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LA FRANCE DES INÉGALITÉS TERRITORIALES

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Academic year: 2021

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Submitted on 30 Nov 2015

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Gérard-François Dumont

To cite this version:

Gérard-François Dumont. LA FRANCE DES INÉGALITÉS TERRITORIALES. 2015, pp.6-12.

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Les impacts de la protection sociale

sur les territoires

La France des inégalités territoriales

Gérard-François DUMONT

Professeur à la Sorbonne, Président de la revue Population & Avenir

En préambule à ma présentation, un point d’actualité s’impose au regard du débat au Parlement du projet de loi portant sur la Nouvelle Organisation Territoriale de la République, dite loi NOTRe, par le Sénat et l’Assemblée nationale. La version adoptée par le Sénat présente des modifications apportées au projet initial. C’est la suite d’une intervention à laquelle j’ai participé : elle met en exergue l’insuffisance des exposés des motifs les lois sur les territoires de toutes ces dernières années. Cette insuffisance explique une incompréhension générale et notoire de l’opinion face à la volonté des partisans de la loi.

À l’annonce, durant le printemps 2014, d’une nouvelle délimitation des régions par le président de la République et de la suppression des départements annoncée par le Premier ministre ; Alain ROUSSET, président de l’Association des Régions de France (ARF) me convia à une rencontre. Au cours des échanges en tête à tête, l’occasion m’a été offerte de lui réitérer que le rôle des régions doit être stratégique ; il convenait à mon sens de ne pas octroyer des compétences de gestion conséquentes, au risque de nuire à leur nécessité de se concentrer sur la dimension stratégique, notamment concernant l’amélioration de l’environnement des territoires à moyen et à long termes. Par exemple, je lui ai expliqué mon incompréhension que l’idée de confier les collèges aux régions, ce qui ne revêt nullement un caractère stratégique.

Quelques mois plus tard, à l’occasion du congrès de l’Assemblée des Départements de France (ADF), devant un auditoire de plusieurs centaines de participants, le président Alain ROUSSET s’est engagé, à titre personnel il est vrai et non en sa qualité de président de l’association, en déclarant sa non revendication des collèges dans sa région. Assurément, je ne m’oppose nullement a priori à un éventuel des collèges aux régions ; toutefois, une éventuelle décision dans ce sens, comme toute prise de décision en matière territoriale ; suppose d’une part, une réflexion et, d’autre part, une communication de l’argumentation justifiant ladite décision. Or, le défaut d’argumentation constaté provoque une évolution des projets de loi vers la direction non désirée par les déclarations présidentielles et gouvernementales initiales car désormais, il est question du maintien du Département et non plus de sa suppression. D’ailleurs, la semaine dernière, la ministre de l’Education nationale, en affirmant que les difficultés liées aux collèges seraient étudiées en coopération avec les départements, présupposait la survie des ces derniers ainsi que le maintien de leur compétences sur les collèges. Toutefois, seul le vote de l’Assemblée nationale à venir détient le pouvoir de déterminer le futur des départements.

I.

Les inégalités territoriales par les chiffres et par nature

1. Les inégalités territoriales mesurées par les données quantitatives

À l’observation des données quantitatives, apparaissent en France des inégalités territoriales considérables.

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Celles-ci s’attachent en premier lieu au phénomène du chômage. Incontestablement, le taux de chômage annoncé par les médias est équivoque. En effet, celui-ci est obtenu par la moyenne de taux de chômage différenciés variant de 5 % jusqu’à 20 %, selon les zones d’emploi. Une telle variation rappelle l’assertion d’Alfred SAUVY affirmant qu’« une moyenne n’a pas de sens concret ». À titre illustratif, le fait de rencontrer une personne pesant 120 kilos et une seconde personne présentant un poids de 60 kilos ne permet nullement d’affirmer que deux personnes pesant en moyenne 90 kilos ont été observées. Par conséquent, les inégalités des taux de chômage notoires m’ont inspiré une formule ainsi : « Il y a de

petites Allemagne en France et de petites France en Allemagne ». En effet, certains territoires français

présentent un taux de chômage parfois aussi faible que la moyenne de l’Allemagne ; tandis que l’Allemagne affiche en son sein, des territoires dont les taux de chômage sont supérieurs à la moyenne française.

