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Étude économique d'une norme volontaire

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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Étude économique d’une norme volontaire

Mémoire Jérémie Blouin Maîtrise en économique Maître ès sciences (M.Sc.) Québec, Canada © Jérémie Blouin, 2017

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Étude économique d’une norme volontaire

Mémoire

Jérémie Blouin

Sous la direction de :

Markus Herrmann, directeur de recherche

Maurice Doyon, codirecteur de recherche

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iii

Résumé

Que ce soit par contrainte, pour accroître la qualité perçue d’un bien, ou encore améliorer l’image de marque, sont des raisons pouvant expliquer pourquoi une firme voudrait entreprendre des démarches de normalisation. Dans ce mémoire, de nombreuses études sont résumées afin de bien cadrer un modèle théorique qui montre qu’un transformateur, en utilisant un intrant de meilleure qualité, peut offrir un produit à valeur ajoutée (innovation de produits) pour lequel les consommateurs sont prêts à payer et ainsi se prémunir de la concurrence du grand transformateur qui produit à coût plus faible (innovation des procédés). Nos résultats montrent que lorsque le transformateur artisanal choisit son niveau de qualité en fonction des paramètres du marché et indépendamment de leur concurrent, s’assure que ce dernier ne réduit pas au maximum ses coûts. Lorsque le producteur artisanal se différentie, les deux joueurs réalisent davantage de profits. Dans un deuxième temps, deux questionnaires sont bâtis afin de vérifier si les consommateurs sont prêts à payer pour une amélioration de la qualité d’un bien laitier en offrant une nouvelle méthodologie pouvant permettre d’évaluer la volonté à payer en présentant le bien comme privé et comme public. Dans les deux questionnaires, nous relevons des signaux indiquant de fortes préférences pour l’attribut sélectionné : l’accès à l’extérieur pour les vaches laitières.

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iv

Abstract

Constraints, increasing product quality or improving brand image are reasons that can justify why a firm, or a group of firms would adopt norms. In this master thesis, many studies about normalization are summarized to lay grounds for a theoretical model. The model shows that processors can produce higher value-added goods with higher a quality input (product innovation), for which consumers are willing to pay more. Our analysis shows that a small processor can mitigate market competition with a bigger processor that can decrease its unit cost (process innovation). Our results show that when the small processor chooses his quality independently from his competitor, the latter doesn’t reduce his costs aggressively. When both firms innovate, their profits increase. In the second part of this thesis, two questionnaires are constructed to assess the consumers’ willingness to pay for an increased quality milk. The two surveys allow us to treat a hypothetic type of milk having either a private or a public-good characteristic. Respondents in each survey signal strong animal welfare preferences, as the additional attribute for this type of milk is the access for cows to pastures.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Table des matières... v

Liste des figures ... vii

Liste des tableaux ... viii

Remerciements ... ix

Section 1 Introduction ... 1

1.1 ProAction : une norme volontaire de l’industrie laitière canadienne ... 2

1.2 Objectifs de recherche ... 3

1.3 Méthodologie ... 3

1.3.1 Modèle théorique ... 3

1.3.2 Questionnaires... 4

Section 2 Les normes volontaires ... 6

2.1 L’hypothèse de Porter ... 6

2.2 Les normes ... 9

2.3.1 Les normes volontaires ... 11

2.3 La différentiation de produits... 12

2.4 Les labels environnementaux ... 13

2.5 Les normes volontaires au Canada ... 15

2.5.1 Exemples de normes Canadiennes ... 16

2.6 Notes supplémentaires sur ProAction ... 17

2.7 La gestion de l’offre au Canada ... 19

2.8 Tendances dans la consommation de produits laitiers ... 21

Section 3 Modèle théorique ... 26

3.1 Préférences du consommateur ... 27

3.2 Le grand joueur ... 28

3.3 Le petit joueur ... 29

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vi

3.5 Équilibre sans innovation ... 32

3.6 Simulations ... 33

3.7 Conclusions du modèle ... 41

3.8 Limites du modèle... 43

Section 4 4. Questionnaire ... 44

4.1 Revue de la littérature sur les questionnaires de valeurs déclarées ... 44

4.1.1 Questionnaires de valeur déclarée et biais hypothétique ... 44

4.1.2 Questionnaires de type référendum et conséquence perçue ... 47

4.2 Méthodologie ... 50

4.3.1 Questionnaire « bien privé » ... 50

4.3.2 Questionnaire « bien public » ... 52

4.3 Hypothèses de recherche... 53

4.4 Résultats ... 54

4.4.1 Modélisation de la volonté à payer (bien privé) ... 54

4.4.2 Analyse des résultats : questionnaire bien privé ... 56

4.4.3 Modélisation du choix (bien public) ... 60

4.4.4 Analyse des résultats : questionnaire « bien public » ... 62

4.5 Discussion ... 66

4.5.1 Retour sur les hypothèses de recherche ... 68

4.5.2 Limites ... 69

4.5.3 Apport ... 70

Section 5 Conclusion ... 71

Références ... 73

Annexe A ... 76

Prix du lait en épicerie ... 76

Annexe B ... 78

Dérivées premières des meilleures réponses en innovation ... 78

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vii

Liste des figures

Figure 1.1 – Tendance de la consommation de lait ... 22

Figure 1.2 – Tendance de la consommation de crème, crème glacée et yogourt ... 22

Figure 1.3 – Tendance de la consommation de beurre ... 23

Figure 1.4 – Tendance dans la consommation de fromage ... 23

Figure 3.1 - Fonctions de réaction en innovation ... 36

Figure 3.2 - Changement dans les préférences du consommateur pour le bien 2 ... 37

Figure 3.3 - Changement dans les coûts de production du second joueur ... 38

Figure 3.4 - Changements dans les coûts d'innovation du grand joueur ... 39

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viii

Liste des tableaux

Tableau 3.1 - Valeurs de référence des paramètres ... 34

Tableau 3.2 - Équilibres sans innovation (#1) et avec innovation (#2) ... 34

Tableau 4.1 – Prix présentés aux répondats du questionnaire « bien public » ... 52

Tableau 4.2 - Statistiques descriptives de l'échantillon du questionnaire bien privé ... 58

Tableau 4.3 - Modélisation de la VAP du questionnaire de valeur déclarée ... 59

Tableau 4.4 - Statistiques descriptives de l'échantillon du questionnaire référendaire .... 63

Tableau 4.5 - Fréquence des préférences pour le bien-être animal, questionnaire référendaire ... 64

Tableau 4.6 - Modélisation de la VAP du questionnaire référendaire ... 66

Tableau 4.7 - Comparaison des volontés à payer des deux enquêtes ... 68

Tableau A.1- Prix du lait de vache et de noix ... 76

Tableau A.2 - Prix du lait de vache en sac ... 77

Tableau B.1 - Changements simultanés dans α1 et α2 ... 78

Tableau B.2 - Changements dans α1 ... 78

Tableau B.3 - Changements dans α2 ... 79

Tableau B.4 - Changements dans β1 ... 79

Tableau B.5 - Changements dans β2 ... 79

Tableau B.6 - Changements dans c1 ... 79

Tableau B.7 -Changements dans c2 ... 79

Tableau B.8 - Changements dans γ ... 80

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ix

Remerciements

Je voudrais d’abord remercier mon directeur de recherche, Monsieur Markus Herrmann, autant pour ses conseils qui ont servi à bien m’orienter que pour sa patience et ses recommandations qui rendirent le travail de recherche moins ardu et plus agréable. L’encadrement que Monsieur Herrmann m’a fourni est ce dont j’avais besoin pour être assidu et efficace dans mon travail.

J’aimerais ensuite remercier mon co-directeur de recherche, Monsieur Maurice Doyon, qui malgré son horaire surchargé a pris du temps pour moi. Je ne pense pas que beaucoup de directeurs répondent à leurs étudiants pendant leurs vacances et les fins de semaine. Sans lui, cette aventure n’aurait pas été possible.

