Université Libre de Bruxelles Faculté des sciences
Chimie Analytique et Chimie des Interfaces
Caractérisation de décharges magnétron Ar/NH
3et Ar/H
2/N
2pour la synthèse de films minces de nitrure de silicium
Henry Frédéric
Thèse présentée en vue de l’obtention
du titre de Docteur en Sciences
Octobre 2011
Remerciements
Je tiens en premier lieu à remercier le professeur C.Buess-Herman de m’avoir accueilli au sein de son service : le CHANI.
Je souhaiterais également remercier mon promoteur de thèse F.Reniers. François, je te remercie infiniment de m’avoir donner la chance de faire une thèse de doctorat et de m’avoir toujours soutenu et conseillé quoiqu’il arrive. Je te remercie aussi pour m’avoir donné la chance de présenter mes résultats dans des congrès internationaux.
Je voudrais remercier le fond Jaumotte-Demoulin pour le soutient financier en fin de thèse et le pole d’attraction interuniversitaire (P6/08) : « Physical chemistry of plasma surface interaction » pour le soutien financier.
J’aimerais remercier tous les membres du laboratoire, en particulier Nicolas, Bernard et Delphine pour la bonne ambiance et leur bonne humeur et Karim pour m’avoir aidé à utiliser la chambre plasma de pulvérisation magnétron.
Je tiens à remercier le personnel technique du laboratoire : Philippe pour le support technique et Eric pour le support logistique.
Je voudrais remercier la famille et en particulier mes parents qui m’ont toujours
soutenu. Et finalement je remercie ma fiancée Rebecca pour sa patience infinie durant
toutes ces années. J’aimerais dédier cette thèse à ma fille Victoria.
Table des matières
I Introduction 10 II Etat de la question 14
1 Le nitrure de silicium 14
1.1 Synthèse de films mince de nitrure de silicium 17
1.1.1 Nitruration thermique 17
1.1.2 Le dépôt chimique en phase vapeur (CVD) 18
1.1.2.1 CVD à pression atmosphérique (PACVD) 20
1.1.2.2 CVD basse pression (LPCVD) 21
1.1.2.3 CVD assistée par plasma (PACVD) 21
1.1.3 Le dépôts physique en phase vapeur (PVD): 21
1.1.3.1 Le dépôt physique en phase vapeur par évaporation 22 1.1.3.2 Le dépôt physique en phase vapeur par évaporation assistée par plasma (self ion
plating) 24
1.1.3.3 Le dépôt physique en phase vapeur par pulvérisation 25
1.1.3.3.1 La pulvérisation cathodique diode 25
1.1.3.3.2 La pulvérisation cathodique diode magnétron 26 1.1.3.3.3 Le High power impluse magnetron sputtering (HiPIMS) 28
2. L’effet d’hystérèse et instabilité du processus de pulvérisation réactive 29 2.1 Mise en évidence de l’empoisonnement de la cible. 30
2.2 Empoisonnement partiel de la cible 32
2.3 Solutions pour supprimer l’instabilité 33
2.3.1 Augmentation de la vitesse de pompage 33
2.3.2 Déplacement du point d’injection du gaz réactif 34
2.3.3 Augmentation de la distance cible-‐substrat. 34
3 Dépôt de nitrure de silicium par pulvérisation magnétron 35 3.1 Empoisonnement lors du dépôt de nitrure de silicium. 35
4 Conclusions 36
III Techniques expériementales 37
1 Techniques de dépôt de films minces 38
1.1 Le plasma 38
1.1.1 La décharge luminescente 40
1.1.2 Processus de base dans les plasmas : 45
1.1.2.1 Les collisions 45
1.1.2.1.1 Collisions électroniques : 45
1.1.2.2 Relaxation des états électroniques excités 51
1.1.3.1 Particules chargées dans un champs magnétique et électrique 53
1.1.3.2 Interaction des ions avec une surface : 56
1.1.3.2.1 Mécanismes de pulvérisation : 57
1.1.3.2.2 Le coefficient d’émission d’électrons secondaires ( γ ) 58
1.1.3.2.3 Le rendement de pulvérisation (Y) : 59
1.1.3.4 Le libre parcours moyen : 60
1.1.3.5 Tension d’une décharge magnétron 61
2 Techniques d’analyse 62
2.1 La spectroscopie des photoélectrons X (XPS) 62
2.2 La spectrométrie d’émission optique (OES) 68
2.3 L’interférométrie optique : 69
2.4 La spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier 70
IV Matériels et méthodes 79
1 Matériels et procédures expérimentales 80
1.1 Enceinte plasma 80
1.2 Dépôt d’un film mince 82
1.3 Etude de l'instabilité du processus de pulvérisation 82
1.4 Spectrométrie d’émission optique 82
1.5 Analyses XPS 83
1.6 Mesures infrarouges 83
1.7 Mesures d’épaisseur 84
V Résultats et discussion 85
1 Caractérisation plasma 86
1.1 Etat de surface de la cible 86
1.1.1 Plasma Ar/NH
386
1.1.2 Plasma Ar/H
2/N
293
1.2 Détection et identification des espèces radiatives 99 1.2.1 Influence de la pression totale sur l’intensité des espèces excitées. 106 1.3 Relation entre l’intensité de Si, SiH et SiN avec l’état de surface de la cible.
