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JOIJRNU. rrrmimtji. Le nouveau Code de procédure. pénale français

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JOIJRNU rrRmiMtJI

HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE LIRE EN CHRONIQUE .JUDICIAIRE :

ÉDITEURS:

Edmond Picard 1882- 1899 Léon Hennebicq

1900- 1940

MAISON FERD. LARCIER, S. A.

La Vie czu Palais : L'éloge de M. René Piret. - Les causes célèbres : Le procès Baudin. - La part du lion : Réveil d'Elpénor. - Bibliographie : L'inter- diction professionnelle en droit pénal. Essai de sys- tématisation, suivi d'une analyse de la législation belge, de Raymond Screvens. - Courrier des revues. - 39, rue dea Minimes

BRUXELLES

Le nouveau

Code de procédure. pénale français

L'objet de cette étude est de donner un a.per- çu des innovations du Code de procédure pénale en vigue•ur en France depuis le 2 mars 19 59.

Cet aperçu, on s'en rendra trop rapidement compte, ne peut être que fragmentaire. On peut s'attendre à une bibliographie importante à pu- blier lillr ces ··très n-ombreux articles de loi, à une jurisprudence qu'explicitera dès leur paru- tion les nouveaux textes. M. Broucbot et ses éminents collaborateurs qui conti- nuent l'œuvre du meilleur de tous les au- teurs spécialisés en procédure pénale, Faustin- Rétie, ont déjà annoncé leur contribution à cet examen.

Le 22 dé.cembre 1958, l'« Officiel» parti- culièrement abondant, publiait une série d' ordon- nances relatives à la justice. Le Statut du ma- gistrat, le Code de procédure civile, l'Organisa- tion judiciaire, le fonctionnement des tribunaux pour enfants, des prud'hommes, ceux de la sêc.u'l"ité sociale et, finalement, le Code de pro- cédure pénale y trouvaient leur nouvelle forme.

La Faculté française et .les écoles de droit compar.é, sont pourvus de matière abondante pendant les années qui vont suivre.

Pour nous,. Belges, l'étude de cette loi com- porte un double enseignement. D'une part la réforme française souligne la valeur de certaines de nos institutions dont la loi française s'est inspirée partiellement, telle la législation sur la détention préventive et le respect du secret de \'instruction, mais d'autre part de courageuses et lfbérales innovations donnent au nouveau Code un aspect de générosité que seuls peuvent avoir les·· précurseurs. Probation, juge de l' exé- cution, réglementation pénitentiaire, qui relèvent d'une pénologie très évoluée, doivent pour d'a•utres pays qui devront bénéficier de l'expé- rience française, faire l'objet d'une toute parti- culière attention.

H

faut souligner a~ssi que des réformes acces- -soires, 1:els que la suppression de la contrainte par corps et la réhabilitation de ·plein droit, marquent toute la réforme d'un sentiment de générosité et lui donnent une allure de gran- deur auxquels les lois répressives ne nous ont guère habitués, le texte sans ambiguïté vise le reclassement social, réadaptation familiale et pro- fessionnelle; aide matérielle, en vue de faciliter les efforts des condamnés.

Historique de la Réforme.

Le 5 juillet 1955, un projet de Code de procédure pénale avait été adopté par la Com- mission d'études législatives. Il avait été éla- boré par M. Besson, procureur général près la Cour de cassation.

Depuis 18 7 9 se trouvait en discussion le principe de la rénovation de la procédure pé- nale. Cette discussion a donné lieu à de nom- brewses études et controverses dont cette com- mission s'est inspirée; si, sur certains points, eHe a pu apporter des vues nouvelles sur les problèmes anciens, elle le doit pour une grande part à la lente maturation d'idées dont les géné- rations précédentes ont été imprégnées.

C'est à dessein que la commission, peut-on lire dans le rappôrt, n'a pas reproduit les dé-

clarations solennelles qui figurent dans les préambules constitutionnels sur la présomption d'innocence des inculpés ou sur l'inviolabilité do 'domi.cile; ·mais elle s'est efforcée de dép as-·

ser les notions contenues dans. ces principes en les introduisant dans le. ®ma~ pragmat:iqu~~

La commission a entendu donner aux . solu- tions qu'elle préconise l'expression sommaire qui convient aux textes législatifs. Elle a ainsi laissé le soin à la Faculté de replacer les solu- tions dans le cadre des considérations générales qui accompagnent l'enseignement des discipli- nes juridiques.

Retenons :

1 o que les pouvoirs respectifs des magistrats du ministère p·ublic et des juridictions d' instruc- tion y sont séparés en des termes dépourvus d'équivoque, leur activité étant placée sur des plans parallèles;

zo

que les membres du parquet reçoivent des moyens d'action adaptés au nouvel état de cho- ses et qui doivent leur permettre de remplir leur mission sociale dans les meiUeures condi- tions;

3° que les juges d'instruction recouvrent leur pleine indépendance;

4° que les magistrats, ~esponsables des actes de la police judiciaire, sont enfin dotés des pou- voirs qui les mettro·nt en mesure d'assurer un contrôl.e réel de cette activité qui jusqu'à main- tenant échappe à leur emprise en dépit des appa- rences;

5o

que dans cet ordre d'idées la chambre d'accusation devant., laquelle la procédure devient contradictoire, se trouve investie de pouvoirs nouveaux marqués d'une profo·nde originalité en ce qui concerne l'exercice de l' actio·n disci- plinaire sur les officiers de police judiciaire.

Vue d'ensemble.

L'a ·V" Rip.nb1îqu"e a .,étendu ceonsidérablem-ent ce ·projet.

Le voici décrit par M. Michelet, garde des sceaux :

Le délai de détention d'un suspect est fixé à vingt-quatre heures. L'assistance d'un médecin est obligatoire si elle est demandée par le pré- venu ou par one tierce personne. La remise en liberté de .}'inculpé ·s'effectue en prindpe au bout de deux mois sauf maintien en détention par décision de la chambre d'accusation. La renon- ciation aux inculpations abusives contre «X~.

évitera l'interrogatoire de témoins bors Ba pré- sence d'un avocat. La présence d'une majorité de juges populaires est exigée pour les condam- nations en cours. d'assises. L'obligation faite au président de cours d'assises d'un comporte- ment impartial, l'individualisation de la peine, ia création de juges chargés de su·ivre l' appli- cation des peines et de «mettre à l'épreuve

»,

le condamné, le régime de détention inspiré des expériences les plus libérales sont également évo- qués .•.

Réformes territoriales.

Celles-ci valent pour la procédure civile com- me pour la procédure pénale.

Notes de législation. - Ecnos.

La nouvelle organisation judiciaire est carac- térisée par le groupement dans les chefs-lieux dé- partementaux et les grandes villes de

l'

adminis- tration de' la justice.

