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ECZÉMA FACIAL DES RUMINANTS ET SPORIDESMINES

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Submitted on 1 Jan 1988

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ECZÉMA FACIAL DES RUMINANTS ET SPORIDESMINES

M Bonnefoi, P Sauvagnac

To cite this version:

M Bonnefoi, P Sauvagnac. ECZÉMA FACIAL DES RUMINANTS ET SPORIDESMINES. Annales

de Recherches Vétérinaires, INRA Editions, 1988, 19 (2), pp.91-106. �hal-00901811�

(2)

Article de

synthèse

ECZÉMA FACIAL DES RUMINANTS ET SPORIDESMINES

M

BONNEFOI P SAUVAGNAC

Laboratoire Associé INRA de Toxicologie Biochimique et Métabolique, École Nationale Vétérinaire de Toulouse, 23 chemin des Capelles, 31076 Toulouse Cedex, France

reçu le 21/10/1986, version corrigée le 27/03/87, accepté le 08/09/87

Plan

1.

Les sporidesmines

1.1. Production des

sporidesmines

1.1.1. Distribution

géographique

et habitat de

Pithomyces

chartarum

1.1.2.

Morphologie

1.1.3.

Développement

et

toxinogénèse

1.2. Nature et

propriétés

1.3. Méthodes

analytiques

1.3.1. Extraction

1.3.2. Détection et

dosage

2. L’eczéma facial

2.1. Circonstances

d’apparition

2.2.

Pathogénie

2.2.1. Photosensibilisation 2.2.2. Altérations

hépatiques

2.3.

Étude clinique

2.3.1.

Symptômes

2.3.2. Lésions

2.3.3. Biochimie

clinique

2.4. Contrôle de la maladie 2.4.1.

Diagnostic

2.4.2. Lutte contre la maladie déclarée et ses

conséquences

2.4.3.

Prophylaxie

L’eczéma facial est une maladie des ruminants d’abord décrite en Nouvelle- Zélande

(Cunningham et a11942) puis

en Australie

(Hore 1960),

en

Afrique

du Sud (Marasas et ai

1972)

et en

Uruguay (Riet

Alvariza F et Diaz L 1974. El

hongo Pithomyces

chartarum associado con casos de fotosensibilisa- cion

hepatogene

en bovinos. Vlo

Congresso

Latino-

Americano y Venezolano de

Microbiologica,

Vene-

zuela) ;

elle est

suspectée

au Texas

(Ueno

et ai 1974). En

Europe,

l’affection a été identifiée pour la

première

fois à l’automne 1982 sur des troupeaux d’ovins de race Manech au

Pays Basque français (Bézille

et ai

1984). Depuis lors,

de nouveaux cas sont

chaque

année observés dans la même

région.

L’eczéma facial est une maladie des ruminants

au

pâturage qui

se manifeste par une

photosensibi-

lisation secondaire à

d’importantes

lésions

hépati-

ques. Elle survient

après

la contamination des

pâtures

par

Pithomyces chartarum,

un

champi-

gnon

microscopique qui

dans certaines conditions

produit

des

mycotoxines hépatotoxiques :

les spo- ridesmines. A la suite de

l’ingestion

d’herbes

contaminées par les

sporidesmines,

celles-ci sont

rapidement

absorbées

puis

concentrées dans le foie où elles manifestent en

priorité

leur toxicité

(Taylor 1971 ).

En Nouvelle-Zélande et en

Australie,

la perte annuelle due à la maladie se chiffrait en millions d’ovins et

quelques

milliers de bovins avant que des

règles

de

prophylaxie

ne fussent établies

(Tay-

lor

1971, Atherton

et

al 1974). Actuellement,

le coût total, estimé à 50 millions de dollars par an en Nouvelle-Zélande

(Edwards 1980),

reste difficile à chiffrer car la

majorité

des fermiers concernés par la maladie ne remarque pas son évolution dans le troupeau, l’altération

hépatique

n’étant pas

systé-

matiquement

révélée par la

photosensibilisation

(Towers

1978, Edwards et al 1983, de Wet et Eras- mus 1984).

(3)

L’extension de l’eczéma facial semblant se déve-

lopper

en France, il nous a paru souhaitable de faire le

point

sur les aspects

mycologiques,

toxico-

logiques

et

cliniques

de cette affection en

présen-

tant les

sporidesmines

avant d’étudier la maladie

qu’elles produisent.

1. Les

sporidesmines

Les

sporidesmines

sont, pour les ruminants,

parmi

les

hépatotoxiques

les

plus puissants

que l’on connaisse. Bien que, d’un

point

de vue clini-

que, l’atteinte

hépatique

se traduise essentielle- ment par des

symptômes

cutanés secondaires de

photosensibilisation,

d’où le nom d’« eczéma facial »,

l’hépatotoxicité

domine le tableau lésion- nel et

explique

les

répercussions

à

long

terme de la

maladie. Cette dissociation entre des

signes

clini- ques apparemment mineurs et une atteinte

biologi-

que

majeure explique

que la

gravité

de la maladie soit souvent mal

comprise.

Pour cette raison, nous

préférons

le terme de «

sporidesmiotoxicose

» à

celui d’eczéma facial

qui

est consacré par

l’usage

mais s’avère en définitive très

incomplet.

C’est

pourquoi également

nous avons choisi de

présen-

ter dans un

premier

temps les

sporidesmines

en proposant au lecteur directement intéressé par

une

description

de la maladie, de se reporter à la deuxième

partie

de cette revue.

1.1. Production des

sporidesmines

À

ce

jour,

les

sporidesmines

ont été extraites exclusivement des cultures de

Pithomyces

charta-

rum

(Berk

et

Curt)

MB Ellis ; pour cette raison l’intoxication est aussi dénommée

pithomycotoxi-

cose (Thornton et Percival 1959, Mortimer et ai 1977 a et b). Une bonne connaissance de

l’écologie

de la moisissure et,

plus particulièrement,

des

conditions de

production

des

sporidesmines

est

nécessaire à

l’interprétation

et au contrôle de la maladie.

