJRNR

HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE Edmond Picard

1881-1899 Léon Hennebicq

1900-1940

Charles Van Reepinghen 1944-1966

Jean Dai 1966-1981

La loi du 7 décembre 1988, dite de << réforme fiscale >>

(*)

CINQUIEME PARTIE

LES NOUVELLES REGLES DE CALCUL DE L'IMPOT DES PERSONNES PHYSIQUES

ET L'AMENAGEMENT DE CELUI-CI EN FAVEUR DE LA FAMILLE

Chapitre premier Les grands principes

103. - La loi de réforme ne modifie pas le principe essentiel qui est à la base du calcul de l'impôt des personnes physiques;

Cet impôt se calcule, d'une part, à un taux progressif par tranches, sur le montant global de l'ensemble des revenus nets des quatre catégories traditionnelles (revenus des propriétés foncières, revenus ·et produits de certains biens mobi- liers (164), revenus professionnels et revenus divers), diminué des sommes déductibles du montant total des revenus nets (165), et d'autre part, à des taux fixes spécifiques, sur certains revenus 'déterminés, extraits des quatre catégories qui précèdent.

104. -Aux normes antérieures, ·la loi de réforme apporte les quatre principales modifica- tions et innovations suivantes :

a) la simplification et la réduction du barême de l'impôt progressif;

b) la taxation séparée des revenus profession- nels;

c) l'introduction d'un quotient conjugal;

d) l'indexation automatique du barême.

Section 1 Le nouveau tarif

105. -Le nouveau tarif de l'impôt progressif applicable aux revenus non imposables distincte- ment, tel qu'il résulte de l'article 7 de la loi de réforme, ne comprend plus que sept taux, allant de 25 % au taux marginal de 55 %, au-delà de 2.200.000 F.

Ce nouveau tarif est une application du principe antérieur de l'imposition progressive par tranches.

(*) Pour le début de la présente étude, voy. J. T. du 3 juin 1989, pages 365 à 379.

(164) Cf. toutefois, supra, n°_ 19.

(165) Art. 71 et 72, C.I.R.

106. - Outre la simplification du tarif, on notera, dans une certaine mesure, la simplifica- tion des principes retenus pour le calcul de l'impôt lorsqu'il s'agit de tenir compte de la situation familiale du contribuable.

En vertu de l'article 6, § 1er, de la loi de réforme, une partie du revenu imposable, varia- ble selon la situation familiale est « exemptée d'impôt ». Cette quotité de revenus, qui est un véritable abattement, est « imputée sur les tranches successives du tarif en commençant par la première » (166), c'est-à-dire par celle imposée au taux le plus bas.

A titre d'exemple, la quotité exemptée est de 165.000 F pour l'isolé et de 130.000 F pour cha- que conjoint; cette quotité est majorée selon le nombre d'enfant à charge.

Pour les conjoints, la quotité exemptée (130.000 F pour chacun), est imputée sur chacune des deux bases d'imposition résultant de la taxa- tion séparée. La partie non utilisée de cette quotité exemptée est transférée sur l'autre base d'imposi- tion et sera ajoutée à la quotité exemptée de 130.000 F y afférente (167).

Quand des époux ont droit à des majorations de la quotité exemptée, par exemple pour enfant à charge, celles-ci sont imputées par priorité sur les revenus professionnéls du conjoint qui en a le plus_ et les autres revenus restants du ménage. Le solde éventuel non imputé est transféré sur l'autre base d'imposition (168).

Notons que la loi de réforme a mis fin à la règle selon laquelle une personne à charge ou un enfant décédé au cours d'une période imposable ne pouvait plus être considéré comme étant à charge, parce que ne faisant plus partie du ménage au 1er janvier de l'exercice d'imposition (169).

Section 2 Le décumul:

la taxation séparée du revenu professionnel le moins élevé

107.-Lorsque, dans un ménage, les con- joints bénéficient tous deux de revenus profes- sionnels, l'impôt progressif par tranches du nou- veau tarif est calculé séparément sur la base,

(166) Art. 7, § 2, L. de réforme.

(167) Circulaire précitée, 1/130.

(168) Circulaire précitée, 1/31.

(169) Art. 6, § 1er, dernier alinéa et § 2, dernier alinéa, L. de réforme.

Afde\ing Economisch RechlO JUIN 1989 -· __ ..-.,... .. T

EDITEURS:

MAISON FERD. LARCIER S.A.

Rue des Minimes, 39

1000 BRUXELLES

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d'une part, ·des revenus professionnels de celui des conjoints qui en a le moins et, d'autre part, des revenus professionnels de l'autre conjoint, lesquels sont cumulés avec les revenus immobi- liers, mobiliers et divers non imposables distincte- ment des deux conjoints (170). C'est ce qu'ex- prime l'article 2 de la loi de réforme.

Il ne s'agit donc pas d'un « décumul » vérita- ble : l'article 73 du Code des impôts sur les revenus, qui contient le principe du cumul des revenus des époux est maintenu. Il s'agit plutôt de la création de deux taxations distinctes, non pas à un taux fixe -spécifique, mais au; taux ordinaire, progressif par tranches.

108. - L'imposition distincte est applicable quelle que soit l'importance des revenus de toutes les catégories ou la nature des revenus profession- nels et sans la moindre limite. Le régime progres- sif complexe antérieur, applicable aux revenus compris entre 787.000 F et 1.574.000 F est, en

~ffet intégralement abrogé.

Comme l'énonce parfaitement la récente circu- laire de l'administration, dans le cas des conjoints qui bénéficient tous deux de revenus profession- nels, il existe deux bases imposables distinctes au taux progressif par tranches; la première est constituée du revenu professionnel le plus bas et la seconde du revenu professionnel le plus élevé, augmenté de tous les autres revenus imposables du ménage à l'exception des revenus imposables

« distinctement »au sens de l'article 93 du Code des impôts sur les revenus. Chacune de ces bases bénéficie séparément de sa propre quotité exemptée dont la partie non épuisée peut être transférée à l'autre (171).

109. - On notera toutefois que le législateur n'a pas, dans la foulée de la réforme, modifié l'article 87ter du Code des impôts sur les revenus, relatif à la réduction d'impôt pour les revenus dits de « remplacement », laquelle n'est applicable qu'une seule fois aux personnes mariées; les concubins bénéficiant de pareils revenus restent donc fortement privilégiés par rapport aux conjoints (172).

Section 3 Le quotient conjugal

110. - En vertu de l'article 4, § 1er, de la loi de réforme, lorsqu'un seul des conjoints bénéficie d'un revenu professionnel propre, 30 OJo de ce revenu, avec un maximum de 270.000 F est attribué à l'autre conjoint.

