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Doctrines modernes et architectures du logement. Marseille, 1945-1960

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Doctrines modernes et architectures du logement.

Marseille, 1945-1960

Jacques Sbriglio, Lise Mesliand

To cite this version:

Jacques Sbriglio, Lise Mesliand. Doctrines modernes et architectures du logement. Marseille, 1945-1960. [Rapport de recherche] 580/89, Ministère de l’urbanisme, du logement et des transports / Secrétariat de la recherche architecturale (SRA); Ministère de la recherche et de la technologie; Ecole nationale supérieure d’architecture de Marseille-Luminy / Groupe d’étude et de recherche sur l’espace moderne (GEREM). 1989. �hal-01905939�

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5? o

D O C T R I N E S

MODERNES ET

ARCHITECTURES

DU LOGEMENT

MARSEILLE, 194&I960

JACQ UES SBRIGLIO

I

9

8

9

GROUPE D'ETUDE ET DE RECHERCHE DUR Lr ESPACE MODERNE

Ecole d Archi tecture De Mar s ei l l e- L u mi ny . 70, route L. Lachamp. 13288 Marsei ll e Cedex 9, Tel.: 912G 79 79

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D O C T R I N E S

MODERNES ET

ARCHITECTURES

DU LOGEMENT

MARSEILLE, 1945-19GQ

JACQUES SBRIGLIO

lllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllll

LISE MESLIANO

"Le présent document constitue le rapport final d'une recherche remise au Secrétariat de la Recherche Architecturale en exécution du programme général de recherche mené par le Ministère de l'Urbanisme, du Logement et des Transports avec le Ministère de la Recherche et de la Technologie. Les jugements et opinions émis par les responsables de la recherche n’engagent que leurs auteurs".

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Photo de couverture

Vue depuis le Pont Transbordeur sur la Revue Rassegna - n 25)

le quartier Saint-Jean à Marseille (photo extraite de

Photo de 4ème de couverture

(5)

. Cette recherche a été effectuée par J. SB R IG L IO

. Avec la collaboration de L. MESLIAND

. La recherche documentaire a été effectuée par J. BAUDINO

S. BINELLO S. SUAT P. CARON O. GOLCER O. LEGALL F. MAGNIEN X. MEKLHOUFI S. SUAT

. L’illustration graphique et photographique est due à O. GOLCER

F. MAGNIEN S. SUAT J. SBRIGLIO

. La conception grahique de la maquette est de N. MULLER

. Le secrétariat a été assuré par E. SELLAM

Cette maquette a été réalisée sur le matériel informatique de l'Agence dUrbanisme de l'Agglomération Marseillaise (A.G.A.M.)

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S O M M A I R E

PAGES

P R E A M B U L E 1

I N T R O D U C T I O N 2 à 3

1 è re P A R T I E : D E S D O C T R I N E S D E L ’ U R B A N IS M E ... . DE L'ECLECTISME AU REGIONALISME, MARSEILLE

A L’ECART DES AVANT-GARDES 4 à 7

. IL EXISTE UN ESPRIT NOUVEAU 8 à 9

. MARSEILLE ET LA THEORIE DE LA VILLE FONCTIONNELLE 10 à 12

. DE LA VILLE AU LOGEMENT 13 à 14

. UN URBANISTE APRES L'AUTRE 15 à 17

. LE CAS LE CORBUSŒR 17 à 18

2 è m e P A R T I E : ... A L ’A R C H I T E C T U R E D U L O G E M E N T :

. LES MONOGRAPHIES 19 à 22

. LA METHODE 23 à 25

. L E G R O U P E D ’H A B I T A T I O N X IV :

. OPERATION DU GROUPE D'HABITATION XIV 26 à 27

. EXPERT, LECONTE, DEVIN, DUNOYER DE SEGONZAC

ET ... QUELQUES AUTRES 27 à 30

. URBAIN, NON URBAIN 31 à 32

. RATIONALISATION DE LA COMPOSITION 32 à 35

. LA RATIONALITE DU CHANTIER 36 à 37

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. O P E R A T I O N D E L A T O U R E T T E :

.OPERATION DE LA TOURETTE 38 à 39

. UN ILOT AUX LIMITES DE LA VILLE 40 à 41

. DE L'ARCHITECTURE DE LA BARRE 42 à 45

. ENTREPRENEUR/CONSTRUCTEUR/ARCHITECTE 46 à 48

. UN CLASSICISME MEDITERRANEEN 48 à 50

. O P E R A T I O N L E G R O U P E S A I N T - C H A R L E S :

. OPERATION LE GROUPE SAINT-CHARLES 51 à 52

. CONSTRUIRE AU RACATI 52

. DES VISSICTTUDES DE LA RECONSTRUCTION 53 à 54

. L'HERITAGE DU MOUVEMENT HBM 54 à 56

. AINSI VA L'ARCHITECTURE DE LA VILLE 56 à 58

. CASE ALTE, CASE BASSE 58 à 61

.D U CHANTIER 61 à 62

. LES APORIES DU GROUPE SAINT-CHARLES 62 à 63

. O P E R A T I O N D E L A V I S T E :

. OPERATION DE LA VISTE 64 à 65

.L A BASTIDE ET LE GRAND ENSEMBLE 65 à 68

. DE LA THEORIE A LA PRATIQUE 68 à 69

. LE LOGEMENT OU LE RETOUR DE LA THEORIE

DE L’EXISTENZMINIMUM 69 à 72

. LE CHANTIER : GRANDE ECHELLE ET PETITS MOYENS 72 à 73

. CANDILIS VS DE STUL 74 à 75

. C O N C L U S IO N 76 à 77

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P R E A M B U L E

Cette recherche est une recherche exploratoire. Elle a pour objet d'une part, de pointer les principaux textes instaurateurs des doctrines modernes en urbanisme et en architecture qui dans l'entre deux guerres vont prendre Marseille pour sujet, et d'autre part, d'étudier les effets de ces doctrines sur quelques opérations de logements collectifs réalisées entre 1945 et 1960 dans cette même ville.

Recherche exploratoire bien sûr, parce que l'analyse critique de ces textes demanderait à elle seule un développement plus conséquent. Ceci est également valable pour le corpus des opérations de logement qui - au delà de l'échantillon sélectionné ici - devrait faire l'objet d'un traitement exhaustif.

Cet inventaire qui reste à faire, devrait permettre de mieux nous éclairer sur les effets de ces doctrines, dans une production, "le logement collectif moderne", qui à Marseille et sur la période précitée représente plus qu’un épiphénomène : un cas d'école dans le panorama architectural français de l'après guerre.

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I N T R O D U C T I O N

C'est à la fin de la seconde guerre mondiale, comme le montre le combat que se livrent à distance, EXPERT, LECONTE, POUILLON, PERRET, Le CORBUSIER et quelques autres ... au travers des chantiers vedettes de la Reconstruction, que peut être observée à Marseille, l'émergence tardive des doctrines du Mouvement Moderne, à l'intérieur de la production du logement collectif.

Cette émergence est à saisir en fait comme la transformation qui va marquer dans cette production, l'abandon définitif du modèle "traditionaliste" de la cité-jardin, largement utilisé jusque là par le mouvement H.B.M.., pour laisser la place à de nouvelles structures d'habitat. Celles-ci vont reprendre à leur compte, d'une part les principes urbanistiques définitivement fixés par la Charte d'Athènes rédigée en 1933 et publiée ... en 1943 et d'autre part le vocabulaire architectural élaboré par les architectes du Mouvement Moderne aux alentours des années 1920.

D'où entre la dernière cité-jardin construite avant guerre et les nouvelles opérations qui vont se mettre en place à partir de 1945, une série de ruptures comptabilisables dont on peut dire, pour aller vite, qu'elles vont porter principalement sur les points suivants : . Rupture d'échelle tout d'abord dans la taille des opérations qui ne va cesser

d'augmenter entre la Reconstruction et l'euphorie des années soixante.

