A.
MULLER,
D. MICOL D.DOZIAS,
J.R. PECCATTE
INRA Domaine du Pin au Haras 61310 Exmes
*INRA Laboratoire Croissance . et Métabolismes des Herbivores
Theix - 63122 Saint Genès
Champanelle
Foin ou ensilage
pour les bovins en
croissance en
système herbager
Du foin
oude l’ensilage d’herbe de qualité moyenne, réalisé
asseztardivement, conduisent à des résultats comparables pour l’hivernage de
bovins
encroissance. Ce sont les contraintes et les avantages respectifs des
deux modes de récolte qui peuvent orienter le choix.
Parmi les animaux
qui
utiliseront à l’avenir les surfacesfourragères,
les mâles et femellesélevés pour la
production
de viande bovine serontpeut-être plus
nombreux que par lepassé.
Ces bovins devront passer aumoins,
et sipossible
auplus,
deux hivers en stabulation et recevoir desfourrages
conservésqui
devront être de bonne
qualité
lepremier
hiver.
Lorsque
leurâge
atteint oudépasse
20mois à
l’automne,
ilspourront
recevoir desfourrages
dequalité plus
ordinaire ou mêmemédiocre car leurs croîts hivernaux
pourront
êtrecompensés,
engrande partie
voire entotalité,
au cours dupâturage
suivant.Pour conserver ces
fourrages qui provien-
dront en
général
des excédents d’herbe deprintemps,
l’éleveur devra choisir entre lefanage
etl’ensilage.
Le choixdépendra
dutype
de stabulation et des moyens de récolte et destockage (matériels, bâtiments...), puis
de la structure et de l’environnement de
l’exploitation
et enparticulier
du climat. Dans les zones dedemi-montagne
duCentre,
letemps peut permettre
une récolte en foin pastrop
tardive(fin juin-début juillet)
sanstrop
de
risques
depertes
sur lesprairies naturelles ;
en zonesherbagères
del’Ouest,
avec une pousse de l’herbe
plus précoce
auprintemps,
lefanage
avant le 15-20juin
estsouvent très
risqué.
En revanchel’ensilage, plus
coûteux maisplus sûr,
pourra intervenirplus
tôt et ainsipermettre
une repousse de l’herbe avant lapériode plus
sèche d’été.On
peut
aussi se demanderquel
sera dufanage
ou del’ensilage,
le mode de conserva-tion
qui permettra
lesperformances
animalesles
plus avantageuses
sur lecycle
hiver et étésuivant,
enparticulier
dans le cas d’une fini- tion aupâturage.
Au Pin-au-Haras dansl’Orne,
nous avons récolté troisprintemps
consécutifs une même
prairie
naturelle selonces deux modes de conservation et à une date de
plus
enplus précoce.
Lesfourrages
ainsirécoltés ont été distribués
pendant
l’hiver àdes bovins en croissance
âgés
d’environ 2 ans,qui
ont été ensuite remis aupâturage
pours’y engraisser.
Dispositif expérimental
1 / Fourrages
Une
prairie permanente
de flore médiocre(vulpin, pâturin, agrostis, houlque
laineuse et renonculesprincipalement)
a été utilisée en1987,
1988 et 1989 aupremier cycle
devégé-
tation pour constituer par moitié de
l’ensilage
et du foin
coupés
au même stade. Lafauche,
dont la date a été choisie pour que le foin nereçoive
pas depluie,
a été effectuée à l’aide d’une conditionneuse àdoigts.
Les bandesréservées à
l’ensilage
ont été récoltées sanspréfanage
par une ensileuse automotrice àtambour-hacheur ;
les bandes restantes ontRésumé ,
Pour des animaux peu
exigeants,
tels que des bovins de deux ans encroissance, l’ali-
mentation hivernalepeut
être basée sur des rations de foin oud’ensilage
d’herbe dequalité
moyenne.L’objectif
de trois essais d’alimentation successifs au Domaine du Pin au Haras a été de comparer chez des boeufs et desgénisses,
l’utilisation durant l’hiver d’herbe récoltée à mêmedate,
asseztardivement,
sous forme de foin ou d’ensi-lage.
Laqualité
desensilages
est variable selonl’âge
de l’herbe et les conditions de réalisation du chantier derécolte ;
laqualité
des foins estplus
stable. Lesquantités ingérées
par les animaux sont voisines entre les deux modes de récolte. Lesperfor-
mances de croissance sont
également comparables.
Onn’enregistre
pas d’arrière effet du mode d’alimentation hivernale sur lescaractéristiques
de finition et d’abat-tage
des animaux.été fanées 3 fois
jusqu’au
pressage (4èmejour).