1.1.1. Distribution

géographique

et habitat de

Pithomyces

chartarum

Pithomyces

chartarum est une moisissure cos-

mopolite,

communément rencontrée dans les con-

trées chaudes ou

tempérées (Dingley

1962). La maladie n’a pourtant été observée,

jusqu’à présent,

que dans un

petit

nombre de pays, où les souches

toxinogènes

sont

probablement plus fréquentes (Taylor 1971).

Il est

également possible qu’elle

sévisse silencieusement, avec des

répercussions

inconnues, dans d’autres pays, tel le

Pays Basque français

avant 1982

(Bézille

et al 19841.

La moisissure pousse habituellement sur des débris

végétaux

morts

(Dingley 1962) :

l’herbe

morte que l’on trouve au ras du sol dans les

pâtures

constitue le seul mode d’intoxication des ruminants

(Thornton

et Percival 1959). L’infestation de la

pâture

est d’ailleurs

plus

forte si l’on tond

régulièrement

en laissant les débris s’accumuler

sur

place (Thornton

et Sinclair

1960).

La

présence

du

champignon

a été

également

observée sur les

parties

aériennes ou souterraines de divers

végé-

taux vivants ainsi que dans le

sol, l’air,

le

papier

et certaines denrées alimentaires destinées à l’homme (Atherton et al 1974) mais aucune de ces sources

potentielles

n’a été associée à une intoxi- cation humaine ou animale.

1.1.2.

Morphologie

La contamination des

pâtures

en

Pithomyces

chartarum est. couramment estimée en comptant les spores récoltées par divers moyens mécani- ques (Done et ai 1961, di Menna et al 1970,

Chap-

man et di Menna

1981).

Ce sont des spores noires

ou brun noirâtres, rugueuses, de 8 à 20 pm x 10 à à 30 tim,

muriformes,

comprenant usuellement trois septa transversaux et deux

longitudinaux.

Elles

sont formées à l’extrémité de

conidiophores

courts (3-10

0 pm)

et

simples

s’élevant au-dessus du

mycé-

lium. Un

petit

denticule provenant du

conidiopho’re

reste habituellement attaché à la base des spores

lorsqu’elles

sont libérées

(Dingley

1962, Butler et Crisan

1977).

Au laboratoire

cependant,

le

champi-

gnon montre en culture de telles variations mor-

phologiques,

en fonction de la

température

notam-

ment, que la

diagnose

est

parfois

difficile

(di

Menna

ei a11977).

1.1.3.

Développement

et

toxinogénèse

Dans les conditions naturelles

Pithomyces

chartarum se

développe particulière-

ment

quand

l’humidité est

importante,

la

tempéra-

ture assez élevée et le substrat

disponible.

Cela

explique

le caractère saisonnier de l’eczéma facial

(Francis

et ai

1972,

di Menna et

Bailey 1973) :

les

premières pluies

d’automne imbibent le matelas de chaume

produit pendant

l’été ; l’herbe drue et serrée

qui

le recouvre, ralentit

l’évaporation

de telle sorte que, même à la fin des

journées

les

plus

ensoleillées, l’humidité peut être

suffisante ;

si la

température

de la nuit n’est pas trop fraîche

(

S

5 ° C), Pithomyces

chartarum trouve ainsi les meilleures conditions pour vaincre la

compétition

des autres moisissures et se

développer

intensé-

ment. Ces données

simples

permettent des

prévi-

sions

qui représentent

un des éléments les

plus importants

de la

prophylaxie

menée en Australie et en Nouvelle-Zélande contre l’eczéma facial

(Tay-

lor 1971, Atherton et

a11974).

Au laboratoire

Croissance et nutrition :

Pithomyces

chartarum

est peu

exigeant

quant à la nature des substrats

(4)

mais la croissance est

proportionnelle

à la richesse du milieu

(di

Menna et al 19771. De très nombreux substrats

d’origine

naturelle sont satisfaisants pour le cultiver : bouillon de carotte et de pomme de terre

(Done et a/ 1961,

di Menna

et a11970,

Marasas

et ai

1972),

orge

(White

et ai

1977), seigle,

blé et autres

grains

(Ross

1960),

son (Done et ai 1961, White et ai 1977) et agarose malté

(Dingley

1962).

La

température optimale

est de

24 ° C,

mais la croissance peut s’effectuer à 18 °C voire 12 °C selon les souches

(di

Menna et ai 1977). Elle est enfin

supérieure

en milieu

liquide périodiquement agité quoiqu’une agitation

trop

importante

inhibe la spo- rulation

(Dingley

et

al 19621.

Sporulation :

Le taux de

sporulation

varie beau- coup suivant les souches et les conditions de cultu-

re. Pour une

température optimale

de 24 à 28 °C et une humidité voisine de 100 %, seule la nature de la source d’azote semble avoir une influence : l’acide

L-glutamique,

notamment,

multiplie

la spo- rulation par un facteur 10 (Done et ai 1961). Avec certains isolats, la

sporulation

doit être induite par

une irradiation ultraviolette

préalable (di

Menna et al 19701.

Peu d’informations existent sur la

composition

des spores ce

qui

est

regrettable

car leur viabilité conditionne la

signification

de leur dénombrement sur le terrain. Elles sont riches en

sporidesmolides,

un matériel

protidique atoxique

dont l’extraction peut être réalisée pour

apprécier

très

grossière-

ment la contamination d’une

pâture (Perrin

1959).

Toxinogénèse :

Les

sporidesmines

sont des

métabolites secondaires dont ne

dépend

pas la survie du

mycélium.

Dans les conditions naturelles,

en

Australie, la production

semble très faible : 260

(Synge

et White

1960)

à 1 000 mg

(Atherton

et ai

1974)

par

kg

de spores récoltées

par lavage

d’herbe

morte. La

toxinogénèse

des souches étudiées au

laboratoire est très variable et même

parfois

nulle

(Done

et al 1961,

Dingley

et

al 1962,

di Menna et al 1970 et

1977).

