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Article pp.49-64 du Vol.21 n°1 (2001)

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SCIENCES DES ALIMENTS, 21(2001) 49-64

Corrélation entre l’analyse sensorielle du boulanger et la mesure de la couleur

Christophe DERAIL *, Myriam REVEILLERE

SUMMARY Correlation between sensorial analysis and color measurement.

Colour measurement is becoming increasingly important in quality control in the food industry and the technology is making it simpler to perform. Commercialy, it is very important to measure this parameter. But today, the colour is appre- ciated by sensorial analysis by the bakers without a proper background and wi- thout reference to the parameters of the colours. We propose a method to measure the colour and to compare its parameters to the results of sensory analysis by the bakers. The results obtained allow us to propose a reliable ex- perimental method of the measure of the colour. A good relation between the sensory analysis of the bakers and the results of the colour measurement has been found. One of the principal aim of this work is to control better the measu- re of the colour in order to use this parameter in the choice of the flour for a gi- ven application.

Key-words:colour, bread, flour, sensory analysis, colorimeter.

RÉSUMÉ

Ces dernières années les consommateurs semblent revenir vers des pains plus traditionnels dont la couleur de la mie tend davantage vers le « crème » en s’éloignant du « blanc ». Commercialement, il est donc important de pouvoir mesurer ce paramètre. L’analyse de la couleur par le boulanger est une expé- rience difficile si la méthode n’est pas stricte. En effet, malgré un œil averti, les écarts peuvent être importants si on ne prête pas attention à l’environnement au cours de l’expérience. De plus, l’œil peut avoir plus de difficulté à donner un nom précis à une couleur alors qu’il sera très pertinent dans la perception de la différence entre deux couleurs très proches. Le travail que nous avons réalisé consiste à corréler l’analyse sensorielle du boulanger à une mesure instrumen-

Groupe de recherche en agro-industrie sur les produits, les procédés et leur environnement, École supé- rieure d’agriculture d’Angers, 49007 Angers, France.

* Correspondance et nouvelle adresse.

Laboratoire de physique des matériaux industriels, Université de Pau et des Pays de l’Adour, 64013 Pau, France.

christophe.derail@univ-pau.fr

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tale de la couleur. Une méthode colorimétrique par réflexion nous permet d’ob- tenir des valeurs de couleur à chaque étape de fabrication du pain. Les résultats nous amènent à proposer une méthode de mesure instrumentale et à corréler sur un graphique les résultats de l’analyse sensorielle avec ceux de cette me- sure. Les tests statistiques nous prouvent qu’il y a des différences sur la mesure instrumentale lorsque le boulanger détecte un changement de couleur. Ainsi, par la mesure de couleur, nous avons pu classer les différentes pâtes de farines testées. L’objectif de ce travail est de mieux maîtriser la mesure objective de la couleur afin de pouvoir faire apparaître à terme ce paramètre important d’un point de vue commercial dans le cahier des charges des farines.

Mots clés :couleur, pain, farine, analyse sensorielle, colorimètre.

1 - INTRODUCTION

En partant du principe que la couleur n’existe pas (GAMAIN, 1996), il semble bien délicat de répondre favorablement au désir grandissant des industriels à reproduire de mieux en mieux à l’identique tous les produits qu’ils fabriquent.

Pourtant, ces dernières années, sont apparus des appareils très simples dans leur utilisation permettant à l’industriel d’avoir un outil de contrôle de la couleur de son produit. Dans certains cas particuliers la couleur peut même devenir un des outils d’évaluation du procédé de fabrication (ALLACHE, 1998). Ainsi, l’utilisa- tion de la colorimétrie se répand un peu plus chaque année. Si globalement on trouve encore peu de publications dédiées exclusivement à la mesure de la cou- leur, on s’aperçoit que l’outil « analyseur de couleur » est de plus en plus souvent cité. Le but est de produire des paramètres intéressants pour prendre une déci- sion finale : on peut citer des exemples plus particulièrement dans le milieu de la viande ou du poisson (MELCIONet al., 1995, BOULARD, 1997, PARADIS, 1996) mais aussi pour le contrôle de la couleur des fruits (FERRÉet al., 1987, SINGHAet al., 1991, PIRACCI, 1994, SINGHAet al., 1994, BAUGHERet al., 1995) et bien évidem- ment dans des domaines non alimentaires (STEENet al., 1999).

