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Journal d Economie, de Management, d Environnement et de Droit (JEMED) ISSN Vol 3. N 3, novembre 2020

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Journal d’Economie, de Management, d’Environnement et de Droit (JEMED) ISSN 2605-6461 Vol 3. N° 3, novembre 2020

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L’enseignement du management: pour une pédagogie qui développe l’employabilité des étudiants

Management education: for a pedagogy that develops the employability of students

Miloud DAOUD 1, Abdellatif TAGHZOUTI2

1Professeur à l’ENCG de Fès, USMBA, Maroc miloud.daoud@usmba.ac.ma

2Enseignant-chercheur, ENCG de Fès, USMBA, Maroc Abdellatif.taghzouti@usmba.ac.ma

ABSTRACT: Managers play a fundamental role in the daily definition of management by integrating complexity into management tools and new managerial values. But this questioning supposes that the teacher modifies his own representations of management and his way of teaching.

By briefly referring to the learning theories, we present an educational essay to develop the employability of students. Our contribution is not based on any empirical study, but only on critical analyzes of new management values and their impact on education.

The basic premise of this essay can be summed up as follows: as soon as the experience is transformed by reflection by means of a clear and proven pedagogy, the transfer into professional life is much more unconscious than conscious. And this ability to transfer these skills to other contexts develops the employability of the student.

KEYWORDS: Crisis; Management; Pedagogy ; Employability; Students; Learning

RÉSUMÉ: Les managers jouent un rôle fondamental dans la définition quotidienne du management en intégrant la complexité dans les outils de gestion et les nouvelles valeurs managériales. Mais cette remise en cause suppose que l’enseignant modifie ses propres représentations du management et sa manière d’enseigner.

En nous référant succinctement aux théories d’apprentissage, nous présentons un essai pédagogique permettant de développer l’employabilité des étudiants. Notre contribution ne se base sur aucune étude empirique, mais uniquement des analyses critiques sur les nouvelles valeurs de management et leurs impacts en matière d’enseignement.

Le postulat de base de cet essai se résume comme suit : dès lors que l’expérience est transformée par la réflexion au moyen d’une pédagogie claire et éprouvée, le transfert dans la vie professionnelle se fait de manière beaucoup plus inconsciente que consciente. Et cette capacité de transférer ces acquis dans d’autres contextes, développe l’employabilité de l’étudiant.

MOTS-CLEFS: Crise; Management; Pédagogie; Employabilité; Etudiants; Apprentissage

Introduction

Les salariés échaudés par les licenciements deviennent de plus en plus attentifs à leur employabilité et au développement de celle-ci. Dans un contexte de risque de perte d’emploi celui qui s’inscrit dans une logique renouvelable d’apprentissage acquiert des compétences distinctives, lui permettant en retour un avantage appréciable le marché du travail. Il sera en mesure d’argumenter sur son employabilité (Le Boterf, 2003). Stimuler l’employabilité, c’est donner plus de possibilités aux salariés pour une mobilité sur le marché du travail qu’il soit interne (promotion à l’intérieur de l’entreprise) ou externe. Ladite mobilité leur permet d’acquérir et maintenir les compétences nécessaires pour trouver ou conserver un emploi, et

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50 également, elle permet de s'adapter à de nouvelles formes de travail (Finot, 2000). C’est là un point d’entrée intéressant et qui mérite d’être approfondi en identifiant les conditions qui favorisent le développement de l’employabilité. Une de ces conditions essentielles, relève, du processus d’apprentissage mené pour ou par l’étudiant encours de formation. Etant donné que les entreprises sont des phénomènes complexes, leur management demeure difficile et exigent des compétences contextualisées souvent tacites. S’aventurer à l’enseigner à des gens qui n’ont jamais pratiqué est une perte de temps- cela compromet la notion même de management (Mintzberg, 2005).

Les universités et les business School décrètent des programmes de management bourrés des théories, des concepts, des modèles, des outils et des techniques, coupés du réel. A contrario, dans la pratique de management, il s’agit d’aller chercher ce qui convient dans une situation donnée.

