M. PETIT,J. AGABRIEL
INRA Laboratoire
Adaptation
desHerbivores aux Milieux
Theix 63122 Saint-Genès
Champanelle
Etat corporel des
vaches allaitantes Charolaises :
signification, utilisation
pratique et relations
avec la reproduction (1)
Les conditions naturelles
d’exploitation
destroupeaux
allaitants sont souventdifficiles,
en été ou en
hiver,
certainesrégions,
méditer-ranéennes par
exemple, pouvant
cumuler deuxpériodes
difficiles d’arrêt de lavégéta-
tion.
La vache allaitante compense, au moins en
partie,
les déficits nutritionnelstemporaires
par la
perte
depoids
etd’état, qu’elle récupè-
re en
périodes
d’alimentationlibérale,
d’où lanotion habituelle de
"tampon
des réserves cor-porelles". L’amplitude
duphénomène
varieselon les ressources naturelles et l’attention
portée
à limiter leurs fluctuations par la dis- tribution defourrages
conservéspendant
lespériodes
de disette. Le succès de la raceCharolaise tient pour
partie
à lacapacité
desvaches à bien tamponner par leurs réserves
corporelles
ces fluctuations des ressources ali- mentaires.En insistant sur le cas du Charolais
lorsque
les connaissances lepermettent,
nousenvisagerons
successivement : 1) lacomposi-
tion des réserves
corporelles,
leurimportance,
et leur évaluation
pratique ;
2) lafaçon
dontelles sont mobilisées et restaurées au cours
d’un
cycle
deproduction ;
3) l’intérêt et leslimites à leur
utilisation,
en insistant sur lesrelations avec la
reproduction ;
4)enfin,
com-ment raisonner leur
gestion
poursauvegarder
au mieux la
productivité
destroupeaux.
1 / Importance et méthodes
d’évaluation des réserves
corporelles
Les variations annuelles de
poids vif, qui peuvent
atteindre 18% dupoids
moyen, ne reflètentqu’imparfaitement
celles des réservescorporelles,
du fait des variations du contenudigestif (jusqu’à
6% deperte
depoids
vif à la mise à l’herbe) et du contenu utérin
(1,4
à1,7
fois lepoids
du veau).Le "volant" des réserves
corporelles,
mesu-ré par
abattage
est surtout constitué dedépôts adipeux
et d’un peu de muscles.Ainsi,
entre des vaches Charolaises taries non ges- tantes abattues soit très
maigres
(622kg)
soitaprès
4 moisd’engraissement
(728kg),
la dif-férence de
poids
vif vide (sans contenudiges-
tifi atteint 130kg,
dont 65% (85kg)
dedépôts adipeux
et 20 % (26kg)
de muscles (Robelin et al 1990). Le reste (19kg) correspond
surtout àla variation de
poids
du tubedigestif
vide etdes organes. Les
dépôts adipeux
intermuscu-laires,
internes et sous-cutanés contribuent pour41,
36 et 23 % à la variation desdépôts adipeux
totaux. Mais ce sont lesdépôts
sous-cutanés dont l’accroissement relatif a été le
(1) Texte présenté au 28ème Congrès International de la race
Charolaise, 20-26 Septembre 1993, Alghero (Sardaigne) Italie.
Résumé
_________________________Le "volant" des réserves
corporelles
d’une vache Charolaise de 700kg
est d’environ130
kg.
Il est constitué par lesdépôts adipeux
(85kg)
et du muscle (26kg)
et correspon- dent essentiellement à deslipides
(environ 95kg).
Lesdépôts
sous-cutanés ont l’accrois- sement relatif leplus rapide,
cequi
permet d’estimer l’étatcorporel global
par une note allant de 0 à 5. La mobilisation des réserves se fait de manièrehiérarchique, les lipides
sont utilisés en
premier, leur
part dans la perte depoids
semblant peu varier autour de 75%. Il faut que la vache soit trèsamaigrie (perte
depoids supérieure
à 80kg)
pour que cetteproportion
diminue notablement. La reconstitution des réserves est d’autantplus rapide
que les vaches sontmaigres,
et ce sont leslipides qui
sontdéposés
en dernier. La reconstitutiondépend
aussi de lacapacité d’ingestion
de lavache,
et donc enpartie
deson format.