Au cours de ces dernières années, on remarque une évolution du comporte- ment du consommateur vis-à-vis de la couleur du pain avec un retour vers des mies plus « crèmes ». Ainsi, au moulin, pour le boulanger testant les farines et les mélanges, la couleur est un paramètre important. En atelier de panification, au cours de l’analyse d’une panification, la couleur est jugée à la sortie du four sur la mie cuite. Le paramètre couleur est donc important et mérite d’être étudié afin de proposer une méthode pour le quantifier.

Actuellement, dans les fiches d’évaluation de la panification, la couleur est estimée par analyse sensorielle du boulanger d’essais. Le lien entre la mesure et cette analyse sensorielle du boulanger doit donc être mis en évidence. En effet, notre objectif principal est de supprimer cette analyse pour la remplacer par une mesure objective et répétable. À ce titre, il est nécessaire de montrer les corré- lations existant entre l’analyse sensorielle du boulanger et la mesure instrumen- tale, comme l’ont déjà proposé SINGHAet al. (1991) pour la couleur de fruits frais ou BENOMARet al. (1997) pour la texture de pains boulots. Si on évoque la mise en place d’une grille d’évaluation des couleurs des mies cuites, il est donc

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Corrélation entre analyse sensorielle et mesure de couleur 51

nécessaire de mettre en place une équivalence entre les résultats obtenus par l’œil du boulanger et la mesure instrumentale de la couleur.

Le travail qui est présenté a été réalisé en deux phases bien distinctes : une première phase d’analyse de la couleur des pâtes réalisées à partir de farines de variétés pures des blés de la campagne de récolte 1999 sur lesquelles nous avons mis au point et affiné la technique de mesure puis, au cours d’une deuxième étape, nous proposons de corréler la mesure de la couleur à l’analyse sensorielle du boulanger en travaillant sur les pâtes réalisées à partir de 12 mélanges de farines commerciales proposés dans le commerce par notre parte- naire industriel : la Coopérative Agricole Vienne Anjou Loire. Ainsi, nous avons voulu savoir si la mesure objective de la couleur par un colorimètre permettait d’obtenir des classements similaires à ceux qui sont obtenus par les boulangers et qui font actuellement référence. Nous souhaitons par cette étude montrer que la corrélation entre l’analyse sensorielle du boulanger et la mesure de couleur existe et est cohérente et que le colorimètre peut éviter les dispersions inhéren- tes à l’analyse sensorielle du boulanger qui se situe loin des méthodes officielles faisant référence dans le domaine de l’analyse sensorielle.

2 - MATÉRIELS ET MÉTHODES

2.1 Les farines

2.1.1 Les variétés pures

Les pâtes de farines que nous avons testées dans le but de mettre au point le protocole de la mesure sont issues des variétés pures consignées dans le tableau 1. Chaque pâte testée correspond à une variété issue d’un même lot.

Nous avions plusieurs lots par variété venant de lieux de récolte différents. Cette palette importante nous a permis de mettre en place différents protocoles de mesure afin de choisir le plus précis. Nous avons aussi classé ces farines suivant la couleur qu’elles donnent à la pâte.

2.1.2 Les farines commerciales

Nous avons testé 12 pâtes réalisées à partir de la même méthodologie de fabrication mais à partir de mélanges de farines commerciales. Le tableau 2 pré- sente les 12 mélanges testés pour cette étude, et pour chaque semaine d’expé- rimentation, les essais retenus. Cette étape s’est déroulée sur 3 semaines d’expérimentation.

2.1.3 Fabrication des pâtes et cuisson du pain La technique de fabrication est toujours la même : 1 kg de farine ;

0,620 kg d’eau ; 0,020 kg de levure ; 0,022 kg de sel.

