~3~~~~~,;evN.1 ~~ . . . ~ QJJIIr;1lI ~; ''l'l~ .. -, ,*'. _ ... ___ ... .-_,
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-L'AC'rIVI1'& DRAMATIQUE A HOtfTREAL DE 1890 A 1900
Jean-Màrc Larrue . A 'l'he.t. , , ;
---
Subad tted to --Jlllc(Ull UD.i-ver.1 ty----
-
~ for the degree o~Master of' ArtS
'\
6J'
DepariaÏftt of - ~ PwiiCll-Language and
Ltterat;ure-1 ~ \ . , - t • Jean-Marc Larrue Mt . . . ~: ~ . , ., )
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/ J~ 19'19 __ ' -_ -_ -_ -_ -_ ... - c..
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./1 1 c , \. 1 Department of French Language and Literature Master of Arts'. '. ---'::;l"iJi
J~an a~c
~arrl!e-'.. L' AcTI'VITÉ
D~IQUE ~ M~NTREAL
DE 1890 A 1900(- RESUME .\
;,
.
,
~La dern1~re~~ennie . du XIXe s1~cle marqueun tournan
\
/
'fondamental dans
..
l'~volut1on de 1~tiv1~·dramat1que montr~alaise1 •
(a~teur et professionnelj~~- ~I
, "
- (
Cette th~se vise, a"l'aide d'analyses statistiques et
.
..; d~ mi~es en perspect~~es,historiqUeS,~endr~c~mPt:.de cette ac ~:~ _____ ". et da- ses principales caracteristicntes (r~pertoires, tr~)Upes, fai s '
marquants. visites) . . <
-\ c
La derni~re partie ~,l 'êtude porte principa-'témènt su 'le
1
-th~atre
canadien {êcdturè et jeud';mati9.t.ues.:>--~
~. .. ~ " '"
---
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, , ~ -_..--->---~--Jean-Marc Larrue ( Department of French language 'and literature Master of Arts --IT~DRAMATI UE A-MONTREAL DE 1890 A 1900 j , . . 1 AB ST RACT - ~ .,The fol1owing paper's objective ;s to ana1ys~ a very important period of the Canadian history of drama (amateurish and professiona1) 'in Montreal fro_m r890 ta 1900.
,\
After a~statistical and' a historlcal surveys. we will
\
try \to descri be the hi strioni c Montreal in the 1890 ' s (s·tars, avents t
)
troops) •
-
.
~he last part of the thesis ls devoted to the Canadian
drama (writ~rs.and players).
,'-\ ,
• 1
~/ / ; " , J 1 -1- INTRODUCTION A- PERSPECTIVE HISTORIQUE 1- b~!~~lY!~!_Qr~ID!~!gY~_Q~_~gy~~ll!:Er!~E! A ~~_~~~SQ~~~~~! _ i __ ~~ ___
!: _
b~!!g~!!~LQ,_~Q!!gy!~~ Jl~ b~~~!ly!!!_gr~~!!1gy~_n!!!gn!1~_!!
~!!~r!!l!!~~_~~_IZ§§_~_!§~Q
- "a- Panorama d'ensemble: rupture et desiqulli bre
" l' "
b- Les conditions economiques ; 1
c- Le rep'ertoire et 1e'public
, /
d- Les descendants de Mgr (de Saint Vallier
'. 1
o 1 ' ( . \
e-: Les pr(!juges"moraux et le ptoblême--soc1al
I~~ "--~ "'-,,_.,.-" - 1 / / IC'
,
\ 1 \ ---, ( 3 '\ 12 14 14 21 24 ., 29 '34 11
f- L'impasse et les n6uveaux êlemen~s: ,1860 et apr~s ... ' / 1 B- LE CONTEXT~ IffefE?IAT \ ' j , , , , , -. . . . ~ ~ .. - . . - " ... - . . 1- Le contexte mbndial ---~---~ 2- Le contexte national ---~ 3- b!_yl!~-~!!!r!!l-4- b!_er21!~[!~!-IDQ!!~I!!1!1~, - 1 5- ~mL~QYY!!l!L,!~!2!2g!! \
\
\, i 1 38 45 45 • \ .. \, ~ If if.! i
f·
1
l' , --~--1t
( i
J. l 1 " 1 1 , 1 '.\' 1 - --- --~ fi i \11- LA VIE DU THEATRE A MONTREAL ENTRE 1
u'
A-, ,EXAMEN CHRONOLOGIQUE: UNE INCROYABLE PROGRESSION
~
B- ANALYSE STATISTIQUE DU THEATRE 0 1 EXPRES-siO~ \
FRANCAISE ET QU THEATRE D'EXPRESSION ANGLAI,SE -'
f"'c- LE REPERTOIRE ,\ 1- Introduction
~
2-~;;~~~;~;;~;ng12e~Q~~~_~~_1!!_e!~S~~
!r~~~~e~~~!~...
r 3- ~!!_92g!!_g~_E~~!!~l_~!~_~~!!~r!_!!_1!!_ ~---r~ 2!Y~!:!!L2!:~f~!!~a- Le
drame \,
b- la'com!die et le vaudeville c- L'opêrette ~t l'opêrad- Les grandes vi s.i tes
11\-
LE THEATRE CANADIEN-~- - - 1
A- LES DRAMATURGES ET LES REPRESENTATIONS
1-
k!~_gr!m!~Yrg!~_!~_l~~r!_~~qYr!!~
, a- les auteurs francophones~et leurs oeuvres \ b- Les auteurs ang~ophones et leurs geuvres 2-
b!~_!:!e~!!n~!!!2n~_g:~!y~!:!!_~!nl!~!!QQ!!
1 .
a- Les pikes .ca(larienneS~fran~ sés _. o ,! b- Les p1~ces canadiennes-anglaises'
\ .
-PAGE 69 , 70 ~~.-~~~--/
. !.~ 100 -100 131 14r 175 17'6 178178
192 197, , 198 2D5)
,1.
,1
1 ~- k ! %'
,
~!... i '\ ~ ' / ... 1 \ ~. ~ ...
J
, ' -'~ 1 11
(
" \ 1.
(J
1 / fva- Les donnêes statistiques b- Le r~pertoire
c- Les dramaturge~ et les oeuvres pr~f@rês
d- Les grands moments
-e- Le contexte des ~ep~sentat1ons
fi Les, coll~ges
dynamiques-:
---~~~~~b!!!r~_!~!!!Yr_fr!~~22b2n~
a~ Les donn~es statistiques
b- Les p1eces et les auteurs , p~f!reS,
c .. Les troupes· amateurs et 1 eurs acti
~i t!~
1- Les cerclés- autonomes11- Les t~oupes p~tronn_~s
1i,i- Les ~ de Famille
lv- lin ca. partlct 1er:" Le
,"Oc "
IV- LES TROUPES PROFESSIONNElLES LOCALES
7''''
'A- LES STATISTIQUES
b- LES TROUPES
---
... 1 ". \)
Q " PAGE 209 210 251 251 253 .", ".
...(
, _? . / -\ 0---~--- -. , ( -o V- CONCLUSION VI- APPENDICES Appendice 1 Appendice 2 -Appendice 3 Appendice-4 Appendi'cè 5 Appendi ce ·6 Appendice7
, 1 Répertoire analytique et chron61ogiqùe des oeuvres Statistiques gên~rales_de 'la sc~ne montrealaise
Statistiques de chaque salle Repr!sentations anglophones
et francophones
.
j)Le r!pertoire collégial Le r!pertoire amateur
Les dix dramaturges les plus
joués
a
Montréa 1 ~.Les principales salles
montré-alaises -- ,
-,
Carte théltrale de Montréal
1 1 . "
Appendice 8 Une annonce de thé3tre
B1bllograph~e
\
l' ~---, 1 .' \ \PAGE
--- " 264 268 454 -:.-:--457 470 470 415-~ 479 481 "------,
" ' , \ \ < } • • ~ 1 ... " " \III • ~ 1 • i; l ' ~ --. - - , : ~ ~ , '. f t ,
- ~- -~-~~ ----\. -,r
INTRODUCTION ;- " 1 "\. A- PERSPECTIVE KrSTORIÔU~ ;, ;.\. --.: Si 11 activitê théatrale, dans une rêgion donnêe, estJ~rge-ment tributaire des influences de'son milieu, elle constitue rareestJ~rge-ment
~ une rupture nette avec le passê. Tenter de cerner la vie du thêatre
a
Montrêal de 1890a
1900 exige donc autant une mi~e en perspective, hiS~o~ique~lune êtud.e 'Sy:chrOniqU~. En _1,890, le tM!tre a dêj! un
passê. Ne pas en tenir compte risquerait d'ob~urcir davantage une,
page- ~ssez confuse -de notre histoirê littêraire.
