Laurence BURLAT Congrès SASPAS -‐2014
L’évaluation colorielle des plaies :
un outil précieux pour le choix des pansements.
Pour toutes les plaies, qu’il s’agisse d’escarre ou non, « la description et
l’évaluation initiale sont essentielles au choix d’une stratégie de traitement et de soins »1. De la même manière, « l’évaluation de suivi est utile à la continuité des soins, à la cohérence et à la pertinence des décisions de traitements ainsi qu’à leur réajustement »1.
De nombreuses classifications ont été crées pour aider les praticiens dans leurs évaluations (initiale et de suivi) des plaies.
La classification anatomo-‐clinique la plus utilisée est celle du National Pressure Ulcer Advisory Panel datant de 1998 ; elle permet de classer les escarres en 4 stades1 :
-‐stade 1 : altération d’une peau intacte, liée à la pression, et se caractérisant par une modification de la température de la peau, et/ou de la consistance du tissu, et/ou de la sensibilité, et/ou de la couleur.
-‐stade 2 : escarre superficiel : perte de l’épiderme +/-‐ derme, il s’agit d’une abrasion, d’une phlyctène ou d’une ulcération peu profonde.
-‐stade 3 : perte de toute l’épaisseur de la peau avec altération ou nécrose du tissu sous-‐cutané, il s’agit d’une ulcération profonde.
-‐stade 4 : destruction importante des tissus ou atteinte des muscles, des os, ou des structures de soutien type tendons ou articulations.
Elle semble cependant complexe à utiliser en pratique.
L’échelle colorielle (Red Yellow Black), au contraire, me semble facilement utilisable en médecine ambulatoire : ludique, simple d’utilisation, elle permet le diagnostic de « coup d’œil » et se mémorise également très facilement. Elle repose sur l’utilisation de 3 couleurs dans la version initiale (rouge, jaune, noir) et de 5 couleurs dans la version modifiée (ajout du rose et du vert).
En pratique, après nettoyage de la plaie, il faut donc apprécier la couleur de la plaie et le pourcentage respectif des tissus selon leur couleur pour déterminer une prédominance. Néanmoins, « elle ne définit pas la gravité de l’escarre en profondeur, son intérêt principal est de suivre l’évolution de l’escarre traitée »1. De ce fait, il convient d’y « associer des mesures de l’escarre »1 : surface,
profondeur, topographie, douleur.
La liste des pansements proposés au remboursement est impressionnante, et, en tant que soignant, nous ne savons pas toujours très bien lequel choisir. Pourtant,
« le niveau d’évaluation des différents pansements est insuffisant. Il existe un nombre restreint d’études cliniques comparatives bien menées.
Actuellement, aucun pansement idéal n’existe. Le choix des pansements doit être adapté à l’état de la plaie.»1
L’étude des documents cités en référence1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8 m’a permis de faire une synthèse des pansements les mieux adaptés « en fonction de la couleur (ou l’aspect du lit de la plaie) et de la quantité des exsudats »2:
-‐Au stade noir / Nécrose : -‐détersion mécanique
-‐sèche : Hydrogel = Duoderm hydrogel, Hydrosurb, Intrasite, Urgo hydrogel … -‐humide : Alginate = Algostéril, Algisite M, Suprasorb A, Urgosorb …
Hydrofibre = Aquacel
-‐Au stade jaune / Fibrine : -‐détersion mécanique
-‐sèche : Hydrocolloïde épais = Algoplaque, Comfeel plus, Duoderm, Tegaderm hydrocolloid, Urgomed …
-‐humide : Alginate Hydrofibre
-‐Au stade rouge / Bourgeonnement : -‐sèche : Hydrocolloïde mince
-‐humide : Hydrocellulaire = Allevyn, Biatain, Cellosurb, Combiderm, Tegaderm foam …
-‐Au stade rose / Epidermisation :
Tulle = Grassolind, Jelonet, Tetratul, Tullegras, Vaselitulle …
Interface = Jelonet plus, Hydrotul (+CMC), Interface 5, Physiotulle (CMC), Urgotul (CMC) …
-‐Au stade vert/ Infection :
Pansement à l’argent = Allevyn S.Ag, Aquacel Ag, Urgotul S.Ag, Biatain Ag, Cellosurb Ag …
Charbon = Actisorb plus, Carbonet, Carboflex …
D’autres « petits trucs » utiles :
-‐ Simple rougeur peristante : Film = Dermafilm, Hydrofilm, Opsite, Tegaderm, Visulin …
-‐ Plaie hémorragique : Alginate -‐ Plaie malodorante : Charbon
-‐ Hyperbougeonnement : Dermocorticoïde : Diprosone2 pendant 3 jours3 Nitrate d’argent (en bâtonnet)
-‐ Hyperkératose (autour de la plaie) : Cérat de Galien, Cold cream3 …
La HAS décrit les grands principes d’utilisation des pansements4 :
-‐ « La prescription sur ordonnance d’un type de pansement donné doit être la plus précise possible ».
-‐ « L’utilisation d’un pansement impose le respect des règles d’hygiène – lavage des mains, nettoyage de la plaie, etc. – qui jouent un rôle
fondamental dans la prévention des infections. »
-‐ « Les différents pansements primaires (en dehors des pansements au charbon actif) ne sont pas destinés à être associés entre eux sur une même plaie. »
Il est utile de rappeler que la cicatrisation d’une plaie comporte 3 étapes clés:
la détersion (« elle est le tournant décisif de la cicatrisation et il faut donc l’obtenir rapidement »3), le bourgeonnement, et l’épidermisation
De ce fait, un pansement doit évoluer en même temps que la plaie qu’il recouvre. Ainsi, dans l’idéal, un pansement ne devrait pas être exactement le même en début et en fin de traitement.
Pour finir, il ne faut pas oublier que « le soin local et le choix du pansement n’est qu’un élément parmi d’autres pour obtenir une cicatrisation : la recherche de la cause de la plaie et des facteurs responsables de retards de cicatrisation afin de les corriger, reste l’élément essentiel pour obtenir une
cicatrisation. »2 Penser donc à la décharge, à la renutrition, etc6 … Références :
1 Prévention et traitement des escarres de l’adulte et du sujet âgé – Conférence de consensus, ANAES, 2001.
2 Rôle de l’infirmière libérale et du médecin généraliste dans le suivi des plaies
chroniques : enquêtes menées en Charente en 2009-‐2010 – Thèse, F.Noaillan, 2012.
3 Prise en charge des plaies chroniques – présentation, Dr A.Petiot-‐Roland
(dermatologue, Caluire et Cuire).
4 Les pansements : indications et utilisations recommandées – Bon usage des
technologies médicales, HAS, avril 2011.
5 Pansements des ulcères veineux de jambe – stratégies, Prescrire, septembre
2013.
6 Eviter les escarres – infos patients, Prescrire, Septembre 2012.
7 www.escarre.fr
8 www.oncologik.fr