(170) Auxquels s'ajoutent les revenus du patrimoine des enfants mineurs:

(171) Circulaire précitée, 1113.

(172) F. Vanistendael, étude citée, Rev. gén. fisc., 1989, Ibis, pp. 12 et s., spéc. p. 12.

(2)

De même en vertu de l'article 4, § 2, de la loi, lorsque dans un ménage, les deux conjoints bénéficient tous deux de revenus professionnels et où le revenu professionnel net le plus bas est inférieur à 30 OJo des revenus nets professionnels additionnés, il est attribué au conjoint ayant le revenu professionnel le plus bas, une quote-part des revenus professionnels de l'autre conjoint qui, jointe au revenu le plus bas, artemnes 30 % cités, sans pouvoir excéder 270.000 F.

Le revenu professionnel fictif ainsi attribué est imposé à son propre taux, en tenant compte de sa propre quotité exemptée, avec le cas échéant, le transfert du surplus à l'autre conjoint.

La seule explication de la limitation à 270.000 F du quotient conjugal, donnée par le ministre des Finances, est qu'il s'agit-là d'une

«indemnité» pour le travail de l'épouse (173), lequel est ainsi valorisé de façon moindre que le salaire minimum légal (174).

Section 4 Les revenus d'aidants

111. - Les principes régissant l'attribution au conjoint aidant ne sont pas modifiés par la loi de réforme. Mais alors qu'auparavant le conjoint aidant ne pouvait pratiquement avoir recueilli aucun revenu professionnel propre, à l'exception d'un revenu annuel minimum de 21.000 F bruts qui était admis par l'administration, la loi de réforme prévoit que l'attribution d'un revenu d'aidant n'est exclue que si le conjoint aidant a recueilli plus de 350.000 F de revenus profession- nels personnels pendant la même période impo- sable.

112. -Comme c'est le cas pour le quotient conjugal, aucune charge professionnelle propre ne peut être déduite par le conjoint aidant du montant qui lui est attribué parce que cette attribution se ferait au départ des revenus nets de l'autre conjoint. Toutefois, le conjoint aidant, comme le conjoint bénéficiaire du quotient conjugal peut appliquer, avant l'imputation de la quotité exemptée qui lui est propre, les déductions prévues au départ des revenus professionnels nets (primes d'assurance-vie individuelle, amortisse- ment des emprunts hypothécaires) et celles prévues par l'article 71 et 72 du Code des impôts sur les revenus.

Section 5 L'indexation automatique

113. -L'article 8 de la loi de réforme nous paraît contenir la modification la plus fonda- mentale apportée par le législateur de 1988, à savoir, l'adaptation automatique à l'indice des prix, du tarif de l'impôt des personnes physiques tel que prévu par la loi de réforme elle-même, et ce à partir de l'exercice 1991 (175).

114. - La règle de l'indexation est simple et s'opère au moyen du rapport arrondi, entre l'indice moyen des prix de l'année précédant

(173) Doc. pari., Chambre, sess. 1988-1989, n° 597/7, p. 182.

(174) F. Vanistendael, étude citée, p. 14.

(175) Sur le problème de la détermination de l'exer- cice de l'entrée en vigueur de l'indexation automatique, cf. Tiberghien, «Taux d'imposition», Rèv. gén. fisc., 1989, Ibis, pp. 5 et s., spéc. p. 8; circulaire précitée, 1/37.

l'année des revenus et l'indice moyen des prix de l'année 1988 (176).

115. - La réponse à la question de savoir ce qui est indexé ne revêt nullement la même sim- plicité.

L'article 8, § 1er de la loi de réforme applique l'indexation aux « montants exprimés en francs dans la présente loi. »

Il s'agit notamment des limites de 270.000 F du

·quotient conjugal (177), de 350.000 F des revenus d'aidant (178), des montants du tarif progressif par tranches et des quotités exemptées (179), des montants de 60.000 F, 40.000 F et 20.000 F, des déductions opérées au départ des revenus profes- sionnels en vertu de l'article 13 de la loi de réforme, des montants des tranches et plafonds pour le calcul du forfait des dépenses profession- nelles (180), de la limite de 490.000 Fau-delà de laquelle la ·cotisation spéciale sur les revenus mobiliers est due (181), mais pas le montant de 120.000 F de l'abattement pour l'habitation et ses majorations, en application de l'article 8, § 3, de la loi.

Les montants. de 100 F, 200 F, 1.000 F et.

2.000 F prévus à titre d'amende par l'article 44 de la loi nous paraissent échapper à la règle de l'adaptation automatique à l'indice des prix. En effet, la seconde partie du § 1er de l'article 8 de la loi de réforme ne prévoit l'adaptation qu'« en ce qui concerne les diverses limites et tranches de revenus, exemptions, réductions, déductions et leurs limites ou limitations » (182).

116. -Selon l'article 8, § 1er, de la loi de réforme, l'adaptation à l'indice des prix s'appli- que également aux montants en francs exprimés dans le titre II du Code des impôts sur les reve- nus, lequel se compose des articles 3 à 93bis.

Sont donc !1-0tamment visés par l'adaptation, le montant de 950.000 F de l'article 10 du Code (183), des 350.000 F de l'article 89, relatif aux versements anticipés, la limite de 100.000 F pour les prix et subsides de l'article 67, 2°, le montant de 5.000 F de l'indemnité de frais de déplacement immunisée par l'article 41, § 2, du

Cod~, etc.

117. -Enfin, l'adaptation automatique à l'indice s'applique aux montants en francs exprimés dans les « dispositions législatives parti- culières relatives en la matière ». Par cette préci- sion, le législàteur nous paraît avoir voulu viser, plus particulièrement, les montants contenus dans l'arrêté royal d'exécution du Code et les arrêtés royaux .d'exécution de· la loi ·de réfor- me (184). 1

Section 6

Le problème de certaines taxations distinctes- 118.- Nous avons vu que le principe même du cumul des revenus imposables des conjoints

(176) Art. 8, § 2, L. de réforme.

(177) Art. 4, L. de réforme.

(178) Art. 3, L. de réforme.

(179) Art. 6 et 7, L. de réforme.

(180) Art. 24, L. de réforme.

(181) Art. 38, L. de réforme.

(182) En ce sens, Tiberghien, étud~ citée, p. 9.

(183) Circulaire précitée, 1/36.

(184) Notamment les montants exprimés dans l'an- nexe à l'arrêté royal du 27 février 1989 modifiant, en matière de précompte professionnel, l'arrêté royal d'exé- cution du Code des impôts sur les revenus.

n'était pas mis en cause par la réforme, laquelle se contentait, pour le calcul de l'impôt dû par les conjoints, de diviser les revenus cumulés en principe, en deux bases distinctes, chacune devant subir son taux propre.

