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L’Union européenne face à la diarrhée virale épidémique des porcs américains

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1090 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 14 mai 2014

actualité, info

L’Union européenne face à la diarrhée virale épidémique des porcs américains

C’est une affaire sanitaire et économique.

C’est donc une affaire éminemment politi­

que. Elle est aussi internationale et donc diplomatique. Le hasard veut qu’elle sur­

vienne à la veille de ce grand rendez­vous démocratique que sont les élections pour le renouvellement des femmes et des hommes qui auront droit de siéger au Parlement de l’Union européenne.

Au départ, l’information devait paraître au Journal Officiel de la République française daté du 3 mai 2014 : la France allait interdire les importations de porcs vivants et de l’ensemble des produits à base de porc en provenance des Etats­Unis, du Canada, du Mexique et du Japon. C’était là une mesure extrême pour se protéger contre le virus de la diarrhée épidémique porcine (DEP – ou PED pour Porcine Epidemic Diarrhea en an­

glais). Les médias européens d’information générale n’en ont encore que peu parlé mais cette maladie a déjà tué plus de sept mil­

lions de porcelets aux Etats­Unis où le prix de la viande de porc atteint des records.

«Quand on voit les chiffres, il y a de quoi être inquiet. Il y a peu de maladies qui pro­

voquent une si forte mortalité à une si grande échelle, confiait, début mai, Jean­Luc Angot, directeur général adjoint de la Direction générale de l’alimentation (DGAL) et chef des services vétérinaires français. Si la diar­

rhée épidémique porcine apparaissait dans des régions comme la Bretagne, qui con­

centre l’essentiel de la production porcine, cela serait dramatique.»

L’embargo annoncé visait les porcs vivants et le sperme de porc mais aussi tous les «sous­

produits» à base de viande de porc comme l’alimentation animale. Les plasmas conta­

minants des porcs adultes infectés peuvent en effet être incorporés dans l’alimentation animale pour porcins, et transmettre ainsi le virus aux élevages intensifs. Cette même alimentation animale peut concerner les ani­

maux domestiques via le marché florissant des pet foods.

S’intéresser à ce sujet, c’était découvrir que la Chine et le Japon avaient déjà imposé des restrictions aux importations de porc amé­

ricain. La France était alors le seul pays de l’Union européenne à annoncer un embar­

go. Paris avait déjà proposé l’adoption d’un embargo européen en avril. Etrangement (compte tenu de l’intérêt de grands produc­

teurs intensifs de porcs dont les Pays­Bas, le Danemark ou l’Allemagne), la Commission européenne avait refusé de suivre Paris.

Comme dans le cas de la vache folle il y a près de vingt ans, la France choisissait donc, au nom de la sécurité sanitaire, de faire cavalier seul.

Que sait­on exactement de la situation sanitaire ? 1 Fin avril 2013, les premiers cas de DEP ont été détectés aux Etats­Unis.

Cette maladie n’avait encore jamais été

décrite auparavant sur le continent améri­

cain. En septembre dernier, plus de 200 sites porcins ont été infectés, la majorité d’entre eux se trouvant dans les Etats à forte con­

centration porcine : Iowa, Minnesota, Indiana principa lement et récemment en Oklahoma.

Quel ques cas avaient déjà été décrits en Ohio, Colorado, Missouri, Illinois, Michi­

gan, Nebraska et Dakota du Sud.

Le coronavirus responsable de cette ma­

ladie, proche de celui de la gastroentérite transmissible (GET), touche les porcs de tous âges, mais entraîne principalement de la mor talité chez les porcelets avant sevrage (jusqu’à 95%). La maladie est par ailleurs enzootique dans de nombreux pays d’Asie orientale.

Ce virus est classé dans le genre Alpha­

coronavirus avec le virus de la GET et le co­

ronavirus respiratoire porcin. Il s’agit d’un virus à ARN positif enveloppé de 28kb, peu résistant dans le milieu extérieur. Il ne se conserve pas non plus dans les viandes de porc et ne se transmet pas à l’homme. Diffi­

cile à cultiver sur cellules. Il se transmet par voie oro­fécale entre porcs. Des formes plus virulentes ont été décrites en 2011 et 2012 en Chine. Le virus de la DEP est responsable d’une diarrhée profuse, aqueuse, pouvant toucher différentes classes d’âge (animaux adultes, porcelets sous la mère, porcs en croissance). Des vomissements peuvent aussi être observés sur les porcelets ou même les truies.

Le virus incriminé aux Etats­Unis est une souche très virulente conduisant jusqu’à 100% de mortalité chez les porcelets sous la

mère. Les autres catégories d’animaux sont affectées, mais moins sévèrement que les jeunes porcelets. L’épizootie s’est propagée très rapidement à plus de deux cents sites porcins en quelques mois.

«Le virus a été séquencé et présente plus de 99% d’identité avec le génome d’un virus de DEP, isolé en Chine en 2012. Dans la mesure où ces virus mutent rapidement, ceci semble indiquer une introduction sur le territoire américain relativement récente, sou­

ligne le ministère français de l’Agriculture.

L’Europe n’est pas à l’abri d’une introduc­

tion du virus dont les conséquences sont difficiles à évaluer.»

Bluff ou pas, la France décida au dernier moment de revenir sur sa décision d’em­

bargo, expliquant chercher un consensus au sein de l’Union. Mardi 6 mai, Bruxelles point de vue

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1 Des informations précises sur ce sujet sont disponibles à cette adresse du ministère français de l’Agriculture : http://agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/Anses_BE_58_

Web_cle0d1ac3.pdf

dé cidait finalement de «durcir les règles»

concernant l’importation du sang porcin américain et canadien, destiné à l’alimenta­

tion animale sans pour autant modifier les règles sur les importations de porcs. La Commission européenne soulignait que «les règles d’importation concernant les animaux vivants sont déjà très strictes» et que les autorités canadiennes et américaines «ont fait savoir qu’il n’était pas prévu que des porcs vivants soient vendus aux pays de l’Union européenne».

La Commission explique notamment que son «comité d’experts» a estimé nécessaire que les produits sanguins issus du porc pour l’alimentation animale (ceux devant être importés vers l’Union européenne) soient désormais «traités à 80 degrés». «Ce trai­

tement devra être suivi d’une durée de stockage de six semaines à température am­

biante, pour s’assurer, dit la Commission, que les éventuels coronavirus présents ne soient plus virulents». Le comité d’experts se réunira à nouveau en juin, précise la Com­

mission. Le ministre français de l’Agricul­

ture, Stéphane Le Foll, a alors «salué» cette mesure de précaution. «Tout doit être fait pour prévenir l’introduction du coronavi­

rus responsable de cette épidémie dans les élevages français et européens», a indiqué le ministre dans un communiqué.

La question du sang porcin apparaît dé­

sormais cruciale dans cette affaire, ce sang pouvant (lorsque les plasmas sont insuf­

fisamment traités par chauffage) être un vecteur privilégié de transmissions virales.

Aucune information n’a encore été donnée quant aux nouvelles techniques d’inactiva­

tion (par chauffage «à 80 degrés»), pas plus que sur les volumes de plasmas sanguins porcins concernés. Aucune précision non plus sur le spectre des aliments pour ani­

maux concernés. On redécouvre, dans cette affaire, que le sang peut être un vecteur de contamination virale. Et que ce risque est d’autant plus grand qu’il s’inscrit dans le contexte de la mondialisation du commerce des produits agroalimentaires.

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

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