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Fardeau des aidants dans le trouble cognitif léger amnésique

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Academic year: 2021

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Fardeau des aidants dans le trouble cognitif léger

amnésique

Thèse

Céline Mavounza

Doctorat en psychologie (Ph. D.)

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

Québec, Canada

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Fardeau des aidants dans le trouble cognitif

léger amnésique

Thèse

Céline Mavounza

Sous la direction de :

Carol Hudon, directeur de recherche

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Résumé

La présente thèse vise la caractérisation de la détresse émotionnelle et du fardeau des aidants de personnes se trouvant possiblement dans la phase prodromique de la maladie d’Alzheimer (MA), à savoir le trouble cognitif léger amnésique (TCLa). Dans la première étude (Chapitre 2), l’impact émotionnel perçu de plusieurs symptômes neuropsychiatriques (SNP) sur la détresse émotionnelle des conjoints et des enfants de personnes avec un TCLa est comparé à celui des enfants et conjoints de ceux qui ont la MA. La relation entre les SNP et la détresse émotionnelle est aussi examinée, de même que l’effet modérateur du sexe et de l’âge des aidants sur la détresse émotionnelle. Les analyses mettent en évidence l’absence de différence significative de détresse émotionnelle entre les aidants de personnes ayant un TCLa et ceux ayant la MA pour l’ensemble des SNP considérés. Les résultats rapportent un profil de détresse émotionnelle similaire entre les deux groupes de conjoints, de la MA et du TCLa, avec en tête de file la dépression, l’anxiété, l’apathie et l’irritabilité. Par contre, pour les aidants enfants, la détresse émotionnelle est significativement plus élevée pour ceux ayant un proche atteint de la MA. Par ailleurs, indépendamment de la relation de l’aidant avec le patient ou du diagnostic (TCLa vs MA) de ce dernier, il y a une relation positive entre la fréquence / gravité des SNP et la détresse émotionnelle des aidants de l’échantillon. L’effet du sexe et de l’âge des aidants sur la détresse émotionnelle due aux SNP n’a pas été démontré. Dans la seconde étude (Chapitre 3), la nature du fardeau (objectif et subjectif) et les symptômes anxieux et dépressifs sont caractérisés chez les époux aidants. Sont aussi explorées la morbidité psychologique et ses relations avec le fardeau, les caractéristiques sociodémographiques (c’est-à-dire le sexe et le niveau de scolarité) et la santé de physique de l’aidant. Les résultats suggèrent que les aidants présentent à la fois des niveaux élevés de fardeau subjectif et objectif et de morbidité psychologique (anxiété et dépression). Ils fournissent de nouveaux soins de santé, du soutien affectif et du transport à leur proche qui a un TCLa et près de la moitié d’entre eux vit un fardeau subjectif lié au stress. Dans l’échantillon, le fardeau subjectif des aidants prédit la sévérité de la dépression et de l’anxiété des aidants. De plus, lorsque l’on prend en considération les variables sociodémographiques et la santé physique de l’aidant, le niveau de scolarité est négativement associé à la dépression. Dans l’ensemble, cette thèse suggère que les aidants des personnes avec un TCLa pourraient avoir besoin d’interventions visant à réduire leur fardeau émotionnel.

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Abstract

The present thesis aims to characterize emotional distress and burden among caregivers of persons in amnestic mild cognitive impairment (aMCI), which is a probable prodromal stage of Alzheimer’s disease (AD). In the first study (Chapter II), the perceived emotional impact of a wide range of neuropsychiatric symptoms (NPS) was compared between children and spousal caregivers of patients with aMCI or AD. The association between the frequency and severity of NPS and caregivers’ emotional distress was also explored, as well as the relationship between age, sex, and caregivers’ emotional distress. The analyses revealed no significant difference in emotional distress between caregivers of persons with aMCI and with AD for all symptoms. The results indicate a similar emotional distress profile in both aMCI and AD spousal caregivers, with depression, anxiety, apathy, and irritability as the prominent symptoms. However, for children caregivers, emotional distress was significantly higher in caregivers of the AD group than those of the aMCI group. Furthermore, regardless of caregivers’ relationship to the patient or the latter’s condition (aMCI vs AD), there was a positive relationship between the frequency/severity of NPS and caregivers’ emotional distress. There was no effect of sex nor age of caregivers on the emotional distress due to NPS. In the second study (Chapter III), objective and subjective burden along with depressive and anxiety symptoms were investigatedin spouses of persons with aMCI. The relationships between psychological morbidity, burden, background and context variables (e.g., sex, education, and health problems of caregivers) were also explored. Results suggested that caregivers have both high levels of subjective and objective burden as well as psychological morbidity (anxiety and depression). They provide new health-related care, emotional support and transportation to the care-recipient. Almost half of them experienced subjective burden associated to stress. In the sample, subjective burden of the caregivers predicted the severity of their depressive and anxious symptoms. Furthermore, when considering the background and context variables, the level of education was negatively associated with depression. As a whole, the results of this thesis indicate that children and spousal caregivers of person with aMCI may need or benefit from targeted interventions in order to reduce the emotional burden related to their role.

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Table des matières

Résumé ... iii

Abstract ... iv

Liste des tableaux ... ix

Liste des abréviations et des sigles ... x

Remerciements ... xii

Avant-propos ... xiv

Chapitre 1. Introduction ... 1

La maladie d’Alzheimer ... 2

Les caractéristiques cognitives, psychologiques et comportementales ... 2

Le Trouble cognitif léger amnésique : phase prodromique de la MA ... 6

Les caractéristiques cognitives et neuropsychiatriques du TCLa ... 8

Les aidants dans la MA ... 9

Le concept de fardeau des aidants ... 10

Le fardeau des aidants dans la MA ... 11

Le fardeau des aidants dans le TCL ... 13

Les caractéristiques des aidants dans le TCL ... 14

La nature du fardeau des aidants dans le TCL ... 15

La mesure du fardeau et des facteurs de stress ... 16

Variables contextuelles influençant la relation entre l’aidant et l’aidé ... 18

Fardeau des aidants et caractéristiques propres aux aidants ... 19

Fardeau des aidants et caractéristiques propres aux personnes ayant un TCL ... 19

Fardeau des aidants et morbidité psychologique ... 21

Synthèse et résumé de la problématique ... 23

Chapitre 2. Caregivers’ emotional distress due to neuropsychiatric symptoms of persons with amnestic mild cognitive impairment or Alzheimer’s disease... 27

Résumé ... 29

Abstract ... 30

(6)

Method ... 33

Participants ... 33

Materials and procedure ... 34

Statistical analyses ... 34

Results ... 35

Sociodemographic characteristics of the sample ... 35

Prevalence of neuropsychiatric symptoms ... 36

Emotional distress due to neuropsychiatric symptoms ... 37

Comparison of emotional distress between Caregivers of persons with AD and aMCI ... 39

Relationship between neuropsychiatric symptoms and emotional distress ... 40

Effect of moderating variables on emotional distress: age and sex ... 41

Discussion ... 41

References ... 47

Chapitre 3. Objective and subjective burden and their relationships with psychological morbidity in spouses of persons with amnestic mild cognitive impairment ... 51

Résumé ... 53

Abstract ... 54

Introduction ... 55

Method ... 58

Participants ... 58

Materials and procedure ... 59

Background and context measures ... 59

Sociodemographic information ... 59

Health problems ... 59

Objective caregiver burden and stressors related to aMCI measures. ... 59

Lifestyle constraints ... 59

Change in activities ... 60

aMCI related stressors ... 60

Caregiver subjective burden related to aMCI measures. ... 61

Subjective demand burden ... 61

Subjective stress burden ... 61

Reactions to aMCI related stressors ... 61

Zarit Burden Interview ... 62

Psychological morbidity measures. ... 62

Depression ... 62

Anxiety ... 62

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Results ... 64

Sample characteristics ... 64

Objective Burden ... 64

Subjective Burden ... 66

Psychological morbidity ... 67

Relation between caregiver burden, background and context variables, and psychological morbidity ... 68