La carte judiciaire de la France a été refaite dans le respect des traditions, celle, par exemple de l'existence des 2 7 Cours d'appel. Des tribu- naux qui traitaient deux cents affaires par an ont été maintenus; ce seront les tribunaux de grande instance; il a été tenu compte de l'ex- pansion de certaines régions. Les sièges de ces tribunaux ont été fixés de façon à être acces- sibles à partir de toutes les localités du dépar- tement et retour dans une même journée.

La justice se prétend ainsi moins coûteuse à la fois pour le justiciable et pour l'Etat. La réforme permettra dans un délai d'un an envi- ron de réduire de trois cents à quatre cents

!l'effectif des magistrats, qui est de l'ordre de quatre mille six cents, et du même cou,p d' amé- liorer la situation personnelle des juges.

C'est auprès de la cour d'appel, ou excep- tionnellement à la grande ville voisine que sié- gera le tribunal de grande instance l'ancien tribunal de première instance, le chef-lieu d'ar- rondissement ne possédant plus que le tribunal d'instance où sont regroupées les anciennes jus- tices de paix cantonales.

Désormais la justice n'est plus rendue qtrt dans les chefs-lieux. La justice est devenue chose urbaine. Les populations rurales ne la trouvent plus à leur portée.

Extension de la compétence du juge de simple police.

Le Code d'instruction criminelle limitait la compétence du tribunal de simple police aux faits pouvant donner lieu soit à. 3 6.000 francs d'amende et au-dessous, soit

i

dix jours d'em- prisonnement et au-dessous.

D'après le nouveau code, la ·catégorie des con- traventions a été sensiblement étendue, puis- qu'elle comprend des infractions punies d'une peine égale ou inférieure à deux mois d'em- prisonnement ou à 20.000 francs d'amende.

Cette nouvelle classe de contraventions est constituée par d'anciens délits qui encombraient souvent les rôles des tribunaux correctionnels.

·Elle vise :

1) les coups et blessures volontaires lorsque l'incapacité de travail n'excède pas huit jours et qu'il n'y a pas eu préméditation, guet-apens ou port d'armes;

2) les outrages à citoyen chargé d'un service public;

3) le port d'insignes, rubans ou rosettes res- semblant à des décorations officielles;

4) les blessures par imprudence n'entraînant pas une incapacité de travail supérieure à trois mois;

A cet égard une circulaire tranche la question de la compéten·ce ·pour le cas de blessures in- volontaires entraînant à la fois une incapacité de travail permanente partielle et une incapacité de travail totale de moins de troi.s mois; ces faits devront être :portés devant le tribunal cor- rectionnel de _grande instance;

5) -les irrégularités dans la tenue des actes de l'état civil;

6) le défaut d'établissement de b preuve de l'état civil d'un enfant;

7) les inhumations clandestines

.{

~

~"-:

(2)

8) l'abattage ou la mutilation d'arbres, la destruction de greffes, la coupe de fourrage ou de grains appartenant à autrui;

9) la destruction sans nécessité d'on animal domestique;

, 1 0) .l'inondation des cbemin6 ou propriétés d autrui.

La détention préventive.

La loi du 20 avril 18 7 4 sur la détention préventive est assurément une des réformes es- sentielles apportées au Code de 1808 par le lé- gislateur belge. Elle a abrogé certaines disposi- tion6 en y substituant deux ordres de garanties :

a) des conditions restrictives de la privation de liberté (interrogatoire, peine d'un minimum 4e gravité, 'résidence, etc.) ;

b) une surveillance obligatoire et périodique, exercée par les juridictions d'instruction.

Ce régime, particulièrement libéral, a donné lieu cependant à des: critiques d'application. Les Barreaux manifestaient assez &Souvent leur mé- contentement devant ce qu'ils appelaient les abus de la détention préventive.

En 19 0 6 déjà, le Journal des Tribunaux ré- clamait le dépôt d'un nouveau projet de loi.

Bien souvent une .circulaire ministérielle rap- pelle aux juges le sens d'application de la loi su·r la détention préventive. Ces derniers manifestent à .ce &Sujet une réelle indépendance vis-à-vis du Grand Juge, et ne s'en cachent pas.

A aucun moment cependant il n'est apparu qu'on se soit trouvé en présence d'une crise réelle des garanties constitutionneH.es; il s'agit, le plus souvent, de cas particulier& douloureux, et pour lesquels le législateur n'a pas cru de- voir intervenir depuis.

C'est à ce régime qui en fait se retrouve chez non&S. depuis plus de 8 0 ans, que l'actuelle loi française aboutit.

En France, sous l'empire du Code d'instruc- tion criminelle la procédure de la chambre des mises en accusation était expéditive, secrète et non contradictoire ( C. 1. C., art. 223). Ni l'inculpé, ni la partie civile ne comparaissaient.

La jurispvudence avait une tendance marquée à laisser les parties en debor&S de la pro·cédure de la chambre des mises en accusation, elle estimait qu'il n'était pas nécessaire de les avertir de la date de transmis:.sion des dossiers criminels ordonnée par application de

r

artiçle 133 du Code d'instruction criminelle ( Crim., 4 mai 1938; B. 128; Rev. sc. crim.), de l'ap- pel interjeté par le ministère public contre une ordonnance de non-lieu ( Crim., 9 juill. 1904, D., 1905, 1, 34 L note Leloir), de la clôture d'un supplément .d'information (1er mai 1940 : B. 28), du renvoi devant la chambre des mises en accusation après règlement des juges ( Crim., 10 mars 1935 : B. 57). La Cour de ca&Ssation admettait en·core que le .procureur général pou- vait faire le rapport prévu par l'article 21 7 du Code d'instruction criminelle avant l'expiration du délai, pourtant très bref, fixé par cet article, sans que les parties soient fondées à s'en plain- dre (Crim., 28 juin 1939; B. 139). Celles-ci pouvaient se trouver, et cela était regrettable.

dans la quasi-impossibilité d'exercer les droits qui leur étaient parcimonieusement concédés.

Elles étaient seulement admises à déposer des mémoires et à obtenir la communication de la procédure. Encore cette communication n'était- elle qu'!! facultative ( Crim., 25 sept. 1919, S., 1921, l, 140).

Une loi du 31 décembre 19 57 portant à ce curieux système .certaine&S améliorations, la pro- cédure présentera depuis un certain caractère contradictoire.

1) La date à laquelle l'affaire sera appelée à l' audien·ce est obligatoirement notifiée par lettre recommandée à chacune des partielS, ainsi qu'à leurs conseils, à la diligence du procureur général, quarante-huit heures au moins ayant l'audience, en matière de déten-

la disposition des parties au greffe où il a été déposé, mais d'où il ne peut être déplacé C. P.