Je tiens aussi à remercier Monsieur Stéphane Bergeron, pour ses précieux conseils qui ont permis d’accélérer grandement mes travaux sur les questionnaires, et pour sa passion qu’il m’a transmise, rendant ces travaux d’autant plus satisfaisants.

Un grand merci à la Commission Canadienne du Lait, leur financement a permis de produire un mémoire très étoffé et de faciliter la recherche.

Merci à ma famille : papa, maman, Josée, grand-maman, Maude, cette réussite est aussi pour vous et n’aurait pas été possible sans vous.

Finalement, merci à P-L, Ben, Joe, Antoine, Francis et Josué. Ce fut un plaisir de bûcher, s’obstiner et rire avec vous pendant les moments où nous avons étudié ensemble.

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Section 1

Introduction

La règlementation fait partie intégrante de l’environnement économique d’aujourd’hui. La plupart du temps pour réduire des externalités dues à des défaillances de marché, parfois parce que des groupes d’intérêt ou des lobbys les demandent. Par exemple,grâce à la pression populaire, le projet pétrolier de l’Île d’Anticosti ne vit pas le jour. Plusieurs instruments peuvent être utilisés; les instruments légaux tels les droits de propriété, les normes, les instruments économiques tels que les taxes, les subventions, les quotas et systèmes de permis. Les instruments légaux tels que les droits de propriété reflètent les intérêts des citoyens, cependant les recours peuvent prendre du temps. Par exemple, en octroyant les droits de propriété d’un lac à un pisciculteur, celui-ci peut obtenir réparation si un pollueur nuit à ses activités, mais ce dernier peut faire traîner le procès très longtemps. Les normes rendent possible un niveau précis de réduction d’externalité mais fournissent de moins bons incitatifs à l’innovation. Les taxes et subventions permettent (en théorie), une quantité produite optimale, que ce soit d’un polluant ou d’un bien générant des externalités négatives. Cependant, il faut connaître les fonctions de coûts et de dommages, ce qui est difficile à évaluer en pratique. Finalement, les systèmes de permis échangeables et les quotas, qui sont moins efficaces1 sont souvent critiqués à l’égard des dotations initiales mais offrent théoriquement d’excellents incitatifs à l’innovation.

La théorie économique classique suppose que les producteurs maximisent leurs profits sous contraintes (p.ex. reliées à la capacité de production). De ce comportement peuvent

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Les quotas sont généralement moins efficaces que les permis échangeables, car ces derniers permettent aux producteurs plus efficaces de générer des profits de la vente de permis et aux moins efficaces de réduire leurs coûts en achetant ces permis.

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2 naître des défaillances de marché, car les producteurs n’internalisent pas nécessairement tous les coûts reliés à la production, d’où la nécessité de l’intervention gouvernementale. De plus, la théorie prédit mal les comportements d’autorégulation parfois observés, notamment en alimentation (p.ex. les chaînes de restauration rapides et l’utilisation d’œufs de poule en liberté et bœuf sans hormones, les producteurs d’œuf et la traçabilité grâce au marquage, les producteurs laitiers et ProAction, etc.). Par ailleurs, plusieurs firmes ou organismes offrent des certifications, la plus connue par le monde est l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO). Alors que l’effet de réputation peut expliquer ces comportements, il est important d’avoir des modèles théoriques qui expliquent pourquoi des firmes au comportement rationnel mettent en œuvre des mesures pouvant augmenter leurs coûts.

Notre objectif premier dans ce mémoire consiste à enrichir la littérature portant sur les normes volontaires. Nous construisons un modèle théorique pouvant expliquer le comportement des firmes à investir dans la normalisation sans y être contraint. Également, il est intéressant de voir les bénéfices qu’en retirent les producteurs. Notre deuxième objectif consiste à vérifier si les consommateurs approuvent de telles mesures. Nous utiliserons les produits laitiers canadiens, qui sont soumis à des normes strictes afin de vérifier si la volonté à payer des consommateurs s’accroît pour un nouvel attribut non réglementé par les normes en vigueur.

1.1 ProAction : une norme volontaire de l’industrie laitière canadienne

ProAction est un programme mis en œuvre par les Producteurs Laitiers du Canada (PLC). Le but de la norme est d’avoir des critères vérifiables de qualité afin de prouver aux consommateurs qu’ils sont dignes de la confiance qui leur est accordée. Le programme est bâti par les producteurs ainsi que des experts du milieu (scientifiques, vétérinaires, etc.). ProAction est un ensemble de règles que doivent suivre les producteurs, et où ceux-ci font partie du processus déceux-cisionnel. noter qu’il peut y avoir des sanctions si les critères ne sont pas respectés. ProAction est un programme que nous pouvons qualifier de norme volontaire parce que l’ensemble des producteurs y a collectivement adhéré, bien que les contraintes soient individuelles et pour certains très contraignantes.

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3 Le programme se décline en six volets ayant des échéanciers différents :

 Qualité du lait et salubrité des aliments, atteints en 2015.

 Bien-être animal et traçabilité du bétail, à échéance en 2 1 .

 iosécurité et environnement, à échéance en 2 2 . 1.2 Objectifs de recherche

Le but de ce mémoire est en premier lieu de développer un modèle théorique pour justifier le comportement des producteurs laitiers canadiens. En second lieu, un questionnaire est construit et administré afin de connaître la volonté à payer des consommateurs face à une mesure de bien-être animal, soit l’accès à l’extérieur.

1.3 Méthodologie

1.3.1 Modèle théorique

Tel que mentionné par Tirole (1988) la différentiation verticale permet de réduire la compétition en prix sur un marché donné. Un modèle de théorie des jeux est développé afin de cerner quels aspects influencent les décisions d’achat selon la qualité des produits, qui permet la différentiation. Généralement, les transformateurs de fromage ayant le choix entre plusieurs intrants, (p.ex. de la poudre importée à bas prix, du lait canadien) ils peuvent réduire leurs coûts de production alors que d’autres peuvent tenter d’influencer la demande des consommateurs (p.ex. en augmentant la qualité perçue). La différentiation de produits peut se faire à l’aide d’un logo imprimé sur les emballages des produits, par exemple le logo « lait 100% canadien » qui garantit que les transformateurs utilisent uniquement du lait produit au Canada pour produire leur fromage.

Plusieurs études récentes se sont penchées sur la volonté à payer des consommateurs pour des produits laitiers et du fromage. Contre toute attente, Bonnet et Simioni (2001) trouvent que les consommateurs de camembert français n’accordent pas de valeur au signal que représente un label de type Appellation d’Origine Contrôlée (AOC). Ils remarquent également qu’une petite partie de ces consommateurs, à prix égal, serait prête à acheter le produit identifié par le label qui garantit l’aspect régional et la méthode de

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4 fabrication du produit. Vecchio & Annunziata (2011) découvrent que les consommateurs de fromages italiens qui connaissent les certifications Européennes à l’égard des labels de type AOC ou Indication Géographique Contrôlée (IGP) sont fortement influencés par ces labels dans leurs décisions d’achat. l’inverse, ils sont plutôt portés à se référer aux bas prix, à l’apparence ou à l’origine italienne lorsqu’ils ne connaissent pas ces labels. Deselnicu et Costanigro (2013) trouvent dans leur méta-analyse que les consommateurs sont prêts à payer une prime de qualité de 43,48% pour des produits avec des identifications géographiques (leur méta-analyse suppose que chaque label a le même impact). Pilone et al. (2 14) trouvent qu’un label de type IGP accroît la probabilité d’achat d’un fromage de type « Canestrato di Moliterno » de %, que l’augmentation de la durée de vie de ce fromage d’un mois augmente cette probabilité de 2.6%, une certification environnementale l’augmente de 17.5% et la hausse du prix d’un euro diminue la probabilité d’achat de 6%.