Depression ... 68

Anxiety ... 69

Discussion ... 70

References ... 76

Chapitre 4. Conclusion générale ... 80

Rappel des études effectuées et des résultats obtenus ... 80

Contributions de la thèse en lien avec les objectifs principaux ... 84

Contributions scientifiques ... 85

Le statut de l’aidant dans le trouble cognitif léger amnésique ... 89

Vers une nouvelle définition de l’aidant ... 90

Les besoins des aidants dans le trouble cognitif léger amnésique ... 94

Besoin d’information sur le TCLa ... 95

Besoins d’informations sur les ressources disponibles ... 96

Besoin de counseling psychologique par téléphone à l’occasion ... 97

Doit-on répondre aux besoins des aidants et quand y répondre? ... 97

Des outils à la mesure de la réalité des aidants ... 99

Une approche centrée sur l’aidant ... 102

Forces et limites de la thèse ... 106

Conclusion ... 107

Bibliographie générale ... 108

Annexe A. Algorithme décisionnel illustrant le diagnostic des sous types du TCLa (Critères de 2004) ... 121

Annexe B. Algorithme de comparaison des critères actuels du TCL ... 123

Annexe C. Modèle du processus de stress de Pearlin ... 125

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Annexe E. Guide d’entretien pour le groupe de discussions focalisées ... 143 Annexe F. Tableau synthèse des besoins... 145

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Liste des tableaux

Étude 1. Caregivers’ emotional distress due to neuropsychiatric symptoms of persons with amnestic mild cognitive impairment or Alzheimer’s disease

Tableau

1 Demographic variables of the sample ... 36 2 Number (%) of persons with AD or aMCI having at least one neuropsychiatric

symptom as reported by children and spousal caregivers ... 37 3 Number (%) of caregivers of persons with AD and aMCI reporting at least a

moderately severe emotional distress due to the presence of neuropsychiatric

symptoms in the care-recipient ... 38 4 Comparison of mean scores (standard deviation) of emotional distress between

subgroups of caregivers and according to their relationship with the care-

recipient ... 40

Étude 2. Objective and subjective burden and their relationships with psychological morbidity in spouses of persons with amnestic mild cognitive impairment

Tableau

1 Sample characteristics (n = 25) ... 65 2 Spousal cargivers’ burden and psychological morbidity (n = 25) ... 68 3 Regression of Psychological Morbidity on burden and background measures ... 70

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Liste des abréviations et des sigles

ADCS-ADL Alzheimer's Disease Cooperative Study - Activities of Daily Living Inventory

aMCI Amnestic Mild Cognitive Impairment

AD Alzheimer’s Disease

ANOVA Analysis of variance

BAI Inventaire de Beck pour l’anxiété

BDI Inventaire de Beck pour la dépression

CBI-R Cambridge Behavioral Inventory Revised

DRS Dementia Rating Scale

GAI Geriatric Anxiety Inventory

GDS Geriatric Depression Scale

ISTAART International Society to Advance Alzheimer’s Research and Treatment

LIFE-H Life Habits Questionnaire

MA Maladie d’Alzheimer

MBCBS Montgomery-Borgatta Caregiver Burden Scale

MBCBS/D Demand burden scale of the Montgomery-Borgatta Caregiver Burden

Scale

MBCBS/O Objective Burden subscale of the Montgomery-Borgatta Caregiver Burden Scale

MBCBS/S Subjective Stress Burden Scale of the Montgomery-Borgatta Caregiver Burden Scale

MBPC Memory and Behavior Problems Checklist

MCI Mild Cognitive Impairment

MoCA Montreal Cognitive Assessment

NIA-AA National Institute of Aging - Alzheimer Association

NINCDS-ADRDA National Institute of Neurological and Communicative Disorders and Stroke and the Alzheimer's Disease and Related Disorders

Association

NPI Inventaire neuropsychiatrique

NPS Neuropsychiatric Symptoms

OBI Objective Burden Inventory

PIA Professional Interest Area

RMBPC Revised Memory and Behavior Problems Checklist

RMBPC/D Depression problems in the Revised Memory and Behavior Problems Checklist

RMBPC/DB Disruptive behavior in the Revised Memory and Behavior Problems Checklist

RMBPC/M Memory problems in the Revised Memory and Behavior Problems

Checklist

RMBPC-R Reaction to the memory, depression and disruptive in the Revised Memory and Behavior Problems Checklist

SBS Subjective Burden Scale

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SPM Stress process model

TCL Trouble cognitif léger

TCLa Trouble cognitif léger amnésique

TCLna Trouble cognitif léger non amnésique

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Remerciements

D’abord, je tiens à remercier tout particulièrement mes directeurs de thèse : Marie-Christine Ouellet et Carol Hudon. Carol, merci pour la confiance que tu m'as accordée en acceptant d'encadrer ce travail et pour toutes les opportunités offertes au cours de ma formation doctorale. Marie-Christine, merci pour ton appui constant et surtout pour tes encouragements des dernières années. Merci à tous les deux d’avoir partagé vos connaissances et votre temps sans lesquels je n’aurais pas pu réaliser cette thèse. Votre rigueur et votre dévouement au travail sont inspirants et m’incitent à devenir une meilleure scientifique.

Je tiens à remercier les membres des laboratoires de recherche de neuropsychologie du vieillissement. Un merci particulier à Isabelle Tremblay, professionnelle de recherche, pour le recrutement, l’évaluation des participants et aussi pour sa disponibilité durant ces années.

Je désire également remercier Philippe Landreville, membre de mon comité de thèse, qui m’a suivie durant mon parcours doctoral. Merci pour votre ouverture, vos commentaires et le partage de connaissances qui m’ont, entre autres, permises d’approfondir les réflexions cliniques et méthodologiques de cette thèse.

Je ne pourrais oublier tous les participants qui ont généreusement accepté de contribuer à ce projet. En donnant de leur temps et en fournissant tous les efforts possibles, ils m’ont aidé à mieux saisir leur réalité.

Je remercie également le Centre de recherche CERVO, pour avoir mis à ma disposition toutes les ressources nécessaires à la réussite de ce projet. Je remercie tous les professionnels que j’ai eu le plaisir de côtoyer durant ces années : lesassistant(e)s de recherche, secrétaires, personnel administratif et soutien informatique. Merci également à l’École de psychologie de l’Université Laval.

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Un immense merci à mes précieux amis pour leur appui, leur compréhension et encouragements dans ce parcours universitaire et particulièrement en fin de rédaction. Un merci particulier à Fernande, Marie-Claire, Marie, Liliane, Denis qui ont su voir plus loin...

Un grand merci tout spécial à ma maman Pauline, dont la force, le courage et la simplicité bienveillante sont le moteur de ma vie. À toute ma famille de l’autre côté de l’océan, merci de vous être souciés de mon avancement et de m’avoir encouragée. Un merci tout spécial à mon Papa Joseph et à ma nièce Vanessa qui ne lieront pas ces mots mais dont l’amour, le soutien, puis le souvenir ont bercé mon cœur durant ces dernières années.

Aux hommes de ma vie! Alexandre, merci d’avoir été ma force tranquille et d’avoir rendu ce projet possible. Je ne pourrai jamais assez te remercier de ta présence, ton appui, ta patience et surtout ton amour au cours de ces dernières années. Merci à mon petit amour, Anthony Emmanuel, qui a su me rappeler l’essentiel en me donnant tout son amour peu importe ma disponibilité. J’espère que mon travail et ma détermination sauront t’inspirer plus tard pour aller au bout de tes rêves et t’accomplir dans le domaine que tu choisiras.

Finalement, merci à Celui qui Est, de me donner d’être et de devenir ce à quoi je suis appelée.

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Avant-propos

Cette thèse comprend une introduction (Chapitre 1) et une conclusion (Chapitre 4), rédigées en français, ainsi que deux articles de nature empirique (Chapitres 2 et 3) qui sont rédigés en anglais. Le premier chapitre, constituant l’introduction générale, fait état des connaissances actuelles sur la maladie d’Alzheimer et sur sa possible phase prodromique : le trouble cognitif léger amnésique (TCLa). La première étude empirique, présentée au deuxième chapitre, a pour objectif principal d’étudier l’impact perçu des symptômes neuropsychiatriques chez les conjoints et enfants-adultes des personnes qui ont soit un TCLa, soit la maladie d’Alzheimer. La seconde étude, présentée au troisième chapitre, vise principalement à étudier le fardeau des aidants-époux des personnes avec un TCLa. Enfin, le quatrième et dernier chapitre présente une discussion générale. Ce chapitre permet un retour succinct sur les principaux résultats de la thèse, expose les limites et les forces des études présentées ainsi que les contributions scientifiques et méthodologiques potentielles. Il comprend également une réflexion clinique puis, une brève conclusion.

