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AUX ÉDITIONS MAGNARD dans la collection «Fantasia»

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Academic year: 2022

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LES S T I P - S T U P

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A U X É D I T I O N S M A G N A R D dans la collection « Fantasia »

DE 3 A 7 ANS

Il était mille et une fois - R. Guillot.

Chocoline et le printemps - M.-L. Vert.

En questionnant la rivière Qui - G. Saint- Cérère.

Un grillon dans la lune - M.-L .Vert.

Les voyageurs du printemps - P. Lavergne.

DE 8 A 11 ANS

La petite île de Monsieur Touminou.

S. Pulicani.

Chat sauvage et sapin bleu - Chaine et Vœltzel. (Prix F a n t a s i a 1959).

Mylord et le saltimbanque - Elsie.

(Prix F a n t a s i a 1955).

Farfelune - L. Aldebert.

Les patins de cristal - A. Baruc.

Sauvageonne des grèves - S. Pasquet.

Quatre pattes dans l'Aventure - C. Cénac.

(Prix Fantasia 1961).

Le clown et la rose - M. Joignet.

Le bal des étoiles - M.-L. Vert.

L'hélicoptère du petit Duc - Y. Meynier.

Clarinet le Patagon - L. Bourliaguet.

DE 12 A 15 ANS

Contes des mille et une bêtes - R. Guillot.

Pouk et ses loup-garous - L. Bourliaguet.

(Prix Enfance du Monde 1956).

Les compagnons de l'arc - L. Bourliaguet.

(Prix F a n t a s i a 1958).

Au vent de fortune - M. Massane.

(Prix F a n t a s i a 1956).

Kpo la panthère - R. Guillot.

Le maître des éléphants - R. Guillot.

(Prix Fantasia 1960).

Castandour - L. Bourliaguet.

X.P. 15 en feu - P. Devaux.

Taro-San - M.-A. de Miollis.

Marielle - M. Déchaud-Pérouze.

Trappeurs des neiges - Elsie.

Douze marches dans la falaise - S. Arnaud- Valence.

Pêcheurs de Lumières - R. Brassy.

La Claire et le Hautain - G. Hellequin.

Le Cluseau du Bois-Brun - L. Bourliaguet.

Voyage au pays de la pierre ancienne J.-C. Froelich (Prix Fantasia 1963).

La Citadelle de l'espoir - C. Cénac.

La Grande Terre des Eléphants - R. Guillot.

(Demandez la liste complète de nos ouvrages à votre librairie)

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COLLECTION FANTASIA

EDDY BARNAUD

L E S S T I P - S T U P

Illustrations de François Lesourt

M A G N A R d

122, bd Saint-Germain, Paris 6°

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© 1963, Editions MAGNARD, PARIS

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CHAPITRE PREMIER

bonhomme que vous voyez là, c'est moi, Adrien Barboleux. Peut-être un jour vous montrerai-je l'autre côté de ma personne et vous verrez alors si ma figure vous plaît. Mais aujourd'hui, c'est exprès que je me suis fait photographier comme cela. Pour vous montrer que je ne compte pas dans cette histoire. Non, il s'agit d'autre chose : il s'agit des Stip-Stup.

Tenez, rien qu'en disant ce nom cocasse et gentil : les Stip-Stup, j'en ris tout seul de contentement. Mais com- mençons par le commencement.

Il faut vous dire, tout d'abord, que j'aime énormément les voyages. C'est pour cela que j'ai choisi un métier qui me fait tant voyager : je suis photographe-de-cartes-postales.

C'est moi qui fais ces cartes postales que vous voyez à la devanture des boutiques sur un tourniquet qu'on tourne et retourne et qui grince. Les mêmes vues reviennent vingt fois ; et l'on a tout son temps pour choisir les plus belles en noir ou en couleur. Oui, je suis fier d'avoir fait tant de cartes postales. Pas toutes, évidemment, mais un bon petit lot quand même.

Je voyageais donc un jour sur ma petite moto-bécane

« teuf-teuf, teuf-teuf », à la recherche de jolis paysages,

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mon appareil à photos sur le porte-bagages, lorsque je vins à traverser une petite ville nommée Brigammal.

Il y a beaucoup de petites villes comme celle-là en France.

Vous savez bien : une église, une mairie, une place avec une fontaine au milieu, une grand-rue. Cette grand-rue, à Brigammal, était particulièrement longue. Elle n'en finis- sait plus.

