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Approches archéologiques et historiques des fortifications précoloniales à l'Ouest-Cameroun et au Sénégal oriental

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Approches archéologiques et historiques des fortifications précoloniales à l'Ouest-Cameroun et au Sénégal oriental

AYMERIC NSANGOU, Jacques De Limbepe

AYMERIC NSANGOU, Jacques De Limbepe. Approches archéologiques et historiques des fortifications précoloniales à l'Ouest-Cameroun et au Sénégal oriental. Société suisse d'études africaines : Newsletter , 2017, vol. 2017/1, p. 37-41

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:97445

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APPROCHES ARCHÉOLOGIQUES ET HISTORIQUES DES FOR- TIFICATIONS PRÉCOLONIALES À L’OUEST-CAMEROUN ET AU SÉNÉGAL ORIENTAL

JACQUES AYMERIC

La fortification est l’acte qui vise à renforcer la sécurité sur une frontière par la mise en place de structures défensives immobiles. Les fortifications, quant à elles, désignent l’ensemble de ces structures. Dans le monde, les fortifications ont revêtu des formes diverses, car elles constituaient des réponses spécifiques à des problèmes précis aux- quels les communautés humaines faisaient face. Afin de mieux appréhender ces diffé- rences, nous menons des recherches archéologiques sur les fortifications à différentes échelles géographiques et contextuelles, tout en restant dans une même séquence chronologique qui s’étend du 16e au 19e siècles. Pour l’Afrique subsaharienne, le choix de cette période se justifie par le fait qu’elle est marquée à son début par l’émergence de nouvelles entités politiques qui, pour la plupart, perdront leur souveraineté à la fin du 19e siècle suite à la colonisation européenne.

1. CAS D’ÉTUDE LOCAL : LES FORTIFICATIONS PRÉCOLONIALES DE FOUMBAN, OUEST-CAMEROUN

De 2011 à 2013, dans le cadre d’un travail de master à l’Université de Yaoundé I, notre première étude a porté sur les fortifications de la ville de Foumban (Ouest-Cameroun).

Cette ville était le centre politique d’un royaume dont la formation s’est probablement achevée au début du 17e siècle (Tardits, 1985: 1266). La mise en place des fortifica- tions dans cette ville a commencé au 18e siècle, sous le règne du roi Mbuombuo, suite aux attaques répétées de la cavalerie Baare Tchamba. En terme de dispositif, cette ville était cernée par des éléments défensifs immobiles constituant en quelque sorte des anneaux de protection, couvrant une superficie d’une centaine de km2. Sur le plan structurel, ces fortifications étaient constituées par des structures creusées (chausse-

trappes et fossés), qui avaient pour fonction essentielle de briser l’élan de la cavalerie des envahisseurs et par une structure construite (muraille).

Les chausse-trappes sont des parallélépipèdes creusés le long du glacis précédant le fossé, mesurant environ 0,5 m de largeur, 2 m de longueur et 2 m de profondeur.

Les fossés sont des lignes de creusement dont la largeur à l’ouverture varie de 5 à 7 m et dont la profondeur varie entre 8 à 13 m (fig. 1). Le fossé principal possède un talus intérieur formant un triangle d’environ 3,5 à 5 m de hauteur sur 4 à 7m de base.

C’est sur cette escarpe qu’était bâtie la muraille qui ceignait la cité. Cette muraille était montée en bauge avec de la boue dégraissée de végétaux (Aymeric 2013 et soumis 2017).

JEUNES CHERCHEURS NACHWUCHS YOUNG SCHOLARS

Figure 1 : Vue d’une portion du fossé défensif de Foumban (Photo Jacques Aymeric)

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Après cette étude localisée, nous nous sommes posé la question de savoir quelles autres techniques pouvaient avoir été utilisées pour établir des structures défensives dans des contextes culturels différents.

2. CAS D’ÉTUDE RÉGIONAL : LES STRUCTURES DÉFENSIVES PRÉCOLONIALES DU SÉNÉGAL ORIENTAL

L’opportunité de répondre à cette question nous a été offerte à travers le programme de recherche « Peuplement humain et paléoenvironement en Afrique – projet Falé- mé » que mène le laboratoire Archéologie et Peuplement de l’Afrique de l’Université de Genève. L’étude des dynamiques techniques et architecturales est l’un des axes de recherche développé au sein de ce programme, dans lequel s’intègre notre thèse de doctorat centrée sur l’étude archéologique et historique des structures défensives du Sénégal oriental. Cette thèse est menée sous la direction du Prof Eric Huysecom et de Dr Anne Mayor.