115
1.3.1 Plasma Ar/NH
3115
1.3.2 Plasma Ar/H
2/N
2118
2 Etude de l'instabilité du processus de pulvérisation réactive 121 2.1 Instabilité lors de la pulvérisation dans un mélange Ar/NH
3122
2.1.1 Inlufence de la vitesse de pompage 126
2.1.1.1 Spectrométrie d’émission optique 127
Vitesse de pompage : 230 L/s 128
Vitesse de pompage : 23 L/s 131
2.2 Instabilité lors de la pulvérisation dans un mélange Ar/H
2/N
2134
2.2.1 Effet de la vitesse de pompage 136
3. Caractéristiques courant-tension 140
4. Dépôt de films minces de nitrure de silicium 145
4.1 Analyse des films minces de nitrure de silicium 145 4.1.1. Influence de la pression totale et de la composition du plasma sur la composition
des films déposés. 147
4.1.1.1 Plasma Ar/NH
3147
4.1.1.2 Plasma Ar/N
2/H
2153
4.1.2 Influence de la pression partielle en gaz réactif (pression totale variable) 155
VI Conclusions & Perspectives 161
Résumé
Lors de ce travail nous avons étudié la synthèse de nitrure de silicium en utilisant des décharges magnétron Ar/NH
3et Ar/H
2/N
2. Nous nous sommes intéressés particulièrement à la caractérisation de la décharge. Le paramètre de diagnostic le plus utilisé pour caractériser une décharge magnétron est la mesure de la tension de décharge, mais ces mesures ne donnent qu’une vue partielle du processus de pulvérisation même si le régime de pulvérisation peut être défini : métallique ou réactif. En effet, aucune information chimique ne peut être extraite des courbes de tension: d’autres techniques d’analyse sont donc indispensables. Nous avons utilisé la spectroscopie des photoélectrons X (XPS) pour analyser la chimie de la surface de la cible et la spectroscopie d’émission optique (OES) pour analyser la phase gazeuse.
La combinaison des mesures de tension et XPS a permis de mettre en évidence l’empoisonnement de la surface de la cible, consécutif à la formation d’une couche de nitrure de silicium lors de la pulvérisation dans un mélange Ar/NH
3. Dans le cas du mélange Ar/H
2/N
2, les mesures de tension ne permettent pas avec certitude de confirmer un empoisonnement de la cible, néanmoins les mesures XPS mettent en évidence, comme pour le mélange Ar/NH
3, la présence d’une couche de nitrure de silicium. Les mesures OES ont permis de détecter les mêmes espèces dans les deux types de mélange gazeux, seule l’espèce NH n’a pas été détectée dans le mélange Ar/H
2/N
2. Parmi les espèces détectées, certaines sont directement pulvérisées de la cible; il a été possible de relier l’intensité de celles-ci avec l’état de surface de la cible dans le cas du plasma Ar/NH
3.
Nous avons également étudié l’instabilité du processus de pulvérisation en combinant des mesures de tension, OES et XPS. Avec une vitesse de pompage de 230 l/s, nous avons observé une très faible hystérèse de la tension pour les deux types de mélange gazeux. Dans le cas du plasma Ar/NH
3, nous avons pu mettre en évidence que la bande de l’espèce NH peut être utilisée comme paramètre de contrôle de la décharge.
Finalement, nous avons caractérisé les films obtenus par XPS et spectroscopie
infrarouge. La stoechiométrie des films déposés va dépendre de la quantité
d’ammoniac ou d’azote injecté dans la décharge, les films déposés avec NH
3sont
contaminés par quelques pourcents d’oxygène alors que ceux déposés avec le
mélange Ar/H
2/N
2en sont dépourvus.
I
Introduction
Introduction
10
Introduction
Depuis des millénaires, les hommes sont à la recherche de nouveaux matériaux ayant des caractéristiques précises et répondant ainsi à des besoins précis. Avec l’essor de la chimie au cours des 200 dernières années, les moyens d’obtenir de nouveaux matériaux se sont multipliés.
Parmi ces nouveaux matériaux, se trouve le nitrure de silicium. C’est un composé constitué de silicium et d’azote possédant des propriétés remarquables : grande dureté, couche barrière, léger, etc… . Les applications du nitrure de silicium sont nombreuses : panneaux solaires, outils de coupe, circuits électroniques, etc… .
Néanmoins, la synthèse de ce composé qui n’existe pas à l’état naturel sur terre, nécessite l’utilisation de gaz dangereux (toxiques, asphyxiants et/ou explosifs) et des températures élevées. Une des réactions les plus utilisées est celle d’un silane (SiH
4) avec l’azote ou ammoniac à plusieurs centaines de degrés. Récemment, une nouvelle technique de synthèse du nitrure de silicium est apparu : le plasma.
Le plasma :
Bien que le premier plasma a été décrit il y a déjà plus de 150 ans, l’intérêt que celui- ci suscite est assez récent. Les plasmas couramment utilisés sont des plasmas hors équilibre dits « plasmas froids », la température des électrons y est beaucoup plus grande que celle des espèces neutres qui est proche de la température ambiante. Ceux- ci permettent d’obtenir une réactivité à basse température et ce sans l’utilisation de réactifs dangereux.
Dans le contexte mondial de réduction d’émission de gaz à effet de serre et de respect
de l’environnement, l’emploi de plasmas suscite un intérêt sans cesse croissant. Il
existe de nombreux types de techniques plasmas, parmi ceux-ci se trouve la
pulvérisation cathodique magnétron que nous avons utilisée pour obtenir des films de
nitrure de silicium.
Introduction
11 La pulvérisation cathodique magnétron :
Cette technique de dépôt est une variante de la pulvérisation cathodique. Sous la cathode se trouvent des aimants qui permettent de confiner les électrons près de la cible et d’obtenir un plasma plus dense. Cette plus grande densité a pour conséquence un taux d’ionisation plus important, ce qui augmente le bombardement de la cible par les ions permettant d’accroître le nombre d’atomes pulvérisés et d’obtenir une plus grande vitesse de dépôt. L’ajout d’aimants permet également de travailler à des pressions de travail plus basses, ce qui réduit grandement le nombre de défauts et d’impuretés présents dans les films déposés. De plus, la diminution de la pression de travail permet l’augmentation du libre parcours moyen des espèces pulvérisées, ce qui a pour effet d’augmenter les vitesses de dépôt. Un dépôt de nitrure de silicium peut être obtenu en pulvérisant une cible de silicium dans un mélange Ar/N
2[1] ou encore en pulvérisant une cible de nitrure de silicium dans un plasma d’argon pur[2] mais les films obtenus sont souvent contaminé par l’oxygène. A. Batan, durant sa thèse de doctorat a démontré que l’ajout d’une petite quantité d’hydrogène dans un mélange Ar/N
2[3]prévient la contamination d’oxygène dans les films de silicium et nitrure de silicium.
Lors de cette étude, nous avons décidé de combiner la source d’azote et la source d’hydrogène dans une seule molécule : l’ammoniac. De plus, l’utilisation de l’ammoniac comme gaz réactif dans un plasma magnétron a été très peu étudiée.
