14 avril 2016 Nasalité et Gwoka - CFA 2016 1
Marie Tahon, IRISA, Lannion
Pierre-Eugène Sitchet, IreMus, Paris
La nasalité dans le
répertoire Gwoka de la
Guadeloupe
Sommaire
Contexte musical
Objectifs
Corpus de chant
Extraction de descripteurs
Résultats
Conclusions et perspectives
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Contexte musical
Le Gwoka un chant traditionnel de la Guadeloupe
Contexte musical
Le Gwoka est né de l'esclavage transatlantique (XVIIe)
Ce répertoire s'articule autour du triptyque tambour (ka), chant et danse
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Contexte musical
Un chant improvisé de veillée funèbre Chanté exclusivement en Créole
Forme responsoriale (alternance répondé et improvisation)
Objectifs
Thèse de PierreEugène Sitchet
Processus de transmission de deux valeurs esthétiques dans le Gwoka, genre musical guadeloupéen : le
«santiman» et la «lokans»
Analyse croisée : musicologie et signal
→ Déterminer des éléments caractéristiques du chant Gwoka Continuité des travaux sur le voisement
[JIM2016], les techniques vocales
[StEtienne2015], la transmission [JAM2015] et la transcription musicale [TENOR2016]
Selon l'ethnomusicologue Aaron Fox, la nasalisation véhicule la tristesse et la plainte (country music).
→ Estce que la nasalisation du chant est un trait caractéristique du Gwoka ?
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La nasalité
Abaissement du voile du palais
→ l'air expiré passe par les fosses
bucales ET nasales
→ modification du timbre de la voix
Corpus de chant
6 interprétations: 4 chanteurs (générations différentes) et 6 chansons
Deux versions, mêmes paroles:
• Version parlée
• Version chantée a capella Exemple Kan Siren la Sone par RM
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Quelques éléments phonétique du Créole
Français métropolitain:
• 36 phonèmes dont 8 nasals Créole Guadeloupéen :
• 39 phonèmes dont 10 nasals
Phénomène de nasalisation [Delumeau2008] :
• [in]dre ou[an]dre → [in]n ou [an]n
• d ou r → m ou n
→ une langue fortement nasale
Extraction des descripteurs
Segmentation des voyelles
• Segmentation manuelle (Transcriber)
• Annotation consonne/voyelle/silence
• Type de voyelle : /a,e,i,o,u/
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Extraction des descripteurs
Descripteurs extraits automatiquement sur les signaux de voyelles :
(1) 3 premiers formants et leur BP
(2) Triangle vocalique complet et réduit
(3) Énergie dans les bandes [0320] et [3205360] sur spectre LPC [Pruthi2004].
D'après l'état de l'art, nous attendons :
(hyp1) augmentation de F1 et de BP1 dans le chant
(hyp2) augmentation du rapport des énergies HF/BF dans le chant
(hyp3) diminution relative de l'amplitude de F1 par rapport à F2
(hyp4) présence d'antirésonances caractéristiques
Resultats – analyse de variance
Lors du passage du mode parlé au mode chanté
• Augmentation significative de F1 (6*) → nasalisation (hyp1)
• Pas de modification de F2
• Augmentation significative de F3 (5*)
• Réduction de BP1 (5, 3*) → contraire aux résultats attendu en cas de nasalisation (hyp1)
• Réduction significative de BP2 (6, 5*)
• Pas de modification de BP3
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Résultats – Analyse du triangle vocalique
Deux triangles sont étudiés:
complet: /aiu/
réduit: /aeo/
L'aire est donnée en st2
Résultats – Analyse du triangle vocalique
Lors du passage du mode parlé au mode chanté
• Tableau : Di,v = moy(Fi,v chanté) – moy(Fi,v parlé)
• Augmentation de l'aire du triangle complet (5)
→ plus grande articulation dans le chant
• Réduction de l'aire du triangle réduit (6) → transformation phonétique
Di,v a e i o u
F1 + 2.3 + 4.7 +0.2 + 4.8 + 3.2
F2 + 0.4 - 1.2 -0.6 + 1.6 - 1.5
Rapprochement de /e/ et /o/
Éloignement de /u/
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Résultats – Analyse des spectres LPC
Pour chaque type de voyelle, on détermine le spectre LPC moyen obtenu en mode chanté ou parlé.
Le spectre est normalisé par l'amplitude obtenue aux faibles fréquences.
Résultats – Analyse des spectres LPC
(hyp1)
Augmentation de F1 dans le mode
chanté (tirets) et baisse de son
amplitude
(hyp2) rapport MF/BF plus grand dans le mode
chanté
(hyp3) baisse relative de F1 (rouge) par rapport à F2 (jaune) dans le chant
(hyp4) Anti
résonance
caractéristique d'un /a/ nasal [Schwartz1968] :
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Résultats – Analyse du spectre LPC
(hyp1) Augmentation de F1 dans le mode chanté → nasalisation
(hyp2) rapport MF/BF plus grand dans le mode chanté → nasalisation
(hyp3) baisse relative de l'amplitude de F1 par rapport à celle de F2 dans le chant pour
/e,i,o/ → nasalisation
(hyp4) présence d'antirésonances caractéristiques → nasalisation
Conclusion
Un certain nombre de descripteurs permettent d'aller dans le sens d'une nasalisation de certaines voyelles lors du
passage du déclamé au chanté
• augmentation de F1,
• baisse relative de l'amplitude de F1 par rapport à F2,
• présence d'antirésonances,
• augmentation du rapport d'énergie MF/BF
Cependant certains descripteurs (comme le rapport d'énergie) sont également modifiés par le chant.
Dans un contexte musicologique, la nasalisation des voyelles dans le chant Gwoka apparaît comme une forme d'accentuation émotive qui aurait pour but de susciter l'empathie de
l'auditoire.
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Perspectives
Une annotation plus fine des voyelles permettrait de quantifier les voyelles nasales.
Un travail sur les consonnes nasales doit être réalisé