1. Management : vers de nouvelles valeurs

Si le management demeure classique dans une société amnésique, il est évident que la brutalité et les incertitudes liées à la crise économique actuelle bouleversent les pratiques managériales dans les entreprises. Le management, tel qu’il est enseigné aujourd’hui, est plutôt défaillant. Il s’inscrit dans une logique du maintien du fonctionnement en cours tout en réinventant de nouveaux concepts pour gouverner l’exception permanente (Rappin, 2018).

Dans ce sens, le management n’essaie que de reproduire le passé avec quelques petits coefficients correcteurs. Cette façon de faire n’est plus adaptée à un nouveau paradigme de management qui se dessine.

1.1. Pratiques managériales : vers un nouveau paradigme

L’ère de la stabilité et de la sécurité dans l’entreprise est révolue. Actuellement, beaucoup d’incertitudes et de contradictions émaillent la vie des entreprises, soit émergentes de leur structure ou imposées par leur environnement, réduisent leur capacité d’autonomie. Elles sont appelées à s’adapter aux exigences d’un nouveau contexte que leurs dirigeants ont du mal à prévoir et à maitriser. (Bériot, 2006). Lesdites incertitudes (économiques, sociales, technologiques, et idéologiques même) exposent le management à une crise de sens. La crise de sens est une crise à plusieurs niveaux :

- une crise de la relation entre les salariés de base et les cadres, largement considérés comme impuissants à maîtriser le changement ;

- une crise d’identification issue de la relation de l’individu à son travail, dès lors que l’implication dans une fonction ou un métier ne garantit plus la sécurité d’emploi ; - et, enfin une crise de management, dépourvu de marge de manœuvre, coincé entre

l’impératif de création de valeur pour l’actionnaire, la pression du client et le refus croissant des salariés de s’engager.

En effet, parallèlement à une conception économique de la valeur, les managers ne croient plus dans l’entreprise comme un lieu d’épanouissement personnel ou comme moteur de progrès social. Le management est toujours en crise, car il change à tout moment de contextes, de problématiques et de caractéristiques. Il ne peut se rétablir qu’à travers le mouvement (à l’image de la bicyclette). Il ne peut connaître et dynamiser ses acteurs que par les pratiques organisationnelles où ils s’expriment (à l’image du cadre du sport collectif).

La priorité donnée aux chiffres ainsi que la reproduction des routines organisationnelles de succès, ont abouti à une crise de management. Cette façon mécaniste de manager les situations de gestion exposent les décideurs à de forts risques d’échec en matière des décisions non programmables, sollicitant plus de connaissances implicites, non circonscrites, dans l'espace et le temps.

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51 La crise actuelle nous interpelle à réinventer le paradigme de management tant au niveau de son sens qu’au niveau de ses valeurs. Si on admet qu’actuellement le changement et la crise ne sont plus des exceptions mais des règles, le manager, à travers son action quotidienne, doit chercher un subtil équilibre entre le renouvellement et la tradition. Ainsi, le management du

« relativement stable »cède la place à celui de la mutation continue (Sérieyx, 1999). Nous pensons que le monde stable et définitivement structuré pour lequel on forme nos étudiants, est en train de s’effondrer et qu’il faut les armer par d’autres qualités pour qu’ils puissent faire face à un monde incertain.

Dans ce monde aussi imprévisible et systémique, il s‘agit de sortir des comportements mécanistes pour développer l‘intuition, la coopération, l‘anticipation et l‘ajustement. Les recettes du passé sont d’une utilité affaiblie. Il s’agit d’être encore plus à l’aise avec l’incertitude et la complexité. D’où une nécessité de stimuler encore davantage une créativité intuitive, réflexive et «débridée» pour développer vision, stratégie et tactique qui soient innovantes et différenciatrices tout en motivant les hommes et en donnant du sens à l’action.

En analysant les fonctionnements, les modes de travail et les caractéristiques du management qui font la différence dans certaines sociétés, Hamel (2008) en conçoit une grille pour s’atteler à « l’innovation managériale » dans une entreprise : repérer les processus internes, remettre en cause les certitudes, questionner les habitudes, et inventer de nouveaux principes de management créateurs de valeur. Tel est le nouveau paradigme de management.

1.2. Managers : vers de nouveaux rôles

Le monde d’aujourd’hui expose les managers à des situations de gestion complexes dont le social, le politique, l’économique, le technologique et l’environnemental s’entremêlent. Ainsi, les entreprises sont dans l’exigence de quémander un nouvel art de motiver et de diriger. Un nouveau modèle de manager s’ébauche. Une combinaison de facteurs persuade un nombre croissant d’organisations que le rôle du manager doit évoluer de contrôleur à facilitateur.