Des échantillons defourrage
ont étéprélevés
à la récolte pourl’analyse chimique (tableau 1).
2 / Animaux
Quelle
que soit leur race, tous les mâles utilisés sont nés en fin d’hiver. Ils ont été conduits aupâturage
ouaffouragés
en vertdans leur
jeune âge
(4 à 8mois) ;
ils ont ensuite été nourris àl’ensilage
d’herbe l’hiver suivantpuis
ontpâturé
à nouveau un second été(14-20
mois). Les femelles charolaises par contre, achetées à 20 moisd’âge,
n’ont sansdoute pas reçu
d’ensilage
avant leur arrivéeau Pin-au-Haras.
En cours
d’essai,
les animaux ont étépesés
toutes les 3 semaines durant
l’hiver,
etensuite tous les mois environ au
pâturage.
Une double
pesée
a été effectuée pour la constitution des deux lotsexpérimentaux, puis 12 j après
en débutd’expérience,
ainsiqu’en
fin de stabulation hivernale et en début et en fin depâturage.
Les animaux ont été finis à l’herbe et abattus soit à l’abattoir INRA de Theix (63) soit à Gace(61) ;
dans ce dernier cas les mesures sur carcasses ont été réduites. Lesgénisses
charolaises ont eu unepériode
d’herbe un peu écourtée et n’ont pas été finies aupâturage.
3 / Rations hivernales
Après
leur rentrée à l’étable en stabulationlibre,
les animaux ont reçupendant
3semaines au moins
(jusqu’à
la mise enlot)
unrégime
mixte constitué du foin et del’ensilage
étudiés. Puis chacun de ces deux
fourrages
aété attribué à un lot et distribué seul à volonté
après quelques jours
de transition.Chaque
animal a reçu enplus
dufourrage
80 g de minéraux de
type 16-8,
et une quan- tité de tourteau de colzaqui
a varié selon l’essai de 300 à 500 g suivant la teneur enmatières azotés
(MAT)
de l’herbe à la récolte(tableau 1).
Lesquantités
distribuées et refu- sées defourrage
ont étépesées
5jours
par semaine. Des échantillons desfourrages
offerts ont été
prélevés
(3 fois par semaine pourl’ensilage,
1 fois pour lefoin)
et regrou-pés
pourl’analyse.
Lescaractéristiques
fer-mentaires des
ensilages
ont été mesurées sur4 échantillons constitués au cours de l’hiver.
Chaque
foin ouensilage
a faitl’objet
d’unemesure de
digestibilité
in vivo dans les essais 1 et 3 et de deux mesures dans l’essai 2(tableau
2).Résultats
1 / Caractéristiques des fourrages
Fourrages
vertsLa fauche a eu lieu en moyenne le 15
juin
soit à
61 j d’âge compté
àpartir
du 15avril,
datequi,
sur unelongue période, correspond
àla mise à l’herbe au Pin-au-Haras. Elle a donc été très tardive (4
juillet)
dans l’essai1,
inter- médiaire dans l’essai 2 (14juin),
et trèspré-
coce (30 mai) dans l’essai 3. Les teneurs en
MAT et en sucres dans les
fourrages
verts ontdiminué et celles de cellulose brute
(CB)
ontaugmenté
avecl’âge ;
mais ces évolutions ont étéplutôt
faibles etirrégulières,
cequi
estdû, peut-être,
à la flore variée de cetteprairie
nonfertilisée en azote.
Ensilages
(tableau2)
Lorsque
la fauche a été tardive etqu’il
n’apas été
ajouté
de conservateur(essai 1),
lesfermentations dans le silo ont été peu favo- rables avec
beaucoup
d’N-NH3 et d’AGV pro- duits et donc unpH
final élevé. Au cours des deux autresessais,
bénéficiant d’une date de récolteplus précoce
et d’un conservateur effi- cace, la conservation a été excellente(peu d’AGV,
peud’N-NH3, pH s 4).
Ces
ensilages
ont étéingérés
enquantités
assez
comparables
par les moutons maintenusen cages à bilans : de 43 à 47 g de MS par
kg
de
poids métabolique ;
c’est un fait admis que les moutons sont assez peu sensibles à la qua- lité de conservation. Par contre ladigestibilité
de la matière
organique (CUD MO)
n’a pas diminuérégulièrement quand l’âge
de l’herbeaugmentait ;
elleparaît
anormalement faible dans l’essai 2. Les teneurs en MAT sont unpeu
plus
élevées que dans lesfourrages
vertscorrespondants ;
les teneurs en PDIE sont de2 à 4 g par
kg
de MSplus
faibles que celles enPDIN.