Deuxième exemple d’inégalité territoriale, l’attractivité migratoire, par exemple dans les choix opérés par les retraités. En effet, l’héliotropisme positif explique certains phénomènes de migration vers des territoires davantage attractifs.

Troisième exemple, les inégalités territoriales dans la répartition par catégories socioprofessionnelles. Assurément, la région Ile-de-France représente un cinquième de la population de la France métropolitaine, mais le tiers de la catégorie des cadres et professions intellectuelles supérieures. En revanche, le pourcentage des ouvriers est particulièrement élevé en région Picardie et celui des employés affiche des proportions importantes dans les régions méditerranéennes.

Aussi, face à l’ensemble de ces différences quantitatives, il est aisé de conclure que la France se caractérise par des inégalités territoriales ostensiblement fortes.

Toutefois, il convient de relativiser cet ensemble de données en rappelant que les inégalités territoriales font partie intégrante de la géographie et de l’histoire des territoires.

2. Les territoires par nature inégaux, non interchangeables et indivisibles

Les territoires sont inévitablement inégaux en raison de leur localisation. Le climat livre un élément d’inégalité qui relève d’une fatalité certaine selon les différentes régions qui composent le territoire national. Aussi, en fonction de son positionnement géographique, le caractère d’enclavement est nécessairement différencié. Tel fut le cas de la ville de Chamonix-Mont-Blanc, qui des siècles durant a été une vallée enclavée puis seulement partiellement désenclavée par l’arrivée du train en 1901.

En deuxième lieu, il faut souligner le caractère jamais interchangeable attaché à tout territoire qui constitue un élément fondamental d’inégalité géographique. Par exemple, vivre à Marseille ne suppose nullement une situation identique selon une localisation dans les quartiers nord de la ville ou dans les quartiers sud de la cité phocéenne. De la même manière, vivre au centre de la commune des Mureaux suggère une configuration différente de vie que dans les quartiers méridionaux de la ville. D’où le caractère jamais interchangeable fondamental des territoires.

Enfin, les territoires sont indivisibles. Vivre ou exercer une activité sur un territoire suppose une obligation d’accepter l’ensemble des aspects dudit territoire. Ceux-ci peuvent être la qualité de l’environnement ou du climat du territoire, son niveau d’imposition en vigueur, son histoire, ainsi que son image de marque. Par exemple, s’installer dans la ville de Maubeuge motivé par son climat ou par sa proximité avec la Belgique implique simultanément une acceptation de l’image de marque guère valorisée de la ville. Le caractère indivisible des territoires demeure incontournable.

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variées selon les territoires. La commune de Marseille occupe un territoire de 240,6 kilomètres carrés à entretenir et à gérer. En revanche, la commune de Lyon s’étend sur une superficie de seulement 48 kilomètres carrés. Par conséquent, certains élus marseillais regrettent la configuration de leur ensemble, alors que si l’histoire avait légué une répartition des 240,6 kilomètres carrés en cinq communes, cela aurait permis depuis longtemps la création d’une intercommunalité déclenchant davantage de dotations de l’Etat. En effet, ces dernières sont notamment octroyées selon le nombre d’habitants et non au regard de la superficie des territoires. De la même manière, le vaste territoire du département de l’Aveyron – 8 711 kilomètres carrés - implique des coûts de gestion territoriaux élevés et supérieurs aux coûts de la gestion des 3 730 kilomètres carrés du département du Tarn-et-Garonne, offert à Montauban en 1806 par NAPOLEON. Aussi, la dispersion des habitants de l’Aveyron qui ont besoin de contacts avec les Caisses sociales départementales provoque des effets auxquels le département doit apporter des réponses.

Cet ensemble de considérations constitue autant de sources d’inégalités héritées de l’Histoire et souvent négligées. Il faut y ajouter les inégalités de peuplement, donnée trop souvent omise dans les analyses territoriales.

II. Les inégalités de peuplement

Certains territoires qui composent la nation sont en effet davantage peuplés que d’autres, notamment en raison des écarts de fécondité peu pris en considération. Par conséquent, les territoires dont les indices de fécondité sont relativement élevés supposent davantage de travail pour les CAF, alors que les faibles indices de fécondité d’autres territoires engendrent un moindre effort pour cet organisme.