Le modèle suppose un jeu à deux joueurs, un qui décide du niveau d’investissement pour la qualité du bien qu’il produit, et un qui décide de l’investissement en équipement permettant de réduire ses coûts. Le jeu se fait en deux étapes, d’abord les joueurs se concurrencent en innovation et ensuite décident de leurs quantités. La résolution se fait à rebours, selon les fonctions de meilleure réponse qui sont propres à chaque producteur. En faisant des hypothèses sur la valeur de certains paramètres, il est également possible de vérifier comment les modifications dans les choix des producteurs influencent les décisions des consommateurs. Ceci est d’autant plus intéressant, sachant que la consommation de lait diminue d’année en année et les producteurs de lait ne peuvent modifier leur prix de vente. En effet, ils sont limités par le système de gestion de l’offre, car la Commission Canadienne du Lait (CCL) fixe les prix.

1.3.2 Questionnaires

En deuxième partie du mémoire, deux questionnaires sont construits. Les questionnaires présentent chacun le même lait dont le bien-être animal est rehaussé, de manière à offrir différents niveaux de conséquence perçue chez le répondant. Le premier consiste à

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5 proposer l’introduction d’un nouveau type de lait garantissant l’accès à l’extérieur pour les vaches laitières, en plus des offres existantes en épicerie. Le consommateur ayant le choix d’acheter ou non le bien une fois celui-ci mis en marché, il déclare une valeur qui maximise son utilité. Selon Carson & Groves (2007) la théorie économique prédit que si l’enquêté pense que les réponses au sondage serviront à décider du prix du bien, il déclarera une valeur plus faible afin d’influencer le prix du bien à la baisse. Au contraire, si l’enquêté croit que le sondage sert à vérifier si la mise en marché du bien est profitable, il a intérêt à gonfler la valeur déclarée. Alternativement, la conséquence perçue est assez forte (p.ex. anticipation d’une hausse de taxe) chez le répondant, celui-ci maximise son utilité en répondant la vraie valeur. En effet, s’il déclare une valeur trop élevée, le paiement lui fera perdre davantage d’utilité que rapportera le bien ou le projet alors que s’il déclare une valeur trop faible, il influencera la mise en marché du bien ou la mise en œuvre d’un projet à la baisse, ce qui nuit aussi à son utilité. Nous tentons d’exploiter ce deuxième phénomène en administrant un deuxième questionnaire qui présente le lait « augmenté » comme une norme pour l’industrie.

Le questionnaire sur la valeur déclarée qui présente le bien comme privé devrait montrer des signes de biais hypothétique forts, étant donné la nature non contraignante de ce type de questionnaire. Les répondants répondent en fonction de leurs croyances sur l’utilisation des réponses au sondage, un individu croyant influencer le prix déclarera une valeur inférieure à sa volonté à payer réelle tandis qu’un individu voulant influencer la mise en marché d’un bien déclarera une valeur supérieure à sa volonté à payer.

Alternativement, la construction du questionnaire de type référendum qui montre le bien comme public, permettra potentiellement d’obtenir des réponses non biaisées, conditionnellement à ce que la conséquence perçue des participants soit forte. En effet, en proposant l’abolition d’un type de lait au profit d’un nouveau produit à prix plus élevé, les répondants pour qui la probabilité de hausse de prix est importante auront davantage intérêt à révéler leurs vraies préférences. Grâce à cette méthode, nous pourrons potentiellement calculer le biais hypothétique pour un attribut de bien-être animal du lait de consommation.

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Section 2

Les normes volontaires

Le modèle théorique qui sera développé plus tard vise à représenter la décision d’un transformateur qui cherche à obtenir un lait ayant des attributs améliorés valorisés par le consommateur. Afin d’assoir ce modèle, plusieurs travaux sur l’hypothèse de Porter, les normes, la différentiation de produits, les labels environnementaux ainsi que des exemples de normes canadiennes sont présentés. La norme « ProAction » est discutée en fin de section, et sont présentées des informations sur le secteur laitier et des tendances dans la consommation. On y voit notamment que la consommation de lait est en diminution constante et les producteurs de lait ont les mains liées par la CCL quant au prix de vente de leur produit. Nous explorons si la différentiation représente une stratégie viable afin de répondre à un univers économique en constante évolution.

2.1 L’hypothèse de Porter

Porter et Linde (1 5) avancent que des règlementations bien mises en œuvre peuvent non seulement réduire des externalités, mais aussi rendre plus compétitives les firmes qui sont affectées. Selon les auteurs, l’innovation est au centre du phénomène, car elle peut réduire les coûts (p.ex. recyclage, consommation énergétique moindre) mais aussi augmenter la valeur des produits (p.ex. plus sécuritaire, plus durable), justifiant une prime de qualité. L’innovation peut aussi permettre aux firmes d’être plus efficaces avec leurs intrants. Ceci implique que les coûts reliés à la règlementation sont possiblement annulés, voire négatifs. Le problème soulevé par les auteurs est que le gouvernement doit intervenir, car l’innovation ne se fera pas volontairement. Ils ajoutent aussi que des règlementations doivent être assez sévères pour induire l’innovation, mais bien pensées pour ne pas imposer des coûts trop importants. L’hypothèse de porter semble contredire la théorie classique de maximisation des profits sous contrainte, mais les auteurs avancent que l’information est trop incomplète, que les conditions changeantes du marché et que les innovations technologiques font qu’elle ne se confirme pas en réalité.

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7 Des cas observés confirment ce qu’avancent ces auteurs, par exemple la compagnie M a réussi à réduire ses coûts en évitant de gâcher des réservoirs d’adhésif. En effet, la firme ne vérifiait pas les lots individuellement et les combinait, et en adoptant une nouvelle technique de tests de qualité à coût presque nul, 3M a réussi à réduire de 10 tonnes ses déchets dangereux et aussi à économiser 200 000$. Les auteurs avancent aussi qu’il existerait sous certaines conditions un « early mover advantage », encore plus marqué sur les marchés internationaux, dans la mesure où les règlementations sont en accord avec ce qui se fait à l’international. Ils illustrent ceci avec l’exemple des moteurs diésel à faible émission de Cummins, qui respectaient des normes environnementales aux États-Unis. Ce moteur permît à l’entreprise d’augmenter ses parts de marché à l’international. L’hypothèse de Porter est cependant bien débattue encore aujourd’hui. Plusieurs économistes classiques n’acceptent pas que la règlementation puisse induire de l’innovation qui se traduira par une hausse de la compétitivité, car les coûts de mise en place sont selon eux plus importants que les bénéfices, et que les cas favorables sont très rares.

Ambec et al. (2011) explicitent les arguments classiques. La règlementation environnementale sous forme de taxe et de permis oblige les firmes à allouer des intrants à la réduction d’externalités. Les normes technologiques forcent les firmes à utiliser des intrants et des procédés spécifiques, qui sont coûteux. La règlementation contraint les firmes à allouer du capital à des investissements non productifs. Ambec et al. (2011) rappellent que l’hypothèse de Porter ne dit pas que la règlementation assure l’innovation. Les auteurs soulignent aussi que les bénéfices de l’innovation ne sont pas toujours supérieurs aux coûts de mise en œuvre.

Dans leur revue de la littérature, Ambec et al. (2011) trouvent plusieurs études qui se détachent de l’hypothèse classique voulant que les entreprises poursuivent uniquement l’objectif de la maximisation de leurs profits. Un premier ensemble s’intéresse aux administrateurs de la firme, qui seraient averses au risque (Kennedy 1994), réticents à effectuer tout changement entraînant des coûts (Aghion et al. 1997; Ambec and Barla (2 7) ou partiellement rationnels ( abel and Sinclair- esgagné 1 ). (Ambec et Barla

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8 2006) modélisent un administrateur avec des préférences biaisées envers pour le présent, cet agent repousse les décisions d’innovation aux périodes subséquentes car l’investissement est coûteux à la période actuelle et rapporte des bénéfices dans le futur. La règlementation permet de pallier aux problèmes inhérents de ce type de gestionnaires qui ne maximisent pas les profits de la firme.