J'avais décidé de continuer plus loin, car ce gros village me semblait banal. Déjà, les maisons se faisaient plus espacées et j'apercevais la campagne entre les toits. J'allais dire adieu à Brigammal sans m'en soucier davantage, quand l'avant-dernière maison sur la gauche attira tout à coup mon regard.

— Ça ! me dis-je en m'arrêtant pile, ça, mais tu deviens fou ?

J'avais, en effet, devant moi une maison extraordinaire.

Je ne peux pas vous la décrire, mais j'en pris une photo.

Le jardin, lui, était plein d'herbe et de fleurs. Il se pro- longeait par-derrière. A droite, un mur haut et mince, coiffé de tessons de verre, séparait ce jardin de celui d'à côté.

Là, sur un terrain sec et rempli de cailloux, se trouvait une autre maison, la dernière du village. Une étrange maison, elle aussi, quoique bien différente : longue, toute noire, avec neuf cheminées sur le toit et neuf fenêtres en enfilade.

Ces deux maisons, côte à côte, m'intriguaient tellement que je posai ma bécane contre un arbre et me mis à faire les cent pas de long en large dans l'espoir de voir sortir quelqu'un de l'une ou de l'autre.

Bientôt apparut une vieille femme qui clopinait, un sac

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vide à la main. Elle venait du village. Je lui demandai, ôtant mon béret : « Pardon, Madame, pouvez-vous me dire à qui sont ces maisons ? »

La vieille se mit à rire : « Vous n'êtes pas d'ici, Monsieur, hein ? Ça se voit ! Celle-là (montrant la première) est celle des Stip-Stup. » Elle se mit à glousser, à pouffer, à s'étran- gler de rire. De son discours embrouillé, je n'appris pas grand-chose, sinon que c'étaient de braves gens « rigolos » qui habitaient là, et que je n'avais qu'à aller leur faire une visite. « Mais si, mais si, disait-elle, y z'aiment qu'on aille les voir... allez-y ! » Elle s'éloignait : « Faut chercher l'herbe pour mes lapins ! » cria-t-elle encore en se retour- nant, et elle ajouta : « Tombez pas sur un jour de concours, au moins ! »

J'avais oublié de la questionner sur la seconde maison.

Et puis, que voulait-elle dire par : jour de concours P Et pourquoi avait-elle ri de si bon cœur ?

Décidément, ma curiosité était éveillée. « Voyons, me dis-je, il faut trouver le moyen d'entrer voir ces Stip-Stup.

Je veux savoir si le dedans de la maison est aussi drôle que le dehors, et comment sont ces gens. »

Il me vint une idée. J'ouvris la grille et je frappai à la porte d'entrée. Personne ne vint ouvrir. « Passons par le jardin », pensai-je.

Je pris une petite allée sur le côté de la maison et trou- vai une pelouse ombragée de grands arbres. Des person- nes étaient assises en rond sur l'herbe, écossant des petits pois.

J'étais tout à coup honteux de ma sotte curiosité, mais il n'y avait plus à reculer. Une dame maigre et gracieuse, en robe rose, se leva.

— Madame, lui dis-je un peu confus, auriez-vous la bonté de me donner un verre d'eau P je voyage et j'ai soif.

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Elle sourit aimablement et me fit signe de la suivre.

Les autres s'étaient levés et me regardaient en silence. Je dis encore : « Excusez-moi de vous avoir dérangés pour un verre d'eau, M'sieurs dames ! » Ils s'inclinèrent sans un mot.

Elle me fit entrer dans une cuisine fraîche, posa un verre d'eau sur la table, y versa un peu de sirop de mûres et me le tendit avec une petite révérence comique. Tout en buvant, je regardais autour de moi. Jamais, non jamais, je n'avais vu une cuisine aussi étonnante ! Les murs étaient peints de vert, de rouge et de blanc, et décorés d'ustensiles bizarres pendus à des clous. D'autres objets ménagers sur des étagères auraient mérité d'être examinés soigneusement un à un. Des casseroles dont le fond s'or- nait de figures ; des louches qui louchaient ; des passoires sans trous ; des moulins ornés de grelots ; sur une cuisi- nière basse, une énorme lessiveuse bouillante. « C'est la lessive de la famille », pensai-je. Mais le couvercle de cette lessiveuse s'étant soulevé un instant par l'effet de la vapeur, une bonne odeur de soupe en sortit. « Cinquante litres de soupe ? Bigre ! les Stip-Stup doivent avoir un solide appé- tit. »

Quand j'eus fini de boire, je tentais encore de faire parler la dame.