Or, en vertu de l'article 93; § 1er, 3°, du Code,

« sont imposables distinctement ( ... ) au taux moyen afférent à l'ensemble des revenus imposa-:- bles de la dernière année antérieure pendant laquelle le contribuable a eu une activité profes- sionnelle normale », certains revenus profession- neis comme les indemnités de dédit; les arriérés de rémunération, etc.

En vertu de l'article 93, § 1er, 4°, du Code,

« sont imposables distinctement ( ... ) au taux afférent à l'ensemble des autres revenus imposa- bles »,certains autres revenus professionnels tels que les pécules de vacances anticipés et certains arriérés d'honoraires.

Le taux moyen d'imposition visé à l'article 93,

§ 1er, 3°, a toujours été entendu comme le taux fictif résultant de la multiplication des termes suivants:

a) le montant de l'impôt des personnes physi- ques, après réduction éventuelle pour charges de famille et pour jeunes ménages, établi à charge du contribuable pour l'année envisagée sur les revenus autres que ceux qui sont imposés distinctement en vertu de l'article 93 du Code des impôts sur les revenus, b) une fraction dont le numérateur est égal à 100

et le dénominateur est égal au revenu imposa- ble globalement qui a donné lieu au montant de l'impôt des personnes physiques visé dans le premier terme de la division.

Avant l'entrée en vigueur de la loi -de réforme, l'administration estimait, pour le calcul du taux moyen d'imposition, qu'il fallait toujours tenir compte du revenu imposable globalement comme s'il avait été « déterminé dans le régime ordinaire, même si l'impôt de base réduit qui est pris en considération, n'a pas été calculé selon ce régime>>. En d'autres termes, pour l'administra- tion, « lorsque, par exemple, les deux conjoints ont bénéficié de revenus professionnels pendant l'année de référence et lorsque l'impôt de base réduit le moins élevé a été calculé suivant le régime de la taxation séparée, on (devait) retenir le revenu imposable globalement, pour son montant déterminé après application, entre autres, de l'abattement maximum de 56.000 F, visé à l'article 64 du Code des impôts sur les revenus » (185).

Quoique la solution ne. nous paraisse pas compatible avec la philosophie de la loi de réforme en ce qui concerne la taxation séparée des revenus des conjoints, le taux moyen afférent à l'ensemble des revenus imposables visé par l'arti- cle 93, § 1er, 3°, du Code, nous semble être le taux moyen qui résulte de l'impôt dû par les deux conjoints pour l'ensemble de leurs revenus impo- sables et non le taux applicable à la base de calcul distincte de l'impôt pour chacun des conjoints.

L'article 93, § ter, 3°, exige en effet de rechercher le taux moyen afférent à l'ensemble des revenus imposables et, ces derniers, sont ceux qui sont cumulés, en vertu de l'article 73 du Code.

Pour les mêmes raisons, il ne nous paraît pas possible, pour l'application de l'article 93, § 1er,

4°, du Code, de tenir compte· du taux de l'impôt afférent à l'une des deux bases distinctes prises en_

(185) COMM. I.R., 93/34.

(3)

considération, dans le · chef de chacun· des conjoints, pour le calcul de l'impôt des personnes physiques.

Chapitre II

Les charges déductibles des revenus nets globalisés des conjoints

Section 1 Méthodes de déduction

119. -Les frais d'encaissement et de garde relatifs à des revenus mobiliers, antérieurement visés par l'article 71, § § 1er et 2, du Code des impôts sur les revenus, abrogé par l'article 35 de la loi de réforme, sont, en application de l'article 25 de la loi de réforme, déduits directement des revenus mobiliers des conjoints auxquels ils sont

« afférents ».

Il n'y a donc pas lieu de les imputer suivant la règle proportionnelle prévue par l'article 17 de la loi réforme.

120. - Les rentes alimentaires visées par l'arti- cle 71, § 1er, 3°, du Code, sont déductibles à concurrence de 80 OJo des revenus des conjoints débiteurs de la rente. Le solde en excédent non imputé peut l'être sur les revenus de l'autre conjoint, par application de l'article 17 de la loi de réforme.

En ce qui concerne les versements de l'épargne ou de l'assurance-pension, ces derniers sont déductibles, à concurrence d'un plafond de 20.000 F pour chaque conjoint envisagé isolé- ment, dans la mesure où chacun a conclu un contrat de l'espèce. Le solde en excédent non imputé sur les revenus d'un conjoint peut l'être pour les revenus de l'autre, en application de l'article 17 précité.

121. - Pour les autres charges, comme le principe du cumul des revenus des conjoints est maintenu par la réforme, une seule limite de déduction et de calcul reste applicable en ce qui concerne les autres charges déductibles des reve- nus nets, sauf les cas visés ci-dessus (186).

Section 2

Les différentes charges déductibles 122. -L'article 26 de la loi dispose que « les intérêts de dettes contractées en vue d'acquérir ou de conserver des revenus mobiliers ne constituent pas des charges déductibles ». L'article 71 , § 1er, 2°, du Code, est par ailleurs abrogé (187).

Nous avons examiné ci-dessus dans quelle mesure les intérêts de dettes ayant permis d' acqué- rir des revenus immobiliers sont encore déducti- bles.

En ce qui concerne les revenus mobiliers, la ratio /egis de cette disposition résulte selon l'administration, du fait« qu'il a été constaté que de tels ·revenus n'étaient généralement plus déclarés qu'en vue de la récupération du précompte ... , les revenus déclarés étant absorbés par la déduction des intérêts. Des programmes informatiques ont même été mis sur le marché en vue de calculer la quotité de revenus mobiliers à déclarer pour se présenter sur le plan de la

(186) Cf. S. Vanistendael, note citée, spéc. p. 20.

(187) Art. 35, § 1er.

récupération du précompte dans la situation la plus favorable » (188).

Cette prétendue justification est pour le moins étrange : on présente çomme un abus ce qui n'a jamais été qu'une manière, pour le contribuable, d'éviter une imposition sur un revenu inexistant.

Si l'on emprunte dans le but d'obtenir des revenus mobiliers, le seul revenu effectivement perçu constitue évidemment la différence entre les reve- nus obtenus et les intérêts payés. Dorénavant, les revenus demeureront taxables, en ce sens qu'ils

· supporteront le précompte mobilier et éventuelle- ment la cotisation spéciale sur les revenus mobi- liers, mais les intérêts payés ne seront plus déductibles. Cette disposition rend économique- ment ruineux tout emprunt destiné à 1' acquisition de revenus mobiliers, en dehors de l'exercice d'une activité professionnelle, puisqu'on taxera désormais le revenu brut, sans tenir compte des charges d'intérêts ayant permis de l'obtenir.

