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Élaboration et validation de contenu de grilles d'observation grâce à la technique Delphi et à l'observation de terrain

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Academic year: 2021

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MARIE-CLAUDE FILION

ilL

ÉLABORATION ET VALIDATION DE CONTENU DE GRILLES D’OBSERVATION GRÂCE À LA TECHNIQUE DELPHI ET À L’OBSERVATION DE TERRAIN

MÉMOIRE présenté

à la Faculté des études supérieures de l’Université Laval

pour l’obtention

du grade de Maître en Psychologie (M.Ps.)

École de psychologie

FACULTÉ DES SCIENCES SOCIALES UNIVERSITÉ LAVAL

MARS 2002

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RÉSUMÉ

La présente recherche vise l’élaboration et la validation de contenu d’éventuelles grilles d’observation structurées pour l’évaluation d’un nouveau programme d’éducation sexuelle en milieu scolaire. Ces grilles servent à évaluer deux éléments. Premièrement, elles tentent de vérifier des caractéristiques structuro-pédagogiques d’écoles et de classes susceptibles d’influencer l’implantation efficace d’un programme d’éducation en milieu scolaire. Deuxièmement, elles visent à vérifier les effets de ce programme sur le développement de l’esprit critique et de l’entraide chez les jeunes qui y prennent part. La validation de contenu des éventuelles grilles d’observation s’effectue grâce à deux méthodes. D’abord, par le biais d’une consultation d’expertes et d’experts en éducation sexuelle ou en pouvoir d’agir, à l’aide de la technique Delphi. Également, par !’observation de terrain qui se déroule dans les écoles et dans les classes lors des cours d’éducation sexuelle. Cette étude a permis de relever les éléments de contenu bruts importants pouvant servir de matériel de base pour l’élaboration de grilles d’observation ainsi que de listes d’évaluation, lorsque !’observation n’est pas possible.

Francine Dufort, Ph.D. Directrice de recherche arte'-(

Marte-Claude Filion Étudiante

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AVANT-PROPOS

En écrivant les dernières lignes de ce mémoire, je ne peux m’empêcher de témoigner ma gratitude aux personnes de mon entourage qui m’ont, tout au long de mes études et de cette rédaction, soutenue dans les beaux moments comme dans ceux plus difficiles.

Je pense tout d’abord à Madame Francine Dufort qui, par sa rigueur et ses judicieux conseils, m’a permis de mener à terme ce grand défi que je me suis lancé il y a près de deux ans.

Je remercie mes partenaires et amies de laboratoire Kathleen et Jacqueline pour leur soutien et leurs encouragements toujours très appréciés. Merci à Julie, présente depuis le début de mes études universitaires, pour m’épauler et me faire rire.

Je ne peux oublier de remercier ma famille et mon amoureux, Pierre. Merci d’avoir su me réconforter quand j’en ai eu besoin. Merci pour tout l’amour et le soutien que vous me donnez. Sans vous, rien de tout cela n’eût été possible.

Finalement, merci à tous ceux qui, de près ou de loin, ont collaboré à cette étude. Je pense aux expertes, experts, aux observateurs ainsi qu’à l’équipe derrière ce programme d’éducation sexuelle innovateur.

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Ill

TABLE DES MATIÈRES

page

RÉSUMÉ...i

AVANT-PROPOS...¡i

TABLE DES MATIÈRES... m LISTE DES TABLEAUX... vi

LISTE DES ANNEXES... vil INTRODUCTION... 1

CHAPITRE 1 :... 3

CONTEXTE THÉORIQUE... 3

1.1 Facteurs susceptibles d’influencer l’efficacité d’un programme d’éducation sexuelle... 3

1.2 L’importance de viser des changements collectifs... 5

1.3 Le programme ESPAR et son évaluation...7

1.4 Introduction aux concepts évalués à l’aide des grilles d’observation...9

1.4.1 Distinctions entre les études portant sur les écoles et celles portant sur les classes...11

1.4.1.1 Caractéristiques structuro-pédagogiques de l’école... 12

1.4.1.2 Caractéristiques structuro-pédagogiques de la classe... 15

1.4.2 Notions d’esprit critique et d’entraide...16

1.4.2.1 Notion d’esprit critique... 16

1.4.2.2 Notions de soutien et d’entraide.·... 21

1.5 Objectifs de la recherche... 24

CHAPITRE 2 :... 27

MÉTHODOLOGIE... 27

2.1 Description de la technique Delphi... 27

2.1.1 Avantages et limites de la technique Delphi...28

2.1.2 Étapes de la technique Delphi...28

2.1.3 Procédure des prétests... 30

2.1.4 Participants à titre d’expertes, experts... 31

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2.2 Caractéristiques de !’observation en situation... 33