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Ce mélange est incorporé dans un pétrin (labo 25, société VMI). Le pétrissage dure 6 min en première vitesse (40 tours/min) et 15 min en seconde vitesse

Tableau 1

Variétés testées avec le nombre de lots pour chacune des variétés Table 1

Tested varieties and the number of groups by variety

Variétés Nombre de lots

Mercury 4

Récital 7

Cracklin 2

Cézanne 9

Sisley 2

Soisson 17

Isengrain 9

Meunier 34

Crousty 2

Tableau 2

Mélanges de farines commerciales testés sur les trois semaines Table 2

Commercial flours blends tested during three weeks

Mélange farines

commerciales Semaine 1 Semaine 2 Semaine 3

A Oui Non Non

B Oui Non Non

C Oui Non Non

D Oui Non Non

E Oui Oui Oui

F Oui Non Oui

G Oui Non Oui

H Oui Non Oui

I Oui Non Oui

J Oui Oui Oui

K Oui Oui Oui

L Non Oui Oui

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Corrélation entre analyse sensorielle et mesure de couleur 53

(80 tours/min). On fait un pesage de 0,3 kg, une détente de 20 min, un façonnage en bâtard, un apprêt de 2 h à 26 °C et une cuisson de 22 min à 230 °C.

Tous ces pains sont réalisés par deux boulangers professionnels qui feront aussi l’analyse globale du pain et notamment l’analyse sensorielle de la couleur.

La fiche CNERNA (Centre national d’études et de recherche sur la nutrition et l’alimentation), similaire à la fiche BIPEA (Bureau interprofessionnel d’études analytiques) (LEGIGAN, 1997) concernant l’estimation de la couleur de la mie, a été choisie dans le cadre de cette étude car elle est couramment utilisée par les deux boulangers.

2.2 Dispositif expérimental de mesure de la couleur

Nous avons utilisé un colorimètre CR-300 de chez Minolta. L’illuminant choisi est le D65 qui correspond à la lumière du jour, ultra-violet compris. Le flash est envoyé sur le produit à analyser à travers une ouverture de 8 mm de diamètre en verre optique. L’illumination est diffuse, la lecture à 0° et la composante spécu- laire est incluse. Cet appareil permet d’avoir accès à toutes les représentations de la couleur par trois paramètres (La*b*, LCh, xyz…) obtenus à partir des valeurs tristimulus X, Y, et Z mesurées par le colorimètre sur la base des fonc- tions de mélanges des couleurs (CIE, 1978). En agroalimentaire, ce sont les para- mètres La*b* qui sont le plus couramment utilisés mais des relations existent entre tous les paramètres (WYSZECKIet al., 1982).

La fonction « multi-measure » a été activée permettant d’envoyer trois flash par mesure et répondant par la moyenne des trois mesures. L’étalonnage a été réalisé à chaque nouvelle journée de mesure sur une plaque blanche fournie par Minolta et dont les composantes en illuminant D65 sont :

Y = 93,7 x = 0,3156 y = 0,3320

Nous avons suivi la couleur à tous les stades de fabrication de la mie : de la sortie du pétrin jusqu’à la mie cuite en passant par la mie après fermentation.

Suivant les étapes, la mise en place de la mesure est différente entraînant quatre protocoles de mesure différents.

2.2.1 Mesure sur la pâte après pétrissage - protocole 1

Nous prélevons un échantillon de pâte dans le pétrin et nous laminons celui- ci sur une table de laminage. Le colorimètre est soutenu par un support pour évi- ter les mouvements au cours de la mesure. Il est placé de telle manière que la pâte recouvre l’orifice du colorimètre. Entre chaque point de mesure, la tête de mesure est nettoyée avec un papier doux.

2.2.2 Mesure sur la mie cuite - protocole 2

Nous découpons quatre tranches de pain de 9 cm de large à l’aide d’une boîte de découpe. La position de chaque tranche est repérée afin de comparer, par la suite, les tranches ayant la même place. À l’aide d’un emporte pièce de 40 mm de diamètre, sur chacune des tranches, nous prélevons un disque sur lequel sera réalisée la mesure. Afin d’améliorer celle-ci, nous plaçons le disque de pâte entre deux plaques de verre. Nous comprimons la pâte de telle manière que la hauteur du cylindre soit de 1,5 cm. Ce montage est alors positionné sous la tête de mesure, au contact de la plaque de verre. Nous choisissons de prendre deux mesures par face sur deux tranches identifiées.

