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Des pouvoirs du corps à l'éducation de l'individu et de la société : l'activité physique et sportive

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Des pouvoirs du corps à l’éducation de l’individu et de la

société : l’activité physique et sportive

NSENGIYUMVA Athanase Professeur associé, Université du BURUNDI

- Résumé

Le corps a toujours été sujet à des pratiques et des sollicitations qui ne cherchent qu’accroitre ses pouvoirs pour l’efficacité et la performance. L’Education physique, par l’accroissement des pouvoirs du corps, prépare à des fins de convenir à l’individu et à la communauté. Depuis le Burundi ancien, la gamme d’exercices physiques est riche et les tendances d’utilisation se sont multipliées. L’activité physique et sportive est aujourd’hui un instrument de cohésion et de rapprochement social, allant de l’éducation de l’individu à celle de la société.

- Introduction

Dès la naissance de l’enfant, des exercices physiques propres et adaptés sont proposés. A l’âge pubertaire, des jeux variés, culturellement définis, caractérisent le jeu des enfants. Aujourd’hui, le sport fait partie des activités privilégiées pour réparer les âmes meurtries par les déstructurations sociales et les inégalités qui en suivent afin de restaurer le vivre ensemble. La présente contribution montre qu’indépendamment des systèmes, doctrines et époques, l’éducation physique a toujours eu sa part dans l’éducation d’un burundais. Sur le plan méthodologique, en plus d’une analyse de terrain sur la singularité des jeux au Burundi, les matériaux mobilisés sont issus de différentes études menées sur la place de l’activité sportive dans la socialisation. Il s’agit de montrer les résultats de ces études réalisées dans le cadre d’exploiter les vertus sociales du sport à des fins de compréhension mutuelle et d’intégration dans la société pour groupe divergents.

1. Une éducation physique pour accroitre les pouvoirs du corps

Eduquer physiquement représente une action méthodique, progressive et continue de l’enfance à l‘âge adulte avec comme objectif d’assurer « le développement physique intégral, d’accroitre les résistances organiques, de mettre en valeur les aptitudes dans tous les genres d’exercices naturels et utilitaires indispensables, de développer l’énergie et toutes les autres qualités d’actions viriles, afin de subordonner tout l’acquis physique et viril» (HEBERT, 1947). KANT conçoit l’éducation physique « non pas seulement dans le sens de l’éducation du corps adressée à un homme soumis au déterminisme, mais plutôt l’être physique de l’homme chez lequel le corporel n’est qu’un cas particulier » (ULMANN J., 1989, p.408). Aujourd’hui, l’éducation physique couvre plusieurs domaines, allant de l’éducation corporelle à l’éducation morale. C’est aussi pour l’intérêt de la communauté car parfois les exploits individuels deviennent aussi collectifs.

L’éducation physique du Burundais présente des traits reconnus à toute éducation. Elle n’est pas séparable de la culture humaine dans la diversité de ses orientations. Le corps humain est soumis à des influences culturelles. Le corps ne se présente jamais sous une forme et dans des

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conditions qu’on pourrait dire de naturelles. Dès la naissance d’un enfant, un idéal physique lui est imposé en fonction des vues que la société, qui le revendique déjà comme membre. Dans ces conditions, les fins de l’éducation physique du burundais ne peuvent pas échapper à la nécessité qui s’impose à toute éducation.

Les grandes orientations éducatives de la société burundaise se résument en « un effort pour développer chez l’enfant une vie conforme à la nature, une tentative pour initier l’enfant à la culture, une manière d’harmoniser, avec les exigences du réel, le principe majeur que constitue en chacun de nous le désir de plaisir et enfin un désir d’élévation des enfants au niveau adulte ». (ULMANN J., 1989, p.450).