— Délicieux ce sirop. Cela fait du bien !

— Vous avez un joli jardin, Madame.

— Il fait beau, n'est-ce pas ?

Je me sentais de plus en plus bête. La dame écoutait avec bienveillance, souriait, faisait de petites mines... mais ne répondait toujours pas. Muette, sans doute !

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Toute la famille se leva de nouveau à mon passage.

Sourires aimables, saluts silencieux. Je bredouillais :

« Au revoir, M'sieurs dames, merci. » Et je me retrouvai dans la rue, assez mécontent. Tous muets, alors ? ou quoi ? Il était déjà tard. Après tout, pourquoi ne pas m'arrêter dans cette petite ville pour la nuit. Il devait y avoir un hôtel, j'y trouverais à dîner et à coucher, et surtout des renseignements sur ces gens singuliers.

Il y avait un hôtel, en effet, où je passai une charmante soirée. Et j'appris sur les Stip-Stup tant de détails et tant d'histoires, qu'il me semblait déjà les connaître en m'éveil- lant le lendemain.

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CHAPITRE II

E soleil brillait gaiement quand M. Stip- Stup ouvrit sa fenêtre d'un geste large, en rabattant les contrevents qui claquè- rent. Il fit un salut au beau jour qui commençait, puis il traversa sa cham- bre, pénétra sur un palier sombre et cria joyeusement :

— Ho ! Stip-Stupiens, debout !

On entendit remuer, il y eut des bruits de voix. Et bientôt surgissaient d'un peu partout les membres de la famille.

Ils se demandèrent gentiment des nouvelles les uns des autres : oncle Agénor avait-il bien dormi dans sa petite cabane sur le toit, et la tante n'avait-elle pas eu peur, là- haut ? « Pas du tout, répondaient-ils, elle est épatante, vous savez, notre villa d'été en altitude. » — Papa n'avait il pas eu trop chaud avec ses dix couvertures ? (M. Stip- Stup était frileux.) — Grand-mère aimait-elle toujours le va-et-vient de son lit-berceur à moteur P Autrement, on

pourrait inventer autre chose...

Après cet échange de politesses, ils descendirent à la salle à manger où M Stip-Stup avait déjà préparé le déjeu- ner. Curieux coup d'œil que ce déjeuner : chacun, dans cette famille originale, mettait son point d'honneur à fabri- quer lui-même ses affaires. Les bols étaient fort divers : certains en bois sculpté, d'autres en terre cuite. L'un en coquille de tortue, l'autre en noix de coco. Les ronds de serviettes étaient du même genre. La nappe, couverte d'une

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broderie compliquée, rappelait l'art arabe... Les dessous de plat, le sucrier semblaient avoir été confectionnés par des Robinsons. Chacun avait sculpté sa propre cuiller (quoi qu'il y en eût de fort belles en argent dans le buffet).

Au mur, les tableaux et leurs cadres avaient aussi été faits par la famille. Aussi, quelle diversité de styles ! depuis le gros dessin maladroit à la solide peinture à l'huile en passant par le pastel de la tante Ida, œuvre sentimentale, représentant un « Après la tempête » avec soleil couchant sur des épaves. Et que dire des meubles P Certains, comme disait M. Stip-Stup en riant, étaient du plus pur style

« Louis-caisse ». Bref, toute la salle à manger démontrait clairement que ces gens voulaient rester libres de faire ce qui leur plaisait et se moquaient du qu'en-dira-t-on.

Ils buvaient leur café.

— Ah ! dit M Stip-Stup, une bonne dame tranquille avec un petit col blanc, ah ! ça fait plaisir de pouvoir enfin parler.

M. STIP-STUP. — Ce pauvre type, hier, avec son verre d'eau, il n'a dû rien y comprendre, il me faisait pitié.

ONCLE AGÉNOR. — On ne pouvait tout de même pas rompre le jour de silence pour lui.

M STIP-STHP. — C'est inouï, ce que cela fait du bien, le jour de silence. On se sent tout reposé après.

M. STIP-STUP. — Ce type, il était tout drôle, avec sa manière de dire «M'sieurs dames»... Appelons-le « M sieurs dames !... »

TANTE IDA. — Non, mais « verre d'eau », plutôt ! On écrirait « Verdo ».

M. STIP-STUP. — Alors ? C'est « M'sieurs dames » ou c'est « Verdo » ? Aux votes, citoyens !

On vota pour le surnom à donner au type et ce fut

« M'sieurs dames » qui l'emporta.