Les deux articles ont été rédigés par l’auteure de cette thèse, qui a participé à toutes les étapes de l’élaboration des manuscrits : soit la conception des études, le recrutement et l’évaluation des participants, l’analyse des données et la rédaction des manuscrits. Son nom apparait ainsi en premier dans l’ordre des auteurs des articles. Les noms des codirecteurs de la thèse apparaissent de la façon suivante : Marie Christine Ouellet en tant que codirectrice et Carol Hudon en tant que directeur du Laboratoire de neuropsychologie du vieillissement, en dernière position et la contribution des différents coauteurs est la suivante : Céline Mavounza, candidate au doctorat, École de psychologie, Centre de recherche CERVO : Recension des écrits scientifiques, définition des objectifs et hypothèses des études, élaboration de la méthodologie expérimentale, utilisation d’une banque de données, collectes de données sur le terrain (conjoints et conjointes de personnes qui ont la MA), analyse et interprétation des données, rédaction des manuscrits.

(15)

Dre Marie-Christine Ouellet, professeure agrégée, École de psychologie et Centre interdisciplinaire de recherche en réadaptation et intégration sociale, codirectrice de thèse : assistance dans toutes les étapes de la thèse, supervision de la démarche scientifique.

Dr Carol Hudon, professeur titulaire, École de psychologie et Centre de recherche CERVO, directeur de thèse : assistance dans toutes les étapes de la thèse, financement du projet et supervision de la démarche scientifique.

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Chapitre 1.

Introduction

Les démences neurodégénératives constituent actuellement un des problèmes de santé publique les plus importants. Elles touchent plus de 46 millions de personnes âgées dans le monde et ce chiffre devrait tripler au cours des 30 prochaines années (Alzheimer’s Disease International, 2015). Représentant entre 50 et 75 % des démences, la maladie d’Alzheimer (MA) en est, sans conteste, la forme la plus fréquente (Ferri, Sousa, Albanese, Ribeiro, & Honyashik, 2009). Au Canada, les estimations de la prévalence de la MA et des maladies cognitives aparentées varient entre 500 000 et 700 000 chez les personnes âgées de 65 ans et plus (Societé Alzheimer du Canada, 2016). Cette variabilité s’explique en raison de la source de données (données administratives ou non), mais aussi en raison des dénominateurs utilisés (considérations ou non des personnes placées en institution). Se basant sur l'Étude canadienne sur la santé et le vieillissement1, les experts estiment que 587 000 personnes seront atteintes d'une maladie cognitive au Canada en 2017 (Societé Alzheimer du Canada, 2016). La prévalence serait 50 % plus élevée si en plus des maladies cognitives on considérait les troubles cognitifs légers (TCL), c’est-à-dire les altérations cognitives plus sérieuses que celles liées au vieillissement normal mais qui ne nuisent pas à la vie quotidienne ou à l’autonomie de la personne (Societé Alzheimer du Canada, 2016).

À l’échelle mondiale, le coût économique de la démence se chiffrait à 818 milliards de dollars américains en 2015 et devrait atteindre 1000 milliards de dollars en 2018, puis doubler d’ici 2030 (Alzheimer’s Disease International, 2015). Au Canada, les coûts annuels associés à la prise en charge des personnes démentes, incluant les soins de longue durée et les soins à domicile, s’élevaient à 8,3 millions en 2011, excluant les 19,2 millions d'heures non rémunérées fournies par les aidants, d'une valeur de 1,2 milliard de dollars (Societé Alzheimer du Canada, 2016). Tenant compte des changements démographiques prévus dus

1 En mai 2015, la Société Alzheimer du Canada a convoqué un groupe d'experts sur la santé de la population,

composé d'épidémiologistes, d'économistes de la santé et d'analystes des politiques afin d'évaluer, à l'aide des sources de données et méthodologies disponibles, la prévalence et les coûts financiers des maladies cognitives au Canada, aujourd'hui et à l'avenir. Les experts estiment que L'Étude sur la santé et le

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notamment à l’allongement de l’espérance de vie, les experts estiment que le nombre de personnes atteintes de MA et de maladies apparentées devrait croitre de manière exponentielle et les coûts reliés à la valeur de l’aide fournie par les aidants devraient doubler d’ici 2031, ce qui alourdira considérablement le poids économique, mais aussi humain, lié à la prise en charge des personnes démentes (Société Alzheimer du Canada, 2016). De fait, l’effet délétère de la MA sur l’entourage proche est déjà largement documenté et décrit en termes de « fardeau des aidants » dans la littérature scientifique. Toutefois, la littérature reste limitée quant au fardeau des proches aidants dans la phase prodromique de la MA. Comme nous le verrons, cette thèse de doctorat contribue à l’avancement des connaissances en cette matière.

La maladie d’Alzheimer

Les caractéristiques cognitives, psychologiques et comportementales

La MA se caractérise par une altération progressive des fonctions cognitives et intellectuelles ainsi qu’une perte graduelle et importante de l’autonomie fonctionnelle (American Psychiatric Association, 2013). Les critères du National Institute of Neurological and Communicative Disorders and Stroke and the Alzheimer's Disease and Related Disorders Association (NINCDS-ADRDA) ont été utilisés pendant plus de 25 ans en recherche (McKhann et al., 1984). De nouveaux critères ont été établis en 2011 par le National Institute of Aging - Alzheimer’s Association (NIA-AA). Ces critères plus récents identifient la maladie sous le nom de démence due à la maladie d’Alzheimer et, à l’inverse des anciens critères, proposent d’intégrer les biomarqueurs physiopathologiques dans la classification diagnostique (McKhann et al., 2011). Concernant ces nouvelles recommandations, il est important de noter que toutes les personnes qui répondent aux critères du NINCDS–ADRDA de 1984 de la MA probable satisfont également ces nouveaux critères de 2011. Une des différences avec les critères de 1984 réside dans le fait que les recommandations du NIA-AA intègrent à la forme classique de la MA des présentations initiales non amnésiques telles que l’aphasie primaire progressive de la variante logopénique, l’atrophie corticale postérieure ou la variante frontale de la MA. Dans ces recommandations de 2011, aux stades de la MA probable ou possible, les critères cliniques cardinaux de démence due à la MA continuent à être la pierre angulaire du diagnostic en pratique clinique

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courante (même si l’évaluation des biomarqueurs, permettant une approche combinée clinicobiologique, est censée améliorer la qualité du diagnostic, surtout dans les stades débutants de la maladie).

Plusieurs degrés de certitude du diagnostic sont proposés : 1) la démence de la MA possible (manque de preuves d’un déclin progressif ou celui-ci est incertain mais rencontre d’autres critères cliniques et cognitifs de la MA); 2) la démence de la MA probable (preuve que les symptômes sont stables ou progressifs); et 3) la démence de la MA probable ou possible avec la preuve du processus pathophysiologique de la MA. Les deux premiers sont destinés à être utilisés dans tous les milieux cliniques. Le troisième est actuellement destiné à des fins de recherche. La démence de la MA probable débute de façon insidieuse entre l’âge de 40 et 90 ans et évolue de manière progressive et irréversible. Le diagnostic de la MA se fait, de façon plus spécifique, à partir d’examens médicaux, psychiatriques, neuropsychologiques et de neuroimagerie mettant en évidence des altérations d’au moins deux fonctions cognitives, incluant une diminution progressive de la mémoire épisodique.

En plus des atteintes cognitives et fonctionnelles, des changements comportementaux et psychologiques peuvent se produire au cours de la MA. Les critères diagnostiques de démence probable du NINCDS-ADRDA de McKhann et al. (1984) font état de certains symptômes non cognitifs qui ne sont pas forcément nécessaires au diagnostic, mais qui peuvent être présents (dépression, délire, déformation de la perception de la réalité, hallucination, insomnie, incontinence, réactions catastrophiques verbales émotionnelles ou physiques, troubles sexuels, perte de poids, etc.). Les nouveaux critères du NIA-AA précisent que la MA probable doit satisfaire aux critères de la démence qui incluent, quant à eux, des changements dans la personnalité ou le comportement (fluctuations inhabituelles de l'humeur telles que : l'agitation, l’altération de la motivation, le manque d’initiative, l’apathie, la perte de motivation, le retrait social, la diminution des intérêts pour les activités antérieures, la perte d'empathie, les comportements compulsifs ou obsessionnels et enfin, les comportements socialement inacceptables).