Etre un manager facilitateur s’inscrit dans le cadre d’une approche participative inductive et partagée, enracinée dans un système de valeurs dont la confiance aux compétences de cette personne est de première importance. Cette posture managériale place ce facilitateur dans une position d’acteur responsable de ses actes, performant dans la résolution des problèmes à son niveau, au lieu d’être télécommandée par un manager interventionniste.

Etre facilitateur, cela demande un apprentissage fondé sur cette même logique. Comment imaginer qu’un étudiant animé par un professeur pratiquant une méthode « je sais et je vous enseigne » puisse préparer des managers à faire l’inverse. Un manager est le produit du système d’enseignement. Ce dernier est trop centré sur les savoirs et pas assez sur les comportements. Le développement de l’intelligence logique et abstraite ne suffit plus; il nous faut aussi développer la capacité créative de l’étudiant à travers une intelligence sociale et émotionnelle. Si les nouveaux comportements en entreprise dépendent de cette intelligence-là, l’enseignement en management doit en comprendre les mécanismes avant de la développer.

L’enseignement du management est orienté beaucoup plus vers la pratique des affaires, à l’image des fonctions de gestion (Marketing, Finance, GRH…). C’est une activité spécifique, différente par sa nature « Versez ces fonctions, chacune étant d’une couleur différente, dans ce récipient vide que l’on appelle un étudiant, agitez légèrement, et vous retrouvez votre étudiant muni de compétences spécialisées, telles des bandes multicolores, mais pas un manager chevronné » (Mintzberg, 2005).

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52 Le graphique schématise les caractéristiques de management en deux catégories, qu’elles relèvent de l’art, enseigné essentiellement dans les cours de marketing ou en GRH, ou de la science, enseignée en finance ou dans la gestion de production. La première encourage la créativité et aboutit à des « idées », alors que la deuxième met les choses en ordre, grâce à des analyses et des évaluations systématiques. Si l’art tend à être inductif, à partir d’événements spécifiques pour déboucher sur une vision très vaste; la science déductive, passe de concepts généraux à des applications spécifiques. Ainsi, le management est souvent présenté aux étudiants tantôt comme une sorte d’analyse systématique sous forme d’intégration et d’évaluation des données, tantôt comme une synthèse générale sous forme d’idées et de visions. Alors que les pratiques managériales font la navette entre le spécifique et le général, grâce à une approche itérative. Elles se présentent réellement comme un apprentissage dynamique sous forme d’actions et d’expérimentations.

Les instituts de management ont fait un travail remarquable en formant des spécialistes de l’organisation: analystes du marché, comptable et financier, gestionnaire scientifique en production…; mais pas des vrais dirigeants. La fonction de manager, telle qu’elle est définie par Mintzberg (1999), implique un grand nombre de compétences : développer des relations avec ses pairs, conduire des négociations, motiver ses subordonnés, résoudre des conflits, établir des réseaux d’information pour collecter puis diffuser l’information, prendre des décisions dans un contexte dominé par l’incertitude, distribuer des ressources. Mais par- dessus tout, le manager doit posséder une aptitude à l’introspection pour maintenir les compétences nécessaires afin de conserver un emploi ou d’en trouver un autre en s'adaptant à de nouvelles formes de travail. C’est de l’employabilité.

2. Développement de l’employabilité des étudiants : vers une pédagogie innovante

L’université est un endroit où l’on réfléchit, où l’on prend du recul par rapport à l’expérience vécue et où l’on tire des enseignements. Souvent, elle est calquée de ‘’théorique’’, mais les théories représentent des cadres conceptuels qui simplifient la réalité pour nous aider à la comprendre. Le mot théorie a fort mauvaise presse dans certains cercles managériaux. C’est plutôt curieux, car aucun d’entre nous, surtout les managers, ne pourrait vivre sans théories;

pas plus qu’une bibliothèque ne pourrait fonctionnait sans catalogue. À travers ses théories, ses outils, ses cadres conceptuels, l’université, par le biais de ses écoles et ses facultés de gestion, est appelée à passer d’une logique de connaissance à une logique de développement des compétences. Dans cette perspective, la théorie en management devient enrichissante quand elle permet aux étudiants de considérer la pratique avec imagination et originalité et d’ouvrir les yeux sur de nouvelles perspectives. Ceci permet d’acquérir de nouvelles

