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L Assurance au présent

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Texte intégral

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28 novembre - 2 décembre 2011 Numéro

43

Année 27

Lettre d'info hebdomadaire Ne paraît pas en juillet Bureau de dépôt Antwerpen X P2A9460

L‟Assurance au présent

Nbap .NN/Nbapnn/KL-NN01

Spécial

Introduction des « class

actions » en Belgique: quelles conséquences pour le monde des assurances ?

Sandra LODEWIJCKX

&

Anne CATTEAU Avocates au Barreau de Bruxelles Spécial

Introduction des « class actions » en Belgique:

quelles conséquences pour le monde des assurances ? 1

(2)

Contenu Introduction

1. Qu’est-ce qu’une action collective ?

- Quels avantages ? - Quels inconvénients ?

2. Le présent et l’avenir en Belgique

2.1. Le présent - Intérêt à agir

- Action en cessation générale - Protection de l’environnement - Lois anti-discrimination

- Représentation dans un procès : le cas de Deminor 2.2. Le futur en Belgique

A. Projet de loi relative aux procédures de réparation collective - La procédure de réparation collective

- L’action en réparation collective - Création d’un fonds public ?

B. Projet de loi relative aux aspects judiciaires des procédures de réparation collective

C. Réactions face aux projets de loi

3. Les actions collectives constituent-elles une menace ou une opportunité pour les assureurs ?

3.1. L’assureur comme entreprise prestataires de services - Possibilité d’une action collective ?

3.2. L’assureur comme « couvreur de risques » - Assurabilité des actions collectives ?

- RC Produits ou RC après livraison - Assurance RC Professionnelle

- L’assurance responsabilité des dirigeants d’entreprise - L’assurance protection juridique

- L’action directe

3.3. Conséquences et mesures à mettre en œuvre par les entreprises et les assureurs

Conclusion

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Introduction

Bien connues aux Etats-Unis, où elles trouvent leurs origines, les class actions font ac- tuellement une percée remarquée dans différents pays d‟Europe. Qu‟entend-on par

« class action », parfois appelées « actions de groupe », « actions collectives », « actio popularis », « action d‟intérêt collectif »1 ? Nous essayerons de donner une définition claire de ce concept.

De nombreux pays européens se sont déjà dotés d‟un arsenal législatif2 permettant et encadrant ces fameuses actions collectives. L‟Union Européenne ne reste pas non plus inactive. D‟autres pays, au rang desquels la Belgique, étudient actuellement la possibilité d‟introduire une telle possibilité dans leur système juridique. Nous analyserons quels recours notre droit met actuellement à la disposition des victimes des « dommages de masse », et quelles sont les nouveautés envisagées par le gouvernement et le législateur dans un avenir plus ou moins proche.

Enfin, nous verrons, quels peuvent être les impacts de l‟introduction des actions collecti- ves dans le secteur des assurances : quels avantages ou inconvénients vont en retirer les assurés ? Quel sera le rôle des intermédiaires d‟assurance ? Comment les assureurs vont- ils faire face ?

1. Qu’est-ce qu’une action collective ?

Les actions collectives permettent à un groupe de personnes, toutes victimes d‟un dom- mage identique, dénommé « dommage de masse », de faire traiter leurs actions conjoin- tement, sans que chaque personne soit individuellement formellement partie au litige, et ce à charge d‟un ou de plusieurs responsable identifié(s). De manière générale, un repré- sentant exercera, au nom du groupe de victimes – qui peuvent mais ne doivent pas néces- sairement être toutes identifiées – et sans nécessairement avoir un mandat de toutes ces victimes individuellement, une action en justice tendant à obtenir un jugement qui dispo- sera de l‟autorité de chose jugée non seulement à l‟égard de ce représentant et du(es) défendeur(s), mais également à l‟égard de toutes les personnes du groupe3.

Certaines branches du droit, parmi lesquelles notamment le droit de la consommation, le droit de la santé et le droit de l‟environnement, offrent des terrains propices à la naissan- ce d‟actions collectives. Ils se caractérisent en effet par un grand nombre de personnes pouvant potentiellement être touchées par un même fait, un même comportement, cau- sant ainsi un préjudice à une multitude d‟intérêts individuels. Songeons, récemment et dans notre pays4, en matière environnementale et humaine, à l‟explosion de gaz qui s‟est produite à Ghislenghien. Les différentes actions menées par les riverains contre les nui- sances sonores générées par l‟aéroport de Zaventem en sont un autre exemple. En matiè- re financière, les affaires concernant les placements Lehman Brothers vendus par la Citi-

1 Selon certains ces notions ne doivent pas être confondues. Aucun de ces concepts n‟est cependant défini dans l‟état actuel du droit belge ; ils ont donc le contenu que leur utilisateur souhaite leur donner (voy. WAGNER K., « Collectieve acties in het Belgisch recht », P&B 2001, p. 151, notes 8 et 9.

Pour les besoins du présent article et par souci de simplification, nous proposons de toujours utiliser le vocable

« action collective »).

Selon B. De Vuyst, « la « class action » est un phénomène typiquement américain qui est et reste une institu- tion importante pour imposer notamment le respect des lois sur la discrimination raciale, la protection de l‟environnement, la responsabilité des produits et les intérêts des consommateurs », DE VUYST B., « Les possibilités d‟actions de classe en droit belge », R.G.A.R. 1997, n° 12707.

Nous utiliserons le vocable « class action » lorsque nous nous référons au concept spécifiquement nord- américain.

2C‟est le cas de l‟Allemagne, de l‟Autriche, de la Bulgarie, du Danemark, de l‟Espagne, de l‟Estonie, de la Finlande, de l‟Italie, de la Lituanie, de la Grèce, des Pays-Bas, de la Pologne, du Portugal, du Royaume-Uni et de la Suède. Outre la Belgique, l‟introduction des actions collectives est actuellement à l‟étude en France.

3 Exposé des motifs du projet de loi relative aux procédures de réparation collective, disponible sur http://economie.fgov.be.

4 La mémoire collective garde des traces de l‟incendie de l‟Innovation en 1967 (323 morts et 150 blessés), du drame du Heisel en 1985 (39 morts et 450 blessés), de l‟incendie dans l‟hôtel Switel à Anvers en 1995 (15 morts et 141 blessés), du crash à l‟aéroport d‟Ostende en 1997 (10 morts et 50 blessés), ou encore de l‟explosion de gaz survenue à Ghislenghein en 2004 (24 morts et 132 blessés) ; voy. e.a. SCHUERMANS L.,

« Het paard van Troje is niet opgetuigd », R.W. 2005-06, 721.

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bank, l‟affaire Lernout & Hauspie, ou encore la vente de Fortis sont quelques uns des exemples récents où les actes posés par une société ont entraîné un préjudice à des cen- taines voire des milliers de particuliers qui tous, d‟une manière ou d‟une autre, ont décidé de se fédérer afin d‟obtenir indemnisation de leur préjudice. En matière de santé, le scan- dale de l‟hormone DES aux Pays-Bas5 constitue un exemple d‟actions collectives dans ce domaine, et l‟on sait que le terrain des atteintes à la santé est un domaine qui peut sou- vent donner lieu à la mise en œuvre d‟actions collectives.

Quels avantages ?

Parmi les avantages souvent cités à l‟introduction d‟un système d‟action collective, l‟on pointe souvent le fait que celles-ci permettent de faciliter l‟accès à la justice. En se fédé- rant, les victimes augmentent leurs moyens. Ce type d‟action permet, notamment en droit de la consommation, de rétablir un équilibre entre les consommateurs, parfois „parties faibles‟ et le responsable potentiel, entreprise industrielle d‟envergure. Les consomma- teurs, parfois freinés par les coûts qu‟engendrerait une procédure judiciaire par rapport à leur préjudice, y voient ici l‟opportunité de mutualiser ces frais avec d‟autres victimes.