Le taux de

production

n’est pas corrélé au

poids

sec de

mycélium

obtenu, il est par contre

grossièrement proportionnel

à la

sporula-

tion ce

qui justifie

l’intérêt

prophylactique

du dénombrement de spores

(Done

et a/1961,

Dingley

et a/1962, di Menna ei al 1970 et

1977). Cependant,

l’étude de

plus

de 50 souches a montré

qu’il n’y

a

approximativement qu’une

chance sur deux pour que l’isolat

qui produit le plus

de

spores

soit le

plus toxinogène

(di Menna et ai

1977),

certaines sou- ches ne

produisant

pas de toxines

malgré

une

intense

sporulation (Ueno et a/1974).

La

synthèse

des

sporidesmines

passe

probable-

ment

par la

condensation du

L-tryptophane

avec la L-alanine

qui

conduit à diverses molécules

(spori-

desmines

A, B,

C,

D,

E,

F, G,

H et J) dont les

proportions

relatives peuvent varier d’un isolat à

l’autre. La

sporidesmine

A,

sporidesmine

au sens strict,

représente généralement plus

de 80 % de la

production

totale

(Taylor

1971, Atherton et a/1974).

Production des

sporidesmines

au laboratoire : L’évaluation de la

toxinogénèse

d’un isolat récolté

sur une

pâture

permet d’estimer

l’amplitude

de

l’exposition

aux

mycotoxines

des animaux

qui s’y

trouvent. La

préparation

des

sporidesmines

est en

outre nécessaire à l’étude de leurs

propriétés

ana-

lytiques

et de leur mécanisme d’action. Différentes méthodes de culture sont détaillées dans la littéra- ture

(Done

et al 1961, di Menna et al 1970, Marasas et al 1972). Les

impératifs

culturaux varient dans

une

large

mesure avec la nature des isolats et la

toxinogénèse

est

toujours

très faible. Il n’a

jamais

été

possible

d’améliorer par sélection la

toxinogé-

nèse des souches étudiées.

1.2. Nature et

propriétés

1.2.1. Structures

Les

sporidesmines (fig

1) sont des

hétérocycles

azotés

polycycliques possédant

deux

parties :

la

première

moitié

aromatique

et chlorée dérive du

tryptophane,

la seconde, dérivée de la

pipérazine,

se caractérise en

général

par un pont

polysulfure.

Ces structures ont été confirmées par résonance

magnétique

nucléaire et diffraction des rayons X (Cole et Cox 1981) ainsi que par

synthèse

totale

(Kishi

et ai

1973).

On retrouve la

partie pipérazini-

que dans la structure d’autres

mycotoxines qui

forment avec les

sporidesmines

le groupe des

Épipolythiodioxopipérazines :

il

s’agit

de la

glio-

toxine, de la chétomine, et de l’aranotine

(Trown

1968, Cole et Cox

1981 ).

Les relations entre la structure des

sporidesmi-

nes et leur activité

biologique

ont été étudiées en

détail sur des modèles

simples

in vitro : activité bactéricide sur Bacillus subtilis et activité

cytotoxi-

que sur diverses

lignées

établies de cellules cancé-

reuses

(Taylor 1971).

Le tableau 1

indique

ces

relations

structure-activité,

mettant en évidence le rôle

primordial

de

l’hétérocycle

soufré. Des obser- vations similaires ont été faites pour les autres

épipolythiodioxopipérazines (Trown

1968,

Taylor

1971). Bien

qu’il

ne soit pas clairement établi dans

quelles

mesures

l’hépalotoxicité

des

sporidesmi-

nes est corrélée à leur activité

antibiotique,

ces

données

expliquent

que l’on ait étudié

particulière-

ment la réactivité

chimique

et

biologique

du pont disulfure afin de

comprendre

le mécanisme d’ac- tion des

sporidesmines (Munday 1982,

1984a et

b,

et 1985). Mais il est

possible

de faire chuter l’acti- vité antibactérienne des

sporidesmines

par des modifications

chimiques qui

laissent intact l’hété-

rocycle

soufré

(Mortimer

et Collins

1968).

Notant

l’analogie

structurale avec l’ésérine, Cordiner et Jordan

(1983)

émettent

l’hypothèse

que l’ensemble

(5)

de la structure des

sporidesmines participe

à leur

mécanisme d’action. Aucune donnée récente n’est

venue éclairer ce

point

assez obscur de la

biologie

des

sporidesmines

ce

qui

n’est pas étonnant

puis-

que leur mécanisme d’action reste assez mal

connu.

1.2.2.

Propriétés physiques

Les masses moléculaires des

sporidesmines

sont

comprises

entre 450 et 500

(fig

1). Leurs

points

de fusion sont variables suivant la

présence

et la

nature d’un éventuel solvant de cristallisation

(Cole

et Cox 1981). La

chromatographie

de partage

(Mor-

timer et

Standbridge

1968) révèle

qu’elles

sont solubles dans les solvants

apolaires

tels que le benzène, le tétrachlorure de carbone, le chlorofor- me, l’éther et l’acétate

d’éthyle.

Elles sont

égale-

ment moyennement ou faiblement solubles dans les alcools et très faiblement

hydrosolubles (Clare

et

Grumbley

1962, White et

a/1977). La spectropho-

tométrie ultra-violette à 254 nm permet de doser la

sporidesmine

A en solution pure (Marbrook

1964).

La

spectroscopie infra-rouge

est la méthode de choix pour différencier les

sporidesmines

entre elles

(Ronaldson

et ai 1963, White et ai 1977, Ronaldson

1981).

1.2.3.

Propriétés chimiques Dégradation

des

sporidesmines

Les

sporidesmines

sont des substances

particu-

lièrement instables en solution

alcoolique

ou

aqueuse car elles sont très sensibles aux attaques

nucléophiles,

à la chaleur et à la lumière

(Clare

et

Grumbley 1962,

Marbrook et Matthews

1962,

White

et al 19771. En solution

alcoolique,

la lumière dif- fuse d’un laboratoire

produit

des pertes considéra- bles, d’autant

plus importantes

que le solvant est

impur (Halder

et al

1980).

