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P révalence des avortements clandestins au centre hospitalier de Libreville, Gabon.

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Santé publique DOI : 10.3185/pathexo3403 230

P révalence des avortements clandestins au centre hospitalier de Libreville, Gabon.

S. Mayi-Tsonga, T. Diallo, O. Litochenko, M. Methogo & I. Ndombi

Service de gynécologie-obstétrique, Centre hospitalier de Libreville, BP 2758 Libreville, Gabon. E-mail : smayi3@yahoo.fr Manuscrit n° 3403. “Santé publique”. Reçu le 3 mars 2009. Accepté le 7 juillet 2009.

Summary: Prevalence of illegal abortions in Libreville Hospital, Gabon.

The objectives of this study were to determine the prevalence of illegal abortion in Libreville and to describe abortive methods used. It is a cross sectional and descriptive survey carried out at the maternity hospital of Libreville (MHL) during one year, from 1 January, 2008 to 31 December, 2008.

750 abortions were performed during this period and 651 cases were illegal abortions. Prevalence was of 86.7%. The women undergoing illegal abortion were most often pupils (67.1%), with an average age of 22.4±5.3 years old and a mean parity of 1.2±1.50. The average gestational term was of 7.4±1.9 weeks. Misoprostol (63.1%) was the most frequent abortive product used. 2 maternal deaths were notified.

Prevalence of illegal abortions is increasing at the MHL. Up to now, misoprostol is the most frequent abortive product used.

Résumé :

Les objectifs de ce travail étaient de déterminer la prévalence de l’avortement clandestin à Libreville et de décrire les méthodes abortives utilisées. Il s’agit d’une étude transversale et descriptive. Elle a été conduite à la maternité du centre hospitalier de Libreville (CHL) sur une année, du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2008. 750 cas d’avortement ont été traités dont 651 cas étaient provoqués et clandestins. La prévalence des avortements provoqués a été de 86,7 %. Les avortées étaient plus souvent des élèves (67,1 %), âgées en moyenne de 22,4±5,3 ans et ayant une parité moyenne de 1,2 ± 1,50 pare. Le terme gestationnel moyen était de 7,4±1,9 semaines d’aménorrhée. Le produit abortif le plus utilisé était le misoprostol (63,1 %). Il y a eu 2 cas de décès maternels. La prévalence des avortements clandestins est en augmentation au CHL et le misoprostol est à ce jour le produit abortif le plus utilisé.

pregnancy unsafe abortion planning familial misoprostol hospital Gabon Sub Saharan Africa

grossesse avortement clandestin planification familiale misoprostol hôpital Gabon Afrique intertropicale

Introduction

L

’avortement clandestin demeure un problème de santé publique dans les pays en développement qui interdisent cette pratique. Afin d’accélérer la mise en route des objectifs du millénaire de 2015, la Fédération internationale des gyné- cologues-obstétriciens (FIGO) a lancé une initiative mondiale de lutte contre ces avortements dangereux dans 55 pays au monde. Le Gabon est l’un des sept pays africains retenus pour cette initiative. Il a été choisi, d’une part parce que ses indi- cateurs en matière d’avortements provoqués sont accablants (9, 10) et, d’autre part, parce que l’avortement constitue la deuxième cause nationale de décès maternels, même s’il semble exister une légère baisse depuis 2005 (8). Devant l’absence de statistiques nationales récentes, nous avons conduit cette étude à la maternité du centre hospitalier de Libreville (CHL) dans le but de faire l’état des lieux de ce problème mal connu et lourd de conséquences à Libreville. Les objectifs étaient de déterminer la prévalence de l’avortement clandestin et de décrire les méthodes abortives les plus utilisées en 2008.

Patientes et méthodes

L

e service de gynécologie-obstétrique du CHL a été le cadre de cette étude transversale et descriptive. Elle a été conduite sur une année, du 1er janvier au 31 décembre

2008. Nous avons inclus toutes les femmes qui ont consulté au CHL, au cours de cette période, pour des complications liées à un avortement. Les femmes provenaient de Libreville et de sa banlieue. À leur arrivée au CHL, ces patientes ont été prises en charge dans l’unité des urgences gynécologiques.

Un examen clinique complet et un bilan paraclinique (écho- graphie pelvienne, NFS, Groupage rhésus, TP et TCA) ont été réalisés pour chaque patiente. Le diagnostic d’avortement provoqué a été fait à partir de l’interrogatoire et pour les cas inavoués, nous avons recouru aux critères de classification des avortements établis par l’OMS. Lorsque ce diagnostic était posé, nous avons proposé à la patiente de répondre à un questionnaire d’enquête. Celui-ci était anonyme. La confiden- tialité a été garantie à chaque femme. Seules les femmes con- sentantes ont été retenues pour l’étude. Pour chaque patiente, nous avons analysé les caractéristiques sociodémographiques, le terme gestationnel, le produit utilisé et la complication majeure relevée. Pour les patientes arrivées en état de choc et/ou inconscientes, ce questionnaire leur a été proposé le lendemain après la réalisation des soins après avortement. Les enquêteurs étaient les internes en médecine de 6e et 7e année en stage dans notre maternité. Ils avaient été préalablement formés au questionnaire.