Nous avons étudié le dépôt de nitrure de silicium avec le mélange Ar/NH
3et comparé
les résultats obtenus avec le mélange Ar/H
2/N
2. Cette comparaison va permettre
d’obtenir, dans les mêmes conditions expérimentales une excellente vue d’ensemble
de l’utilisation de l’ammoniac pour l’obtention du nitrure de silicium.
12
Etat de la question
13
II
Etat de la question
Etat de la question
14
1 Le nitrure de silicium
Historique :
Le nitrure de silicium n’existe pas à l’état naturel sur terre, il est produit artificiellement par l’homme. Le nitrure de silicium à été produit pour la première fois en 1857 par Deville et Wöhler[4], mais celui-ci reste une curiosité scientifique pendant près de 100 ans. Sa production commerciale ne commencera qu’après la seconde guerre mondiale.
Structure :
Le nitrure de silicium est un composé ou chaque atome de silicium est lié à trois atomes d’azote (figure 1), il existe deux formes cristallographiques : α (trigonal), β (hexagonal). Chacune est caractérisée par une température de cristallisation différente ( α : 1473 K, β : 2000 K). Les paramètres de leur maille cristalline respective ainsi que l’angle de liaison Si-N-Si sont regroupés dans le tableau 1.
Figure 1 : Maille élémentaire du nitrure de silicium [5].
Etat de la question
15
Cristal α Si
3N
4β Si
3N
4Paramètre de la maille
a (Å) 7,766 7,586
c (Å) 5,615 2,902
Angle de liaison Si-N-Si 118,8° 119,9°
Longueur de liaison (Å) 1,738 1,730
Tableau 1 : Paramètres cristallins de la maille élémentaire du nitrure de silicium et l’angle de liaison Si-N-Si.
Diagramme de phase :
La figure 2 représente le diagramme de phase du système Si-N en fonction de la température et de la fraction molaire en azote, obtenu à partir d’un calcul thermodynamique[6]. Bien que ce diagramme soit purement théorique, plusieurs points expérimentaux se sont révélés en accord avec celui-ci. Il permet de mettre en évidence la grande stabilité du nitrure de silicium à haute température (2150K). Lors de cette étude, étant donné que les deux phases cristallines du nitrure de silicium possèdent des propriétés thermodynamiques proches, les auteurs n’ont pas fait de distinction entre celles-ci.
Figure 2 : Diagramme de phase du système Si-N [6].
Etat de la question
16 Propriétés du nitrure de silicium
Barrière de diffusion[7] :
La structure dense du nitrure de silicium empêche la diffusion des espèces telles que les ions alcalins, l’eau, l’oxygène, etc… Avec une couche d’épaisseur égale, le nitrure de silicium diminue la diffusion des atomes de phosphore de quatre ordres de grandeur comparé à une couche d’oxyde de silicium[8]. Une couche de nitrure de silicium de 10 nm permet de diminuer la perméation à l’eau et l’oxygène des polymères d’un facteur 50000[9]. Pour obtenir cette propriété, il faut que les films obtenus soient amorphes : la structure discontinue des films cristallins[10] ne permet pas d’obtenir une couche barrière[11].
Couche anti-reflet[12] :
Une couche anti-reflet permet de diminuer la réflexion d’un rayonnement incident en favorisant les interférences destructives des ondes réfléchies à l’interface air-nitrure de silicium et de l’interface nitrure de silicium-substrat. Cette propriété dépend principalement de l’épaisseur de la couche et de son indice de réfraction. Le nitrure de silicium est transparent entre 300 et 1200 nm et possède un indice de réfraction (η = 2), ce qui en fait un candidat idéal pour les applications de couches anti-reflet dans le domaine du visible.
Grande inertie chimique[13] , grande dureté[14] et résistance aux hautes températures[15]:
Le nitrure de silicium possède une grande dureté, une grande inertie chimique et une
résistance aux hautes températures grâce à la nature covalente de ses liens Si-N. Ces
liens covalents sont forts parce que les atomes d’azote et de silicium sont petits et que
leur longueur de liaison est courte.
Etat de la question
17 Diélectrique [16]:
Le nitrure de silicium possède une constante diélectrique de 7, ce qui lui confère des propriétés isolantes. Sa résistivité est de l’ordre de 10
12Ω.cm[17].
Ses propriétés conduisent à de nombreuses applications : couches passivantes et anti- reflet pour les panneaux solaires[18], isolantes et résistantes à l’érosion pour les circuits électroniques[19], outils de coupe[20].
1.1 Synthèse de films mince de nitrure de silicium
Nous allons présenter les différentes techniques de dépôt et de synthèse de films minces de nitrure de silicium les plus employées. Nous allons discuter de la nitruration thermique, de la technique de dépôt chimique en phase vapeur (CVD) [19]
et finalement nous allons détailler la technique de dépôt physique en phase vapeur (PVD) [21]. Nous allons mettre en avant les avantages et les inconvénients de ces techniques.
1.1.1 Nitruration thermique
Les films de nitrure de silicium peuvent être obtenus en faisant réagir un substrat de silicium à haute température ( T > 900 °) dans une atmosphère de N
2ou NH
3[22].
Cependant, l’épaisseur de la couche synthétisée (10 nm) est limitée parce que les espèces réactives diffusent difficilement au travers de la couche en formation. Pour obtenir une épaisseur supérieure à 10 nm, la température du substrat doit être supérieure à 1200 °C. De plus, les vitesses de croissance du film sont lentes, elles sont de l’ordre de quelques nanomètres par minute.
Les hautes températures utilisées peuvent induire la formation d’un film cristallin ou
polycristallin, ceci les rend inutilisables dans le cas de certaines applications,
notamment dans la microélectronique. Cette méthode de synthèse est extrêmement
sensible à la moindre trace d’oxygène dans la phase gazeuse comme l’atteste le
diagramme de phase repris dans la figure 3.
Etat de la question
18
Figure 3 : Diagramme de phase du système Si-N-O à 1200 °C [23].