« L’éducation corporelle commence dans les bras d’une mère par un modelage du corps de l’enfant et des massages-étirements. En effet, chaque fois que la mère descend son bébé du dos (au réveil de l’enfant), avant de lui donner le sein, elle procède à de petits massages localisés suivis par des étirements (kugorora umwana »). « Assise par terre, jambes allongées, transversalement sur ses cuisses, elle couche le bébé à plat ventre. Après humectation de la face postérieure des genoux (le pli poplité, l’intérieur des coudes (le pli brachio-anté-brachial), la courbure lombaire et le cou, à la salive ou grâce à quelques gouttes de la sécrétion mammaire, elle promène, avec une légère pression son avant-bras sur les mêmes régions corporelles que nous venons d’énumérer ; ensuite, prenant l’enfant par les poignets, elle le suspend en l’air pour l’étirement général » (NAHIMANA S., 1997). Ce n’est qu’après quelques années que l’enfant commence à marcher et à jouer.

2. Les jeux traditionnels comme activités physiques et sportives

L’expression selon laquelle « le sport est vieux comme le monde », rejoint l’idée que « l’apparition du sport se situerait juste après la nourriture et serait l’expression d’une nature pulsionnelle primitive » (BROHM J –M : 175). De même, « les exercices physiques culturels que les anciens faisaient en vue de faire plaisir aux dieux étaient des exploits sportifs » (GILLET B., 1960). Mais, il n’est point de sport sans que l’esprit des sportifs suive, de façon consciente et élaborée, un certain nombre de règles ou de valeurs spécifiques liées à la discipline dans une perspective compétitive. C’est pour cela que Thomas ARNOLD qualifie de sport de « discipline, loyauté, self-government, esprit d’initiative, nécessité de l’effort et gain des qualités de virilité et de courage grâce aux compétitions, dépassement de soi, recherche de performance et des progrès. C’est le sport sous la forme originelle : jeu, compétition, formation tant physique que morale et intellectuelle. » (ULMANN J., 1989, p. 329).

« Les Burundais se sont, de tout temps, adonnés à des exercices physiques, sous forme de compétitions ludiques, pour se détendre. Il s’agissait des exercices exécutés pour se maintenir en bonne santé ou pour se guérir »1.

Autant les enfants ont toute une série de jeux que les adultes. Parmi les jeux d’enfants, la première place revient aux « jeux de combats », chez les garçons, assimilable à la lutte ou à la

1 NSENGIYUMVA A. La dynamique de l’éducation physique au Burundi, in, NAHIMANA S. et al, Sport,

Santé et société, les staps pour l’épanouissement harmonieux de l’Individu et de la société, EUE, Saarbruken, 2015

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boxe suivant les règles fixées à l’avance : soit c’est juste faire chuter le partenaire et l’immobiliser par terre sans le frapper, soit c’est juste faire des coups de point jusqu’à ce que le vaincu abandonne. Dans tout cela, le respect des règles et des consignes est strict. A côté de « kunagana » (la lutte), le jeu masculin est la marche en « appui tendu reversé » (amagendera). Il s’agit de couvrir une distance déterminée dans cette position.

Les garçons font des concours au lancer de bâtons. Chacun prend deux baguettes et ils les lancent l’un après l’autre comme des javelots à partir du même endroit et dans la même direction. Quand on a jeté plus loin son bâton, on prend celui de l’autre et on l’ajoute aux siens, et celui qui en a le plus à la fin a gagné. Pour les jeux de balles, les enfants confectionnent des balles avec toutes sortes de matériaux élastiques. Ils se les lancent ou tapent dessus avec un bâton. On joue également à cache-cache : l’enfant débusqué doit à son tour se mettre à la recherche des autres. On pratique le saut en hauteur par-dessus une ficelle tendue aussi haut que possible ou par –dessus un bâton.

Sur les branches souples et résistantes, les garçons se construisent des balançoires (ikivuma). Sur des terrains à pente prononcée, ils jouent à la glisse à l’aide d’un tronc de bananier (igitumbutumbu) sur lequel on s’assied et fait dévaler jusqu’en bas de la pente. S’il a plu, les glissades sont effectuées directement soit debout en s’appuyant sur le pied avant (technique de l’arête extérieur ou du talon), soit à genoux : « guserereka ».