Dans l’eau, la

dégrada-

tion est

quasi

totale

après

1 à 3 heures

d’exposition

à un soleil vif : une certaine détoxification des

pâtures

est ainsi

possible (Clare

et

Grumbley

1962, Marbrook et Matthews

1962).

Au

laboratoire,

la conservation des

sporidesmines

s’effectue dans le benzène, en solution concentrée, à

pH

neutre, au

congélateur

et à l’abri de la lumière : ces solutions sont stables

pendant plusieurs

années (Done et ai 1961, White et al

1977).

Réactions

d’oxydo-réduction

Toutes les

sporidesmines,

à

l’exception

des spo- ridesmines D et F

qui

ne

possèdent

pas de liaison

disulfure, présentent

un

équilibre

entre une forme

oxydée

et une forme réduite

qui

leur donne la

propriété

de

catalyser l’oxydation

de l’azide de sodium par l’iode, ce

qui

permet de les doser ou de les caractériser

(Russel

1960, Clare 1963, Marbrook

1964).

La réaction est relativement

spécifique

des

épipolythiodioxopipérazines (Taylor 1971).

De

même,

les

sporidesmines

réduisent le nitrate d’ar- gent,

l’hydroxyde

d’aluminium et les sels de

plomb

en milieu

basique

(Ronaldson et

al 1963,

White et ai 1977).

Après hydrolyse basique,

elles absorbent

quantitativement

l’iode à la manière des

pénicilli-

nes

(Russel 1960). Enfin,

par une réaction

(6)

d’échange

avec d’autres thiols, suivie de l’auto-

oxydation

de leurs thio-dérivés, les

sporidesmines

sont

capables,

aussi bien in vitro

(Munday

1982 et

1987) qu’in

vivo

(Munday 1984a),

d’initier une série de réactions radicalaires aboutissant à la

généra-

tion d’anion

superoxyde

et de radical

hydroxyde qui

seraient

responsables

de leur activité

biologi-

que. La réaction est activée par de faibles concen- trations d’ions Cu2+ ou Fe2+ ; le Znz· est au con-

traire inhibiteur

(Munday

1984b, 1985 et 1987).

Transformations dans la série

Un

petit

nombre de réactions

chimiques simples

portant sur le reste soufré des

sporidesmines

per- met le passage de l’une à l’autre

(Atherton

et al 1974) ou leur transformation en dérivés thio-

méthyls analysables

par

spectrométrie

de masse

(Jamieson

et al 1969, Francis et al 1972). La

prépa-

ration d’un dérivé

thioacétyl-poly-L-iysine

de la

sporidesmine

A a

permis

à Jonas et Ronaldson

(1974)

d’immuniser des

lapins

contre les

mycotoxi-

nes.

1.3. Méthodes

analytiques

1.3.1. Extraction

À

côté des méthodes

qui permettent

d’isoler les

sporidesmines

pour les étudier ou

produire

des étalons, il y a celles

qui simplement

concentrent les toxines, ce

qui

est suffisant pour les caractériser par

chromatographie (diagnostic)

ou les adminis-

trer à des animaux de laboratoire

(toxicologie expérimentale).

Elles dérivent toutes des travaux de White

(1958) qui,

pour identifier le

toxique,

a tenté initialement de l’extraire des

pâtures

conta-

minées obtenant ainsi un extrait 70 000 fois

plus toxique

que la

pâture

elle-même, lui

permettant

d’estimer la

proportion

du

toxique

dans la

pâture

à 5-10 ppm. Bien que le facteur de concentration ait pu être

multiplié

3 à 6 fois par la suite

(Synge

et

White 1959 et 1960, White

et al 19771,

il n’a

jamais

été

possible

de caractériser directement le

principe toxique

des

pâtures.

Le fait que la même méthode d’extraction

appliquée

aux cultures pures de Pitho- myces chartarum ait conduit à l’identification des

sporidesmines (Ronaldson

et ai

1963) représente cependant

un bon argument en faveur de l’identité entre les

composés toxiques

concentrés par White à

partir

des

pâtures

et les

sporidesmines.

L’intoxi- cation

expérimentale (cf 2e partie)

apporte les der- niers éléments de preuve. Par ailleurs, il n’a

jamais

été

prouvé

que les deux groupes de substances soient différents.

À

l’heure

actuelle,

la

préparation

des

sporidesmi-

nes fait

appel

à la

chromatographie liquide

haute

pression préparative

(Ronaldson

1982) qui

permet d’atteindre un pourcentage de

récupération

de

90 %,

supérieur

à celui que donne la

chromatogra- phie

basse

pression (Ronaldson

et

Fyvie 19731.

Ces méthodes

chromatographiques

portent sur un

« concentré » obtenu par extraction

méthanolique

d’une

grande quantité

de culture. Ce matériel brut est, par ailleurs, satisfaisant pour la

majorité

des

expérimentations

animales ainsi que d’autres extraits obtenus de manières très diverses

(Done

et ai 1961, Clare et

Grumbley

1962, Marbrook et Matthews 1962, Halder et ai 1979 et

1980),

un

simple

extrait aqueux pouvant être utilisé

(Marasas et al 1972).

1.3.2. Détection et

dosage

La

chromatographie

sur couche mince

(Rahman

et ai

1980)

permet la détection des

sporidesmines

dans les extraits sans toutefois les

séparer parfaite-

ment entre elles

(tabl2l.

Ueno et ai

(1974)

ont conclu à l’absence de

sporidesmines

dans les

pré-

lèvements du Texas avec les

cinq systèmes

décrits dans le tableau 2. La révélation est couramment effectuée par un

mélange

d’azide de sodium et

d’iode, suivi d’une seconde

pulvérisation

d’ami- don, ou par le nitrate

d’argent

et l’arséniate de sodium ; la sensibilité est inférieure à 0,1 !ig (Rus- sel 1962,

Taylor

19711. ).