L’utilisation des réserves permet une économie notable des apports alimentaires, à condition que l’efficacité de la
reproduction
de la vache ne soit pas atteinte(allongement
de lapériode d’anoestrus,
fertilité..). Les seuils de note d’état minimale auvêlage proposés
varient de 2,0 à 2,5 suivant les niveaux alimentairespendant
lapériode
de
reproduction.
La durée de lactation permet degérer
l’étatcorporel
à la rentrée àl’étable,
etd’anticiper
l’état auvêlage suivant,
en fonction des ressources alimentairesdisponibles.
L’étatcorporel
est un indicateurindispensable
à la conduite économe des vaches allaitantes..plus
élevé(multiplié
par7,0),
suivis desdépôts
internes (x
4,3)
et enfin desdépôts
intermuscu- laires (x2,7).
Ces variations de
composition
tissulaire cor-respondent
évidemment surtout à des varia- tions delipides
(97kg)
contenusprincipale-
ment dans les
dépôts adipeux
(87 %) ainsi que dans les muscles et l’os. A titred’exemple,
lateneur en
lipides
des muscles &dquo;rhomboïde tho-racique&dquo;
de ces vaches estpassée
de2,5
à4,4
% ou celle des muscles&dquo;long
dorsal&dquo; de1,7
à
3,8
% (Dumont et al 1991). Cetteaugmenta-
tion
rapportée
à l’ensemble de la musculaturereprésenterait
23% del’augmentation
depoids
des muscles.
L’importance
des variations relatives desdépôts adipeux
sous-cutanés (DASC)permet
de lesapprécier facilement,
et d’estimer ainsil’adiposité globale.
Il est commode etpratique
de donner à l’animal une note d’état
d’engrais-
sement. Plusieurs
grilles
de notation ont étéproposées
pour des vaches laitières ou à vian- de. Ellesreposent
soit sur lasimple
observa-tion de l’animal (Rned-bovin
1984,
Edmonsonet al
1989),
soit sur des maniements à diffé- rents endroits (Lowman et al1976,
Richards et al 1986).Nous avons décrit et validé une méthode
adaptée
à la race Charolaise (et à sa muscula- ture)(Agabriel
et al 1986) : une note est don-née de 0 à 5 par maniements à la base de la queue et sur le
plat
de côtes (tableau 1). Pour des notateursentraînés,
cette méthode est à la foisrépétable
etreproductible.
Une meilleureprécision peut
d’ailleurs être obtenue avecplu-
sieurs personnes notant
indépendamment.
A un
point
de notecorrespond
en moyenne 30kg
delipides,
de 25 à 35 selon lesexpé-
riences
(figure
1) et 40-45kg
de masse corpo-relle. Ces valeurs
correspondent
à celles citéespar Rémond et al (1988) pour la
grille
de notesutilisée sur les vaches laitières en France.
Cette notation d’état
s’applique
bien pour les étatscorporels
moyens, c’est-à-dire dans des conditions normalesd’élevage.
Elle devient moinsprécise
vers les étatsextrêmes,
enparti-
culier pour les vaches très
maigres,
dont lanote varie peu
lorsqu’elles perdent
encore dupoids
et deslipides ;
leDASC,
mobilisé en pre-mier,
estrapidement épuisé,
contrairementaux
dépôts adipeux
internes.D’autres méthodes d’estimation de la quan- tité de
dépôts adipeux
existent.L’échographie
est intéressante pour les animaux à forte adi-
posité,
mais difficilement utilisable avec des vaches Charolaises en étatnormal,
dontl’épaisseur
du DASC au niveau du dos nedépasse
pas 2 à 3 mm. La mesure du diamètre desadipocytes
du DASC(prélevé
parbiopsie) permet
aussi d’estimerl’adiposité
totale (Robelin 1982). Cette méthode repose sur le fait que c’est surtout le volume des cellulesadipeuses
(et pas leur nombre)qui
varie avecl’état
d’engraissement. Toutefois,
comme lanotation
d’état,
elleperd
de laprécision lorsque
les vaches sontmaigres
et le DASCdéjà appauvri
enlipides.
