La « bar-récursion » en réalisabilité classique : choix dépendant et bon ordre sur R
Jean-Louis Krivine
20 janvier 2015
Abstract.T. Streicher has shown [7], by means of abar recursion operator, that the realizability models of ZF, obtained from usual models ofλ-calculus (Scott domains, coherent spaces, . . .), satisfy the axiom of dependent choice.
In this note, we give a proof of this result, in the framework ofclassical realizability.
Moreover, we show that these realizability models satisfy the formula : “Ris well ordered”.
This formula is therefore realized by a closedλc-term.
We also show that every true formula of analysis is realized by a closedλc-term.
Introduction
T. Streicher a montré dans [7], en utilisant un opérateur dit debar-récursion, que les modèles de ZF, associés aux algèbres de réalisabilité obtenues à partir de l’un des modèles usuels du λ-calcul (domaines de Scott, espaces cohérents, . . .), satisfont l’axiome du choix dépendant.
On donne ici une preuve de ce résultat, dans le cadre de la réalisabilité classique (voir [5]) en prenant comme exemple le modèle de Scott.
Dans les sections 2 et 3, qui sont très semblables, on montre qu’un opérateur de bar-récur- sion réalise le choix dénombrable (CDen), puis le choix dépendant (DC). La preuve est un peu plus simple pour CDen.
Les idées sont tirées de [2], mais utilisées dans un contexte tout à fait différent.
On déduit de ce résultat que, dans le modèle de ZF associé à l’une de ces algèbres de réalisa- bilité,tout réel (plus généralement, toute suite d’ordinaux) est constructible.
La formule «Rest bien ordonné» est donc réalisée par unλc-terme clos.
On montre également quetoute formule vraie d’analyse est réalisée par unλc-terme clos.
1 L’algèbre de réalisabilité du domaine de Scott
Le domaine de Scott est l’un des modèles les plus simples duλ-calcul. On en rappelle ci- dessous rapidement la construction.
On fixe deux symbolesO,→ et on définit latramedu domaine de Scott comme le plus petit ensembleDtel que :
O∈D; siα∈Det siaest une partie finie deD, alors (a→α)∈D.
De plus, on identifie Oet (; →O).
L’ensemble des parties finies deDest notéD∗.
On utilisera la notation a1, . . . ,an→α pour a1→(a2→(· · ·(an→α)· · ·)) (aveca1, . . . ,an∈D∗).
Les éléments de la trameDsont appelésformulesou encoretypes.
Toute formule s’écrit, d’une façon et d’une seule, sous la forme a1, . . . ,an→O, avecan6= ;.
Ses autres écritures sont a1, . . . ,an,;, . . . ,; →O. On définit, par induction, une relation d’ordre surD:
(a→α)≤(b→β)⇔α≤βet tout élément debest≤à un élément dea(ce qu’on écritb≤a).
Soient a1, . . . ,ak,b1, . . . ,bl∈D∗, avecak,bl6= ;. On a alors : (a1, . . . ,ak→O)≤(b1, . . . ,bl→O) ⇔ k≥letb1≤a1, . . . ,bl≤al.
La borne inférieure (a1, . . . ,ak→O)u(b1, . . . ,bk→O) est (a1∪b1, . . . ,ak∪bk→O).
Oest le plus grand élément deD.
SiX ⊂D, lesegment initial(resp.terminal) engendré parX est l’ensemble : X↓={β∈D; (∃α∈X)(β≤α)} (resp.X↑={β∈D; (∃α∈X)(α≤β)}).
Poura,b∈D∗, on a doncb≤a⇔b⊂a↓. On écriraα↓pour {α}↓. On a O↓=D.
Ledomaine de Scott, que nous notonsΛ, est l’ensemble des segments initiaux deD.
On définit surΛune opération binaire t,u7→(t)u, appeléeapplication, en posant : (t)u={α∈D; (∃a∈D∗){a⊂u, (a→α)∈t}}.
On écrira souventt u1. . .unpour (. . . ((t)u1) . . .)un.