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Tableau 3

Paramètres de la couleur obtenus sur les pâtes fabriquées à partir des farines de variétés pures accompagnés des coefficients de variation (cv)

Table 3

Examples of colour parameters values given by the apparatus with standard deviation in percent (pure flour dough)

L Cv (%) a* Cv (%) b* Cv (%)

Mercury 76,74 1,53 – 0,76 – 33,74 13,22 13,63

Récital 73,43 1,72 – 0,70 – 18,74 11,79 5,71

Cracklin 73,18 0,60 – 0,57 – 181,87 13,71 3,71

Cézanne 72,18 4,60 – 0,87 – 27,20 13,74 8,14

Sisley 77,45 1,20 – 1,70 – 6,77 16,33 4,82

Soisson 74,71 2,09 – 1,18 – 13,29 14,43 4,55

Isengrain 73,60 2,23 – 1,10 – 11,70 14,60 4,81

Meunier 73,12 1,84 – 0,88 – 23,97 13,62 4,50

Crousty 75,28 0,25 – 1,11 – 1,92 12,56 1,46

X Cv (%) Y Cv (%) Z Cv (%)

Mercury 48,35 3,88 51,16 3,76 43,03 6,01

Récital 43,39 4,34 45,90 4,26 39,37 3,65

Cracklin 43,05 2,26 45,49 1,45 37,46 0,53

Cézanne 41,69 10,71 44,16 10,64 36,17 9,75

Sisley 49,11 2,90 52,33 2,97 41,35 1,70

Soisson 45,14 5,19 47,93 5,22 39,04 5,57

Isengrain 43,52 5,55 46,18 5,56 37,33 5,43

Meunier 42,89 4,33 45,44 4,40 37,45 4,21

Crousty 46,02 0,68 48,83 0,66 41,43 1,11

C Cv (%) h Cv (%) x Cv (%) y Cv (%)

Mercury 13,24 13,67 93,26 0,85 0,3393 1,03 0,3590 1,19

Récital 11,81 5,64 93,47 0,84 0,3372 0,42 0,3567 0,33

Cracklin 13,75 3,38 92,53 4,75 0,3418 0,82 0,3612 0,01

Cézanne 13,77 8,09 93,68 1,16 0,3415 0,48 0,3618 0,47

Sisley 16,41 4,84 95,99 0,10 0,3439 0,33 0,3664 0,40

Soisson 14,48 4,55 94,70 0,64 0,3417 0,39 0,3628 0,41

Isengrain 14,64 4,78 94,37 0,58 0,3426 0,38 0,3635 0,37

Meunier 13,65 5,10 94,10 2,20 0,3410 0,30 0,3612 0,35

Crousty 12,60 1,47 95,07 0,05 0,3377 0,12 0,3583 0,13

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Corrélation entre analyse sensorielle et mesure de couleur 55

2.2.3 Mesure sur la pâte après fermentation - protocole 3 et 4

Afin de savoir si des variations de couleur ont lieu à partir de cette phase de fermentation, nous avons mesuré la couleur en posant directement la tête de mesure du colorimètre sur les pâtons (protocole 3) ou à l’intérieur des pâtons après avoir découpé ces derniers en deux parties égales (protocole 4). Dans ce dernier protocole, après avoir vérifié l’égalité des mesures sur les deux parties, nous prenons la moyenne de la totalité des mesures.

2.3 Analyse sensorielle des pains

Il s’agit pour les boulangers de classer les mies cuites sur une échelle allant de « blanc + » à « très crème ». Dans cette étude, les boulangers ont l’expérience de l’échelle choisie, plus précise que celle généralement constatée qui consiste à noter en excès ou en insuffisance la couleur de la mie par rapport à la couleur

« crème ». Ici, on découpe l’échelle des couleurs avec huit échelons possibles.