123. - Une autre modification, de moindre importance, consiste en la réforme du régime des déductions, autres qu'à titre de charges profes- sionnelles, des rémunérations payées ou attri- buées à un employé de maison (189).

Nous avons exposé, dans un précédent com- mentaire, le régime incroyablement complexe, organisé par la loi du 4 août 1986, pour la déduction d'une partie des rémunérations payées à des employés de maison, lorsque ces rémunéra- tions ne constituent pas des charges profession- nelles (190).

Cette législation, qui avait pour but de créer des emplois dans le secteur du personnel domestique, soumet à des conditions, dont certaines com- plexes, la déductibilité d'une partie des rémunéra- tions payées aux employés de maison.

Il ne fallait dès lors guère s'étonner de voir que cette législation n'a connu quasiment aucun succès, le ministre reconnaissant, en commission du Sénat que pour la première année d'applica- tion (soit l'année 1987; exercice d'imposition 1988), il n'y avait eu que 89 cas où cette déduction a été demandée (191).

Le législateur, au lieu de supprimer cette législation ou de la rendre plus aisée à appliquer, s'est borné à une modification mineure, qui facilitera sans doute la tâche de l'administration, mais très faiblement celle des contribuables. La loi s'est en effet bornée à prévoir que la déduction serait dorénavant uniformément limitée à 50 OJo, alors qu'auparavant, le taux de déduction variait de 40 à 60 OJo, suivant le montant des revenus de l'employeur.

Dans la mesure où les conditions d'application les plus dissuasives sont maintenues, on voit difficilement pourquoi cette mesure connaîtrait un plus grand succès dans l'avenir.

124. -Enfin, la lutte annoncée depuis plu- sieurs années, contre les« dépenses fiscales »,n'a pas einpêché le législateur d'introduire une nou- velle dépense déductible de l'ensemble des reve- nus nets imposables : les sommes exposées pour la garde d'enfants de moins de trois ans.

(188) Doc. par/., Sénat, n° 440-2, pp. 120 et 121.

(189) Art. 14, de la loi.

(190) Afschrift, « La loi du 4 août 1986 portant des dispositions fiscales », J. T., 1986, p. 688.

(191) Doc. par/., Sénat, n° 440-2, p. 83.

L'article 15 de la loi prévoit que« sont déduites de l'ensemble des revenus nets des différentes catégories visées à l'article 6 du Code des impôts sur les revenus, à concurrence de 80 OJo, les dépenses engagées pour la garde d'un ou plusieurs descendants à. charge du contribuable ou des enfants dont il assume la charge exclusive ou principale et qui n'ont pas atteint l'âge de trois ans ».

On constate donc que la déduction n'est permise qu'à concurrence de 80 %, que l'enfant soit un descendant du contribuable, ou que celui- ci en assume la charge exclusive ou principale. La loi exige en outre que l'enfant soit âgé de moins de trois ans, sans préciser à quelle date cet âge devrait être atteint : s'agit-il du moment où la dépense est engagée, ou du 1er janvier de l'exercice d'imposition ? Il nous semble à la fois logique et conforme à la rédaction du texte, de considérer que c'est le moment d'engagement de la dépense qui importe à cet égard.

125. -Loin d'être découragé par le peu de succès des mesures prises en matière de personnel domestique en 1986, le législateur a encore cru bon de soumettre la présente déduction à plu- sieurs conditions.

Il faut tout d'abord que le contribuable bénéfi- cie de revenus professionnels visés à l'article 20 du Code. Il peut donc s'agir tant de rémunérations, que de bénéfices ou de profits, ou même de pensions. Aucune condition n'est également fixée quant au mondnt de ces revenus professionnels.

En outre - et cette condition posera beaucoup plus de difficultés - les sommes déductibles doivent être payées soit à des institutions recon- nues, subsidiées ou contrôlées par l'Office de la naissance et de 1' enfance, par Kind en Gezin ou par l'exécutif de la communauté germanophone, soit à des gardiens indépendants d'enfants à domicile ou à des crèches placés sous la surveil- lance de ces institutions (192). Cette condition implique nécessairement que le débiteur révèle l'identité du . bénéficiaire, pour permettre à l'administration de vérifier si les conditions requi- ses sont réunies. L'administration ne manquera pas d'utiliser ces renseignements pour procéder à l'imposition des revenus du bénéficiaire.·

On a soulevé, à juste titre, que le texte serait difficile à appliquer en raison de l'existence de trois catégories de gardiennes d'enfants, au sens de l'arrêté royal du 29 janvier 1988 en la matière (193). Nous nous abstiendrons d'exami- ner ici les différentes subtilités que cela suppose.

Enfin, une dernière condition de déductibilité est que les montants payés soient justifiés par des documents probants, et que ceux-ci soient joints à la déclaration à l'impôt des personnes physi- ques (194).

En outre, la loi autorise le Roi, par arrêté délibéré au Conseil des ministres, à fixer un montant maximum déductible par jour de garde et par enfant, sans que ce montant soit inférieur à 160 F. Ce montant a été fixé _à 345 F, qui représente 80 OJo du montant maximum (426 F), que les parents doivent payer aux gardiennes d'enfants subsidiées.

(192) Art. 15, § 2, li, de la loi.

(193) Fiscologue, 30 janv. 1989, p. 2 et s.

(19~) Art. 15, § 2, c, de la loi.

(4)

SIXIEME PARTIE MODIFICATIONS·

EN MATIERE D'IMPOT DES SOCIETES Chapitre premier

La réduction des taux de déduction des revenus définitivement taxés 126. - Le régime des revenus définitivement taxés, institué par les articles 111 et suivants du Code, a pour but d'éviter une double imposition économique des dividendes distribués par une société à une autre société, pour les actions de celle-ci faisant l'objet d'une participation perma- nente, au sens de l'article 112 du Code.

Jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi, cette double imposition économique était évitée en grande partie, en permettant à la société action- naire de déduire de son bénéfice imposable un montant égal à 95 OJo des dividendes de telles participations permanentes. Ce taux de 95 % était toutefois réduit à 90 % dans le cas défini par l'article 113, § 2, du Code, des sociétés dites

« holdings ».

Si la déduction n'était permise qu'à concur- rence de 90 ou 95 %, et non de 100 %, c'était afin de tenir compte du fait que les sociétés bénéficiai- res de· dividendes supportaient certains frais qui étaient, de toute manière, déductibles à titre de charges professionnelles (195).

127. - La loi a réduit la quotité déductible des revenus définitivement taxés à 90 ou 85 %, au lieu de respectivement 95 ou 90 %.