1.1.2 Le dépôt chimique en phase vapeur (CVD)
Ce procédé permet d’obtenir un dépôt solide en faisant réagir chimiquement des
composés volatils sur un substrat, les parois du réacteur sont généralement chauffées
(figure 4). Une température du substrat élevée permet de vaincre la barrière
d’activation de la réaction, de favoriser la diffusion dans le substrat des atomes
apportés à la surface, ce qui permet une bonne adhésion du dépôt.
Etat de la question
19
Figure 4 : Schéma du dépôt par la technique CVD [24].
La préparation de couches minces grâce à cette méthode est très populaire, en effet : la composition chimique des couches obtenues est très variée (voir tableau 2), le recouvrement de substrats ayant une géométrie complexe est possible, ce qui dans le cas du dépôt de nitrure de silicium permet d’obtenir une couche barrière performante[25].
Néanmoins, cette technique présente des inconvénients : l’utilisation d’une température élevée limite la diversité des substrats utilisables et elle est également coûteuse en énergie. De plus les gaz employés peuvent être corrosifs, explosifs et toxiques (par ex: SiH
4), les dépôts obtenus peuvent être également contaminés par de l’hydrogène [26], du fluor [27] et du chlore [28] en fonction du type de réactif employé, ce qui peut modifier fortement leurs propriétés [26, 29].
Néanmoins, cette technique est toujours très appréciée pour la synthèse de dépôts de nitrure de silicium car elle permet d’obtenir des dépôts dépourvus de contaminations par l’oxygène. Une des réactions les plus étudiées est la suivante :
3 SiH
4+ 4 NH
3=> Si
3N
4+ 12 H
2D’autres types de réactifs sont utilisés pour obtenir du nitrure de silicium, le tableau 3
regroupe différentes réactions et techniques employées pour obtenir du nitrure de
silicium.
Etat de la question
20
Nous distinguerons trois types de CVD : la CVD à pression atmosphérique, la CVD basse pression (LPCVD), et la CVD assistée par plasma (PACVD).
Dépôt Réactifs Température Méthode
FeN FeCl
3+ NH
3920 K CVD[30]
Si SiH
4832 K LPCVD[31]
W WF
6+ H
2800 K LPCVD[32]
Tableau 2 : Exemples de dépôts obtenus par diverses méthodes de type CVD.
Dépôt Réactifs Température Méthode
Si
3N
4SiH
4+ NH
3600 K PACVD[33]
Si
3N
4SiCl
2H
2+ NH
31170 K PACVD[34]
Si
3N
4SiHCl
3+ NH
31073 K LPCVD[35]
Si
3N
4SiH
4+ NH
3573 K PACVD[36]
Si
3N
4SiH
4+ NH
3/N
21103 K CVD[26]
Tableau 3 : Exemples de dépôts de Si
3N
4obtenus par diverses méthodes de type CVD.
1.1.2.1 CVD à pression atmosphérique (APCVD)
Avec ce type de technique, le dépôt est obtenu grâce à la circulation du ou des gaz réactifs à pression atmosphérique vers le substrat chauffé préalablement. La réaction chimique conduisant au dépôt est favorisée grâce à une température élevée du substrat. Les gaz réactifs sont parfois dilués avec un gaz vecteur (Ar, He), ceux-ci servent à empêcher l’oxydation du gaz réactif.
Etat de la question
21 1.1.2.2 CVD basse pression (LPCVD)
Cette technique est analogue à la CVD classique, la différence est que la pression utilisée est de l’ordre de 1 Torr. Le fait de travailler à basse pression présente plusieurs avantages :
• Diminution de la quantité de gaz consommée.
• Meilleure uniformité des dépôts et diminution des défauts dans les couches déposées.
• Augmentation de la pureté des dépôts.
• Obtention de dépôts filmogènes.
1.1.2.3 CVD assistée par plasma (PACVD)
Cette technique de dépôt permet de diminuer ou de se passer du chauffage du substrat, en effet les espèces créées dans le plasma sont extrêmement réactives et ne nécessitent plus une activation thermique, ce qui permet d’obtenir un dépôt sur des substrats résistant moins aux hautes températures.
Remarquons néanmoins que les films de nitrure de silicium obtenus par PACVD en faisant réagir SiH
4avec NH
3contiennent beaucoup d’hydrogène (jusqu’à 15%) [37].
Pour diminuer la quantité d’hydrogène présente, un recuit à 850 °C [38] est alors nécessaire.
1.1.3 Le dépôt physique en phase vapeur (PVD):
Cette méthode de dépôt consiste à évaporer ou sublimer le matériau à déposer sous
vide. Les atomes sont transportés sous forme de vapeur vers le substrat. Ceux-ci se
condensent sur un substrat pour former un film mince. Cette technique permet
d’obtenir des couches très pures, de compositions variées et est plus simple à
contrôler que la CVD. Le tableau 4 regroupe différents types de dépôt obtenus par
différentes techniques de type PVD.
Etat de la question
22
Dépôt Méthode
TiN PAPVD[39]
Si
3N
4PAPVD[40]
Al
2O
3PVD (ebeam)[41]
Si
3N
4PVD (ebeam)[42]
Tableau 4 : Exemples de dépôts obtenus par diverses méthodes de type PVD.
1.1.3.1 Le dépôt physique en phase vapeur par évaporation
Il existe plusieurs méthodes d’évaporation : par un filament chauffé par effet Joule
[43], par un faisceau d’électrons [44], par laser [45] et par arc [46]. L’ajout d’un gaz
réactif [43, 47, 48] ou un bombardement par un faisceau d’ions [49] réactifs permet
d’obtenir une grande diversité en termes de type de dépôt. L’évaporation peut être
obtenue grâce à un filament chauffé pour les matériaux ayant un point de fusion
relativement bas : aluminium, cuivre, argent. Pour les matériaux ayant un haut point
de fusion (tungstène, zirconium), l’évaporation est obtenue avec un faisceau
d’électrons. L’évaporation obtenue avec un arc provoque une ionisation partielle des
particules évaporées. Les ions crées peuvent être accélérées vers un substrat polarisé
négativement, ce qui permet d’obtenir une meilleure adhésion ainsi qu’une
cristallisation du dépôt [50].