Pour un

dosage spécifique,

les meilleures métho- des sont restées

pendant longtemps

les tests biolo-

giques

mesurant l’activité des toxines chez le cochon d’Inde

(Perrin 19571,

sur la cornée du

lapin

(Done

et ai 1961, Leaver 1968a) ou, in vitro, sur cultures cellulaires

(Synge

et White

1960).

Ce der- nier test était souvent

préféré

car la sensibilité est de l’ordre du nanogramme

(tabll).

Un certain nombre de méthodes

chimiques plus simples

était

également employé (voir

Atherton et

a/1974),

celle à l’azide de sodium

(Clare 1963)

étant la

plus

spécifique

et, dans sa version

manométrique (Mar-

brook

1964),

la

plus

sensible.

À

l’heure

actuelle,

on

(7)

utilise essentiellement la

chromatographie liquide

haute

performance

en

phase réverse,

sensible

jusqu’à

100 ng

(Halder

et

a/1979).

De nombreuses méthodes sont donc utilisables pour identifier et doser les

sporidesmines

prove- nant d’une culture pure de

Pühomyces

chartarum, mais aucune ne permet de les

détecter

directement dans un

prélèvement

d’herbe. La

responsabilité

des

sporidesmines

dans le

développement

de

l’eczéma facial des ruminants est pourtant désor- mais fermement établie. Les données fondamenta- les

qui

viennent d’être

rapidement

décrites permet- tent d’éclairer l’évolution de la maladie et d’envisa- ger des moyens de contrôle

appropriés.

2. L’eczéma facial des ruminants 2.1. Circonstances

d’apparition

L’affection survient de la fin de l’été au milieu de l’automne, au

pâturage.

Elle fait suite au retour des

pluies

et à la repousse de l’herbe

après

que

quel-

ques semaines de sécheresse aient transformé les

prairies

en chaume

(Mitchel

et ai

1959).

Au

Pays Basque,

les troupeaux passant l’été et l’automne

sur les côteaux d’estive ne sont pas

affectés, qu’il s’agisse d’agnelles

ou de brebis. Par contre, en

plaine,

l’accident est

beaucoup plus fréquent

sur

certaines

parcelles (Bézille

efa/1984). Cette notion de

parcelle

« à

risque

»,

également

reconnue dans

les pays de l’autre

hémisphère (Mortimer

et Dalton

1981),

est

probablement

liée à une

plus

forte conta- mination par la moisissure et au

surpâturage qu’el-

les subissent, en raison notamment, de leur com-

modité d’accès. La

composition

de la

pâture,

la

structure du sol et

l’exposition

du terrain ont une

importance

certaine car

l’apparition

de chaume à la fin de l’été et une rétention suffisante de l’humi- dité à la suite des

premières pluies

sont des fac- teurs déterminants (di Menna et

Bailey

1973). En

pratique, cependant,

seuls

l’expérience

et le comp- tage de spores permettent de reconnaître les par- celles «

à risque

».

La morbidité est extrêmement variable

(0

à 100

%)

d’un troupeau à l’autre et d’une année à la

suivante ;

il en est de même pour la mortalité

(Mortimer

et al 1977a et

b).

Divers

éléments d’expli-

cations sont avancés :

hétérogénéité

des habitudes alimentaires et de la distribution de la moisissure dans les

pâtures (Mortimer

et

Taylor

1962) ; pente de la courbe dose-effet : de faibles variations de doses entraînent une forte

aggravation

des effets

(Mortimer et Taylor 1962) ;

existence

probable

d’un facteur de résistance

d’origine génétique (Camp-

bell

et al 19811.

Les accidents tardifs sont

toujours plus

graves : il est

probable

que cela

signe

une accumulation d’effets

inapparents pendant

toute la durée de

l’automne,

au cours d’une

phase

silen-

cieuse

prolongée (Mortimer

et Dalton 1981). Au

Pays Basque,

les

agnelles

sont

plus fréquemment

touchées que les brebis car ces dernières sont

plus

facilement

envoyées

en estive

(Bézille efa/1984).

2.2.

Pathogénie

2.2.1. Photosensibilisation

L’eczéma facial se caractérise par une

photosen-

sibilisation et un ictère secondaires à

d’importantes

altérations

hépatiques,

notamment une cholestase

(Cunningham

et ai 1942). La cholestase

empêche

l’élimination de la

phylloérythrine, pigment

issu de

la

dégradation

de la

chlorophylle

dans le tube

digestif.

La

phylloérythrine

s’accumule dans

l’orga-

nisme et provoque, sous l’effet des rayonnements ultra-violets, la destruction des membranes des cellules cutanées et muqueuses

exposées

au soleil

(Smith

et O’Hara 1978, Galitzer et Oehme 1978, Laustriat

1986).

Seules les

parties non-pigmentées

et non enlainées de la surface

corporelle

sont donc atteintes. Ainsi, les moutons à robe noire ne font-ils pas de réaction cutanée

malgré d’importantes

lésions

hépatiques (Bézille era/1984).

2.2.2. Altérations

hépatiques

La nature de ces altérations et le mécanisme d’action des

sporidesmines

ont pu être

précisés

lors d’études

expérimentales.

Nature

Les observations

cliniques

(Mortimer et

Taylor 1962,

Coetzer et

al 1983), biochimiques

(Done et ai 1962, Mortimer 1962, Peters 1963, Peters et Smith 1964, Leaver 1968a, Mortimer et

Standbridge

1969, Peters et Mortimer

1970)

et

nécropsiques (Morti-

mer et

Taylor

1962, Mortimer 1963, Mortimer et

Standbridge 1969)

mettent toutes en évidence l’as- pect

diphasique

de l’intoxication chez le mouton.

L’atteinte

hépatique,

d’abord limitée et

clinique-

ment muette,

s’aggrave

ensuite lentement pour devenir très

importante

vers le 7e ou le

14 e jour après

l’administration d’une dose

unique

de 1

mg/

kg

par voie orale.