(Hélas ! c'est ainsi que je vins à avoir ce sobriquet ridi-

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cule qui m'est resté longtemps. Comme on devrait faire attention à la manière dont on parle !)

Toute la famille se mit à rire. Ils avaient la manie de donner des noms à tout le monde. Ces noms finissaient par être adoptés par leurs amis et souvent par toute la ville, malgré les protestations des victimes.

La Tante Ida leva son petit doigt pour montrer qu'elle allait parler :

N'oublions pas, écoutez bien

Qu'à dix heures arrivent les chiens.

Sur cette parole, les Stip-Stup plièrent leur serviette et chacun partit vers ses occupations.

Pendant ce temps, à l'hôtel de Brigammal, j'achevais de déjeuner, moi aussi, après une bonne nuit de repos.

Tout en déjeunant, je me parlais à moi-même. « Bon, me disais-je, tu vas aller voir ces Stip-Stup. Il paraît que ça vaut la peine. Des originaux finis. Ils sont neuf : papa, maman, trois enfants, deux grands-parents, un oncle et une tante.

M. Stip-Stup possède une petite fabrique de pantoufles qui se trouve non loin de la maison. Six ans qu'ils sont à Brigammal ; en arrivant, ont acheté une vieille demeure abandonnée. L'ont rebâtie eux-mêmes, selon leur fantaisie.

Paraît qu'ils sont impayables ! Toujours prêts à se lancer dans des aventures saugrenues. Au début, les gendarmes venaient en courant voir ce qui se passait et tombaient au milieu d 'un fou-rire. Maintenant, ils ne se dérangent plus.

On dit que l'oncle est monté une fois au faîte du clocher, par l 'extérieur. Que M. Stip-Stup a descendu le cours du ruisseau dans un baquet. Que la grand-mère s'était fait une

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hutte dans les bois pour vivre en ermite... et mille autres racontars peu croyables.

Les Stip-Stup disent : « La joie de vivre, c'est de tou- jours espérer du nouveau », et comme il ne se passe rien de neuf à Brigammal, il faut bien l'inventer, ce « nouveau ».

Ils ne sont pas muets du tout. Mais j'étais tombé, hier, sur un jour de silence. C'est un jour, de temps en temps, où les Stip-Stup ne parlent pas ; rien, pas un mot, des gestes seulement. « C'est amusant et ça repose », disent-ils.

On m'a aussi parlé des fameux jours de concours. Il paraît que M. Stip-Stup organise parfois un concours pour sa famille, avec un premier prix et même un second. Un concours de quoi ? il faut que je voie cela.

C'est lui, M. Stip-Stup, avec son air naïf, ses yeux ronds et sa barbiche en pointe, qui entraîne les autres dans les aventures les plus extravagantes.

La tante Ida (celle qui m'a donné le verre d'eau) est aussi une personne inhabituelle. Elle fait beaucoup de ma- nières et parle en vers. Il y a toujours foule à la crèmerie pour l'entendre dire d'une voix suave :

Monsieur, donnez-moi, s'il vous plaît Des œufs, du beurre et puis mon lait.

L'oncle Agénor, lui, a été acrobate quand il était petit.

Ensuite gendarme, et maintenant il aide au ménage. Mais parfois il s'ennuie du cirque. Il fait alors de la voltige sur le toit et grimpe aux arbres comme un singe.

Le grand-père a l'air absolument terrible avec sa barbe hirsute. Il est l'inventeur d'une sorte de pince, appelée

« pince-teck », dont personne n'a encore compris l'usage, mais dont il menace les enfants quand ils ne sont pas sages.

La grand-mère... mais, après tout, ce n'est pas la peine de faire toutes ces réflexions ; je n'ai qu'à aller moi-même voir si c'est vrai.

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CHAPITRE III

OUR ne pas surprendre les Stip-Stup de trop bonne heure, j'avais d'abord fait un tour en ville. Cette ville, maintenant que je la regardais mieux, avait l'air plus gai que les villes ordinaires. Cela se voyait à des tas de petites choses. Plusieurs mai- sons avaient les volets peints de couleurs vives. Dans les vitrines des magasins s'étalaient partout de superbes pantoufles rouges : la couleur préférée de M. Stip-Stup. Je rencontrais aussi, à certains coins de rues, des sortes de pompes comme celles qui distribuent de l'essence aux autos. Mais celles-là ne distribuaient pas de l'essence. Elles versaient gratuitement de la limonade à tous les assoiffés ; c'est ce que j'appris en questionnant les passants. Seulement voilà : la limonade ne coulait pas régulièrement ; les pompes étaient souvent à sec. Comme les Brigammaliens ne savaient jamais quel jour il prenait fantaisie à M. Stip-Stup d'alimenter ses machines, ils avaient payé un jeune garçon pour les essayer chaque matin. Si par hasard il en jaillissait de la limonade, il sonnait de la trompette et c'était une ruée générale vers les distributeurs, verre et carafe en mains. Ce jour-là, on se régalait dans tout Brigammal.