Ensuite, les écarts d’espérance de vie constituent également un facteur à considérer dans l’étude des inégalités de peuplement. Assurément, un certain nombre de territoires septentrionaux seraient davantage peuplés si leur espérance de vie était aussi élevée que la moyenne nationale.

Enfin, les migrations de retraite ainsi que les inégalités en matière de moyens d’attractivité fondent également des éléments d’étude à la bonne compréhension des inégalités de peuplement.

1. les écarts de fécondité

En préambule au développement de la présentation des inégalités de fécondité, je vous propose de participer à un quiz concernant les indices selon les territoires français. Ainsi, si j’interroge à propos du département français dont la fécondité est la plus élevée, sans nul doute penserez-vous, à raison, à la Seine-Saint-Denis. En effet, ce dernier département demeure le premier territoire de la migration internationale qui attire les populations originaires de pays dont les niveaux de fécondité sont élevés. En revanche, quel serait le département métropolitain en deuxième position ?

De la salle

La Mayenne ?

Gérard-François DUMONT

Tout à fait. Hormis l’outre-mer où Mayotte et la Guyane présentent les plus forts taux de fécondité, le département de la Mayenne se positionne au deuxième rang après la Seine-Saint-Denis. En revanche, la Haute-Vienne, le Puy-de-Dôme, la Lozère, la Haute-Garonne, le Gers, ainsi que le département de la Côte-d’Or sont autant de territoires aux faibles taux de fécondité.

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En tout état de cause, de telles inégalités s’inscrivent dans l’Histoire. En effet, bien que la fécondité en France soit plus faible aujourd’hui que deux siècles auparavant, les écarts entre les départements sont sensiblement identiques car des traditions locales de propension à avoir plus ou moins d’enfants perdurent à travers les décennies. Par exemple, depuis toujours, les indices de fécondité demeurent plus élevés en Ardèche qu’en Creuse.

Par ailleurs, les données par les cartes présentées rappellent un paradoxe fondamental d’inégalités territoriales. En effet, les participants à notre journée originaires de Haute-Garonne sont susceptibles de contester la donnée selon laquelle l’indice de fécondité est faible dans leur département, le fait que les Haut-garonnais présentent une tendance à avoir peu d’enfants. La Haute-Garonne compte une fécondité assurément faible, mais sa composition par âges est jeune. Le nombre de femmes en âge de procréer y est élevé, ce qui entraîne un nombre de naissances élevé malgré un bas indice de fécondité. Ainsi, pour une meilleure compréhension du nombre de naissances sur un territoire, il est indispensable de combiner la fécondité avec la composition par âge, particulièrement la composition féminine par âge.

D’autre part, il convient de souligner que les inégalités exposées apparaissent structurelles. En effet, il serait vain d’inciter la population du Gers à avoir davantage d’enfants car, malgré les changements de populations et les flux de populations que le département a connu, l’attitude de fécondité inférieure à la moyenne nationale qui existe depuis des décennies perdure. De la même manière, l’indice de fécondité de la Mayenne demeure au fil des décennies supérieur à la moyenne nationale.

En tout état de cause, l’étude des inégalités territoriales, qui s’inscrivent dans une longue histoire, exige des analyses fines. Toutefois, il serait indispensable de les analyser davantage ; car elles présentent des effets sur l’activité de l’ensemble des organismes publics. Par exemple, en cas de doublement du nombre des naissances dans un département, les conséquences administratives sont nombreuses.

2. Les disparités dans l’espérance de vie

Les départements dont l’espérance de vie à la naissance est la plus faible sont le Nord, la Creuse, le Finistère, ainsi que certains départements de la région Bourgogne et l’Outre-Mer. En revanche, l’Aveyron, la Haute-Garonne, ainsi que les Alpes-Maritimes, offrent une espérance de vie plus longue. Les contrastes, bien que réels, sont à considérer comme des ordres de grandeur car l’espérance de vie à la naissance comporte des difficultés de calcul. Dans la région Ile-de-France, s’observe un élément symptomatique, une division en deux parties. L’espérance de vie à la naissance est y plus élevée à l’Ouest qu’à l’Est.