Le gouvernement n'a pas pris la peine de justi- fier cette mesure, qui ne peut en tout cas l'être par l'idée que les charges déductibles par les sociétés holdings entraîneraient une réduction du bénéfice imposable plus importante que le forfait de 5 ou 10 % qui était censé les représenter. Il a toujours été notoire que ce dernier forfait excédait très lar- gement la réalité dans la quasi-totalité des sociétés holdings.

Il faut bien se résoudre à la seule explication plausible de la modification contenue dans l' arti- cle 30 de la loi de réforme : il fallait à tout prix trouver une mesure pouvant, selon l'administra- tion, rapporter au Trésor deux milliards cinq cent millions (196), et il apparut politiquement oppor- tun d'effectuer ce prélèvement au détriment des sociétés détenant des participations dans d'autres sociétés.

A ce stade, la législation fiscale perd tout caractère de généralité et toute justification sociale ou économique·, et se ramène à la pure légalisation d'une confiscation à charge d'un

secteur déterminé. '

On en trouve un autre exemple dans la loi du 7 décembre 1988, à propos de la taxe annuelle sur les participations bénéficiaires (197).

En effet, dans la mesure où on revient partielle- ment, à propos du régime des revenus définitive- ment taxés, sur une règle dont l'objet était d'évi- ter une . double imposition économique des dividendes, c'est clairement que, dans une cer- taine mesure, on admet dorénavant une telle double imposition.

(195) Doc. pari., Sénat, n° 440-2, p. 126.

(196) Doc. par!., Chambre, sess.l988-1989, n° 597/7, p. 72.

(197) Ci-dessus, art. 43, de la loi.

128. -On peut d'ailleurs se demander, à pro- pos de cette mesure, comme de bien d'autres, sur quels éléments l'administration peut se fonder pour déterminer l'impact budgétaire des mesures fiscales.

Si elle s'est bornée à calculer l'incidence, sur le montant des revenus définitivement taxés, déduits jusqu'à présent, de la mesure proposée, elle se prépare bien des désillusions, qu'on quali- fiera bientôt de« moins-values budgétaires ».

L'administration ne doit en effet pas s'attendre à ce que les sociétés holdings s'abstiennent de réaction devant une telle législation (198). Pour de telles sociétés, l'imposition grevant dorénavant 10 % au lieu de 5 % des dividendes perçus suppose un doublement de leur charge fiscale, qui justifiera des mesures de restructuration.

Ainsi, il est vraisemblable que des groupes ou une chaîne de sociétés qui détiennent des partici- pations les unes dans les autres se réorganiseront.

Dans le meilleur des cas, il s'agira de fusions entre des sociétés belges, ce qui réduira le nombre de sociétés soumises à l'imposition sur la partie taxable des divide!J.des. Dans d'autres cas, il faut s'attendre à ce que des sociétés holdings émigrent vers des pays ne pratiquant pas une telle double taxation. Ce ne serait pas la première fois qu'une augmentation d'un taux ou d'une base imposable entraînerait une réduction des recettes de l'Etat, parce que celui-ci a négligé de tenir compte des modifications de comportement du contribuable.

Chapitre Il La cotisation spéciale sur les commissions secrètes

129. -La cotisation spéciale sur les commis- sions secrètes vise « les charges ou sommes non justifiées visées aux articles 47, § 1er et 101 du Code des impôts sur les revenus ». Il s'agit par conséquent des rémunérations, et des revenus payés à des exploitants ou titulaires de profession libérale (sauf dans le cas où une facture a été émise par ceux-ci), sans que le contribuable puisse justifier de ces sommes par la production de fiches individuelles et de relevés récapitulatifs établis et remis dans les formes et les. délais requis.

·Jusqu'à présent, non seulement ces sommes n'étaient pas déductibles de la base imposable, et ce tant à l'impôt des personnes physiques qu'à l'impôt des sociétés, mais en outre lorsqu'elles étaient pàyées par une société, elles étaient soumi- ses à une cotisation égale à la différence entre

« d'une part, les soixante-sept virgule cinq centiè- mes du triple de ces charges et, d'autre part, la quotité de l'impôt des sociétés ... qui se rapporte proportionnellement au triple desdites charges ou sommes » (199).

La cotisation pouvait donc atteindre un maxi- mum de 202,5 % du montant net attribué au bénéficiaire. Ce taux n'était toutefois qu'appa- remment dissuasif, parce qu'il s'appliquait au montant net de ces revenus. Il existait encore des cas où le paiement de cotisations secrètes s'avérait en définitive plus avantageux pour le bénéficiaire que la déclaration de la charge par l'entreprise qui les attribuait. Le total des impôts et des charges sociales dus à raison de ces revenus excédant

(198) Voy. Denys et Van Caeneghem, «Fiscalité des entreprises », Rev. gén. fisc., 1989, dossier Ibis, p. 28.

(199) Art. 132, du Code.

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encore le montant de la cotisation (200). Le taux effectif de cette cotisation était de 66,94 % du montant brut avànt impôt (201), ce qui était inférieur au taux maximum des charges fiscales et sociales pouvant grever un revenu.

130. - Ce système complexe a été modifié, notamment dans le but « de ne plus se limiter au seul impôt, mais d'incorporer à l'imposition les cotisations sociales, patronales et personnelles, que l'octroi de ·commissions secrètes permet d'éluder » (202).

Dorénavant, la loi prévoit que« les charges ou sommes non justifiées visées aux articles 4 7, § 1er, et 101 du Code des impôts sur les revenus, ne sont pas incorporées à la base qui est imposable conformément aux articles 126 à 128 et 130 du même Code».

La loi de réforme décide en effet que les com- missions secrètes seront soumises aux trois règles suivantes :

- le montant des commissions secrètes n'est pas repris dans le bénéfice imposable;

les commissions secrètes sont sujettes à une cotisation spéciale distincte au taux de 200 OJo;

cette cotisation spéciale distincte sera déducti- ble au titre de charge professionnelle.

Ce régime est par conséquent très différent du régime antérieur. Sans le dire expressément, on relld en effet, aux commissions secrètes le carac- tère de charges déductibles, en dépit de leur exclusion de principe des charges professionnelles par l'article 47 du Code. La loi dispose en effet qu'elles ne font pas partie du bénéfice imposable.

131.- En revanche, les commissions secrètes seront taxées, au taux de 200 %, à une cotisation spéciale, et à ce point spéciale qu'on l'a qualifiée au cours des travaux préparatoires d'« impôt autonome et non plus taxation complémentaire à l'impôt des sociétés » (203).