P;, art. 196).

2) Les parties et leurs conseils se sont vu confirmer le droit de produire des mémoires;

il a toujours été admis que ces mémoires peuvent être rédigés sous forme de con-:- clusions auxquelles il doit être répondu à peine de nullité, spécialement lorsque ces mémoires tendent à obtenir un supplément d'information, une mesure d'instruction ou la mise en liberté provisoire du prévenu. De plu.s, les conseils des partielS pouvaient désormais être entendus en leurs observations sommaires, sur kur demande. La chambre d'accusation, si elle le juge utile, ordonnait la comparution personnelle des parties ( C. P. P., art. 19 8) •

Le.s débats se déroulent sans publicité.

Cette loi, toute récente, vient encore d'être modifiée.

Une chambre du conseil, telle qu'elle fon~­

tionne chez nous, n'a pas été créée et le juge d'instruction continue de rendre les ordonnan- ces que prononceraient nos chambres du con- seil, mais respectent les formalités de convoca- tion dans des délai&S déterminés un peu plus longs que les nôtres et avisent le~ parties du pro- noncé des ordonnan·ces juridictionnelles. L' ap- pel des ordonnances des juges d' in&Struction est porté devant une chambre de mise en accusa- tion. dont le fonctionnement sera identique à celui qui est prévu par notre loi du 20 avril

18 7 4 et qui statuera dans la quinzaine.

Remarquons une innovation pratique qui permettrait d'accélérer l'expédition des affaires.

Tous les procè.s-verbaux sont établis en double exemplaire de façon telle qu'un pourvoi contre l'ordonnance du juge d'instruction ne prive pas ce dernier du dossier. La Chambre des mises en accusation jugera sur le double des procès- verbaux que constitue le dossier.

Retenons au sujet de la détention préventive qu'elle doit se subir dans des établissements bien déterminés, sous le contrôle de ceux qui procèdent à l'instruction de l'affaire. Une in- terdiction temporaire de communiquer d'une durée fort longue - 1 0 jours - est prévue.

En aucun cas, l'interdiction de communiquer ne s'applique au conseil de l'inculpé, mais elle s'oppose à ce que le détenu qu'elle concerne soit visité par toute autre personne étrangère à l'administration pénitentiaire ou corresponde avec elle, ce détenu peut écrire tous les jours et sans limitation à toute personne de son choix et recevoir des lettres de toute per.sonne, sous réserve de dispositions contraires ordonnées par le magistrat saisi du dossier de l'information.

II est interdit au personnel de l'administra- tion pénitentiaire et à toute personne qui ap- porte sa collaboration à cette administtation d'agir de façon: directe ou indirecte auprès des détenus pour influer sur leurs moyens de dé- fense et sur le choix de leur défenseur.

Pour l'exercice de ce choix, le tableau des avocats inscrits dans les barreaux des départe- ments et la liste des avoués sont affichés au greffe et tenus à la di.sposition des détenus; les prévenus peuvent communiquer librement avec leur conseil verbalement ou par é·crit, et toutes facilités ·compatibles avec les exigences de la discipline et de la sécurité de la prison leur sont a·ccordées pour l'exercice de leur défense.

Ni l'interdiction de communiquer ni les pu- nition.s de quelque nature qu'elles soient, ne peuvent supprimer ou restreindre cette faculté de libre communication avec le conseil.

Le défenseur régulièrement choisi ou désigné, agissant dans l'exercioce de ses fonctions, et sur présentation d'un permis portant mention de .sa qualité, communique librement avec les pré- venus, en dehors de la présence d'un surveillant, et dam un parloir spécial.

tion préventive, cinq joun au moins avant

1

A moins de dérogations motivées par l'ur- l'audience, en toute autre matière .• Au cour.s de gence, les visites du conseil peuvent avoir lieu ce délai, le dossier de la procédure est mis à 1 tous les jour.s, aux heures fixées par le règlement

intérieur de l'établissement après avis du bâ~

ton nier de l'ordre des avocats.

Les lettres adressées sous pli fermé par le.s prévenus à leur défenseur, ainsi que celles que leur envoie ce dernier, ne sont pas soumises au contrôle, s'il peut être constaté sans équivoque qu'elles sont réellement destinées au défenseur ou proviennent .de lui.

A cet effet, les mentions utile&S doivent être portées sur leur enveloppe pour indiquer la qualité et l'adresse professionnelle de leur . des- tinataire ou de leur expéditeur.

Le juge de l'application de la peine.

Dans l'esprit du législateur de 18 0-6 l' exé~

cution de la peine ne pose plus aucun problème de procédure. En confiant au mini.stère public et à la partie civile, chacun en ce qui le con- cerne (art. 1 6 5, 19 7 et 3 7 6 du Code d' instruc- tion criminelle), la mise en œuvre effective des arrêts et jugements et en « laissant

»

aux juri- dktions qui les ont prononcées, compétence pour trancher les contestations qui peuvent sur- gir à propos de cette exécution, ·le Code de Napoléon estimait avoir fait l'œuvre de ré- pression.

L'exécution d'un jugement pénal, qui pa- raissait si simple en 18 08, devait se révéler bientôt d'une complexité extraordinaire à la suite des transformations du droit pénal et des - mutations que subi.ssent la notion de peine.

Les exigences de la doctrine s'orientaient vers 1' élaboration d'un Code de l'exécution des pei- nes, où l'action des deux braqcbes du pouvoir exécutif, originairement en opposition, devait nécessairement s'adapter à l'une et à l'autre et prendre dans une .série de circonstances ( libé- ration conditionnelle, libération provisoire, pro- bation) l'allure d'une collaboration. Il se trouva alors que dans la recherche des solutions bu~

maines, le juriste, le criminologue et le pénolo- gue en vinrent à remettre en question la déci- sion même du juge et, dès lors, à souhaiter .sa participation active à l'œuvre de redressement, qui est aujourd'hui la fin première de l' exé- cution des peines.

Voici la solution législative nouvelle.

C'est le juge de l'appÜcation des peines qui est chargé, auprès des établissements pénitentiaire&

situés dans le ressort de sa juridiction et dans les- quels sont détenus les condamnés, de suivre l'exécution des peines de ceux-ci.

Il ne peut .se substituer au directeur régional ou au chef de l'établissement, en .ce qui con- cerne l'organisation ou le fonctionnement de celui-ci, mais il doit assurer l'individualisation de l' exé.cution de la sentence judiciaire en orientant et en contrôlant les conditions de son application. A cet effet, il lui appartient de décider les principales modalités du traitement auquel sera .soumis chaque condamné.

Probation.

Le nouveau Code introduit dans le droit fran- çais, le sursis avec mise à l'épreuve.