Elle reste coûteuse et difficilementgénéralisable
carchirurgicale.
Enfin une autre méthode
indirecte, reposant
sur la mesure de vitesses relatives d’ultrasons à travers un ensemble de tissus mous fait actuellement
l’objet
d’une mise aupoint
surdes animaux de race Charolaise.
2 / Le cycle des réserves
et les priorités
dans l’utilisation et la reconstitution
des constituants
Dans les conditions de
l’élevage
Charolaisfrançais,
la vache mobilise ses réserves au cours del’hivernage,
avec unephase plus
intense autour du
vêlage.
Ces réserves sontreconstituées
principalement
auprintemps,
aumoment de la pousse maximale de
l’herbe,
etparfois
en automneaprès
sevrage du veau.La variation des
lipides corporels
au coursd’un
cycle
deproduction
a été mesurée par uneméthode indirecte
(marquage
de l’eaucorporel-
le (Robelin 1982)) sur deux lots de 6 vaches Charolaises
plus
ou moins bien nourriesdurant la
période
hivernale encadrant le vêla- ge(Agabriel
et al 1993b). Lesapports énergé- tiques
différaient de2,5 UFL/jour,
soit de 30%en moyenne. Les vaches des deux lots
pesaient
initialement 730
kg
depoids
vif (soit 564kg
demasse
corporelle,
sansfoetus),
et ontperdu
55
kg
(lot H) et 114kg
(lot B) de masse corpo- relle en 180jours.
Le lot H aperdu
39kg
delipides
(71 %) et le lot B 74kg
(65 %) pour moins de 20kg
deprotéines.
Lapart
deslipides
dans la massecorporelle
a donc dimi-nué de 20 à 9 % pour les vaches du lot B.
Mais la mobilisation des réserves se fait de manière
hiérarchique,
leslipides
étant mobili-sés avant les
protéines
et l’eau. Sur les 50 pre- miersjours
de notreexpérience,
laproportion
de
lipides
dans laperte
depoids
est restéeéquivalente
(environ 75 %)quelle
que soit l’in- tensité de la mobilisation. Par lasuite,
elle n’adiminué de
façon significative (jusqu’à
60 %)qu’après
mobilisation d’environ 80kg
depoids
(soit 60kg
delipides).
Lorsque
ces deux lots ont été réalimentés defaçon
libérale avec de l’herbecoupée,
73 % (lot B) et 82 % (lot H) de la massecorporelle
per- due en hiver a étérécupérée
en deux mois. Cesont les vaches les
plus maigres qui
ontconsommé le
plus
et ont eu lareprise
depoids
la
plus rapide.
En deux mois elles ontrécupéré prioritairement
lesprotéines
et l’eauperdues,
mais seulement 43 % des
lipides perdus,
aulieu de 70 % pour les vaches en meilleur état.
La
figure
2représente,
pour ces 2lots,
l’évolu-tion de la masse
corporelle
sur une année.Ces observations ont été faites en conditions maîtrisées sur des vaches
qui
devaient resterLa mobilisation des réserves
corporelles
au cours de l’7ziaer
puis
leurreconstitution au
pâturage n’affectent
pas la
productivité
des vaches adultes.
aptes
àproduire.
Dans des situationsplus extrêmes,
il est sans doutepossible
de mobiliserencore
plus
delipides
et d’atteindre un&dquo;plan-
cher&dquo; de 5 à 6 % de
lipides
dans la masse corpo-relle. Il
s’agirait
là d’une situation presquepathologique,
en tout cas auxconséquences
fâcheuses pour laproduction
du troupeau.3 / Intérêt et limites
à l’utilisation des réserves
corporelles
3.
1 / Epargne alimentaire liée à la perte de poids
etd’état
Les réserves mobilisées sont utilisées effica- cement, avec un rendement
énergétique supé-
rieur à celui de
l’énergie
métabolisableingérée.