Cette dêmarchè historique exige cepéndant dé la \. ~r~d~~ce.
- /
---_ ---_ 1
Llabondance apparente de documentation et dlêtudes sur le thêatre au
\
.
Canada français, des origines ~'-1890 (surtout depuü 1970), déçoit et
\.
-
-laisse perplexe. Les êtudes vraiment. originales sont rares, les
au-teurs' se contentant de reprendre, avec la m@me perspective, ~es affir- /ft
mations et hypoth!ses des pionniers- daJa recherCheJlr1lmatique.
•
Nous nlavons pas bien sOr la prêtention de refaire cette
his-, ---'
toire ~n_~ le cadre de cettesonmafre pn1s~ntation, majs n~ys
tente-, 1
rons dlen faire ressortir ce qui.nous apparatt pert4nent pour notre
propos. . . - t, •
- 90:.
~Ûl~~OUS
propose;ons uned4!~lnltlon
del'actfvfU dramatique', c lest-a-d1re du thê!tre en son sens le.plus -
.
, ~
-large~ Pourl ' 1nstant. nous nous trouvons confroontê
a
~probl~-. três prêcfs: qU'ést-ce
~e
le thê!tre:ana~ie~:!/a~çais1
.\
\.
,
" '1
t
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r.,
l, " ~-, ,,' ~ 2~ " , ,', , ; --;-- --" , -~I J, " .<1.
.; ; . ~,-,
: ~•
i 1(
\!
T-i 1 , ,r
2Jeart Bêraud a sa
~ponse:
"350a~~
de thê!trel! 1,' Ceciimp11que que 1 e fameux TMltre de Neptune de Marc:, Lescarbot mar--~-"
" '
que' le d.!hut deMtre, tMatre et de notre tradition ,dramatique.
...- , ,
Jean Clfo Godi,n et Laurent Ma1lhot ironisent: 1/350 ou 25 ans de tMatre?".2 En d'autres termes" est ... ce Marc Lescarbot qui marque
le~
dêbuts'de notre' thêltre ouGr~ti~n Gêlin~s1 Est-~e
l'allêgo-, " f
rie pOêt1que des marins français ,cêlêbrant l.e-retour de Pontrincourt
La' rêponse
a
c~_Lquestions est fndi ssodab 1 ernent 1 i êea
1 a~I ~."
perspective d'approche des diffêrents chercheurs. Si le thê!tre
"
.
---canad1en-françai::s (puis quêbêcois) n~obtient ses lettres' de noblesse
. . ,'...- - - < " ~
1
"
'-qu'au moment 00 des pi ~ces êcrites ici, par quelqu'un d'ici, sur un
j- . • ---~'- ~
-1
sujet d'ic1, satisfon.t aUJLt..r.iUres de qualitê de la critique (qui
\
~'_est' peut-@tre pas d'ici!), la question de. Mailhot et Godin perd de {son' caractêre 'lapidaire! Si aù contraire, .le thê!tre canadien-français
naft, pour l' ~istoire, au ~ent de l.a premH~~~ __ ~~n1-~~~tation Idramati~ue
~u. pays', la perspective de Bêraud apparaTt plus sympathique
et
plus' , .justif1êe.
Mais
la position de Bêraud est discu~ble. Le plus souvent, , '$pn ,pproche des oeuvres dramatiques est fortement empreinte de principes
.. - 1 _
" critiques lansonn1ens. Ce parti-pris esth!t1que...semble peu valide.
1. Jean Yraud, 350 ans de tM!tre au Canada fran~~i'{ (Le Cercle'
du----:-~ L1du----:-~rdu----:-~ de France, 19~8).-- /
i ~Jean Cl êo Godi n et Laurent' Ma l1hot; Le Thtf!tre quêb~coi s J~yrJub1 se t'
H.M.H •• 1970),,P. 19. ( , .-_.-~---,
----.
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• \"1<'r--=---.
J
-1- \
t
---,-"~( (
-~If .. \ ~---... ,;;,.,....I ~---... <".I~ ... ~ ,~ .. / ' - ~ ... ", , ! " \1.
,'\'
3 ---t1 - Conme le -sou1 igne 'Burger:
-
aJoseph Quesnel n'est pas Mol iêre, év1denment...--ma+s--le Bas-Canada n'est pas non plus la France. l ' ... - .
1
-'
Que dire alors de' la province de- Québec?
Dans ce bref historique, nous êviterons, donc de parler de
~
la valeur estMtique des oeuvres et du génie littéraire des auteurs. Nous nous cont~nterons de prêciser 1 es courants, 1 es traditions et
~
les condHions'-'9bjectives de l'exercice de l'activitê\dramatique.
...
COIIIIIe l parti r' de 1760 une autre cul ture vient' influencer'
"
---~~-:::--(
---1 a nO,tre. il nous apparalt (essentiel de tenir compte dei ce vOisinage,
---====---..::===--- - 1 ; - - ~} J ~
qui frin e, souvent le ''ma ri age, dans 1 a . présen tat1 on de cet exposé.
(v'
--, " Dês le~ débuts de l'a 'CÇJlonie, le thê!tre de la No'uvelle-France
.
• •CI\
\
''l'\t, ~,,,,"se distingue, par certains aspects, de la tradition française sans POIlr' • .. fi ' !
autant s'en libêrer. Le p~ier spectacle dramatique qui se dêtoul~
a
, 0
_---=-P-OrtiRoya 1, sous 1 e nom de ThéStre de- Neptune, vi sa i t
a
cél êbrer 1 e re ..*
-\
tour d'expédition de Jean de Bi,enco~rt'de pcntrincourt.' Bien.qu'il P.r~ ...cêde de plus de trente ans la réprêsentation dramatique suivante, et qu'il,
.. ' - ~ ... 1
• , - 1 <
constitue un cas iSOlé, le TM!trè de ,Neptune inaugure tci un genre,
qui, '
..,l' !- • .. ~ t ( • ' \ ..
três vite, sera adapte
a
la s1tl:lat1on de l~ Nouvelle-Francè-:" la .rêc~Ption.. '
. .
, ... ', ' .... ,"'--.
---
, ' ....----1 Baudoin, Burger" L'
Act1vit~
thê!tra-le au Québec "(1765-1825)... <, " . -(Parti-pris, 1974).,
p.16.
"','
. "
.
..
-.
-.. ,t',' " \ ;,'it ..('
(
, \ (. ~. • l' r fl
!:t
\ ~ t t 1 : , ( -'.
..
,-
" l i ~ 1 , 1 J i 1 0\0 , " , , . '.
... , ~.--.-. . ' ~ ... ~."~ >~ . . . .,n,~.\.~...-.c""'"
1... 1 , 1 -'----1'" .~
:~
__-~·l
une nouvelle' rêception est brganisée èn '~"',
'--l"honne;;; -;U~ fois de la ven~e' du gouverneur Louis d'Ail1~etJroust.
, .
•
~.
Trois ans· pltts tard,,,! 11
0ccasfQn de l'arrivée de Lauzon, une--autre
l, .. ()
réception est présentée. La même chose se reproduit en 1658, al0r~
...J .--~ •
, --que le vicomte .. diArgens,on est "reçu par la-'jeunesse du pafs"d'un
, . - - ---. 1 " r , ,,~
petit drame en français, huron et algonquin~' -.. ,.~ _____ <
A partir de 1648, la réception se caraèt-érise de
deux,"fa-f \ ... ~ \' ,
, ~ ''-... - -,:., ..
çons:.~ D'une part, elleia Ifour but-de cilébMr un éVênèment.J~~l ;-ti.~ue
'---"
--et religieux, dans u~ cadre ~ormel relativêment str;ct\ d'autre part;
_elle est "jouée, sa~f en 1606 évidemment. par d~s étudiants. "
'.1
De fait, si la "r!ception" revêt! nos y.eux une grande impor":,, _ _ G _ _ f
tançe."clest qu!e11e marque 1 1~ tais les débuts de ~e qulon appelle'
, • - , '1
,
.