Quant aux jeunes filles, elles portent des paniers sur leurs têtes et parcourent une certaine distance. La consigne est de ne pas faire tomber le panier durant toute la course. Les jeune filles s’adonnent également au jeu de pierre lancée dans des carrées tracées et les jeunes filles rivalisent en parcourant le plus rapidement la figure tracée. C’est aussi le jeu d’échange de balle à trois où les points se gagnent en esquivant la balle. L’autre jeu féminin favori est la danse. Les jeunes femmes composent des chansons et s’entraînent à faire des pas de danse qu’elles ont vus exécuter par leurs aînées lors des fêtes ; un jour, elles s’exhiberont à leur tour. Elles s’adonnent aussi à quelques jeux de course. Le jeu mixte consiste à emballer les jambes dans un sac et en sautillant, parcourir une distance d’une centaine de mètres.

Sur les collines, les premiers espaces consacrés aux jeux de course sont notamment l’ubute, un jeu qui consiste à poursuivre un adversaire où le poursuivi touché devient le poursuivant. C’est également le jeu d’intambwe (jeu de lion). Il s’agit d’une course-poursuite : ceux qui jouent le gibier-cible du lion doivent se rendre d’un camp à l’autre en évitant le lion qui cherche à toucher sur le maximum de fugitifs. Existe aussi l’inkoni ou le jeu du drapeau. Parallèlement à ces jeux, nous enregistrons beaucoup de terrains réduits de football. Ce sont des terrains vagues situés sur les aires de pâturages ou à proximité des points d’eau, non délimités et sur lesquelles les jeunes garçons utilisent « ikibangano » (ballon fabriqués dans du matériel local) pour jouer.

A travers ce genre de vie typiquement culturelle, l’on se rend compte que les Barundi sont également obligés de s’adonner à l’exercice physique qui relève de l’activité de production. Ils sont de grands marcheurs et de grands travailleurs. Dans un pays où les bêtes de somme et les attelages sont inconnus, un pays où même la bicyclette (sans parler de véhicules motorisés) est un des grands signes extérieurs de richesse, dans un pays où les habitations sont dispersées sur les collines, la marche est une activité non seulement de masse mais vitale et la force humaine est primordiale partout.

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Pour se rendre aux champs, il faut marcher plus ou moins longtemps. Il en est de même pour les nombreux déplacements effectués sur l’« itongo » que l’on entretient. « Les huttes étant perchées à mi-hauteur des collines, il faut toujours descendre jusqu’au fond de la vallée puiser de l’eau. Chercher du bois de chauffage, c’est marcher à travers les boisements, derrière son troupeau on marche, on traverse monts et vallées pour se rendre visite ou pour aller courtiser les « grands » (gushengera). Pour se rendre à la place du marché ou à quelque centre administratif, sanitaire, scolaire ou missionnaire, il faut faire des kilomètres à pied » (NAHIMANA, S. 1997).

En plus, les enfants, déjà attachés aux activités ménagères (aller chercher de l’eau, chercher du bois de chauffage, …. ), sont obligés de parcourir de longues distances pour aller à l’école. Là aussi, une séance d’éducation physique est prévue, non pas sous forme récréative mais plutôt comme relaxation devant faciliter l’apprentissage intellectuel.

Le jeu représente un divertissement mais aussi la mise en œuvre des pratiques véritablement opérantes à l’égard de la gloire. Certains exercices étaient conçus pour préparer une guerre de conquête de territoire, rivalités qui s’observaient entre les différents Baganwa et Batware. C’est le cas des jeux d’ubute, iminagano(lutte) ;ninde atinya intambwe( jeu de capture),

…qui, en fin de compte, préparait physiquement les jeunes. Pour les Ingabo, les exercices sont

à la fois pré-militaires et post-militaires dans le sens où les préparations physiques réparaient des combats meurtriers en même temps en préparant à de nouvelles luttes. Les préparatifs aux expéditions guerrières étaient un véritable entraînement physique assidu. Ils étaient prolongés à l’image de la préparation du soldat « classique » dans le système « parcours du combattant ».