Dans cette optique, certains estiment que les actions collectives permettraient de traiter efficacement des demandes multiples. En autorisant une multitude de victimes à porter une seule et même action contre un(des) responsable(s), elles permettraient aussi d‟éviter que des jugements contradictoires ne soient rendus dans des cas parfois très similaires.

Leur but est également d‟augmenter les chances de règlement à l‟amiable, moins coûteux puisque la procédure judiciaire n‟est pas forcément menée à son terme.

Enfin, l‟on constate, là où elles existent, que les actions collectives peuvent avoir un effet positif sur le marché, et permettent quelque peu de le réguler. Il va évidemment de soi qu‟il y a un équilibre à trouver entre les consommateurs « parties faibles », qui peuvent devenir détenteurs, via l‟action collective, d‟un instrument potentiellement très menaçant pour le(s) responsable(s) d‟un dommage de masse, et les grands groupes industriels, sou- vent à la base mieux armés pour faire face à des procédures judiciaires d‟envergure.

Pour ces diverses raisons, l‟on comprendra que les associations de défense des consom- mateurs voient généralement d‟un très bon œil l‟arrivée des actions collectives (voy. in- fra).

Quels inconvénients ?

Parmi les points négatifs liés aux actions collectives, l‟on peut pointer les dangers d‟abus qu‟elles peuvent représenter dès lors qu‟elles sont utilisées comme moyen de pression contre les responsables potentiels. Ceci peut parfois être bénéfique pour les victimes dans la mesure où les responsables potentiels peuvent être enclins à régler plus rapidement un dommage à l‟amiable, et ce avant l‟intentement, forcément médiatisé, d‟une procédure judiciaire à leur égard. L‟on pointe parfois le fait que ceci aurait pour vertu de désen- combrer les tribunaux.

Il fut cependant constaté aux Etats-Unis, lors de l‟introduction de ce type de procédure, que celle-ci peut également parfois provoquer une inflation des procédures judiciaires.

Ainsi la menace d‟une action collective peut parfois rapidement dégénérer en chantages à la transaction, consécutifs à des manipulations avec des rumeurs parfois désastreuses pour les entreprises, leurs marques et leurs produits.

Il faut que les droits de la défense restent garantis ; faciliter l‟accès à la justice des parties dites faibles ne peut aller au détriment des droits fondamentaux des parties dites « for- tes ». Dans l‟affaire ayant opposé récemment, aux Etats-Unis, les supermarchés Wal- Mart à un groupement d‟employés, le géant américain avait en effet soulevé le fait que le groupement d‟actions l‟empêchait de mener une défense « ciblée ». Les actions, ayant une origine commune, avaient toutes leurs caractéristiques propres, pour lesquelles Wal- Mart entendait apporter une réponse plus nuancée, au cas par cas, éventuellement au

5 Le diéthlylstilbestrol ou DES est une hormone de synthèse. Il fut prescrit à de nombreuses néerlandaises en- ceintes entre 1947 et 1976. Il est apparu plus tard que les enfants nés de ces grossesses (et majoritairement les filles) rencontraient d‟importants problèmes de santé, dont notamment de graves cancers.

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moyen de « mini class actions »6. Il est évident également que le juge doit pouvoir conserver sa liberté d‟appréciation et doit être à même de prouver sa totale indépendance face aux parties en présence.

Les actions collectives constituent en outre une menace non négligeable pour les entre- prises (et même pour les autorités publiques, puisqu‟il n‟est généralement pas exclu que celles-ci pourraient également se retrouver responsables d‟un éventuel dommage de mas- se). En effet, la menace d‟actions judiciaires collectives, qui pourraient s‟avérer nom- breuses dans certains secteurs, n‟est pas à prendre à la légère. Il s‟agit d‟un facteur que les entreprises se doivent d‟intégrer dans leur politique de gestion des risques, et qui pourrait avoir un certain impact notamment sur les primes d‟assurances de ces entrepri- ses, puisqu‟elles chercheront bien souvent à répercuter ce risque auprès d‟un assureur. Le rôle joué par les médias dans le cadre des actions collectives n‟est pas non plus à sous- estimer, et l‟on sait que ceux-ci peuvent parfois nuire à l‟image de marque d‟une entre- prise.

Pour ces raisons, l‟on comprend également pourquoi, de leur côté, les entreprises privées et les fédérations qui les représentent sont parfois plus que sceptiques à l‟introduction des actions collectives dans leur système judiciaire. Notre Vieux Continent possède ses pro- pres aspects culturels, qui peuvent parfois s‟avérer incompatibles avec des principes et usages nord-américains.

Que ce soit aux Etats-Unis ou dans d‟autres pays européens connaissant déjà (en partie) le système des actions collectives, celles-ci se caractérisent par une trame chronologique spécifique. En effet, les actions collectives sont généralement d‟abord soumises à une procédure dite de « vérification » ou de « certification » : leur recevabilité et leur fonde- ment sont tout d‟abord examinés par le juge. Avant que celui-ci ne se penche sur le fond du litige, il analysera tout d‟abord la forme de celui-ci.

Aux Etats-Unis, il ne certifiera la class action que si elle est utile aux parties et/ou au système judiciaire7. Cette certification ne sera accordée qu‟après une enquête menée en deux phases : dans une première phase le(s) représentant(s) du groupe devront prouver que leur demande répond à quatre critères cumulatifs ; dans une seconde phase le juge examinera si la class action s‟avère justifiée ou opportune. Ce sera le cas, et il s‟agit ici d‟un des avantages souvent attribués aux class actions, si l‟intentement d‟actions sépa- rées parallèles aboutirait à des décisions de justice contradictoires.

2. Le présent et l’avenir en Belgique

2.1. Le présent

Au jour d‟aujourd‟hui, les particuliers qui souhaitent intenter collectivement une action judiciaire contre un même responsable ne sont pas démunis. Il suffit de voir les divers procès qui ont secoué le monde de la finance, ces dernières années, pour voir qu‟il est déjà possible aujourd‟hui, en Belgique, de fédérer des intérêts en vue d‟une même action.

Les organisations de consommateurs et diverses fédérations professionnelles, représen- tant par définition plusieurs dizaines voire centaines d‟individus, sont également très actives dans notre pays sur le plan judiciaire.

Le droit belge prévoit un arsenal de règles, dont quelques unes permettent, dans une cer- taine mesure, d‟intenter une action collective.

Intérêt à agir

Le droit belge de la procédure civile a une vision individualiste ou atomistique de l‟action en justice. En effet, selon les articles 17 et 18 du Code judiciaire, toute personne, pour agir en justice, doit avoir un qualité et intérêt pour ce faire. De plus, cet intérêt doit

6 Pour un très bon résumé de cette affaire, voy. PIERS M., “Class actions. Verenigde Staten vs. Europa.

Rechtsvergelijkende beschouwingen naar aanleiding van de Wal-Martzaak”, NjW, nr. 171, november 2007, 825-837. Le raisonnement de Wal-Mart ne fut cependant pas suivi par les juges américains, ni en première instance ni en degré d‟appel.

7 PIERS M., “Class actions. Verenigde Staten vs. Europa. …”, op. cit., 827.

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être concret, légitime, personnel et direct, né et actuel8. Le droit belge prône donc une conception individualiste de la procédure judiciaire9. L‟intérêt est défini comme « tout avantage matériel ou moral, effectif mais non théorique, que le demandeur peut retirer de la demande au moment où il la forme »10. Cette condition de l‟article 17 du Code judi- ciaire se traduit par l‟adage « sans intérêt pas d‟action ». Les actions qui n‟ont pas d‟utilité individuelle ou sociale sont donc interdites par le Code judiciaire belge.