..,le th~âtre de col'~ge et ceux dè la pro~uctioh dramatigue ~anadienne. Inf}uencés par le 'milieu, les cireonstances et )a s.1tuation politique" '
1.- • • ~ \ > t .
, l'es auteurs des "réceptions Il ·(des professeurs' Jàui tes) produ~$en't
.
-'>.:des~oeuvres or~ginales ass~ez éloignêes de leur modiHe frança,is. Ainsi ~
. ' ~
_ en 1658, la l"êêëPffOn contient des parties dial.\'Oguêes en algonquin et
\ "
en huron. le ~lus souvent d'ailleurs, des indig~nes et dès personn~ges
\ '
allêgoriques amêrindiens partic~pent ! la reprês~nt~tion.
La "rècept1on" ntest cependant pas le seWl.: genre 'adapté
a.
la'0
s~tuation de la Nouvelle-Frarfce," L '''action'', quj occupe une-.pJace
respec---->-'""" ,
'le Ja.jrnal. des Jêsu1tes citê par Baudoin Burger, _ ,
~.'
p. '36.
-",---•
...
\ ,.
- 1.c. ,"
) \ ,;;' 1 \, . : ~ , T~ • ,~ ."'; ,
.
'-( /1'---- ~_ ; î< ç- ~/~ '. '".
•..
(' , 1 . -,.
. '.
... • ' N ~ ... _ , ~ " ' .... ~-,.... . . . _ Lé'" ... 5 . \.\ ta"b1e ,dans l'activité dramatique~Te la colonie, se-teinte
ég~le-.
ment de couleur locà1e. Ecrite e1,le aussi. par_ des ~.j~~~ites
ensei--J • .. ,
gnants, '''1' "action" dêsigne: une pillee
a
sujet religieux tiré de la 'Bible ou d'une Vi,e' de Saints dont 'l'intrigue, peu comp1e~e, met èn
. . - -- \ - . ' ,
scène d_es ,.personnages 'généralement a 11 êgori que~' pour. .SOJJll gner 1 e
-'trî~omphe 'du Bien sur le Ma1".1 . . \ - ,
, !
L •. pr"'!i!"re ",action':iest-jouae 'par~
es i!lhes duÇo~
age desJêsuites'en 1659. D'autres sont prêsentêes~en 1661, 1668-et 1691.
Malgtê leur caractêré ane~dati~ue;et dans la mesure où elles
; :<r
-constituent plus de la moitiê de'l'activité dramatique globale 'de' la .# ,...< \ ..
"- r ... ?i' \
Nouvelle-France, les se t actions -et rêcep.tions répertoriêés~ntre ...
·-\
- l ' _ '-... 2 '
1648 et 1694 font par te -de\no~re
..
his,toire théâtrale. "t",---"--Ce~te
propor' ion iïïustre bien- " impOrtance de' ce q'U' il e tconvenu d' a PP" 1 er 1
,e,th~ltre d~
c;;lt ;ge. -~
i' ?n_ en croi t j' exemp~.
du thê!tre ~?lJêgial français do~t il s'inspire, tout indique que
t
théatre est vouê
a
un brillant avenir.\ '
En effet; l!organisation d'es collêges 'de France et \du Cani,-dJ
--_est 1a nIIme et
r~lhe d~
RJtioStu~u~,
guide etprogra~
des'l~~~
blissements scolail'~s jês~;tes. RêdigE!-! Rome par un~ c.ol11T1ission de .
la Compagnie en 1584, ce guide consiste- ! 1a fois en une méthode-p~~a
\( -"II 1 • J.b, p. 38.
..
' ~ \ . $ . ", 2La
rist~/n'est ~erta~~nt-Fas
exhaustivec~r
elle ne concernele Coll!ge des Jêsu1te'S~ f"'~ _ ,
r'J
----
--- "-,---l (\
C' ' - . \, ,~-.
,.
.
" .... ~ "<:i --" , t If,< f
.
- t---(
\ , ,-
.---6 '\ 1-90giqu~ et en u,.n prog~â'nmeode cours.
\
AuJre de
~eUX-C1
les
~ \
exe~cJces dramatil.ues, ca~~s jésuite~_ '
éta~nt convaincus que les exercices dramatiques
honnêtement ~ratiquês aident au développement"du
caract~re et des sentiments, A 1 a cul ture de 11 es ..
pri t et de 1 a lnêmoi-r.,e
1
-'
---
Le~_œnséquences de l'application du Ratio Stud-io~um furenttelles en Franc~ que'Raymond_l~~è~ue affirmait en 1929:
"
Le thêatre coll êgi al français servi t de berceau" ~ 1 a
tragédie française?
-Il semble difficile de tempérer cette affirmatton, car Corneille, Molière, Voltaire et Le Sage, pour ne citer·quleoux. furent formés.. A'
l'école des j:ésui~es ... ~
/ ,
'\
Le rOle-eonsidérable j~~~ par les collégiens ju~qulen 1699 et
-- "'-:) ,<
--1-a--foftction stimul ante (du cQlll9t~nt attestés par 1 e fait que,le's
élê-. 1 t " . , -~-, ~ , f- ,
(1
o , <~ fl(es 1 a'ques parfi-e-i-pent géri~reù~ement\à- 11 autre" volet de 11 activité
'drama-' - /
- ,\ fi'
tique de la Nouvelle-France. -le-tfléUre de société. GuoicitJe moins imposAAlt
, -~ '.''''
que 1 e thé;tre de collège. 1 e t1lêatre de soci été. nous
~ourri on~i
re de ", - ~
la haute sociét!. reprend volontiers, ici.~J-es -spectaéles qui ont eu 'du
GI
succ~s dans-la mêtropole,-quelques roois ou quelques années plus tot.~ .
, Devant unpublic d'élite constitu~ du- gouverneur, de 1 1 intendant, d~
\ .~, < ' ,
de militaires et quelquefois. dlinvités sp~ciaux (des Indiens al1iés),-les \
.
\1 Jeanne Co rri ve~u • S. G. C. 1 .;..Jo:;.:.'n:.;:;:a,,=:th:.:.;a:.,:s;...' d;:;;:u::....:.;R:.:,.. p:..;.:...::.:Gu::.::s:..:t:.;:;:W .... ve~L=àm;;:;: •. a:;.:.r_ch:.:.;e:;...;::e_t .
le Thê!tre coll~gial (Th~se dactY~o9raphi~e de l'Universitê de Montr~al),
p.10. ~- - - --~
'-2Raymond Lebêguet, La Tragédie
rel~en -\Franceicha;i~n:·
1929). p" 144. ..
----\ , .... li, , _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ ----~-~~~--~_.~~~ _ _ -L - - '.t'''-' 1 ; tI 2. iL. iL '"l , \ ~ 1 -1 ,
1
---; "1.-9--1 -
~ 1 l' l 1 -7 \amateurs incarnent sur~les héros de Cornei11~cine
ou bi~n présentent des myst~res et des 'tragi-comédies.
\ '
Ainsi en 1640, .le Jou~~e~Jésuites~~te quia
11~cca-, ' I f '
sion de l,'anniversaire de naissa~ce du futur Louis XIV, le gouver-neur de
Montm~gny,
.~
- - \doué d'un zèle~t d'une prud~nce non commune, nous invite- d'y mesler que1qu~ chose qui leur pOt donner 1 _ iux Indi en~ dans 1 a velle et frapp~r 1 eurs ore il1 es.
c~ spectacle est sans do~te-EitHnême type 'que celui qui se déroule e~ 1~46 au magasin des Cent Associés.2 En 1651 ,et 1652,. l'é1ite'peut assister aux représentations de Héraclius et Le Cid
L
de Corneille. En 1693 et 1694, clest au tour de Racine" avec .-.---: - - -,\ Mithridate et Nicomède d'avoir l~faveurs, de 1 'élite coloniale.
---~-
-,Come orr peut le constater,:-le thê!tre de socH!té se manifeste'
(
de façon tout ~ fait irrégUi ière. Cela est probablem$nt dO aux aléas
, ." 10Ù ,
de l'amateurisme, bien-qUi! partir de 1651, ce soient principalement les
"
militaiFes 'gui montent sur les planches, instaurant de cette faç-on la
.
tr.dl~10n
du theUre de ghnison;·t.ls. suptout;··A la persohnalitêmêne du gouverneur" puis de
l-'int~dant
dont l'autorisation et 'Iencou-ragement sont nécessaires a toute.-e.nD.:epl':tse dramatique la'que.,lJournal des Jésuites.