Foins
(tableau 3)
Les foins ont
toujours
étéplus
pauvres encendres
(- 39%)
et en MAT(-
15%)
que lesensilages ;
cela résulte enparticulier
despertes
au sol des éléments lesplus fragiles,
mais
aussi,
dans le cas desensilages,
d’unecertaine souillure de l’herbe verte et humide par la terre. Leur
ingestibilité
par les mou-tons maintenus en cages à bilan a été peu dif- férente de celle des
ensilages (47
g contre 45 g de MS parkg
depoids métabolique).
Ladiges-
tibilité de la matière
organique
des foins aLa
digestibilité
et lavaleur
énergétique
des
/btMS
oyt! ntOtMSdes
variéfoins
queont
pourmoins
lesensilages.
Les
quantités ingérées
defoin
etd’ensilage
ont étévoisines et le
gain
depoids vif
a peu variéavec le
type
defourrage.
diminué avec
l’âge
del’herbe,
et estplus
faibleque celle de
l’ensilage
(4 à 6points
dedigesti-
bilité de MO en
moins)
dans les essais 1 et3 ;
dans l’essai2,
ladigestibilité
de la matièreorganique
est la même(0,55)
pour les 2types
defourrage.
Par l’effet des teneurs en cendres
plus faibles,
l’estimation del’énergie
nette de cesfoins est à
peine
inférieure à celle des ensi-lages (0,63
UFL contre0,64 UFL,
enmoyenne)
maisplus
élevée de0,04
UFL dans l’essai 2 etplus
faible de0,07
UFL dans l’essai 3. Les teneurs en PDIN des foins sonttoujours plus
faibles(- 6
g parkg
de MS) etcelles en PDIE
toujours plus
élevées (+ 12g)
que celles des
ensilages.
L’estimation de la valeur d’encombrement est peu différente pour les 2
types
de four-rage :
1,40
UEB pour les foins et1,44
UEBpour les
ensilages.
2 / Quantités ingérées et
croîts hivernaux des bovins
En moyenne dans les 3 essais et les 5 com-
paraisons
entre lotsd’animaux,
lesquantités ingérées
diffèrent de seulement 3% entre ensi-lage (8,68 kg MS)
et foin(8,45 kg MS) (tableau 4). L’âge
et lacomposition
de l’herberécoltée de même que la
qualité (mauvaise
oubonne)
del’ensilage
neparaissent
pas avoir d’effet sensible sur ces différences. Onpeut cependant
remarquer que dans l’essai 1 oùl’ensilage
estmauvais,
les boeufs charolais(CH)
eningèrent
presque autant que defoin,
et les boeufs
pie-noirs (PN)
16 % deplus ;
dans les essais 2 et 3 où
l’ensilage
estbon,
lesconsommations des deux
types
defourrage
sont en moyenne strictement
équivalents.
Ainsi,
hormis le cas des boeufsPN, qui
appar- tiennent à une race connue comme peu &dquo;diffi- cile&dquo; et commeayant
unecapacité d’ingestion importante,
iln’y
a pas de différence de quan- titésingérées
entre les deux formes de conser-vation de l’herbe
(Micol
etBéranger 1981).
Sur une durée
expérimentale
moyenne de 100j,
legain
depoids
vif a peu varié avec letype
defourrage :
en moyenne 494g/j
avecl’ensilage
et 480g/j
avec le foin. Intraessai,
il n’estsignificativement
différentqu’en
faveurdu lot foin dans le cas des charolais de l’essai
1,
danslequel
les croîts sont lesplus
faibles par suite de la date de coupe très tar- dive
(tableau 4).
C’est en effet
l’âge
de l’herbe lors de la fauchequi
a eu l’influence laplus
notable surles consommations et sur les croîts. Sans dis- tinction du mode de conservation ou du
type
d’animaux,
lesquantités
defourrages
seulsrapportées
aupoids
vif ont été dans l’ordre des essais1,37 ; 1,59
et1,68
et les croîts de255 ;
588 et 746g/j.
3 / Période de pâturage
et abattage
Les
pertes
depoids
entre la sortie de stabu- lation et lapremière pesée
à l’herbe(inter-
valle standard de 15j)
ont été tantôtplus
éle-vées,
tantôtplus
faibles avec lefoin,
et enmoyenne peu différentes entre les lots foin
(23 kg)
etensilage (21 kg) (tableau 5).
Au
pâturage,
iln’y
a pas eu de différencesignificative
de croissance entre lots intraessai ;
le croît moyen des animaux des lotsensilage
a été de 981g/j,
et celui dans les lots foin de 995g/j.