Les éventuelles variations dont l’espérance de vie à la naissance auraient des conséquences de peuplement. En effet, en cas d’ajustement à la moyenne nationale du département du Nord en matière d’espérance de vie, le nombre d’habitants y serait supérieur. Un tel phénomène contribuerait ainsi à une hausse du nombre de ressortissants des caisses sociales.

Jusque dans les années 1970, la faible espérance de vie observée dans la partie septentrionale de la France était expliquée liée par l’économie industrielle du territoire, additionnant les effets de la pollution générée par les activités industrielles, et l’épuisement lié au labeur dans l’activité industrielle et minière. Ainsi, au terme de la période que je nomme « la fin de l’ère industrielle traditionnelle », un certain nombre d’acteurs ont considéré que la fermeture des mines et l’arrêt des activités industrielles les plus polluantes devraient contribuer à une hausse de l’espérance de vie dans le nord de la France, jusqu’à atteindre la moyenne nationale. Or, l’espérance de vie de ladite région demeure actuellement toujours plus faible que la moyenne nationale. Par conséquent, la cause fondamentale de la faible espérance de vie dans le Nord n’était pas liée exclusivement au niveau de pollution et à la pénibilité du travail au sein des entreprises industrielles et minières. Les analyses conduites mettent en exergue une cause liée aux

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comportements de prévention sanitaire moins développés au sein des départements du Nord que dans d’autres régions de la France. Une telle donnée invite à mener une réflexion approfondie sur les politiques de prévention sanitaire.

Enfin, apparaît, au sein des départements de la Creuse, du Finistère ou des Cotes-d’Armor, le facteur du fléau de l’alcoolisme. Toutes ces observations exigent une réflexion pour orienter les politiques à conduire face à l’inégalité territoriale en matière de différences d’espérance de vie.

3. Les inégalités des migrations de retraités

La carte que je vous soumets propose une observation des territoires que les populations quittent au moment du départ à la retraite. Lors de la fin de la contrainte de proximité entre le lieu de domicile et le lieu de travail, nombre de retraités considèrent qu’ils acquièrent une liberté du choix de leur domicile. Certains quittent les grandes et moyennes communes afin de s’installer au sein de petites villes, particulièrement du littoral. De tels effets sont majeurs, car les migrations de retraités modifient structurellement la composition par âge des territoires. En effet, d’une part, elles rajeunissent la composition par âge des territoires les plus urbains car une partie des retraités les quittent ; et d’autre part, elles contribuent au vieillissement des territoires qui accueillent ces populations de retraités. Dans les premières années qui suivent la migration, l’arrivé des populations de retraités ne suppose pas de difficultés supplémentaires majeures pour les régions accueillantes car les jeunes retraités disposent le plus souvent d’un pouvoir d’achat satisfaisant et ne manifestent guère de besoin social. Toutefois, au fil de l’avancée en âge, le jeune retraité devenant vieux retraité exprime progressivement de nouveaux besoins, notamment sociaux. Aussi, les caisses sociales doivent anticiper l’évolution des populations des jeunes retraités qui ont une vocation naturelle à vieillir. À cet effet, j’avais une idée financière afin de diminuer encore plus les contraintes financières des caisses sociales franciliennes,. Ainsi, à l’occasion d’une rencontre avec Bertrand DELANOË, alors maire de Paris, et Jean-Paul HUCHON, président de la région Ile-de-France, je leur avais été suggéré de verser une prime pour chaque retraité formulant le choix de quitter la ville de Paris et la région Ile-de-France. Ma proposition n’a nullement été retenue ! En réalité, l’inégalité des migrations résidentielles des retraités demeure davantage fondée sur les décisions de nos contemporains.

En outre, la carte de France présente les différences de poids locaux des ménages de retraités. Ainsi, le territoire affiche des zones au sein desquelles plus de la moitié des ménages sont des ménages retraités, tandis que d’autres territoires comptent en leur sein une faible part de ménages retraités. Enfin, une troisième catégorie compte des territoires dont les populations de ménages retraités correspondent à la moyenne nationale. Par conséquent, les besoins des populations sont inévitablement différents selon les territoires.