. Rupture ensuite dans le rapport logement/ville, avec l'abandon progressif de la notion d'îlot et l'exploration de nouveaux territoires situés en marge des urbanisations traditionnelles.

. Rupture encore dans le système de production qui va désormais privilégier la grande échelle de l'industrialisation.

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. Rupture également dans les modes d'habiter traditionnels que le mouvement H.B.M. avait semble-t-il tenté de préserver.

. Rupture enfin dans l'utilisation des codes esthétiques qui vont abandonner de façon radicale toute référence au vocabulaire régionaliste pour privilégier celui de l’architecture rationaliste.

C'est donc bien sur une voie nouvelle que s'engage la production du logement à Marseille à partir de 1945. Il faut dire que l'enjeu est de taille dans la mesure où les besoins en logements sont immenses pour une population qui ne cesse d'augmenter. Marseille va ainsi connaître durant un quart de siècle, jusqu'aux portes de la crise, une véritable folie constructive qui va la placer au premier rang des villes françaises dans le domaine de la construction des logements sociaux1.

Si comme l'écrit BENEVOLO, le Mouvement Moderne prend fin dès le début des années 1930, on peut alors affirmer sans trop de risques qu'il n'existe pas d'architecture moderne à Marseille. Mais si l'on s'en tient à essayer de montrer la prise en compte, même tardive, de certains points des doctrines du Mouvement Moderne à travers une analyse de ce qui va se produire à Marseille à partir des enjeux de la Reconstruction, alors un travail d'évolution critique reste possible.

Comme l'occasion de questionner à nouveau l'architecture moderne, par projets interposés, lorsque quittant les terrains de l'utopie alternative à la "ville bourgeoise post-libérale", elle est confrontée à une réalité objective, qui la contraint à expérimenter ce que trente années de recherche patiente lui ont permis de théoriser.

1 D e 1945 à 1961, 80 000 logements seront construits à Marseille (cf. in l'Envers du Décor P. SAN MARCO, B. MOREL, Ed. Edisud).

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DE L'ECLECTISME AU REGIONALISME, MARSEILLE A L'ECART DES AVANT-GARDES

Marseille est une ville convulsive. Cette définition relevée dans un article récent du journal Le Monde, illustre assez bien les rapports que cette ville a entretenu, au cours de son histoire, avec son urbanisme et ses architectures.

Ici pas de continuité, ni de révolution tranquille, mais toute une série de soubresauts qui font passer alternativement la ville, de la plus profonde léthargie à un activisme débordant.

Ce que l'on nomme "espace moderne" à Marseille commence dès le XVIIème siècle avec l'implantation sur les rives du Lacydon, de l'Arsenal des Galères. Cet arsenal, véritable manufacture qui emploie près de 6000 forçats, va fonctionner comme le laboratoire de la ville industrielle qui va se mettre en place lentement au XVIIIème et se développer d'une façon inattendue au XIXème siècle. En effet c'est dans la deuxième moitié de ce siècle que tout se noue à Marseille autour des questions de l'urbanisme moderne.

Création et déjà extension des nouveaux ports, mise en place des principaux bâtiments institutionnels savamment répartis dans l'armature urbaine, projets de rénovation de la vieille ville... Avec le Second Empire Marseille peut achever un processus de rationalisation et de modernisation de la ville, initié deux siècles auparavant par Louis XIV.

Entre les deux guerres, celle de 1870 et celle de 1914, si l'activité économique de Marseille reste relativement importante, peu de choses vont cependant être produites au

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G roupe Paul ST R A U SS HBM 1922 (doc. archives O PH LM )

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niveau de son urbanisme. Désormais l'ère des grands travaux est terminée. On se contente de compléter les projets entrepris, de combler les vides entre la ville et son terroir. Celà peut apparaître d'autant plus paradoxal que le mouvement de croissance urbaine ne cesse de se développer, comme le montre la création des "400 lotissements qui se mettent en place entre 1914 et 1930" K Cette urbanisation spontanée due pour l'essentiel à l'immigration va entraîner une croissance désordonnée qu'aucune infrastructure réglementaire ne sera là pour réguler. La crise du logement qui sévit depuis 1910 va servir de détonateur à l'élaboration d'une politique municipale qui va s'intéresser à l'urbanisme. En 1919 est créé le premier Office Municipal de H.B.M. qui trois ans plus tard en 1922 inaugure la cité Paul Strauss.1 2 Désirant bénéficier des crédits de la Loi Loucheur la municipalité décide d'engager un vaste programme de construction de 10 000 logements.

1 L'encyclopédie départementale décrit ces lotissements comme "des cités-jardins, assez misérables d'aspect démunies du confort minimum".

In Bulletin d'informations Architecturales n° 127 Spécial Marseille. 2 220 logements dans le quartier de Saint-Mauront.

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C on cou rs pour la rénovation du quartier de la Bourse à M arseille (Tony G A R N IER 1906) (d o c. A rch iv es M u n icip a les)

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Toutefois l'attribution de ces crédits possède une clause restrictive : ceux-ci ne peuvent être accordés qu'aux seules municipalités qui ont engagé la procédure des Plans d’Aménagement et d'Extension, mise en place par la Loi Comudet de 1919. La nécessité de confier l'étude du développement de l'urbanisme marseillais se fait jour. C'est l'urbaniste Jacques GREBER qui se verra confier cette tâche en 1931.

Cette d écisio n de lancer une opération de construction de 10 000 logem ents tournera court. M arseille ne sera pas Francfort.1 M anqueront à l'appel la personnalité d'un architecte urbaniste co m m e Ernest MAY et surtout un cadre p olitiq u e suscep tible d ’encourager une opération d’avant-garde.1 2

Ainsi Marseille grande ville de province restera spectatrice des expérimentations urbanistiques et architecturales qui se développeront dans les villes de l’Europe du Nord. Victime de son clientélisme politique mais aussi d’une indifférence locale de la part des élites, en particulier de la bourgeoisie, pour les questions touchant à l'urbanisme et à l'architecture, la ville va longtemps résister à toute idée de modernité. Ce ne sont pourtant pas les experts qui lui feront défaut. Dès 1906 Tony GARNIER avait tenté de bousculer les choses en organisant pour l’aménagement des terrains de la Bourse, le premier concours à caractère urbanistique qui ait eu lieu en France au début du XXème siècle. 3 Mais Tony GARNIER ne réussira pas à Marseille ce qu'il

1 Entre 1925 et 1930 15 000 logements seront construits à Francfort. Cette ville va servir de banc d'essai aux théories de l’architecture moderne. Cf. M. TAFURI F. DAL CO - In Architecture Contemporaine Ed. Berger LEVRAULT.

2 Cf. le rôle du maire de Francfort Landmann, même si l'on sait, comme font écrit TAFURI et DAL CO que cette opération, dérapera à son tour.

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entreprendra plus tard avec succès à Lyon, avec les encouragem ents d'une m unicipalité dirigée par la forte personnalité d'E. HERRIOT.1

Le fait que Marseille reste dans l'entre deux guerres, imperméable aux doctrines du Mouvement Moderne, repose aussi bien évidemment sur la culture architecturale locale et ses agents que sont les architectes. Alors que la seconde moitié du XIXème siècle avec des architectes comme A.L.T VAUDOYER, ESPERANDIEU à un degré moindre, P. COSTE, avait développé les théories d’un éclectisme dont la notoriété fut rapidement internationale, 1 2 l'entre deux guerres procédera à un repli frileux à l'intérieur des doctrines du régionalisme.

Influencés par les travaux théoriques de GUADET les architectes marseillais seront soucieux d'appliquer cet enseignement à leur réalisation, que ce soit en matière de logements sociaux, 3 de bâtiments institutionnels ou de maisons individuelles.