Selon l‟adage « nul ne plaide par procureur », érigé par la Cour de cassation11, le seul fait qu‟une personne (physique ou morale) poursuive un but ne donne pas automatiquement naissance à un intérêt. Une personne morale ne peut pas agir en réparation du préjudice causé à l‟ensemble de ses membres ou affectant le but pour la défense duquel elle est constituée. Ce principe de l‟irrecevabilité d‟une action intentée par un groupe dans l‟intérêt personnel de ses membres ou dans un intérêt collectif connaît cependant de nombreuses exceptions légales. Le droit belge reconnaît en effet à des groupements ou des particuliers, moyennant certaines conditions, un droit d‟action d‟intérêt collectif dans divers domaines12. Parmi celles-ci, une des plus importantes s‟avère le droit reconnu aux associations ayant pour objet la défense des intérêts des consommateurs et jouissant de la personnalité civile de pouvoir, par dérogation aux dispositions des articles 17 et 18 du Code judiciaire, agir en justice via une action en cessation d‟une pratique commerciale définie, pour la défense de leurs intérêts collectifs statutairement définis13. C‟est par ce biais que les différentes actions menées par Test-Achats, ou encore par les fédérations de courtiers d‟assurances telles FVF ou Feprabel, ont pu aboutir ces dernières années.

Action en cessation générale

La loi sur les pratiques du marché du 6 avril 201014 et la loi sur le crédit à la consomma- tion du 12 juin 199115 autorisent toutes deux, à côté des associations de consommateurs, à certaines organisations d‟introduire une action en cessation à l‟encontre de pratiques jugées contraires à ces législations respectives. Il est exigé que ces organismes siègent au sein du Conseil de la Consommation, ou soient à tout le moins reconnus par le Ministre des Affaires Economiques au moyen d‟un arrêté royal.

Elles doivent en outre bénéficier de la personnalité juridique ; les associations de fait sont donc exclues. Leur action ne peut être engagée que dans un but collectif, tel que prévu dans leurs statuts.

Dans le cadre d‟une action en cessation, le juge ne se prononcera pas sur le fond de l‟affaire ; il procédera uniquement à l‟interdiction de certaines pratiques, éventuellement en assortissant sa décision d‟une astreinte.

On peut citer comme exemples récents de ce type de procédure d‟injonction, les actions menées par Test-Achats contre diverses banques, contre des compagnies aériennes, contre des assureurs hospitalisation… Les fédérations professionnelles, parmi lesquelles au premier plan les fédérations de courtiers, ne sont pas en reste et n‟hésitent pas, dès qu‟elles constatent un comportement contraire aux pratiques du marché, à porter l‟affaire en justice.

Les avantages reconnus entre autres par Test-Achats à ce type de procédure sont (i) le fait qu‟elles permettent un large champ d‟action puisqu‟elles permettent de demander la cessation de nombreux types de comportement différents. Elles permettent aussi de stop- per des pratiques illégales dans des contrats conclus pour des durées plus ou moins lon-

8Pour une très bonne analyse de ces caractéristiques, voy. REGHIF H., « L'action en justice », dans X., Droit judiciaire. Commentaire pratique, I.1-1 - I.3-5, pp. 2-5.

9 EYSKENS W. et KALUNA N., « La class action et le droit belge. Va-et-vient de part et d‟autre de l‟Atlantique », J.T., 2008, 484.

10 VAN REEPINGHEN Ch., « Rapport sur la réforme judiciaire », Doc. parl., Sénat, 1963-1964, n° 60, p. 23.

11Voy. notamment les références citées par BUYLE J.-P. et MAIRLOT M., « Le droit des actions collecti- ves », in X., Les 25 marchés émergents du droit, Bruxelles, Bruylant, 2006, p. 184, note 592.

12 Pour une liste non exhaustive, voy. REGHIF H., « L'action en justice », op. cit., p. 4.

13 Article 113, al. 2 de la loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consomma- teur, M.B. 12 avril 2010.

14 Article 113, al. 2 de la loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du consomma- teur, M.B. 12 avril 2010.

15 Article 109 de la loi du 12 juin 1991 sur le crédit à la consommation, M.B. 9 juillet 1991.

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gues, tels que par exemple des contrats d‟assurance, des contrats de services bancaires, de fourniture d‟énergie ou de services de télécommunication,…16

Parmi les inconvénients, l‟on peut citer le fait que ce type de procédure n‟a aucun effet contraignant pour les tiers, et seul un effet « d‟exemple ». En outre, elles permettent uni- quement d‟obtenir la cessation de la pratique incriminée, aucune compensation financière n‟est possible dans ce genre de procédure.

Protection de l’environnement

En outre, à côté de l‟action en cessation proprement dite, depuis la loi du 12 janvier 199317, les organisations de protection de l‟environnement peuvent, au même titre que le procureur du Roi ou une autorité administrative, demander au président du Tribunal de première instance de constater l'existence d'un acte portant atteinte à l'environnement. Le président peut ordonner la cessation de ces actes, ordonner des mesures de prévention et/ou imposer une astreinte. Il n‟a pas la possibilité d‟ordonner des mesures de répara- tion, ni d‟octroyer une indemnité.

Pour pouvoir intenter ce type d‟action en cessation, ces organisations de protection de l‟environnement doivent avoir pris la forme d‟une ASBL. Elle doit également avoir dans son objet social la protection de l'environnement et avoir, dans ses statuts, défini le terri- toire auquel s'étend son activité. De plus, elle doit, au jour de l'intentement de l'action en cessation, être dotée de la personnalité juridique depuis au moins trois ans18.

Lois anti-discrimination

En vertu des diverses lois anti-discrimination, le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme19, l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes20 disposent également du droit d‟intenter une action en cessation contre un acte emportant discrimi- nation, et ce sans que ce Centre ou cet Institut n‟ait à justifier d‟un intérêt propre. Cer- tains groupements d‟intérêts sont au même titre autorisés à agir en justice21.

Représentation dans un procès: le cas de Deminor

Nul n‟ignore que le monde de finance fut vivement secoué ces dernières années, et s‟est avéré devenir le théâtre de procédures judiciaires largement suivies par le public.

L‟affaire Fortis est probablement la plus connue de ces dernières années.

La véritable action collective n‟étant à ce jour pas encore possible en Belgique, l‟organisation Deminor, le groupe de défense des actionnaires minoritaires de sociétés

16 Voy. MECHELS I., « Consumer collective redress for Belgian and European consumers », Séminaire AIA du 25 mars 2011.

17Loi du 12 janvier 1993 concernant un droit d'action en matière de protection de l'environnement, M.B. 19 février 1993.

18 Article 2 de la loi du 12 janvier 1993.

19Article 20, § 1er de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, M.B. 30 mai 2007 et article 18 de la loi du 30 juillet 1981 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme et la xénophobie, M.B. 8 août 1981.