Le deuxième ensemble d’études retenu par Ambec et al. (2 11) identifient les défaillances de marché comme environnement dans lequel l’hypothèse de Porter peut être validée. Supposant une concurrence imparfaite, Simpson et Bradford (1996) montrent que des règlementations sévères donnent aux industries domestiques des avantages stratégiques. André et al. (2009) ajoutent les produits différentiés à la concurrence imparfaite, et montre qu’une norme minimale de qualité environnementale d’un produit solutionne un problème de coordination et génère une amélioration au sens de Pareto. Mohr (2002) et Mohr et Saha (2008) montrent que des retombées technologiques sont capturées par des firmes compétitrices, ce qui réduit les bénéfices de la recherche et développement (R&D) au niveau individuel. Popp (2005) mentionne notamment que dans certains cas les bénéfices de R&D peuvent être très importants, mais que lorsque les cas sont étudiés dans l’ensemble, leur moyenne est faible. Il existerait ainsi une faible probabilité que les gains soient significatifs.

La hausse des profits par la règlementation peut également être due à la réduction de l’inertie qui est due à l’absence d’un « first mover advantage ». En d’autres mots, la règlementation obligatoire permet de faire changer les pratiques dans une industrie où la mise en marché de produits nouveaux produits « verts » est stagnante. Le modèle présenté par Constantatos & Herrmann (2011) permet à un produit vert de générer une hausse des profits et du surplus du consommateur. L’adoption des procédés permettant la production de ce bien serait impossible sans intervention. Les auteurs supposent un jeu à deux joueurs à la Cournot, avec un bien qui induit des dommages et un bien vert. Les consommateurs ne voient pas le changement à la période où il prend place, et changer de type de bien augmente les coûts de production. Ceci fait que les profits de la firme qui innove seule sont plus faibles que si elle n’innovait pas. L’inertie vient du fait que les

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9 firmes n’ont aucun incitatif à adopter le produit vert, puisqu’il y a deux équilibres: un où les deux firmes produisent le bien dommageable, et un où les deux firmes produisent le bien vert. Finalement, les profits des firmes lorsqu’elles produisent toutes deux le bien vert sont plus élevés que si elles produisent le bien dommageable. Les consommateurs favorisent le bien vert, ce qui justifie l’intervention du gouvernement qui brise ainsi l’inertie sur le marché.

2.2 Les normes

Souvent, une norme devrait corriger une externalité environnementale. Elle induirait la quantité optimale de cette externalité caractérisée par l’égalisation du dommage marginal et du coût marginal d’évitement. La norme ne permet pas nécessairement d’atteindre cet objectif au moindre coût, et elle n’est pas considérée un instrument économique au même titre qu’une taxe ou un permis de pollution. Il faut distinguer entre politique efficace et politique effective, l’une permettant d’atteindre l’optimal social et l’autre ayant un objectif d’acceptabilité sociale. Alors que la politique efficace est désirable, selon la théorie de la capture de Stigler (1 71), des groupes d’influence peuvent avoir un impact sur les décisions du gouvernement pour obtenir des privilèges spéciaux ou des rentes particulières. Il est également possible que des firmes puissantes, malgré la pression populaire, puissent influencer le gouvernement à ne pas intervenir dans le marché. Notons que l’acceptabilité politique d’une norme est un enjeu pour toute règlementation obligatoire (taxes, subventions, quotas, etc.). Il n’y a aucune certitude sur l’optimalité sociale de l’intervention gouvernementale, des industries peuvent influencer les décisions du gouvernement qui instaurera des politiques sous-optimales.

u point de vue de l’économie de l’environnement, la norme tente de fixer la quantité optimale d’une externalité, où le dommage marginal est équivalent au coût marginal d’évitement. La définition alternative de norme selon Rousset et al. (2015) est la suivante:

Document approuvé par une autorité reconnue, selon lequel des caractéristiques, des marches à suivre, des règles doivent être respectées pour des procédés de production ou pour des produits mais qui n’est pas obligatoire. Elle peut également inclure ou traiter exclusivement d’exigences

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10 vis à vis des terminologies, symboles, emballages ou étiquetages car elles s’appliquent à un produit ou un procédé de production.

Une norme obligatoire est une approche centralisée qui restreint l’ensemble d’une l’industrie à avoir un comportement décrété par les autorités en place. Cette méthode est appréciée car elle permet, avec des mécanismes de surveillance adaptés, d’avoir un objectif environnemental précis. Elle est parfois coûteuse pour le public, car les pollueurs sont chargés de réduire les externalités qu’ils génèrent, moyennant certains coûts de mise en application et de contrôle. En théorie, la norme n’offre aucun incitatif à l’innovation. Selon Milliman & Prince (1989), les contrôles directs sont les instruments qui arrivent au dernier rang dans le classement selon les incitatifs à l’innovation. Soit la norme est respectée et il n’y a aucune incitation à faire mieux, soit elle n’est pas respectée et doit être appliquée quel que soit le coût. Alternativement, les permis échangeables (octroyés gratuitement ou par enchères), les taxes et les subventions arrivent à égalité et sont de meilleurs incitatifs à l’innovation.

Théoriquement, les normes sont simples et directes car il suffit de trouver les comportements optimaux des producteurs en matière d’externalités et de règlementer. Les pollueurs sont responsables des coûts pour respecter cet objectif. Les normes comportent cependant quelques inconvénients, et certains d’entre eux ne se retrouvent pas nécessairement chez leur pendant volontaire. Selon Vercammen (2011) « les normes sont peu efficaces car elles sont coûteuses à mettre en œuvre et à modifier, ignorent les différences entre les producteurs, et sont influencées par des groupes d’intérêt ».

Un autre problème des normes est que les consommateurs peuvent ne pas être en mesure d’évaluer concrètement si les producteurs respectent celles-ci. ousset et al. (2 15) disent que les biens produits par ces firmes deviennent des biens de croyance, et des problèmes de sélection adverse peuvent survenir, où les consommateurs, incapables d’évaluer la qualité, ne voudront pas compenser les producteurs pour la hausse de prix. Une norme peut aider une industrie à réduire l’asymétrie d’information et pallier au problème des biens de croyance, dans la mesure où elle est crédible. Un second problème des biens de croyance est que les firmes peuvent annoncer la mise en œuvre d’une norme, sans la

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11 respecter pour obtenir les avantages discutés plus haut. Il est essentiel de vérifier si la norme est effectivement mise en œuvre et si les avantages privés et la probabilité de défection sont bien réels.

2.3.1 Les normes volontaires

Les normes volontaires peuvent offrir un accès à des marchés lucratifs, évincer d’autres producteurs peu efficaces et si elles satisfont les exigences internationales, vont même rendre possible des exportations dans des législations ayant déjà ce type de norme. Elles permettent de différencier un produit et fournissent une garantie de qualité (et ainsi protègent l’image de marque). u côté agricole, Rousset et al. (2015) avancent que les principaux motifs d’engagement dans une norme sont reliés à l’augmentation de la demande des consommateurs pour la nourriture de qualité et pour une production durable. Si on considère que la qualité environnementale est un bien de luxe, ce qui veut dire que sa consommation augmente avec le revenu. Dans les pays développés, les consommateurs tendent à favoriser des biens de meilleure qualité et dont la production génère moins d’externalités. Les normes permettent un accès à ces marchés, en supposant que les objectifs de celle-ci sont intéressants aux yeux des consommateurs. Les normes peuvent également augmenter la valeur ajoutée des produits.