Le régionalisme comme alternative critique à l'éclectisme fera l'économie du détour par l'Art Nouveau - inexistant à Marseille - ce qui peut être explicatif du manque d'influence sur la culture architecturale locale, des premiers travaux du Mouvement Moderne.

Si l'on e x c e p te la person n alité de G aston CASTEL, la notoriété d es a rch itectes m arseillais de l'entre deux guerres ne dépassera pas les lim ites de la ville.

1 Notamment la construction du quartier des Etats-Unis entre 1920 et 1928.

2 Exemple la Cathédrale de la Major (1856-1893) qui aurait inspiré H.H. RICHARDSON dans son projet de Boston Trinity Church (1873-1877) cf. H.R. Hitchcock, Histoire de l'Architecture X lX è et XXe - Edition MARDAGA - p. 640

3 Les cités HBM locales seront construites à partir d'une prise en compte croisée de la théorie anglaise des cités-jardins et des doctrines du régionalisme provincial.

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G ratte-ciels sur la voie centrale M arseille-C alanques E vocation de G aston C A ST E L dans M arseille M étro­ pole, les C ahiers du Sud M arseille 1934.

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IL EXISTE UN ESPRIT NOUVEAU

A défaut des architectes et des artistes, c'est du côté des intellectuels, des écrivains et des poètes que les choses vont commencer à bouger à Marseille dans les années 1930, et plus précisément du côté de la revue les Cahiers du Sud créée dès 1919 1 par André

GAILLARD et Jean B ALLARD.

D'une revue conformiste d'inspiration parnassienne ou symboliste, les Cahiers du Sud vont devenir progressivement une revue d'avant garde liée aux idées nouvelles. Cette revue va développer une pensée universalisante, internationaliste et méditerranéenne qui va s'opposer au félibrige comme mouvement d'idées local, strictement enraciné dans une culture mythique de l'intérieur : la culture provençale. Une culture provençale qui tente d'opposer les valeurs séculaires de la campagne à toute idée de culture urbaine et industrielle.

Ce sont les Cahiers du Sud qui en 1927 et 1928 vont accueillir les écrits de Gaston C A ST E L et constituer le lieu de diffusion à la fois local mais aussi national, des nouvelles idées qui commencent à se mettre en place en matière d'urbanisme et d'architecture1 2. Dire que les écrits de Gaston CASTEL ont un caractère théorique original serait inexact. Apparemment influencé par la lecture des premiers ouvrages de Le

CORBUSIER3, CASTEL va reprendre à son compte certaines des idées corbuséennes sur

la ville moderne avec la ferme intention de lancer un mouvement d'opinion.

1 La revue deviendra très active à partir de 1925. Les Cahiers du Sud seront publiés jusqu'en 1966. 2 En 1931 les Cahiers du Sud sous la plume de CASTEL et BALLARD, rendront un vibrant hommage à Le CORBUSIER

’ Vers une architecture - 1923, Urbanisme -1925

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Plan D irecteur de la Région M arseillaise : L A R Z IL L E R E , C A ST E L , R IC H A R D , B E Z A U L T , M IC H E L IS, FA B R E , BO U R T IN - 1931

G aston C A S T E L . E x ten sio n du P alais de J u stice de M a r se ille 1930 (d o c. ca ta lo g u e G aston C A ST E L - M usées de M arseille)

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E lèv e de Victor LALOUX1, de TOURNON, de PONTREMOLI, etc.. CASTEL pétri de culture académ ique, n'entend pas rester in sen sib le aux théories du M ou vem en t M oderne, m êm e s'il ne met pas en application ses théories dans sa production personnelle.

En octobre 1924 il écrit dans les Cahiers du Sud :

"Il y a donc de par le monde un intérêt puissant qui s'attache aux améliorations de la vie urbaine.

Il faut qu'à Marseille, les meilleurs esprits éclairés par l'effort de l'étranger et des autres villes françaises, se joignent au mouvement. Il faut gagner nos concitoyens aux idées nouvelles qui modernisent les cités et font entrer la lumière et la joie dans les foyers avec l'hygiène et le confort".

Plus activiste que théoricien Gaston CASTEL entend sortir la ville de sa torpeur. Il a compris que le renouvellement de la question architecturale ne peut à Marseille faire l'impasse sur la question urbaine qui reste préoccupante. Tout en ayant recours à une série de conseils techniques qui portent sur la nécessité d'améliorer le réseau viaire et l'état du bâti il nourrit pour cette ville de grandes ambitions et lance le concept du Grand Marseille appelé aussi Marseille Métropole.1 2

S'il ne s'attèle pas à la tâche de dessiner ce nouveau Marseille, c'est tout de même lui qui va servir de relais local aux grands urbanistes et architectes qui au tournant des années trente vont prendre en charge les destinées de l'urbanisme marseillais.

1 Architecte de la gare d'Orsay

2 II faut rappeler ici que l'idée du Grand Berlin apparaît en 1920, celle du Grand Londres en 1925, celle du Grand Paris en 1930

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E xtrait de J. GRERER (Plan d é m é n a g e m e n t et d ’E xtention de M arseille). D écoupage du territoire de la C om m une en zones fonctionnelles.

oc MARitILL 0l»Tt>V3N l • i l-OUi.'L441-t*.’

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M ARSEILLE ET LA THEORIE DE LA VILLE FONCTIONNELLE

"Je ne parlerai dorénavant plus de la Révolution Architecturale qui est accomplie. C'est l'ère des grands travaux qui commence, c'est l'urbanisme qui devient la préoccupation dominante".

Le CORBUSIER - Introduction au Tome II de l'O.C. - Juillet 1934.

Deux événements vont marquer l’histoire de l'urbanisme à Marseille en 1933.

. Le premier se situe à bord d'un bateau, le Patris II amarré le 20 juillet de cette même année quelque part du côté du port de la Joliette. A son bord se tient le 4ème Congrès du C.I.A.M. qui réunit les élites internationales du Mouvement Moderne et bien sûr parmi elles, Le CORBUSIER.

. Le second correspond à la publication d'un ouvrage très attendu et qui va influencer pour de longues années l'urbanisme marseillais, il s'agit du Plan d'Aménagement et d'Extension de la Ville de Marseille dont l'auteur est Jacques GREBER 1 . Ce plan préfacé par Henri PROST est dédié au Docteur RIBOT, Maire du Grand Marseille.

Coincidence de date pour deux événements qui concernent la question urbaine et dont on peut penser à première vue qu'ils n'entretiennent aucune relation. Le premier

Jacaues GREBER, professeur à l'Institut d'urbanisme de Paris, Membre de la Commission Supérieure des Plans d'Aménagement et d'Extension, lauréat des concours de Lille et de Paris (aménagement des fortifications) a travaillé à partir de 1920 au plan de transformation et d'embellissement de Philadelphie. Nommé en 1931 à Marseille, Jacques GREBER rend son rapport en 1933.

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correspond à la confrontation d'un ensemble de questions théoriques portant sur la ville moderne, celle du rationalisme. Le second est un travail de terrain dont le but est de régler de façon très pragmatique les problèmes de développement de l'urbanisme marseillais.

En réalité, le travail de Jacques GREBER à Marseille, et ceux menés par les membres du C.I.A.M.1 qui préparent la Charte d'Athènes se recoupent sur plusieurs points.

. D'abord la méthode, qui utilise la représentation cartographique pour analyser la ville dans ses composantes essentielles : la localisation et l'affectation sociale de l'habitat et des équipements urbains, les données du développement démographique, les caractéristiques spatiales du réseau des voies de circulation et l'établissement des relations spatiales entre la ville et sa région d'influence.

La volonté de GREBER est de faire en sorte que son document oublie la notion d'embellissement pour privilégier une approche plus scientifique du phénomène urbain.