Ce rendement est par
exemple proche
de0,8
(au lieu de0,6)
pour la sécrétionlactée ;
unkg
de masse
corporelle
mobilisé devrait dans ce cas fournirl’équivalent
de 3 à4,5
UFL selon sateneur en
lipides
(60 à 100 %). Enfait,
l’écono-mie alimentaire réalisée par
kg perdu
est sou-vent
plus élevée,
engrande partie
parce que lesvaches sous-alimentées sont
capables
de rédui-re leur métabolisme
(dépenses
d’entretien).Pour des vaches adultes en état initial satisfai- sant, l’économie serait de
4,5
à 6UFL/kg
enlactation et
5,5
à7,5 UFL/kg
engestation (Agabriel
et Petit1987),
soitl’équivalent
de 8 à13
kg
d’un foin dequalité
moyenne. Parpoint
de note
perdu,
l’économie atteint 150 à 250UFL,
soit 270 à 450kg
du même foin !Pour des vaches
jeunes
peudéveloppées
oudes vaches
déjà
fortementamaigries,
l’écono-mie par
kg
depoids perdu (plus
pauvre enlipides)
serait vraisemblablementplus
faible.Il en est de même
lorsque
lesapports
pro-téiques
sontinsuffisants,
etqu’un
déficit azotéimportant
(>200 gPDI/j)
accélère la fonte cor-porelle
de la vache allaitante.3.
2 / Risques liés à la mobilisation des réserves
Il
s’agit
de savoir dansquelle
mesure le tampon des réservespeut
fonctionner correcte- ment pour éviter les effets des fluctuations sai- sonnières desdisponibilités
alimentaires.Un déficit
alimentaire,
mêmeimportant,
chez la vache adulte
compromet
rarement lepoids
et la vitalité du veau à la naissance.Ainsi dans une
expérience pluriannuelle
(tableau 2)
portant
sur les effets cumulés de deux niveaux d’alimentation hivernale sur des vaches Charolaises (entre 4 et 8ans),
lepoids
des veaux à la naissance n’a pas été modifié selon que leurs mères ont
gagné
15kg (+2,2
%)ou ont
perdu
34kg (-5,4
%) de massecorporelle
durant les 4 derniers mois de la
gestation.
Ilfaudrait en fait que le
poids
de la mèregravide
diminue de
plus
de 5 % au cours des 2 à 4 der-niers mois de
gestation
pour que soit réduit lepoids
du veau à la naissance (Petit 1979). La vitalité du nouveau-né ne semblecompromise
que dans les cas
d’amaigrissement
extrême(Hight
1966).Cependant,
lepoids
des veauxjumeaux (fréquents
en raceCharolais)
aug- mente avec le niveau d’alimentation des mèresgestantes (Chupin
et al1976),
et dessignes
detoxémie de
gestation peuvent apparaître
chez des vachesportant
desjumeaux
et nourries auvoisinage
de l’entretien seulement.La
plupart
des étudesindiquent qu’une
réduction modérée du niveau d’alimentation de la vache allaitante ne modifie que très peu sa
production
laitière et donc la croissance de sonveau,
grâce
à la mobilisation de ses réserves.Ainsi,
dansl’expérience
citéeprécédemment,
les vaches Charolaises
qui perdaient
durantl’hivernage complet
60kg
de massecorporelle
n’ont pas modifié leur
production laitière,
ni enpériode
hivernale ni au cours de la lactationtotale,
parrapport
à cellesqui
neperdaient pratiquement
pas depoids (tableau
2).Cependant,
dans le mêmeessai,
laproduction
laitière de vaches
&dquo;plus productives&dquo;
(Normandes et CharolaisxNormandes allaitant deux
veaux),
a eu tendance à baisser avec leniveau alimentaire
(12,7
vs13,6 kg/j
au coursdes deux mois et demi de lactation hivernale).
Tout se passe comme si le faible niveau de pro- duction des vaches à viande
(portant
et allai-tant un seul veau) leur
permettait
de bientamponner
un déficit alimentaire (mobilisation deréserves,
réduction du métabolisme). Celareste vrai
lorsque
la fonte des réserves est accélérée par un déficit azoté.La mobilisation des réserves au
profit
de laproduction
laitièrepeut
êtrepoussée
loin chezla vache allaitante adulte.