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Il me semblait aussi que les gens avaient l'air moins préoccupés que dans les autres villes. Plus attentifs et aima- bles. Un petit brin moqueurs.

Au fur et à mesure que je me rapprochais, ces signes se multipliaient. Etait-ce le voisinage des Stip-Stup ? Il y avait de la gaieté dans l'air.

Une chose commençait à m'inquiéter. Des chiens, de plus en plus nombreux, se joignaient à moi. J'en voyais de gros, de maigres, de bien soignés et de négligés. Bientôt, je fus ridiculement encadré de chiens. J'en comptai vingt-cinq, puis trente-quatre. Mais il y en avait probable- ment davantage, car ils gambadaient et jouaient entre eux à se mordiller, et faussaient mes calculs. Ils ne me regardaient pas, je pris donc le parti de marcher avec eux.

J'étais assez ennuyé de ce cortège, d'autant plus que je surprenais les rires de ceux qui me voyaient passer tel un berger au milieu de son troupeau.

Enfin, je reconnus la maison des Stip-Stup. J'obliquai vers la grille, bien content de laisser ces idiots de chiens continuer leur chemin. Mais il faut croire qu'ils avaient la même idée que moi, car ils s'arrêtèrent aussi. L'un d'eux, un gros aux yeux jaunes, se dressa sur ses pattes et fit entendre un énorme aboiement. Les autres chiens se mirent à aboyer en un concert assourdissant.

— Ah, voilà nos amis !, cria une voix derrière la haie.

D'autres voix parlaient ensemble. « Papa, ce sont les chiens.

— Attends, ça va être prêt ! — Je peux ouvrir, dis ? — Eh mais, papa, il y a aussi un monsieur... je crois que c'est M'sieurs dames. — Un monsieur avec les chiens ? ha ! ha !... »

M Stip-Stup apparut et vint nous ouvrir. Les chiens

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se ruèrent vers le jardin arrière. Moi, je restais là, embar- rassé.

— Madame, excusez-moi, je suis déjà venu hier.

— Mais oui, je vous reconnais, vous êtes M'sieurs da...

heu... je veux dire, le monsieur au verre d'eau.

— C'est cela, Madame. Je viens pour... enfin... je suis photographe et je voulais vous demander la permission...

Elle dit simplement : « Venez voir nos invités, ça vaut le coup d'œil. » La pelouse était pleine de chiens. Tous avaient la tête baissée et avalaient, dans des baquets, une soupe qui sentait bon. La soupe que j'avais vue cuire dans la lessiveuse.

M. Stip-Stup se frottait les mains de plaisir. « Ces braves chiens ! Tous les jeudis nous leur offrons un bon dîner.

Certains viennent de loin. Ce pauvre maigre, là, tenez, ne doit pas faire beaucoup d'autres repas. Si vous saviez comme ils connaissent bien le jeudi. Ils ne se trompent pas souvent. »

Les autres membres de la famille étaient là, s'affairant à empêcher les disputes et donnant leur part aux chiens les plus petits et les plus faibles.

Ils s'excusèrent du jour de silence et se rattrapèrent en bavardant à qui mieux mieux. Ensuite, sur ma demande, ils posèrent pour leur photo avec beaucoup de complaisance et j'ai le plaisir de dire qu'elle fut réussie (I).

L'objet qui se trouve en avant se nomme « la Bitifol », et j'aurai l'occasion d'en reparler.

Après la séance de photo, ils me montrèrent leur maison abracadabrante. Je visitai aussi « l'usine » où trois vieux ouvriers confectionnaient des pantoufles rouges en sifflo-

(1) Voir la couverture de ce livre.

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IMPRIMERIE DES EDITIONS M A G N A R D N° I m p r i m e u r : 216

N° E d i t e u r : 1704 D é p ô t légal : 2e t r i m e s t r e 1963

(23)

Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement

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