Management = Art Management = Science

Style chaotique qui encourage la créativité grâce à une approche inductive active

Style technocratique qui lutte contre le chaos grâce à une approche déductive

Pratique du Management

Des styles capables de faire des connexions entre le spécifique et le général grâce à une approche itérative

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53 compétences ou maintenir les siennes à travers l’entreprise d’un ensemble d’actions concrètes. Toutefois, la question du développement des compétences renvoie à la notion d’apprentissage. La compétence émane de l’action. Ainsi, la compétence et l'apprentissage sont inséparables de leurs conditions de mise en œuvre. Ainsi, la question de développement des compétences nous renvoie à la question de l’enseignement, et plus précisément au volet pédagogie.

Dans le cadre de cette section, nous nous focalisons sur une approche pédagogique qui développe l’employabilité des étudiants, à travers l’action sur le terrain.

2.1. Une pédagogie développant l’employabilité

Comprendre et mémoriser ne sont pas suffisants pour agir si cela reste au niveau cognitif.

Certes, la compréhension et la mémorisation des acquis s’effectuent en salle de cours, la mise en œuvre, en revanche, se réalise sur le terrain.

«L’apprentissage expérientiel est une théorie cognitive (les individus transforment, en mobilisant leur propriété cognitive, leurs expériences en nouvelles connaissances) et situationnelle (l’apprentissage est situé dans l’expérience) » (Toutain, 2010).

L’application de cette théorie dans les programmes d’enseignement au management suppose donc de porter son attention sur le processus de transformation d’expériences plutôt que sur les résultats obtenus. Contrairement à la théorie béhavioriste qui est davantage centré sur le « stimuli-réponse », c’est-à-dire sur le résultat (la réponse), l’apprentissage expérientiel se trouve ainsi particulièrement adapté pour découvrir la pratique managériale qui nécessite de s’adapter en permanence à un environnement instable et à un avenir incertain. Dans ce cadre, la formation active, qui permet la mise en situation et l’expérience, favorise ce processus d’apprentissage.

En salle de cours, la plupart des enseignants transmettent des contenus, orientent leur formation sur l’acquisition des savoir-faire. Dans cette phase, l’étudiant peut rencontrer un certain nombre de freins internes, de blocages à l’apprentissage, se situant au niveau cognitif (problème de langue, de raisonnement..) et/ou psychologique (peur du groupe, refus de contenu…). Dans l’apprentissage par l’expérience, l’enseignant-formateur part du contexte et du vécu professionnel de l’étudiant en faisant travailler sur ses difficultés de mise en œuvre et ses freins internes. Il le met en situation de vivre sa relation à la situation et d’en tirer un savoir pour lui, sur l’autre, sur sa relation à l’autre et à son environnement. Il travaille donc autant sur les techniques à acquérir que sur l’ajustement personnel nécessaire pour les mettre en pratique.

Dans le cadre de ce paragraphe, nous nous intéressons à l’apprentissage expérientiel et à l’apprentissage en double boucle. Ce sont des courants anglo-saxons qui proposent une épistémologie nouvelle de la pratique professionnelle. Ces deux approches mettent en lumière

Comprendre / mémoriser

Savoir Contenu Comportement

Appliquer

Culture Valeurs

Règles de fonctionnement Pédagogie

Expérientielle

Salle de Cours Contexte Professionnel

De la compréhension à la mise en œuvre (adapté de Karolewicz, 2000)

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54 la problématique des interrelations des événements vécus (actions)et les savoirs. Par ailleurs, elles considèrent que l’action peut être source d’apprentissage, affirmant que les connaissances issues de l’action sont aussi « valables » que celles issues de la recherche.