20 Article 25, § 1er de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, M.B. 30 mai 2007.

21Ces groupements sont décrits aux articles 30 de la loi générale anti-discrimination, de l‟article 35 de la loi- genre, et de l‟article 32 de la loi anti-racisme. Il s‟agit des groupements suivants:

1° tout établissement d'utilité publique et toute association, jouissant de la personnalité juridique de- puis au moins trois ans à la date des faits, et se proposant par ses statuts de défendre les droits de l'homme ou de combattre la discrimination;

2° les organisations représentatives des travailleurs et des employeurs, visées à l'article 3 de la loi du 5 décembre 1968 sur les conventions collectives de travail et les commissions paritaires;

3° les organisations représentatives au sens de la loi du 19 décembre 1974 organisant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités;

4° les organisations syndicales représentatives au sein de l'organe de concertation syndicale désigné pour les administrations, services ou institutions pour lesquels la loi du 19 décembre 1974 réglant les relations entre les autorités publiques et les syndicats des agents relevant de ces autorités n'est pas d'application;

5° les organisations représentatives des travailleurs indépendants.

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cotées et non-cotées, a cherché une solution alternative pour fédérer de nombreux plai- gnants. Via un mandat de procédure, de nombreuses victimes ont donné un mandat à Deminor afin que l‟association puisse intenter une action devant le tribunal, pour le compte des victimes. Ces victimes sont matériellement parties au procès, puisqu‟elles sont titulaires du droit d‟action (droit subjectif), mais, au moyen de ce mandat, seule l‟organisation Deminor est désignée comme partie formelle au procès.

Dans ce cas précis, Deminor ne devait pas prouver l‟existence d‟un intérêt dans son chef, car la condition de l‟intérêt à agir est examinée dans le chef de chaque victime prise indi- viduellement. En effet, en vertu du contrat de prête-nom, une partie peut rester « ca- chée » derrière un représentant22. Le mandant agira par l‟intermédiaire de son mandatai- re, sans formellement dévoiler son identité au(x) défendeur(s). La seule exigence est que cette manière d‟agir ne porte pas préjudice au(x) défendeur(s).

La récolte et la gestion des ces divers mandats coûte bien évidemment du temps et de l‟argent. Cette solution n‟est donc pas efficace dans chaque cas d‟espèce. En outre, des jugements contradictoires restent dans ce cas inévitable.

2.2. Le futur en Belgique

Ces dernières années, face à la place grandissante qu‟occupent les class actions à l‟étranger, mais suite aussi aux initiatives entre autres des autres Etats-membres et de la Commission européenne, de nombreuses propositions de loi23 ont été introduites au Par- lement en vue d‟instaurer dans notre système juridique, une procédure permettant les actions collectives.

Il existe aujourd‟hui un consensus, au sein de la classe politique, quant à la nécessité d‟une initiative législative. Il est aussi évident que l‟activisme accru des associations de consommateurs n‟y est pas étranger.

Notre gouvernement s‟est également attelé à la tâche, et les Ministres de la Justice Ste- faan De Clerck et du Climat et de l‟Energie Paul Magnette ont déposé, au mois de sep- tembre 2009, deux projets de loi. Fruit du travail des unités de droit économique et de droit judiciaire de l‟ULB, ces projets de loi avaient alors été transmis pour consultation au Conseil de la Consommation, qui avait rendu son avis le 29 avril 2010. La chute du gouvernement au printemps 2010 avait alors sonné le glas de la suite de la procédure législative, mais il y a fort à parier que ces deux projets resteront à la base des discus- sions futures.

A. Projet de loi relative aux procédures de réparation collective

Ce premier projet de loi belge s‟inspire de deux systèmes existant, à savoir ceux des Pays-Bas et du Québec.

Pour la procédure non-contentieuse (appelée dans ce projet « procédure de réparation collective », voy. infra), le projet s‟inspire du système actuellement en vigueur aux Pays-

22 K. BROECKX, « Vertegenwoordiging in rechte en naamlening in het geding », R.W. 1994-95, 248.

23 Voy. entre autres les propositions suivantes :

Proposition de loi du 16 août 2007 complétant l‟article 17 du Code judiciaire et l‟article 3 du titre préliminaire du Code d‟instruction criminelle en vue d‟instaurer au profit des associations une ac- tion d‟intérêt collectif, Doc. parl., Chambre, Sess. extr. 2007, n° 52/0109.

Proposition de loi du 12 novembre 2007 complétant l‟article 17 du Code judiciaire et l‟article 3 du titre préliminaire du Code d‟instruction criminelle en vue d‟instaurer au profit des associations une action d‟intérêt collectif, Doc. parl., Sénat, Sess. 2007-2008, n° 4/385.

Proposition de loi du 22 février 2008 modifiant le Code judiciaire en vue d‟accorder aux associa- tions le droit d‟introduire une action d‟intérêt collectif, Doc. parl., Chambre, Sess. 2007-2008, n°

52/0872.

Proposition de loi du 17 mars 2008 modifiant les lois coordonnée sur le Conseil d‟Etat en vue d‟accorder aux associations le droit d‟introduire une action d‟intérêt collectif, Doc. parl., Chambre, Sess. 2007-2008, n° 52/0978.

Proposition de loi du 29 mai 2009 modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne l‟instauration d‟une procédure collective, Doc. parl., Chambre, Sess. 2008-2009, n° 52/2019.

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Bas puisqu‟il prévoir la possibilité d‟homologuer un « accord de réparation collective » conclu entre un représentant et les responsables (ou leurs assureurs)24.

Pour la procédure dite contentieuse, c‟est le système québécois qui a servi de modèle car l‟on prévoit la possibilité pour le représentant d‟introduire une action au nom et pour le compte du groupe. Le système québécois, lui-même inspiré du système en vigueur aux USA, présente en effet l‟avantage d‟être un système de droit civil. En outre, la loi date de 1978 ; le législateur belge a donc pu se baser sur plus de 30 années d‟expérience de ce système. Le principal apport du système québécois dans le projet de la loi belge est la procédure en deux temps, à savoir tout d‟abord une phase d‟autorisation, et ensuite une phase de jugement.

Dans le système prévu, il est à tout moment possible de suspendre la procédure conten- tieuse pour glisser vers la procédure non-contentieuse, et atteindre ainsi un accord à l‟amiable qui sera soumis à l‟homologation du juge.

Un projet concerne les procédures de réparation collective, et l‟autre les aspects judiciai- res de ces procédures25. Ces projets ont un double but: (i) permettre de trancher à l‟amiable des litiges qui concernent un grand nombre de victimes, soit via un accord de réparation collective soit via une procédure, et (ii) introduire dans notre droit une vérita- ble action collective: « l‟action en réparation collective ».

La procédure de réparation collective

Il s‟agit d‟une procédure à l‟amiable qui tend à réparer un dommage de masse, via la conclusion pour les parties d‟un accord de réparation collective en dehors de toute procé- dure contentieuse.

Le projet de loi belge ne fait pas de distinction selon l‟origine du préjudice de masse (préjudice résultant de l‟usage de biens de consommation, de l‟usage de médicaments, de l‟engagement dans certains contrats financiers, préjudice à l‟environnement, …), ni selon le type de préjudice (préjudice matériel, préjudice physique, préjudice émotionnel). Tou- tes les sortes de préjudices de masse sont donc ici visées. À titre de comparaison, le pro- jet de législation actuellement en discussion en France26, limite les actions collectives aux préjudices matériels, et exclut donc les atteintes à l‟intégrité physique. Il limite aussi les actions collectives aux préjudices subis uniquement par les consommateurs.

Différents types de préjudices se doivent parfois d‟être traités différemment. Pour cette raison notamment, le projet de loi belge avait donné lieu à certaines critiques (assureurs, entreprises).