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À l'exception de la psychose de la maladie d'Alzheimer (Jeste & Finkel, 2000) et de la dépression de la maladie d'Alzheimer (Lyketsos & Lee, 2004; Lyketsos & Olin, 2002), il existe peu de consensus sur les critères diagnostiques pour les symptômes psychologiques et comportementaux dans la démence (SPCD). Dans la littérature, on retrouve d’ailleurs une hétérogénéité terminologique pour rendre compte de ces symptômes non cognitifs dans la démence (perturbations comportementales, troubles ou symptômes neuropsychiatriques (SNP), affectifs, psychotiques, troubles de l’humeur, de la personnalité, des conduites neurovégétatives, etc.), ce qui ne facilite pas l’étude comparative des données publiées (Landreville, Rousseau, Vézina, & Voyer, 2005). Cependant, dans le cas de la MA, les experts du Professional Interest Area - Neuropsychiatrique Symptoms (NPS-PIA)1 organisent les symptômes neuropsychiatriques autour de cinq zones syndromiques qui comprennent la dépression, l'apathie, le sommeil, l'agitation et la psychose (Geda et al., 2013; Lyketsos et al., 2001). Plus récemment, Apostolova et al. (2014) regroupent les SNP en quatre domaines incluant les symptômes affectifs (dépression, anxiété, apathie), les symptômes de détresse/tension (agitation et irritabilité), les symptômes de contrôle pulsionnel (désinhibition, comportements moteurs aberrants, euphorie) et enfin les symptômes psychotiques (idées délirantes et hallucinations).

Les symptômes psychologiques et comportementaux sont environ quatre fois plus fréquents chez la personne atteinte de la MA que dans la population générale (Lyketsos et al., 2000). Selon l’étude classique de Lykestos et Olin (2002), les symptômes les plus fréquents dans la MA sont l’apathie (36 %), la dépression (32 %) et l’agitation/agressivité(30 %). Une récente méta-analyse révèle des taux de prévalence plus élevés, soit de 49 % pour l’apathie, 42 % pour la dépression, 40 % pour l’agitation/agressivitéet rajoute l’anxiété et les troubles du sommeil avec un taux de 39 % pour chacun (Zhao et al., 2016). La prévalence des symptômes comportementaux et psychologiques varie entre les études citées dans la méta-analyse. Cette variabilité pourrait principalement être due aux caractéristiques de la population de référence. En effet, les études réalisées en milieux cliniques sont facilement sujettes à des biais dus à la surestimation de la

1 Le groupe de travail du Professional Interest Area (PIA) à l’intérieur de l’International Society to Advance

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prévalence des symptômes (Kokmen, Özsarfati, Beard, O'Brien, & Rocca, 1996; Tsuang et al., 1996). De plus, les études en milieu clinique ont tendance à rechercher les participants qui présentent une pathologie et les participants ciblés sont interpellés par ces études. La variabilité de la prévalence entre les études peut également être due à la variabilité dans les définitions des symptômes et des outils d’évaluation utilisés qui recouvrent des répertoires de comportements différents (Landreville et al., 2005; Lyketsos et al., 2011). Les échelles validées en usage général se répartissent en deux catégories : des échelles ciblées - par exemple, des échelles pour la dépression ou l'agitation - et des échelles générales dont la plus commune est l'Inventaire neuropsychiatrique (NPI) de Cummings et al. (1994) qui évalue une douzaine de types de symptômes neuropsychiatriques.

Une relation entre la gravité des atteintes cognitives et les symptômes psychologiques et comportementaux est présente dans les études, mais de façon différente selon les symptômes concernés (Harwood, Barker, Ownby, & Duara, 2000; Haupt, Kurz, & Jänner, 2000). Par exemple, dans l’étude de Cooper, Mungas et Weiler (1990), la dépression est présente dès les premiers stades mais moins dans les stades avancés, alors que les symptômes tels que les changements de personnalité, l’agitation et la colère, l’errance, les hallucinations/délires, l'insomnie sont présents surtout dans les stades plus sévères de la maladie. Selon une étude de Steinberg et al. (2006), la période de prévalence de la dépression est estimée à 77 % sur cinq ans. Dans cette étude, 27 % des personnes avaient la dépression au départ et 41 à 47 % l’ont développée par la suite. Benoit et al. (2003) établissent, quant à eux, que l’apathie et les symptômes affectifs (dépression et anxiété) sont présents quel que soit le stade évolutif de la MA et ont des taux de prévalence déjà élevés, soit entre 46,5 et 63,5 %, à des stades modérés de la maladie. En contraste, ils établissent que les symptômes de registres psychotiques incluant les hallucinations, par exemple, sont plus fréquents chez les personnes dont les détériorations cognitives sont plus avancées. Les hallucinations et les troubles délirants sont d’ailleurs associées à un déclin cognitif rapide de la maladie (Scarmeas et al., 2005).

Il est possible que certains SNP soient plus probables selon le stade d’évolution de la maladie. Ceci dit, la variabilité des SNP peut-être aussi attribuable à des considérations

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l'étude, la fréquence de l'évaluation, le résultat souhaité d'une étude particulière (réduction des symptômes, prévention primaire), ce qui peut introduire un biais (Geda et al., 2014).

Le Trouble cognitif léger amnésique : phase prodromique de la MA

De nombreuses recherches ont montré que des signes et symptômes avant-coureurs de la démence peuvent être identifiés plusieurs années avant le diagnostic. C’est le cas des symptômes cognitifs (Amieva et al., 2008; Elias et al., 2000), mais aussi des symptômes psychologiques comme l’anxiété ou la dépression (Ownby, Crocco, Acevedo, John, & Loewenstein, 2006; Palmer et al., 2007; Simard, Hudon, & van Reekum, 2009). Au cours des vingt dernières années, le concept de TCL (Mild Cognitive Impairment [MCI]) a été défini pour rendre compte des symptômes pouvant être observés durant la phase prodromique de la démence (Blackwell et al., 2004; Gauthier et al., 2006; Kluger, Ferris, Golomb, Mittelman, & Reisberg, 1999; Petersen, 2004). Une conférence consensuelle a permis l’élaboration de critères diagnostiques de la clinique Mayo (Petersen, 2004). Ceux-ci comprennent (a) une plainte cognitive formulée par la personne (et de préférence corroborée par l’entourage); (b) une objectivation du trouble cognitif (performance se situant à 1,5 écart-type sous la moyenne des personnes de même âge et de même niveau de scolarité); (c) un fonctionnement cognitif général normal; (d) une absence d’atteinte significative de l’autonomie fonctionnelle; et (e) une absence de démence. Si l’atteinte cognitive affecte la mémoire épisodique, le TCL est considéré de type amnésique (TCLa). Si la mémoire épisodique n’est pas touchée, le TCL est alors considéré de type non amnésique (TCLna). Chacun de ces sous-types peut également être considéré à domaine unique si seulement un domaine cognitif est atteint ou à domaines multiples si plusieurs sphères de la cognition sont touchées1 (par exemple, exécutif fonction, langage ou compétences visuo-spatiales). Cette distinction entre les sous-types est importante, car plusieurs résultats suggèrent que les individus avec le TCLa sont à risque plus élevé de développer la MA comparativement aux personnes avec un TCLna (Gauthier et al., 2006; Petersen, 2005; Winblad et al., 2004).