2.1.1. La pédagogie expérientielle

La pédagogie expérientielle est une pédagogie globale où l’enseignant-formateur travaille autant avec l’individu qu’avec le groupe, autant sur le processus que sur le contenu. C’est un apprentissage qui stimule chez l’étudiant une aptitude d’auto-découverte, à travers son vécu professionnel, en étant acteur de son apprentissage et responsable de son évolution. Effectuer un stage dans une usine, cuisiner des pâtisseries en parlant anglais, faire un diagnostic dans un service, résoudre un problème par la manipulation d'objets...voilà autant d'exemples d'un type d'apprentissage holistique que l'on nomme expérientiel et qui implique un contact direct avec la réalité étudiée.

La pédagogie de l'apprentissage expérientiel s'apparente à la pédagogie active et affective : durant le processus, les apprenants ressentent des émotions telles que le défi, la compassion, le plaisir, l’excitation, l’émerveillement, l’identification, le désir de partager leurs impressions...etc.

Cette pédagogie est différente des approches magistrales de type « je sais, je vous enseigne ».

Ici, l’apprenant se forme lui-même en étant acteur. Il a à résoudre des problèmes en tenant compte des contraintes et des ressources fournies. Mais contrairement à la vie en entreprise, les conséquences de ses choix sont immédiates.

Exemple : imaginons que Karim est un excellent étudiant en formation de Master

« Entrepreneuriat et Innovation ». Son professeur le met à la tête d’un groupe d’étudiants pour identifier les opportunités d’affaires dans la région de Fès-Meknès. Karim ne veut pas décevoir son professeur. Au lieu de déléguer des tâches et des responsabilités, il sera toujours

‘sur le dos’ de chaque membre de l’équipe. Suite à un cours de management, il admet que déléguer fait partie de son futur rôle de manager, mais, au même temps, cette attitude lui fait prendre un risque, dans ce projet d’équipe.

Le travail expérientiel avec Karim va dans un premier temps lui faire prendre conscience de la façon dont il délègue et des blocages qu’il a repérés. Ensuite, l’enseignant- formateur l’aide à modifier sa représentation du risque qu’il croit prendre en confiant une mission importante à un membre de son équipe, puis à trouver des moyens à mettre en œuvre pour se rassurer, tout en permettant à ses collègues de progresser.

Cette pédagogie expérientielle suggère à travers cette théorie une perspective holistique et intégrative de la formation qui combine expérience, perception, cognition et comportement.

De ce fait, l’apprentissage par l’expérience est davantage centré sur la personne et le processus que sur le contenu.

L’objectif de la pédagogie expérientielle est d'apprendre à apprendre du contexte professionnel en intégrant les expériences vécues.

Beaucoup de chercheurs ont étudié les effets de l'apprentissage expérientiel sur ce que les chercheurs en sciences sociales appellent un terrain. Ils ont conclu que l’apprentissage expérientiel a d’énormes avantages en termes de développement psychologique des apprenants, amélioration de l’estime de soi, s’intéresser à l’école, augmentation de l’autonomie et de la confiance, … ( Conrad et Hedin, 1995 ; Druism, Owens et Owens,1995)Quant à Bisson et Luckner (1996), ils soulignent les avantages que ce type d’apprentissage offre. Selon ces auteurs, le plaisir ressenti par des expériences réelles provoquerait, chez les élèves, l’automotivation, vaincrait le stress et diminuerait l’aversion à prendre le risque durant l’apprentissage.

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Journal d’Economie, de ISSN 2605-6461 A partir des apports de Lewin présente le processus d’apprentissage étapes. Il s’agit de :

- l’expérience concrète : l'apprenant expériences vécues des autres - l’observation réflexive : en groupe, place dans un cadre réflexif

vécus.

- la conceptualisation abstraite hypothèses) à tester dans la quatri - l’expérimentation active : consiste du savoir en tentant de le reproduire un terrain.

Cette application de la conceptualisation ainsi recommencé forme la spirale

Source : le cycle expérientiel de Selon Kolb (1984), « l'apprentissage travers la transformation de l'exp lequel les concepts sont dériv p.26).