À

cette dose, l’ensemble des

signes

observés dans les conditions naturelles sont

reproduits :

ils

correspondent

à la deuxième

phase

de l’intoxication.

La

première phase

est

contemporaine

de l’excré- tion biliaire intense et

rapide

de la

sporidesmine

(Mortimer et

Standbridge

1968). Au cours de son

passage dans la bile, la toxine détruit les membra-

nes cellulaires avec

lesquelles

elle entre en

contact : membrane canaliculaire des

hépatocytes

et membrane

apicale

des cellules

pariétales

des

canaux biliaires

(Eakins

et al 19731. Le

phénomène

s’observe

également

dans le rein mais à un

degré

bien moindre car la toxine n’est que très faiblement éliminée par voie urinaire (Mortimer et Stand-

bridge

1968). Dans le foie où la concentration est très élevée, les destructions membranaires

impor-

(8)

tantes induisent une forte réaction inflammatoire

qui

s’étend de manière

centrifuge

à

partir

des

voies biliaires. Ces destructions membranaires peuvent gagner les membranes intracellulaires

perturbant

l’ensemble du métabolisme, elles

expli-

quent la cholestase

intrahépatique qui

s’établit à la fin de la

première phase

de l’intoxication et

qui

est à la fois

hépatocellulaire (défaut

de

conjugaison

des acides

biliaires)

et canaliculaire

(défaut

de

sécrétion) (Cordiner

et Jordan

1983).

La seconde

phase apparaît

alors que la

sporides-

mine a été éliminée

depuis déjà quelques jours (Mortimer

et

Standbridge 1968),

elle est

aspécifi-

que et peut être

reproduite

par la

ligature chirurgi-

cale du canal

cholédoque (Leaver

et Christie 1965, Leaver 1968a et

b).

Elle évolue vers la fibrose et la cirrhose

hépatique

sous l’effet de l’irritation provo-

quée

par les acides biliaires

qui

s’accumulent dans le foie à cause de la cholestase ou s’infiltrent à

partir

de la bile par les brèches de la

paroi

des

canaux (Mortimer et

Taylor

1962, Peters 1963, Mor- timer 1963, Peters et Mortimer 19701.

Mécanisme d’action

L’action des

sporidesmines

est

probablement aspécifique, l’hépatotoxicité s’expliquant

chez le

mouton par un

phénomène

de concentration à la

« cible » déterminé par le métabolisme de la toxine dans cette

espèce (Mortimer

et

Standbridge 1968).

Chez les animaux de

laboratoire,

l’intense réaction inflammatoire

provoquée

par la

sporidesmine

a un site

principal

variable suivant

l’espèce :

canaux

biliaires chez le

lapin (Clare

1959, Worker et Dodd 1960,

Thompson

et ai 1983) et le

cobaye

(Perrin 1957, White 1958,

Percival 1959) ;

séreuses et pou-

mon chez le rat

(Rimington

et ai 1962, Slater et ai 1964, Towers 1977) et la souris

(Mortimer

1970).

Divers arguments permettent de penser que ces variations sont dues à des différences de métabo- lisme

(Eakins

et al 1973, Bullock efa/1974, Hove et

Wright

1969, Mortimer et

Taylor

19621. L’altération

hépatique

ne s’observerait que dans les

espèces

où la toxine

présente

une très forte extraction

hépatique ;

c’est en outre un facteur de sensibilisa- tion car le rat et la souris sont très résistants alors que le mouton et le

cobaye

sont les

plus

sensibles

(Mortimer

et al 1977c).

L’action membranaire non

spécifique

de la

toxine peut être facilement mise en évidence in vitro sur des bactéries

(Brewer

et ai 1966) et des

hépatocytes

en culture (Kroker et al 1977, Cordiner et Jordan

1983),

ainsi que sur des mitochondries

en

suspension (Gallagher

1964, Middleton 1974a et

b).

Dans le

foie,

elle

n’implique

ni l’inhibition des ATPases membranaires (Eakins 1978) ni celle de la

production

d’ATP

(Bullock

et ai 1974) ; elle est par contre

parfaitement

corrélée à la destruction des microfilaments de

l’espace périplasmique (Jordan

et Pedersen 1986).

À

l’échelle

moléculaire,

les mécanismes sont mal

compris.

Les travaux de

Munday,

que nous avons cités

(Munday

1982, 1984a et b, 1985 et 1987), doivent être

envisagés

avec

circonspection

car les concentrations utilisées dans les essais sont très élevées et seule la moitié

épipolythiopipérazine participe

à la

production

d’anion

superoxyde

alors

qué

de nombreuses observations semblent

indiquer

que l’autre moitié de la molécule est

également (ou

surtout) toxo-

phore (Cordiner

et Jordan 1983). Jordan et Cordi-

ner

(1987)

ont récemment résumé dans une excel- lente revue les

problèmes posés

par

l’interpréta-

tion du mécanisme d’action des

sporidesmines

ainsi que les

applications thérapeutiques qui

pour- raient en être faites :

immunosuppression,

traite-

ments antibactériens et anticancéreux.

D’importan-

tes études restent à faire en ce domaine et il n’est pas certain que

l’hépatotoxicité

des

sporidesmines réponde

aux mêmes mécanismes que ceux

qui

sont étudiés in vitro. D’un

point

de vue

pratique,

il

en résulte

qu’aucune thérapeutique spécifique

de l’intoxication n’est

envisageable

à ce

jour.

(9)

2.3.

Étude clinique

Nous décrirons simultanément la maladie des bovins

(Mortimer

et ai

1977a)

et celle des ovins (Mortimer et ai 1977b, Mortimer et Dalton 1981, Bézille

et a11984) qui

sont tout à fait similaires.

2.3.1.