1 Le lecteur est prié de se référer à l’Annexe A pour consulter l’algorithme décisionnel original illustrant ces

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Le concept de TCL évolue et plus récemment, de nouveaux critères ont vu le jour afin d’améliorer le diagnostic1 (Albert et al., 2011; Petersen et al., 2014). Le groupe de travail du NIA-AA propose des recommandations pour améliorer le dépistage clinique mais aussi des critères spécifiques à la recherche (Albert et al., 2011). Notons qu’avant le TCL, la phase préclinique de la MA peut être identifiée et s’appuie sur la détection de biomarqueurs, et ceci, en l’absence des symptômes cliniques du TCL (Sperling et al., 2011). Concernant le diagnostic du TCL, les nouveaux critères cliniques sont très similaires à ceux de Petersen (2004) mais apportent toutefois quelques spécificités. Ainsi, la plainte cognitive de la personne présentant un TCLa peut être rapportée ou corroborée par un proche ou alors par un clinicien et les troubles cognitifs observés doivent inclure une atteinte de la mémoire épisodique. Les critères de recherche, quant à eux, tiennent compte des progrès en neuroimagerie et permettent d’investiguer davantage l’étiologie du trouble par l’utilisation de biomarqueurs. En effet, partant du principe que le TCL peut avoir plusieurs étiologies, le processus diagnostique se différencie de celui décrit par Petersen (2004) en menant une investigation plus exhaustive de l’étiologie possible des difficultés mnésiques rapportées et observées. Ainsi, à l’aide de biomarqueurs il est possible, avant la phase de démence, d’identifier les individus ayant une pathologie Alzheimer, comme étant la cause primaire de la progression de la MA et ces individus sont identifiés sous le terme de TCL dû à la MA. Le TCL dû à la MA requiert la présence d’un biomarqueur typique de la MA. Toutefois, les critères cliniques basés sur les symptômes correspondent presqu’exactement à ceux des critères de TCLa de Petersen (2004). À défaut d’avoir mesuré des biomarqueurs chez les participants des études des chapitres 2 et 3, cette thèse se limitera à l’identification de la phase prodromique de la MA basée sur les symptômes et donc, sur la base des critères cliniques centraux d’Albert et al. (2011). Dorénavant dans ce texte, l’acronyme TCLa sera utilisé pour désigner les personnes qui ont minimalement un trouble léger de la mémoire, sans distinction entre le domaine unique et les domaines multiples. L’acronyme TCL désignera plutôt le concept général du trouble cognitif léger, sans égard à ses sous-types.

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Les caractéristiques cognitives et neuropsychiatriques du TCLa

Plusieurs études montrent que les sémiologies du TCLa et de la MA sont souvent similaires en ce qui concerne la nature des symptômes (Apostolova & Cummings, 2008; Belleville, Chertkow, & Gauthier, 2007; Crowell, Luis, Vanderploeg, Schinka, & Mullan, 2002; Hudon, Belleville, & Gauthier, 2009; Hudon et al., 2006; Lyketsos et al., 2002; Moulin, James, Freeman, & Jones, 2004). Par définition, toutefois, la gravité des symptômes est plus importante dans la MA comparativement au TCLa. Les études qui s’intéressent aux symptômes cognitifs montrent que plusieurs composantes ou processus de la mémoire épisodique sont altérés dans le TCLa (Barbeau et al., 2004; Bennett, Golob, Parker, & Starr, 2006; Hudon et al., 2006, 2009; Ivanoiu et al., 2005; Petersen et al., 1999; Ribeiro, Guerreiro, & De Mendonca, 2007). Les troubles cognitifs peuvent aussi toucher le fonctionnement exécutif (Belleville et al., 2007; Kramer et al., 2006; Traykov et al., 2007), la mémoire sémantique (Brueckner & Moritz, 2009; Estevez-Gonzalez et al., 2004; Hodges, Erzinclioglu, & Patterson, 2006; Joubert, Joncas, Barbeau, Joanette, & Ska, 2006; Seidenberg et al., 2009) et le langage (Taler, Klepousniotou, & Phillips, 2009; Taler & Phillips, 2007).

Outre les critères cognitifs, tout comme dans la MA, les symptômes neuropsychiatriques sont observés chez les personnes avec un TCLa. En effet, deux revues systématiques de la littérature par Apostolova et Cummings (2008) et Monastero, Mangialasche, Camarda, Ercolani et Camarda (2009) mettent en évidence que 35 à 85 % des personnes qui ont un TCLa manifestent des symptômes psychologiques et comportementaux. Les symptômes les plus communs chez les personnes qui ont le TCLa, sont la dépression, l’apathie, l’anxiété, l’irritabilité et les difficultés du sommeil (Apostolova & Cummings, 2008; Beaulieu-Bonneau & Hudon, 2009). Les manifestations les moins communes sont l’euphorie, les hallucinations et les comportements moteurs aberrants (Apostolova & Cummings, 2008). Le patron des troubles neuropsychiatriques diffère entre ceux qui ont le TCLa et ceux qui ont le TCLna (Rozzini et al., 2008). Les personnes qui ont un TCLa présentent plus fréquemment des symptômes de dépression, d’anxiété, d'apathie et d'irritabilité que les personnes qui ont un TCLna, tandis que ces derniers présentent plus fréquemment des idées délirantes et des hallucinations (Rozzini et al., 2008).

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Les aidants dans la MA

Les symptômes cognitifs, psychologiques et comportementaux associés à la MA représentent des défis de taille pour les personnes qui doivent prendre en charge un individu atteint de la maladie. Cette prise en charge est dispensée par l’entourage familial (appelé aussi aidants naturels) dans 75 % des cas; les cas restants sont pris en charge par des services formels, c'est-à-dire des cliniques du système public (Schulz & Martire, 2004). Un rapport de Santé Canada définit un proche aidant comme étant un membre de la famille, par exemple un enfant ou un conjoint, un ami ou un voisin, qui apporte de l'aide ou procure des soins à une personne se trouvant dans un état critique qui requiert de l'assistance, et ce, sans rémunération (Dunbrack, 2005). Depuis des décennies, ces personnes ont tour à tour été dénommées des aidants informels, aidants naturels, aidants familiaux, personnes soutien, proches aidants et soignants non professionnels. Les qualificatifs « informels » et « naturels » expriment ici l’invisibilité et le caractère inné attribué à l’aide offerte à un proche âgé; les termes « aidants familiaux » et « proches aidants » sont donc préférés dans le vocabulaire canadien français (Ducharme, 2006).

L’aide consiste à apporter un appui, du soutien, une assistance et des soins, de manière momentanée dans différentes situations. Selon la National Alliance for Caregiving (1997), afin d'évaluer le degré de demande de la situation d'aide, il importe de considérer le niveau de soins selon la difficulté, le nombre d'heures de soins hebdomadaires et le type d'aide fournis. Il faut également considérer l'épuisement physique, le stress émotionnel et les difficultés financières. Selon Ducharme (2006), le fait de prendre soin est une réalité complexe à saisir en raison de tous les facteurs qui influencent le temps passé à prendre soin, notamment la nature du lien aidant-aidé. Ainsi, la prise en charge d’un proche inclut beaucoup plus que les tâches et les fonctions instrumentales.

Il existe d’ailleurs différentes typologies de l’aide offerte par les aidants familiaux (Ducharme, 2006). Selon Bowers, les types d’aide regroupent : 1) l'anticipation ou la prévision des besoins de la personne aidée; 2) la prévention, c'est-à-dire le fait de minimiser le plus possible les détériorations au niveau de la santé physique et mentale en maintenant un

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supervision de l'aide et des soins dispensés par les autres aidants du réseau informel, formel et communautaire; 4) la protection relative aux détériorations inévitables de l’état de santé en favorisant une bonne image de soi; et 5) la réalisation des tâches dites instrumentales entourant entre autres les soins physiques (p.ex., la prise de médicaments), l'hygiène personnelle (p.ex., : le bain), l'entretien ménager et la préparation des repas. Nolan, Grant et Keady (1996) complètent cette typologie en rajoutant deux autres dimensions : 1) le soin reconstructeur se rapportant aux activités visant à maintenir les rôles valorisants pour la personne soignée; et 2) le soin réciproque qui touche le processus relationnel inhérent au « prendre soin » et aux bénéfices potentiels de la réciprocité aidant-aidé (Ekwall, Sivberg, & Hallberg, 2004). Vézina et Pelletier (2001) proposent également diverses formes de participation à l’aide et aux soins : 1) l’assurance du bien-être physique; 2) l’assurance du bien-être psychologique et social; 3) la gestion des finances; et 4) l’aide au transport.

Rappelons ici que l’aidant naturel ou informel est généralement une personne issue de l’entourage du sujet malade qui n’a pas été formée pour les différentes tâches de soins, mais qui en assume la prise en charge de façon non rémunérée. En 2008, 55 % des Canadiens de 65 ans et plus, atteints de démence, vivaient chez eux et on estime que ce taux atteindra 62 % d’ici 2038 (Société Alzheimer du Canada, 2009), ce qui représente une augmentation de 510 000 cas sur 30 ans (Societé Alzheimer du Canada, 2016). Les experts réunis par la Société Alzheimer du Canada (2016) prévoient que ces changements auront un impact significatif sur la demande de soins de proximité, de même que sur les difficultés des aidants naturels.