Deux étapes ont permis d’aboutir à un jugement fiable des boulangers : une première étape, classiquement utilisée en fournil, pour laquelle le boulanger donne une couleur sans référence quotidienne. Au cours de la deuxième étape, on propose une référence adoptée avec les deux boulangers puis on classe tous les pains de la fournée par rapport à celle-ci. Nous montrons dans un premier temps que sans référence les boulangers peuvent avoir des jugements erronés (différence importante de couleurs entre les deux boulangers).

Nous avons réalisé une même expérience plusieurs fois afin d’estimer la répétabilité des boulangers inter et intra boulanger.

2.4 Analyse statistique

Nous avons réalisé des tests de comparaison de moyenne 2 à 2 avec le test de Student au risque α de 5 %. Lorsque les conditions initiales à ce test (norma- lité, égalité des variances) n’étaient pas respectées, nous avons utilisé le test de Mann et Withney. Tous ces tests statistiques ont été effectués avec le logiciel Statbox®.

3 - RÉSULTATS - DISCUSSION

3.1 La mesure de la couleur et le choix des paramètres (travail sur les farines pures)

En suivant les protocoles développés ci-dessus, nous avons cherché celui qui permettait d’avoir le coefficient de variation le plus faible.

Le tableau 3, dans lequel sont reportées les moyennes des lots pour chaque variété, permet de constater les variations de la plupart des paramètres colori- métriques. Le nombre important de mesures nous a permis de définir les para- mètres les plus adaptés à notre problème. On constate que les paramètres x et y sont ceux qui permettent d’avoir les coefficients de variations les plus faibles et ils seront donc choisis. Nous pouvons d’ailleurs préciser à ce propos que ces

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paramètres ne sont pas les meilleurs pour la lecture de la couleur (variation non linéaire en fonction des couleurs contrairement à a* et b* (CIE, 1978) facilitant l’imagination de la couleur par des chiffres) mais il ne s’agit pas ici d’avoir des paramètres lisibles mais plutôt des paramètres fiables. D’autre part, la figure 1 montre que chaque protocole de mesure permet d’avoir un écart similaire sur les paramètres x et y.

Ainsi, nous avons choisi de poursuivre par la mesure par la mie cuite (proto- cole 4) car elle est plus facile à mettre en œuvre tout en permettant une aussi bonne fiabilité sur les résultats par rapport aux autres protocoles.

Le paramètre a*, dans cette étude, a été jugé totalement impossible à fiabili- ser. Le coefficient de variation de ce paramètre est en effet très important. Ceci est expliqué par le fait que la couleur que nous mesurons est très proche de la couleur blanche, zone dans laquelle ce paramètre semble être peu pertinent.

3.2 Classement des farines pures à partir des mesures sur la mie cuite

À partir des résultats obtenus sur les pâtes réalisées en utilisant des lots de farines pures, nous avons classé celles ci en fonction de la couleur qu’elles apportent à la pâte. La figure 2, qui représente pour chaque variété la moyenne du lot le plus blanc et la moyenne du lot le plus crème, permet de constater qu’il est difficile d’avoir des différenciations évidentes entre toutes les variétés. Ceci semble logique puisque chaque variété n’apporte pas forcément une spécificité

Figure 1

Comparaison des écarts entre les protocoles de mesures pour x () et y () (représentation de moyenne ± écart type).

Les protocoles sont numérotés de 1 à 4

Comparison of standard deviations between methods of measurements for x () and y () (each point represents mean ± standard deviation).

Methods of measurements are noted 1 to 4

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Corrélation entre analyse sensorielle et mesure de couleur 57

sur la couleur. En revanche, on peut constater que pour avoir une mie très crème on choisira plutôt la variété Sisley et pour avoir une mie plutôt blanche on choi- sira Récital.