La circulaire explicative déclare qu'il s'agit d'une institution depuis longtemps préconisée et permettant le traitement des délinquants selon une méthode communément dénommée « pro- bation »', de nature à faciliter considérablement leur reclassement.

Les textes légaux déclarent que le condamné, pbcé sous ce régime est .soumis aux mesures de surveillance et d'assistance en vue d'assurer le contrôle de son comportement et son reclas- sement sodal.

Retenons que l'on prévoit :

« Ces mesures et obligations ne sauraient porter atteinte à la liberté d'opinion de ceux qui y sont soumis ni à leurs convictions religieu- ses ou politiques

»

et plus loin :

« Les mesures d'assistance ont pour objet de &Susciter et de seconder les efforts des con- damnés en vue de l~ur reclassement social et no- tamment de leur réadaptation familiale et pro- fessionnelle.

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,_ Elles s'exercent sous la forrne de l'aide morale et, s'il y a lieu, de l'aide matérielle ap- portée par l'agent de probation et par le co- mité de probation ou, sur leur intervention, par tout" organisme d'assistance ou d'aide sociale :J>.

Les mesures de surveillance sont détermi- nées :

1" Répondre aux convocations du juge de l'application d'es peines ou de l'agent de proba- tion compétent;

2" Recevoir les visites de l'agent de proba- tion et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d' existen.ce;

3° Justifier éventuellement des motifs de ses changements d'emploi ou de résidence;

4"' Prévenir l' a·gent de probation des chan- gements de rési,dence ainsi que toute absence ou de tout déplacement dont la durée excéderait huit jours et prévenir le même agent de son retour;

5" Obtenir l'autorisation préalable du juge de l'appli.cation des peines pour tout déplace- ment à l'étranger.

L'arrêt ou le jugement plaçant le condamné sous le régime de la mise à l'épreuve peut lui imposer spécialement l'observation de l'une ou plusieurs de.s obligations suivantes :

1 o Exercr unee activité professionnelle ou suivre un enseignement ou une formation pro- fessionnelle;

zo

Etablir sa résidence en un lieu déter- miné.

3 ° Se soumettre à des mesures de contrôle de traitement ou de soins, même sous le régime de l'hospitalisation, notamment aux fin'S de désintoxication;

Contribuer aux .charges familiales ou ac- quitter régulièrement les pensions alimentaires.

5., Réparer les dommages causés par l' infrac- tion.

L'arrêt ou le jugement peut également impo-

&er au condamné : ·

1"'

De ne pas conduire certains véhicules dé- terminés:

2" De ne pas fréquenter certains lieux tels que débits de boissons, champs de courses, ca- sinos, maisons de jeu, établissements de danse, etc ... ;

3° De ne pas engager- de pa·ris, notamment dans les organismes de paris mutuels;

4<> De s' a•bstenir de tout excès de boissons akoolisées ;

5° De ne pas fréquenter certains condamnés, notamment les coauteurs ou complices de l'in- fraction;

6" De s'abstenir de rcevoir ou d'héberger à son domicile certaines personnes, notamment la victime de l'infraction s'il s'agit d'un attentat aux mœurs.

Le contrôle de l'exécution de.s mesures et des obligations est effectué par le juge de l' appli- cation des peines. Ce dernier est assisté à cet effet d'agents chargés de la probation qui sont désignés dans les condition.s fixées par arrêté du ministre de la Justice.

Il les réunit en vue de coordonner leur ac- tivité, au sein du comit~ prévu à l'article 7 3 1 qui prend le nom de « Comité de probation ».

La loi française a donc résolu, ·à l'occasion . de l'introduction du nouveau code, un problème que Français et Belges avaient d'ailleurs discuté en commun à l'Union belge de droit pénal il y a quelque.s mois (R. D. P., juin 1957). A l'occasion de cette réunion la doctrine fran- çaise avait été confrontée avec les projets belges en la matière. C'est la première introduction légale sur le continent européen, d'un système de probation.

La détermination des cas dans lesquels la probation peu·t être appliquée et des limita- tions et modalités auxquelles il convient de la soumettre, ressortit normalement de la science pénale: seuls les procédés d'enquête et !es modes à suivre pour opérer la substitution cie la me- sure à la peine, appartiennent au domaine de la procédure.

Le mouvement doctrinal avait pris &on dé- part en Belgique dès 19 3 6, lorsque Paul Cor- nil, sans avoir suscité à ce moment une réac- tion bien vive, y avait consacré une étude dans la Revue de Droit pénal et de Criminologie. Depuis lors le mouvtment doctrinal s' e.st développé et, comme le .constate le procureur général Bekaert, s'arrêtera au s·euil du parlement, où les projets de loi déposés successivement par trois ministres de la Justice rencontreront une adhé.sion unanime et à ce point généreuse, que la réforme pour l'instant semble étouffer de l'excès d'enthousiasme qu'elle provoque (Pro- jet Struye du 18 mai 194 8: - Projet Lagae du 11 novembre 19 52 et projet Lilar, de 1955).

L'exemple français sera contagieux, espérons- le tout au moins et constatons l'esprit prati- que des criminaliste.s français qui ont introduit une loi pénale dans leur Code de procédure (v. Jean Eeckhout, J. T., 16 juin 1957 avait à ce sujet fait aux Belges d'utiles sug- gestions.)

Semi-liberté.

Le détenu peut bénéficier d'un placement à l'extérieur. Il peut être mis à la disppsition d'un employeur sous le contrôle exercé à inter- valles réguliers par des agents de l'administra- tion pénitentiaire.

Dans ce cas, la garde dù ou des détenus in- combe à l'employeur. Celui-·ci doit veiller à ce que le.s condamnés ne quittent à aucun moment le lieu du travail. passent des heures et jours de repos dans les limites de l'entreprise ou dans un périmètre préalablement déterminé et res- pectent les prescriptions réglementaire& relati- ves à la sécurité et à la discipline.

L'employeur doit informer d'urgence le re- présentant qualifié de l'administration péniten- tiaire de tout incident ·con.cernant le détenu, no- tamment de toute absence, quelle qu'en soit la durée.

La décision de placement à l'extérieur des condamnés en vue de leur emploi à des tra- vaux contrôlés par l' admini.stration, l'admis- sion au régime de semi-liberté ou d'autorisa- tion de sortie est prise par le juge de 1' applica- tion des :peines sur la proposition ou après l'avis du chef de l'établissement.

Le.s détenus admis au régime de semi-liberté ou auxquels une permission de sortir a été dé- livrée sont dispensés du port dudit co.stume pendant le temps qu'ils passent à l'extérieur de l'établissement.

Le.s détenus admis au régime de semi-liberté ou bénéficiaires d'une permission de sortir sont autorisés à détenir une somme d'argent leur permettant d'effectuer en dehors de l'établisse- ment les dépenses nécessaires et, notamment, de payer les repas pris à l'extérieur et d'utiliser des moyens de transport.