Le concept de fardeau des aidants

Le concept de fardeau a été élaboré pour rendre compte d’une composante du vécu des aidants. Ce concept, défini à l’origine comme une notion subjective liée à la perception du proche aidant vis-à-vis des soins à prodiguer ou des tâches à accomplir (Zarit, Reever, & Bach-Peterson, 1980), a évolué plus tard vers une conception plus multidimensionnelle (George & Gwyther, 1986). La notion de fardeau est aujourd’hui définie par l’ensemble des problèmes physiques, psychologiques, émotifs, sociaux et financiers encourus par une personne qui prend soin d’une autre personne (DiBartolo, 2000). Le fardeau a deux

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composantes principales, une dimension objective et une dimension subjective (Montgomery, Gonyea, & Hooyman, 1985). Le fardeau objectif comprend les problèmes pratiques associés à la prestation des soins (p.ex., augmentation de la charge de travail pour les activités de la vie quotidienne ou domestique). Le fardeau subjectif (également appelé stress) se rapporte plus à une réaction émotive de l'aidant (p.ex., anxiété et dépression).

Le fardeau des aidants dans la MA

De nombreuses études s’intéressent aux facteurs impliqués dans le fardeau des aidants des personnes atteintes de la MA. Selon Germain et al. (2009), ces facteurs peuvent être classifiés de trois façons, c'est-à-dire les facteurs associés à l’aidant, ceux associés à la personne aidée et enfin, des variables contextuelles qui influencent la relation entre l’aidant et la personne aidée. Concernant les variables contextuelles, on y retrouve par exemple le statut marital, les relations en cours et les précédentes relations avec la personne aidée, le fait d’avoir un bon soutien social et les aménagements ou dispositions de vie (Germain et al., 2009). Ainsi, un bon réseau social et le fait d’être satisfait de sa vie peuvent contribuer à diminuer le fardeau des aidants (Mohamed, Rosenheck, Lyketsos, & Schneider, 2010; Vitaliano, Russo, Young, Teri, & Maiuro, 1991). À l’inverse, la baisse du soutien social contribue à augmenter la dépression chez les aidants de personnes ayant la MA.

Par ailleurs, certaines caractéristiques propres aux aidants peuvent contribuer à augmenter leur fardeau. Les variables sociodémographiques y jouent un rôle. Concernant le genre, par exemple, beaucoup d’études ont identifié que les femmes aidantes vivent un fardeau plus important que les hommes aidants (Germain et al., 2009; Mohamed et al., 2010). Il en va de même pour le fait d’avoir des problèmes de santé (Zanetti et al., 1998). Le fait d’être un conjoint ou un enfant peut également avoir une incidence sur le fardeau (Etters, Goodall, & Harrison, 2008). Le niveau de fardeau est plus élevé chez les aidants-enfants selon Conde-Sala et al. (2010), alors qu’il est plus élevé chez les aidants-conjoints selon Serrano-Aguilar, Lopez-Bastida et Yanes-Lopez (2006). Enfin, les études examinant les caractéristiques des personnes aidées et leur influence sur le fardeau des aidants démontrent que les symptômes comportementaux et psychologiques associés à la démence contribuent à

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Hadjistavropoulos, & Tuokko, 2000; Coen, Swanwick, O'Boyle, & Coakley, 1997; Mohamed et al., 2010). Ces symptômes sont d’autant plus associés au fardeau dans les stades modéré ou sévère de la maladie (Gallagher et al., 2011).

Les études ne font pas consensus sur les types de symptômes psychologiques et comportementaux associés au fardeau. L’étude d’Allegri et al. (2006) rapporte que les symptômes tels que les hallucinations, les comportements moteurs aberrants, les comportements anormaux pendant la nuit (troubles du sommeil, errance), les idées délirantes, l’agitation, l’anxiété, la désinhibition et les modifications de l’appétit sont les plus perturbants pour l’aidant, confirmant ainsi les résultats d’autres travaux (Coen et al., 1997; Germain et al., 2009; Mangone et al., 1993). En revanche, les auteurs rapportent que les symptômes affectifs comme la dépression et l’apathie ne sont pas à l’origine du fardeau des aidants (Allegri et al., 2006). Toutefois, une étude plus récente rapporte que les niveaux de fardeau des aidants sont corrélés aux symptômes psychologiques et comportementaux sévères incluant aussi les symptômes dépressifs des personnes atteintes de la MA (Mohamed et al., 2010).

Concernant les caractéristiques cognitives des personnes ayant une MA, certaines recherches mettent en évidence que le degré de troubles cognitifs est relié au fardeau (Allegri et al., 2006; Germain et al., 2009; Hirschman, Shea, Xie, & Karlawish, 2004), mais d’autres ne notent pas ce lien (Donaldson, Tarrier, & Burns, 1998; Mangone et al., 1993). Germain et al. (2009) précisent qu’une baisse générale des fonctions cognitives augmente le fardeau de l’aidant et ils soulignent plus particulièrement l’effet négatif des troubles du langage, des apraxies, des problèmes de coordination motrice ainsi que des troubles spatiaux. Mohamed et al. (2010), quant à eux, argumentent que les troubles cognitifs des personnes ayant une MA contribuent à augmenter légèrement le fardeau des aidants, mais bien moins que les symptômes psychologiques et comportementaux.

Le fait d’endurer les changements au niveau fonctionnel et comportemental de la personne ayant la MA expose les aidants à de hauts risques au niveau psychologique. La

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dépression et l’anxiété sont connues pour être les conséquences négatives les plus communes chez les aidants de personnes qui ont la MA (Clyburn et al., 2000; Cooper, Katona, Orrell, & Livingston, 2008). Plusieurs études démontrent d’ailleurs que les mesures de fardeau sont associées à la présence de la dépression et de l’anxiété chez les aidants des personnes avec la MA (Cooper et al., 2008; Crespo, López, & Zarit, 2005; Pinquart & Sörensen, 2003). Ainsi, plus les symptômes de la MA s’aggravent, plus les aidants sont déprimés et anxieux (Ferrara et al., 2008).

Malgré une tendance à explorer les aspects positifs de la relation entre l’aidant et son proche malade (Cohen, Colantonio, & Vernich, 2002; Kramer, 1997), les effets négatifs que constituent le fardeau, l’anxiété et la dépression sont encore largement étudiés car ils sont manifestement prépondérants tout au long de l’évolution de la MA. Avec le vieillissement démographique, l’effet de la MA sur la santé des aidants et sur l’économie canadienne risque d’augmenter (Société Alzheimer du Canada, 2010). Étant donné que la MA a un impact considérable sur les proches aidants des personnes atteintes, il est possible de se demander si la phase prodromique de la maladie a des répercussions semblables sur les aidants. Si c’est le cas, il est impératif de connaitre les caractéristiques du fardeau des aidants de personnes avec un TCL pour éventuellement développer des programmes qui pourraient aider à prévenir l’aggravation de ce fardeau au fil du déclin cognitif du proche. Cette question sera abordée dans la section qui suit.

Le fardeau des aidants dans le TCL

À travers la littérature des dernières années, un peu plus d’une dizaine d’études s’intéressant aux conséquences négatives de la condition des personnes avec un TCL sur leurs aidants sont recensées (Blieszner & Roberto, 2010; Bruce, McQuiggan, Williams, Westervelt, & Tremont, 2008; Gallagher et al., 2011; Garand, Dew, Eazor, DeKosky, & Reynolds, 2005; Garand et al., 2007; Lu et al., 2007; McIlvane, Popa, Robinson, Houseweart, & Haley, 2008; Paradise et al., 2015; Savla, Roberto, Blieszner, Cox, & Gwazdauskas, 2011; Seeher et al., 2014; Springate & Tremont, 2013). De plus, deux méta-analyses ont pris en compte les résultats des études réalisées avant 2012 (Seeher, Low, Reppermund, & Brodaty,

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des TCLa en rapportant toutefois des résultats globaux pour les personnes qui ont le TCLna ou le TCLa (Gallagher et al., 2011; Garand et al., 2005, 2007) et une autre parle de TCL alors qu’en fait les critères diagnostiques utilisés réfèrent au TCLa (Lu et al., 2007). Notons, toutefois, que quinze aidants sur dix-sept ont un proche qui rencontre les critères du TCLa et les deux autres les critères du TCLna dans l’étude de Gallagher et al. (2011). Cependant, les résultats de cette étude ne seront pas pris en compte dans cette section car ils ne ciblent pas distinctement les personnes ayant un TCLa, mais les incluent dans un groupe composé aussi d’aidants de personnes qui ont un diagnostic de MA légère. Considérant l’ensemble des études, seulement deux d’entre elles (Lu et al., 2007; McIlvane et al., 2008) s’intéressent particulièrement aux conséquences négatives de l’aide en termes de détresse et de dépression alors que toutes les autres incluent des mesures du fardeau dont certaines spécifient les liens avec des mesures psychologiques chez les aidants. Elles permettent de souligner les premières caractéristiques des aidants et l’effet négatif du TCL dans leur vie notamment en termes de fardeau et de conséquences sur le plan psychologique.