Etat de la question
23
Figure 5 : PVD avec comme source d’évaporation un faisceau d’électrons et un canon à ions utilisé pour bombarder le dépôt en cours de formation [51].
L’énergie cinétique des particules évaporées étant relativement faible (1eV) (sauf dans le cas de l’évaporation par arc si le substrat est polarisé négativement), les dépôts obtenus ont une faible adhésion et présentent de nombreux défauts. Un canon à ions bombardant le dépôt en cours de formation permet également d’obtenir la cristallisation du dépôt (Figure 5).
Le dépôt obtenu se fait en ligne directe, il est donc difficile de recouvrir des substrats
ayant une géométrie complexe.
Etat de la question
24
1.1.3.2 Le dépôt physique en phase vapeur par évaporation assistée par plasma (Self ion plating)
Cette technique couple la source d’évaporation avec un plasma réactif [52] ou non réactif [51]. Dans le cas du plasma non réactif, celui-ci est employé pour ioniser les particules évaporées et pour les accélérer vers le substrat qui est polarisé négativement. Cet apport d’énergie aux ions permet d’obtenir un dépôt plus dense et une meilleure adhésion (figure 6).
Dans le cas du plasma réactif, celui-ci est employé pour générer des espèces qui vont réagir avec les particules évaporées pour former un composé.
Figure 6 : Schéma d’un dispositif expérimental PAPVD avec une source
d’évaporation par arc [51].
Etat de la question
25
1.1.3.3 Le dépôt physique en phase vapeur par pulvérisation
Cette technique consiste à bombarder une cible du matériau à déposer par des ions [53]. Par transfert de la quantité de mouvement, les atomes constituant la cible vont être éjectés de celle-ci et venir se déposer sur un substrat. Les ions peuvent être générés grâce à un canon à ions (source plasma externe) (Figure 7) ou dans le plasma dans lequel la cible sert de cathode. Lorsque les ions sont générés par un plasma, cette technique est appelée « pulvérisation cathodique diode».
Figure 7 : Schéma de la pulvérisation par canon à ions.
1.1.3.3.1 La pulvérisation cathodique diode
Le phénomène de pulvérisation cathodique a été observé pour la première fois en
1853 par Groove, en établissant une décharge électrique sous une atmosphère d’un
gaz inerte à pression réduite. Il a observé la formation sur la surface de l’anode d’une
fine couche du matériau constituant la cathode. Ce n’est que bien plus tard que le
phénomène de pulvérisation cathodique a été compris. Celui-ci consiste en l’éjection
Etat de la question
26
de particules de la surface de la cathode par transfert de la quantité de mouvement des ions.
Pour obtenir ce phénomène, il faut polariser négativement une électrode (recouverte du matériau à pulvériser), ce qui conduit à l’établissement d’une décharge luminescente. Les ions du gaz (généralement de l’argon) sont accélérés dans la gaine cathodique et vont aller bombarder la surface de la cathode et entraîner l’éjection des atomes ou molécules constituant la cathode par transfert de quantité de mouvement.
Les particules éjectées diffusent dans toute l’enceinte et une partie d’entre-elles est recueillie sur le substrat pour former une couche mince.
Cependant cette technique de dépôt présente plusieurs désavantages : le faible taux d’ionisation couplé à la rétrodiffusion des particules pulvérisées, dû à une pression de travail de l’ordre de 10
-1à 10
-2Torr, conduit à des vitesses de dépôt assez faibles : <
0,1 µm*h
-1. Cette faible vitesse de dépôt couplée à une pression de travail de l’ordre de 10
-1à 10
-2Torr augmente la concentration des contaminants dans les dépôts obtenus.
1.1.3.3.2 La pulvérisation cathodique diode magnétron
Pour éviter les problèmes liés au processus de pulvérisation cathodique diode, la
cathode est équipée d’un dispositif magnétron constitué d'aimants situés au-dessous
de la cible à pulvériser (figure 8). Les aimants vont générer un champ magnétique qui,
combiné au champ électrique permet de confiner les électrons près de la cible et
d’accroître leur probabilité de collision avec un atome dans le cadre d’une interaction
ionisante. Ce dispositif permet d’obtenir des vitesses de dépôt plus élevées ainsi
qu’une diminution de la pression de travail, ce qui favorise des dépôts plus denses et
d’une plus grande pureté.
Etat de la question
27
Figure 8 : Schéma d’une cathode magnétron [54].
Cette technique permet d’obtenir une grande variété de couches minces en combinant différentes cibles et mélanges gazeux réactifs. Le tableau 5 regroupe une liste non exhaustive des différents types de dépôt réalisables avec cette technique : métalliques, alliages, oxydes, nitrures, carbures, oxynitrures, nitrure/carbures,…
Il est possible de pulvériser dans une atmosphère d’argon une cible ayant la même
composition que celle du composé à déposer [55, 56]. Néanmoins, cette méthode
nécessite l’utilisation d’un générateur électrique RF dans le cas ou la cible est isolante
(nitrure, oxyde, carbure). De plus les vitesses de dépôt sont faibles car le rendement
de pulvérisation des cibles composites est plus faible que celui des cibles
élémentaires. Par exemple, une cible de nitrure de silicium possède un rendement de
pulvérisation sept fois plus petit que celui d’une cible de silicium élémentaire[57].
Etat de la question
28
Dépôt Cible Gaz
ZnO [58] Zn Ar/O
2Ti [25] Ti Ar
TiN [59] TiN Ar/N
2Al
2O
3[60] Al Ar/O
2Ag-Pd [61] AgPd Ar
V
2O
5[62] V Ar/O
2CN
x[63] C Ar/N
2TiCN [64] Ti Ar/N
2/CH
4NbO
xN
y[65] Nb Ar/N
2/O
2Tableau 5 : Liste de différents types de dépôt obtenus par pulvérisation magnétron.
Nous venons de voir que la pulvérisation magnétron permet d’obtenir une grande variété de composition de couches en termes de composition. Néanmoins, le fait d’ajouter un gaz réactif dans la chambre de dépôt va provoquer des réactions chimiques au niveau de la cible, des parois et du métal qui se condense sur le substrat.