La procédure de réparation collective se déroulera en cinq étapes. Tout commence par une négociation entre les parties pour essayer d‟arriver à un accord. Si celui-ci est atteint, il peut être homologué par un juge, qui contrôlera si cet accord répond aux conditions légales. Il peut refuser son homologation s‟il l‟estime manifestement déraisonnable, ou suggérer des modifications. Une fois son homologation accordée, sa décision aura la va- leur d‟un jugement d‟accord et elle rendra celui-ci contraignant pour l‟entièreté du grou- pe. Ceci n‟entraînera cependant aucune reconnaissance de responsabilité ou de faute, dans le chef d‟aucune des parties. Les entreprises qui concluraient un tel accord doivent donc auparavant bien vérifier l‟étendue de leur couverture d‟assurance responsabilité : en effet, certaines polices n‟offrent leur couverture que si la responsabilité de l‟assuré est légalement établie. Elles n‟interviendront dès lors pas dans des cas d‟accord de répara- tion collective simplement homologué par un juge.

Vient ensuite la phase d‟option. Il faut savoir que la plupart des procédures d‟actions collectives existant dans les autres pays utilisent un mécanisme d‟option. Deux systèmes co-existent: (i) le système d‟option exclusif ou « opt out » : dans ce système les victimes doivent explicitement marquer leur volonté de ne pas faire partie du groupe ; et (ii) dans

24 BOULARBAH H., « Projet de procédure de réparation collective : vers une class actions à la belge ? », Pré- sentation donnée à l‟occasion du déjeuner-causerie de l‟Association des Juristes d‟Assurance, 29 avril 2010, slide 10.

25 Les deux projets sont disponibles sur http://economie.fgov.be.

26 Article 12 du projet de loi en faveur des consommateurs, n° 3430, mis en distribution le 14 novembre 2006. Disponible sur www.assemblee-nationale.fr.

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le système d‟option inclusif ou « opt in »: les victimes doivent marquer leur volonté de faire partie du groupe.

Le projet de loi belge prévoit qu‟au cours de la phase d‟option (minimum 30 jours et maximum 6 mois), les victimes pourront choisir de faire partie ou non du groupe et de bénéficier de l‟accord. Ce projet de loi retient donc le principe d‟« opt out » comme prin- cipe de base. Le principe « opt-in » est toutefois admis si (i) le système « opt-out » n‟est pas approprié au cas d‟espèce, et (ii) à l‟égard des personnes résidant à l‟étranger.

Enfin, le jugement d‟homologation devra être publié et exécuté. Les victimes connues seront averties personnellement du jugement, et il sera publié sur un site web, ainsi que dans divers journaux. L‟accord homologué sera également publié dans le « registre des procédures de réparation collectives ».

L’action en réparation collective

Il s‟agit ici de la procédure judiciaire qui tend à la réparation d‟un dommage de masse et qui est soumise à une décision d‟autorisation. Elle se déroulera en six phases.

L‟action en réparation collective est tout d‟abord introduite par requête. Ici cette action ne peut être introduite que par une organisation représentative (soit un regroupement de victimes, une association de fait ou de droit, soit société à finalité sociale agissant au nom des victimes) requête. Rappelons que le seul tribunal compétent, dans l‟avant-projet de loi, est le Tribunal de première instance de Bruxelles27. Un registre contenant toutes les requêtes introduites sur base de cette loi sera par ailleurs tenu au greffe de chaque cour d‟appel28.

Ensuite le juge décide s‟il autorise ou non l‟action, en vérifiant certains points juridiques.

L‟action collective doit procurer des avantages supérieurs à des actions individuelles. S‟il autorise l‟action, il décrira précisément le dommage de masse en tant que tel, ainsi que le groupe de victimes. Sa décision prévoira quel système d‟option (opt-in ou opt-out) est applicable, ainsi que le délai d‟option et ses modalités d‟exercice.

Chacune des parties peut ensuite requérir la suspension de cette procédure, en vue de négocier un accord de réparation collective (accord amiable extrajudiciaire, cfr. supra).

Ceci suspendra tant la procédure que les délais d‟option. Si cette tentative est couronnée de succès, l‟accord de réparation collective fera l‟objet d‟une homologation par le juge, et l‟on retombe dès lors dans la procédure d‟accord de réparation collective telle que dé- crite plus haut. Si cette tentative échoue, les délais d‟option prendront leur cours.

Ensuite le juge rend sa décision sur le fond de l‟affaire. Celle-ci sera susceptible d‟appel et éventuellement de pourvoi en cassation.

Enfin la décision sera publiée et devra être exécutée. Le même juge restera compétent pour décider de tout litige qui découlerait de l‟exécution de son jugement sur le fond ou de son homologation d‟accord.

Création d’un fonds public ?

La question de la création d‟un fonds public financé par les sommes non-réclamées et non-distribuées est toujours en suspens. Ce fonds servirait essentiellement à la diffusion de l‟information relative à la procédure collective, et à indemniser les personnes lésées qui n‟auraient pas vu leur dommage réparé par une entreprise qui serait entretemps deve- nue insolvable29.

27Article 6 du projet de loi relative aux aspects judiciaires des procédures de réparation collective.

28Article 16 du projet de loi relative procédures de réparation collective.

29 In X., « Position de Test-Achats. L‟instauration d‟une procédure d‟action de groupe en droit belge : une nécessité pour les consommateurs », Conférence organisée conjointement par Test-Achats et par le BEUC, 15 novembre 2010.

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B. Projet de loi relative aux aspects judiciaires des procédures de répara- tion collective

Ce second projet de loi, qui entend apporter de légères modifications à notre Code judi- ciaire, règle quant à la lui la compétence territoriale des cours et tribunaux en matière de procédures de réparation collective.

Il prévoit en effet que seul le Tribunal de première instance de Bruxelles sera compétent pour connaître des futures procédures de réparation collective. Pour ce faire, il sera d‟office composé de trois juges, qui auraient suivi une formation spécifique en matière de procédure de réparation collective. En degré d‟appel également, seule la Cour d‟appel de Bruxelles serait amenée à connaître des affaires de réparation collective.

L‟exposé des motifs justifie cette attribution exclusive de compétence à l‟arrondissement bruxellois une volonté de « professionnaliser » en quelque sorte leur traitement : les pro- cédures de réparation collective seront des procédures complexes, tant au niveau juridi- que qu‟au niveau de leur mise en œuvre. Une spécialisation des juges ayant à traiter ce genre de dossier sera donc nécessaire. Le déroulement des procédures au sein d‟un seul et même arrondissement judiciaire aura également un rôle centralisateur : les dommages de masse relèvent généralement rarement du ressort naturel d‟une seule cour ; la tenue et l‟accès au registre répertoriant les procédures de réparation collective en seront facilités.

Le Conseil de la Consommation, notamment, a considéré que la concentration de ce type de litige auprès du Tribunal de première instance de Bruxelles et de la Cour d‟appel du même ressort n‟est pas la solution idéale. Les membres de ce conseil préféraient une cen- tralisation partielle, en créant une chambre spécialisée auprès des Tribunaux de première instance (ou d‟autres), avec un Tribunal de première instance compétent par ressort de cour d‟appel.

Le Conseil Supérieur de la Justice30 (CSJ) a également estimé que cette solution n‟est pas la meilleure puisque d‟une part les justiciables germanophones n‟auraient pas la possibi- lité de suivre leur procès en langue allemande, et d‟autre part, le projet prévoit que les juges suivraient une formation spécifique. Or, comme le relève à juste titre le CSJ, l‟accent doit être mis sur la compétence et les connaissances du juge sur la matière qui fait l‟objet de la demande, et non sur la procédure en elle-même. Dans le même ordre d‟idées, le CSJ ne requiert pas que ce type de dossier soit systématiquement dévolu à une chambre à trois juges.

C. Réactions face aux projets de loi

Les réactions des différentes organisations, suite à la publication de ces avant-projets de loi, ne se sont pas fait attendre.