211 ne s'atit probâplement,pas de Le Cid. Voir Baudoin Burger,
oe.
cjt:, p. 43. ---~,--
\ \ \ _ , 52 j k ~_....- 1 , \(
. 1
o. '---~ il"L
- ' -~ ----1 J _-..
- · 8.1
~ La situation en 1694 n'est donc pas aussi dêsesp!rante que l' ~t. sou~enu certa i ~s chercheu rs . 'Cer-t,es, i 1 n' y a pa s en-core de tradition, il n~_pas de dramaturges, mais il y a pr~s
.
<>-'de 15 reprêsentation~ dramat1ques en 50 ans-;--Certes, c \est pe~
mais c'est nêan~oins estimable car, il ne fàut pas l'oublier, ces
, 1 .0 '
reprêsentations conçernent moins'd'un millier de personnes, c'est ,
de bon augur.e en ra i son de l' apport~i f ·des rel; gi eux ense; gnants
~ la cguse-du th~âtre.
• - Ce,t
aven~r,
somnè toute prometteur,'al1ai:~
être~
, ,par le clerg~ et par la France.
~ : '
---En 1694, éclate ,"l'Affaire de Tartuffe" . . Cêabre dans
l'his--, - - - 2
toire anecdotique par le~scandale qu'elle provoque,-"l'Affaire de
"
~ - \
Tartuffe" s'avêre catastrophjque pour le tM3tre et marque le d!but
-<Yun conflit encore violent deux--S'i~ctes plus tard.
En 1694, Mareuil, intendant de Frontenac, décide de monter _Tartuffe de Molière. Le choix n'est sans doute pas adroit, car il s'agit d'une piêce_très-controversée. Ayant dêja fait scandale en
/
/
France, elle avait êté interdite par le clergé dès sa parùtion et dut, finalement,
a
l'interve~tion personnelle du Roi d'être jou!e---lseule l'é~ite cultivée-de.Quêbec assiste aux représentations. 1;
~ \
~Pour convainc~e Frontenac de ne pas ,prêsen~er la pi~ce, Mgr
de Saint-Vallier lui offrit la rondelette somme de cent pistoles.
-"
(
---'/1 \ . , ---~~ o(
\\
.:::=::::.---. 9
----
"potir la première fois.
Il ne faut donc pas_s'~tonner de voir le clergê. colonial. Jivec
a
sa tête Mgr de Saint-Vallier. s'êleve~-.Contre le projet deMareuiL
. Malheureusement pour le thê3tre,'Frontenac nlest pas
Lou1s---"
\XlV. En l'espace de deux semaines les choses s'enveniment ~ un point tel qulapr~s la lecture en chaire par l'abbê Grandelet d·une
Instr~ction pour l'E:claircis,sement "des C.onsciences touchant les
eo-, '
rnédies gui se jouent dans le M,onde, l'~v@que rêdige deux mandemen~s
"success ifs: le Mandement sur 1 es D. i scours impi es et 1 e Mandement au
Suj
et
des Comêd i es ..
.-.,
. La violence d~ la confrontation, qui e~t pour rêsuftat i~ dfat d'"émp(!cher la prêsentation de Tartuffe et d'enrichir Frontenac --<
.
"
de,"cent pistoles. peut surprendre si on ne la \place 'Pas dans un cadre , • u
\
beaucoup p.lus vaste. ç~lui du problème moral soule/vê par ~l~ thê!tre.-\-~---
Le conflit~ comme nous l'indiquions plus tat, nl~st pas
seu-l , '
1
,À • lement ,local (ici t COnllle partout, la Nouvelle-Frànce s~' comporte en
l''-''~~ ~;)~ ~.A
,;_.. colonie qui suit avec un bateau de retard, la vie de la mêtropole);
, fI, l '
r<
-il n'est même pas ,d' êpoqu,~. En fait, il est inhérent au th~atre
" '~~ -" \
-, lui-même. -,Pour s'en convaincre-, 'tW'on se rapp!l1e-, a.titre d'ex~mples,
\ / ~
~ue Platon chasse Homère de sa Il Rêpubl iqu~1t car le t~ê!tre "nourrit et arrose les-passfons'< que Sênêque
considè;e~
unh~~e
qui frêquenteJ'
"
.'
,,'
(
\-(
';' , 1 ; \ f , \J
-'--l~ectacles et qu'en 1314, le premier Concile d'Arles 1ance_
\
la peine d'excommunication contre les comédiens~ Dans l'histoire \
1 - "
f-rança,ise rêcente, le tombat apr~s une pause relative de quelques
si~cles, reprend, la Renaissance aidant, e~1548. A cette date: ,
~n arrêt du Parlement, Al' ins;t.igation du clergé, fit ' dêfense aux confr~res de la Passion de représenter A l'avenir des pi~ces A sujet sacrê. Ce fut la p'remi~re>
rupture entre l'Eglise et le thê8tre en France.2, '
- - - L'arrivée des jansénistes sur le champ de bataille n)arranQe-_.',
.
-rien, êvidenment. Nicole, dans son Traitf de la'-Comêdie en arrive ....ainsi
A cette conclusion que le thê3tre pl~!-t-au public dans la mesure 00 il ême~t ses passions et que, par consêquent. tout chrétien devê,it êviter le thê!tre.3
1(' 1
Un premier paroxysme est atteint au mOment - . - - où les auteurs dramatiques, ----"
désireux de faire-plus que du divertisseme.nt, ont des prétentions di
dac-.
""'--tiqu~s.
,
Non content de se borner au domaine des-passions, ,\ ·le thêatre empiétait sur celui de l'Eglise et affi':'4
chai t la prêtenti on_de donntr des leçons de moral e. Coup sur COllP .apparais,sen:btDon- Juarre:t Tartuffe .... _
Mgr de Saint Vallier, ex-aumonier du roi jusqu'en 1685, n'tgnoPa---certainement pas ce conflit et, têmoin du revirement dêvot de la cour--en 1683, se sent sans doute l ~me de tuer -êrans-r'oeuf,en Nouvel1e-France,un
il
1La crise "8 dêj3 \êclat~ avec vigueur en Espagne et en Ital ie.
----
~2Margaret M. Moffat, Rous'seau. et la-Que':;11e -du TMatre au iS& -,
si~cle (Sletkinè Reprints, 1970), p.7.
3
-Id., p. 8.
-
i, . . ,
C
(i
; ; , ---1 -'\ '1 --; \ , ~---- ! 11r
\pOi,son qui menace toujou'rs H' France. De 1694 \ a 170 , date de son dépa'rt pour la mêtropole, il rép~te , les. interdictions et menaces
'
\
d'excomnunication env~rs\tous (:eux qui projettent d'aller au
speC-j
tacle ou d'en faire, \. \ :
, \ -" 1
L'impact de "l' Affa ore de Tartuffe" aurait probable!'lent ét
~ moindre si, A la suite des j n~éristes et jésuites de France, l'évêque
,
avait continué à to1~rer-res peC~ac 1 es sco lai res, perçus avant tG/Iut Mai s il ne fit pas d'exception et, , cOlTIIIe exerci ces p~dagogi ques,
en 1699, interdit formellement ,les spectacles dra~atiques dans les col1êges. Qu~tre-vingts an~-allaient être ainsi perdus.l
1
C'est peu si 1-! on songe que l' i nterdi'tti on de Calvi
n
priva
1 es,--GenTvo i s de thé3tre pendant deu-x-s4-êc-les. c' es't beaucoup quand on sa i t,
, ,
grac~
a
l'exemple français. le rOle\~u'~uraient pu jouer les co11~ges dans la naissance de la tradition dramatiq~e 'éanadienne. ;-',Le thé8tre collégial entièreme~t éliminé. le thêatre de société survit
a
peine.On note, en 1706, la représentation d'un opéra allégorique
a
Québec. _ Il s'agit d'une oeuvre intitulée les Quatre saisons. Aprês cela, la capitale ne connaTt plus de spectacle.Quarante-trois ans plus tard, Montréal vit ~a premfêre représen-tat1on, malgré l'interdJ~tion~~s autorités religieuses. En 1757, c'est au tour des militairesO de l~~arnfson de Fort Niagara de monter le
~/ .
\
--lJ'eanne Corr~veau, op.cit., p. 20.
...
"
(
...
, \ ii
'C)
1 1 . { 1 ,1 12 1Vieillard -aûpê ,que .. l~ critique1considêre corrrne la premiêre comêdie
~ .... , '
franco-canadi en ne : -,.