Une fonction f :Λ→Λest ditecontinue croissante(c.c.en abrégé) si, pour toute suite crois- santetn∈Λ(c’est-à-diretn⊂tn+1) on af(S
ntn)=S
nf(tn).
PourX ⊂D, on posef(X)=f(X↓).
On définitλx f(x) (ouλf)∈Λpar :λf ={a→α;α∈f(a),a∈D∗}.
On a alors (λf)t=f(t) pour toutt∈Λ.
Cela permet de définir les valeurs desλ-termes clos et donc, en particulier, celles des com- binateurs B=λxλyλz(x)(y)z,C=λxλyλz xz y,I =λx x,K=λxλy x,W=λxλy x y y.
On définit maintenant unealgèbre de réalisabilité[3, 5], notéeAA =(Λ,Π,⊥⊥⊥), qui est associée à ce domaine.1
L’ensembleΛdes termes deAA vient d’être défini.
Π(ensemble des piles de l’algèbreAA) est l’ensemble des segments terminaux deD, qui sont clos paru(filtres). Il s’identifie àΛω:
En effet, siπ∈Π, on définit la suiteti∈Λ(i ∈ω) en posant : ti =S
{ai; (a1, . . . ,ai, . . . ,an→O)∈π}. On a alors : π={a1, . . . ,an→O;ai⊂ti pour 1≤i≤n}.
Sit∈Λ,t=X↓etπ∈Π, on at∩π6= ; ⇔X ∩π6= ;.
On pose :
⊥⊥⊥ ={t?π; t∩π6= ;}.
t
.
π={a→α;a⊂t,α∈π}.kπ={a→δ;δ∈D,a∩π6= ;}=k0π↓, aveck0π={{α}→O;α∈π}.
cc=cc0↓, aveccc0={ {a→β}→α1u. . .uαnuβ; a={{α1}→O, . . . , {αn}→O} }.2
1. La construction de cette algèbre est due à T. Ehrhard et T. Streicher.
2. La définition de⊥⊥⊥,kπetccdans les modèles usuels duλ-calcul est due à T. Ehrhard.
On vérifie que :
kπ?t
.
ρ∈ ⊥⊥⊥ ⇔t?π∈ ⊥⊥⊥, c’est-à-dire k0π∩t.
ρ6= ; ⇔t∩π6= ;.En effet, si ({α}→O)∈t
.
ρavecα∈πalorsα∈t∩πet inversement.cc?t
.
π∈ ⊥⊥⊥ ⇔t?kπ.
π∈ ⊥⊥⊥, c’est-à-direcc0∩t.
π6= ; ⇔t∩kπ.
π6= ;.En effet, si ({a → β}→ α1u. . .uαnuβ)∈ t
.
π avec a = {{α1} → O, . . . , {αn} → O}, alors α1, . . . ,αn,β∈π, donca⊂kπ; de plus, (a→β)∈t, donc (a→β)∈t∩kπ.
π.Inversement, si (a→β)∈t, aveca⊂kπetβ∈π, on aa⊂a0↓avec :
a0={{α1}→O, . . . , {αn}→O}, etα1, . . . ,αn∈π; donc (a0→β)∈tet ({a0→β}→γ)∈t
.
π, avec γ=α1u. . .uαnuβ. Donc ({a0→β}→γ)∈cc∩t.
π.Pour achever la définition de l’algèbre de réalisabilitéAA, il reste à choisir l’ensemble des quasi-preuves[3, 5]. On prend le plus petit possible, c’est-à-dire le plus petit sous-ensemble QPdeΛqui contient les valeurs des combinateursB,C,I,K,W,cc, et qui est clos par l’opéra- tion d’application.
Toute algèbre de réalisabilité permet de construire des modèles de ZF, à condition qu’elle satisfasse la condition decohérence[3, 5] :
Pour tout t∈QP, il existe une pileπ∈Πtelle que t?π∉ ⊥⊥⊥. Lemme 1. L’algèbre de réalisabilitéAA est cohérente.