Néanmoins, il convient de souligner les deux mesures possibles de la population des personnes âgées que sont d’une part, le vieillissement de la population, soit l’augmentation du pourcentage des retraités dans la population ; et d’autre part, la « gérontocroissance, » selon le néologisme que j’ai proposé, qui consiste à observer non le chiffre relatif, mais l’évolution du nombre de retraités en chiffres absolus. Une telle étude offre une cartographie divergente de la première car la gérontocroissance est urbaine. En effet, en dépit de l’émigration de bon nombre de personnes des grandes villes à l’âge de la retraite, le départ ne concerne toutefois qu’une part minoritaire de la population retraitée. Assurément, la majorité d’entre eux poursuivent leur existence au sein de leur ville, parmi leurs réseaux associatifs et familiaux et n’émettent pas le souhait de quitter leurs habitudes. Ainsi, un paradoxe naît : la migration ne concerne qu’une minorité de retraités, mais elle a un effet massif sur les territoires vers lesquels ils se dirigent. La gérontocroissance demeure urbaine et concerne particulièrement les territoires périurbains des grandes métropoles comme Lyon, Marseille ou Nantes.

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Il est nécessaire de conduire les deux analyses pouvant montrer des évolutions différentes entre le chiffre absolu et le chiffre relatif. Ceci entraîne des dynamiques différentes selon les territoires. Certains peuvent connaître une hausse de la proportion des personnes âgées de 65 ans, soit un vieillissement de la population, d’autres, à l’inverse, un rajeunissement de la population quand le pourcentage de leur population âgée de 65 ans tend à diminuer. Les données absolues de la gérontocroissance indiquent une augmentation du nombre de personnes âgées, mais il peut aussi exister une diminution, donc une gérontodécroissance. Le croisement des deux phénomènes se traduit par des résultats contrastés selon les territoires.

4. Les inégalités de moyens d’attractivité

Les territoires qui se rendent attractifs pour les activités économiques ou pour les activités dédiées aux populations retraitées ont des moyens pour répondre aux besoins. Il s’agit pour eux de faciliter la qualité de la vie et/ou de permettre un développement des outils d’accueil des entreprises. Or, la France repose sur un fort principe d’inégalités car les dotations globales de fonctionnement par habitant divergent selon les territoires. Aussi, selon l’État, les habitants à plus grande valeur demeurent les Parisiens. En effet, l’Etat considère qu’un Parisien vaut deux fois plus que l’habitant d’une commune de moins de 500 âmes. Ainsi, il verse une dotation par habitant à la mairie de Paris deux fois plus élevée qu’aux maires de petites communes.

Une telle politique inégalitaire provoque des effets de seuil. A titre illustratif, ceux-ci ont été particulièrement mis en évidence lors du recensement au sein d’une commune de l’Ouest de la France. En effet, le maire de cette dernière, afin de pouvoir atteindre une population de ses administrés de 200 000 habitants et obtenir ainsi la dotation adaptée au seuil, fit voter par son Conseil municipal une subvention accordée au cirque présent sur son territoire et toutefois en phase de départ. Ainsi, la prolongation des représentations du cirque permit la présence comptabilisée dans le cadre du recensement de la population nomade et l’octroi de la dotation maximale au maire habile. Ainsi, force est de constater que l’Etat participe aux inégalités, estimant que les grandes métropoles assument des charges de centralité dont seraient exonérées les villes de moindre taille. Une telle considération demeure discutable car une métropole a, par définition, une densité de population qui engendre des économies d’échelle significatives.

III. Les inégalités de services, le cas des médecins

L’ensemble des cartes diffusées ces dernières années illustrant les inégalités en matière médicale sont toutes erronées. Certes, il persiste des zones de densité médicale affaiblie. En revanche, des territoires par exemple du littoral breton apparaissent dans la moyenne en nombre de médecins par habitant. Et des zones apparaissent avantagées telles que le Sud de la France ou Paris. Or, une telle cartographie de la démographie médicale est fausse car son dénominateur est inadapté aux besoins réels. Le nombre de médecins sur un territoire donné ne devrait pas être rapporté à sa population statistique mais à la population présente en son sein. En effet, les médecins sont appelés à soigner non seulement les personnes domiciliées sur le territoire, mais également, tout individu présent sur le territoire pour des raisons professionnelles ou de loisirs. Or, la population présente sur le territoire français varie fondamentalement de la population statistique. le département des Hauts-de-Seine présente une population présente inférieure de 10 % à sa population statistique. En revanche, le département du Var, a une population présente supérieure de quasiment 200 000 habitants à sa population statistique, en raison de l’importance du tourisme. La région Bretagne affiche une situation identique. Par conséquent, le littoral breton qui se situe dans la moyenne nationale selon la cartographie classique de densité médicale, est en réalité dans une situation de pauvreté médicale compte tenu de son caractère touristique. Par exemple, le tourisme dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur (PACA) représente l’équivalent d’une