3.3 Suivi de la couleur au cours de la fabrication (travail sur les farines commerciales)

Le tableau 4 reprend les valeurs des mesures sur les farines commerciales pour les différents protocoles de mesure (de 1 à 4). La figure 3 montre que quelle que soit la farine et quel que soit le stade de mesure au cours de la fabrication, nous avons des variations identiques d’une farine à l’autre. C’est-à-dire que l’on est capable de donner une indication quantitative de la couleur finale du pain dès la fin du pétrissage.

On s’aperçoit sur cette figure qu’une pâte après pétrissage ayant une faible valeur du paramètre y donnera une mie cuite présentant une valeur plus forte ou égale, mais le classement établi entre les farines est le même quel que soit le stade de mesure.

Le classement des pâtes par un paramètre de couleur ne semble donc pas affecté par l’étape de la mesure.

3.4 L’analyse sensorielle

Le but principal est de construire une grille de corrélation entre l’analyse sen- sorielle et la mesure instrumentale de la couleur. Ainsi, afin de mettre en place une corrélation fiable, nous avons travaillé sur la séance d’analyse sensorielle des boulangers dans le but d’évaluer l’incidence du mode de présentation des pains sur le classement final par la couleur.

Figure 2

Classement des farines suivant les valeurs maximales et minimales de y obtenues sur la mie cuite

Ranking of flours according to minimum and maximum y values obtained to on the crumb

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3.4.1 Constat

Nous avons mis en évidence des écarts importants de jugement, et donc des classements différents des pâtes de farines, si les boulangers ne respectent pas quelques règles simples. Pour exemple, avec les farines pures, nous avons réa- lisé seize pains différents à classer par les boulangers par une analyse senso- rielle en utilisant leur démarche actuelle. Le tableau 5 montre les écarts entre ces deux boulangers et les écarts d’un même boulanger lorsque la dégustation est réalisée à deux instants différents et en utilisant des techniques de classement différentes. Dans ce tableau, les classements ont été réalisés soit en classant les pains 4 par 4, soit en classant tous les pains disponibles. Nous avons ici seize pains à notre disposition, différents de ceux utilisés pour notre étude, afin de couvrir toute la gamme classique des couleurs en boulangerie. On peut remar- quer que peu de pains ont été classés de manière identique et que seulement six pains sont classés dans la même couleur par le même boulanger mais en utili-

Tableau 4

Comparaison des coefficients de variation suivant le protocole de la mesure et suivant le paramètre colorimétrique choisi

Table 4

Comparison of standard deviation in percent between the experimentation and the colour parameter chosen

x Moyenne Écart type Cv (%)

protocole 1 0,3408 0,0016 0,4659

protocole 4 0,3373 0,0013 0,3963

protocole 2 0,3400 0,0012 0,3434

protocole 3 0,3360 0,0014 0,4117

y Moyenne Écart type Cv (%)

protocole 1 0,3580 0,0014 0,3838

protocole 4 0,3583 0,0013 0,3587

protocole 2 0,3588 0,0011 0,3025

protocole 3 0,3546 0,0011 0,3224

b* Moyenne Écart type Cv (%)

protocole 1 14,06 0,70 4,85

protocole 4 11,28 0,53 4,69

protocole 2 14,66 0,58 3,99

protocole 3 12,28 0,60 4,83

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Corrélation entre analyse sensorielle et mesure de couleur 59

Figure 3

Évolution de la couleur de chaque pain suivant l’étape de fabrication : mie cuite ; : pâte fermentée extérieure ; : pâte fermentée intérieure ; : pâte fraîche

Colour changes during breadmaking process

: bread crumb;: fermented dough (exterior); : fermented dough (interior); : fresh dough

Tableau 5

Classement de 16 pains quelconque par les deux boulangers (en gras les classements identiques)

Table 5

Colour ranking of 16 breads by the two bakers

Pain

Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 2

Comparaison 4 à 4 Comparaison sur l’ensemble

Comparaison sur l’ensemble

1 Crème Crème Crème

2 Tendance crème Tendance crème Crème

3 Grise Tendance grise Tendance grise

4 Très grise Grise Grise

5 Tendance grise Tendance grise Tendance crème 6 Tendance grise Tendance grise Tendance crème 7 Tendance grise Tendance crème Tendance crème 8 Tendance grise Tendance grise Tendance crème

9 Crème Tendance grise Crème

10 Grise Grise Tendance grise

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sant deux techniques différentes. Nous rappelons que nous avons choisi de classer les pains de « blanc + » à « très crème » avec plusieurs étapes d’évolu- tion qui sont : blanc +, blanc, tendance grise, grise, très grise, tendance crème, crème et très crème.