Dans l’essai1,
les boeufs PN du lot foin sont restés12 j
deplus
à l’herbe etont
pesé
10kg
deplus
que le lotensilage ;
dans l’essai
2,
il aurait fallu12 j
depâturage
de
plus
aux boeufs du lotensilage
pour atteindre le mêmepoids
final que ceux du lot foin.Enfin,
le mode de conservation du four- rage en hiver n’a pas eu d’effetsignificatif
surles
caractéristiques d’abattage,
même si dans 2 cas sur 3 le lot foinprésente
des carcassesun peu moins grasses.
Conclusion
Les résultats de ces 3 essais n’ont donc pas
permis
de faire ressortir unavantage
détermi-nant pour l’un des deux modes de conserva-
tion de l’herbe sur les
performances
d’ani-maux de deux ans en croissance remis ensuite
au
pâturage
pourl’engraissement.
La
qualité
desfourrages
utilisés a été trèsvariable. Dans le cas des foins
(tous
récoltéspar beau
temps),
lescaractéristiques
de com-position chimique
et de valeur alimentaire ont évolué normalement avecl’âge,
de même que lesquantités ingérées
par les bovins et les croissancesqu’ils
ontpermis pendant
lapériode
hivernale.Quoiqu’on puisse,
aposte- riori, constater,
pour les lots recevant dufoin,
des
apports
azotés en PDIN par la ration totale inférieurs auxapports recommandés, (cf
tableau 6 et INRA1988)
ces déficits nesont sans doute
qu’apparents
carcompensés
par un
recyclage
sous forme d’uréesalivaire ;
de
plus
ilsproviennent
dans les essais 2 et 3 degains
depoids supérieurs
à ceuxqu’on
pou- vait attendre. En effet si l’on déduit desapports
enénergie
telsqu’ils
sont estimésnécessaires
(INRA 1988) l’apport
constituépar le tourteau de
colza,
onpeut
estimer le foin valorisérespectivement
à0,70 ; 0,75
et0,76
UFL parkg
de MS dans les essais1,
2 et3, (contre 0,60 ; 0,62
et0,67
par la mesure de leurdigestibilité).
La
qualité
desensilages
a affecté de manière variable leuracceptabilité
par lesanimaux ;
cela est vrai surtout dans l’essai1,
où il avait paruinopportun d’ajouter
unconservateur coûteux à un
fourrage
verttrop âgé.
Sauf dans l’essai3,
ilapparaît
des défi-cits élevés
(-
40 à95g) d’apports
en PDIE par la ration avecl’ensilage ;
lacomplémentation
par du tourteau de colza tanné aurait sans
doute amélioré
l’équilibre
desapports PDIN/PDIE,
mais comme avec le foin les croîts constatés dans l’essai 2 sont élevés. Les boeufs et lesgénisses
ont finalement utilisél’énergie
et l’azote desensilages
aussi bienque ceux
qui
recevaient les foins.Remarquons
cependant
quel’équation
faisant intervenirl’âge, compté
àpartir
du 15avril,
pourappré-
cier la valeur en
énergie (INRA
1981) semble sous-estimer lefourrage
vertcoupé
tard parrapport
à sa valorisation par les bovins dans l’essai1,
alorsqu’on
a l’inverse dans l’essai 3 où il a étécoupé tôt ;
dans l’essai2,
les 2 modes d’estimation concordent assez bien.On n’a pas constaté
qu’après
une alimenta-tion hivernale à base de foin les
pertes
depoids
lors du passage à l’herbe soientplus
éle-vées,
ou que lesdépôts adipeux
de la carcassesoient
plus importants
à même durée depâtu-
rage, comme cela est avancé
parfois.
Ce sontdonc d’autres facteurs que l’utilisation du
fourrage
conservéqui
doiventguider
l’éleveurRéférences bibliographiques
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tion des ensilages d’herbe. Bull. Tech. CRZV Theix, INRA, 25, 33-34.
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Summary
A
comparison of hay
and grasssilage for rearing
young cattle in winter.
For less
demanding animals,
such as twoyear-old
cattle winter feed may be based on rations of
hay
or of medium
quality
grasssilage.
The aim of three consecutive feed trials at the Domaine du Pin auHaras was to compare the effect of different diets fed to steers and heifers in winter. Grass harves- ted at the same
relatively
late date was eithergiven
in the form ofhay
or assilage.
Thequality
ofsilage
variedaccording
to the age of the grass and the harvest conditions under which it was made.The
quality
ofhay
was more constant. The amountingested by
the cattle was similar forsilage
or forhay.
Growth was likewisecomparable
for the twofeeds. No after effects due to different winter feed
were observed in
finishing
on grass or at the time ofslaughter.
MULLER A., MICOL D., DOZIAS D., PECCATTE J.R.
1992. Foin ou
ensilage
pour les bovins en croissance ensyst6me herbager. INRA Prod. Anim., 5 (2), 121 - 126.