. Ensuite l'idéologie : et le travail de C.I.A.M. et celui de GREBER s’insèrent dans la même famille de principes issus des doctrines de l'urbanisme déjà présentes au XIXème siècle. Utilisation de l'analogie médicale pour dresser le constat d'une ville malade, recours à l'hygiénisme et au scientisme, avec en bout de parcours un diagnostic et bien sûr un traitement.

* Les CIAM cette "forme de parlement supranational" comme l'écrit Jacques GUBLER in Nationalisme et Internationalisme dans l'Architecture Moderne en Suisse - Edition l'Age d'Homme Lausanne.

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Les percées de J. GRERER à travers la vieille ville (Plan d 'A m é - naRement et d'E xtension de M arseille)

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. Enfin la théorie réalisatrice, qui si elle n’est pas partagée par tous les courants des C.I.A.M. de la même manière, rapproche des urbanistes comme VAN EESTEREN1 et

GREBER sur la nécessité technique de l'harmonisation des différentes composantes de

la ville et sur la mise en place d'une certaine logique de fonctionnement.

L'ensemble de ces travaux ayant bien sûr pour objectif majeur de formuler une nouvelle théorie d'urbanisme qui assure la promotion de la ville fonctionnelle.

C'est bien cette logique fonctionnaliste qui sera reprochée plus tard à GREBER. Logique qui institue le zoning pour réguler le développement urbain et qui va être à la base d'une ségrégation spatiale et sociale dont la ville porte aujourd'hui encore les traces. Ainsi l'urbanisme de GREBER à Marseille ne sera pas celui d’un "socialisme doux" comme ont pu l'écrire certains commentateurs, mais bel et bien celui d'une démarche volontaire qui dans la période politique trouble que traverse Marseille au cours de ces années là, ne connaîtra pas une application immédiate.

Toutefois, cette modernité radicale, GREBER essaiera d'en atténuer les effets puisqu'il écrira dans la conclusion de son plan d'aménagement :

"Nous appuyant sur la précieuse circulaire du 5 mars 1920 nous avons cherché avant tout à proposer des solutions pratiques et réalisables, dès maintenant, aux problèmes d'une telle importance ... dans la plupart des cas chaque fois que celà nous a semblé possible, nous nous sommes contentés de "la formule corrective" en améliorant sans bouleverser".

1 VAN EESTEREN est le seul urbaniste professionnel des C.I.A.M. Il est à la tête du bureau du plan d'Extension d'Amsterdam depuis 1929. Cf. P.G. GEROSA, la Charte d'Athènes comme fragment de la ville du rationalisme - E.P.F. Lausanne 1984

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DE LA VILLE AU LOGEMENT

On voit, bien à la lecture de ce qui précède, qu'il est difficile de séparer en matière de doctrines, durant l'entre deux guerres, ce qui ressort de l'urbanisme et ce qui appartient à la question du logement. GREBER est très explicite la dessus.

Pour lui il ne saurait y avoir de solutions au problème du logement, sans rénovation urbaine. C'est ce qu'il nomme "le double avantage de l’hygiène et du trafic".1

Après une étude "du point de vue de l'hygiène et de la densité d'habitation", il propose de lancer à Marseille la construction d’un programme de 40 000 logements.

Ses techniques d’intervention, pour augmenter le nombre de logements reposent d'une part sur la surélévation du bâti existant ou son remplacement à partir de nouveaux îlots composés "d'immeubles à étages" et d'autre part sur la création de quartiers nouveaux. L'idée de création de quartiers nouveaux l'amènera à se positionner contre "les innombrables lotissements, morcellements et tentatives de création de cités-jardins qui ont été amorcées dans le plus complet désordre, tant du point de vue du tracé qu'au point de vue de l'hygiène".2

1 Position théorique qui s'apparente à ce qu'écrivait par exemple Ludwig HILBERSEIMER en 1927 in Groszstadt Architecktur. "L'architecture de la grande ville dépend essentiellement du type de solution apportée à deux questions : celle de l'élément constitué par la cellule et celle de l'ensemble constitué par l'organisme urbain. La simple pièce habitable étant l'élément constitutif de l'habitation en déterminera l’aspect ; et puisque les habitations constituent à leur tour des îlots, la pièce habitable deviendra un élément constitutif de la configuration urbaine".

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G a sto n CASTKL. Proposition pour le Vieux-Port (doc. catalogue Gaston C A S !'K L -M usées de M arseille)--- --- —... ... ... ...—

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S'il ne fait aucun doute que Jacques GREBER a été le prem ier urbaniste à introduire à M a r se ille le s d o ctrin es m od ern es, son ou v rage n'est cep en d an t pas un traité d'architecture moderne. D e ce point de vue, J. GREBER serait plutôt un conservateur. Dans un des chapitres de son rapport intitulé "Esthétique" il développe tout un discours sur la notion de protection du patrimoine et de classement des sites.

B ien qu'il n'incite aucunem ent les constructeurs à "faire du pastiche ou de la fausse a r c h é o lo g i e " 1 il m ilite, aidé en celà par G aston CASTEL, pour le recours à une architecture m oderne dans sa fonction m ais qui p u isse tirer parti d es élém en ts du vocabulaire architectural issu des doctrines régionalistes.

S’il peut partager les convictions des architectes modernes sur la ville fonctionnelle, il n’en va pas de même de leurs valeurs esthétiques. Comme le montre le réquisitoire qu'il prononce contre le Pont Transbordeur2 qui, quelques années plutôt, avait servi d'illustration de couverture à SIEGFRIED GŒDION pour le numéro de sa revue consacrée à la construction en France.3

1 Ibid, page 80

Le Pont Transbordeur de Marseille par Ferdinand Joseph ARNODIN - 1905.

3 Sur cette revue "Baucn in Frankreich, Bauen in Eisen, Bauen in Eisenbeton" voir Rassegna n° Spécial S. GIEDION.

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UN URBANISTE APRES L'AUTRE

L'arrivée d'Eugène BEAUDOUIN 1 à Marseille en 1940, précède de peu celle de L e

CORBUSIER. Comme GREBER, BEAUDOUIN jouit d'une notoriété nationale. Bien que sa

mission initiale ait été d’étudier le dégagement du Port, BEAUDOUIN va très rapidement se voir confier le Plan d'Aménagement et d'Extension de la ville.2 Ce qui différencie E.

BEAUDOUIN de J. GREBER c'est que le premier est architecte, le second urbaniste. C'est

dire que pour B E A U D O U IN le problème de la ville se pose avant tout comme un problème de forme. Il suffit aujourd'hui de comparer leur proposition respective pour s'en convaincre. Tandis que le plan GREBER cherche avant tout à tisser un réseau qui lie les grandes unités fonctionnelles de la structure urbaine, quelle que soit l'élégance du tracé, BEAUDOUIN définit son réseau à partir d'une forme clairement identifiable : le schéma radioconcentrique. C'est grâce aux radiales de ce schéma qu'il entend sortir la ville de son adossement à la mer.

1 Eugène BEAUDOUIN (1898/1983) Architecte DPLG, Premier Grand Prix de Rome, Directeur de l'Ecole d'Architecture à l'Université de Genève, Professeur et Chef d'Atclier à l'Ecole des Beaux Arts de Paris.

Réalise en collaboration avec Marcel LODS : la cité du champ des oiseaux à Bagneux (1931-1932), la cité de la Muette à Drancy (1932-1935), l'Ecole de Plein Air de Suresnes (1935), le marché couvert et la Maison du Peuple à Clichy (1937-1939). Après son départ de Marseille, BEAUDOUIN réalisera la cité Rotterdam à Strasbourg (1951/1953) et la Résidence Universitaire d’Antony (1954). Il est un des architectes du complexe Maine-Montparnasse.

In dictionnaire de T.Architecture Moderne par Gerd Hatje Ed. HAZAN

2 C'est le 16.2. 1940 que BEAUDOUIN est chargé par la Délégation Spéciale de la Ville de réaliser ce plan. Le 3.8.1941 ce plan est approuvé à l’unanimité.