Les épreuves physiques rentraient également dans le souci de soins corporels : « un désir que le corps soit non seulement disponible mais dispos » ou « un désir religieux de purification » (ULMANN J., 1989, p.10). Il est certain en tout cas que les mains sont lavées avant et après le repas. Après le combat, la chasse, ou un long voyage, les héros se plongent dans la fraîcheur des marais ou des rivières. La toilette est suivie d’une onction d’huile qui fait bien partie des soins corporels.

La danse faisait également partie des activités physiques. Elle était pour le Murundi une manifestation artistique, un moyen d’expression et de communication des sentiments. Prenons le cas du tambour. Cette danse très marquante de la culture burundaise, s’avère être un véritable spectacle pour les pratiquants et pour les spectateurs. La danse au tambour est une activité qui renforce les muscles, la souplesse Elle exige des qualités physiques pour permettre une bonne exécution du mouvement. La répétition du geste est la clé de la réussite du mouvement. C’est dans cette répétition régulière et ordonné que chaque tambourinaire aura recours pour augmenter la puissance musculaire et l’endurance afin de mieux utiliser les ressources nerveuses pour se résistance cardiaque.

Un tambourinaire doit avoir une condition physique suffisante pour exécuter de bons mouvements pendant la danse et ainsi minimiser les risques de blessure pendant les multisauts et les bondissements. Du point de vue technique, la préparation d’un tambourinaire consiste à développer les habilités indispensables pour frapper le tambour avec rapidité et cadence en intégrant les différentes combinaisons liées à cette danse. Tactiquement, le tambourinaire doit savoir gérer l’espace et l’énergie pendant le tambourinage. Il doit également se préparer à être endurant pendant toute la cérémonie.

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Mais, bien que le sport reconnaîtrait tous ces exercices pour siens, cela n’est pas encore de la pratique sportive car le sport exige autre chose qu’une pratique, ou le simple désir de jouer. Pratiquer le sport, c’est rechercher la performance.Dans ce sens, le sport devient « tout genre d’exercices ou d’activités physiques ayant pour but la réalisation d’une performance et dont l’exécution repose essentiellement sur l’idée de lutte contre un élément défini : une distance, un obstacle, une difficulté matérielle, un danger, un adversaire, un animal et par extension, soi-même » HEBERT (G., 1993, p.7).

3. Education du corps et du caractère

L’idée d’inscrire un cours d’éducation physique dans l’enseignement vise l’harmonisation des théories en rapport avec l’éducation simultanée du corps et de l’âme. A l’époque de la Renaissance, l’école fut un lieu où l’enfant apprenait des connaissances purement « intellectuelles ».Avec le temps, ROUSSEAU réalise que « l’activité physique est le mouvement, la base, le fondement même de l’épanouissement humain puisqu’il est, en quelque sorte, créateur de l’intelligence » (ROUSSEAU J.-J, 1966, p.87).

De surcroit, « l’âme ne peut être droitement entretenue et formée si le corps est négligé, ni le corps sans l’âme. Il est donc nécessaire que les deux notions prospèrent ensemble... » (ULMANN J., 1989, p.158). « Le corps peut augmenter ou diminuer les ressources intellectuelles de l’âme de l’individu, favoriser ou rendre impossible son équilibre moral » (ULMANN J., 1989, p.159). C’est pour cela qu’on a introduit l’activité physique à l’école pour éviter de « ne pas couper de la vie une jeunesse qui est destinée à la vie, non à la contemplation et à l’étude » (ULMANN J., 1989, p.157). Ainsi, au Burundi, ce sera à partir des institutions scolaires et militaires que le modèle d’enseignement des activités physiques et sportives se diffuse dans toutes les couches de la société.

Aujourd’hui, « les exercices auxquels sont soumis les militaires burundais visent la formation du caractère en matière d’audace et d’endurcissement physique. C’est notamment de longues marches de nuit, des épreuves physiques dures pour habituer le candidat à une situation de combat, des combats sans armes, … » (NYENIMIGABO, J.J., 2007).