Ainsi,
dans une étudecomparative
incluant à la fois l’état endébut
d’hivernage
(noté3,0
ou1,5
sur 5) et le niveau d’alimentation durant les 4 mois entou- rant levêlage (correspondant
aux besoins ouaux besoins diminués de 2
UFL/j),
l’état initial n’a pas eu d’effet sur laproduction
laitière de vaches Charolaises(9,2
vs.9,5 kg/j),
ycompris
dans le cas de sous-alimentation hivernale (Garel et al 1988). Il est
possible
que cela soit lié à la bonneaptitude
laitière de cette race.Petit (1988) a
cependant proposé
la note d’étatlimite de
1,5
en dessous delaquelle prolonger l’amaigrissement risquerait
de réduire la pro- duction des meilleures laitières adultes.Il est à noter
qu’une
élévation de la teneurplasmatique
en acides gras libres (témoin par défaut de la mobilisation deslipides corporels)
est observée en
gestation
àl’approche
du vêla-ge, variable selon
l’importance
du déficit ali-mentaire,
mais elle ne survientpendant
la lac-tation que
lorsque
le déficit estintense,
entraî-nant une
perte
depoids
de0,5 kg/j
ouplus.
Si le
tampon
des réservespermet
aisémentaux femelles
développées
de combler les défi- citsalimentaires,
il n’en est pas de même desprimipares
ou desjeunes
vaches encore peudéveloppées, qui
sontbeaucoup plus
sensibles.Ainsi,
on observe une baisse de laproduction
laitière de très
jeunes
vachessous-alimentées,
comme du
poids
de leurs veauxnouveau-nés,
même
lorsqu’elles
sont en bon état initial (tableau3 ;
Garel et al 1988).Curieusement
cependant,
on nedispose
pas de relationsquantitatives
claires entre l’étatd’adiposité
autour duvêlage
et ledéveloppe-
ment
pré-
etpost-natal
du veau ou laproduc-
tion laitière de sa
mère,
encore moins pour dif- férents niveaux d’alimentation instantanée. La raisonprincipale
en est sans doute que l’amai-grissement
des vaches à viandejoue
en pre- mier lieu sur leurreproduction
dans les condi- tions normalesd’élevage,
avant d’atteindre lesautres fonctions. C’est sur la
reproduction
que l’état des réservescorporelles
a l’effet leplus marqué
etle
plus rapide,
et c’est l’étatcorporel
(ou lepoids) qui
semblejouer
le rôlemajeur
dans lareproduction
de la vache à viande.Ainsi,
unesérie d’observations réalisées dans des éle- vages Charolais
français
par l’Institut del’Elevage
et l’INRA avec le concoursd’orga-
nismes
départementaux (Agabriel
et al 1992) a montréqu’un point
de note d’étatcorporel
enmoins à la fin de la
période
hivernale corres-pondait
à unallogement
de l’intervalle entre deuxvêlages
de 8-10jours
etjusqu’à
30jours
chez les
primipares (figure
3). L’effet de l’étatcorporel
est d’autant moinsmarqué
que lapériode
devêlage
est tardive en saison (lareproduction
étant réalisée totalement à l’her- be) et que laperte
hivernale d’état est faible.L’allongement
de l’intervalle entrevêlages
chez les vaches
amaigries
résulte enpremier
lieu d’un retard de lapremière
ovulation et de lapremière
chaleur(figure 4 ;
revue de Petit et al1992), plus
que d’une réduction de la fertili-té,
celle-ci restant souvent normale dès lorsChez les
primipares,
la sous-alimentation hivernale réduit le
poids
du veauà la naissance et leur croissance
jusqu’au
sevrage.C’est sur la
reproduction
que l’état des réservescorporelles
al’e ffet
le
plus marqué.
que la chaleur est survenue, au moins en
monte naturelle. En conditions
expérimentales contrôlées, le
pourcentage de vachescyclées
2 mois
après vêlage
est réduit chez les vachesCharolaises adultes
amaigries
(tableau2),
et lespremières
ovulations peuvent être retar- dées d’un mois chez desprimipares maigres
auvêlage.
Il semble que l’état à la mise bas oujuste après
soitdécisif,
il a donc souvent étémis en relation avec le taux de
gestation
et lepourcentage
devêlages précoces
(Wiltbank 1985). Les vaches en mauvais état auvêlage
nécessitent par la suite un haut niveau d’ali- mentation pour revenir en chaleur suffisam- ment tôt, ce
qui peut
être le cas lors de laplei-
ne pousse de l’herbe de
printemps.