(\ ' ' \
,~
A
'pa'tt
J;]a,t: i1 semble b1enqUel;thêatre niait pas fait• c ~J
-f';' " i 1
partie de la "vie ,.. de~l')" , ~ "'" Nouvelle-France au dix-huitiême siêcle. Conne , ... ie soul igne: Bêraud, ,'~le filon de la culture ou du divertissement 1
par'l'a~tidrama\tique
te
perd pour ce 'qui est du rêginîé français~,2, ' \ '\
, ~ ~ ..
En somme,
a
1a veille de l760,_la __ No~~elle-F~ance nia plus ni acfeurs, ni spectateurs, ni àùteurs, ni habitudes de thê2tre; e,ti
l '
rien ne permet de croire
a
un changement radical et ~apide de'la si - tuatioÎ1~-'---~ 1 ,2- Lendemains qe Conqu!te ) -c" , '[ . ., \.
'Pendant tes quinze premiêres ann!es du rêgiiiÎe anglais, il nry i/
, . ) .r! .. , ; r
a de trace d'activitê fthêatrale ni en français, ni ,en anglais. Mais
,
. , dês 1775, on apprend q4e deux comédies de Mo1iêreJ le ,Mêdecin malgrélui et'le Bourgeois genti1h~mme vont être prêsentêes par les officiers de la garnison de Quêbec. Le fait est cocas~e, Le premier thê8tr~
a
~ --- "
~
rêapparaltre aprês'la Conquête est un thê8tre français, jouê en français par des Anglais! ce paradoxe s'explique bien pourtant.
lJean Bêraud, op.cit., p. 21.
t \ , ,----~ .r =
,
J 1/ . ": : - - - - -_: • ---~
.;
J
\
-7---~.
,1 c , " r---_.:.1:
o f/
13Conrne le,.r.a.ppelle Houle,l la culture et l~ langue frança'ises
rayonnaient et trônaient dans --_._--- to~tes - les cours dlEurope du XVIIIe
st~~~.~--Il nlest_donc pas surprenant que les officiers aristocrates ~e la ga
nisori\il,tent~eu le goQt de faire ici ce que le grand acteur
.
Gar~ick3~
faisait 'a Londres: jouer des classiques françai~.
'Cette da te de 1775 marque donc autant 1 a repri se
\
activitl! tMatrale au--pays'" que la~rl!apparit,ol1 dlun J:M!tr_e....Jr n,.n.nnn
- - - l '
-~_~~11e insta~:e en même temps la tradition du thêatre de garnison.
~
.
, ,,-.
cette fois, et perpétue le caract~re élitiste de 1 lacti~ité
J
Car éVid,emnent. le IIpetit-- peupl e ni y avait pas'
accès~4
" Cinq ans pl.us tard, les offlciers présentent une autre pièce de
-,,\-Mol i~re, \.@S Fourberies de, Scapin. ',.
~
La troupe joue aiJs;~
plusieurs reprises et pour une Jonguepé-__ -_JJode les grands succès
les
scènespari~iennes,
puis européennes .Cette activité jaissante ne pouvait être plus opportune. flle
atti re" dês ses débuts, autant 11 êl i te anglophone que francophone et
'lt-,<>
.çomporte_ 11 inmense av'antage de se trolJver, par~ielleme"'t, a 1 labri des
. foudres" du clergê catholique dont on conna1t~ les convi'ctions.
=
-lLêOPold'Aoule, Histoire du Thé8tre au Canada, (Fides, 1945),
pp. 40 et sui vante~ ---= ' "
; ---__ 2Voltaire nlavait-il pas remarqué en arr;-vant aÎrerlin: ... trouve ici en France! "?
3Garrièk;-le plus célèbre acteur anglais'de l'époque jouait "'êlite anglaise, les tragédies de Corneille et de Raéine.
4LêOPOld Houle, op.cit., p. 72.
1 \
-
.
/,
~." ~;-\.--=;--:~:-:;:!:~~~~----_._111111''''''''--~ ,. ,. ~ ~[/
(
, '. ·1' .,
-~----~----:---, , 1 14 \Il ne faut donc pas s'étonner de voi r-apparaTtre, l' exempl e aidant, des troupes de thê!tre amateurs ou collégial'es, tant-a-Québec qu'! Montréal.
~
1-En aOQtl775, ~pi~ces, probablement canadiennes-françaises,
~~ont
jouées au 'Séminaire de Québec, 76 ansapr~s
, 'interdiction de\
1
Mgr de Saint Vallier. L'année suivante, une tragédie religieuse, ' Jonathas et David est présentée au Co11~ge Saint-Rapha~l
de
Montréal.
.
qui récidive en 1777 avec 1'e Sacrifice d'Abraham. Selon t<?ute y'raisem-b1ance. les coll~g'es anglophones qui connencent
â
se développer au~ .
pays, participent également! ce modeste essor thê!tra1. ---~
Les débUts s'avéraient prometteurs. Contre toute attente. la , . ,-venue-d'une autre ethnie, loin d'étouffer les velléités des
francophoriës-pour les activités dramatiques, donne au--thêatre français une Yigue~r en-core jamais atteinte.
('
\
a- Panorama d'ensemble: rupture et dêsiq~il-ibre
Cett~ collaboration allait @tre de courte durée. Si nous devio~s
(
nous r1.squer a présiser le moment de 1~ rupture, nous avancertons deux
~1 s'agit qe Le Monde démasqué et Le Concert ridicule. ,
\
... ----~'-\.
\;,.e
1
,
.
~ j " f. ;(
"> \ , \-
{ -15 ----~.---',._dates, 1785..et
1809.~
Lapremi~re
marquel'arriv~e
de la troupe.
a~r1caineAllen Co., ! Quêbec; la d~uxiême, plus' d1ffuse~ con-finne la suprê.matie de Montrêal sur Québec en matH:re thêatr~ii. Bien qu'apparenÎnent indépendants l'un de l'autre, ces deux faits contribuent
a
marginaliser le thêatre franc,ophon~ ·~ta
le mainte-nir dans soniêtat anêmique.Dans un premier temps, la venue de l'AllenrCo. 'inaugure -
-ce qu' ; l est convenu dia ppe 1 el'~le-~th~~ de tournée. Avec une rêgularité'remarquable, des troupes professionne11es venant de
l'ê~ranger, principalement des Etats-Unis,
!
-1
1
viendront ici chaque année présenter une série_ge pi~ces anglaises et amêricaines. Ce!-> prêsentations auront sur la petite collectivité anglophone un effet bienfaisant assez prêvisilùe-et Pvlteront la fossH~sation de son
_4' thê3tre. ~A~l~C retard peut-êtr~~c une perte d~ qualiU aussi;
" 'f) , / ' - ;
Jes Anglais du Canada vivront au diapason de la/c~lture amêric~no~arf-1
gla'ise et êvolueront presque
a
son rythme. Grace à c!-~tro~'pesêtran-gêres~ les a~glophones. élargissent leur répertoire et surtout, dé-couvrl!nt des mod~les. l'
/ / / / . / : - - - Cela est impo,rtant, car le thê!tre amateur a besoin, pour Si af-: / / ~ f1nner et progresser, de s'inspirer des productions professionnelles et
~ , ..
du jeu des acteurs
expt!rimentês.--.---
t(
---\ ,
L---~~----~'0,~~.,~<,~~-.~i;---r , c, ë ) , 1
C'
l'
i!
, 1 1 ~L \ ~----( #. _ Sous ce rapport donc, le thê'tre des tournêes contribue 1 a rgement au ~ dynami sme du tMatre anglophone 1 oca 1, qu' ils' ag i sse ' d'uri ,thé!tre
a
proprement par.1er amateur' ou d'un thêatre scolaire.- , 1
En quoi cette vivification p~t-è11e Ure préjudiciab1 e au ,...
thé!tre francophone?
,.-' Dans l'illJllêdiat, 11 semble injustifié de parler de pr~judice.
011 doit seulement constater une in~gali~~ démesurée 'des chances et des
, ,
moyens qui annonce l'essor du théa~re anglophone et la ,stagnation du thêatre
francoPhone~
1,809 est autrement funeste. En effet, cOll1lle nous le di sions' plus tOt, Montréal, d~ja métropole, du Canada, dêpasse enfin, Québec quant au nombre de pi èces reprêsentées.
..