Les réactions du gaz avec la cathode ont pour conséquence son recouvrement partiel ou total par un composé à la surface de celle-ci si le flux du gaz réactif dépasse une valeur critique. Ce phénomène d’empoisonnement de la cible a de fortes répercussions sur le processus de pulvérisation : augmentation abrupte de la pression partielle en gaz réactif, diminution de la vitesse de dépôt, modification de la stoechiométrie des films déposés et apparition d’une hystérèse au niveau du processus de pulvérisation. Cette hystérèse a pour conséquence l’existence de plus d’un point de fonctionnement stable, ce qui conduit à une instabilité du processus de pulvérisation.
1.1.3.3.3 Le High power impluse magnetron sputtering (HiPIMS)
Cette technique de pulvérisation récente [66] consiste à appliquer la puissance
électrique sur la cible de manière pulsée et fréquencée, ce qui permet d’atteindre des
densités de puissance au niveau de la cible de l’ordre de plusieurs kW cm
-2. Le
plasma généré est très dense et permet d’obtenir un taux d’ionisation des particules
pulvérisées beaucoup plus grand (jusqu’à 70 %), en polarisant le substrat
Etat de la question
29
négativement les films obtenus ont une meilleure adhésion et une plus grande densité ainsi qu’une cristallinité. Néanmoins cette technique présente plusieurs inconvénients:
les vitesses de dépôt obtenues sont inférieures à celles obtenues avec la pulvérisation magnétron DC car une partie du dépôt en cours de formation est repulvérisé par le bombardement ionique et parce qu’une partie des espèces ionisées sont accélérées vers la cible par le champ électrique. Cette technique étant récente, aucun dépôt de nitrure de silicium n’a encore été décrit, à ce jour dans la littérature.
2. L’effet d’hystérèse et instabilité du processus de pulvérisation réactive
La figure 9 représente la pression partielle de gaz réactif en fonction du flux de celui- ci lors de la pulvérisation magnétron réactive. Une courbe d’hystérèse de la pression partielle en gaz réactif en fonction du flux de gaz réactif est observée. Lorsque le flux de gaz réactif est faible f
r1(point A), les particules réactives sont piégées par effet getter et occupent les sites d’absorption vacants : la cible se trouve dans un état quasiment métallique. Quand on augmente le flux au-delà d’une valeur critique f
r2(point B), les sites d’absorption sont saturés et le surplus de gaz réactif va réagir avec
la cible pour former une couche à la surface de celle-ci. La pulvérisation du composé
à la surface de la cible est nettement inférieure à celle de la cible métallique, ce qui
diminue le nombre d’atomes métalliques pulvérisés et entraîne une diminution de la
consommation du gaz réactif. La conséquence est une augmentation soudaine et
abrupte de la pression partielle en gaz réactif à une valeur P
r1(point C). Si ensuite, le
flux de gaz réactif est diminué, la pression partielle de gaz réactif diminue lentement
jusqu’au point D en suivant une pente parallèle à celle de la pression partielle du gaz
réactif en l’absence de décharge. La pression partielle en gaz réactif reste élevée
jusqu’au moment où le composé à la surface de la cible est pulvérisé (point D). On
retourne dans la situation de départ où des atomes métalliques sont pulvérisés et
peuvent à nouveau réagir avec le gaz réactif (point A). La présence d’une hystérèse
est indésirable : en effet, pour un flux de gaz réactif il existe deux points de
fonctionnement stables où la stoechiométrie des films déposés peut être totalement
différente.
Etat de la question
30
Figure 9 : Effet d’hystérèse de la pression partielle en gaz réactif lors de pulvérisation magnétron réactive[67].
2.1 Mise en évidence de l’empoisonnement de la cible.
L’empoisonnement de la cible peut être mis en évidence de plusieurs manières : en mesurant la tension et le courant de la cible, la pression partielle en gaz réactif, l’intensité lumineuse des espèces pulvérisées.
La mesure en continu de la tension de la cible donne une très bonne indication sur l’état de surface de celle-ci. Le passage du mode métallique au mode réactif se caractérise par un brusque changement de la tension dont l’amplitude dépend fortement de la nature de la cible.
La formation d’un composé à la surface de la cible modifie le coefficient d’émission
d’électrons secondaires induite par ions (CEESII), en général les oxydes et les nitrures
ont un CEESII plus grand que celui du métal pur. Cela a pour conséquence une
diminution de la tension de cible facilement identifiable (figure 10) lorsque le flux de
gaz réactif est augmenté.
Etat de la question
31
Figure 10 : Tension d’une cible d’aluminium en fonction du flux d’oxygène (Courant de décharge : 400 mA, pression partielle d’argon : 0.4 Pa.) Le flux d’oxygène est
augmenté par pas toutes les deux minutes [68].
La mesure de l’intensité lumineuse des espèces pulvérisées est également utilisée pour
détecter un empoisonnement de la cible. De manière générale, l’empoisonnement de
la cible se traduit par une brusque diminution de l’intensité de l’élément X constituant
la cible [69] (figure 11). Lorsque la cible est empoisonnée, il est aussi possible de
détecter des molécules de type A-X directement pulvérisées de la cible ayant réagi
avec le gaz réactif A, un suivi précis de l’intensité de ces molécules peut donner une
très bonne information sur le taux de recouvrement de la cible [70]. Le libre parcours
moyen régnant lors de la pulvérisation magnétron étant généralement de l’ordre du
centimètre, la probabilité de former des molécules de type A-X dans la phase gazeuse
est très faible.
Etat de la question
32
Figure 11 : Intensité de la raie d’émission de l’atome d’aluminium (396.2 nm) en fonction du flux d’oxygène lors de la pulvérisation d’une cible d’aluminium [71]
(Courant de décharge : 870 mA, pression partielle d’argon : 0.39 Pa).
2.2 Empoisonnement partiel de la cible
Les décharges magnétron ne sont pas uniformes à cause de la configuration du champ
magnétique. A la surface de la cible, il y a formation d’une région du plasma de forme
toroïdale ayant une haute densité électronique. Celle-ci forme le racetrack de la cible,
une zone de forte érosion. Par conséquent, une incorporation non uniforme du gaz
réactif au niveau de la cible est attendue. Les zones les moins érodées de la cible
peuvent être empoisonnées alors que le racetrack reste non empoisonné [72].