Les fiches d’enquêtes étaient recueillies tous les matins. Les données ont été saisies et analysées à partir du logiciel Le Sphinx Plus 2. Les variables quantitatives ont été exprimées

(2)

Bull Soc Pathol Exot, 2009, 102, 4, 230-232 DOI : 10.3185/pathexo3403 231 en moyennes avec écarts-types et les modalités qualitatives

ont été rendues en pourcentage.

Résultats

Prévalence

Il y a eu 747 avortements pris en charge, dont 651 étaient clandestins au CHL en 2008. La prévalence des avortements clandestins est de 87,1 %. Seules 252 patientes (38,7 %) ont accepté de répondre au questionnaire. Elles ont représenté l’échantillon d’étude.

Caractéristiques sociodémographiques

L’âge moyen était de 22,4 ± 5,3 ans, avec des extrêmes de 14 et 39 ans. Ces femmes avaient une gestité moyenne de 2,8 ± 1,9 geste avec des extrêmes de 1 et 11 gestes, alors que la parité moyenne était de 1,2 ± 1,5 pare avec des extrêmes de 0 et 8 pares. Le tableau I présente les caractéristiques socio- démographiques de l’échantillon.

Particularités de l’avortement clandestin

Pour les 241 cas (95,6 %) chez qui l’âge gestationnel était connu avec précision au moment de l’avortement, il était en moyenne de 7,4 ± 1,9 semaines d’aménorrhée (SA), avec des extrêmes de 5 et 14 SA. Seules 3 femmes (1,2 %) n’ont pas avoué le lieu de l’avortement et la qualité de l’avorteur (tableau II). Le misoprostol (63,1 %) était le produit abortif le plus utilisé (tableau III).

Complication majeure

La complication majeure a été l’hémorragie utérine par réten- tion de débris ovulaires (55,9 %). Trente et une de ces patien- tes (12,3 %) ont présenté des signes de choc à l’admission.

Chez 70 patientes (27,8 %), l’avortement était complet avec une vacuité utérine échographique (tableau IV).

Pronostic

Il y a eu 2 cas de décès maternels (0,7 %). Ces décès sont survenus chez des femmes ayant utilisé des décoctions tra- ditionnelles.

Discussion

L

a prévalence des avortements clandestins est en progres- sion à la maternité du CHL. Ce résultat confirme les tendances nationales relevées par l’enquête démographique sanitaire de 2000 (2). D’après cette enquête, la prévalence était de 16 % en 2001, 18 % en 2002 et 28,8 % en 2004. Certes,

Tableau I.

Caractéristiques sociodémographiques de l’échantillon.

Demographic socio characteristics of the sample.

Tableau II.

Répartition des particularités de l’avortement.

Distribution of the characteristics of abortion.

effectifs % âge gestationnel (SA)

< 6 43 17,1

6-8 85 33,7

8-10 76 30,2

10-12 32 12,7

≥ 12 5 2,0

non réponse 11 4,4

total 252 100

lieu de l’avortement

domicile de la femme 201 79,8

cabinet de soins infirmiers 36 14,3

clinique privé 6 2,4

domicile de l’avorteur 3 1,2

domicile de la femme, puis cabinet de soins infirmiers 3 1,2

non avoué 3 1,2

total 252 100

qualité de l’avorteur

auto avortement 176 69,8

personnel para médical 33 13,1

auto avortement, puis personnel paramédical 28 11,1

médecin 10 4,0

personnel non médical 2 0,8

non avoué 3 1,2

total 252 100

effectifs % tranches d’âge (ans)

<19 66 26,2

19-25 106 42,1

25-31 62 24,6

31-37 12 4,8

>37 6 2,4

total 252 100

gestité (n)

<2 71 28,2

2-5 132 52,4

5-8 41 16,3

8-11 7 2,8

>11 1 0,4

total 252 100

parité (n)

<2 167 66,3

2-5 78 31

5-8 6 2,4

8-11 10,4 0,4

>11 0 0

total 252 100

statut social

élève 169 67,1

sans emploi 66 26,2

ménagère/commerçante 9 3,6

fonctionnaire 8 3,2

total 252 100

statut conjugal

célibataire 183 72,6

concubine 65 25,8

mariée 4 1,6

total 252 100

Tableau III.

Répartition des patientes selon le produit abortif utilisé.

Distribution of the patients according to abortive products used.

produits abortifs effectifs %

misoprostol 159 63,1

décoctions traditionnelles 36 14,3

curetage à la curette 34 13,5

misoprostol, puis curetage à la curette 7 2,8

sonde intra cervicale 6 2,4

ocytocine injectable 5 2,0

autres 3 1,2

non avoué 2 0,8

total 252 100

Tableau IV.