La zone d’étude se situe de part et d’autre de la rivière Falémé, qui fait partiellement frontière entre le Mali et le Sénégal. Cette vallée relie des zones de végétation aussi diverses que la savane forestière guinéenne au sud et la zone sahélienne au nord.

Durant la période du 16e-19e siècles, les principales entités politiques qui se sont mises en place sur la rive gauche de la Falémé sont : le royaume soninké du Gadiaga, le royaume peul du Boundou, ainsi que les royaumes malinké du Bélédougou, du Siri- mana et du Dantila. L’histoire de ces royaumes est marquée par des tensions politico- religieuses (guerres d’islamisation menées par les peuls, conquête coloniale française) et économiques (lutte pour le contrôle des circuits commerciaux, razzias pour la cap- ture d’esclaves, de denrées alimentaires ou de terres). C’est en réponse à cette insé- curité que plusieurs villages de la région ont contruit des fortifications {tata en langue mandé}, afin de se protéger (Huysecom et al., 2013: 157).

MÉTHODOLOGIE

Nous avons opté pour une approche croisée entre les sources orales, les sources his- toriques et les données archéologiques. Les données orales sont recueillies auprès des populations riveraines des sites et ces informations nous renseignent aussi bien sur l’histoire du peuplement que sur le contexte politique, économique et social de la mise en place des structures défensives. Lors des enquêtes historiques, nous enregis- trons les interviews avec nos interlocuteurs, puis nous les comparons pour recouper l’information ou identifier les points de divergence. Ces données orales forment donc un corpus de sources historiques internes.

Les sources historiques externes sont constituées par les récits de voyage effectués par les explorateurs, les marchands et les militaires européens entre les 16e-19e siècles. Ces textes décrivent pour la plupart ce que ces Européens ont vu dans les villages où ils sont passés ou ce qu’ils ont entendu à propos des populations établies dans ces contrées. Certains des textes que nous exploitons, à l’instar des récits d’Anne Raffenel (1846), d’Ancelle (1886), et de Rançon (1894), nous livrent des indications intéressantes sur l’existence des fortifications dans les villages où ils ont séjourné. En décrivant les relations qu’entretiennent les villages et les royaumes entre eux, ces textes nous dressent un tableau du contexte politique, économique et social qui pré- valait durant cette période. Ces textes historiques sont analysés et comparés entre eux, puis croisés avec les données orales.

Les données archéologiques sont tout d’abord issues de travaux des rares archéolo- gues qui nous ont précédés dans la zone. Ibrahima Thiaw (1999) et Cameron Gokee (2012) ont ainsi mentionné l’existence de sites défensifs dans leurs thèses respectives.

Toutefois, c’est dans le cadre du présent programme de recherche que l’essentiel des données est généré. Les enquêtes ethnohistoriques réalisées par Anne Mayor entre 2012 et 2015 (Huysecom et al. 2013, 2014, 2015, et comm. pers.), ont notamment permis la reconnaissance de plusieurs sites fortifiés.

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PREMIERS RÉSULTATS ET PERSPECTIVES

Dans ce cadre, nous avons effectué deux missions de terrain (janvier-mars 2016 et décembre 2016 à mars 2017). Au cours de ces missions, nous avons procédé à la reconnaissance des sites déjà connus par les travaux ci-dessus cités. Nous avons éga- lement identifié de nouveaux sites au cours des prospections et nous avons réalisé des fouilles archéologiques sur quatre de ces sites.

Ces prospections nous ont permis d’identifier plusieurs sites dont les vestiges sont visibles en surface : Boulebane, Darra, Demboube, Hamdallaye, Koba, Koussan, Samba Yaye et Som Som (fig. 2). Les vestiges des structures se présentent généralement sous la forme d’éboulis de pierre. Le tata de Dalafi a complètement disparu mais a laissé une empreinte sur le paysage sous la forme d’un espace découvert sans végétation au milieu de la fôret. Dans d’autres villages tels qu’Alinguel, Toumboura, Goulounga et Farabana, les traditions orales et les sources écrites mentionnent l’existence des structures défensives, mais celle-ci ont totalement disparu sans laisser de trace ni d’empreinte sur le paysage.