Tiberghien a, à notre avis, à juste titre jugé cette expression excessive; et a notamment fait observer qu'on ne pouvait comparer cette cotisa- tion à la « cotisation sociale assimilée à l'impôt des _ personnes physiques », qui elle, bénéficie effectivement d'un régime particulier (204). Il en résulte à notre avis que cette cotisation est régie par les mêmes règles que l'impôt sur les revenus, notamment du point de vue de la procédure.

132. -Une question importante est de savoir si cette cotisation continue à s'appliquer exclusi-.

vement aux sociétés ou si elle devient actuellement applicable . également aux personnes physiques qui auraient payé à des tiers des commissions secrètes.

Sans s'en expliquer, Tiberghien semble consi- dérer que la cotisation s'appliquerait aux person- nes physiques également (205).

(200) Th. Afschrift, « Les entreprises à la recherche de voies mojns imposées pour leurs dirigeants et leur personnel de cadre », L'entreprise et les voies les moins . imposées en droit fiscal belge, Conférence du Jeune barreau de Bruxelles, pp. 141-142.

(201) Doc. part., Sénat, rapport, n° 440-2, p. 131.

(202) Doc. part., Sénat, n° 440-2, p. 131.

(203) Doc. part., Sénat, n° 440-2, p. 131.

(204) Tiberghien, « Taux d'imposition »,La réforme de 1988, revenu général de fiscalité, 1989, lbis, pp. 5 et s., initialement, p. 11.

(205) Ibidem, p. 11.

(5)

Cette cotisation est en revanche considérée comme propre aux sociétés par Denys et V an -Caneghem (206).

Certes, la référence, dans l'article 33 de la loi, aux sommes et charges non justifiées visées aux articles 47, § 1er, et 101 du Code, peut faire penser à- une disposition applicable en matière d'impôts des personnes physiques, puisque l'arti- cle 47 fait partie des dispositions relatives à cet impôt.

Il convient toutefois de relever qu'une expres- sion identique est utilisée dans l'article 132 du Code, qui se réfère donc également expressément à l'article 47, § 1er. On a cependant toujours admis que l'article 132 ne s'appliquait qu'aux sociétés, parce qu'il figurait lui-même dans les dispositions relatives à l'impôt des sociétés.

L'article 33 de la loi de réforme ne précise pas expressément, qu'il_modifie l'article 132 du Code, puisque la loi n'a pas été coordonnée, il ne fait aucune distinction entre l'impôt des sociétés et il n'est pas possible d'invoquer la place qu'il

o~cupe.

L'article 33 fait en effet partie d'un chapitre dénommé très généralement « compensations budgétaires'», et d'une section intitulée, sans précision _ excessive, « dispositions particuliè- res ».

Il paraît toutefois manifeste que l'intention du législateur a été de remplacer l'article 132 du Code, disposition relative exclusivement aux sociétés, par une autre disposition concernant exclusivement celles-ci. Les travaux préparatoires sont en effet muets quant à une éventuelle inten- tion d'étendre aux personnes physiques la cotisa- tion spéciale qui ne frappait que les sociétés.

133. - La cotisation spéciale constituera une charge déductible pour son débiteur. Cette déductibilité a été voulue pour éviter une double taxation, tant à la cotisation spéciale qu'à l'impôt des sociétés (207).

On ne s'étonnera pas du fait qu'un impôt soit déductiblé de la base imposable : cette situation générale pour les impôts indirects supportés par un contribuable, est en effet fréquente pour certains Impôts directs, tels les précomptes non imputables, notamment le précompte immobilier.

On peut toutefois se demander si la loi- atteint encore son objectif, puisqu'elle permet d'une part la déduction de la commission secrète elle-même et d'autre part, celle de la cotisation payée sur

·cette commission, soit le double de celle-ci. Le total déductible de la base_ imposable à l'impôt des sociétés atteint par conséquent le triple de la commission secrète, alors que la cotisation spéciale repJésente le double de celle-ci. En sup- posant un impôt des sociétés au taux de 43 OJo, l'avantage résultant de la déduction représente 129 o/o, tandis que la taxation atteint 200 o/o, ce qui laisse subsister une taxation effective de 71 %. Mais celle-ci s'applique à un revenu

« net », qui ne sera pas imposé dans le chef du bénéficiaire. Il ne nous semble pas que ce taux effectif suffise pour dissuader de l'octroi de commissions secrètes. ·

134. -La cotisation s'avérera finalement beaucoup plus lourde pour les contribuables sou- mis à l'impôt des personnes morales. En effet,

(206) Etude citée, Rev. gén. JlSC., 1989, pp. 32 et s., spéc. p. 36, chap. III et n° 24.

(207) Doc. par/., Sénat, ibidem.

pour celles-ci, la cotisation, atteindra également 200 % des charges non justifiées, mais, comme ces contribuables ne sont pas imposés sur leurs revenus professionnels, ils ne bénéficient ni de la déductibilité des charges, ni de celles de la cotisa- tion, et supporteront donc effectivement la coti- sation au taux de 200 %.

135. - Enfin, la question se pose de savoir si le nouveau mode de calcul de la cotisaHon spéciale s'applique également aux non-résidents. La loi est en effet muette à leur égard.

Certes, ainsi que le relève Tiberghien, l'article 152, 2°, du Code, _prévoit que les sociétés non résidentes sont soumises, notamment à la cotisa- tion spéciale sur les commissions secrètes visées par l'article 132 de ce Code. La nouvelle loi abroge explicitement l'article 132, mais si l'on peut admettre que la nouvelle disposition concerne également les sociétés étrangères, il nous semble en revanche difficile. de concevoir que le renvoi prévu par l'article 153 à l'article 132 s'applique à une disposition ultérieure qui a remplacé cette disposition sans toutefois être introduite dans le Code. On ne peut en effet soutenir que l'intention du législateur, lorsqu'il a voté l'article 132, a été de rendre applicables les règles à venir qui devaient remplacer l'article 132;

un tel type d'interprétation, contraire à la règle de l'interprétation stricte qui prévaut en droit fiscal, ne nous paraît pas admissible.

Il nous semble dès lors qu'il faille en déduire que les nouvelles dispositions ne sont pas applica- bles aux sociétés non résidentes, à défaut de renvoi dans l'article 152 du Code, à l'article 33 de la loi, qui est muet à leur égard.

Nous sommes conscients que cette conséquence est absolument contraire aux intentions du législateur, qui n'a pas voulu exonérer de la cotisation spéciale les sociétés non résidentes. Elle est toutefois à notre avis la seule conciliable avec les textes et les principes d'interprétation du droit fiscal.