Répartition des patientes selon la complication majeure relevée.

Distribution of the patients according to major complication.

complications effectifs %

hémorragie 141 55,9

abondante et sans signe de choc 97 38,5

abondante avec signes de choc 31 12,3

minime 13 5,1

algies pelviennes /avortement complet 70 27,8

endométrite 27 10,7

traumatique 10 4

perforation intestinale 7 2,8

perforation utérine 2 0,8

déchirure cervicale 1 0,4

autres 4 1,6

état de mal convulsif 2 0,8

échec de l’avortement (grossesse évolutive) 1 0,4 échec de l’avortement (grossesse ectopique) 1 0,4

total 252 100

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Santé publique DOI : 10.3185/pathexo3403 232

S. Mayi-Tsonga, T. Diallo, O. Litochenko et al.

notre étude est hospitalière et ne prétend pas être représenta- tive de la population générale gabonaise. Cependant, sachant que 60 % de la population habite à Libreville la capitale, nos résultats pourraient refléter ceux d’une étude en population.

Par ailleurs, dans nos contextes africains, il est quasiment impossible de réaliser une étude en population sur ce pro- blème encore tabou. Seule une extrapolation à partir des cas hospitaliers peut nous donner un reflet approximatif de cette pratique. D’après une étude (10) réalisée dans le même service en 1991, la prévalence était de 14 % et les auteurs estimaient qu’elle était sous-évaluée. Ce constat est fait par plusieurs études africaines (1, 11) qui retrouvent des taux variant de 36 % à 69 %. La sous-déclaration des cas est fréquente en milieu africain (7), du fait des risques de stigmatisation. Nos résultats, aussi parcellaires qu’ils puissent être, constituent au moins un supplément scientifique indispensable à l’initiative mondiale de la FIGO.

La tranche d’âge la plus exposée est celle des 19-25 ans. Elle est identique à celle retrouvée par NLOME N (10) parmi les 135 cas d’avortements provoqués enregistrés au CHL. Plus géné- ralement, c’est la tranche d’âge la plus relevée par les études africaines (1, 3-6, 12). Mais l’avortement a concerné toutes les tranches d’âge entre 14 et 39 ans, soit les femmes les plus acti- ves sexuellement. Ce constat avait été fait par BARRÈRE (2) en 2000. Nos patientes ont une gestité moyenne plus élevée que celles de NLOME N (10). Les grossesses répétées seraient un facteur d’exposition à l’avortement clandestin. Ceci refléterait l’ampleur du problème des grossesses non désirées dans notre pays. Les femmes recourent à l’avortement comme moyen d’espacement des grossesses à défaut d’user d’une méthode contraceptive moderne. Afin de prévenir ces grossesses non désirées et souvent vouées à l’avortement clandestin, il est souhaitable de promouvoir les méthodes de contraception dans notre pays.

Au CHL, il semble que les femmes aient changé leurs habitu- des abortives. Le misoprostol (Cytotec®) a supplanté l’usage du permanganate de potassium (10) qui était le produit le plus utilisé en 1991. L’usage du misoprostol à des fins abortives n’est relevé dans aucune des séries africaines susmentionnées alors qu’à Libreville, et depuis 2005 (9, 11), il est très répandu. Sa vente en pharmacie est insuffisamment encadrée, ce qui favo- rise sa distribution libre dans les marchés publics, les lycées et les rues de Libreville. C’est cette facilité d’achat qui pourrait expliquer la fréquence élevée de l’auto-avortement, pratiqué à domicile et à l’aide du misoprostol. Les complications immé- diates sont les mêmes que celles de l’étude de NLOME N

(10) et plus généralement que celles des autres auteurs africains (1, 3-6, 12). Il faut cependant noter que le misoprostol appa- raît avantageux en termes de morbi-mortalité, puisqu’aucun décès n’est survenu chez les femmes qui l’ont utilisé. De plus, toutes les patientes ayant eu un avortement complet avaient utilisé ce produit. Les infections et les lésions traumatiques sont également en baisse dans notre service comparativement aux résultats de NLOME N (10) qui avait retrouvé 30 % d’infection et 26 % de lésions traumatiques.

Conclusion

A

u CHL, la prévalence des avortements clandestins est en nette augmentation. Elle est passée de 14 % en 1991 à 87,1 % en 2008. Le misoprostol est le produit abortif le plus utilisé et semble moins délétère que le permanganate de potassium dont l’usage était prédominant en 1991. Le profil épidémiologique de l’avortée est une femme âgée de 19 à 25 ans, multigeste, paucipare, célibataire et élève. Les complica- tions infectieuses et traumatiques sont en baisse.

Afin de lutter contre le recours à cette pratique interdite au Gabon, il nous paraît nécessaire d’accroitre les campagnes de sensibilisation à l’utilisation des méthodes contraceptives modernes.

Références bibliographiques

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