Pour chaque formuleα∈D, on définit savaleur de vérité|α| ∈{0, 1} :
|O| =0 ;|a→α| =0⇔ |α| =0 et (∀β∈a)(|β| =1).
Pour chaquet∈Λ, on pose alors |t| =inf{|α|;α∈t}.
On vérifie facilement que|B|,|C|,|I|,|K|,|W|,|cc| =1 et que :
(∀t,u∈Λ)(|t| = |u| =1→ |t u| =1). Il en résulte que (∀t∈QP)(|t| =1).
Par suite, sit∈QP, alorsO∉t, donct?{O}∉ ⊥⊥⊥. La pileπcherchée est donc {O}.
C.Q.F.D.
Lemme 2. Pour chaque n∈ω, soit n=λfλx(f)nx∈Λl’entier de Church n de l’algèbreAA. Il existeνn∈D tel queνn∈n etνn∉m pour m6=n.
On définit une suiteµn∈Dpar récurrence : µ0=({O}→O) ; µn+1=(; →µn).
On pose In=nK I. On a immédiatement µn∈In, par récurrence.
Il existe doncan,bn∈D∗, avecan⊂Ketbn⊂I, tels que (an,bn→µn)∈n.
On poseνn=(an,bn→µn).
On montre queµm∉Insim6=n: c’est immédiat pourn=0, puisque I0=I.
Sim=0,n6=0 etµ0∈In, on a ({O}→O)∈K In−1, donc In−1=O↓=D, ce qui est faux.
Si m,n 6= 0 etµm ∈ In, on a (; →µm−1)∈K In−1, donc µm−1∈ In−1, d’où le résultat par récurrence.
On a alorsνm=(am,bm→µm)∉npourm6=n, puisqueµm∉nK I,am⊂Ketbm⊂I.
C.Q.F.D.
Le théorème 1 ci-dessous exprime la seule propriété de l’algèbreAA utilisée dans la suite.
Théorème 1. Pour toute suiteξn∈Λ(n∈ω), il existe φ∈Λtel que :
• φn=ξnpour tout n∈ω;
• pour tout θ∈Λtel que θφ||− ⊥, il existe k ∈ωtel que θφ0||− ⊥pour tout φ0∈Λtel que φ0n=ξnpour tout n≤k.
On poseφ={({νn}→α) ;n∈ω,α∈ξn}. On a immédiatementφn=ξn, d’après le lemme 2.
Par ailleurs, on a θφ||− ⊥ ⇔ O∈θφ ⇔ il existea⊂φtel que (a→O)∈θ.
Or,aest une partie finie deφ, et on a O∈θφ0pour toutφ0∈Λtel quea⊂φ0. On obtient la deuxième partie du théorème en prenant pourkle plus grand entier tel que ({νk}→α)∈a, avecα∈ξk.
C.Q.F.D.
L’opérateur de bar-récursion
On définit ci-dessous deuxλ-termes clos (quasi-preuves)χetΨ.
Dans ces définitions, les variablesi,kreprésentent (intuitivement) des entiers et la variablef une fonction de domaineω, à valeurs quelconques dansΛ:
χk f zi=f i sii <k;χk f zi=zsii ≥k.
On a donc :
χ=λkλfλzλi((i<k)(f)i)z où le booléen (i<k) est défini par :
(i<k)=((k A)λd0)(i A)λd1 avec0=λxλy y,1=λxλy xetA=λxλy y x.
Le termeχk f est une représentation, enλ-calcul, de la suite finie〈f0,f1, . . . ,f k−1〉.
Ψg uk f =(u)(χk f)(g)λz(Ψg uk+)(χ)k f z oùk+=λyλx(k y)(y)xest le successeur dekdans les entiers. On a donc :
Ψ=λgλu(Y)λhλkλf(u)(χk f)(g)λz(hk+)(χ)k f z. Le termeΨest appeléopérateur de bar-récursion.