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(34)

La première chose que va faire BEAUDO UIN en arrivant à Marseille c'est de rendre hommage au travail de GREBER : "ce n'est qu'en 1932 que fu t élaboré le plan dit

GREBER aui constitue pour Marseille la première tentative moderne d'organisation urbaine"J

Prudent, devant le travail rigoureux effectué par son prédécesseur, BEAUDOUIN va se limiter à une réactualisation de ce plan.

Sa proposition va mettre en oeuvre deux idées directrices : l'aménagement de la ville existante et l'organisation de la ville future selon une logique de l'extension.

"Ce qui frappe à Marseille avant toute chose, c'est le contraste entre la splendeur du cadre, ses possibilités monumentales et la médiocrité de la ville qui s ’y trouve ... aucune composition ne marque la ville, ni aucun attrait architectural et trop peu d'édifices intéressants lui donnent un caractère monumental digne d'une métropole commerciale".2

Après avoir entériné la doctrine de la ville fonctionnelle, introduite par GREBER, B E A U D O IN va plus loin sur le plan de l'architecture. Il demande que toutes les nouvelles constructions soient réalisées sur une même échelle monumentale, suivant une ordonnance constante et majestueuse.3

Très courtisé dans le milieu de l'architecture locale surtout de la part de jeunes architectes comme POUILLON, DUNOYER de SEGONZAC ... dont on reparlera par la suite, BEAUDOUIN fait pour un temps figure de chef de file. Bien que souvent cité, son travail reste aujourd'hui méconnu.

* In Revue Marseille n° 21 octobre 1942 - archives AG AM n° 7785 if In Revue Municipale op. cit. (p. 19)

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V ue axon om élriq u e du p rojet urbain de Le C O R BU SIER pour M arseille (in O .C .T .5) Ed. G IR S B E R G E R

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Les événements politiques succédant aux événements politiques, BEAUDOIN quittera Marseille par la petite porte au moment de la Libération, pour aller poursuivre sa carrière à Paris.

LE CAS LE CORBUSIER

Le dernier architecte qui aura oeuvré, dans le Marseille de l'entre deux guerres, pour faire passer le message de l'urbanisme et de l'architecture moderne aura été L e

CORBUSIER. Après ses premiers contacts avec cette ville dans les années 1930, c'est en

1943 qu'il revient à Marseille pour proposer sa solution de réurbanisation du Vieux- Port. De 1943 à 1955, L e C O R B U SIE R ne cessera de s'intéresser à cette ville, à l'intérieur de laquelle il construira un de ses bâtiments les plus importants : l'Unité d'Habitation au boulevard Michelet.

Attiré pour un temps par le rôle d'urbaniste en chef de la ville,1 après le départ de

BEAUDOUIN, L e CORBUSIER ira exercer cette fonction ailleurs, à la Rochelle-la-Pallice

dès la Libération.

Reste que les différentes propositions, qu'il fait pour Marseille entre 1943 et 1955, croisées avec les attendus des travaux de GREBER et BEAUDOUIN influenceront d'une façon importante l'urbanisme marseillais à partir de la Reconstruction.

1 Cf. correspondance Le CORBUSIER sur lUnité d'Habitation, dans laquelle il évoque un déjeuner avec G. DEFFERRE - Archives F.L.C.

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Ainsi de Tony G ARNIER à Le CORBUSIER en passant par GREBER et B E A U D O U IN , Marseille aura vu défiler dans la première moitié du XXème siècle, un staff d'urbanistes et d'architectes venus se pencher sur son sort. Si les différents travaux et recommandations de ces spécialistes n'ont pas été suivis à la lettre, celà ne signifie pas pour autant que leurs messages ne soient pas passés dans les esprits.

Prise collectivement, leur démarche aura visé le même but : moderniser la ville. Reposant sur les mêmes fondements idéologiques, leurs travaux, pragmatiques pour les uns, plus théoriques pour les autres se rapprochent tous des courants de pensées (quant ils ne représentent pas eux-mêmes un courant de pensée comme celà est le cas pour L e CORBUSIER) qui appartiennent aux Congrès Internationaux d'Architectures Modernes. Congrès desquels sortira après de longues tribulations un modus vivendi appelé la Charte d'Athènes1. En l'absence de doctrine contradictoire durant cette période, il était normal que la Charte d'Athènes connaisse le succès qui a été le sien. C'est après 1945 que va réellement commencer la période de diffusion et d'application de cette charte. Echappant au contrôle idéologique des architectes, cette doctrine va alors investir les grands instruments institutionnels de politique et de gestion urbanistique ... jusqu'à la crise des années 1970 et à la réévaluation critique que celle- ci va entraîner.

G.P. GEROSA indique qu'il y a eu six versions différentes de la Chartes d'Athènes, dont une version Marseille, réalisées par les trois courants principaux des CLAM. In la Charte d'Athènes comme fragment de la ville du rationalisme op. cit.

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LES M ONOGRAPHIES

Le travail sur les études monographiques a été mené avec la collaboration de Jérome BAUDINO Serge BINELLO, Pierre CARON, Olivier GOLCER, Olivier LEGALL, Frédéric MAGNIEN, Xavier MEKHLOUFI, sous la responsabilité scientifique de Jacques SBRIGLIO.

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La seconde partie de cette recherche a pour but d'évaluer, à travers quelques opérations de logements réalisées à Marseille entre la Reconstruction et le début des années soixante, l'influence de ces doctrines modernes dont il a été question en amont.

Cette façon de procéder comporte cependant un risque qu'il est nécessaire d'évoquer rapidement. Qu'il s'agisse du Plan GREBER ou BAUDOUIN, des écrits de CASTEL ou de ceux de L e CO RBUSIER, ce serait en effet inexact d'imaginer que ces écrits aient pu influencer de façon mécaniste les opérations qui ont servi d'échantillon à cette recherche. Fort heureusement le travail architectural possède un degré d'autonomie qui permet au projet de ne pas être totalement assujetti à telle ou telle doctrine, fut-elle celle d'une idéologie dominante. Il y a dans les productions qui vont être présentées ici d'autres influences. Celles par exemple des architectes grands patrons de l'Ecole des Beaux Arts, toujours porteurs durant cette période, de la culture académique. Il y a également les retombées d'un débat international celui du Mouvement Moderne qui s'il ne possède plus la vigueur de l’entre deux guerres continue d'alimenter les revues d'architecture.1

Cette difficulté d'établir des relations trop directes entre doctrines et réalisations se révèle de façon évidente à l'analyse des oeuvres. D'autant plus que des distorsions peuvent également apparaître entre le dire et le faire des architectes eux-mêmes.

1 Exemple, André DEVIN, architecte marseillais jouissant d’une certaine notoriété a été très influencé par le rationalisme allemand de la période 1920-1930, et par l'architecture de MENDELSOHN (1887-1963) (Interview de DUNOYER).

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C'est par exemple ce que montre le travail de Fernand POUILLON à la Tourette. Loin de revendiquer son appartenance aux courants de l'architecture moderne, préférant situer son travail aux antipodes du travail de Le C O R B U SIE R ! , PO U IL L O N ne parvient cependant pas à échapper au processus de rationalisation de son architecture. Que ce soit au niveau de la conception du projet ou du chantier, sa démarche de ce point de vue, n'est en rien éloignée des théories néo-productivistes du Mouvement Moderne. Concernant le projet de DUNOYER de SEGONZAC, la contradiction est moins apparente. En l'absence d'écrits de sa part sur ce projet on en est réduit aux hypothèses. Mais que ce soit dans la façon dont il traite dans le rapport architecture/construction ou même dans sa référence explicite à la stylistique corbuséenne, on peut penser que DUNOYER

de SEGONZAC a choisi son camp avec cette opération.