Les pratiques sportives chez les militaires sont liées au métier. C’est le cas du parcours d’obstacles et du cross-country, utiles pour la résistance militaire. Le Judo est également utile pour les policiers, les gardiens de usines et même pour le militaire quand il s’agit d’un combat corps à corps. En plus de la préparation physique, chez le miliaire, « les séances de REEI (règlement de l’évolution e l’exercice de l’infanterie) ont pour but de faire acquérir au miliaire une attitude énergétique et dégagée. Elles lui inculquent des habitudes de discipline. Elles créent la cohésion et l’esprit d’équipe. Bien conduite et bien exécutées, elles développent en lui un sentiment de fierté et de force » (NIYONZIMA, 2014).

L’activité physique est décrite comme éducative par essence. Les bienfaits de la pratique sportive s’appuient sur trois dimensions : améliorer les relations interpersonnelles, canaliser l’agressivité, dépasser ses limites. Ces trois objectifs permettent l’apprentissage de la règle sportive devant conduire à l’intériorisation de la règle sociale. Les disciplines sportives sont susceptibles de développer des compétences qui relèvent des catégories auxquelles elles appartiennent : les règles du jeu assurant l’essentiel de l’acte éducatif. Cette logique de transfert entre règles sportives et règles sociales est un facteur d’établissement du vivre ensemble en partant du postulat que le pratiquant respecte les règles,

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4. Etablir le vivre ensemble par des activités sportives

Aujourd’hui, « le sport tend à devenir l’opium de la fraternité entre les peuples, de la compréhension entre l’oppresseur et les opprimés. Il contribue à l’amélioration des capacités d’action d’adaptation, permet à l’homme de découvrir et d’améliorer les gestes clés de la socialisation » (BROHM, 1968).

Comme facteur d’inclusion lié au genre, « les activités sportives aident à démonter certains stéréotypes, à remettre en question les modèles socioculturels imposés aux femmes et aux jeunes filles et à aborder les rôles des femmes et des hommes dans la société burundaise. Il fournit aux femmes et aux jeunes filles l’occasion d’améliorer leurs contacts sociaux, d’accroître leur participation à la vie publique et de montrer leurs valeurs. En effet, sur le plan national, les jeunes femmes sont organisées en équipe de Volley-ball, Basket-ball, de handball. La participation féminine dans des tournois internationaux d’athlétisme en devenue régulière. Un championnat de Football féminin est aujourd’hui organisé et la qualité technique des joueuses est appréciable2 ».

Le sport contribue à l’épanouissement personnel par l’acquisition d’une expérience individuelle et collective. L’exercice de compétence sociale au sein du groupe favorise l’intégration et le sens communautaire. Le sport offre un cadre d’apprentissage qui permet à chacun d’acquérir de manière ludique et amusante des compétences sociales fondamentales telles le travail en équipe, la connaissance des règles contraignantes, le sens de l’organisation, la gestion du temps libre ou la maîtrise d’émotions fortes.

Lors d’une étude effectuée sur la contribution des activités physique et sportive à l’intégration des Batwa dans la zone Buterere en mairie de Bujumbura et sur la colline ZG en commune GT (MBONIHANKUYE, 2004), il était organisé un jeu qui regroupait les Batwa et le non Batwa. A la fin des rencontres, les joueurs ont affirmé que « la rencontre permet de se connaitre et de se familiariser en jouant. Tous les Batwa interrogés disent « accepter le concours des APS dans l’établissement des relations socio-affectives positives avec les non BATWA ». En effet, le but des APS est de supprimer les préjugés et la discrimination qui entraine des effets sur le psychisme d’un individu. Avec l’organisation de ces rencontres à Buterere et à Zege, le constat était que l’attitude de mépris de crainte, d’infériorité ou de supériorité n’avait plus de place. De surcroit, comme le disait un des joueurs rencontré sur le terrain, « pendant le jeu, si quelqu’un commet une faute, l’arbitre brandit un carton envers le fautif ». Cela permet de respecter l’autre. Ce qui montre que le jeu contribue à l’apprentissage social. C’est dans cette perspective des normes de jeu qu’il finira à apprendre les normes de la société comme illustré dans les propos d’un des Batwa selon lesquels « lors de rafraichissement, nous partageons aisément un verre avec les autres sans exclusion ni crainte »