Le tableau ci-dessous met en l’apprentissage par expérience

Critère Apprentissage

traditionnel

Qui apprend ? L’individu

Le formé est Récepteur

Le formateur est Enseignant, Rôle du formateur Apporte

connaissances

de Management, d’Environnement et de Droit

6461 Vol 3. N° 3, novembre 2020

Lewin et de Piaget, Kolb (1984)a conçu un mod apprentissage comme un « cycle expérientiel », l'apprenant est sous l’épreuve de l’action , loin de

comme elles sont interprétées par son enseignant.

groupe, de façon individuelle ou avec l'animateur, propre à lui pour construire un sens à partir abstraite : c’est la phase de développement d’un

quatrième étape.

consiste finalement à faire connaître à d’autres reproduire sur ce que les chercheurs en science conceptualisation amène à vivre une nouvelle exp

spirale de plus en plus large de l’apprentissage

de Kolb (1984)

l'apprentissage est le processus par lequel la connaissance l'expérience ».Il ajoute que: « l'apprentissage est rivés et continuellement modifiés par l'expérience

en exergue la différence entre l’apprentissage expérience :

Apprentissage

traditionnel Apprentissage par l’expérience L’individu L’individu et le groupe

Récepteur Acteur

Enseignant, évaluateur Facilitateur, parfois participant Apporte des

connaissances

Crée les conditions d’un apprentissage

Droit (JEMED) 2020

55 modèle théorique, qui composé de quatre toute influence des enseignant.

l'animateur, l'apprenant se partir des événements d’un modèle (ou des personnes la valeur s sociales appellent expérience, et le cycle

par expérience.

connaissance est créée à est un processus par rience» (Kolb, 1984, l’apprentissage traditionnel et

l’expérience groupe

participant

d’un processus d’auto-

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56 Acquisitions centrées sur Le contenu Le contenu et le processus

Conceptualisation Guidé par le formateur Découverte par le formé au travers de sa propre expérience

Développement Intellectuel Holistique (globalité de la personne)

Supports Généralement papier-

crayon

Mise en situations réelles

Climat Formel, inhibant Informel, confiance et acceptation mutuelle

Source : adapté de Karolewicz, 2000 2.1.2. L’apprentissage en double boucle d’Argyris et Schon

Argyris et Schön (2002) distinguent deux types d'apprentissage organisationnel : l'apprentissage en simple boucle et l'apprentissage en double boucle.

L'apprentissage en simple boucle : axé sur le court terme, ce type d'apprentissage vise à corriger les erreurs dans les limites fixées, mais sans remettre en question les valeurs et les façons de faire. Il a souvent des effets souvent limités et ponctuels.

L'apprentissage en double boucle : ce type d'apprentissage vise un changement durable, en profondeur. Il nécessite la remise en question des normes et valeurs directrices, dans un contexte où il existe une incompatibilité ou un conflit entre les valeurs actuelles et celles nécessitées par le changement.

Le premier niveau d’apprentissage (ajouter de nouvelles connaissances) consiste à apporter des microcorrections à l’action à l’intérieur d’un répertoire préétabli mais qui demeure inchangé. Quant au deuxième niveau d’apprentissage, il cible à changer la nature des connaissances mobilisées en apporter des régulations. Les apprenants s’inscrivent dans un processus dans un processus de destruction reconstruction des connaissances et des compétences. Dans cette perspective, la capacité d’apprentissage consiste selon ces auteurs à remettre en cause ses propres schémas de pensée et d’action.

« Par exemple, un manager est conscient de sa difficulté à dire non et cela lui pose problème.

Il est débordé, il ne bénéficie pas de reconnaissance et subit les reproches de son entourage.

Dans un apprentissage en simple boucle, ce manager va décider de s’affirmer davantage pour être capable de refuser certaines tâches ou propositions. Dans l’apprentissage en double boucle, il va prendre conscience de son besoin de reconnaissance qui le conduit à toujours accepter. Il comprend qu’il sera plus apprécié pour sa capacité de décision, que par le fait de toujours céder » (Karolewicz, 2000).

Cependant, plus les expériences accumulées par l’apprenant sont importantes, plus la remise en question pourra être difficile tant sur le plan personnel que vis-à-vis de ses collègues. En effet, l’étudiant risque de développer un raisonnement défensif qui crée un obstacle à l’accès

Stratégie daction

Valeurs directrices Conséquences

Apprentissage en simple boucle (action corrective)

Apprentissage en double boucle (modification du modèle mental)

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57 aux nouvelles connaissances et à d’autres manières d’agir : c’est le risque de l’apprentissage en boucle simple.