Même si les écarts peuvent être considérés comme peu importants (car le plus souvent une seule étape de couleur sépare le classement par le même bou- langer), cette expérience nous a amené à mettre en place une méthode plus fia- ble et à respecter par les deux boulangers.

3.4.2 Fiabilisation

Nous proposons de classer les pains par ordre croissant de la couleur (de blanc + à très crème) en les présentant 4 par 4 aux boulangers. Le boulanger doit prendre les quatre pains, les positionner devant lui par ordre croissant de couleur et donner une couleur en se référant à ses vis-à-vis. Les tableaux 6 et 7 montrent que les classements entre boulangers sont similaires et que les pains classés dif- féremment ne le sont que pour des mêmes familles de couleurs. Dans ces tableaux, le boulanger 2 est considéré comme la référence et donne un classe- ment des pains du blanc + au très crème sans préciser la couleur alors que le boulanger 1 donne des noms de couleur à chaque pain. On peut alors comparer les classements suivant la technique et s’apercevoir qu’en utilisant la comparai- son des pains dans leur ensemble, on permet une fiabilisation du classement entre les deux boulangers.

3.5 Relations entre les paramètres instrumentaux et l’analyse sensorielle

Le classement des farines par la mesure de la couleur doit être le même que celui obtenu par les boulangers. Ainsi, nous avons porté sur la figure 4 la varia-

11 Crème Tendance crème Tendance crème

12 Tendance crème Tendance crème Tendance crème

13 Tendance grise Tendance crème Crème

14 Crème Tendance crème Crème

15 Bien crème Crème Bien crème

16 Bien crème Crème Bien crème

Tableau 5 (suite)

Classement de 16 pains quelconque par les deux boulangers (en gras les classements identiques)

Table 5 (suite)

Colour ranking of 16 breads by the two bakers

Pain

Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 2

Comparaison 4 à 4 Comparaison sur l’ensemble

Comparaison sur l’ensemble Table 5 (continued)

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Corrélation entre analyse sensorielle et mesure de couleur 61

Tableau 6

Comparaison des classements de 12 pains par les deux boulangers utilisant la même technique (résultats semaine 1)

Table 6

Comparison of colour ranking of the 12 breads tested by the two bakers using the same method (results of week 1)

Semaine 1 Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 2 Mélanges

farines commerciales

Comparaison 4 à 4 avant cuisson

Comparaison 4 à 4 après cuisson

Classement sur l’ensemble

Comparaison sur l’ensemble après cuisson

A Crème Crème Très crème 8

B Blanc Blanc Crème 3

C Tendance crème Tendance crème Crème 4

D Crème Crème + Très crème 5

E Très crème Très crème Très crème 10

F Crème Crème Très crème 9

G Blanc Tendance Blanc Blanc 2

H Blanc Blanc Blanc + 1

I Très Crème + Très crème Très crème 11

J Très crème Très crème Très crème 7

K Tendance crème Très crème Très crème 6

Tableau 7

Comparaison des classements de 8 pains par deux boulangers utilisant la même technique (résultats semaine 3)

Table 7

Comparison of colour ranking of the 8 breads tested by the two bakers using the same method (results of week 3)

Semaine 3 Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 2 Mélanges

farines commerciales

Comparaison 4 à 4 après pétrissage

Comparaison 4 à 4 après cuisson

Classement sur l’ensemble

après cuisson

Classement sur l’ensemble

après cuisson

E Très crème Très crème 8 7

F Crème Crème 3 3

G Blanc Blanc 1 2

H Blanc Blanc + 2 1

I Très Crème + Très crème/C + 7 8

J Crème Crème – 4 5

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tion des variables colorimétriques y et b* pour chaque pain (A à L) ainsi que le classement, traduit en terme de couleur, du boulanger 2.