Symptômes

L’intoxication

expérimentale

du mouton par voie orale à dose

unique reproduit

avec fidélité la mala- die naturelle tout en montrant que la courbe dose- effet est très

abrupte :

les cas les

plus

graves

correspondent

à une dose de 1

mg/kg

tandis que

l’administration de 0,3

mg/kg produit

un

syndrome infra-clinique

révélé

uniquement par la

biochimie

clinique

et

l’autopsie (Mortimer

et

Taylor

1962, Mortimer 1963, Kellerman et al 1980). Cela peut

expliquer

que, dans les conditions naturelles, l’at- teinte des animaux d’un même troupeau soit très variable.

Phase de début

Expérimentalement

et à la dose de 1

mg/kg,

la

sporidesmine produit rapidement

une anorexie intense (réduction de 75 % de

l’ingéré quotidien)

et, de manière

inconstante,

une forte diarrhée

qui

détermine une

importante

perte de

poids

et une

déshydratation

sévère avec

oligurie

et,

parfois,

hématurie

(Mortimer

et

Taylor 19621.

Ces

symptô-

mes

régressent

vers le 6e

jour

et,

après

une

période

de rémission

temporaire,

les

signes

caractéristi- ques de l’obstruction biliaire s’installent

progressi-

vement du 10eau 14e

jour.

Cet aspect

diphasique

est

cependant

rarement

observé dans les conditions naturelles car peu d’animaux

présentent

les

symptômes

de diarrhée et de

déshydratation.

Les

premiers signes

de la maladie ne sont ainsi relevés que par les fermiers

qui

la

craignent

et soumettent, en

conséquence,

leurs troupeaux à une surveillance étroite à la fin de l’été et au début de l’automne. Ce sont surtout des

symptômes

mal définis

qui

sont

exprimés

à

des

degrés

divers :

affaiblissement,

altération du comportement

(anorexie,

maintien à l’écart du groupe,

inquiétude), photophobie

(Mortimer et

Dalton 1981). Il est

possible

que

quelques

animaux

meurent sans

symptômes

au cours de cette

phase.

Chez les

bovins,

une réduction

importante

et tem-

poraire

de la

production

lactée est

parfois

le seul

indice du début de l’intoxication.

Phase d’état

Le

signe caractéristique

est en

général

l’éclosion

des lésions cutanées de

photosensibilisation.

Les résultats des intoxications

expérimentales

(Morti-

mer et

Taylor 1962) indiquent qu’à

ce moment la maladie évolue

depuis déjà

7 à 14

jours.

Les symp- tômes locaux sont limités aux zones blanches et, chez le mouton, non enlainées. L’inflammation oedémateuse débute, en

général,

par les oreilles

pour s’étendre aux

paupières (avec épiphora),

aux

ailes du nez

(avec jetage)

et

progressivement

à

toute la tête. L’atteinte des lèvres rend douloureuse la

prise

de nourriture. La vulve et les mamelles peuvent être

également

touchées, ce

qui

accroît l’inconfort de

l’animal, gêne parfois

la miction et, chez les bovins, pour

qui

il

s’agit

des zones les

plus touchées,

interdit la traite

mécanique.

Sur toutes

ces zones le

prurit es;

intense, la peau est rouge, douloureuse au

toucher,

très chaude à la

palpation

et couverte de sueur, le

poil

est hérissé. Les symp- tômes

généraux

sont dans le

prolongement

de la

phase

de début. De

plus

en

plus

d’animaux sont abattus et

amaigris,

ils cherchent l’ombre et ne se

nourrissent pas. La

température

rectale est le

plus

souvent normale.

Occasionnellement,

on peut observer des tremblements musculaires, de la diar- rhée et, tardivement, de

l’hémoglobinurie.

Évolution

Les

symptômes

cutanés évoluent

rapidement

sous l’effet du grattage : les zones atteintes sont suintantes en 24-48 h

puis

croûteuses. La peau devient dure et se fissure libérant des lambeaux de tissus

qui

se décollent en laissant de

petites

hémor-

ragies sous-jacentes.

En

quelques jours,

la surin-

fection bactérienne

produit

des sécrétions

plus

ou moins

purulentes.

Même si les animaux sont ren-

trés à l’étable, le

prurit persiste

et la cicatrisation est très lente. On peut encore observer un mois

après,

des zones foncées, dures et

épaisses d’hy f perkératose parsemées

de

petites

croûtes

plus

ou moins sèches.

L’évolution de l’état

général dépend

de celle des lésions

hépatiques

et reste un

problème

mal connu

malgré

son caractère crucial. La

capacité

extraordi- naire de

régénération

que manifeste le foie dans certaines conditions

explique probablement

la

gué-

rison

clinique

que l’on observe

fréquemment.

Mais certains animaux restent

fragilisés

et pourront mourir lors de

mammite,

par

exemple,

ou

simple-

ment au cours de la

prochaine

lactation ou gesta- tion. Ces mortalités tardives ne sont pas corrélées à l’état de l’animal au cours de la

phase

d’état (Towers

1978,

Mortimer et Dalton 1981). Des cas

de

neuropathie

tardive

d’origine hépatique

ont été

également

relevés

(Mortimer

et Dalton

1981).

Enfin,

l’atteinte

rénale, qui

reste

inconstante,

peut laisser des

séquelles d’hémoglobinurie chronique

et d’incontinence urinaire.

2.3.2. Lésions

Dans les cas les

plus caractéristiques, l’autopsie

met facilement en évidence le caractère secondaire de la

photosensibilisation.

Celle-ci,

cependant,

n’est pas

systématique :

la

fréquence

des

signes

cutanés dans un troupeau ne

reproduit

pas celle des lésions

hépatiques (Done

et ai

1960).

Ainsi

l’autopsie

peut révéler la cause de pertes de pro-

(10)

duction insidieuses ou de mortalités sans

symptô-

mes.

Évolution chronologique

lors d’intoxications

expé-

rimentales

L’évolution

chronologique

peut, dans ces condi- tions, être

parfaitement

suivie.