Les condamnés admis au régime de semi-liberté sont ·placés en dehors de l'établissement péniten- tiaire, sans surveillance continue pendant la journée et dans les conditions .de travail de.s salariés libres; ils travaillent soit pour le compte d'un employeur soit pour leur propre compte;

ils peuvent prendre le repas de midi près du lieu où ils sont employés, mais ils ont l' obli- gation de réintégrer la prison chaque jour, à l'expiration de leur temps de travail et d'y passer les jours fériés ou chômés.

A titre exceptionnel, le régime de Bemi-liherté peut également être accordé pour permettre à d'es condamnés de suivre une formation profes- sionnelle ou pour subir un traitement, tel qu'une cure de désintoxication alcoolique ou de réadaptation fonctionnelle. Dans cette hypothèse, le temps passé en dehors de la prison doit être strictement limité à l'horaire de.s cours ou du traitement.

Pour être admis au régime de semi-liberté, les conditions sont les suivantes

loo Etre condamné à une peine ou plusieurs peines d'emprisonnement et re.ster à subir un temps de détention qui n'excède pas un an.

2'0 Etre condamné à une peine privative de liberté et être détenu dans un établissement pé- nitentiaire comportant un système progressif et

qui ont accédé à la phase d'application du ré- gime de semi-liberté.

3'0 Etre condamné à la relégation placé da'~iS un centre d'observation et avoir fait l'objet d'une d~cision favorable prise en commission de classement, par le juge de l'application de la peine.

Etre admis au bénéfice de la libération conditionnelle sous la condition d'avoir été soumis à titre probatoire au régime de se mi-·

li.berté.

Permis de sortie.

Le système de permis· de sortie tst également organisé. Il peut être accordé dans les condi~

tions suivantes :

1"" Circonstancies familiales graves visées à l'article D. 425.

2·o Visites à des employeurs éventuels ou aux entreprises qui envisageraient de le.s em~

baucher, des détenus prochainement Hbérables ou susceptibles d'être admis au bénéfice de 1a li- bération conditionnelle ou au régime de semi- liberté;

3° Présentation aux épreuves d'un examen;

4"' Visite médicale ou accomplis.sement de toute formalité requise par l'autorité militaire préalablement à un tngagement dans les forces armées, lorsque la libération conditionnelle a été açcordée en vue de cet engagement, ou à l'égard des détenus militaires et marins lorsque les nécessités de l'administration militaire l'exi- gent;

5° Sortie les dimanches et jours fériés ou chômés des condamnés admis au régime de semi-liberté;

6"' Sortie individuelle des condamnés, lors- qu'elle est prévue par le règlement intérieur de l'établissement où ils subissent leur peine comme épreuve préalable à leur admission au régime de semi-liberté ou comme conséquence de leur ac- cession à une phase de confiance; les permis- sions de sortir autorisant un condamné à s'ab- senter d'un établi.ssem~nt pénitentiaire pendant une période de temps déterminée s'imputent sur la durée de la peine en cours d'exécution.

Suppression de la contrainte par corps.

II en est des institutions judiciaires comme les modes qui vieillissent prématurément et n' ap- parais.sent après quelques années que comme un amusement rétrospectif dont on -s'étonne qu'elles aient pu être consacrées les unes par des déci~

sions de justice, les autres par les arbitres de l'élégance.

Rien ne nous paraît plus désuet aujourd'hui que la contrainte par corps et notre indulgence s'inquiète que des débiteurs aient pu pendant des siècles et juBqu'à la fin du Second Empire, être mis en prison pour ce motif unique qu'ils ne pouvaient pas payer leurs dettes; nous com,- prenions difficilement que les condamnés de droit commun soient encore incarcérés quand ils ne s'acquittent ni des amendes auxquelles ils sont condamnés ni des indemnité.s qui réparent les dommages causés par les fautes délictuelles.

La nouvelle législation interdit dorénavant au particulier désireux d'obtenir · la condamnation aux dommages-intérêts, le recour.s à la contrainte par corps. C' èst U l'évolution à peine un peu pré- cipitée, des idées actuelles : le sens d'amen~

dement et du redassement du condamné dans la société après expiation de sa peine, si tant est que le mot « expiation » puis.se adéquate~

ment être employé, l'emporte .sur le principe de l'exécution d'un jugement civil.

Réhabilitation de plein droit.

Toute personne condamnée par un tribunal français à une peine criminelle ou correction~

nelle peut être 'réhabi~itée.

La réhabilitation est soit acquise de plein droit, soit accordée par arrêt de la chambre d'accusation.

Elle est acquise de plein droit au condamné qui n'a, dans les délais ci-après déterminés, subi aucune· condamnation nouvelle à ·l'emprisonne- ment ou à une peine plu.s grave pour crime ou délit :

(4)

1 ° Pour là condamnation à! l'amende après un délai de

5

ans à compter da jo{llr do paie- ment de l'amende ou de l'expiration de la con- trainte par corps ou de la prescription accom- plie;

2" Pour· la condamnation unique à une peine d1emprisonnement ne dépassant pas six mois.

après un délai de dix ans. à compter soit de l'expiration de la peine subie. soit de b pre- scription accomplie;

· J<> pour la condamnation unique à une peine d1emprisonnement ne dépassant pas deux ans ou pour les condamnations muhiples dont l'en- semble ne dépasse pas un an, après un délai de quinze ans compté comme il est dit au para- gra·phe précédent;

4" pour la condamnation unique à une peine supérieure à deux ans d'emprisonnement ou pour les condamnations multiples dont l'ensemble ne dépasse pas deux ans. après un délai de vingt ans compté de la même manière.

Sont, pour l'application des dispositions qui précèdent, considéréu comme constituant une condamnation unique les condamnations dont la confusion a été accordée.

La remise totale ou partielle d'une peine par voie de grâce équivaut à son exécution totale ou partielle.

La

justice et la presse.

L'opinion publique française semble perdre de vue le réalisme et la générosité de ce nouveau code, et se trouve heurtée par les dispositions relatives au secret de l'instruction et celles qui visent la répression d'actes, paroles ou écrits tendant à jeter le discrédit sur une décision de justice.

Le Monde, relatant une conférence de presse du garde des sceaux, pouvait le 15 mars 19 59 déclarer :

« Conférence de presse ou procès à la manière de la Chine populaire ? D'un côté deux cents journalistes procqreurs impitoyables ou soop- çonneux. De l'autre, accusé, le ministre de la Justice en personne. Quand il excipait de sa bonne foi et alléguait la pureté de ses inten- tions, une sourde rumeur de désapprobation sa- luait ses répliques, tandis que les questions-ré- quisitoires étaient. ponctuées de longues rafales d'ap:plaudissements

».