À travers ces apports, nous avançons la thèse selon laquelle en aidant les étudiants à modifier leur manière de raisonner et à faire l’apprentissage d’un raisonnement constructif qu’on développe leur employabilité. Ils doivent être capables non seulement de résoudre les problèmes routiniers liés à l’apprentissage en simple boucle, mais aussi agir efficacement lorsqu’ils sont confrontés à des situations difficiles, cela nécessite alors un apprentissage en double boucle.

2.2. Processus d’apprentissage développant l’employabilité : vers un modèle intégrateur 2.2.1. Apprentissage en management: vers un modèle intégrateur

En nous référant succinctement aux principales théories d’apprentissage développées par d’éminents chercheurs de spécialité (Piaget, Kolb , Argyris et Schön , …), nous présentons un modèle intégrateur, schématisant le processus d’apprentissage, qui permet de développer l’employabilité des étudiants.

Un modèle intégrateur

Tout d’abord, le « moment de l’expérience concrète » où l’étudiant s’engage dans l’action et se confronte à des situations considérées comme des opportunités d’apprentissage. L’étudiant

Apprentissage en double boucle

Développement des compétences (Employabilité)

Conceptualisation Modélisation

Observ ation Réflexi

ve Transp

osition à de nouvell

es situati

ons

Expérience Concrète Apprentissage en simple boucle

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58 peut procurer des routines répétitives sans véritable prise de recul, dans un processus d’apprentissage en simple boucle.

Ensuite, le « moment de l’observation réflexive » où l’étudiant récite ses actions et commence à prendre de recul par rapport son expérience vécue. Réciter son action consiste à enregistrer les événements en histoire et repositionner les acteurs. Dans cette phase, l’individu engage un processus de réflexion autour des actions entreprises et leur donne un sens. Ce travail de réflexion et de représentation ne se réalise pas systématiquement. Il fait appel à un enseignant-facilitateur.

Troisièmement, le « moment de la conceptualisation » où la réflexivité et la reconstruction aboutissent à l’élaboration d’un modèle. Il s’agit, en effet, de construire des répertoires du savoir pragmatique qui capitalise sur l’ensemble des actions entreprises dans des situations de gestion bien précises pour ainsi les rendre enseignables et par conséquent généralisables. En acceptant de perdre des détails, la modélisation aide les étudiants à agir dans des contextes différents.

Finalement, le « moment de la transposition à des nouvelles situations » où l’étudiant expérimente en (re)considérant les leçons de son vécu professionnel. C’est un moment de recontextualisation plus ou moins important selon le degré de variation des situations. Cette opération constitue un simple transfert quand il s’agit d’une certaine similarité des situations (ancienne–nouvelle), ou elle est de l’ordre de transposition quand la situation nécessite des modifications importantes des schèmes opératoires, à travers l’apprentissage en double boucle.

Ce modèle intégrateur montre que l’apprentissage par l’expérience ne se fait pas spontanément. Il nécessite de mettre en œuvre des processus cognitifs de réflexivité et de construction de sens, que l’on peut avoir à l’aide d’un enseignant-facilitateur.

2.2.2. Enseignant du management : vers de nouveaux rôles

Au-delà des cours magistraux et des exercices, le rôle d’enseignant en management est de stimuler une réflexion approfondie pour aider les étudiants à tirer les enseignements de leur propre expérience et s’efforcer avec eux, de faire le lien entre celle-ci et les apports conceptuels. Ceci exige une certaine préparation pour le contenu mais surtout pour le processus.

Dans cette perspective, l’enseignement est une activité de facilitation; il est pratiquement plus important d’encourager les étudiants que d’enseigner stricto sensu. Ainsi, une grande partie de ce qui est aujourd’hui directif - la conception du programme, l’agencement physique des salles de cours, le rôle des enseignants - doit se transformer, être l’instrument d’une facilitation. Autrement dit, tout cela doit soutenir l’acte d’apprendre et non imposer un carcan à la façon d’enseigner : camps d’entrainement, examens intensifs et amphis/salles conçus pour mettre la pression sur les étudiants qui font obstacle à l’apprentissage.