Les caractéristiques des aidants dans le TCL

La majorité des études cible, d’une manière générale, des personnes qui fournissent des informations sur un proche avec un TCL et sur elles-mêmes dans la relation avec le proche (Blieszner & Roberto, 2010; Garand et al., 2005, 2007; Lu et al., 2007; Paradise et al., 2015; Seeher et al., 2014; Springate & Tremont, 2013). En ce sens, toutes les études n’identifient pas les personnes qui informent sous l’appellation d’aidant mais préfèrent le terme « répondant ». Par exemple, l’étude de Seeher et al. (2014) s’intéresse à tout « répondant » qui apporte du soutien dans au moins une activité (p.ex., faire des courses), y compris des professionnels qui connaissent la personne avec un TCL. L’étude de Bruce et al. (2008) s’intéresse essentiellement aux aidants époux et aux enfants, alors que les aidants sont exclusivement des époux dans les deux études de l’équipe de Garand (Garand et al., 2005, 2007). Dans l’ensemble, les aidants sont pour la plupart soit des conjoints, des enfants, de la parenté ou des amis.

D’une façon générale, le profil ressortant des études publiées indique que les aidants des personnes atteintes du TCL sont essentiellement des femmes et particulièrement des

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femmes-conjointes âgées de plus de 60 ans. En effet, les femmes représentent entre 51 et 85 % des aidants dans les différentes études (Blieszner & Roberto, 2010; Garand et al., 2005, 2007; Paradise et al., 2015; Seeher et al., 2014; Springate & Tremont, 2013). De plus, elles représentent 76 % d’épouses dans l’enquête de Blieszner et Roberto (2010) et 46,6 % dans l’étude de Lu et al. (2007). Une exception est à noter pour l’étude Seeher et al. (2014) qui, bien que constituée de 51 % de femmes, rapporte une proportion plus grande d’aidants enfants. Cette différence pourrait s’expliquer par le profil plus vaste des répondants qui sont le sujet de l’étude de Seeher et al. (2014). En effet, c’est la seule étude qui cible des personnes donnant des informations simplement parce qu’elles assistent leur proche dans une activité et non parque qu’elles sont des aidants principaux ou primaires tels qu’on le définit dans les autres études.

La nature du fardeau des aidants dans le TCL

Les études réalisées à ce jour mettent en évidence que les aidants de personnes avec un TCL (sans distinction du sous-type TCLa ou TCLna) présentent à la fois un fardeau subjectif et un fardeau objectif. Le fardeau objectif se manifeste par l’apparition de nouvelles contraintes financières liées aux dépenses en frais de santé relatifs à leur vie d’aidant (Lu et al., 2007), par de nouvelles tâches domestiques (p.ex., transport, courses) qu’ils ont à effectuer, par de nouveaux soins à prodiguer (p.ex., gestion des médicaments, aide au bain, à l’habillage et à l’hygiène personnelle) et par la gestion des affaires (finances) (Garand et al., 2005). Ces tâches sont de nouvelles responsabilités reliées à l’apparition des premiers symptômes du TCL. De plus, selon Garand et al. (2005), les tâches de soins sont typiquement caractéristiques de celles qui sont prodiguées dans la démence ou dans la MA. En fait, à des taux variables, les aidants des personnes avec un TCL accomplissent en moyenne quatre tâches ménagères et entre zéro et une tâche de soins infirmiers. Les seules tâches qu’aucun aidant n’accomplit sont celles associées communément avec des maladies fonctionnelles sévères (l’assistance pour les repas, les sorties et la mise au lit).

En devant assumer de nouvelles responsabilités, les aidants rapportent avoir un style de vie plus contraignant qui se reflète sur le temps qu’ils se réservent pour eux-mêmes, le fait

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al., 2005). Les aidants attribuent aussi ces contraintes de style de vie aux changements cognitifs des personnes aidées (Garand et al., 2005). Parallèlement, 30 à 40 % des aidants vivent un fardeau subjectif significatif (Bruce et al., 2008; Paradise et al., 2015; Springate & Tremont, 2013). Aussi, selon Paradise et al. (2015) deux fois plus d’aidants de personnes avec un TCL (36 %) présentent un fardeau subjectif significatif comparativement à un groupe de conjoints de personnes qui n’ont pas de troubles cognitifs (16,7 %).

La mesure du fardeau et des facteurs de stress

À travers les études recensées, les dimensions subjectives et objectives du fardeau sont mesurées par différents outils. Pour la dimension subjective, certaines études utilisent des échelles globales telles que l’Inventaire de fardeau de Zarit (ZBI) (Zarit et al., 1980) et le Subjective Burden Scale (SBS; Blieszner & Roberto, 2010; Bruce et al., 2008; Gallagher et al., 2011; Garand et al., 2005; Matsuda, 1999; Paradise et al., 2015; Springate & Tremont, 2013). Ainsi, dans sa dimension globale, le fardeau subjectif est conceptualisé comme le stress perçu dans un rôle d’aidant. Par ailleurs, l’étude de Seeher et al. (2014) utilise deux outils pour évaluer la dimension subjective de l’aide. Elle évalue l’impact perçu des symptômes neuropsychiatriques, en utilisant l’échelle de détresse émotionnelle du NPI et crée une échelle de fardeau relié au soutien à partir d’une liste de tâches communément réalisées par des aidants.

La dimension objective n’est rapportée comme telle que par le groupe de Garand (Garand et al., 2005, 2007). En fait, leurs études utilisent une variété d’outils complémentaires mesurant à la fois les deux dimensions du fardeau. On peut donc répertorier l’échelle d’évaluation du Montgomery Borgatta Caregiver Burden Scale, se composant de trois sous-échelles de fardeau objectif et subjectif. On retrouve aussi le Memory and Behavior Problem Checklist (MBPC) ou sa version révisée, le Revised Memory and Behavior Problem Checklist (RMBPC) de Montgomery et al. (1985), qui sont utilisés pour permettre aux aidants d’évaluer à la fois la fréquence des problèmes comportementaux et cognitifs de leur proche (qu’ils considèrent comme faisant partie du fardeau objectif), puis leur propre réaction face aux problèmes rapportés (qui réfère au fardeau subjectif) (Garand et al., 2005, 2007). Enfin,

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ces études utilisent une liste de nouvelles tâches représentant des nouvelles responsabilités comme étant une mesure objective du fardeau.

Certaines études tentent de spécifier l’existence d’un lien entre des mesures de fardeau (tâches accomplies par les aidants et réactions des aidants à ces nouvelles tâches, fréquence des comportements des personnes ayant un TCL et réaction des aidants à ces comportements ou alors, perception des aidants quant à leur rôle) et les symptômes psychologiques tels que la dépression et l’anxiété de l’aidant (Blieszner & Roberto, 2010; Bruce et al., 2008; Garand et al., 2005; Paradise et al., 2015). Elles établissent alors des corrélations entre les mesures au RMBPC, SBS et/ou ZBI et les symptômes de détresse psychologique ou de morbidité psychologique chez l’aidant (anxiété, dépression).