Le garde des sceaux explique :

« L'article 11 du Code de procédure pénale prend place dans un ensemble qui tend à don- ner aux prévenus le maximum de garanties. Il assure - ou il essaye d• assurer - une plus grande indépendance du juge d'instruction et un plus grand contrôle des pouvoirs donnés à la police. C'est donc dans le cadre d'une meilleure enquête et d'une meilleure instruction que se situe un secret plus rigoureux.

» Il permet de mettre à l'abri l'honneur des individus tant qu'il n'est point définitivement établi qu'ils y ont manqué ».

Dans la .presse on pouvait lire des titres tels que «La Justice au Secret

(France

Observateur) ;

«

La Démocratie s'arrête aux portes du Palais de Justice l) (Témoignage Chrétien); «Orien- tation d'un Etat totalitaire» ... « Mort du fait- divers »> etc ...

Qu'y a-t-il de changé ?

A. - En France, jusqu'à une époque avancée, l'instruction des procès criminels était pu- blique. L'inculpé comparaissait devant les jurés et· la procédu,re était accusatoire; c'est- à-dire que l'accusateur devait apporter ses preuves devant un accusé présumé inno- cent. Puis, avec l'organisation de la justice con- fiée à des magistrats, l'instruction devint secrète.

Avec le système inquisitorial, l'accusé cessa d'être présumé innocent, et pour obtenir l'aveu, préoccupation essentielle du juge, on eut recours à la tromperie, la fraude et surtout, en dernière ressource, à la torture. Procédure souvent dé- loyale, privant

r

ac.cusé de garanties essentielles et source de nombreuses erreurs.

Lorsq·oe vint la Révolution, un bouleverse- ment s'imposait. Si pour le jugement des affai- res criminelles on recourut à la législation anté-

rieore au quinzième siède en rétablissant le jury, la publicité des débat5 ·et les preuves orales, on conserva au contraire la législation postérieure au quinzième siècle pour l'instruction avec l'institution du juge permanent, la procédure écrite jusqu'au débat et surtout le secret.

Pourtant le décret des 8 octobre- 3 novembre 1789 tenta de remédier aux inconvénients du secret absolu. L' A&'lemblée nationale n'aimait pas les mesures législatives trop précipitées. Con- sidérant que les réformes de la procédure « exige une lenteur et la maturité des plus profondes méditations

»,

elle décida de prendre des dispo- sitions qui, «sans subvertir l'ordre actuellement suivi, rassureront l'innocence et faciliteront la justification des accusés en même temps qu'elles

· honoreront davantage le ministère des juges dans l'opinion publique ».

On décida donc que la première information, tout en demeurant secrète, se déroulerait en pré- sen•ce de personnes notables adjointes au juge d'instruction et l'accusé fut assisté d'un con- seil présent aux recolements et aux confronta- tions.

La .Constitutton de 1791 alla plus loin en- core et- rétablit le système accusatoire en insti- tuant un jury d'accusation et en rendant l'instruction publique. Le Code de 1808 revint au sy.-;tème antérieur, confia l'information à un juge d'instruction et exigea le secret. Devant les abus nombreux auxquels le système donna lieu on intro·duisit le contrôle de la défense, par la loi de 18 97, dite de l'instruction contradictoire.

Le nouvel article 11 dispose :

«

La procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est se- crète, sauf les .cas où la loi en dispose autre~

ment et sans préjudice des droits de la défense.

Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les con- dlitions et sous les peines de l'article 3 78 du Code pénal ».

A 'la vérité, cet article n'a rien de surpre- nant, il ne fait que ramener au respect d'un principe posé depuis fort longtemps et jamais modifié depuis un siède et demi, mais qu! on avait peu à peu lai~sé tomber en désuétude.

En tant que rapporteur de la commission de législation devant l'Assemblée nationale, le dé- puté Jacques Isomi a rédigé le texte de l'arti- cle ll qui ne figurait pas dans le texte du pro~

jet du gouvernement. Le texte fut voté· à l'una- nimité par la commission et à l'unanimité par l'Assemblée elle-même le

25

juin 1957. On aurait donc bien tort de l'attribuer à un gou- vernement dictatorial. De quoi s'agissait-il ? De rappeler un principe essentiel de l'instruc- tion, celui du secret. Ce secret ne fut supprimé, au cours de l'histoire judiciaire, que pen- dant une brève période de la Révolution.

Et, bien que le Code d'instruction criminelle de Napoléon, aujourd'hui abrogé, n'ait contenu aucune disposition formelle, tous les crimina-.

listes enBeignent que l'instruction était secrète, et cette formule se retrouve dans de très nombreux arrêt5 de la Cour de cassation.

Le secret est nécessaire pour éviter que des soupçons pèsent à tort sur un innocent; pour la bonne marche de l'enquête; pour soustraire l'information aux pressions de l'opinion.

Laissons à M"' Garçon, dans le Monde du 4 mars décrire la situation :

(: Cependant, nonobstant ces interdictions formelles, l'habitude était prise depuis quelques années de tenir très peu compte des prescriptions de la loi. La police judiciaire avait nn bureau à la disposition des informateurs judiciaires. La presse publiait souvent presque in extenso les procès-verbaux de police avec accompagnement de photographies.

~ Les cabinets d'instruction et les parquets n'étaient souvent pas beaucoup plus secrets. Le fâcheux est que les informations, qui n'étaient jamais que le résultat d'indiscrétions. manquaient souvent d'objectivité non pas par la faute de la presse mais à raison de la source des indiscré- tions. Selon que les renseigntments émanaient dt la police, des magistrats ou des avocats, le dé·

roulement de l'instruction apparaissait différent et tout s'en trouvait faussé».

En résumé, il a fallu une loi pour rappeler l'existence d'une infraction au secret profes- sionnel. Celui-ci était péniblement tombé en désuétude, suivant en cela l'évolution des mœurs do' monde contemporain. Cette loi abandonne à l'appréciation du parquet l'opportunité de faire certains communiqués au sujet d'informations en cours.

L'homme libre veut juger par lui-même les événements et veut être informé de tout ce qui touche l'ordre social et politique et le secret paraît heurter la conscience publique.

II y a ici une sorte de conflit entre la loi et les mœurs. En Belgique, nous vivons depuis longtemps sous un régime analogue. L'instruc- tion est secrète. Les magistrats et les policiers sont tenus à la plus grande discrétion. La presse en est réduite à publier des communiqués officiels qui sont d'ailleurs rares et réservés. Les défenseurs

eux-m~mu ne tiennent pas à révéler quoi que ce s()it avant les débats, les plaidoiries et le jugement.

B. - D'autres dispœitions visent les actes, pa- roles ou écrits tendant à jeter le discrédit sur un acte ou une décision juridictionnelle de nature à porter atteinte à l'autorité de la justice et à son indépendance.