Etat de la question
33
2.3 Solutions pour supprimer l’instabilité
De nombreux chercheurs ont travaillé pour supprimer l’instabilité du système de pulvérisation magnétron réactive. Dans le paragraphe suivant, les solutions permettant de supprimer l’effet d’hystérèse ont été abordées.
2.3.1 Augmentation de la vitesse de pompage
L’augmentation de la vitesse de pompage permet diminuer l’ampleur et de modifier la position de l’hystérèse [73] (figure 12). Cela ne supprime pas l’empoisonnement de la cible, à la place d’une transition brutale du mode métallique au mode réactif, nous assistons à une transition plus graduelle (figure 13). Néanmoins cette solution engendre des coûts supplémentaires car elle nécessite des pompes plus puissantes.
Figure 12 : Pression partielle en azote en fonction du flux d’azote lors du dépôt de nitrure de titane à partir d’une cible de titane pour différentes vitesses de pompage (S
1< S
2< S
3)[74].
Etat de la question
34
Figure 13 : Tension d’une cible d’aluminium en fonction du flux d’oxygène pour différentes vitesses de pompage [75]. (Courant de la décharge : 200 mA, pression
partielle d’argon : 0.2 Pa)
2.3.2 Déplacement du point d’injection du gaz réactif
Danroc [76] a montré qu’un placement judicieux du point d’injection du gaz réactif permet d’éliminer le phénomène d’hystérèse. En plaçant celui-ci près de la pompe, la majorité du gaz réactif est pompé et un gradient de concentration en gaz réactif se créé entre la pompe et la cible. Berg [77] a suggéré que l’injection du gaz réactif au niveau du substrat permet également de diminuer l’effet d’hystérèse.
2.3.3 Augmentation de la distance cible-substrat.
Schiller [78] a montré que l’augmentation de la distance cible substrat permet d’éviter
le phénomène d’hystérèse, en effet lorsque le substrat est trop proche de la cible, le
flux de gaz réactif nécessaire pour obtenir un film stoichiométrique doit être
important, ce qui conduit à l’empoisonnement de la cible. Une plus grande distance
cible-substrat permet de travailler à des flux de gaz réactif plus faibles et éviter
l’empoisonnement de cible.
Etat de la question
35
3 Dépôt de nitrure de silicium par pulvérisation magnétron
Les films de nitrure de silicium peuvent être déposés par pulvérisation magnétron à partir d’une cible de nitrure de silicium pulvérisée dans une atmosphère d’argon [1]
ou d’azote [79], d’une cible de silicium dans une atmosphère Ar/N
2[80] ou encore dans une atmosphère Ar/H
2/N
2[3].
La composition des films obtenus varie en fonction de la quantité d’azote injecté dans le plasma. En fonction de la quantité d’azote injectée, le rapport N/Si peut varier de 0 à 1,33 [3, 81].
La contamination par l’oxygène [82, 83] des films de nitrure de silicium déposés est souvent observée, la concentration en oxygène mesurée est de l’ordre de quelques pourcents. Une solution à ce problème est d’introduire quelques pourcents d’hydrogène dans le plasma pour réduire les oxydes formés lors de la pulvérisation [3].
Sans chauffage du substrat, les films obtenus sont amorphes [1, 3], un recuit à 1300°C est nécessaire pour obtenir une cristallisation [84].
La polarisation négative du substrat permet de diminuer la rugosité et d’améliorer les propriétés optiques des films obtenus [83].
3.1 Empoisonnement lors du dépôt de nitrure de silicium.
Comme nous l’avons décrit précédemment, l’ajout d’un gaz réactif peut mener à un
empoisonnement de la cible. Une grande majorité des auteurs ont pu observer cet
empoisonnement grâce à des mesures de tension de la cible. Une brusque diminution
de celle-ci est observée lors du passage du mode métallique au mode réactif de
pulvérisation d’une cible de silicium dans un mélange Ar/N
2[80, 85]. Dans ce cas,
l’empoisonnement est attribué à la formation d’une couche de nitrure de silicium à la
surface de la cible. D’autres auteurs ont observé une augmentation de la tension de la
décharge lors du passage du mode métallique au mode réactif de pulvérisation [86].
Etat de la question
36
Cette augmentation de la tension de la décharge a été attribuée à l’implantation non réactive d’atomes d’azote dans la cible.
Aucune explication n’a été fournie pour expliquer ce comportement d’empoisonnement totalement différent lors de la pulvérisation du silicium dans un mélange Ar/N
2.
4 Conclusions
Le nitrure de silicium est, par ses propriétés remarquables, un matériau de choix pour
de nombreuses applications. Les méthodes de synthèse du nitrure de silicium en films
minces sont nombreuses et variées, le choix de la pulvérisation magnétron comme
technique de dépôt et de synthèse du nitrure de silicium s’impose
naturellement comparé aux autres méthodes. Celle-ci permet : d’obtenir une vitesse
de dépôt élevée et une excellente adhésion, de déposer sur un grand choix de substrat
dont les polymères, de limiter l’utilisation de gaz dangereux, de travailler à
température ambiante et est plus simple à mettre en œuvre.
37
III
Techniques
expérimentales
Techniques expérimentales
38
1 Techniques de dépôt de films minces
1.1 Le plasma
Le terme « plasma » a été introduit par Irving Langmuir [87] en 1928 bien que les plasmas avaient déjà mis en évidence dès 1830 par Michael Faraday. Ce dernier a étudié les plasmas dans des tubes en verre qui contenaient un gaz à pression réduite.
Grâce à deux électrodes, on appliquait une différence de potentiel qui provoquait l’ionisation du gaz et la création d’un arc électrique assez étrange entre les deux électrodes : le plasma. Par la suite les expériences sur les plasmas se sont succédées.
En 1856 Heinrich Geissler améliora le vide dans le tube en verre et obtint une décharge luminescente qui remplit le tube à la place d’un arc électrique.
Vers 1875, Sir Williams Crookes reprit l’expérience dans des cylindres en verre où le vide était encore plus poussé que dans les expériences précédentes. Ceux-ci seront appelés « tube de Crookes » et permettront la découverte de l’électron quelques années plus tard en 1897 par J.J. Thomson.