2 Réaliser le choix dénombrable
On écritl’axiome du choix dénombrablesous la forme :
(CDen) ∀nגω¬∀xגX¬F[n,x],∀fג(Xω)¬∀nintF[n,f(n)]→ ⊥
oùX est un ensemble quelconquenon vide, du modèle de baseM, etF(n,x) une formule quelconque de ZFε, à deux variables libres, avec paramètres.3
On sait que, dans le modèle de réalisabilité (N ,ε),ω(resp.X) est un sous-ensemble deגω (resp. גX), et ג(Xω) est un sous-ensemble de (גX)גω (voir [5]). Donc, si f εג(Xω), alors f définit une fonction deωdansגX.
Théorème 2. λgλu(Ψ)g u0||− CDen.
L’axiome du choix dénombrable est donc réalisé dans le modèle de ZF associé à l’algèbre réalisabilité du domaine de Scott (il suffit, en fait, que l’algèbre de réalisabilité considérée satisfasse la propriété énoncée au théorème 1).
SoientG,U∈Λtels que G||− ∀n¬∀xגX¬F[n,x] et U ||− ∀fגXω¬∀nintF[n,f(n)].
On poseH=ΨGU et on doit montrerH0||− ⊥.
3. Le symboleגet les quantificateurs restreints∀xגX,∀nint sont définis dans [5].
Lemme 3. Soient k∈ωet φ∈Λ, tels que (∀i<k)(∃ai∈X)(φi ||−F[i,ai]).
Si H kφ6||− ⊥, alors il existe ak∈X etζk,φ||−F[k,ak]tel que(H k+)(χ)kφζk,φ6||− ⊥.
Soita∈X fixé. Posonsηk,φ=λz(H k+)(χ)kφz, d’oùH kφ=(U)(χkφ)(G)ηk,φ. Si ηk,φ||− ∀xגX¬F[k,x], alorsGηk,φ||− ⊥et donc (χkφ)(G)ηk,φ||− ∀nintF[n,fk(n)], oùfk:ω→X est définie parfk(i)=ai pouri <k; fk(i)=apouri ≥k.
En effet, si on pose φ0=(χkφ)(G)ηk,φ, on a :
φ0i=φi ||−F[i,ai] pouri <ketφ0i =(G)ηk,φ||− ⊥pouri≥k, et doncφ0i ||−F[i,a].
Il en résulte que (U)(χkφ)(G)ηk,φ||− ⊥, autrement ditH kφ||− ⊥.
On a ainsi montré que, si H kφ6||− ⊥, alors ηk,φ6||− ∀xגX¬F[k,x], ce qui donne immédiate- ment le résultat voulu.
C.Q.F.D.
Soitφ0∈Λtel que H0φ06||− ⊥. En appliquant le lemme 3, on définit ak ∈X et φk ∈Λpar récurrence, en posant φk+1=χkφkζk,φk.
On montre alors immédiatement, par récurrence surk:
φki ||−F[i,ai]pour i<k ; φki=φk+1i pour i <k ; H kφk6||− ⊥. On peut alors définir :
une fonctionf :ω→X telle quef(i)=ai pour touti∈ω;
et, au moyen du théorème 1, un termeφ∈Λtel queφi =φkipouri,k∈ωaveci<k.
La fonctionφ:ω→Λest le prolongement commun desφkk (φkrestreinte à{0, 1, . . . ,k−1}).
On a doncφi ||−F[i,f(i)] pour touti∈ω, autrement dit φ||− ∀nintF[n,f(n)].
Il en résulte que Uφ||− ⊥. D’après le théorème 1, il existe donc un entierk tel queUφ0||− ⊥, pour toutφ0∈Λtel queφ0i=φi pouri<k.
On a donc, en particulier, (U)(χkφk)ξ||− ⊥quel que soitξ∈Λ.
Or, on a H kφk=(U)(χkφk)(G)ηk,φk et donc H kφk ||− ⊥, ce qui est une contradiction.
On a ainsi montré que H0φ0||− ⊥quel que soitφ0∈Λ, et donc H0||− ⊥.
C.Q.F.D.