La FEB (Fédération des Entreprises Belges) s‟est avérée assez préoccupée par

l‟introduction d‟un système d‟actions collectives en Belgique. Les patrons belges ne veu- lent en effet en aucun cas que l‟on transpose en Belgique le système américain, qui a selon eux démontré plus d‟effets pervers que d‟avantages. Suite à la publication du nou- veau règlement du NOAB (Nederlandse Orde van Advocaten bij de Balie te Brussel), la FEB s‟est étonnée31 qu‟il était désormais permis aux avocats de faire dépendre une partie substantielle de leurs honoraires du résultat du litige. Pour la FEB, « le projet de loi cons- titue une véritable bombe à retardement pour les entreprises par les risques qu’il intro- duit : impossibilité de cerner et de chiffrer les conséquences de ce type d’action, risque de devoir provisionner des sommes déraisonnables, croissance du nombre d’actions ne correspondant pas à des besoins réels, incitation à intenter des procès, inassurabilité de certains risques, dommages et intérêts exorbitants… »32. La FEB considère que le systè- me juridique belge permet déjà aux victimes d‟un dommage collectif d‟obtenir de maniè- re peu onéreuse et simple la réparation de leur dommage. Compte tenu des projets déjà en cours au niveau de l‟Union européenne, la FEB estimait en outre que l‟initiative belge était tout à fait prématurée.

30 Conseil Supérieur de la Justice, “Avis sur la proposition de loi modifiant le Code judiciaire en ce qui concer- ne l‟instauration d‟une procédure collective”, approuvé par l‟assemblée générale du 16 décembre 2009.

31 L.B., “VBO verzet zich tegen „class actions‟ in Brussel”, De Tijd, 19 juin 2009.

32« Veut-on introduire la "class action" en Belgique ? La FEB tire la sonnette d'alarme », Communiqué de presse FEB, 16 septembre 2009.

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Lors de l‟examen de l‟avant-projet de loi au sein du Conseil de la Consommation33, les représentants des entreprises ont également fait savoir les mêmes inquiétudes, demandant au gouvernement de ne pas adopter un projet législatif qui entraverait les progrès écono- miques et sociaux de notre pays, et qui paralyserait l‟esprit d‟entreprendre. Dans ce contexte, les représentants de la production, de la distribution et des classes moyennes ont fait valoir qu‟il était normal qu‟un contrat d‟assurance RC prévoie une limite de ga- rantie.

Quant aux assureurs, qui seront en première ligne (mais aussi deuxième ligne…, voy.

infra) si un tel système était introduit dans notre système juridique, ils ont fait savoir par le biais de leur groupement professionnel Assuralia qu‟ils n‟étaient pas demandeurs de ce type de procédure34. L‟union professionnelle s‟est toutefois montrée compréhensive et favorable à l‟adoption d‟un système collectif en lieu et place de dossiers individuels. Les modes de règlement extra-judiciaires, tels que les recours aux ombudsmans ou aux com- missions de litiges devraient continués à être encouragés. Si toutefois une procédure d‟action collective devait être adoptée en Belgique, Assuralia a fait savoir qu‟elle souhai- tait voir ce type de procédure limitée aux dommages matériels, à l‟exclusion des dom- mages corporels.

Tout comme la FEB, Assuralia souhaite que le législateur belge ne dépasse pas le cadre européen. Ceci aurait pour conséquence d‟affaiblir le pouvoir concurrentiel des entrepri- ses belges35. La crainte d‟une invasion du système américain de class action se fait éga- lement sentir au sein d‟Assuralia.

L‟idée du fonds, alimenté par des indemnités non réclamées et servant à financer des actions futures est quant à elle rejetée en bloc par Assuralia.

Enfin, concernant le système à mettre en place en cas d‟action collective, à savoir un système d‟« opt-in » ou d‟« opt-out », les assureurs plaident, pour des raisons pratiques mais aussi d‟assurabilité, pour le système d‟« opt-in », là où l‟avant-projet de loi belge entend privilégier le système « opt-out »36. En effet, dans un système où toutes les per- sonnes entrant dans la définition du groupe feront partie de celui-ci si elles n‟ont pas ex- pressément manifesté la volonté de s‟en exclure avant la date fixée dans le jugement sur la recevabilité de l‟action, il y a jusqu‟à l‟attribution de l‟indemnité, une incertitude sur le nombre de victimes qui pourraient prétendre à une telle indemnité. Cela signifierait que jusqu‟au bout il y aurait pour les assureurs une incertitude sur le montant total à allouer aux victimes et dès lors d‟énormes difficultés de provisionnement…

Afin d‟avancer une solution, Assuralia avait proposé au sein du Conseil de la Consom- mation37, l‟idée de procéder, lors de sinistres exceptionnels, à une indemnisation « accé- lérée et intégrale » des victimes par le biais d‟avances pour compte de qui il appartiendra (c‟est-à-dire le responsable non encore déterminé). Ce mécanisme d‟indemnisation accé- léré serait financé par tous les assureurs RC du pays, qui, à l‟instar de ce qui se fait ac- tuellement dans le cadre du règlement RDR, récupéreraient ultérieurement les indemnités versées auprès du responsable (et/ou de son assureur) lorsque le juge aura tranché la question de la responsabilité.

Les associations de consommateurs avaient quant à elles applaudi vivement cette initiati- ve législative. L‟exemple néerlandais prouvait à suffisance, pour ces associations, l‟utilité et la valeur d‟un tel système. En outre, Test-Achats s‟est clairement, quant à elle, positionnée pour que l‟on retienne le système de l‟« opt-out » comme système de base38. Ce système, selon l‟association de défense sera plus protecteur pour les consommateurs puisque toute personne lésée sera d‟office partie à l‟action, sauf à exprimer un choix contraire.

Pour le Conseil Supérieur de la Justice enfin, certaines questions ne sont pas tranchées par l‟avant-projet de loi. En effet, l‟avant-projet est muet quant à l‟indemnité de procédu-

33 Avis n° CC-426 du Conseil de la Consommation sur un avant-projet de loi relative aux procédures de répara- tion collective, le 29 avril 2010, p. 7.

34 Assurinfo n° 30 du 1er octobre 2009, p. 4.

35 VAN OLDENEEL C.-A., “Class actions op z‟n Belgisch?”, Assurinfo n° 17, 20 mai 2010.

36 À l‟instar de la législation américaine en matière de class action.

37 Avis n° CC-426 du Conseil de la Consommation, op. cit., p. 11.

38 In X., « Position de Test-Achats. L‟instauration … », op. cit., p. 2.

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re. En effet, depuis la loi du 21 avril 200739, la partie obtenant gain de cause à un procès peut percevoir, à charge de la partie succombante, une intervention forfaitaire dans les frais et honoraires de son avocat. Or toute procédure de réparation collective est suscep- tible d‟entraîner des frais relativement importants, notamment des frais d‟expertise et d‟avis technique. Le CSJ est toutefois attentif à ne pas pénaliser exclusivement la partie défenderesse.

Concernant le système d‟« opt-out » qui a été retenu par l‟avant-projet de loi, le CSJ y est favorable. Ce système offre selon lui plus de garanties puisqu‟en principe les personnes lésées n‟auraient pas à accomplir une quelconque démarche pour être associée au groupe.

3. Les actions collectives constituent-elles une menace ou une opportunité pour les assureurs ?

Dès lors que semble acquise l‟idée de l‟introduction dans notre système juridique d‟une possibilité d‟action collective – reste uniquement à savoir quand une telle possibilité ver- ra le jour – les assureurs doivent d‟ores et déjà se préparer à ce nouveau type d‟action.