Cette tendance déj1i -percept; b 1 e vers 1780 ira s'accentuant sans ce~se j~squ'a nos jours. Or, -en cette tin de dfx-nuftième siècle, et dans le premier quart du dix-neuvième, Montréal et Québec cliffèrent non seu1emeri'Î par leurs vocations, mais1
aussi par leur
POP4~
ation',j
une ville administ,rative.
/ 1 /
)
Quêbec, capitale politique, est avant tout Sa popul ation constttu~e en forte majorité
.;
troupes frança i ses en 1815 et en 1827,' Trop rares, trop espacées, ces visites n'eurent pas de lende-"in même si la Compagnie,des jeunes Artistes semble avoir stimulé une
certaine~activ,ité
---
amateur en 1815 et en 1816. Yoir Baudoir. Burger, Q.2.:.... ~ dt," p. 144.
·c
/"" ~/ J i . 1 \ , ... -....
' - 17, '~"-
---derrancophones, 'se caractêrise par une élite bilingue ou, \au -'
moins, aùtant intêressêe aux manifestations dramatiques 'ffârlçilsës ~ ,
qu'anglffses. -Comne nous ~e mentionnions 'plus tôt,
l'aristocra--1 •
-tie et la haute bourgeoisie ang1ais,es t.r0iJvent valorisant d'as7
~
~---
"~-. si ster. a-âeSrWêsentations classiques français~s. Cela
fait~-part i e d~ leur cu 1 ture .
Montrêal t. par contre', est cÎâvàntage un
c~ntre
de coownerceet de travail. - Sa bourgeoiSie -a~g.laise est une bourgeoisie
mar-. "~ ; . / .
'. chande, totalement êtrangAre, voire rt!fractaire, a
la
francophiliea~istocratique. Sur le plan du thêatre, ceci entratne des
consê-quences ~ou1oureuses. D'une part, sauf exception, la bour..geome
~, ,) ..
anglophone de Montrêa1 n1encourage d'aucune façon le thêatre fran-c
~ cophone local; d'autre part; grace
a
la prêdominance de ,Montrêal,--elle va, pour les dêcennies
a
venir, orienter le thê!tre a-nglophonecanadien et condamner le th~atre • francophone
a
0 la lêthargie.• 0
.J'our bien illus-trer' ces ~omênes, n~us nous pennettons de
rappeler
le~
relevêsstatisti~~
de Baudoin Burger 1. Entre Je débutdu thêltre angl ophon~ en 1782 et la crêa ti on ",du -Thêatre Royal en
1825, l!analyse q~a~titative des reprt!sentations dans chacune des
deux langues dêmo"trent une nette prêdomin~'nce de l' activitê.
drama-
---~-. ,
-tfqUë\"ang1aise. Ainsi,' entre ceS deux dates, l~. population du Canada
-:
---.---~'.
1
Baud~in
Burger, op. c1t., pp. 315a
324., . •• , ~ , 1 ,
.
';f..
,.
·'1 ... , ,', ~r 1
."
~ ~ Jf
tt
(.
f
i ~ ~' f~ '" ~ (.
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1 \ , , "-1 1 \' ",c-J.
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.: • -- ~----:.. .~ 18,-,,----\.
---T~EAU 1: Diapmme du nomlxe total de repriïentaliou 1765-1825 • 1 u. . , 1-' ~
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" _ _ _ _ _ _ - ... :t 1 ., . __ ..peut assist~Y.'/a 1,067 reprê~e~tations anglophones et 99
repr~sen-. .
tations francophones. Plu? pr~cisément.
a
une moyenne ~.34.4re--~tions anglophones annuelles, on doit opposer 3.2 reprêsen~
\
---
. 'tations francophones, soit A peu • ' tI _ . / pr~s J.&-Mu~e .
-L'analyse de Burger.est d'autant p,~s éloquente qu'elle ,,'prouve, mieux que tout a~tre argument, l~jmp~tance du th~atre de ," ·.tourn~e. Si l'on tiérit comPt&-o:de. certalnsfacteurs évi~ents, mais
~ore iRdêtetintf1é~~
on doH situer vers·la01 la datea
J l.aquel1e •. , . ,.'.>;i
1 es tournées des _ troupes _ ang1 a i s'es attef gnent l eur- rythme d&--erOt--- . )
,/ ~ière~ Or,. l'exa~n des chiffres fournis par. Bu~r, d~mor}tre que,
,. . ' ...
de 1782 ! 1797, alors que seulement six troupes visitént le pays, -:::;:;.. on joue en mâyenne une pi~ce en français pou~ 5.6 en anglais, soit
o
resPèc~ivemeht 15% et 85% de la production globale.
Pour 1 a deux i ~e pêri ode dét-erilTi"n!e', ce 11 e a 11 ant de 1804 A'
1825, la diffêrence\quantitative entre les deux activitês dramatiques
\
prend des proporti ons ai annantes. En
vi
ngt .. deux ans, Burger' dênombre\ l • • '
l ' ..
- - - - • $
..::::--~- -60 représentations françaises contre 886 repr~sentations-;:angt&ises, solt
.
.'. annuellement 2.7 contre 40 ou globalem~nt 93.6% contre 6.4% .
•
..
toujours' le mime ~ombre~~'~euvres. En plus, il sem~1e qu'aucune repré-sentation nIait étê donnée de 1798 ~ --
a
1803 inclusivement.---•
\, , ~-'", ..--:----.' \---..
-,
(
'. \ ' l .... , ~-- -., ." 20 "}4. ,A partir de 1825, c'est-a-dire a partir de,la création de~ , thé3tres permanents ~ Montréal. tout laisse supposer que cette
p~o
-portion se-ma1nt1ent et même. sauf en de rares exceptions '(visite de troupes frarylaises, incendi,es de salle: de
spectac;es)r.s'accentue~
, '~,
Ainsi en l.â'90~ le rapport s"établ it
a
97.6% pour le thênre anglo-phone ~ 2.4% pour 1 e thé8tre francophone. ,.f'
,- Ces chif,fres, fiables sans\ être absolument 'sOrs. nous con-,
J
frontent a umroouroureuse réalité. Dans l'ensemble de l'activité
1 r ' f • \ \ /i
...---\ (dramatique canadienne d'abord, montréalaise ensuite, l'activitê'fran-co phone est statistiquement, insignifianjte de 1782
a
,l.8~O.,Paradoxa-'" ,
-J..~-1ement. de la 'Conquête
a
1890, les descendants des,colons de la-: ~
Nouvelle-France sont largement majoritaires dans le Bas-Canada, puis au Québec.
Ils
le sont aussi , - - -à Montréal.Comment, alors, eX~!9uer l'écrasante prépondérance du thê8tre de 1 a minori té?
Les réponses à la question sont'multiples et variées.' Elles
-::-'trouvent leur fondeme~t dans la f~iblesse de l'activité dramatique fran-çaise et dans la fa.rce de l'anglaise.
rien d'une tautologie.
Cela, malgrê les apparences, nia
---.
/ :
l '
,lplus aucun chiffre n'est actuellement;disponible
a
parti; de , . cette date.2 Infra., p. 9Q .•
---
~ .
-.c
, , ' ,.
1 0 -, 21 •.
b- Les conditions économiQues
La premi ère sera 1 t d'ordre économi que. ,On \ set i t, en effet, que des origines-! 1894, aucun mécène ni aucune associatton
bien-v
faitrice ne manifestent un quelconque soutien au thê!tre francophone.
. e '
Cette absence d'aide extêrieure le confronte,! l'alternative suivante: la rentabilitê ou l'auto-financement par les membres. La première pçssibi1itê implique que les troupes amateurs parviennent à attirer suffisamment de specta~ayants pour da frayer les coOts des rêa-, ljsations (ceci constituerait un premier pas' vers le professionn_a .. , l1sJ!:!e). La deuxiBne signifie que les--ac-teurs amateurs, jo~ant par
o goOt et par plaisir, se subventionn~nt eux-mêmes quandola somme-des
billets vendus reste infêrieure aux frais encourus, quand les
repré-\
.
- ---. _ ....sentations sont gratuites ou quand il s'agit de "so1rées-bénêfice~'
Bien que.la première. proposition de l'alternative ser soit rêalisêe A quelqueS-repriseslavant 1850, la rentabilité des spectacles
e'
.
...---relève plus de l'exception que de la règle. Gênéralement, les amateurs
---~~--pouv~ient s'attendre·! financer eux-mêmes une partie de leur projet.