En passant en revue la littérature sur les normes obligatoires, Lim & Prakash (2014) concluent que celles-ci sont désavantageuses du point de vue de l’innovation car les capitaux engagés par les firmes sont plutôt axés sur le respect des critères que sur l’investissement en technologies permettant de réduire les coûts et les externalités. Lorsque les firmes ont effectué des investissements et respectent la norme obligatoire elles ont peu d’incitatifs à engager des ressources pour s’améliorer. Un problème peut aussi survenir. Les firmes vont faire pression pour que la technologie acquise serve de barrière à l’entrée. ans leur étude, les auteurs trouvent que les normes volontaires ne causent pas ces problèmes.

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12 Un autre avantage souligné par Maxwell et al. (2000) est que les firmes individuelles fixent des normes qui sont moins strictes et mieux adaptées à leurs contraintes. Le problème est que ces normes ne seront potentiellement pas optimales car la réduction d’externalités est trop faible (norme pas assez sévère), puisque les entreprises décident du niveau. Ces auteurs utilisent un modèle selon lequel les consommateurs font pression sur le gouvernement pour que celui intervienne et instaure une norme. Les entreprises, en réponse à la menace des consommateurs, vont engager des capitaux afin de corriger elles-mêmes les externalités, à un niveau assez élevé pour rendre négligeable tout bénéfice que pourraient tirer les citoyens à s’engager dans une mobilisation « environnementale ». Les auteurs trouvent que malgré le fait que le bien-être ne soit pas maximisé, il augmente tout de même. L’engagement des consommateurs dépend des coûts d’organisation (relié à l’effort fourni). ’après ces auteurs, lorsque les coûts d’organisation sont trop élevés pour les consommateurs, ceux-ci ne vont pas entrer dans le jeu d’influence. Les firmes ne vont pas corriger leurs externalités, car le gouvernement ne subira aucune pression citoyenne.

’après leurs résultats empiriques, un nombre élevé de groupes environnementaux actifs dans un tat où les émissions sont élevées impliquera des normes strictes, car les coûts de dépollution sont faibles et la menace est forte. Alternativement, un nombre faible de producteurs réduit le problème du passager clandestin (i.e. firmes qui ne respectent pas la règlementation, qui trichent). Ce problème est surtout néfaste pour les producteurs qui mettent en œuvre la règlementation (la hausse de coût creuse un écart important entre les firmes qui trichent et celles qui s’engagent véritablement dans la mesure). Finalement, lorsque les firmes ont davantage de liquidités, elles mettent en œuvre des normes plus strictes.

2.3 La différentiation de produits

Hotelling (1929) fut le premier à établir un modèle de différentiation horizontale de produits. La différentiation se fait dans l’espace : son célèbre exemple des marchands de glace sur la plage permet de bien comprendre son modèle. Deux producteurs (marchands de glace) vendent le même produit, à des emplacements différents. Le coût que subissent les consommateurs est composé d’une part par les coûts en espèces et d’autre part par les

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13 coûts de transport. La différentiation est due aux différences de coûts de déplacement, un consommateur préfèrera marcher 500 mètres au lieu de mètres pour s’acheter une glace. Les marchands de glace ont tendance à s’éloigner pour éviter qu’une guerre de prix se déclenche, et desservent chacun leur propre part du marché. Alors que l’illustration spatiale est très simple, le modèle peut aussi s’adapter pour plusieurs marchés.

La différentiation verticale est axée sur la qualité et les prix. Bien que les consommateurs veuillent toujours un bien de meilleure qualité pour un prix donné, si le bien de haute qualité commande une prime jugée trop importante par le consommateur, celui-ci n’achètera pas ce bien. Lancaster (1966) postule que les consommateurs tirent l’utilité des caractéristiques des biens. La divisibilité du bien en ses caractéristiques contraste avec la théorie classique d’équilibre générale, qui dit que la consommation du bien dans son ensemble génère de l’utilité. Il serait alors possible pour un producteur de modifier une caractéristique du bien qu’il produit et ainsi se spécialiser et réduire les impacts de la concurrence, en essayant d’exploiter une niche du marché.

Le modèle de Tirole (1988) est basé sur celui de Shaked & Sutton (1982). Il suppose deux firmes qui choisissent la qualité et ensuite se concurrencent sur les prix, et leurs profits sont nuls si elles ne se différentient pas. l’équilibre, les qualités seront différentes, une firme réduira sa qualité au minimum et l’autre l’augmentera au maximum. La firme au produit de meilleure qualité fait davantage de profits, ce qui fait que chaque firme voudrait produire le bien de haute qualité (first mover advantage). La concurrence se fait toutefois en qualité, et l’intensité du jeu ne s’en retrouve pas réduite. 2.4 Les labels environnementaux

Fisher et Lyon (2014) montrent avec leur modèle de base que les labels écologiques produits par une industrie augmentent les profits de celles-ci. Ceci est dû au fait que la différence entre le coût unitaire et le nouveau prix de vente est supérieure au prix du bien non-amélioré. Les profits des firmes qui ne s’engagent pas dans la certification n’augmentent pas. Les auteurs montrent également que les profits de l’industrie sont au moins aussi importants que si une organisation non gouvernementale (ONG) avait fixé

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14 les objectifs du label. Dans leur modèle, chaque producteur de label est capable de générer une norme qui maximise ses propres objectifs. L’ON veut maximiser l’amélioration écologique, l’industrie veut maximiser les profits des acteurs, et le gouvernement veut un équilibre entre ces deux objectifs. Les firmes vont respecter la norme qui permet de vendre à un prix supérieur aux coûts de respecter cette norme. Il est possible qu’une firme avec des coûts de respect très élevés décide de ne respecter aucune norme et de ne pas utiliser de label. Les auteurs montrent également que lorsqu’un acteur propose un label dans une industrie où un label existe déjà, la réponse du joueur présent sera de se différencier davantage du joueur qui entre. Un des labels étant plus stricte, les firmes à coût faible peuvent obtenir plus de profits en l’utilisant. Les firmes à coût élevé peuvent réaliser davantage de profits car elles peuvent désormais adhérer à une norme, plus souple. En revanche, les firmes à coût médian qui respectaient l’ancienne norme et qui ne peuvent plus respecter les nouveaux objectifs devront vendre à un prix moindre (près des firmes à faible coût) et réaliseront moins de profits.

Baksi et ose (2 7) étudient l’étiquetage frauduleux dans le cas des biens de croyance. Si les firmes sont honnêtes et ont des coûts nuls d’auto-labelling, l’équilibre et le bien-être agrégé sera le même qu’en équilibre concurrentiel. Si par contre les firmes ne sont pas honnêtes, il faut faire appel à des organismes indépendants pour fournir les labels, car elles utilisent des étiquettes pour leurs produits si les coûts de le faire sont inférieurs aux bénéfices. Quand les firmes polluantes peuvent mentir sur leur identité et prétendre qu’elles sont vertes, le gouvernement doit intervenir. Celles-ci doivent alors faire une analyse coût bénéfice, elles seront dissuadées de tricher si le gouvernement met en place un système de contrôle qui donne une bonne probabilité de détection et des pénalités assez importantes. Les auteurs trouvent que le moyen le moins coûteux du gouvernement pour prévenir ces comportements est d’obliger les firmes à étiqueter elles-mêmes leurs produits et d’effectuer des visites aléatoires dans les firmes pour vérifier si elles sont conformes à leurs labels. L’intuition derrière cette approche de régulation et de contrôle est que l’étiquetage par les firmes se fait à coût presque nul, alors que les autres méthodes requièrent que les firmes soient certifiées par des organismes de normalisation indépendants, induisant des coûts supplémentaires chez les firmes. Cependant, si les

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15 coûts de vérification sont très élevés, nuancent les auteurs, il est probable que l’option la moins coûteuse soit d’obliger les firmes vertes à être normalisées par un organisme indépendant. Les parts de marché se transfèrent des firmes propres vers les firmes polluantes car le prix du bien vert augmente à cause de l’introduction du label. Ceci fait que les coûts totaux d’étiquetage sont plus élevés lorsque les firmes polluantes sont règlementées.