L‟on peut ranger les circonstances pouvant donner lieu à des actions de consommateurs en diverses catégories40 : (1) les produits ou services qui ne répondent pas aux exigences de base et communément admises que le consommateur peut raisonnablement attendre (électro-ménager, hi-fi, vidéo, secteur textile, secteur de la construction), (2) les produits ou services qui ne remplissent pas des exigences spécifiques qui avaient été clairement exprimées par le consommateur (voyages, services financiers ou de télécommunication, secteur de l‟énergie,…), (3) les comportements fautifs du vendeur du produit ou du pres- tataire de services.

À la lumière de ces divers exemples, l‟on réalise très vite que les assureurs s(er)ont dou- blement exposés suite à l‟introduction d‟un système d‟action collective. En effet, de par leur qualité de prestataires de services, il se peut qu‟ils deviennent la cible d‟une action collective intentée par leurs propres assurés, qui seraient mécontents de l‟assurance sous- crite. De par leur core business ensuite, à savoir le métier d‟assurer et donc de couvrir des risques, ils devront intervenir pour leurs assurés se voyant eux-mêmes confrontés à une action collective, et faisant appel, pour mener celle-ci à bien, à leur assureur (que ces assurés soient les victimes d‟un dommage de masse et donc les demandeurs, ou les po- tentiels responsables d‟un tel dommage, et donc les défendeurs).

3.1. L’assureur comme entreprise prestataire de services

Possibilité d’une action collective ?

Quel que soit le type de produit qu‟un assureur distribue sur le marché (assurance vie ou non-vie, assurance multirisques habitation, assurance RC auto), il a un devoir général d‟information. Ce devoir s‟avère en outre renforcé lorsque les clients de cet assureur font partie de ce que l‟on nomme les « risques de masse », c‟est-à-dire le plus souvent quand les preneurs d‟assurance sont des consommateurs.

Le devoir de conseil et d‟information de l‟assureur intervient tant au niveau de la phase pré-contractuelle qu‟au niveau de l‟exécution du contrat en lui-même. La plupart des actions collectives pourront être exercées principalement, mais pas exclusivement, sur le fondement de l‟absence d‟informations ou du défaut de conseil. Les récentes affaires

39 Loi du 21 avril 2007 relative à la répétibilité des honoraires et des frais d'avocat, M.B. 31 mai 2007.

L‟indemnité de procédure peut varier de 150 EUR à 30.000 EUR (Arrêté Royal du 26 octobre 2007 fixant le tarif des indemnités de procédure visées à l'article 1022 du Code judiciaire et fixant la date d'entrée en vigueur des articles 1er à 13 de la loi du 21 avril 2007 relative à la répétibilité des honoraires et des frais d'avocat, M.B.

9 novembre 2007).

40X., “Consurmer redress in the European Union: consumer experiences, perceptions and choices. Aggregated report August 2009”, Qualitative Study, European Commission, pp. 21-24.

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financières qui ont défrayé la chronique ces derniers mois, concernaient il est vrai des produits bancaires. Cependant, au vu des procédures déjà intentées contre des assureurs branche 23 aux Pays-Bas notamment, la possibilité d‟une action collective pour défaut d‟information et de conseil n‟est pas négligeable.

Si l‟action collective existait en Belgique, l‟on peut raisonnablement supposer qu‟un en- semble d‟individus, ayant souscrit un même type de contrat d‟assurance, et se sentant, pour une raison quelconque, pareillement lésé par une pratique de l‟assureur, pourrait se regrouper et demander réparation de leur préjudice. Les procédures déjà engagées à l‟étranger, et notamment aux Pays-Bas, contre des assureurs, concernaient souvent des assurances vie, où il était reproché à l‟assureur de ne pas avoir ou d‟avoir mal informé le consommateur sur le type de produit, sur les frais pris en compte, etc….

À côté de ce devoir d‟information et de conseil, il se pourrait qu‟une politique de sous- cription, la mise en œuvre d‟un tarif spécifique, ou encore une publicité spécifique autour d‟un produit pourraient également être à l‟origine d‟une action collective intentée par des assurés qui s‟estimeraient préjudiciés suite l‟application d‟une telle politique, tarif ou par une telle publicité.

En outre, les assureurs adoptent parfois des pratiques similaires pour des contrats diffé- rents, ou utilisent parfois des couvertures standardisées. On peut ainsi imaginer qu‟une pratique adoptée par l‟ensemble de la profession, pourrait donner lieu à une multitude de dommages individuels, et partant à une action collective en réparation.

Les risques de voir un jour des actions collectives intentées contre eux ne sont donc en aucun cas négligeables pour les assureurs. L‟impact d‟une telle action aura bien évidem- ment des répercussions financières sur l‟assureur, mais également en termes d‟image. Ils devront donc non seulement évaluer les risques qu‟ils encourent, les classifier éventuel- lement par type de produit, les chiffrer et bien entendu les provisionner.

3.2. L’assureur comme « couvreur de risques »

Assurabilité des actions collectives ?

L‟introduction de l‟action collective dans notre système judicaire aurait ensuite un se- cond impact pour le monde de l‟assurance, impact qui cette fois sera circonscrit à ce sec- teur, de par son activité. En effet le core business d‟un assureur est de prendre en charge les risques que ses clients assurés encourent dans leur activité quotidienne.

En effet l‟introduction des actions collectives aurait, de manière générale, pour consé- quence une augmentation du nombre mais aussi de la fréquence des sinistres. Les dom- mages sériels seraient nécessairement visés puisque les dommages de masse rentreraient généralement dans la définition des « sinistres sériels »41. Les plafonds de couverture et les primes devraient également potentiellement être revus dans la mesure où les assureurs seront amenés à supporter une partie des frais découlant des actions collectives.

Dans ce contexte, et compte tenu du fait que la majorité des actions collectives de par le monde sont intentées par des consommateurs à l‟encontre d‟entreprises vendeuses de biens ou fournisseuses de services, les activités des assureurs qui seront impactées par les actions collectives ne seront bien entendu pas les activités IARD (Incendie, Accidents et Risques Divers). En effet, les assurés qui peuvent potentiellement être impactés par des actions collectives seront des entreprises, pouvant aller des PME aux grands groupes industriels. Ces entreprises auront contracté certains produits spécifiques auprès de leurs assureurs tels que entre autres la RC Produits, la RC professionnelle, la RC Dirigeants d‟entreprise, ou encore l‟assurance protection juridique. Nous verrons ci-dessous pour- quoi ces garanties peuvent pour l‟instant s‟avérer inadaptées aux actions collectives.

41 Ceux-ci sont généralement définis comme « l‟ensemble des dommages résultant d‟un même fait générateur ou d‟une série de faits générateurs identiques ». Ils seront considérés comme un seul et même sinistre s‟étant produit à la date de survenance du premier de ces dommages. Le sinistre se rapportera alors à l‟année d‟assurance au cours de laquelle les premiers dommages se sont produits.

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RC Produits ou RC après livraison

La gestion du risque produit a pris ces dernières années une part de plus en plus impor- tante dans la politique des entreprises. La prévention de risques potentiels liés à la com- mercialisation de produits ou de services, et la réparation du risque réalisé sont en effet législativement très encadrés depuis quelques années42.

Le régime de réparation mis en place par le législateur belge – via notamment le système de responsabilité objective – tend à faciliter les recours du consommateur, celui-ci n‟ayant pas à démontrer de faute dans le chef du producteur, mais uniquement une défec- tuosité dans le produit.