Avec le projet du groupe Saint-Charles dont l'architecte est MARCUCCINI, les choses redeviennent complexes. Dans le même temps où il se déclare partisan d'une "architecture conçue selon une logique française et latine" et où il exprime sa volonté "d'améliorer le traditionnel en l'adaptant aux nécessités de la vie moderne" M A R C U C C I N I subit la pression d'Eugène C L A U D IU S PE T IT , Ministre de la Reconstruction.* 2

Piloté à deux, ce projet va être un compromis entre les théories du modèle H.B.M. et les réalisations les plus signifiantes de l'architecture rationaliste.

* In A.A. cf. numéro de 1949 à 1955.

2 E. CLAUDIUS PETIT, ardent défenseur de l’architecture moderne

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Planche com p a ra tiv e des plans d'étage courant des 4 opérations :

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Hiiniiiiiininiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiniiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiimiiimi

1 - Immeuble groupe XIV 2 - Le Groupe Saint-Charles 3 - La Tourette

4 - La Viste

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Le dernier exemple, l'opération de Georges CANDILIS à la Viste est des quatre opérations choisies, celle dont la légitimité moderniste pourrait ne souffrir d'aucune contestation. Second fils spirituel de Le CORBUSIER avec A. WOGENSCKY, CANDILIS qui a dirigé pour un temps la construction de l'Unité d'Habitation de Marseille, revient dans cette ville pour une opération d'envergure.

Après la liquidation des C.I.A.M. à Dubrovnik en 1956 par le groupe du Team x, dont

CANDILIS sera un membre influent1 l'opération de la Viste pouvait apparaître comme

une occasion d'appliquer les éléments de critique formulés par les membres de ce nouveau groupe à l'égard du Mouvement Moderne.

Celà ne sera pas le cas. Malgré des qualités évidentes, le projet de la Viste ne pourra pas échapper à la fatalité du grand ensemble. Aujourd’hui cette opération doit être regardée pour Marseille, comme le chant du cygne d'une architecture moderne désormais impuissante à contrôler l'emballement d'une production du logement dans lequel l'urbanisme et l'architecture vont faire naufrage.

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LA M ETHODE

Les quatre opérations qui composent l'échantillon analysé dans cette recherche n'ont pas été prises au hasard.

Le critère de choix a été d'illustrer le mieux possible un itinéraire, celui du logement collectif public à Marseille, sur une période donnée.

Un autre critère a été bien sûr, que ces opérations soient représentatives d'un positionnement par rapport aux doctrines modernes en matière d'urbanisme et d'architecture.

Un certain nombre d'éléments sont communs à ces quatre opérations. La maîtrise d'ouvrage est toujours publique : le M.R.U. (Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme) pour les trois premières, le groupe XIV, la Tourette, le groupe Saint- Charles, la SCIC (dépendante de la Caisse des Dépôts et Consignations) pour la quatrième, la Viste.

De même en ce qui concerne la chronologie, les trois premières opérations menées dans le cadre de la Reconstruction démarrent pratiquement en même temps. Le projet de la Viste viendra dix ans plus tard.

D'autres éléments les séparent de façon assez significative. D'abord la taille : de 46 logements pour le groupe XIV on passe à 260 logements à la Tourette, puis à 291 logements pour le groupe Saint-Charles, enfin à 700 logements à la Viste.

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Ensuite la situation urbaine : les deux premiers projets sont situés dans le centre ville, le troisième sur les limites de ce centre, le quatrième en périphérie.

Enfin le niveau de produit qu'elles sont censées représenter en matière d'architecture du logement. De ce point de vue plus on avance dans la chronologie et plus on s'éloigne de la ville plus la qualité du produit baisse. C'est une autre manière de dire que ces quatre opérations ne concernent pas la même population. Bien que cette question ne soit pas abordée dans le cadre de ce travail.

Pour pouvoir "lire" ces quatre opérations, nous nous sommes fixés un certain nombre d'objectifs d'analyse qui ont porté sur les points suivants :

. étude du rapport entre le logement et la ville

. étude des caractéristiques typologiques : rapport forme/usage

. étude du rapport architecture/construction dans son incidence sur la forme architecturale

. étude de la stylistique architecturale du projet.1

Avant de conclure sur cette présentation globale du corpus de cette recherche, il nous faut dire pourquoi le projet phare de l'Unité d'Habitation de Le CORBUSIER construit à Marseille durant cette période a été volontairement écarté de ce travail.

C'est parce que précisément en raison de son caractère exceptionnel, des conditions de sa commande, de la personnalité de son architecte, de son aura internationale ..., nous pensons que ce projet n'a que peu de rapport avec l'ordinaire du logement qui va être produit à Marseille durant cette période. Cette mise à l'écart ne signifie pas pour autant

1 Au sens donné au mot stylistique par le Petit Robert : qui appartient à l'expressivité, à l’aspect non logique de l’expression.

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que ce projet n'ait pas constitué un point de référence imponant pour le travail des architectes qui nous intéressent ici. Au contraire, de nombreux éléments abordés dans le cadre de la construction de l'Unité vont se retrouver dans ces opérations de façon différenciée : exemple le travail théorique mené sur la cuisine, le mode de production du chantier ou la codification esthétique du bâtiment lui-même.

Toutefois aucune des cellules des opérations analysées n'aura pu pousser aussi loin le travail théorique développé par Le CORBUSEER au boulevard Michelet.

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GROUPE D'HABITATION XIV

Bâtiments E.F.G. (1948-1952)

Opération de Reconstruction du Vieux-Port de Marseille

- Nombre de logements - Maître d'Ouvrage - Architecte : 46 : Le M.R.U. (Ministère de la Reconstruction et de l'Urbanisme)

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■ s i t m WtiÊmBœ m c i K 's iz z M W Ê m m S È ^ is r » ( | | i l Le 'bâtiment du G roupe XIV : à gauche la tour de la T ou relle, au fondTa"C atïiédraie

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O PER ATIO N DU GROUPE D 'HABITATION XIV

"Nous serions heureux d'ajouter à la joie intense d'édifier ,dans notre ville les éléments rationnels et purs, la curiosité de travailler avec vous que nous connaissons par tant de manifestes et de proclamations bâties ... Cette équipe que nous formons serait heureuse de vous aider à dresser dans notre ville les symboles efficaces de l'Esprit Nouveau".

A. DUNOYER d e SEGONZAC - lettre à Le CORBUSIER - 1 9 4 7 - 1

Difficile de décrire le projet de logements réalisé par André DUNOYER de SEGONZAC 1 2 dans le quartier Saint-Jean à Marseille (1948-1952), sans entrer dans l'histoire longue et douloureuse de la Reconstruction du quartier du Vieux-Port.3

1 Archives de la Fondation L.C. cf Unité d'Habitation de Marseille

2 André DUNOYER de SEGONZAC est né en 1915. j _ ...

Il prépare son admission à l'Ecole d'Architecture dans l'agence d'André DEVIN. Il passe son diplôme avec E. BAUDOUIN vers 1942. Après la Libération DUNOYER de SEGONZAC travaille un temps chez R.H. EXPERT à Paris. De retour à Marseille, il intègre l'équipe d'André DEVIN qui prépare le projet de

la Reconstruction du Vieux-Port. , . . .

De toutes ses réalisations son oeuvre majeure reste la Cathédrale d Higuey qu il réalisé en République Dominicaine entre 1948/1955. André DUNOYER de SEGONZAC a été egalement professeur a l’Ecole d'Architecture de Marseille-Luminy jusqu'en 1981. Il est actuellement membre de 1 Academie

d'Architecture.

3 Cf. Fernand POUILLON - Mémoire d'un Architecte - Paris 1968 - Editions du Seuil.

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Toutefois et dans la mesure où cette histoire n'est pas le sujet central de cette recherche, nous laisserons de côté ses péripéties et ses rebondissements multiples, pour nous intéresser à ce qui - dans cette opération du Vieux-Port - concerne directement ce projet.