---Cette observation amène
a
la constatation brufale qui suit: pour f~iredu thé3tre, il faut @tre aisé, et. pour @tre aisé, il faut faire au~re
~~hos~
que du thêatre. De cela, on peut dédu'iresa~sque
d'erreur '\\ "~ que les amateurs canadiens-français se recrutent princ~-palement au sei~
~ lAu dêbut du .r@gime anglais, les amateurs étaient assurés d'entrer dans leurs frais si le Gouverneur assistait au spectacle.
\ .
\
\
"
c
J
de la bourgeoisie et que, dans 11i
sont contraints au dilettantisme
----ense major~t~ des cas, ils Ainsi que le tâppe11e Burger: "Seuls les membres des p 'fessions liMrales pouvaient
. 1
~~sur les planches, sachant_ qu ' i1s y perdraient de 1 largent~
Cette situation a de quoi surprendre lorsqu Ion la compare
A cel~e du th~atre anglais. Comme nous le disions plus tOt, les
t'roupes américaines entreprennent des _tournées à Québec 'et
a
Mon,t.r_éal-• c ' dès 1785. Or,i 1 serai t ill usO'i re de penser que ~es troupes
profes-sionnelles présentent aes spectacles par pure philanthropi-e,. Si les J
tournées hl,avaient pas étê minimale~ent rentables, elles auraient sans doute été interrompues. 2 ,Comment
d~s
lors, 'expliquer que les conditions économiques permettaient un t~~re-dë langue anglaise et empêchaient un thé!tre de langue française? , ' Est~ce dO seulementa
la supériorité êcono-'~ , \ 0
mique de la minorité? Peut-être. On peut rappeler des faits qui, sans satisfaire-pleinement, peuvent ouvrir de nouvelles perspectives.
En premier"1ieu, n-faut souligner que, sans avoir-de rnêc~ne
~ , précisément ide~tifiable, le théâtre anglais jouissait ~,'ap-puis finan-- finan--
~-EierS irilpor~~~ts.
Ainsi, lorsque' John Mol son faitconst~uire
le prenner\
----~~ - "
-ttTem-èl'~nt de Montréal en 1825, le Thêatre Royal, il investi,h bien
1Baudoin Burger, oP. cit., p.
---
263~-" 2 \
Ce sont sans ddute de mauvaises expériences qui e~pliquent
!l'absence de tournées
a
certaines périodes et la-fait-que les troupes , frà~çaises de 1815a
1827 ne ~oient pas revenues.l, i , ~
, ,C
.,
1 , , L-23-
-- .-
\sûr, ses fonds 'dans une aventure sOlTJ11e toute assez . hasardeus~ . )
,Mais, à l~instar de Burger, il faut rappeler que Melson n'est pas' seul et, qu'en fait, derrière lui, c'est la franc-maçonnerie qui
\ . ()
.
-favorise l'activit~ dramatique de la -riffilorité. Bien qu'on puisse difficilement évaluer le r6le de cette sociét~ dans l'évolutiqn du théatre anglophone, on sait oqu' il n; était pas, négli'geabl e.'"
Non seulement la plupart des animateurs de thé!tre " anglophone ~taient des francs-maçons, mais les
m@mes salles étaient util isées pou,r des __ lIJanifesta- - l ttons maçonniques et des représéntations dramatiques.
,
En second lieu, comme le d~montre l'unanimité des chercheurs, t
les francoph~nes- assistaient généreusement et assez r~gulièrement aux
\ . activités dramatiques de leurs co~patriotes. Béraud signale: Le Thé!tre Roya 1 ( ..•
.J
sera en mesure d' offri rdes saisons régu 1 i èreLde spectac l e~, surtout en langue angla~se, mais attiraiffUfle élite ,des deux langues? ,
Plus abruptement; Burger affinne:
"
On reconnaTt donè que le thêatre anglophone n~ . saura i t être rentab l~ sans 1 a présence des
-Canadiens (francophones~.3
Les multiples anecdotes relevéés par Jean-Claude No~l conf1nnent \ également la présence des deux ethnies aux représentations anglophanes.4
\
. - .
1 Id., p.' 160.
1
2Jean Béraud, op.cit., p. 3â'~.
-
\
3 r \
Baudoin Burger, oD.cit., p~ 273.
Q
, , ; ,. \ ) p '.
t
f
l ' i , , ~ l " ! ,-
, 1 :('
'\Cl
~ -~... . . . , , . ' -< . . . - q \ . , ' . 24 , >Enfin, 1: insistançe des journaux français
a
annonceret cri-tiquèr-les rep~~~entatiPns dramatiques de l'autre collectivtté, indtque!
qu'elles intérè~saient au moins une certaine partie des membres de'
\~~ ( '':r
la majorit~.' ! , , _ _~
,n
est ainsi paradoxal'de constater que les Canadiens fran'!".
çais contribuaient économiquement A 1 'act;v;t~ dramatique anglaise alors que la leùr était moribonde.
, Cet appui êtonne, mais il a certa 1 nement sa rai soh ~'être.
Tenter de la déceler, c'est qu!tteS le domaine des eff~ts pour celui des causes. 'C'est sug~êrer que la situation économique' lamentable du
, )
? ' ...
thé3tre francophone au 'pays résulte d'un malaise ~eaucoup plus
pr.ofond,--- ,-,-c- Le r~ef!.tQ,ire et 1 e publ ic .'
<,--"
,
-'\ \.. ~ -....''\
'Wne questi~ , que ne semblent pas s'@tre posée les historiens ~ '
'-'-'-....-- \
dramatiques, c'gst celle du gollt du public. Pourtant, il 'y~ a lieu de se demander s1 l'une des causes de l'apparente Ï'ndiffêrence'deS=Ga~
o •
diens français pour leur thê!tre ne provient pas du fait qu'ils trouvent l'autre plus attrayant~
S~rétendre répondre tQtalem~l'tette qUéstion, hasardons
quelques hypothèses. Rappelons en premier lieu que le' d1x~huitieme
(
-- \ \, -"-'
,"." - - - ----"'-, '-'? ,25
sérieux ., bQulev~rsements. Aux genres tragiques et comiques tra~
ditionnels s~ajoute un genre nouveau: le drame. Pl us justement ,
qualifi~ de ~me bourgeois;-puis de mélodrame, il
n'apparaTt pas comme une innovatton ltttêraire
iso1~e, un épisode de l'htstotFe-dramatique
française,_mais comme une force particuli~re
de l'immense mouvjffient spirituel qui anime toute une épo.que~ __ ....
, .
___ Dans la mesure où,
a
la'"~uite d'auteurS" tels que Richardson et Nivelle de la Chaussée, les "Philosophes" du siêcle des Lumiêresadoptent le nouveau genre, tl semble bien, en effet, que le drame-ne----.
. '
solt pas un simple accident.
.
Son apparition correspond A une mutation sociale profonde, car,
. ' ,
-i'l~ drame' bourgeois ne s'aâresse- pas! l'assis.tance aristocratique de Versailles, mais! ces nouveaux privi1êg;~s de la fortune et de la
cu1-ture"~ entendons par
n
les bourgeois.Si l~on s'attarde
a
son contenu eta
sa vàéation, on constate\
que le drame privilégie'la sensibilité aux dépens de l'esprtt.
~
Délaissant un public sclérosê, il s'adresse ! des spectateurs moins sensibles aux raffinements de la culture et de la pensêe qu'aux conflits moraux et aux problêmes quotidiens de la vie moderne, plus avides des émotions du coeur que des plaisirs de
1Iesp..r.it~. ' . - _ ~
, ~;
If
,
\
1Miche1 Lioure, \ Le Drame, (Coil.U., McGraw Hill, 19631. ,t.\J 1. ,
.---' 2 Id., p. 12.
3 Id., p. 13.
, /
, f:::'-' • - - ' . - ~-\ Î 1
(
26ColTf11e il appJraT.t...en-Ennce _au moment de 1 a
Conqu~te
1 / 1 e drame n' a:g"~'
1 nfluenc~ ~ur
l' act1v1; )hUtra 1 e' de la / Nouve 11 e-France: Ul t~ri e~rem~nv, l' examen ~~ pi ~ces pr@sentêes.~ MOntrêal' et ~ Québec p~r les amateurs porte
a
croire qu'~lest exclu de la sc!ne francophone. Aussi de 178Z-
a
1825, plus1 ./ 1
du tirrs des représentations dramat!ques de cette sc~ne sont
consa~rêes
a
Moli~ e~
la~ajOritê
des autres allanta
des auteurs~
\
.
co~ique\ tels qu~ R gnard et Beaumarchais.