Nous constatons que la croissance des paramètres y et b* correspond à une classification des pains de la couleur blanche à la couleur très crème. De plus, l’analyse statistique nous indique que chaque point est systématiquement diffé- rent de son voisin quand on change de famille de couleur (entre blanc et crème par exemple). Nous montrons donc ici la relation directe entre la mesure de la couleur et l’analyse sensorielle du boulanger.

K Crème –

/Td crème Crème 5 4

L Crème/TC Très crème 6 6

Figure 4

Évolution des paramètres b* et y suivant les pains (couleur prise sur la mie après cuisson)

B : blanc ; TC : tendance crème ; C : crème et TRC : très crème ; : valeur de b ; : valeur de y b* and y values for the different breads. Parameters measured on final crumb

B: white; TC: light cream colour; C: cream; TRC: strong cream colour; : b value; : y value Tableau 7 (suite)

Comparaison des classements de 8 pains par deux boulangers utilisant la même technique (résultats semaine 3)

Table 7

Comparison of colour ranking of the 8 breads tested by the two bakers using the same method (results of week 3)

Semaine 3 Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 1 Boulanger 2 Mélanges

farines commerciales

Comparaison 4 à 4 après pétrissage

Comparaison 4 à 4 après cuisson

Classement sur l’ensemble

après cuisson

Classement sur l’ensemble

après cuisson Table 7 (continued)

(15)

Cette dernière figure montre que le protocole de mesure mis en place permet un classement identique à celui du boulanger. Ainsi, la fiabilité d’une mesure ins- trumentale étant connue et objective en regard de l’analyse sensorielle du bou- langer, cette corrélation permet de penser à une modernisation possible de l’évaluation de la couleur au cours de l’essai de panification. Enfin, Il est impor- tant de noter que cette mesure est simple et rapide et n’apporte donc pas de contraintes supplémentaires au boulanger durant le dépouillement des essais.

4 - CONCLUSION

Nous avons montré que la mesure de la couleur permet de réaliser un clas- sement des mies cuites et peut aider le boulanger dans la description de la cou- leur.

La méthode de mesure sur les mies cuites est peu contraignante. Elle est plus simple que la mesure sur la pâte fraîche pour laquelle pourtant nous avons des résultats très bons en terme de fiabilité. Mais, les différences observées sur les deux étapes nous permettent de préconiser la mesure sur la mie cuite afin de gagner un temps précieux sans remettre en cause la fiabilité des résultats.

Le travail accompli avec les boulangers pour améliorer le classement des pâtes de farines consiste surtout à comparer le plus de pains entre eux en par- tant du principe que l’œil détecte plus facilement un écart de couleur plutôt que d’identifier une couleur particulière. Notre étude sur l’analyse sensorielle du bou- langer montre bien cela.

Cette étude permet de constater que la mesure instrumentale peut être un outil précieux pour les boulangers notamment dans le cadre d’une formalisation de la fiche de notation CNERNA, sous la forme d’une assistance plus grande par des mesures instrumentales (on peut dire la même chose au sujet de la fiche de notation BIPEA). La mesure de la couleur est seulement, selon nous, une pre- mière étape.

La suite à donner à ce travail est de compiler les résultats sur une prochaine campagne de mesure à l’arrivée de nouvelles farines afin de valider la relation mise en évidence sur le classement entre la mesure instrumentale et l’analyse sensorielle. Enfin, il sera très intéressant de savoir si des lois de mélanges sont applicables au paramètre couleur lorsque nous maîtriserons encore mieux la mesure et que le classement par un paramètre objectif sera admis.

REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient la Coopérative Agricole Vienne Anjou Loire et particu- lièrement MM. BELLANGER et GOUGEON pour leur avoir permis d’utiliser leur labo-

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ratoire de panification et pour avoir mis à leur disposition les professionnels de la panification.

Reçu le 21 août 2000, accepté le 19 décembre 2000.

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