Par ailleurs, les échelles de fardeau sont utilisées pour mesurer des composantes impliquées dans le processus de stress que vivent les aidants dans la relation avec leur proche, en référence directe au modèle conceptuel de Pearlin, Mullan, Semple et Skaff (1990) nommé Stress Process Model (SPM)1. Les études qui s’y réfèrent (Blieszner & Roberto, 2010; Bruce et al., 2008; Garand et al., 2005, 2007; Seeher et al., 2014) ne testent pas tous les aspects du modèle mais l’utilisent de manière partielle. Selon le modèle SPM, l’aide implique quatre domaines qui ont une influence potentielle sur la santé et le bien-être tels que : 1) le contexte et les antécédents des soins (caractéristiques personnelles des aidants, relation avec la personne aidée, et ressources qui permettent de gérer la situation); 2) les facteurs de stress (statut cognitif et problèmes comportementaux de la personne aidée); 3) les médiateurs du stress; et enfin 4) les conséquences ou les manifestations de stress (anxiété, dépression). De plus, les facteurs de stress de même que leurs conséquences peuvent être influencés par des facteurs protecteurs tels que les stratégies d’adaptation et le soutien social.

Notons, pour conclure sur les mesures du fardeau, qu’en référence au modèle de stress de Pearlin et al. (1990), les problèmes comportementaux mesurés par le RMBPC et le MBPC peuvent-être considérés comme étant des facteurs objectifs du stress pour Blieszner et

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Roberto (2010) et aussi pour le groupe de Garand (Garand et al., 2005, 2007). Selon Seeher et al. (2014). Les symptômes mesurés au NPI de Cummings et al. (1994) et la liste de tâches peuvent être considérés comme étant des facteurs objectifs de stress. Les facteurs subjectifs du stress sont évalués par des mesures de fardeau subjectif, telles que le ZBI pour Blieszner et Roberto (2010) et Garand et al. (2005), ainsi que le fardeau relié au soutien, et enfin l’impact perçu des symptômes au NPI pour Seeher et al. (2014). Contrairement à la conception de ces auteurs, dans l’étude de Bruce et al. (2008) le fardeau subjectif (mesuré par le ZBI) est conçu comme une conséquence ou une manifestation du stress et non un facteur de stress comme tel. Dans deux autres études, ce modèle est aussi utilisé sans sa référence directe au fardeau pour expliquer les conséquences négatives de l’aide au niveau psychologique (Lu et al., 2007; Savla et al., 2011).

Les disparités dans la conceptualisation et l’opérationnalisation du fardeau peuvent compliquer la manière de rapporter les résultats. Dans l’exposé qui suit, afin de faciliter la recension des écrits, comme le proposent Garand et al. (2005), les indicateurs objectifs de stress seront considérés dans la dimension objective du fardeau et les indicateurs subjectifs de stress dans la dimension subjective du fardeau. Les facteurs impliqués dans le fardeau reprendront la classification de Germain et al. (2009) colligés selon les variables contextuelles qui influencent la relation entre l’aidant et l’aidé, les caractéristiques propres à l’aidant et les caractéristiques propres aux personnes avec un TCL. Enfin, les conséquences négatives du stress seront abordées en termes de morbidité psychologique pour souligner les conséquences du fardeau au niveau psychologique.

Variables contextuelles influençant la relation entre l’aidant et l’aidé. Une étude s’intéressant aux variables contextuelles influençant la relation entre l’aidant et l’aidé démontre que l’insatisfaction dans la relation matrimoniale prédit le fardeau chez les aidants de personnes avec un TCL (Garand et al., 2007). Les résultats soulignent en effet l’existence de comportements fréquents, dont beaucoup reflètent directement des éléments perturbés dans la communication, qui sont significativement liés à la perception de la qualité maritale chez les conjointes des personnes atteintes de TCL. Plus précisément, lorsqu'une personne avec un TCL parle peu ou pas du tout, le conjoint rapporte des niveaux plus faibles de

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satisfaction conjugale (c'est-à-dire le degré auquel le répondant est satisfait de l'état actuel de la relation et s'engage à le maintenir), de consensus conjugal (c’est-à-dire le degré auquel le répondant estime que le couple s'accorde sur les questions d'importance) et d'expression de l’affectivité (c'est-à-dire le degré auquel le répondant est satisfait de l'expression de l'affection et du genre dans la relation). Dans cette étude, le fait que la personne avec un TCL répète souvent les mêmes questions constitue un indicateur objectif du fardeau qui est également associé à une baisse de la satisfaction conjugale.

Blieszner et Roberto (2010) étudient l’effet d’autres facteurs tels que la santé physique, le soutien social et ne démontrent pas de relation significative entre ces facteurs et le fardeau. Aussi, ils démontrent que la nature de la relation entre l’aidé et l’aidant, que ce dernier soit un conjoint, un enfant-adulte ou autre (frère/sœur, amis) n’est pas associée au fardeau. Ces résultats sont confirmés par l’étude de Paradise et al. (2015). Toutefois, le fait de co-résider avec la personne aidée contribue au fardeau de l’aidant dans l’étude de Blieszner et Roberto (2010), mais pas dans celle de Paradise et al. (2015).

Fardeau des aidants et caractéristiques propres aux aidants. Les caractéristiques et facteurs sociodémographiques de l’aidant (c.-à-d., l'âge, le genre, la race, la scolarité, la relation entretenue et le fait de co-résider avec la personne aidée) ainsi que d’autres facteurs tels que l'importance de la religion, les attentes par rapport à la démence, les attitudes à l'égard du vieillissement et l’utilisation des services peuvent être considérés comme des prédicteurs potentiels du fardeau (Blieszner & Roberto, 2010; Bruce et al., 2008). Or, aucun de ces facteurs ne prédit le fardeau des aidants de personnes avec un TCL (Blieszner & Roberto, 2010; Bruce et al., 2008).

Fardeau des aidants et caractéristiques propres aux personnes ayant un TCL. Dans le fardeau des aidants, différentes caractéristiques propres aux personnes ayant un TCL ont été examinées, c’est-à-dire les variables sociodémographiques, cognitives et neuropsychiatriques. Les études de Bruce et al. (2008), de Lu et al. (2007) et de Springate et Tremont (2013) sont les seules qui considèrent les caractéristiques sociodémographiques

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(âge, genre, scolarité) de la personne qui a un TCL. Bruce et al. évaluent également le coefficient d'intelligence pré-morbide des personnes avec un TCL. Aucune de ces variables n’influence le niveau de fardeau des aidants. Le fonctionnement cognitif des personnes avec un TCL, tel qu’évalué par la performance aux tests neuropsychologiques, n’est pas non plus associé au fardeau dans les études (Bruce et al., 2008; Paradise et al., 2015; Springate & Tremont, 2013). Ce qui détermine le niveau de fardeau est moins le fait que la personne avec un TCL rapporte des difficultés cognitives mais plutôt le fait qu’elle et son aidant rapportent une plus grande durée des symptômes cognitifs, soit un plus grand nombre de mois écoulés depuis leurs premières apparitions (Bruce et al., 2008). Ainsi, plus les personnes avec un TCL se plaignent subjectivement de difficultés cognitives de longue durée, plus le fardeau des aidants est accru.

Par ailleurs, c’est la présence de problèmes comportementaux et cognitifs (problèmes de mémoire, de comportement et d’humeur) tels que rapportés par l’aidant, qui prédit le niveau de fardeau (Bruce et al., 2008; Paradise et al., 2015; Springate & Tremont, 2013). Plusieurs études reconnaissent que certains problèmes comportementaux et cognitifs des personnes avec un TCL sont plus perturbants que d’autres (Blieszner & Roberto, 2010; Bruce et al., 2008; Garand et al., 2005). Plus précisément, la présence de problèmes mnésiques, par exemple le fait d’avoir de la difficulté à se remémorer certains évènements récents et de poser les mêmes questions, serait un des problèmes les plus perturbants pour l’aidant (Blieszner & Roberto, 2010; Garand et al., 2005). De plus, les aidants indiquent que les perturbations du sommeil et le manque d’initiative des personnes avec un TCL contribuent à augmenter leur stress (Blieszner & Roberto, 2010; Savla et al., 2011). Aussi, les comportements perturbateurs récurrents, la dépression, l’apathie, la désinhibition et les problèmes reliés aux fonctions exécutives sont significativement associés au degré de fardeau (Bruce et al., 2008; Springate & Tremont, 2013). Il est intéressant de noter que Bruce et al. (2008) ainsi que Springate et Tremont (2013) testent des modèles prédictifs et qu’au final, seule la catégorie des comportements perturbateurs (p.ex., le fait de parler fort et rapidement, être agressif verbalement avec les autres) explique la variance du fardeau.

Références

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