EXPERT, LECONTE, DEVIN, DUNOYER de SEGONZAC, POUILLON et ... quelques autres.

Ce projet dont l'appellation technocratique est : Groupe d'Habitation XIV bâtiments EFG, prend sa place dans le plan d'ensemble que l'architecte André LECONTE, Grand Prix de Rome, va établir, à la suite de son confrère R.H. EXPERT, en 1948 pour la Reconstruction du Vieux-Port de Marseille.

En octobre 1948, LECONTE définit ainsi la ligne générale de son plan : "Nous a v o n s le d essein d e r e c r é e r un m agnifique q u a rtie r bien m é diterra n éen , g ro u illa n t d e vie a v e c d e s ru es, d e s p la c e s a g r é a b le s e t d e s h a b ita tio n s d e lu x e"L Avec cette déclaration d'intention, le masque est définitivement tombé. Au quartier populaire et coloré, démoli par les autorités allemandes en février 1943 - après de sombres magouilles politico-financières - va se substituer un quartier nouveau, que ses concepteurs souhaitent plus en harmonie avec l'image institutionnelle d'un centre ville. C'est donc sur les cendres presque chaudes de l'ancien quartier du Vieux-port que le pari est lancé. Pari qui entérine une volonté de rénovation de la vieille ville qui préoccupe les édiles marseillais depuis le milieu du XIXème siècle. Volonté à laquelle les différents

* La Revue Marseille - cx;tobre 1948

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urbanistes et architectes "appelés au chevet du malade" n'ont été, bien entendu, pas étrangers.1

Dans la recomposition de l'ensemble du site du Vieux-Port qu'il effectue, André LECONTE 1 2prévoit en bordure du plan d'eau, la mise en place d'une longue barre de logements, qui s'interrompt pour venir encadrer le bâtiment de l'Hôtel de Ville, témoignage de l'architecture du XVIIème siècle.

En arrière de cette barre il reconstitue à l'Est deux grands îlots, à proximité de la percée hausmanienne de la rue de la République.

Au centre de la composition, il tente d'intégrer dans son plan de masse, les deux immeubles déjà en chantier de son prédécesseur R.H. EXPERT.

A l'Ouest, utilisant la césure qui depuis la place de Lenche, descend du quartier du Panier vers le Vieux-Port, LECONTE fait basculer sa trame urbaine à 45° pour organiser trois îlots qui vont construire la pente depuis la rive du Vieux-Port jusqu'à l'esplanade de la Tourette. Toutefois son projet, s'il fixe les grandes orientations de la composition ne va pas être réalisé tel quel. Il subira de profondes modifications. Celles-ci consisteront pour l'essentiel, à recouper le long linéaire de la barre de logements située en bordure du plan d'eau, pour retrouver une trame urbaine plus compatible avec l'échelle de l'espace urbain du Vieux-Port, et à éviter un système d'îlots fermés. On peut penser sur ce dernier point que l'action d'Eugène CLAUDIUS PETIT, Ministre de la

1 "De 1855 à 1860 une dizaine de projets ont été publiés qui concernent un même lieu : la rénovation de la ville de Marseille" in l'Unité de lieu - mémoire de diplôme de Pascal URBAIN - UP6 - 1979

2 Sur la personnalité d'André LECONTE - cf également F. POUILLON - op. cit.

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Reconstruction et supporter enthousiaste des doctrines modernes a eu quelque influence dans cette démarche.

C'est sur la longue ligne brisée qui vient border la trame à 45°du plan de LECONTE que se situe le bâtiment de DUNOYER de SEGONZAC. Dans ce plan le bâtiment est encore entièrement intégré à cette ligne. Rien ne vient le différencier. L'idée de modifier cette partie du plan d'ensemble en traçant un axe de symétrie à travers cette trame, pour relier le point haut de la Tourette au point bas de la rive du Vieux-Port, va permettre à ce bâtiment de retrouver une certaine autonomie.

Sur sa partie Est il va être mitoyen avec le bâtiment qui prolonge l'alignement de la place de Lenche. Sur sa partie Ouest il va se terminer par un pignon au droit du passage qui va servir d'accès à l'îlot de la Tourette.

A l'intérieur de la division du travail organisée par le M .R.U. pour les opérations du Vieux-Port, A. DUNOYER de SEGONZAC appartient à un groupe composé des architectes

CHRYSOCHERIS, DEVIN, EGGER, HOA et POUILLON.

Bien que la coordination générale du projet soit assurée par A. LECONTE, architecte en chef, c'est ce groupe qui va modifier et affiner l'organisation du plan de masse initial. Dans cette démarche les architectes doivent prendre en compte les dispositions réglementaires définies par le M.R.U. et applicables à l'intérieur du périmètre de reconstruction. Ces dispositions concernent à la fois l'implantation et la volumétrie des îlots et des bâtiments, l'organisation interne des logements et l'obligation de se soumettre à certaines volontés architecturales. Maître d'Ouvrage, le M.R.U. contrôle également le choix des procédés de construction, l'approvisionnement du chantier en matériaux, le planning des travaux et bien sûr la budgétisation des dépenses. La conception, du projet si elle est laissée à la libre initiative des architectes, n'en subit pas moins la pression d'une tutelle administrative fortement centralisée et hiérarchisée.

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L oggias dans l'O p ération de R econstruction du V ieux-P ort (photo G O L C E R /M A G N IE N )

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Pour prévenir les e ffe ts d'une bureaucratisation e x c e s s iv e , su scep tib le à term e de pénaliser la créativité des architectes, André LECONTE écrit : "les architectes sont invités

à manifester leur tempérament et leur tendance individuelle. Il faut avant tout que le quartier présente des aspects vivants et variés. Cette variété a été adoptée en vue d'éviter la monotonie et un esprit rationnel d'industrialisation qui n'est pas de mise au Vieux-Port" }

Ici donc, en apparence du moins, pas de mot d'ordre, pas d'idéologie dominante qui privilégie telle ou telle doctrine d'urbanisme ou d'architecture. Mais une volonté de travailler "la variété" qui se traduira dans la réalité par un répertoire urbanistique et architectural qui ira du néo-classicisme au néo-moderne, bien qu’il soit nécessaire de mettre entre parenthèses ces labels dont on verra par la suite qu'ils méritent d'être étudiés de façon critique.

Un autre point qui mérite d'être relevé dans la déclaration de LECONTE est cette volonté affirmée "d'éviter la monotonie et un esprit rationnel d'industrialisation".

Attitude qui peut surprendre si l'on sait combien les pouvoirs publics vont encourager précisément le développement de cette industrialisation à l'occasion de cette période de la Reconstruction. De la part de LECONTE, architecte en chef du M.R.U., on peut penser que ce discours avait plutôt pour objectif de rassurer le public et de séduire les politiques, que d’orienter de façon radicale le travail des architectes engagés dans une opération de restructuration urbaine de grande envergure. 1

1 In Revue Marseille - octobre 1948

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URBAIN NON URBAIN

Confronté à un exercice d’architecture urbaine, dans un fragment de ville en devenir, A. D U N O Y E R de SE G O N Z A C va caler son projet à partir de trois contraintes : un prospect définissant une hauteur maximale de construction de 25 mètres, une obligation d'alignement sur rue, et l'utilisation d'une bande constructible d'une épaisseur de 10 mètres.

La parcelle étant relativement modeste environ 500 m2, la volumétrie obtenue est celle d'un parallélépipède assez haut qui intègre, dans sa morphologie, l'inflexion de la rue qu'il accompagne. Aucun décrochement n'est prévu dans la ligne d'acrotère de l'édifice, le bâtiment venant négocier la pente au niveau de son rez-de-chaussée.

Cet épannelage, s'il obéit aux règles de cohérence, réclamées par le plan de masse, ne parvient cependant pas à régler le problème de forme urbaine que pose celui-ci.