2.5 Les normes volontaires au Canada

Alors que les normes volontaires apparaissent avantageuses, elles peuvent être utilisées frauduleusement par les producteurs. Pour protéger les consommateurs, le gouvernement canadien a par exemple instauré la « Norme nationale du Canada sur l’étiquetage volontaire et la publicité visant les aliments issus ou non du génie génétique » pour veiller à ce que les allégations de ce genre respectent un ensemble approprié de paramètres, et qu’elles soient ainsi informatives, intelligibles, vérifiables et non erronées ni trompeuses » (Office des normes générales du Canada, 2004). De façon plus générale, l’Office des normes générales du Canada permet aux consommateurs de savoir si des normes sont véritablement mises en application par les producteurs en fournissant des accréditations, sans toutefois se pencher sur le côté normatif, à savoir si elles sont assez strictes pour pallier aux externalités et socialement désirables.

Bien que chaque entreprise puisse établir elle-même des normes, il existe des organismes de certification qui ont des codes de conduite. Les producteurs peuvent y adhérer si leurs méthodes sont conformes à ces codes. Les organismes de certification vérifient et acceptent ou non une demande. Le meilleur exemple dans le domaine environnemental est la famille de normes ISO 14000, sur la gestion environnementale. Plusieurs entreprises du monde suivent ces normes et les utilisent pour promouvoir leurs produits. Selon l’ISO (International Organisation for Standardization), les avantages de leurs normes ne s’arrêtent pas là. Elles permettent la réduction d’utilisation de matières premières, de la consommation d’énergie, d’améliorer l’efficacité des processus, de réduire les déchets et les coûts de mise au rebut et l’utilisation de ressources renouvelables (Secrétariat central de l’ISO, 2 ). Alors que l’ISO est reconnu, il peut en

(25)

16 être autrement, et si les consommateurs n’ont pas confiance en un organisme de normalisation alors il sera très peu utile pour les producteurs d’y faire application. Le gouvernement peut intervenir pour deux raisons : pour éviter que des firmes tirent profit de fausses ou de mauvaises certifications, ou pour augmenter la confiance des consommateurs vis à vis de bonnes certifications.

2.5.1 Exemples de normes Canadiennes

Voici quelques exemples de normes Canadiennes, qui touche plusieurs secteurs différents.

• La norme CAN CSA- 1 -1 N 7 - 2 1 , Santé et sécurité psychologique en milieu de travail est une norme d’application volontaire dont l’objectif est de fournir aux employeurs canadiens des lignes directrices systématiques pour leur permettre de créer et d’améliorer sans cesse des milieux de travail psychologiquement sains et sécuritaires pour leurs employés. (Commission de la santé Mentale du Canada, 2 1 )

• Conseil Canadien des Normes de adiodiffusion (CCN ) : organisme de règlementation volontaire qui a été créé par les radiodiffuseurs privés du Canada pour traiter des plaines des consommateurs à propos des émissions des producteurs participants. Presque toutes les stations de radio et de télévision participent, cependant les sociétés d’ tat, les radiodiffuseurs éducatifs, les stations communautaires et de campus ne sont pas admissibles. Déontologie journalistique, violence à la télévision, représentation équitable et la définition de lignes directrices pour l’industrie sont les objectifs principaux du CCNR. (CCNR, 2016)

• coLogo : « Le programme canadien coLogo (également appelé Choix environnemental) vous aide à reconnaître les produits et services certifiés de façon indépendante comme respectant les normes strictes environnementales qui reflètent leur cycle de vie complet — de la fabrication à la disposition. Les normes coLogo sont élaborées de telle sorte que 20 % uniquement des principaux produits disponibles sur le marché puissent obtenir la certification. Plus de 7 000 produits — de la peinture au papier — arborent ce logo. » (Industrie Canada, 2012)

• Commerce équitable (Fairtrade Canada) : des programmes de commerce équitable, comme Fairtrade Canada, établissent des normes pour faire en sorte que les produits certifiés soient fabriqués de manière équitable socialement et économiquement, et responsable au plan environnemental. De tels programmes mettent de l’avant le développement durable et travaillent à améliorer les moyens de subsistance des agriculteurs et des autres travailleurs dans le monde en développement. (Ibid.)

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17 • Produits biologiques : les produits alimentaires qui sont conformes à la norme

canadienne sur l’agriculture biologique (à toutes les étapes, de la culture au marketing) et qui contiennent au moins 5 pour cent d’ingrédients biologiques, sans OGM (organismes génétiquement modifiés) peuvent arborer le logo Biologique Canada. Les producteurs doivent également adopter des pratiques de gestion durable pour éviter d’endommager l’environnement et assurer le traitement éthique du bétail. (Ibid.)

• Certification du Marine Stewardship Council : Les produits qui arborent le logo du Marine Stewardship Council (MSC) proviennent des pêcheries certifiées qui répondent à la norme du MSC en matière de durabilité de leurs activités. Ces pêcheries doivent démontrer la façon dont elles réduisent l’impact sur l’environnement, et qu’elles assurent la pérennité des stocks de poisson et disposent d’un système de gestion efficace conforme aux lois internationales et celles du pays. (Ibid.)

2.6 Notes supplémentaires sur ProAction

Selon les producteurs et les administrateurs, la norme est appliquée en premier lieu car les tendances dans la consommation de produits laitiers observées chez les consommateurs et les entreprises changent, et également pour conserver le titre de chef de file dans l’industrie agricole canadienne, et augmenter la productivité et la prospérité des fermes laitières. Selon des sources chez les PLC, ProAction est aussi mise en œuvre parce que les producteurs sont conscients de la relation privilégiée qu’ils ont avec les consommateurs, et veulent « redonner » à ceux-ci afin de préserver cette relation avantageuse. Selon ces mêmes sources, les consommateurs sont de plus en plus exigeants, ils s’attendent à ce que l’industrie laitière soit de plus en plus performante et que ses produits soient de meilleure qualité. En fait, ProAction est plutôt une norme axée vers les transformateurs et les acheteurs directs. ’une part, les producteurs veulent éviter que les transformateurs exigent des normes plus strictes, ce qui engendrerait des coûts plus importants. ’autre part, des normes garantissant des produits de qualité sont une valeur ajoutée pour les transformateurs.

Si des normes plus strictes exigent des investissements de la part des producteurs, seuls les intérêts reliés aux emprunts seront pris en compte pour l’augmentation des prix de vente fixés par la CCL. Autrement dit, les consommateurs ne défrayeront pas la totalité

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18 de la hausse de coûts. Aussi, des mécanismes de vérification sont en place, ainsi que des conséquences pour les producteurs fautifs (allant jusqu’à l’arrêt de la collecte), pour éviter des problèmes de passager clandestin. Les efforts de recherche et développement par le biais d’alliances stratégiques entre transformateurs, universités et centres de recherche fédéraux et provinciaux sont diffusées à l’ensemble de l’industrie (selon le site de la Commission Canadienne du Lait). En fait, l’innovation n’est pas laissée entre les mains des producteurs, ce qui devrait permettre d’éviter, du moins en partie, le problème du manque d’incitatifs à faire des efforts de recherche et développement au-delà des normes. Bien que les producteurs n’aient pas tous exactement les mêmes installations, la norme oblige ceux-ci à respecter un code de pratiques socialement désirables. Puisque la norme n’est pas approuvée par un organisme indépendant, l’aspect bien de croyance du lait est exacerbé. En effet, la majorité des attributs améliorés des produits laitiers ne sont pas observables par la consommation, et la norme n’aide pas les consommateurs à s’assurer que les attributs sont réellement améliorés. Les transformateurs peuvent observer une différence dans le rendement des produits laitiers qu’ils utilisent. La norme n’est pas publicisée afin de la faire connaître auprès des consommateurs, malgré que d’autres agents de la chaîne de valeur puissent l’utiliser. ien qu’il soit mentionné que les producteurs ont accepté collectivement de mettre en œuvre le programme, individuellement il est fort possible que ces producteurs ne soient pas en accord. Sachant qu’une norme ne permet pas d’obtenir un équilibre de marché optimal à moindre coût (de par la différence dans leurs coûts marginaux), certains producteurs feront face à des coûts plus élevés pour la respecter. ’un autre côté, ceux dont le produit est déjà de bonne qualité auront moins d’efforts à fournir pour atteindre les objectifs.

