DITS DE MATHIEU
Si je veux que mon chevreau puisse devenir plus .tard une bonne ç/ièvr~,
apte
à
suivre le troupeau ou même à le diriger, capable d'affronter les défilés et les roches pour chercher les herbes qui lui sant spécifiques, suscep- tible de produire en son temps des chevreaux de bon rapport, je lui rés!!f've une nourriture naturelle qui ne le fera point gros à souhait mais lui donnera vigueur et agilité. Et surtout, je le laisse gambader de bonne heure de murs en buissons, car c'est ainsi que se forment les chèvres rustiques et fécondes.Mais si mes chevreaux sont destinés à la boucherie, défense cfabonl de sortir. lis resteront prisonniers dans leur parc à ruminer betteraues et 1ourr t·eaux producteurs de graisse, car seule la graisse fait prime s11r le marché.
Et si le chevreau, un instant échappé de la prison, est comme un impotent incapable de sauter un mur ou de se dresser sur ses pattes pour brouteti les pousses neuves d'un cognassier, qu'importe ! Tel n!esf pas son destin. On /'élève pour la boucherie.
Reste à savoir ce qui rapporte le plus, pense le paysan.
Le calcul n'est même plus à faire pour les peuples.
Former les enfants à l'obéissance passive, à l'exploitalion et à la guerre, les garder prisonniers dans la pénombre de la classe, à l'abri d'une uérité qui risquerait de les éblouir, les nourrir de devoirs et de leçons qui font.
sur
le comportement etsur fo
pensée comme un imperméable rideau de graisse, c'est le passif d'un bilan.Ouvrir toutes grandes sur la vie et sur les exQériences qu'elle suppose les portes de notre école, aider les enfants à atfr.onter et à escalader les cimes, les laisser partir hardiment à l'avant du troupeau pour de mémora/Jles conquêtes, c'est l'actif du même bilan.
Nous laissons à quelque technicien curieux le soin d'établir, avec ses machines électr<miques le solde d'une telle opération. // se chiffrerait par un tel bénéfice économique, technique et 'humain que les dépenses les plus hardies seraient rentables au centuple et qu'on jugerait sévèrement les hom- mes et les peuples qui savent dépenser des milliards pour rajeunir leurs machines et moderniser leur exploitation et qui laissent s'avilir, s'atrophier ou se pervertir le capital le plus précieu;c :