En effet le projet, sans souci d'harmonisation volumétrique avec les immeubles qui le bordent, va affirmer son individualité. Individualité qui sera renforcée par le caractère de son architecture. On peut à ce propos avancer deux hypothèses.

Soit l'architecte a été victim e dans ce cas des incertitudes qui ont pesé longtem ps sur la m ise en place du plan d'ensem ble, plan dont on connait mal le degré de précision, Soit il n'a pas su suffisamment tirer parti du contexte dans lequel il intervenait et qui réclamait en cet endroit la prise en compte de toutes les exigences d'une architecture urbaine. Vraisemblablement influencé par le projet de l'Unité d'Habitation de L e C O R B U S I E R , publié en 1947, D U N O Y E R de S E G O N Z A C tente d'en faire une

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transposition stylistique en réduction, sans tout à fait réaliser que le rapport entre ces deux bâtiments et leur territoire est radicalement différent. Privé de l'autonomie dont jouit le bâtiment du boulevard Michelet sur sa parcelle, le projet de D U N O Y E R de SEG O N ZA C est un compromis entre l'objet moderne "free standing" et l'immeuble urbain. Celà produit une architecture un peu étrange qui ne peut masquer ses ambiguïtés, comme le montre par exemple le traitement de l'angle qui, au lieu de retourner le bâtiment sur le passage, offre un effet de proue qui hausse le bâtiment au dessus des toits qui l'entourent.

RATIONALISATION DE LA COMPOSITION

Dans le même temps où il oblige les architectes à se conformer à des règles d'urbanisme très strictes, le M.R.U. impose un certain nombre de règles communes concernant la conception du logement et sa construction dans tous les chantiers de la Reconstruction. Ce dernier point ne constitue pas un obstacle pour D U N O Y E R de S E G O N Z A C , architecte pour lequel la construction, mieux l'idée constructive en architecture est une des composantes essentielles du projet.

C'est ainsi que la prise en compte de la fabrication du bâtiment, celle de la technique comme faisant partie intégrante de la composition et le sens du détail intelligent et cultivé, vont marquer la réalisation de ce projet.

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Au regard d'une prise en compte des doctrines modernes, le projet de DUNO YER de

SEGONZAC affirme une nette volonté de rationalisation. Rationalisation poussée du

plan, mais aussi du rapport architecture/construction et dans une certaine mesure, rationalisme dans l'écriture architecturale.

La conception du plan de l'étage courant commence, dans ce projet, par une recherche très poussée sur la définition d'un "noyau idéal" de desserte verticale de l'étage courant. Ce noyau reproduit trois fois sur la longueur de la parcelle définit ainsi la structure architectonique de base du projet. Son organisation spatiale est strictement pensée sur la symétrie.

Le système typologique est simple : deux logements sont regroupés de part et d'autre de ce noyau. La trame utilisée est de 3,20 m. Ce dimensionnement est conforme à celui imposé par le MRU pour l'ensemble des chantiers de la reconstruction du Vieux-Port. Le découpage fonctionnel, à l'intérieur de chaque logement, coincide de façon très stricte avec la trame constructive. Celà produit des espaces d'une grande économie de moyens, dans lesquels par exemple, une seule cloison permet d'assurer la partition du logement en deux séquences : une séquence séjour/cuisine et une séquence chambre/bains. Conditionnée par la disposition du terrain, l'orientation de ces logements pose quelques problèmes.

Dans la travée-type, celle située au centre de la composition, la séquence séjour/cuisine est toujours au Nord, la séquence chambre, au Sud. Cette organisation se modifie avec les variantes de la cellule de base. Deux cas se présentent : à l'Est du projet la zone séjour/chambre reçoit une double orientation, Sud pour le séjour, Est pour la chambre. Dans ce cas la cuisine est au Nord. A l'Ouest du projet la salle de séjour est soit au Nord-Ouest soit au Sud-Est. Quant aux chambres elles sont orientées Sud-Ouest.

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Le système de composition du plan d’étage courant ne se limite pas à l'utilisation de la symétrie. DUNO YER de SEGONZAC a également recours, dans ce projet, à un autre modèle spatial, conçu sur l'imbrication de trois éléments : la cage d'escaliers, les espaces techniques du logement (salle de bains et WC) et les espaces du logement eux- mêmes. L'emboîtement de ces trois éléments, réglé par la trame constructive, aboutit à une rationalisation de la conception du logement qui parfois pénalise la valeur d'usage de celui-ci. Comme le montre par exemple le jeu d'ouvertures des portes qui depuis l'entrée, permet d'accéder à la fois à la salle de bains, au WC, au séjour et à la chambre, le tout sur un espace extrêmement réduit.

L'ensemble de ce travail précis indique la volonté de D U N O Y E R de S E G O N Z A C d'expérimenter avec ce projet de nouveaux concepts. Cette architecture de laboratoire reprend les trois critères à partir desquels les architectes du Mouvement Moderne proposaient de repenser la conception du logement : la typification modulaire, la préfabrication des structures, et la recherche d'une cellule minimum standardisable.1 Comme l'Unité d'Habitation, le bâtiment du groupe XIV renvoie la métaphore de la chaîne de montage. Dans sa volonté d'illustrer à sa manière, la rationalité nouvelle qui doit désormais caractériser l'intervention des Pouvoirs Publics dans le domaine de l'habitat, ce projet contraste avec les déclarations de LECONTE sur le refus de l’emploi de tout système rationnel, dans l'opération de reconstruction du Vieux-Port.2

Si le plan d’étage courant montre sa capacité à vouloir ordonner les choses et à fournir une lecture claire de ce projet, il n'en va pas de même en ce qui concerne les façades. 1 Cf. à ce propos les travaux fondamentaux de A. KLEIN sur la distribution du logement en Allemagne en 1928 mais également ceux de J. DUIKER vers 1930 en Hollande qui publie un essai sur le logement populaire, où meme les travaux de GROPIUS et de BRINCKMANN.

L Cf. première partie de la recherche

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Si le plan d'étage courant montre sa capacité à vouloir ordonner les choses et à fournir une lecture claire de ce projet, il n'en va pas de même en ce qui concerne les façades. L'écriture de celles-ci procèdent en effet de systèmes de composition différents, dont il est difficile d'identifier les filiations.

La façade sur rue est travaillée à partir de l'idée d’un soubassement, à peine marqué par un retrait, surmonté d'un corps principal percé d'ouvertures verticales régulières et couronné d'une double rangée de loggias en creux qui forment l’attique. Ces loggias, eu égard au peu d'épaisseur des logements, sont quasiment factices et ne peuvent répondre à une quelconque qualité d'utilisation.

Pour briser la régularité de cette façade, D U N O Y ER de SEGONZAC introduit "deux accidents" sous la forme de deux loggias accrochées en porte à faux sur la façade, sorte de clin d'oeil au bâtiment du boulevard Michelet.

Si la façade sur rue emploie un système de composition qui alterne à la fois l'horizontale de la double bande des loggias et la verticale des fenêtres répétitives, la façade Nord quant à elle est strictement verticale. Trois corps de loggias, dont deux ont la même dimension, recoupent ce bâtiment sur toute sa hauteur. Entre ces trois bandes, en avant-corps sur le nu de la façade, sont positionnées les verticales des fenêtres selon un rythme 1/2/2.

Le soubassement qui apparaissait côté rue a disparu côté cour. Quant au traitement du pignon Sud, organisé sur trois travées, il reprend les premières propositions de Le

CORBUSIER et BODIANSKY pour l'Unité d'Habitation. Grâce à sa grande hauteur sous

plafond (3,20 m), au traitement des gardes-corps et à celui des retombées de plancher,

DUNOYER de SEGONZAC parvient presque à faire passer l'image d'un logement en

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P hoto du chantier et détail d'exécution d'une cellule (d'après A. D UNO YER de S E G O N Z A C , architecte)

Références

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