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population moyenne de 700 000 habitants et suppose par conséquent une adaptation des équipements en réseaux d’eau et d’électricité afin de satisfaire ce chiffre au delà de la population statistiques.

Donc, il est indispensable de modifier la méthode d’analyse des inégalités médicales et de considérer davantage la population présente au sein d’un territoire.

IV. Les inégalités dans la géographie urbaine de l’exclusion

À l’instar des données concernant les inégalités médicales qui couvrent le territoire national, les inégalités dans la géographie urbaine présente également un succès médiatique qui repose sur des analyses macro-économiques. Cependant, celles-ci masquent la réalité très diversifiée des territoires. En effet, il m’est apparu opportun d’étudier la géographie urbaine de l’exclusion dans la mesure où un certain nombre d’écrits expliquent que les villes se situent soit, dans un modèle américain qui dessine un centre habité par une population pauvre et une banlieue occupée par la classe aisée ; soit, dans le modèle européen au sein duquel les plus riches vivraient au centre de la ville et les pauvres à la périphérie. Aussi, pour examiner ce dernier paradigme coutant, je me suis attaché aux métropoles régionales françaises et créé un outil, l’indice synthétique d’exclusion. Ce dernier s’appuie sur les chiffres obtenus des CAF, de la Banque de France, qui a fini par me livrer les chiffres de surendettement par commune après avoir soutenu que ces derniers n’existaient pas, et de la Direction générale des Impôts. Ainsi, j’ai combiné treize indicateurs pour élaborer un indice synthétique d’exclusion. Le résultat démontre une exclusion davantage marquée, en général, dans les communes-centres que dans les périphéries. Tel est le cas de la plupart des grandes métropoles régionales que sont Bordeaux, Lille, Marseille, Nice, Lyon et Toulouse. Ceci dément par conséquent les analyses souvent avancées du paradigme rappelé ci-dessus. Certes, le phénomène de gentrification existe ; toutefois, il ne saurait nier la réalité fondamentale selon laquelle les taux d’exclusion au sein des communes-centres des grandes métropoles sont plus élevés que dans la périphérie. Il est opportun à cet effet de signaler que Lyon s’affiche comme une exception partielle à une telle observation.

Afin d’expliquer ce phénomène, il convient de souligner l’évolution des activités industrielles dans les grandes métropoles régionales. En effet, un certain nombre d’activités industrielles autrefois implantées en centre-ville ont disparu et laissé sans emploi de nombreux habitants. D’autre part, la présence des immigrants est davantage marquée en centre-ville, ainsi que les difficultés liées à l’insalubrité et la présence d’étudiants et de populations marginalisées.

En conclusion, il est fondamental de se méfier des poncifs délivrés au quotidien par les médias et qui ne correspondent aucunement à la réalité. Les facteurs d’inégalité territoriales sont multiples, certains sont structurels, tandis que d’autres tiennent à des comportements comme les comportements migratoires des retraités. Enfin, d’ultimes facteurs relèvent de décisions politiques sur lesquelles il convient de s’interroger.

Julien DAMON

Il est pertinent de relever que la première partie de la journée a d’ores et déjà offert une vision des territoires de la retraite, de la prévention sanitaire, de la fécondité ainsi que de la médecine. Désormais, le sujet qui nous réunit sera consacré à la question fondamentale liée à l’amélioration en matière de Protection sociale afin d’accompagner les réductions d’inégalités territoriales, si tant est que toutes soient véritablement souhaitables.

D’autre part, avant de vous délivrer les questions reçues par voie électronique, je soumets à Gérard-François DUMONT une remarque concernant les déplacements des retraités. En effet, a été évoqué le fait que certains déplacements de retraités avaient vocation à peser sur les caisses sociales. Or, j’estime

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