Pourquoi al rs s'inquiéter du drame? Les mutaUons
so-ciales qu'a connues la France n'ont presque rien de commun avec ce qui s'est produit ici et le~~s français ne sont pas des Français. Ces diffêrences expliqueraient pourquoi le succès remportê par le \
.
- - '
nouveau genre en France d!s la Rêvolution n'atteint pas les scènes francophones du Canada.
Or, on doit admettre que l' appartt10n du-1Irame n'a rien d'un phênomène lim1tê ;
a
la France, car il touche aussi l'Angleterre,---- ~
l~Italie, l'Espagne et les Etats .. Unis. C'est en fait ~n phênomêne_
- - - î
occidental. Les Canadiens' français. malgré leur apparent fsolement, participent'de ce monde occidental, mais par des voies_d~tournêès,
plus prêcisêment par la culture anglaise. Cette situation nous amène
! affirmer que les Canadiens français, comme tous leurs contemporains, dêcouvriront,tOt 9U tard, le drame.
•
.
lLe Fils naturel ,de Diderot est jouée en 1757 et
Le
Ptre deFamille "en 1 7 6 1 . ' \ , \ <~-~~~---:~--;::-~::-:-:---:!'~---~~.~ .... ~,~; ~~ =:-:~,...,...---
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27Ainsi dè's 1810, ils peuvent aller applaudir une troupe amér-icaine qui joue
a
Montréal et ~ ~uébec, Ellie Rosenberg? un mélodrame de Kenney. Le succ~s remporté par la pièce (succès qui tend ~ justifier notre hypothêse) incite les troupes 1 - __ professi'on~'nelle's ~ inscrire de plus en plus-de mélodrames
a
leur'répertoire de tournée. Ce courant prend vi te de l' ampl eur et s'impose à un point tel que les amateuts,anglophones, très pe~êables aux in~,fl uences des profess'ionnel s, présentent eux aussi des drames dès ,
:. ,1
cette péri ode.
Ils durent, dit Burger, s'adapter au goOt-du jour et introduire la variêté et la modernité dans leurs spectacles; il, durent
a
leur tour présenter des mélodrames. ~~,Que les anglophones du pays aient vite ~dJ>.p~é le.lodrame, cela est p~u discutable; qu'il en ait ~té de même gour les franc~
phones, cela reste
,la
prouver. En effet, si' 'effect1.vement le nouveau-- (.
genre avait autant emballé ces derniers que feurs compatriotes Cee
qu~ncmN:-une fois tendraient à indiquer les succès rempo~tés par les
, ,
troupes), pourquoi ne retrouve-t-on aucune trace de_Jnêlodrame dans 1 e répertoire des amateurs jusqu'à 18251 La première réponse, aussi bru-tale q~'ob-jeG-t-i-v.e, à cette ques:tion est bien simple. Il n'y a pas de textes mélodramatiques français disponibles dans les biblioth!ques et
, , ~
..
librairies du ..pays2en 1810. La deuxiême, plus dê1icate, reUve sans
-~u conservatisme des amateurs, conservatisme motivé, é~tre autres
lsaudoin Burger, op.cit., 1'\. 193.
2.!.9.:., pp. 87 'a"1 06. r-- . 1
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----
'le
1 .
28
êlements, par une situation êconomique precaire, des pressions
, \ l
morales incessantes et, peu~être, par simple conservatisme
lit--'
, têraire. \
~
Toutefois, les prefêrences du public allaient être
d~mon-trêes.
A partir de 1850, en effet, les amateurs francophones se lancent, timidement, dan,~. le m!lodrame. En 1860, ils le
pr-ivilê-'" '
gient', incarnant presque exclusivement des h~ros de Brisebarre, d' Ennery et Boui,lly.
'---Ainsi, avec quarante ans de retard sur le thê3tre profes~
'sionnel, le thêatre amateur français entrait dana l'ère du
rnêlo-drame~
,
Est-ce
a
dire qu'acetiê
date les amateursfrancoPho~~~
1êtaient en mesure de satisfaire le goOt du public et de
concurrenc~r,'
au moins quanta
la modernitê, les scènes anglaises amateurs etpro-1 ,
fessionnelles? Malheureusement non. Dès 1850. /1es anglophones, s'e-taient lanc~s dans
les
rnê10drames a grand d~p10iem~nt. qui ~~~aient, les dêbuts du path~tique spectaculaire.A
En raison des investissements fabuleux que pouvait exiger une telle entreprise, les amateurs francophones ne s'y risquèrent m@me~·pas. Cette fois, l'impuissance etait encore plus flagrante. En 1880,
---
'
~-, Infra~ pp. 34-38.
•
2,Jean-Claude NotH, op.dt., ,P. 103 a 110 .
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• ~,avec le Jacob's show, la vague vaudevilli-ste amêricaine dêferlait
_ _ su_r:'2 e Quebec. LI encor" 1 II fa l,lut 'au publl
ë
fr~C:ophone'
attendre---.:.::-' \ plusieurs annêes avant dl apprêcier le nouveau genre dans sa propre
~' l t ' ~ . ! t ~
i'
,
1 ~ ., , f , > 1\
. .~.
1 1 ! . langue.,'En conclusion, nous devons constater que le rêpértoire thêa
-)
tra1 'defarnaJori-tê française a souvènt suivi les mênes votes que
- - 1 >110"
le'r~pertoire anglophone, mais avec beaucoup de. retard. Ce dêlai .
n.' aur:ait pa's····itê prêjudic1ab1e' si 1 es fra(~coPhones n'en avaient pas
·eu consci ence. Or" on 1 e Sla i t. il sn' êta i ent pas êtrangers aux
acti-, • - f •
vitês dramatiques de la minor1tê et tout por)Ve
a
croire que leurft-'de 1 i te 11 ngu i sti qu e .
~e
re
si
sta it pa s i l ' a 1r:it de la .nouveaute.do! Les descendants de Mgr d~ Saint 'Vall ier
----=----'-- ----=----'--
- (Si la 'question dU rêpert01re peut exp1 iquer le dês11~têr!t de
certains francophones, elle ne parvient pas
a
justifier rfhostilttêde la majoritê d'entre eux
a
l'êgard de ,tart dramatique en gênêral.\ -- ' . ...---,
Aussi 'les historiens ont cherchê ailleurs les causes de cette
mêfiance et ont presque tous ê~oquer l'action castratrice du clerga.
,
De la cêll!bre "Affaire"\du Tartuffe"
a
1880, il est en effet--.
indêniabl'e que le clergê canadien, conme le clergê français de la
~ \
mime êpoqué, a,
a
plusieur~ reprises, fortement influencê le cours! ,
,
--.
• "">
.-,
- -
.. ~,
---
---30
de l' activit~ dra~at;que. a question n,' apparatt donc pas de
, \
savoir si oui ou non le clergê a jouê un rôle dans l'êvollltion
\
du th~atre au pays, mais plutÔt d'êvaluer l'importance 'de ce
rOle. Conme nous le sous .. entendions plus tat, la plupart des
chercheurs qui se sont 1nt~ressês. au probnme~-.e1L
--
tendanteA faire des autoritês rel~gieuses catholiques les pri'nc{paux
responsables de la situation'léthargique du tM~tre' francophone:
--
' CJ---. ---.
1 ! "Sans oser contredire cett! déclaration, nous nous permettons œrta i nes réserves.
11·'
lapremi~re
résulte de la faiblesse ,relative du clergéA partir de l,a, Conquête. Soucieux d'éviter tout affrontement
:avec l'autorité politique, le clergé se montre tolérant A l 'égard".~
.
--' ,
de l' activitê dramatigue. On voit mal, en effet, conment jl aurait
pu condamner ouvertement derreprê-sentations auxquelles assistaient, outre l'élite francophone, 'l'élite anglophone, le gouverneur, et, parfois, un membre de la famille royale d' Angletèrre.' De plus,
quand bi en même elles l'aura i ent voul u, 1 es autorités rel i gi euses
francophones auraient eu peu de moyens
de
faire pre~sion sor lesan!mateûrs du thé!tre anglophone.
,
Ces circonstances nouvelles plaçaient donc le clergé dans
une situation d'impuissance. Sa seule vêrltable influence p0l!vait se 4 •
.---.