Dans une étude intitulée, « Intégration sociale des enfants de la rue: quand le sport fait la différence » (NSENGIYUMVA, 2012) au cours de laquelle je confrontais deux groupes d’enfants ayant des logiques de vie différentes: des élèves du cycle inférieur au Lycée de l’Amitié du quartier Ngagara de la mairie de Bujumbura et les enfants de la rue de Bujumbura, j’ai pu expérimenter l’idée d’utiliser le Football dans l’intégration et la

2 NSENGIYUMVA Athanase, in La dynamique de l’Education physique au Burundi, i, NAHIMANA S. et al,

Sport et société, les stps au service de l’epanouissement hamonieux de l’individu et de la société, EUE, Saarbruken, 2015

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socialisation des enfants de la rue. Après Huit(8) rencontres organisées , j’ai pu rassembler des matériaux pendant 4 mois sur deux groupes d’enfants ayant des logiques de vie différentes pour les soumettre à une et même logique sportive qui servira de base d’une nouvelle forme de vision.

Les observations ont permis de rassembler des données qui ont permis d’établir une évolution en phases progressives et ainsi établir une comparaison entre l’avant et l’après- expérimentation. Des indicateurs objectivement repérables, mesurables et visibles des dimensions du sport ont été observés. Le Football est devenu un mécanisme de rapprochement en exploitant les qualités des enfants de la rue, en confrontation avec les autres enfants éduqués en famille, pour leur permettre de s’intégrer dans la société.

Alors que le premier contact entre ces deux groupes d’enfants affichait un climat de méfiance, progressivement le jeu devient rassembleur, L’indicateur du rapprochement par le Football s’est produit quand j’ai manifesté l’intention de faire le don du ballon qu’on utilisait pendant l’expérimentation. Après s’être heurté au fait qu’il n’y en avait qu’un seul ballon pour deux équipes, ll fallait que les deux équipes se la partagent. D’une manière spontanée, les lycéens, par la voix de leur capitaine, cèdent le ballons aux enfants de la rue car disent-ils, ils sont les plus nécessiteux. Après ce geste, les enfants de la rue proposent aux lycéens de les attendre pour rentrer ensemble. A la question de savoir le pourquoi de cette proposition alors qu’au début chaque groupe prenait son chemin, la réponse est la suivante : « avec les rencontres, nos deux équipes se connaissent désormais ». Un autre enfant martèle: « le trait d’union des enfants de la rue est l’espace-rue mais le ballon devient le nouveau trait d’union entre les lycéens et les enfants de la rue ».

A partir d’une étude effectuée en 2014 sur la contribution des activités physiques et sportives dans le processus de réintégration des ex-enfants soldats dans la province de MB ( NKUNZUMUREMYI, 2014), sur les 52 ex-enfants soldats interrogés pour savoir comment ils se sentent quand ils sont entrain de jouer avec les autres qui étaient restés sur les collines, 48 interrogés soit 92,30 % affirment se sentir mieux pendant que seulement 3,84% se regroupent en marge des autres. De même 76,92% de ces ex-enfants soldats acceptent que les activités physiques et sportives les aident à se familiariser avec les autres et entretenir de bonnes relations. A la question de savoir quels sentiments éprouvés lors des rafraichissements, 94,23% reconnaissent que ces derniers les réunissent autour d’un verre animé d’un esprit de partage accompagné par la le dialogue et la convivialité.

En exerçant une activité physique avec les autres, on renforce les relations sociales. Ainsi, par exemple, le travail physique avec les enfants-soldats a permis de créer un bon climat entre eux et l’entourage en diminuant la distance qui les séparent dans la mesure où « le sport est naturellement porteur de vertus de socialisation, d’intégration des règles, d’étayage des personnalités fragiles et des identités défaillantes, de développement de la fraternité » (Philippe SEGRESTAN, 2003). Ainsi, « pour pouvoir éprouver un sentiment d’appartenance, il faut d’abord qu’un individu s’intègre dans une équipe.