3 Réaliser le choix dépendant
On écritl’axiome du choix dépendantsous la forme :
(DC) ∀xגX¬∀yגX¬F[x,y],∀fג(Xω)¬∀nintF[f(n),f(n+1)]→ ⊥
oùX est un ensemble quelconquenon vide, du modèle de baseM, etF[x,y] une formule quelconque de ZFε, à deux variables libres, avec paramètres.
Théorème 3. λgλu(Ψ)g u0||− DC.
L’axiome du choix dépendant est donc réalisé dans le modèle de ZF associé à l’algèbre de réalisabilité du domaine de Scott (ou, plus généralement, pour toute algèbre de réalisabilité satisfaisant la propriété énoncée au théorème 1).
SoientG,U∈Λtels que G||− ∀xגX¬∀yגX¬F[x,y] etU ||− ∀fגXω¬∀nintF[f(n),f(n+1)].
On poseH=ΨGU et on doit montrerH0||− ⊥.
Lemme 4. Soient k∈ω, a0, . . . ,ak∈X et φ∈Λ, tels que (∀i<k)(φi ||−F[ai,ai+1]).
Si H kφ6||− ⊥, alors il existe ak+1∈X et ζ||−F[ak,ak+1]tel que(H k+)(χ)kφζ6||− ⊥.
Posonsηk=λz(H k+)(χ)kφz, d’oùH kφ=(U)(χkφ)(G)ηk.
Si ηk||− ∀yגX¬F[ak,y], alorsGηk||− ⊥et donc (χkφ)(G)ηk||− ∀nintF[fk(n),fk(n+1)], oùfk:ω→X est définie parfk(i)=ai pouri <k; fk(i)=akpouri≥k.
En effet, si on pose φ0=(χkφ)(G)ηk, on a :
φ0i=φi ||−F[ai,ai+1] pouri<ketφ0i=(G)ηk||− ⊥pouri ≥k.
On a doncφ0i ||−F[fk(i),fk(i+1)] pour touti ∈ω.
Il en résulte que (U)(χkφ)(G)ηk||− ⊥, autrement ditH kφ||− ⊥.
On a ainsi montré que, siH kφ6||− ⊥, alorsηk 6||− ∀yגX¬F[ak,y], ce qui donne immédiatement le résultat voulu.
C.Q.F.D.
Soient a0∈X et φ0∈Λtel que H0φ06||− ⊥. En appliquant le lemme 4, on définitak ∈X et φk∈Λpar récurrence, en posant φk+1=χkφkζ, oùζest fourni par le lemme 4, où l’on fait φ=φk. On montre alors immédiatement, par récurrence surk:
φki ||−F[ai,ai+1]pour i <k ; φki=φk+1i pour i≤k ; H kφk6||− ⊥. On peut alors définir :
une fonctionf :ω→X telle quef(i)=ai pour touti∈ω;
et, au moyen du théorème 1, un termeφ∈Λtel queφi =φkipouri,k∈ωaveci<k.
La fonctionφ:ω→Λest le prolongement commun desφkk.
On a doncφi ||−F[f(i),f(i+1)] pour touti ∈ω, autrement dit φ||− ∀nintF[f(n),f(n+1)].
Il en résulte que Uφ||− ⊥. D’après le théorème 1, il existe donc un entierk tel queUφ0||− ⊥, pour toutφ0∈Λtel queφ0i=φi pouri<k.
On a donc, en particulier, (U)(χkφk)ξ||− ⊥quel que soitξ∈Λ.
Or, on a H kφk=(U)(χkφk)(G)ηket donc H kφk||− ⊥, ce qui est une contradiction.
On a ainsi montré que H0φ0||− ⊥quel que soitφ0∈Λ, et donc H0||− ⊥.
C.Q.F.D.
4 Un bon ordre sur R
Dans cette section, on utilise les notations et les résultats de [5] et [6].
SiF est une formule close de ZFε, la notation ||−F signifie qu’il existe unλc-terme clos θ tel que θ||−F.