Il s'agit là d'une des multiples conséquences du procédé particulièrement malencontreux choisi - par le législateur, en superposant la loi de réforme au Code et en se bornant à-prévoir une coordina- tion ultérieure. Il faut évidemment s'attendre à ce que, lorsque cette coordination aura lieu, et fera l'objet d'une loi d'approbation, de telles erreurs seront corrigées .. On peut toutefois le regretter pour l'insécurité juridique que cela cause.

Chapitre III

Modification en matière de fusion 136. -L'article 124 du Code soumet l'exoné- ration de la cotisation spéciale sur le boni de liquidation à plusieurs conditions.·

Aux conditions suivantes, depuis le 1er janvier 1989, il faut en outre ajouter que pour bénéficier de l'immunité, lorsque la liquidation n'a pas été décidée directement en vue de la fusion ou de la scission, le liqmdateur ne peut pas procéder

« à l'aliénation intégrale ou partielle d'immobili- sations corporelles, incorporelles ou financiè- res » (208). -

(208) Art. 174, de la loi-programme. Vu son impor- tance, il nous a paru utile d'en traiter ici, en dépit du fait qu'il ne s'agit pas d'une disposition de la loi de réforme.

Avant l'entrée en vigueur de cette disposition, il arrivait souvent que les sociétés se mettaient en liquidation, procédaient à. la réalisation, avec plus-value, d'une partie importante, voire'la tota- lité, de leurs immobilisations, et se faisaient absorber par une autre société. Les plus-values réalisées après la mise en liquidation et avant la fusion, n'étaient pas imposables, à défaut de répartition aux actionnaires. La modification de la législation empêche dorénavant dans ce. cas la société de bénéficier de l'immunité prévue par l'article 124 (209).

Il faut toutefois préciser que la règle nouvelle ne s'applique qu'aux cessions d'immobilisations.

Le mécanisme décrit ci-dessus pourra toujours _ être utilement adopté si la cession porte sur d'autres actifs, tels des stocks ou des créances.

SEPTIEME PARTIE

PROCEDURE ET INFORMATISATION DE L'ADMINISTRATION FISCALE

Chapitre premier Les projets d'informatisation avant la loi de réforme fiscale

Section 1

Les projets d'informatisation 137. -Les conséquences juridiques de l'auto- matisation de l'administration fiscale en ce com- pris l'automatisation de son pouvoir informatif et décisionnel, n'ont fait, dans notre pays, l'objet que de peu d'études (210). Ceci n'est sans pas surprendre, quand on sait que les administrations fiscales belges ont été parmi les premières à se doter de puissants moyens informatiques. Au début, les raisons de cette informatisation sont certainement à rechercher dans la nécessité de rationaliser tant le travail administratif de traite- ment des informations (notamment le traitement des déclarations fiscales) que la réalisation des tâches matérielles d'exécution à caractère répétitif (envoi des formulaires de déclaration, enrôlement des cotisations, impressions des invitations de paiement, comptabilisation des paiements, tenue des comptes-, etc.).

Dans de pareilles applications, l'informatique fiscale n'est pas un outil de contrôle de la fraude fiscale, mais un simple instrument de rationalisa- tion du travail administratif, un moyen d'amélio- rer la productivité et la rentabilité.

138. -Ce n'est que depuis une quinzaine d'années que l'informatique est apparue, à l'étranger, comme une technique de contrôle de la fraude fiscale. Le droit fiscal comparé nous révèle, à cet égard, trois types de procédés princi- paux.

-(209) Voy. Th. Afschrift, «Les réorganisations de sociétés en droit fiscal belge », Actes du colloque Mer- gers and Acqui$itions, Ecole de Commerce Solvay, p. 7.

(210) Cf. P. Glineur, «Fraude informatique et fraude fiscale, l'informatique comme instrument ou comme objet de contrôle de la faute fiscale », actes du colloque U.L.B., 7 déc. 1984; «L'ordinateur, l'homme et l'organisation » et« La fiscalité et l'informatique ...

vers la naissance d'un droit fiscal de l'informatique », Rev. gén. fisc., 1984, pp. 75 et s.; T. Delahaye, « Ré- flexions au sujet d'une réforme de la procédure fis- cale », Rev. gén. )ISe., 1989, pp. 10 et s.

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(6)

Le premier procédé est celui du contrôle formel. Il s'agit d'un contrôle d'anomalies matérielles et formelles dans les déclarations fiscales, signalant des résultats de caractère objectif, non sensibles, au départ de données objectives et formelles. A titre d'exemple, pareil contrôle formel peut détecter l'absence de décla- rations de revenus professionnels dans-le chef d'un contribuable salarié au départ d'informa- tions tirées des « fiches » délivrées par les employeurs et autres débiteurs de rémunération.

Pareil contrôle formel n'est rien de plus que la rationalisation du contrôle formel de type

« manuel » effectué antérieurement.

Le deuxième procédé est celui de la présélection automatique. Ce procédé automatisé indique aux services de contrôle les déclarations et les contri- buables « à vérifier par priorité » au départ de la constatation de divergences par rapport à des ratios ou à des normes préétablies. Ainsi, sur base de données objectives, tirées de la déclaration, et de ratios (le plus souvent statistiques), la machine dégage des résultats fortement subjectifs et sensi- bles, comparables à de véritables listes de« frau- deurs potentiels ».

Enfin, le troisième procédé consiste en l'in- terconnexion des banques de données fiscales et administratives, permettant aux divers agents chargés des contrôles fiscaux d'obtenir un aperçu global, le plus large possible, de la situation du contribuable, ceci aux fins de découvrir l'un ou l'autre fait ou situation permettant de mettre en cause la sincérité des déclarations fiscales (211).

139.-Le premier procédé est exempt de tou- tes critiques. Les deux autres procédés sont depuis longtemps à l'étude au sein du département des finances, qui envisageait, déjà avant 1983, une réorganisation qualifiée de « révolutionnaire » par le ministre concerné (212).

En effet, ce département met au point un système de présélection automatique des déclara- tions en matière de t.v.a. et d'impôts sur les revenus, ainsi qu'un « dossier fiscal synthétique unique par contribuable », c'est-à-dire une ban- que de données résultant du jumelage des ban- ques de données des administrations fiscales et mises à la disposition de chacune de ces adminis- trations fiscales par téléprocessing.

140. -On ne saurait dissimuler l'appréhen- sion des contribuables à propos de l'élaboration d'un système de connexion de banques de don- nées administratives. Si les fondements de pareille appréhension peuvent apparaître dans certains cas illégitimes et être assimilés à la crainte de voir une fraude éventuelle découverte, il ne reste pas moins vrai que, dans la plupart des cas, il s'agira d'une aspiration à une discrétion toute particu- lière sur des données dont le volume et le degré de sensibilité font de toute divulgation une atteinte grave à la vie privée.

(211) Système Proselec en France, système D.I.F.

aux Etats-Unis (discriminated fonctions system); cf. P.