En voici les textes :

a) Quiconque aura publiquement, par actes, paroles ou écrits, cherché à jeter le discrédit sur un acte ou une décision juridictionnelle, dans des conditions de nature à porter atteinte à .}'au- torité de la justice ou à son indépendance, sera puni d'emprisonnement (un à six mois) et d'amende ( 50.000 à 2.000.000 de francs);

b) Quiconque aura publié avant l'interven- tion de la décision juridictionnelle définitive des commentaires tendant à exercer des pres- sions sur les déclarations des témoins ou sur la décision des juridictions d'instruction ou de jugement, encourra les mêmes peines.

Un journaliste français, s'adressant au garde des sceaux déclarait :

«Nous ne redoutons pas ces textes appli~

qués par vous parce que nous connaissons votre li:béralisme-; nous nous demandons ce qu'ils peuvent devenir le jour où le pouvoir et parti- culièrement

1'

administration de la justice au~

raient, par hypothèse, passé dans les mains de gens qui n'auraient pas les mêmes sentiments libéraux.

Cette innovation, d'inspiration gouvernemen- tale, semble devoir être accueillie avec plus de réserves.

Pour tous ceux qui prennent la société au sérieux, l'appareil de la justice a je ne sais quoi de grand et de grave; ce.; institutions dépendent entièrement des sentiments que les hommes y at~

tachent et des grandeurs dont elles sont revêtues par la pensée : c'est en ce.-; termes que Balzac définit ses sentiments sur les a·utorités qui sont chargées de la mission de juger et il dira ail- leurs : «La JuBtice est un temple redoutable dont on ne doit pas approcher sans déférence.

c'est comme une ~réa ti on divine en laquelle cha~

con doit avoir foi ».

Les magistrats participent de ce caractère majestueux de la justi<:e : ils sont en dehors et au-dessus de l'humanité dont ils jugent les actes et dont ils fouillent les intentions. Leurs robes u·niformes, qu'elles soient noires ou roÙges, créent une sorte d'anonymat derrière lequel l'homme disparaît pour ne laisser que la Cour ou le tribunal, entité sociale qui décide du sort des hommes, de leur honneur, de leur fortune et même de leur vie.

Leur langage, leur style hermétique aux pro- fanes assurent aux juges une autorité inquié- tante et mystérieuse.

La justice doit être par elle-même garante de ses décisions. Il semble que ce soit la dimi·

nuer que de vouloir la protéger contre toute critique. La réforme pénale sera organisée dans un esprit libéral, avait déclaré le garde des sceaux. Est-ce une garantie suffisante dont se contentera l'annotateur d'arrêts ou jugements.

le journaliste, qui, comme c'est son devoir,· veut réparer une erreur judiciaire ? •••

... ~.

(5)

Il est à espérer que la mise en application des textes montrera que les critiques soulevées par les articles, s'avèreront exagérées.

En ce qui concerne les appréciations sur le fonctionnement de la justice, deux textes assez récents, dans un arrêt de la Cour suprême des Etats-Unis sont à rappeler, ils manifestent une tendance diamétralement opposée.

< Est insultante pour l'opinion publique l'idée que le respect du pouvoir judiciaire pourrait être obtenu en le mettant à l'abri des critiques.

»! Est insultante pour le pouvoir judiciaire lui-même, l'idée que les critiques pourraient in- fluencer sa manière de diriger et trancher une instance. »

Considérations générales.

Le Code d'instruction criminelle est donc dé- finitivement débaptisé pour être appelé Code de procédure pénale; ~il fait partie d'un ensemble législatif qui pourrait bien être .connu sous le nom de Code de Gaulle; ces modifications ter- ritoriales, on le comprend aisément, on provo- qué pas mal de mécontentements. On ne lèse pas impunément des intérêts si traditionnellement respe.ctés. On ne bouleverse pas une organisa- tion séculaire sans provoquer des réactions.

S'imagine-t-on un parlement décider la suppres- sion de centaines de juridictions ? Il a fallu pour le faire le régime spécial français du début de la ye République.

L'opinion a été également agitée par certaine presse, qui a cru à la fin du fait divers, causé par le rappel des prescrits relatifs au secret pro- fessionnel.

Le système suisse et belge sera dorénavant celui de la France. Peut-on dire que Belges et Suisses sont mal informés, que notre presse est muselée, que la démocratie s'arrête aux portes du Palais ?

Il faut être réservé dan.s l'appréciation de la

défense de critiquer arrêts et jugements et at- tendre l'expérience des faits pour l'apprécier. En Belgique pareille loi n'a aucune raison d'être.

Mais tout ce bruit, qui va sans doute en s'apaisant, eBt relatif à des éléments assez acces- soires du nouveau code. Il est regrettable vraiment que les Français perdent de vue l'essentiel de cette innovation. En effet le Code de pro-cédure pénale constitue vrai- ment l'effort le plus important accompli de- puis de nombreu.ses années dans la voie du li- béralisme et du progrès.

Fait pour le justiciable, il garantit mieux que par le passé la liberté de la défense et les droits de l'inculpé. Il s'inspire dans une mesure appréciable des idéfiS de l'école de Défense So- ciale qui a trouvé en France des partisans réa- listes et éclairés.

Poar nous, Belges, il nous permet d'heureu- ses et amères réflexions. C' e.st avec une légitime fierté que nous voyons certaines innovations françaises s'aligner sur une pratique qui, chez nous, remonte à 18 7 4 en ce qui concerne la détention préventive à toutes nos· traditions na- tionales quand il s'agit du respect du secret professionnel.

Hélas, probation, semi-liberté, juge. de l' exé- cution, sont des notions qui nous sont fami- lières, nos projets de· loi étaient étudiés alors que la doctrine française s'en faisait à peine l'écho, nous voilà largèment et définitivement dépassés.

Consolons-nous à l'idée que ce n'est pas la première fois que nous sommes tributaires d'ex- cellentes lois d'inspiration française que vote le parlement belge quelque temps après leur mise en vigueur en France.

Espérons que cette expérience se renouvellera bientôt et que nous bénéficieron.s également de ces innovations dans la mesure où l'expérience voisine se sera montrée efficiente.

José VANDERVEEREN.

LA VIE DU DROIT

Propos sur l'immunisation fiscale des plus-values réalisées sur immeubles professionnels

Dans l'état, assurément fort confus, de la doctrine et de la jurisprudence anciennes en œtte matière, les derniers arrêts de la Cour de cassation -ont apporté une salutaire lumière.

Les textes sont connus :

L'article 25, § l"r, 1°, des lois coordonnées d'impôts sur les revenus décide que la taxe pr-ofessionnelle atteint les bénéfices des exploi- tations industrielles, commerciales ou agricoles quelconques.