Des notes-cibles ont été recommandées pour les vaches Charolaises au début de la
période
de
reproduction,
tenantcompte
de la date duvêlage
parrapport
à lapériode
faste d’alimen- tation(Agabriel
et Petit 1987).3.
3 / Limites à la reconstitution des réserves
Les réserves
corporelles
sontgénéralement
constituées en
période
faste depâturage.
Leurimportance
va doncdépendre
de la durée dupâturage,
de laquantité
et de la valeur ali- mentaire de l’herbe offerte.Ainsi,
lareprise
depoids
aupâturage
dejeunes
vachesCharolaises atteint 95
kg
enNormandie,
et 72à 58
kg
enAuvergne
selon l’altitude (1100 à 1300 m). De même un fortchargement
dupâturage
diminuegénéralement
lareprise
depoids
et d’état desvaches,
d’autant que leurproduction
laitière n’est que très peu affectéecomme nous l’avons vu
précédemment.
La constitution des réserves
corporelles
vaaussi
dépendre
dans unelarge
mesure descaractéristiques
des vaches : race etformat, âge, composition corporelle
initiale etcapacité d’ingestion
aupâturage.
Toutes choses
égales
parailleurs,
ungrand
format comme celui des vaches Charolaises
pourrait
êtreavantageux
enpériode
de sous-ali-mentation
puisqu’il correspondrait
àplus
deréserves
(proportionnelles
aupoids),
alorsqu’il
est admis que les
dépenses
d’entretien augmen- tent moins vite que lepoids.
Un formatimpor-
tant serait
également
intéressant au cours de la reconstitution car lacapacité d’ingestion
variesuivant un coefficient du
poids proche
de 1.Ainsi,
par un calculthéorique,
une vache de 700kg
depoids
vif aupâturage disposerait
pour reconstituer ses réserves de 15 %d’énergie
sup-plémentaire
parrapport
à une vache de 600kg ayant
uneproduction équivalente. Cependant,
pour un même
format,
il existe entre races et àl’intérieur d’une même race de
grandes
variabili-tés dans
l’aptitude
às’engraisser,
souvent enrelation
positive
avecl’aptitude
laitière. Il existe deplus
unegrande
variabilité dansl’importance
relative des différents
dépôts adipeux,
dont onne connaît pas encore les rôles exacts.
Enfin,
lesfemelles de
grand
format ont, en conditions diffi-ciles,
uneplus grande probabilité
de croissancedifférée
(y compris
celle de leursdépôts
adi-peux), qui peut
accentuer lesrisques
encourusdans leurs
premières
années deproduction.
Les
reprises
depoids
et d’état sont aussi heu- reusement d’autantplus
élevées que lespertes
ont été
plus importantes
durantl’hivernage précédent
(tableau 2 etfigure
1). Cela résulte de laplus
faible valeurénergétique
dukg
depoids repris,
de besoins d’entretien moins élevés(poids réduit,
efficacité accrue lors des pre- mièressemaines),
et d’uneaugmentation
desquantités
d’herbeingérées.
A titred’exemple,
dans
l’expérience
citéeprécédemment,
lesvaches fortement
amaigries
(notées1,3)
ontconsommé durant 11 semaines
1,5 kg
de MSd’herbe de
qualité
enplus
que leurhomologues
en bon état (notées
2,1).