Un avantage de ProAction est d’épargner des coûts aux transformateurs. Par exemple, la chaine de restauration McDonalds a annoncé en 2014 que son approvisionnement en bœuf ne viendrait que de fermes durables certifiées. McDonalds effectue des vérifications avec les producteurs laitiers canadiens afin de voir si les critères de ProAction sont en accord avec les critères demandés par l’entreprise mondiale. Si c’est le cas, Mc onalds n’aura pas besoin d’inspecter les fermes laitières canadiennes, car elles respectent l’initiative ProAction. Le but de la multinationale n’est pas de dupliquer les efforts, mais

(28)

19 bien d’éviter d’effectuer des vérifications et d’avoir plusieurs codes de conduite. Les PLC évitent à McDonalds des coûts, et permettent à cette dernière d’avoir de la crédibilité face aux consommateurs (Milk Producer, décembre 2015).

2.7 La gestion de l’offre au Canada

Le débat entourant la gestion de l’offre n’est pas l’objet de ce travail. Les éléments présentés se veulent informatifs : le but principal de cette sous-section est de faire un portrait non-exhaustif du système pour justifier certaines hypothèses du modèle théorique.

Doyon (2011) mentionne que les conditions de la théorie néoclassique sont rarement rencontrées dans l’industrie laitière. Ceci est dû au capital, qui est relativement fixe et car lorsqu’une décision est prise, il y a des délais importants avant d’en voir les répercussions. Finalement, la périssabilité des produits et la résistance aux baisses de prixsont d’autres facteurs qui limitent l’applicabilité de la théorie économique classique. La majorité des pays du monde ont des mécanismes ou des structures d’entreprise (intégration verticale ou horizontale, gestion de l’offre, subventions, etc.) pouvant pallier aux problèmes venant de ces caractéristiques. Ces problèmes sont réels : le même auteur note que la période de 2007-2009 fut marquée par une diminution du prix du lait au niveau mondial. Pour pallier à ce problème les producteurs augmentèrent leur production afin d’augmenter leurs liquidités et passer la période à bas prix. Ce comportement est cependant contrintuitif dans un contexte néoclassique de maximisation des profits, car en augmentant la production le prix diminue encore plus fortement. Toutefois, cette stratégie s’explique mieux dans un contexte de maximisation de l’utilité du producteur. Le secteur laitier Canadien ne fut pas touché par cette crise, car le système de gestion de l’offre était en place.

Le système canadien est constitué de trois piliers : des quotas à la production, des restrictions aux importations et un prix basé sur le coût de production. Les quotas ont initialement été alloués selon la production historique et sont désormais obtenus par enchères, ne pouvant pas être échangés entre les provinces. Ils représentent environ la

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20 moitié de la valeur des fermes laitières : un quota équivalent à la production annuelle d’une vache coûtant environ 25 $. u côté de la fixation des prix, la Commission Canadienne du Lait (CCL) est responsable d’établir un prix de soutien auquel elle achète du lait écrémé en poudre et du beurre. Le prix fluctue en fonction des changements dans les coûts de production, le revenu disponible des consommateurs et l’inflation. u côté de la restriction des importations, le Canada permet l’importation de l’équivalent de 5% de la production domestique, et les tarifs douaniers sont entre 200% et 290%. Doyon (2011) explique que le Canada oriente sa production vers le marché domestique, ce qui en fait un petit exportateur au niveau mondial. L’auteur mentionne également que les échanges sont majoritairement constitués de fromage, de beurre et de lait en poudre et que les secteurs laitiers des États-Unis et de l’Union Européenne ont besoin de subventions à l’exportation afin d’avoir accès aux marché international. Notons que le traité de libre-échange avec l’Europe permet l’exportation non-tarifée de 32 000 tonnes (13 500 auparavant), ce qui représente 7,5% du marché Canadien (Fillion, 2016).

Les quotas ne permettent pas aux producteurs de développer des techniques de production plus efficaces générant des économies d’échelle. Cette situation est observée puisque le prix d’un quota est plafonné dans plusieurs provinces, si bien qu’au prix plafond l’enchère est remplacée par une distribution administrative qui résulte en l’impossibilité d’obtenir rapidement des quantités significatives. Les quotas réduisent potentiellement la compétitivité de la chaîne de production laitière.

La gestion de l’offre, comme toute mesure protectionniste, a des impacts sur les négociations de libre-échange. Avec un accord de libre-échange, les tarifs douaniers seraient réduits, ce qui nuirait possiblement à l’industrie laitière canadienne qui fait face à des coûts plus élevés. D’une part, car d’autres pays subventionnent l’exportation de leurs produits laitiers, d’autre part parce qu’ils ne peuvent pas bénéficier d’économies de taille. ien que l’industrie laitière canadienne ne soit pas compétitive au niveau des coûts de production, le libre-échange peut donner l’opportunité d’exporter des produits plus fins. Ceci est possible grâce à la différentiation de produits, pouvant potentiellement pallier au problème des coûts élevés.

(30)

21 (Garneau, 2014) recense les principaux arguments évoqués par les économistes qui critiquent la gestion de l’offre. ’abord, les prix que paient les consommateurs pourraient être plus élevés que si les producteurs étaient en situation de concurrence. De par leur pouvoir oligopolistique, le transfert de la rente des consommateurs vers les producteurs s’accompagnerait potentiellement d’une baisse du bien-être total. Aussi, puisque le marché n’est pas en contact avec l’étranger, la croissance de la productivité et de l’innovation peut être ralentie.

2.8 Tendances dans la consommation de produits laitiers

Une raison attendue pour motiver le comportement des producteurs laitiers à s’engager dans des démarches volontaires d’amélioration des procédés est de mieux se positionner face aux substituts qui prennent de plus en plus de parts de marché. Par exemple, le lait de soya remplace dans certains ménages le lait de vache, tout comme la margarine prend la place du beurre chez d’autres. Il est important de connaître les tendances dans la consommation nationale de produits laitiers pour savoir si les producteurs laitiers ont véritablement intérêt à augmenter la qualité perçue de leurs produits2.

2

(31)

22

Figure 2.1 – Tendance de la consommation de lait

Figure 2.1 – Tendance de la consommation de crème, crème glacée et yogourt

1800 1900 2000 2100 2200 2300 2400 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 K il olitr es

Lait de consommation (1%, 2% et 3,25%)

0 50 100 150 200 250 300 350 400 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 K il olitr es

Crème, crème glacée et yogourt

(32)

23

Figure 2.2 – Tendance de la consommation de beurre

Figure 2.3 – Tendance dans la consommation de fromage

On observe une tendance à la baisse pour la disparition intérieur 3 de lait de consommation (de l’ordre de 1 kilolitres, soit ,4 %) sur la période étudiée, alors qu’on observe une tendance à la hausse pour le fromage (augmentation de 2 6 tonnes soit 11,23% de plus). La tendance pour le beurre est moins marquée (augmentation de 9 tonnes, soit 9,8%), alors que la crème glacée a subi une importante baisse (diminution de 119 kilolitres, soit 38,1%). Finalement, la crème et le yogourt ont augmenté de manière

3

La disparition intérieure est la quantité rendue disponible sur le marché.