L'artiCle 27, § 1•r, définit ces bénéfices comme étant :

a) les bénéfices qui proviennent de toutes les opérations traitées par ces établis-sements;

b) -tous a{!croi\Ssements des av-oirs investis dans cette exploitation, en y comprenant ceux qui résultent des plus-values réalisées ou exprimées dans les comptes.

L'article 27, § 2bis, déroge au §

rr :

il im- munise, dans la mesure qu'il précise, les plus- values réalisées sur immeubles et outillages professionnels.

C'est le champ d'application et l'étendue de cette immunisation d'impôt que la jurispru- dence récente a délimités lorsque le bénéfice en était réclamé par des sociétés immobilières sur les plus-values par elles• ·ralisées sur im- meubles professionnels. Pour cette délimita- ti()n, la Cour de {!assation a posé deux jalons importants : le premier qui accroît le champ de l'immunisation, le second qui le r~streint.

* * *

Premier jalon : dans le sens d'un accroisse- ment du champ de l'immunisation.

La Cour de cassation décide que l'article .27, 2bis, est général en ce sens que l'expression

<immeubles professionnels» s'entend, lors- qu'il s'agit. de sociétés, de tous les immeubles

(sous-entendu : investis ... v. ·2e jalon) car

« dans une société anonyme, l'être moral qu'elle constitue ayant été créé en vue de l'exercice d'une activité professionnelle lucra- tive, ne possède rien qui ne soit affecté à cette fin et, partant, tous ses avoirs immobiliers (investis dans l'exploitation) ont nécessaire- ment un caractère professionnel. » ·

(•Cass., 9 juill. 1957 - Immobilière de Bel- gique- Pas., I, 1347; - Cass., 3 déc. 1957- Forestière des Flandres - Pas., 1958, I, 350; - Cass., 21 janv. 1958 - C-omptoir Foncier - Pas., I, 533; - Cass., 4 mars 1958 - Egimo - Pas., I, 739.)

Conséquence. - Etant cons.tant en fait que les plus-values taxées par l'administration re- présentaient un accroissement d'avoir investi dans l'exploitation de l'Immobilière de Bel- gique (arrêt du 9 juillet 1957) ou de la Fo- restière des Flandres (arrêt du 3 décembre 1957), la Cour casse car le juge du fond ne pouvait pas ·refuser l'immunisation au motif que les immeubles vendus n'étaient pas des immeubles professionnels « parce qu'ils ne pouvaient être considérés comme des moyens de production

».

Tous les avoirs d'une société anonyme (no- tamment •Ses immeubles) sont nécessairement professionnels. On ne conçoit donc pas que certains puissent ne pas avoir ce caractère pour. le motif qu'ils ne pourraient pas être considérés comme des moyens de production (cf. la note R.D. à la Pasicrisie sous l'arrêt précité du 3 décembre 1957).

Deuxième jalon : dans le sens d'une restric- ti-on du champ de l'immunisation.

Mais, dit la Cour de cassation, l'immunisa- tion de l'article 27, § 2bis, ne concerne que ce que l'article 27, §

rr,

deuxième phrase, in- clut dans le bénéfice taxable d'une exploita- tion commerciale ou industrielle, à savoir les

«accroissements d'avoirs investis l> que la Cour définit comme étant « les plus-values surve- nues au cours de l'exploitation à des époques indéterminées et... considérées fictivement c-omme un bénéfice de l'année au cours de laquelle l'existence de ces plus-values est ré- vélée » (cf. les quatre arrêts précités).

L'immunisation de l'article 27, § 2bis, ne s'étend pas aux ·bénéfices visés par l'article 2 7,

§ 1er, première phrase, à savoir les bénéfices qui proviennent de toutes opérations traitées (cf. les mêmes arrêts).

Conséquences.

a) Est justifié le refus de l'administration de faire bénéficier· le redevable de l'immu- nisation prévue par l'article 27, § 2bis, lors- qu'il est constant que < les bénéfices imposés proviennent, non de pfus-values de biens in- vestis; mais des opérations traitées dans J' exer- cice de l'occupation lucra'live, spécialement de la vente de marchandises :1> (immeubles fai- sant l'objet même de l'occupation lucrative).

(Cass., 21 nov. 1957 - Carey - Pas., 1958, I, 299 (rejet); - comp. Cass., 7 oct. 1958 - Immobilière du Brabant : «les immeubles peuvent constituer des marchandises (au sens, in casu, de l'article 27, § 2ter), s'ils ne sont pas investis dans l'exploi·tation, mais sont destinés à faire l'objet d'un trafic»).

b) N'est pas justifié le refus de l' adminis- tration de faire bénéficier le redevable de l'immunisation prévue à l'article 27, § 2bis, lorsqu'il est constant c: que pendant les vingt ans où ils ont fait partie. du patrimoine de

la

société anonyme (Comptoir Foncier), les im- meubles vendus ont été donnés en . location et que cette ·activité est prévue par les sta- tuts ... ; qu'il en résultait nécessairement que ces immeubles étaient investis dans l'exploita- t:ion (de la S. A. Comptoir Fonder) même si, lors de leur acquisition, celle-ci avai:t eu l'in- tention· de les revendre avec bénéfices, l'in- vestissement pouvant se réaliser ultérieure- ment».

(Cass., 21 janv; 1958, arrêt Comptoir Fon- cier [cassation]).

** *

Cette jurisprudence conduit ainsi au « dis- tinguo :1> qu'un des· tout derniers arrêts rendus en matière de taxation de plus-values réali- sées par des sociétés immobilières (arrêt Egimo du 4 mars 1958) indique en ces ter- mes : « Si tous les immeubles professionnels ne sont pas investis dans l' exploi,tation au sens de l'article 27, § 1er, en revanche, tous les immeubles investis dans l'exploitation ont nécessairement un caractère p·rofessionnel ».

« L'investissement dans l'exploitati-on est la condition de !'·application de l'article 27,

§ 2bis » (note R. D. précitée) : si elle est réalisée, cette application iva de soi, car tous les immeubles d'une société immobHière sont

« professionnels

» -

comme le sont tous les avoirs des personnes morales.

« En revanche, d·ans une société anonyme ayant notammeDit pour objet l'achat et la vente d'immeubles, tous ses immeubles sont professionnels, mais ne sont pas nécessaire- ment investis dans ·l'exploitation» (id.): s'ils sont traités comme

«

marchandises

»

il ne sera pas question d'appliquer l'article 27, § 2bis, car ce texte est étranger ·aux bénéfices des

«-opérations traitées » par de telles· exploita- tions.

** *

Fidèle aux enseignements de la Cour de cas- sation, l'administration va désormais tenter de maintenir les. sociétés immobilières en dehors

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