Dans une autre séried’expérience (Agabriel
et al 1992) lareprise
demasse
corporelle
mesuréependant
les trois pre- mières semainesqui
suivent la mise à l’herbevarient de 1 à 3
kg/jour lorsque
la note d’étatdiminue de 3 à 1
(figure
5). Ceci est à rappro- cher des relations entre étatcorporel
etcapacité d’ingestion proposées
par l’INRA : +1 à +1,2 UEB parpoint
de note au-dessous de2,5
pourune vache allaitante
pesant
650kg
(1 UEB cor-respond
à 1kg
de MS d’herbepâturée
et à0,75 kg
de MS d’un foinmoyen). Cependant,
par rap-port
à des vaches mieuxnourries,
la compensa- tion (en terme depoids
et d’état) réalisée à l’herbe par des vaches trèsamaigries
en hiverest rarement totale. Leur
développement
com-plet
est alorsretardé,
voirecompromis
si lapériode
depâturage
esttrop
courte.La constitution des réserves
peut
aussi êtrelimitée par la
compétition
avec laproduction
laitière. Cela
apparaît
clairement avec des vaches laitières ou croisées laitières utiliséescomme allaitantes. Mais ce n’est pas
toujours
apparent dans une même race, en raison des relationspositives
existant entre laproduction laitière,
le format et lacapacité d’ingestion.
Cependant,
à formatidentique,
ce sont lesmeilleures laitières
qui
sont souvent dans le moins bon état au sevrage, surtoutaprès
unpâturage
d’été et d’automne difficiles.Enfin,
lacapacité d’ingestion
hivernalevarie dans de
larges proportions,
mêmeaprès
avoir tenu
compte
dupoids,
de laproduction laitière,
de l’état et du stadephysiologique,
avec un coefficient de variation de
près
de 10 %(Agabriel
et Petit 1987). Si cela reste vrai aupâturage,
une telle variationcorrespondrait
à1,5 UFL/j
enplus
ou en moins parrapport
à lamoyenne, pour des vaches de 600-650
kg
surun bon
pâturage,
soit une variation de larepri-
se de
poids
de±0,25 kg/j
environ.Rappelons
aussi que la
capacité d’ingestion
est limitéeautour du
vêlage,
et que, pourprofiter pleine-
ment de la pousse
printanière
del’herbe,
il estpréférable
que les vaches aient mis basquelques
semainesauparavant.
4 / Stratégies de gestion
des réserves à l’échelle de l’année
Le choix de la date de
vêlage
et de lapériode
de
reproduction
comme celui du sevrage desveaux déterminent le
cycle biologique
de lavache
qui
doits’adapter
au mieux aucycle
desressources
alimentaires naturelles. Lespériodes
de disettepeuvent
éventuellementcorrespondre
auxpériodes
de besoins élevés (fin degestation,
début de lactation) à condi- tion que les réservescorporelles
soient suffi-santes et utilisées de
façon
raisonnée.Lorsque
laproductivité numérique
du trou-peau reste
l’objectif principal, l’adaptation
desa conduite aux ressources alimentaires doit tenir compte simultanément : de l’état mini- mal
requis
au moment desvêlages, qui
est legarant
d’un intervalle normal pour le retour enchaleur,
et del’apport
alimentaire durant lapériode
dereproduction, qui
est legarant
d’une bonne fertilité lors de ceschaleurs,
etqui
permet dans une certaine mesure de réduire la durée de l’anoestrus chez les vaches du trou- peau en état insuffisant à la mise bas.Traditionnellement,
avec des ressources ali- mentaires hivernaleslimitées,
lesvêlages pla-
cés 1 à 2 mois avant la pousse
printanière
del’herbe
permettent
de satisfaire la seconde condition. Ainsi avec de l’herbe abondante auprintemps,
il est mêmepossible
de limiterl’état à la mise à l’herbe
(par exemple
note de1,5/5).
Si la vache débutel’hivernage
dans unétat noté
3,
l’économie alimentaire hivernalepossible
est alors substantielle (250-300 UFL).Dans des conditions moins
difficiles,
lesvêlages peuvent
avoir lieuplus
tôt en saison.Mais comme la
reproduction
débute alors aussiplus tôt,
il convient de viser un état minimumau
vêlage (par exemple 2,5)
pour assurer les retours en chaleur dans l’intervalle de 2mois,
et de maintenir cet état au mieux
jusqu’au
début de la
reproduction
et de la mise à l’herbe (note de2,0) ;
les économies alimentaires pos- sibles sont alorsbeaucoup plus modestes,
àmoins que les vaches ne soient grasses en
début
d’hivernage
(notesupérieure
ouégale
à3,0).