D’une manière générale, le passage d’une logique de transmission des connaissances par un

« maitre » détenteur du savoir à celle d’accompagnateur, qui facilite le développement de l’employabilité de l’étudiant, oblige à prendre en considération la progression individuelle de celui-ci, en interaction permanente avec le terrain. Dans ce contexte, l’enseignant organise les situations d’apprentissage, identifie les contraintes et les ressources qui permettent d’apprendre par soi-même. Replacé dans le champ de l’éducation, il ne s’agit plus seulement d’enseigner des contenus et des connaissances propres à chaque discipline, mais d’enseigner des règles générales de pensée, des procédures intellectuelles, pour savoir comment acquérir et utiliser des connaissances en vue d’un but clairement identifié.

Ainsi, l’essentiel du rôle d’enseignant est de concevoir des situations souhaitables, de poser des problèmes et des limites, de soutenir les étudiants, d’assurer la sécurité émotionnelle et de

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59 faciliter le processus d’apprentissage. Le profil d’enseignant expérientiel est très spécifique puisqu’il a une double compétence technique et relationnelle.

« Se placer du point de vue de l’apprenant suppose de ne regarder que les progrès accomplis.

En dernière analyse, l’acte d’apprendre doit donc être réactif, individuel, intégré au sein d’un mouvement de découverte; tout à fait comme le management lui-même, où les expériences vécues, les concepts et les réflexions se mêlent à mesure que le manager assume ses tâches.

Cela devrait être fondé sur des allers et retours entre l’école et le terrain » (Mintzberg, 2005)

Conclusion

Le postulat de base de cet essai se résume comme suit : dès lors que l’expérience est transformée par la réflexion au moyen d’une pédagogie claire et éprouvée, le transfert dans la vie professionnelle se fait de manière beaucoup plus inconsciente que consciente. Et cette capacité de transférer ces acquis dans d’autres contextes, développe l’employabilité de l’étudiant.

Toutefois, l’étudiant acquiert à travers le développement de son employabilité des compétences nécessaires et des routines du travail susceptibles d’être reproduits dans d’autres situations professionnelles. Ainsi, à travers le développement de ses compétences, l’étudiant édifie donc son employabilité, c’est-à-dire renforcer la capacité de sa mobilité dans un univers professionnel de plus en plus instable. Autrement dit, la capacité de réinvestir le processus d’apprentissage expérientiel et en double boucle, constitue bien un moteur du développement de l’employabilité de nos étudiants.

L’apprentissage expérientiel, et en double boucle, ne peut se réaliser sans l’intervention d’enseignant qui aide l’étudiant dans son fonctionnement opératoire et joue ainsi le rôle de facilitateur - accompagnateur dans la construction des connaissances. L’objectif est d’amener l’étudiant à développer son apprentissage réflexif et d’analyser ses propres stratégies d’intervention.

En nous référant succinctement aux théories d’apprentissage développées par Piaget (1971), Kolb (1984) et Argyris et Schön (2002), nous avons bien constaté combien la prédisposition de l’apprenant est important pour mettre en œuvre des pédagogies innovantes. Le facteur motivationnel joue un rôle central dans la réussite de ce type d’apprentissage, tant pour l’enseignant qui organise le cadre de sa réalisation, que pour l’étudiant qui le construit. Qui plus est, nous pensons que la mise en œuvre de cet apprentissage dans l’enseignement du management nécessite de construire un système d’évaluation organisé autour de l’axe central de la transférabilité des connaissances acquises. Cependant, évaluer les retombées, chez l’étudiant, d’une telle formation, suppose d’avoir à l’esprit que la variété des individus dans une situation d’apprentissage génère des effets différents, donc des résultats hétérogènes chez chacun d’entre eux. Cela nous invite ainsi à la plus grande prudence dans la création d’indicateurs qui doivent traduire la prise en compte des résultats issus d’une interaction complexe entre les particularités de l’individu, la situation dans laquelle il se trouve, et l’objet d’apprentissage.

En somme, c’est par le développement des compétences qu’on développe notre employabilité.

On acquiert une compétence grâce à la pratique et à l’évaluation de nos performances, qu’il s’agisse de situations réelles ou simulées. Les facultés et des écoles de management doivent identifier des compétences-clés utiles aux futurs managers, sélectionner des étudiants qui montrent des aptitudes dans ces domaines, les mettre en situation pour qu’ils puissent exercer et développer ces compétences, et leur accompagner dans le développement des règles générales de pensée, des procédures intellectuelles leur permettant d’apprendre à apprendre continuellement.

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Bibliographie

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Références

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