0 20 40 60 80 100 120 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 To nn es

Beurre

1700 1750 1800 1850 1900 1950 2000 2050 2100 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 To nn es

Fromage

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24 très importante (augmentation de 182 et 208 kilolitres, soit une hausse de 154,2% et 244,7% respectivement).

Les producteurs laitiers font indéniablement face à une tendance à la baisse à la consommation de lait (1%, 2% et 3,25%) depuis 1990, alors que la consommation de la plupart des autres produits laitiers est en croissance. Le lait de Soja, de riz, d’avoine et d’amande sont tous des produits substituts au lait de vache et peuvent être dans une certaine mesure coupables de cette baisse, alors que d’autres facteurs peuvent aussi influencer la demande, tel le vieillissement de la population. Pour combattre la concurrence, les producteurs laitiers n’ont pas accès à davantage de quotas facilement et ne peuvent pas bénéficier d’économies de taille afin de réduire leurs coûts de production, selon lesquels leur prix est basé. Une alternative à la baisse de prix est la hausse de la qualité perçue. Pour la suite, nous analyserons si une stratégie de hausse de qualité peut contrer la concurrence des produits substituts, mais aussi pour contrer la concurrence étrangère qui est possible grâce au partenariat transpacifique.

Une comparaison simple et non-exhaustive des prix du lait de vache et du lait alternatif (voir tableau A1 et A2 en annexe)4 révèle que les prix sont similaires dans certains commerces pour le lait de vache de marque Natrel ou Lactancia. Il faut mentionner que ces deux dernières marques sont du lait ultrafiltre, c’est-à-dire que leurs propriétés sont différentes. En particulier, la texture, le goût et la périssabilité sont améliorés et ils sont plus chers. Les laits de consommation de marque Québon, Nutrilait et Béatrice respectent les prix minimums5 pour les formats de quatre litres, alors qu’ils sont fixés au prix

4

Les données ont été collectées dans des supermarchés de la région de Québec, entre le 26 mars et le 30 mars 2016. Les prix sont affichés en $/litre pour faciliter la comparaison, et seuls les prix réguliers sont pris en compte.

5

Ces prix sont fixés par la Régie des marchés agricoles et alimentaires du Québec. La région 1 est celle où les observations ont été recueillies.

(34)

25 maximum pour les formats de deux litres6, et ce dans tous les commerces. Ces trois marques ont des prix très différents avec les laits alternatifs (ultrafiltre ou de noix). Par exemple, le lait de vache Québon 2% se vend partout à 1,58$/litre alors que le lait de soya se vend entre 2,10$/litre et 2,39$/litre, selon la marque et le détaillant. Alors qu’une des méthodes pour concurrencer une industrie est de baisser les prix, il semble que les substituts au lait soient plus chers que celui-ci. Puisque le prix est plus faible, les producteurs peuvent se tourner vers la hausse de la qualité afin de mitiger la concurrence. Un raisonnement similaire peut aussi s’appliquer aux fromages. Par exemple, des petites fromageries qui ne peuvent pas réaliser d’économies d’échelles peuvent tenter d’augmenter la qualité de leur produit afin de le différencier des transformateurs industriels qui produisent en grande quantité et vendent à bas prix. C’est ce comportement que nous tentons de modéliser dans la prochaine section.

6

Les détaillants ne sont pas tenus de respecter ces prix si le lait dont les caractéristiques sont particulières (durée, valeur nutritive et présentation), comme les laits ultrafiltres.

(35)

26

Section 3

Modèle théorique

Ce modèle analyse la décision de transformateurs de produits laitiers, car ce sont eux qui font face directement à la demande des consommateurs, et qui doivent s’approvisionner auprès des producteurs de matières premières. Plus précisément, nous cherchons à modéliser le choix des petites entreprises (producteurs artisanaux) à l’égard de la qualité des produits mise en marché qui dépend de la qualité des intrants qu’ils utilisent. Ceux-ci font face à la concurrence des producteurs industriels qui produisent à moindre coût. ’une part, ces grands producteurs peuvent bénéficier d’économies de taille, et d’autre part peuvent utiliser des intrants qu’ils importent de l’étranger à coût moindre. Afin d’illustrer les choix des transformateurs, imaginons le jeu entre producteurs de fromage artisanaux et industriels.

Nous supposons un jeu à deux joueurs. Un petit qui représente les petites fromageries, qui choisissent l’innovation de produit en décidant de sa qualité, ce qui leur permet de vendre à un prix plus élevé. Le différentiel de prix entre le produit du petit joueur et du grand joueur peut être considéré comme une prime de qualité. Tel que discuté dans la section précédente, les petites firmes peuvent réduire la compétition dans le marché en choisissant un positionnement distinct. La qualité du bien dépend principalement de la qualité de l’intrant choisi. Tel que discuté précédemment, un programme comme ProAction génère une matière première de qualité supérieure. Comme les Producteurs Laitiers Canadiens mettent en œuvre le programme pour répondre aux exigences des transformateurs, nous faisons l’hypothèse qu’il n’y a pas de différence entre la qualité du produit des producteurs laitiers et la qualité que choisit le transformateur artisanal. De plus, ProAction agit comme une norme minimale à respecter. Des transformateurs peuvent élaborer des stratégies avec certains producteurs pour que leur matière première dépasse cette norme de qualité, ce qui n’invalide pas notre modèle.

(36)

27 Le grand joueur représente les transformateurs industriels. Nous supposons que celui-ci peut investir massivement dans l’innovation des processus afin de réduire ses coûts et augmenter la substituabilité entre ses intrants, mais ne peut pas mettre l’accent sur la qualité de ses produits. Ce transformateur, au lieu de choisir la qualité va plutôt choisir un niveau d’investissement qui permet d’utiliser des intrants moins coûteux. Par exemple, l’innovation permettrait pour un transformateur de fromage donné d’utiliser de la poudre protéinée au lieu du lait, qui se transporte beaucoup plus facilement (un volume donné de poudre permet de produire davantage de fromage qu’un volume de lait). Ce processus de production permettant de réduire ses coûts, le producteur peut mettre davantage de produits sur le marché et les vendre à prix moindre.

3.1 Préférences du consommateur

Nous considérons un consommateur représentatif ayant le choix entre deux produits, celui du grand joueur (le transformateur industriel) et celui du petit joueur (la fromagerie artisanale), dont les quantités produites et consommées sont dénotées par respectivement. L’utilité que le consommateur retire de la consommation du second bien augmente avec la qualité, dénotée par , qui peut être vu comme un différentiel de qualité ( signifie que les deux biens sont de qualité identique). Nous utilisons la fonction d’utilité quadratique suivante7

:

( ) ( ) (3.1.1)

La forme quadratique admet une complémentarité (si ) entre les deux biens. Plusieurs consommateurs achètent à la fois du fromage industriel (p.ex. du cheddar style américain) et du fromage relativement haut de gamme (p.ex. de la mozzarella fraîche), ce que permet également de capter cette forme fonctionnelle. Les paramètres et sont

7

Cette fonction quadratique est basée sur celle présentée par Vives (2001), chapitre 6 en page 145. Elle fut modifiée pour inclure un paramètre de qualité au bien 2 qui influence l’utilité générée par la consommation de ce bien.

Figure

Figure 2.1 – Tendance de la consommation de crème, crème glacée et yogourt 1800190020002100220023002400199019911992199319941995199619971998199920002001200220032004200520062007200820092010 2011 2012 2013 2014KilolitresLait de consommation (1%, 2% et 3,25%)
Figure 2.2 – Tendance de la consommation de beurre
Tableau 3.1 - Valeurs de référence des paramètres
Figure 3.1 - Fonctions de réaction en innovation
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