Le régime de prévention est tout aussi lourd d‟obligations pour les entreprises. Les pro- ducteurs doivent en effet supporter deux types d‟obligations : (1) une obligation générale de sécurité, les producteurs devant être en mesure de suivre leurs produits à tout stade de leur production et commercialisation, et (2) une obligation d‟information des consomma- teurs et de signalement immédiat aux autorités compétentes lorsqu‟il y a un risque in- compatible avec l‟obligation générale de sécurité. Cette démarche s‟accompagne d‟actions d‟envergure auprès des consommateurs : mise en garde, rappel, retrait des pro- duits. Tous les produits manufacturés ou transformés peuvent être concernés par ces me- sures, en ce compris les produits de l‟agriculture, de l‟élevage, de la pêche ou de la chas- se.

Les contrats d‟assurance RC Produits ne couvrent généralement pas les dommages subis par le produit lui-même43. Elles couvriront en effet uniquement la responsabilité que l‟assuré pourrait encourir, après mise en circulation de ses produits, pour des dommages corporels, matériels et immatériels causés à des tiers pour un défaut au produit et trou- vant son origine dans la fabrication, la matière utilisée, le dosage, le conditionnement, la conservation, le stockage et l‟entretien, ou encore suite à une faute commise au cours des opérations de montage, pose, réparation ou maintenance. Un contrat RC Produits ne cou- vre généralement pas non plus le défaut de conformité du produit, ou défaut de perfor- mance. Les dommages immatériels consécutifs à un défaut de performance ou domma- ges immatériels « purs » (également appelés dommages immatériels non-consécutifs car non-consécutifs à un dommage couvert) ne seraient donc pas indemnisés. Sont visés les troubles de jouissance, le manque à gagner, l‟atteinte à l‟image de marque, etc.

Lorsqu‟une assurance RC Produits couvre les dommages immatériels purs44, elle ne le fait que lorsqu‟ils découlent de certains événements précis (incendie, explosion, court- circuit) ; cette couverture est généralement également soumise à une limite assurable assez stricte. Les contrats grands risques ne prévoient généralement pas de sous- limitation. Or c‟est potentiellement ce type de dommage qui pourrait constituer le gros du contentieux en cas d‟action collective.

Les frais de retrait font généralement l‟objet d‟une sous-couverture en RC Produits, sou- vent en extension. Lorsqu‟elle est proposée, cette garantie couvrira le remboursement de certains frais engagés par l‟assuré ou par un tiers en vue du retrait de produits déjà distri- bués sur le marché, tels que frais de repérage et de recherche des produits, les frais de retrait proprement dits et les frais d‟examen (extraction, dépose, acheminement, …), les frais de destruction des dits produits, et encore les frais de réhabilitation de l‟image de marque.

Suite à la judiciarisation croissante de notre société, les actions en justice contre les four- nisseurs de produits défectueux se multiplient ces dernières années. Il ne fait donc aucun doute que l‟introduction des actions collectives en droit belge aura un impact non négli- geable sur les entreprises, et entre autres sur leurs assurances RC Produits. Les assureurs RC Produits, même s‟ils ne couvriront pas l‟intégralité du « risque action de groupe », une fraction parfois non négligeable restant à charge des entreprises assurées, se devront

42 Loi du 9 février 1994 relative à la sécurité des produits et des services, M.B. 1er avril 1994 pour la prévention et loi du 25 février 1991 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux, M.B. 22 mars 1991 pour la réparation.

43 KEULERS H., CATTEAU A. et FOSTIERS H., « L‟assurance R.C. après livraison ou R.C. produits », in X., Les assurances de responsabilité de l'entreprise: questions choisies, Anthemis, Louvain-la-Neuve, 2010, p.

122.

44 KEULERS H., CATTEAU A. et FOSTIERS H., op. cit., p. 120.

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plus que probablement de répercuter ce risque accru sur le niveau des primes en RC Pro- duits.

Assurance RC Professionnelle

L‟assurance de la responsabilité civile professionnelle garantit les dommages matériels et moraux causés à des tiers du fait d‟erreurs, de fautes ou de négligences commises par des professionnels (citons les professionnels de la santé, les avocats, les architectes, mais aussi d‟autres professionnels tels que les agences de voyages et les tours-opérateurs, les intermédiaires en immobilier, intermédiaires financiers, …) dans le cadre de l‟exercice de leur profession. La garantie s‟adapte généralement à chaque type de profession.

Ces contrats ne garantissent pas l‟inexécution des prestations contractuellement prévues, mais peuvent en revanche couvrir les conséquences découlant de cette inexécution, telle le trouble de jouissance qui en aurait résulté. À nouveau, ce seront les dommages imma- tériels purs qui seront les plus impactés. La sinistralité dans ce type de produit dépend assez fortement des catégories de profession, songeons en effet aux professions médica- les qui offrent un terrain propice aux actions collectives. L‟introduction des actions de groupe ne feront qu‟aggraver cette sinistralité, d‟autant plus que l‟avant-projet de loi bel- ge, contrairement à son homologue français par exemple, n‟exclut pas les dommages corporels de son champ d‟application.

L’assurance responsabilité des dirigeants d’entreprise

Les dirigeants d‟entreprise, qu‟ils soient dirigeants de fait ou de droit d‟une société, peu- vent voir leur responsabilité mise en cause à titre personnel pour infraction de la société qu‟ils dirigent aux dispositions législatives, réglementaires ou statutaires en vigueur, mais aussi pour une simple faute de gestion.

Cette responsabilité peut être mise en cause tant par la société elle-même45 que par ses actionnaires, salariés, ou toute personne préjudiciée.

Cette assurance vise donc à couvrir les conséquences des fautes commises par les diri- geants de société dans l‟exercice de leur mandat. Elle protège donc le patrimoine person- nel des dirigeants contre les dettes de responsabilité liées à leur activité. La faute couver- te est la « faute de management », ou faute de gestion. En pratique, il peut arriver qu‟une telle faute de gestion donne lieu à des dommages à des personnes tierces, et potentielle- ment (et ce en fonction de l‟activité de l‟entreprise) à des dommages de masse. Tradi- tionnellement, les polices d‟assurances R.C. Dirigeants d‟entreprise offrent deux garan- ties distinctes, à savoir (i) la couverture de la responsabilité civile des dirigeants, (ii) la défense civile et pénale des dirigeants. Parfois vient s‟ajouter la garantie du rembourse- ment par la société assurée46.

L‟on voit donc toute la pertinence de ce type de produit en cas d‟action collective : les dirigeants pourraient en effet faire appel à leur assureur R.C. Dirigeants d‟entreprise tant pour la prise en charge des frais de défense en justice (dans le cas d‟une procédure judi- ciaire ou extra-judiciaire, la plupart des polices couvrant généralement les deux types de litige), mais également l‟indemnité qu‟ils seraient amenés à payer dans le cas où soit en vertu d‟un accord de réparation collective, soit au terme d‟une procédure judiciaire, les dirigeants se verraient condamnés à verser des indemnités à des victimes d‟un dommage de masse.

Les assurances R.C. Dirigeants d‟entreprise sont bien entendu souvent assorties de cer- taines clauses de déchéance (parmi lesquelles bien entendu la faute intentionnelle) et d‟exclusion, parmi lesquelles se retrouvent parfois les dommages corporels, les domma- ges résultant d‟une pollution, les amendes fiscales, administratives et/ou disciplinaires47.

45 Ceci fait généralement l‟objet d‟une extension dans la police.

46 CALLEWAERT V, « L‟assurance de la responsabilité civile des dirigeants d‟entreprise », in X., La respon- sabilité des dirigeants des personnes morales, La Charte, Bruxelles, 2007, p. 209.

47 CALLEWAERT V., op. cit., pp. 219-222.

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