Dans la section 2, on a réalisé l’axiome du choix dénombrable sous la forme (CDen). On considère ici le cas particulierX ={0, 1}. On obtient, en ajoutant un paramètreφ:
||− ∀φ¡
∀nint∃xג2F(n,x,φ)→ ∃fג(2ω)∀nintF(n,f(n),φ)¢ pour toute formuleF(n,x,φ) de ZFε.
En particulier, en prenantφε2ωetF(n,x,φ)≡(x=φ(n)) (c’est-à-dire (n,x)εφ), on trouve :
||−(∀φε2ω)∃fג(2ω)∀nint(f(n)=φ(n)).
Donc, dans le modèle de réalisabilitéN , toute fonctionφ: ω→ 2, (c’est-à-dire tout réel) est la restriction àωd’une fonction f εג(2ω) (qui est elle-même une fonction deגωdansג2, d’après [5]).
Dans le modèle de baseM, soientg⊂ωet f ∈2ωsa fonction caractéristique.
On a évidemment I||−f(n)= 〈n∈g〉, pour toutn∈ω.4Il en résulte que : λx xI ||− ∀fג(2ω)∃g∀nגω(f(n)= 〈n∈g〉).
On a montré ainsi que :
||−(∀φε2ω)∃g∀nint(φ(n)= 〈n∈g〉).
Or, dans [6], on a construit un ultrafiltreD :ג2→2 sur l’algèbre de Booleג2, ayant la pro- priété suivante : le modèleN , muni des deux relations binairesD(〈x∈y〉),D(〈x=y〉), est un modèle de ZF, notéMD, qui est une extension élémentaire du modèleM de base. De plus,MD est isomorphe à un sous-modèle transitif deN , qui contient tous les ordinaux deN.
MDsatisfait l’axiome du choix, car on suppose queM |=ZFC.
Si on suppose queM |= V = L, alorsMDest isomorphe à la classe des constructibles deN. Pour touteφ:ω→2, on a évidemmentD(φ(n))=φ(n). Par suite :
||−(∀φε2ω)∃g∀nint(φ(n)=D(〈n∈g〉)).
Cela montre que le sous-ensemble deωdéfini parφest dans le modèleMD: c’est, en effet, l’élémentg de ce modèle.
On a ainsi montré queN etMDont les mêmes réels.
DoncRest bien ordonné dansN , et on a : ||−(Rest bien ordonné).
Si le modèleM de base satisfait V = L, on a de plus : ||− (tout réel est constructible).
De plus, commeN etMD ont les mêmes réels, toute formule d’analyse (formule close à quantificateurs restreints à N ouR) a la même valeur de vérité dans MD,M ouN . Il en résulte que :
Pour toute formule d’analyse F , on a M |=F si et seulement si ||−F . En particulier, on a ||−F ou ||− ¬F.
Références
[1] S. Berardi, M. Bezem and T. Coquand.On the computational content of the axiom of choice.J. Symb. Logic 63, 2 (1998) p. 600-622.
[2] U. Berger and P. Oliva.Modified bar recursion and classical dependent choice.
Proc. Logic Colloquium 2001 - Springer (2005) p. 89-107.
[3] J.-L. Krivine.Realizability algebras : a program to well orderR. Logical Methods in Computer Science vol. 7, 3 :02 (2011) p. 1-47.
[4] J.-L. Krivine.Realizability algebras II : new models of ZF + DC.
Logical Methods in Computer Science, vol. 8, 1 :10 (2012) p. 1-28.
[5] J.-L. Krivine.Realizability algebras III : some examples.To appear (2013)5.
[6] J.-L. Krivine.On the structure of classical realizability models of ZF.To appear (2014).
[7] T. Streicher. A classical realizability model arising from a stable model of untyped λ- calculus.To appear (2013).
4. La notation〈F〉, oùFest une formule close de ZF, avec paramètres, est définie dans [6].
5. Les articles [3, 4, 5, 6] se trouvent à www.pps.univ-paris-diderot.fr/˜krivine/