Courtois, Face au fisc, contribuables et contrôleurs, Stock, Paris, 1976, pp. 50 et 96).

(212) Travaux préparatoires de la loi du Il avril

1983, « Portant des dispositions fiscales et budgétaires, rapport au nom de la commission du budget, Doc.

pari., Chambre, sess. 1982-1983, 46617/17, p. 27; cf.

égalem., M. De Broeck, Eléments de la science des im- pôts, par F. Loeckx et R. Van Dioant, 1982, t. Il, 5 337 et s.

On a encore souligné récemment, qu'il existe non seulement une libre circulation des ·données des administrations fiscales vers les autres a<;lmi- nistrations de l'Etat, mais encore une libre circu- lation des informations des diverses adminis- trations de l'Etat vers les administrations fiscales (213).

Cette libre circulation des informations s'étend aux « établissements et organismes publics », notion vague qui « englobe aussi bien les académies de littérature, les archives, la radio et la télévision belge, la Bibliothèque royale, la Caisse nationale d<r crédit professionnel, le Centre d'étude de l'énergie nucléaire, la Commis- sion bancaire, les fabriques d'église, le domaine de Gaasbeek, l'Orchestre national de Belgique, la Régie des postes et de nombreux autres cas ! » (214). Certains ont conclu qu'il résultait de ce principe de libre circulation des données, qu'il était devenu légalement possible soit de créer une banque de données de grande dimension, qui, grâce à l'informatique, permettra de stocker un nombre incroyable de renseignements au sujet de chaque contribuable (215), soit, tout en conservant « le principe du stockage des infor- mations utiles au sein de chaque administra- tion, de permettre aux autres administrations d'avoir directement accès à ces informa- tions (216).

141. - Avant l'entrée en vigueur de la loi de - réforme, on pouvait douter de la légalité de pareille banque de données centrale ou de la légalité de pareilles possibilités d'accès intégral d'une administration à la banque de données d'une autre administration.

S'il est vrai, dans une certaine mesure, qu'il n'existe pas à proprement parler, un devoir de secret professionnel entre les divers services publics ou dans les rapports de l'administration fiscale avec le pouvoir judiciaire, il n'en restait pas moins qu'il existait une obligation de discré- tion entre les divers services administratifs de l'Etat, fiscaux ou non : le respect dû· à la vie privée du contribuable nécessite que l'accès des informations provenant d'une administration ne puisse apporter à l'administration sollicitant des informations, des données superflues par rapport au but poursuivi par l'administration demande- resse, c'est-à.,.dire pour les administrations fisca- les, la perception d'un impôt bien détermi- né (217).

En effet, l'accès à des informations superflues n'est guère licite, car il ne répond pas aux princi- pes de « spécialité » qui guide l'action adminis- trative (et donc également l'information admi- nistrative), principe selon lequel chaque service administratif doit limiter son activité à ce qui constitue l'objet de la mission qui lui a été confiée (218). Il est en effet impossible de justifier la légalité d'un accès intégral par une administra- tion fiscale au dossier ou à la banque de données d'une autre administration non fiscale ou d'un

(213) T. Delahaye, « Le secret de la vie privée et la taxation des revenus », Rev. gén. fisc., 1984, pp. 132 et s., spéc. p. 36.

(214) T. Delahaye, ibid.

(215) T. Delahaye, ibid, p. 139.

(216) Travaux ·préparatoires de la loi du 11 avril

1983, rapport cité, p. 27.

(217) P. Glineur, actes du colloque, cité.

(218) J. Lebrun,<< L'information de l'administration par les entreprises et son utilisation », Banque de don- nées - Entreprises - Vie privée, C.I.E.A.U., Créadif,

1980, p. 176.

établissement public : l'article 235 du Code des impôts sur les revenus n'a pas pour objet d'auto- riser un dépouillement systématique des données des autres services administratifs aux fins de dépister les fraudes possibles commises en matière fiscale (219), mais seulement de conférer à l'administration fiscale un moyen subsidiaire de contrôle, dans la mesure où certains éléments particuliers lui sont nécessaires.

De même, il est impossible de trouver un fondement légal quelconque à une transmission par une administration fiscale à une autre admi- nistration fiscale, de l'intégralité des renseigne- _ments en sa possession sur un contribuable. Les

agents d'une administration fiscale « ne restent dans l'exercice de leurs fonctions » que lorsque les informations qu'ils communiquent à d'autres services, établissement ou organismes « sont nécessaires à ces services, établissements ou orga- nismes pour assurer l'exécution des dispositions légales ou réglementaires dont ils sont char- gés » (220).

142. - Des considérations qui précèdent, il nous paraît résulter, qu'en l'état du droit positif en vigueur avant la loi de réforme, il n'était point envisageable de reconnaître aux administrations fiscales un accès intégral aux données détenues par les autres administrations fiscales, les services administratifs de l'Etat et les établissements publics.

Un « dossier_ fiscal synthétique unique », tel qu'il était envisagé par l'administration, nécessi- tait donc que chaque banque de données destinée au « jumelage » soit éclatée, pour ne permettre la diffusion des informations enregistrées que selon le caractère de nécéssité propre à chaque adminis- tration « interconnectée ».

En d'autres termes, chaque administration devait être limitée quant à ses possibilités d'accès, ce qui supposait une définition préalable de cha- cune des données qui, pour une administration déterminée, pouvait constituer un « renseigne- ment nécessaire ». Cette exigence est essentielle pour le respect des droits des contribuables.

143. - La méthode de la préselection automa- tique, envisagée par l'administration, n'est pas non plus, sans critique.

Cette -méthode a fait récemment, en France, l'objet de sévères réserves de la « Commission nationale de l'informatique et des libertés » (C.N.l.L.) à propos de l'impôt sur les grandes fortunes (221).

Le traitement« I.G.F. »soumis à la Commis- sion nationale de l'informatique et des libertés, correspondait à deux fonctions principales, d'une part, la gestion automatisée des déclarations et, d'autre part, l'aide au contrôle fiscal.

Cette seconde fonction prévoyait que, sur la base d'informations extraites de différents fichiers fiscaux, l'établissement d'une liste qes contribuables dont le patrimoine, à partir de ces données, apparru."trait d'un montant supérieur à 2.500.000 F.

(219) COMM. I.R., art. 235/14.

(220) C. t.v.a., art. 244; C.I.R., art. 212; C.T.A.T, art. 90, C.T .; exception faite de l'inspection spéciale des impôts.

(221) C.N.I.L., troisième rapport d'activité, La documentation -.française, pp. 25 et s., délibération n° 82-29, 23 mars 1982, pp. 230 et s.

Références

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