Macroscopique-

ment, Mortimer et

Taylor (1962)

décrivent, chez le mouton, la succession suivante

après l’ingestion

de 1

mg/kg :

J2 : oedème des voies biliaires

extrahépatiques qui présentent

de rares ulcères

hémorragiques ;

J4 :

apparition

de lésions similaires en zones bas-

ses de

l’appareil

urinaire

(uretère, vessie), péricho- langite,

rares

foyers

de nécrose

hépatique ;

J7 : encombrement des voies biliaires par des débris muqueux, début de la réaction de fibrose ; J10 : extension du processus occlusif des canaux

biliaires, réparation

des lésions urinaires ; J14 :

imprégnation ictérique

de la carcasse,

ascite, péricardite, augmentation

de la taille du cortex surrénalien, fibrose

hépatite ;

J24 : cirrhose

hépatique.

Microscopiquement,

l’inflammation et l’cedème des canaux et de la vésicule biliaires sont les altérations les

plus significatives (Mortimer

1963, Mortimer et

Standbridge 1968).

La réacion inflam- matoire évolue par endroit vers la nécrose localisée

(2

à

4j) avant

que les processus de

réparation

ne fassent

apparaître

un tissu de

granulation ;

celui-ci

finit par envahir les canaux biliaires et par les oblitérer de

façon

irréversible entre le 7e et le

14e jour.

Les

phénomènes

de thrombose veineuse

qui

s’observent dès le 7e

jour

en zone

hépatique

sont certainement des conditions aggravantes.

Ainsi, après

le retrait du

toxique,

les lésions

s’ag- gravent-elles

encore

pendant

au moins 3 à 4 semai-

nes en s’étendant de

façon centrifuge

autour des

canaux biliaires. Des processus similaires s’obser- vent dans les

parties

basses du tractus urinaire mais leur

réparation

est

complète :

elle ne conduit pas à l’oblitération

(Mortimer

1963).

Dans les conditions naturelles

L’intoxication

expérimentale reproduit

toutes les lésions que l’on peut observer sur le terrain, cepen- dant, lors d’une enzootie, l’étendue et l’intensité des altérations sont extrêmement variables d’un animal à l’autre

(Done

et

al 1960).

L’ictère est

plus

ou moins

prononcé.

Le foie

présente

de

grandes

variations de taille, de couleur et dans la situation des

principales lésions ;

la vésicule biliaire peut être d’un volume normal ou contenir

jusqu’à

350 ml de bile.

Enfin,

les

épanchements (plèvre, péritoine, péricarde)

et les lésions de la vessie et de l’uretère

(oedème, hémorragie)

ainsi que de la surrénale

(hyperplasie corticale)

ne sont

pratique-

ment

jamais

rencontrés. Ces variations se retrou-

vent à l’échelle

microscopique

sur la base de ce

qui

a été décrit au

sujet

de l’intoxication

expérimentale

(Done et al 19601. Dans ces conditions, il est difficile de déterminer

rétrospectivement l’époque

exacte de l’intoxication. Nous avons pu observer des lésions de cirrhose 6 à 7 mois

après

la

guérison

des

plaies

de

photosensibilisation

et à

l’opposé,

la

mort sans

symptômes

d’un animal au cours de la

phase

de début : à

l’autopsie,

il n’avait aucune lésion

caractéristique.

2.3.3. Biochimie

clinique

Avant de décider la conduite à tenir face à une

enzootie, il est

particulièrement important

de révé-

ler les animaux

qui

souffrent

d’importantes

lésions

hépatiques

sans manifester de

photosensibilisa-

tion. La biochimie

sérique

est à ce

sujet irremplaça-

ble

(Caple

et

Vandergraaff

1976, Smith et O’Hara 1978, Mortimer et Dalton 1981, Bézille et

al 1984).

Lors d’intoxication

expérimentale,

les études bio-

chimiques

mettent facilement en évidence la nature

diphasique

de l’intoxication chez le mouton (Done et al 1962, Mortimer 1962, Peters 1963, Peters et Smith 1964, Leaver 1968a, Mortimer et

Standbridge

1969, Peters et Mortimer 1970). L’in- suffisance

hépato-cellulaire primaire

et la

cytolyse s’accompagnent

d’une

hypoalbuminémie

et d’une

augmentation

de la

bilirubinémie,

de la cholestéro- lémie et des activités

sériques

de l’ASAT

(Aspartate

aminotransférase :

E.C.2.6.1.2.),

de l’ALAT

(Alanine

aminotransférase :

E.C.2.6.1.1.),

de l’OCT

(Ornitine carbamyltransférase : E.C.2.1.3.3.),

des PAL

(Phos- phatases

Alcalines :

E.C.3.1.3.1.)

et de la GGT

(Gamma-Glutamyl

Transférase :

E.C.2.3.2.2.).

Cette insuffisance est associée à une

première phase

de réduction du flux biliaire

qui

peut être

objectivée

par la rétention accentuée de la Bromo Sulfo Phta- léine

(BSP)

du 1e! au 7e

jour (Mortimer

1962).

Après

une courte

période

de restauration fonctionnelle

(normalisation temporaire

de la clairance de la BSP ; Mortimer

1962),

la seconde

phase

débute chez le mouton au bout de 10-14

jours

par une modification de la bile

(non pigmentée,

elle

s’appa-

rente au

liquide

d’oedème)

qui précède

de

quelques

heures l’obstruction biliaire

(Mortimer

et

Taylor

1962). Les

signes biochimiques

en sont

classiques :

accumulation

sérique

de bilirubine, cholestérol,

phospholipides,

acides biliaires (i

et j1 globulines

et

augmentation

de l’activité des PAL. Ils

persistent pendant

40

jours

au moins.

Dans les conditions naturelles, on observe les mêmes variations

(Mortimer

et ai 1977a et b, Bézille et

al 1984).

Les activités

enzymatiques

peu- vent être

multipliées

par

plus

de dix.

Malgré

son

manque de

spécificité hépatique

(Braun

efa/1983),

l’ASAT semble

plus

fidèle que l’OCT pour suivre l’évolution du début de la maladie

(Done

et al 1960

et 1962, Mortimer 1962, Smith et O’Hara 1978). La recherche des très forts accroissements de la GGT

Références

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