Le plasma est défini couramment comme un gaz ionisé, caractérisé par des concentrations en espèces neutres, ions et électrons. Le plasma est électriquement neutre. Il existe une grande diversité de plasmas, ceux-ci étant répertoriés selon différentes grandeurs.
Le taux ionisation α du plasma est défini comme le rapport entre la densité d’espèces chargées et la densité d’espèces totales. Cette grandeur va permettre de définir deux grandes catégories de plasmas.
!
" = n
cn
c+ n
n(1)
Avec n
c: la densité d’espèces chargées (m
-3) et n
n: la densité d’espèces neutres (m
-3).
Techniques expérimentales
39
Les plasmas faiblement ionisés ont un taux d’ionisation compris entre 10
-7et 10
-4. Lorsque celui-ci est compris entre 10
-4et l’unité, on parlera d’un plasma fortement ionisé.
La température des espèces est aussi une grandeur importante pour définir le type de plasma, cette température est déterminée par l’énergie moyenne des espèces (chargées ou neutres) et de celles de leurs degrés de liberté (translationnelle, rotationnelle, vibrationnelle). Lorsque toutes ces températures sont égales, on parlera de plasma à l’équilibre. Les plasmas à l’équilibre sont en général des plasmas chauds. Si la température des électrons (T
e) est différente de celle des ions (T
i) et des neutres (T
n) alors on parlera de plasma hors équilibre. Les décharges luminescentes sont des plasmas froids dont la température électronique se situe entre 1000 K et 100000 K (0,1 eV à 10 eV) alors que celle des ions et des neutres se situe entre 300 K et 1000 K.
La figure 14 regroupe les différents types de plasmas en fonction leurs densités électroniques et de leurs températures électroniques.
Figure 14 : Classification des plasmas en fonction de leur densité électronique et de leur température électronique[88].
Techniques expérimentales
40
Les plasmas peuvent être aussi caractérisés par la longueur de Debye, λ
D. Le potentiel effectif v
iressenti à une distance r lorsqu’une charge q n’est plus isolée mais est écrantée par les particules constituant le plasma est donné par :
!
"
i= q
4 #$
0r exp %r
&
D' ( ) *
+ , (2) où
!
"
D= #
$
e
$2n
$2%
0k
BT
$&
' ( )
* +
,12
(3)
Dans le cas des plasmas hors équilibre, la température électronique est beaucoup plus grande que celle des autres espèces, l’expression de la longueur de Debye peut se réduire à :
!
"
D= #
0k
BT
ee
2n
e(4)
Avec ε
0: la permittivité du vide (8,85 10
-12C
2J
-1m
-1) k
B: la constante de Boltzman (1,38 10
-23JK
-1)
e : la charge de l’électron (1,602 10
-19C) T
e: la température électronique (K)
n
e: densité électronique (m
-3)
1.1.1 La décharge luminescente
Le tube de Crookes (figure 15) va servir d’exemple pour décrire la décharge
luminescente. Le tube en verre est composé de deux électrodes métalliques planes
séparées de 50 cm sous une atmosphère résiduelle d’environ 1 Torr. La décharge
luminescente est obtenue en appliquant une différence de potentiel entre les deux
Techniques expérimentales
41
électrodes. Lorsque la tension atteint une valeur critique (tension de claquage), un courant de décharge passe entre les deux électrodes et le gaz devient lumineux.
Figure 15 : Schéma du tube de Crookes.
Au niveau macroscopique, la différence de potentiel entre les deux électrodes accélère un électron libre, celui-ci va rentrer en collision avec une molécule ou un atome de gaz et l’ioniser pour produire un électron qui va à son tour ioniser une molécule ou un atome. Ce mécanisme produit une réaction en chaîne qui conduit à la formation d’une décharge.
La figure 16 représente l’évolution du courant de décharge en fonction de la tension
appliquée. Aux faibles tensions, le courant de décharge est constant, ensuite il
augmente avec l’augmentation de la tension jusqu’au point de rupture. Ce type de
décharge s’appelle la décharge de Townsend, celle-ci n’émet pas de lumière. Au-delà
du point de rupture, le courant est indépendant de la tension appliquée, ce type de
décharge est appelé : la décharge normale. Si le courant est encore augmenté, on
passe dans le régime de décharge anormale où la tension augmente avec
l’augmentation du courant. Finalement, une nouvelle augmentation du courant
conduit au passage à l’arc caractérisé par une faible tension et des courants élevés.
Techniques expérimentales
42
Figure 16 : Courant de décharge (A) en fonction de la tension (V) appliquée entre les électrodes [89].
La figure 17 montre les différentes zones d’une décharge luminescente : l’espace cathodique, la lueur négative, l’espace sombre de Faraday, la colonne positive et la zone anodique.
L’espace cathodique est une zone de la décharge où se trouve la plus grande chute de potentiel (i.e. : le plus grand champ électrique), les électrons vont subir une grande accélération vers l’anode et les ions positifs vers la cathode. Les ions vont venir bombarder la cathode et vont émettre des électrons secondaires.
La lueur négative est la zone la plus lumineuse du plasma : les électrons accélérés dans l’espace cathodique entrent en collision avec les molécules et les atomes du gaz et provoquent des excitations et des ionisations. En se relaxant, les atomes et les molécules excitées émettent un rayonnement.
L’espace sombre de Fraraday est une zone où il n’y a pas de rayonnement car les
électrons ont perdu leur énergie suite aux collisions inélastiques qu’ils ont subi dans
Techniques expérimentales
43
la lueur négative. Ils ne sont plus capables d’ioniser les molécules de gaz présentes dans cette région. L’absence de cation dans cette zone à pour conséquence un excès de charges négatives, ce qui empêche les électrons d’être accélérés par l’anode.
La colonne positive : c’est dans cette zone que se trouve le plasma, la densité de charge positive est égale à la densité de charge négative.
La zone anodique : dans une décharge luminescente, l’anode n’émet aucune particule,
elle se contente de collecter les électrons.
Techniques expérimentales
44
Figure 17 : Schéma des différentes zones d’une décharge luminescente [90].
Techniques expérimentales
45