Au cours de la deuxième campagne, nous avons effectué quatre fouilles archéolo- giques à Samba Yaye (fig. 3), Dalafi, Koussan et Koba. Ces fouilles nous ont notamment permis de mettre à jour les fondations des murs écroulés et d’identifier plusieurs types de maçonnerie de pierre et de mortier en terre. Lors de ces deux missions de terrain, nous avons essentiellement examiné les structures défensives du royaume peul du Boundou. Pour les prochaines missions, nous irons plus au sud, afin d’explorer les provinces historiques malinké du Bélédougou, du Sirimana et du Dantila.

En sus des résultats préliminaires mentionnés, nous avons pu constater que les forti- fications précoloniales de la vallée de la Falémé sont dans un état de destruction très

avancé. Il nous semble qu’aucune mesure de conservation n’ait été mise en œuvre ni par les populations riveraines ni par les pouvoirs publics. Partant de ce constat, nous nous interrogeons sur la valeur patrimoniale de ces sites, qui sont des témoins indé- niables de l’histoire mouvementée des populations de cette région, et sur les mesures qui pourraient être prises pour leur conservation et leur mise en valeur.

Jacques Aymeric est doctorant au laboratoire Archéologie et Peuplement de l’Afrique, Unité d’Anthropologie, Département de Génétique et Evolution, à l’Université de Ge- nève. Contact : jacques.aymeric@unige.ch.

Figure 2 : Localisation des sites dans la zone d’étude

Figure 3 : Soubassement et assises de la muraille de Samba Yaye (photo Jacques Aymeric).

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BIBLIOGRAPHIE

• Ancelle, J., 1886, Les explorations au Sénégal et dans les contrées voisines depuis l’antiquité jusqu'à nos jours. Maisonneuve frères et Ch. Leclerc, Paris.

• Aymeric, J., 2013, Architecture militaire traditionnelle chez les Pa’Mom : une étude anthropologique et archéologique. Mémoire de Master, Université de Yaoundé I.

• Aymeric, J., 2017, Pitfalls, ditches and a wall: territorial defense strategies of the Bamun of Foumban (16th-19th centuries). Soumis à Azania Archaeological Research in Africa.

• Gokee, C. D., 2016, Assembling the village in medieval Bambuk : an archaeology of interaction at Diouboye, Senegal. Equinox, Sheffield.

• Huysecom, E.; Jeanbourquin, C.; Mayor, A.; Chevrier, B.; Loukou, S.; Canetti, M.; Diallo M.; Bocoum H.; Gueye N. S.; Hajdas, I.; Lespez, L.; Rasse, M.; 2013:

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• Huysecom, E.; Loukou, S.; Mayor, A.; Jeanbourquin, C.; Canetti, M.; Chaix, L.; Sa- nogo, K.; Garnier, A.; Chevrier, B.; Hajdas, I.; Balouche, A.; Lespez, L.; Pollarolo, L.;

Bocoum, H.; Camara, A.; Gueye, N.S.; Gardiola-Figols, M.; Sankaré, F.; Timpoko- Kiénon-Kaboré, H.; Rasse, M.; Guindo, N.; Tribolo, C.; 2015: La construction du

cadre chronologique et paléoenvironnement de la moyenne vallée de la Falémé (Sénégal oriental) : les résultats de la 17ème année d’activité du programme inter- national « Peuplement humain et paléoenvironnement en Afrique de l’Ouest ».

In : Jahresbericht SLSA 2014. Zurich et Vaduz : Fondation Suisse-Liechtenstein pour les recherches archéologiques à l’étranger, pp. 99-109.

• Raffenel, A. J.-B., 1846, Voyage dans l’Afrique Occidentale. Arthus Bertrand, Paris.

• Rançon, A., 1894, Dans la Haute Gambie : voyage d’exploration scientifique, 1891-1892. Société d’éditions scientifiques, Paris.

• Tardits, C., 1985, L’espace, indicateur historique, révélateur structural : l’exemple Bamoum (Cameroun). In : Annales ESC, novembre–décembre 1985, n°6, pp.1261-1287.

• Thiaw, I., 2012, Atlantic impacts on inland Senegambia : French penetration and African initiatives in eighteenth-and nineteenth-century Gajaaga and Bundu (Upper Senegal River). In Cameron M. & Ogundiran Akinwumi (eds), Power and landscape in Atlantic West Africa : archaeological perspectives. Cambridge Uni- versity Press (downloaded from Cambridge Books Online).

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