Des
apports
alimentaires ont donc été recom-mandés pour atteindre ces notes-cibles (Petit
1988) en fonction de l’état
d’engraissement
endébut de la
période
hivernale : les écartsd’ap- port
peuvent varierjusqu’à 1,8 UFL/jour
(soitde 20 %) pour une Charolaise de
700kg.
L’état minimal au
vêlage
n’estcependant
pastoujours
atteint ni suffisamment&dquo;anticipé&dquo;.
Pour
l’obtenir,
il est utile de faire lepoint
surl’état du
troupeau plusieurs
moisauparavant (par exemple quatre).
Si les vaches sont en état insuffisant parrapport
aux ressourcesdispo-
nibles
jusqu’à
la misebas,
il est souhaitable d’avancer le sevrage pour éviter d’accroîtrel’amaigrissement
en casd’indisponibilité
fourra-gère,
ou pourpermettre
unereprise
de l’étatqui peut
êtrerapide
sur les repousses automnales parexemple.
Il est à noter que lespossibilités
de
reprise
d’état avec desfourrages
dequalité
médiocre sont
illusoires,
ycompris après
taris- sement, etqu’elles
sont exclues au cours destoutes dernières semaines de la
gestation.
Dansles
régions
aux ressources alimentaires trèslimitées, le
raccourcissementsystématique
de ladurée de lactation
peut
être unepratique
cou- rante ; ellepermet
de limiter lesdépenses
totales annuelles de la
vache ;
cela la maintienten état suffisant pour
procréer régulièrement
etallaiter son veau durant les
premiers
mois alorsqu’il dépend
totalement de sa mère. Un tel sys- tème conduit à dissocierquasi complètement
lieu de naissance en zone difficile et lieu de
croissance-engraissement
en zoneplus
riche.En
définitive,
en cas de déficitalimentaire,
les réserves
corporelles
(essentiellementlipi- diques)
des vaches à viandejouent
efficace-ment le rôle de
tampon,
auprofit
de toutes lesfonctions
physiologiques,
avec un ordre depriorité :
entretien etsauvegarde
de lamère,
entretien etsauvegarde
du foetus (au-delà del’implantation),
maintien de lalactation,
et endernier lieu maintien de la
reproduction.
L’étatcorporel,
indicateur externe de laquantité
totale de tissus
adipeux,
est de ce fait un bonindice de
l’aptitude
dutroupeau
à sereprodui-
re
régulièrement.
Il devient par là-même unélément
indispensable
de la conduite alimen- taire économe des vachesallaitantes,
et unindicateur du mode et de la
qualité
de la ges- tion dutroupeau
par l’éleveur.Les réserves
corporelles
doiventêtre utilisées de
façon
raisonnéepour
anticiper
l’étatau
vêlage.
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Transfer in Beef Cattle. NAAB., Box 1033, Columbia, Mo. 65205, 15-27.Summary
Body
reservesof
Charolais cow. Relations withreproductive performance.
The
body
stores of a Charolais cowweighting
700kg
can reach 130kg :
fat is the mostimportant component
(85kg), largely
before muscles (26kg).
Subcutaneous fat has a
higher
relativechange,
soit is
possible
to have agood
estimation of the total fat with a condition score scaled from 0 to 5.Mobilisation of
body
reserves is made on a hierar-chical way :
lipids
arefirstly utilised,
in propor- tion of 75% perkg
ofweight
loss. Thisproportion
decrease
appreciably
for very lean cows which mobilisation overgoes 80kg
ofbody
mass.Restoration of the reserves
depend
on intake capa-city
of the cow atpasture,
which isdirectly
corre-lated with the size.
An
important
economy offeeding
stuffs can beachieved from the use of
body
resources, but agood efficiency
ofreproduction
must be conserved (risks ofincreasing postpartum
anoestrus anddecreasing fertility).
Thresholds of conditionscores
proposed
atcalving change
from 2.5 to 2.0for different level of nutrition
given during
repro- ductionperiod.
The duration of lactation allows to manage condition score athousing,
so it is pos- sible toanticipate
condition score atcalving
whentotal
alimentary
resources are known.Body
condi-tion score is
absolutely
necessary for an economicmanagement
of the suckler cow.PETIT
M.,
AGABRIELJ., 1993.
Etatcorporel
des vachesallaitantes Charolaises :