• Aucun résultat trouvé

et La Thébaïde de Racine

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "et La Thébaïde de Racine "

Copied!
2
0
0

Texte intégral

(1)

Deux variantes du "sujet le plus tragique de l'antiquité" : l'Œdipe de Corneille

et La Thébaïde de Racine

(résumé) 1

De 1658 à 1663, la légende des Labdacides, qui avait déjà été abon- damment traitée dans les périodes antérieures, fut, semble-t-il, à la mode. C'est en effet à elle que songe Fouquet lorsqu'il propose à Corneille de retourner au théâtre; c'est à cette même source que, poussé par des amis, vient puiser Racine pour commencer sa carrière.

Deux pièces, deux étapes de cette légende, mais, comme l'indiquent la reprise de noms propres, le souci de renvoyer, chaque fois, à l'autre étape et le respect de l'atmosphère qui est celle du mythe pris dans sa globalité, une préoccupation unique.

Annoncé, reporté et finalement perpétré, le fratricide, toujours nommé - conformément à l'état de la langue - parricide, fait la substance même de l'intrigue de La Thébaïde. Dès les premières scènes, nous apprenons qu'il est programmé depuis six mois, que la menace s'est récemment précisée et que, du reste, nous avons affaire à deux couples de frères ennemis, Ménécée étant à Etéocle ce que Hémon est à Polynice. Mais l'acte 1 n'est pas achevé que naît un espoir d'entente. Déception à l'acte II, au terme duquel nous apprenons que l'on en est aux mains, et au début de l'acte III, où est annoncée la mort de Ménécée. Nouvel espoir dans le courant de ce même acte quand on apprend qu'il ne s'agit que d'un incident et que Créon ne crie pas vengeance. Déception définitive après la longue confrontation de la scène 3 de l'acte IV. De là, à l'acte V, l'annonce des morts de Jocaste, d'Etéocle, d'Hémon, de Polynice et, probablement, de Créon.

Le parricide structure aussi la pièce de Corneille. Au départ, le meurtre de Laïus apparaît comme une affaire classée. A la fin de l'acte 1 Jocaste devine que la peste est le châtiment que les dieux ont envoyé aux Thébains pour cette mort. Puis survient une accalmie. Nouvelles alarmes et nouvelle accalmie à l'acte III. D'abord détournée sur Dircé et Thésée, qui envisagent successivement de se sacrifier, l'attention du

1 Paru dans Papers on French Seventeenth Century Literature, Günter Narr Verlag Tübingen, janvier 2000, p. 23-43.

51

(2)

spectateur est enfin concentrée sur Oedipe dans les actes N et V où, après la double intervention de Phorbas et d'Iphicrate, on établit qu'il est coupable d'un meurtre qui est aussi un parricide. La troisième partie de la vérité - l'inceste - ne s'impose qu'à la scène 3 de l'acte V et dès lors nous n'avons plus qu'à apprendre la triple catastrophe finale : suicide de Jocaste et de Phorbas, puis automutilation d'Oedipe.

Si le thème de l'inceste est tardivement et brièvement évoqué par Corneille -l'auteur a dans un de ses Discours dénoncé l'irrecevabilité de cet aspect du mythe -, il est en revanche très présent dans la pièce de Racine, où il sous-tend le thème, fondamental, des frères ennemis. De là l'intérêt que représente une lecture psychanalytique qui peut porter non seulement sur le déchirement familial mais encore sur l'attitude para- doxale d'Antigone moins attachée à son fiancé qu'à ses frères, en qui elle retrouve son père.

En revanche, la dimension politique qui, sans être exclue de La Thébaïde - parce que c'est le sort d'une ville qui est en jeu, parce que ces frères ennemis sont des princes et parce que Créon est une belle figure d'ambitieux, hypocrite et pervers, prêt à tout sacrifier pour régner -, n'a pas dans cette pièce le premier rôle, est très présente chez Corneille, où l'on réfléchit sur l'origine et sur le fonctionnement du pouvoir: on pose en effet le problème de la légitimité, on présente Oedipe comme un tyran qui n'est pas à proprement parler un usurpateur et on souligne que, contrairement à Thésée, il s'oppose à toute pratique machiavélienne ; enfin et surtout nous assistons là à une belle leçon de loyalisme, étant bien entendu que si Oedipe est fautif, ce n'est pas en tant que parricide mais en tant que régicide.

A quoi il faut ajouter l'intérêt que présentent l'introduction du thème amoureux et, plus encore peut-être, celle de la réflexion théologique sur la Grâce et le libre arbitre.

Au total donc, deux réécritures dont l'une marque une étape dans la réflexion de Corneille sur le héros et l'autre programme tout le théâtre de Racine, dominé par l'attention portée à des drames familiaux qui sont toujours plus ou moins liés à des crises politiques.

52

Suzanne GUELLOUZ Université de Caen

Références

Documents relatifs

Il se rendait à la source à sa place et elle avait en permanence une petite réserve d'eau'." Lorsque ses frères lui conseillaient une autre femme, d'abord parce

À l’acte I, scène 3, Pharnace presse ainsi Monime de ne plus attendre son père et de s’unir à lui ; Monime lui oppose un discours où elle ressaisit l’unité de son

31 Le mot de mystère dans la bouche d’Étéocle est ainsi l’emblème de l’échec de la rhétorique, mais il dit aussi une vérité sur la réussite, du

Cette remarque concerne en premier lieu Domitien à qui Stace s’adresse directement dans le proème (S TAT. 405 L’interprétation du conflit thébain comme une métaphore de la

Nombreuses réalisations dans l'espace public en France (Nevers, Dijon, Montceau-les-Mines, Paris, Sens, Nancy, La Rochelle, Lille) et à l'étran- ger (Suisse, Allemagne,

Présenter deux actions dans une tragédie, comme l’a fait Rotrou, revient à en faire deux tragédies, aspect avec lequel Racine avoue, implicitement, être en désaccord: «Le

(6) Rappelons que le nombre de racines d’un polynôme sur un corps commutatif ne peut pas excéder le degré de ce polynôme.. Si x est une racine de ce polynôme, il en est de même

Des cellules qui n’ont jamais été exposées aux UV, sont prélevées chez un individu sain et chez un individu atteint de Xeroderma pigmentosum.. Ces cellules sont mises en