L

e concerné, ayant pris conscience des règlements qui régissent le jeu, de bonnes habitudes qui caractérisent les membres de son équipe, va à son tour inculquer ces normes aux autres (Nsengiyumva, 2014).

Les activités sportives permettent de supprimer les complexes et les discriminations qui entrainent des effets sur le psychisme d’un individu. Ces effets se remarquent surtout au niveau de l’estime de soi. Cela affecte l’individu dans ses valeurs morales. C’est en transformant en normes et en mœurs que les valeurs assurent une régulation de la vie sociale,

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la régulation des rapports des individus et des groupes dans une société. La suite sera l’adaptation de la personne socialisée dans le milieu dans lequel elle est appelée à vivre mais aussi intérioriser les éléments socioculturels pour communiquer et communier avec les membres des collectivités auxquelles l’individu appartient.

Conclusion

Tout au long de cette contribution, la préoccupation était de montrer qu’au Burundi, l’éducation physique a toujours eu sa part. La jeunesse a toujours été éduquée dans un contexte d’adaptation du corps aux circonstances du moment et aux visées de la société. Depuis sa forme traditionnel jusqu’à sa forme réglementée d’aujourd’hui, le jeu et par extension, le sport, joue, un rôle dans l’éducation corporelle et sociale de l’individu. Le sport est aujourd’hui utilisé comme un instrument de sensibilisation, de rapprochement social, d’éducation de l’individu et de la société.

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Bibliographie

1. BROHM J -M.- Pour une sociologie du sport in : QUEL CORPS ? 2. BROHM, J. M. Sociologie politique du sport, Paris, PUF, 1968

3. GAGIGAL (-).- « Progrès sportif et progrès de l’homme in : « FEDERATION SPORTIVE ET GYMNIQUE DU TRAVAIL.- Sport et progrès de l’homme. Colloque International

organisé par la FSGT du 21 au 24 mai 1995

3. GILLET B.- Histoire du sport.- Paris, PUF, 2è édition, 1960, (1949),

4. HEBERT (Georges).- Le sport contre l’Education Physique.- Paris, Editions « Revue EPS », 1993

5. J.J. NYENIMIGABO, Le sport et l’éducation physique au Burundi, l’Harmattan, 2007, 6. J. ULMANN, ULMANN (J.).- De la gymnastique aux sports modernes. Histoire des

doctrines de l’éducation Physique.- Troisième édition revue et augmentée d’un essai Que faut-il entendre par Education physique ?- Paris, Librairie Philosophique J. Vrin, 1989, (1ère

édition, Presses Universitaires de France, 1965).

7. NAHIMANA (S.).- Techniques du corps et développement. La pratique et les

représentations du sport au Burundi.- Thèse pour le Doctorat de l’Université de Bordeaux 2,

Mention : Ethnologie, option Anthropologie sociale et culturelle, Présentée et soutenue publiquement le 19 septembre 1997. [Diffusion : Lille, Presses Universitaires du Septentrion, (Thèse à la carte), 1999]

8. ROUSSEAU (J.-J).- Emile ou de l’Education.- Paris, édition Garnier-Flammarion, 1966 9. MBONIHANKUYE H ; Contribution des activités physiques et sportives à l’intégration des Batwa dans la société burundaise, enquête menée auprès des Batwa des zone Buterere et et Kanyosha , en mairie de Bujumbura et sur la colline Zege, en commune de Gitega ; Bujumbura, 2004., memoire

10. NKUNZUMUREMYI A, la contribution des activités physiques et sportives dans le processus de la réintégration de ex-enfants soldats dans la société burundaise, cas de la commune de Kibago en province de Makamba, Bujumbura, 2014

11. NIYONZIMA, J.M., Analyse structurelle et apport des activités physiques et sportives dans les unités de formation militaire, cas de l’ISCAM, Bujumbura, juillet, 2014, mémoire

10. NSENGIYUMVA, A. Intégration sociale des enfants de la rue : quand la sport fait la différence, Lausanne, 2012

Références

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