2.3 Respect de l’éthique...34

CHAPITRE 3... 36

RÉSULTATS DE LA DÉMARCHE DELPHI... 36

3.1 Évolution de la procédure de la technique Delphi...36

3.1.1 Premier questionnaire Delphi...36

3.1.2 Deuxième questionnaire Delphi... 40

3.1.3 Troisième questionnaire Delphi... 43

3.2 Pistes de réflexion pour la création des grilles d’observation... 45

CHAPITRE 4...46

CONTEXTE D’OBSERVATION... 46

4.1 Convergences et divergences rencontrées entre le groupe d’expertes, experts et les observateurs...47

4.1.1 Caractéristiques structuro-pédagogiques de l’école... 48

4.1.2 Caractéristiques structuro-pédagogiques de la classe... 49

4.1.3 Caractéristiques ou indicateurs du développement de l’esprit critique...50

4.1.4 Caractéristiques qui correspondent au climat de soutien et d’entraide entre les jeunes... 51

4.2 Caractéristiques de !’observation pour l’évaluation de ESPAR... 52

4.2.1 Déroulement de !’observation lors de l’évaluation du programme... 52

4.2.2 Définitions de !’observation en situation... 53

4.2.3 Différents systèmes d’observation... 54

4.2.4 Modèle de grille d’observation pouvant être envisagé... 56

CHAPITRE 5...58

INTERPRÉTATIONS DES RÉSULTATS... 58

5.1 Caractéristiques structuro-pédagogiques des écoles et des classes...58

5.2 Caractéristiques de l’esprit critique à retenir...60

5.3 Caractéristiques de l’entraide à retenir... 61

5.4 Limites de la recherche... 63 iv

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V

CONCLUSION... 65 RÉFÉRENCES... 68 ANNEXES... 75

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VI

LISTE DES TABLEAUX

page

Tableaul : Catégories et nombre d’énoncés observés dans la compilation du

questionnaire #1...39

Tableau 2 : Exemple d’un échantillon de questions du deuxième questionnaire Delphi... 41

Tableau 3 : Nombre d’énoncés ayant atteint le seuil de pertinence de 80%, sur le

nombre total d’énoncés... 42

Tableau 4 : Énoncés éliminés du contenu des outils... 44

Tableau 5 : Exemples d’énoncés ou d’information pouvant être récupérés lors

d’entrevues...59

Tableau 6 : Éléments de l’esprit critique à récupérer lors de !’observation de

groupe-classe... :... 60

Tableau 7 : Exemples d’éléments de l’entraide à récupérer lors de !’observation de

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Vil

LISTE DES ANNEXES

page

ANNEXE A : Modèle de grille d’observation et d’évaluation (Boisvert, 1997; 1999)... 76

ANNEXE B : Premier questionnaire Delphi... 77

ANNEXE C : Deuxième questionnaire Delphi... 80

ANNEXE D : Formulaire de consentement éclairé... 97

ANNEXE E : Troisième questionnaire Delphi... 99

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INTRODUCTION

L’implantation d’un programme de prévention ou de promotion du pouvoir d’agir (empowerment) dans une école nécessite une bonne organisation, du temps et de la bonne volonté de la part des différentes actrices et des acteurs impliqués dans cette école. Plusieurs éléments sont à considérer pour favoriser la réussite et l’efficacité de son implantation et plusieurs méthodes d’évaluation existent pour vérifier l’atteinte de ses objectifs. Ainsi donc, l’équipe de recherche qui a élaboré le nouveau programme d’Éducation Sexuelle fondé sur le Pouvoir d’Agir et de Réfléchir (ESPAR) qui s’adresse aux jeunes fréquentant l’école secondaire aux niveaux 1 et 2, juge important de s’attarder à l’évaluation de l’implantation du programme dans l’école, ainsi qu’à l’évaluation de l’atteinte de certains objectifs collectifs du programme.

Comme le suggèrent certains écrits scientifiques (Moos & Trickett, 1974, 1987; Levine, 1998), les chercheuses de l’équipe veulent considérer les aspects structuro- pédagogiques des écoles ainsi que ceux des classes pouvant influencer l’implantation d’un programme éducatif. En outre, elles comptent vérifier si ce nouveau programme d’éducation sexuelle contribue à développer chez les jeunes certains comportements et certaines attitudes face à la sexualité et face à leur entourage en général. En effet, par le recours à des stratégies pédagogiques associées au empowering education, le programme ESPAR vise !’accroissement de l’esprit critique des adolescentes et des adolescents. Cet esprit critique peut se traduire notamment par des questionnements face à certains préjugés ou certains stéréotypes sexuels qui prévalent dans leur environnement social ou familial. De plus, l’équipe de recherche souhaite vérifier si les jeunes qui bénéficient du programme d’éducation valorisent l’entraide. ESPAR accorde beaucoup d’importance à l’aspect de l’entraide qui se traduit par le respect et le souci de l’autre, l’échange et la réciprocité. En effet, le programme se fonde également sur des stratégies pédagogiques associées à !’apprentissage coopératif.

Ainsi, le présent travail porte sur l’élaboration et la validation du contenu de grilles d’observation qui serviront à une partie de l’évaluation de l’implantation du programme ainsi qu’à l’évaluation de l’atteinte des objectifs collectifs de développement de l’esprit critique et de l’entraide chez les jeunes. Le but de cette recherche est d’obtenir des

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énoncés de contenu valides, à joindre à d’éventuelles grilles d’observation pour évaluer les caractéristiques structuro-pédagogiques des écoles, les caractéristiques structuro- pédagogiques des classes, l’esprit critique et enfin, l’entraide d’élèves de secondaires formant les groupes-classe.

La démarche entreprise pour élaborer et valider le contenu des éventuelles grilles d’observation est la suivante. D’abord, il y a une consultation d’expertes et d’experts en sexualité adolescente ou en pouvoir d’agir qui s’effectue grâce à la technique Delphi. Parallèlement, il y a de !’observation de terrain qui se déroule lors des cours d’éducation sexuelle dans les écoles où le programme est implanté. Finalement, l’analyse des résultats obtenus grâce à ces deux méthodes de collecte de données est faite. Des recommandations sont émises quant à la forme que pourraient prendre les éventuelles grilles d’observation et quant aux autres méthodes de collectes que l’équipe de chercheuses devrait considérer pour recueillir les données jugées pertinentes à l’évaluation.

Voici donc comment s’organise ce mémoire. Le premier chapitre présente le contexte théorique qui sous-tend les notions concernant l’implantation efficace d’un programme éducatif et présente l’objet d’évaluation de cette recherche. Le second chapitre explique les méthodes utilisées pour recueillir !’information nécessaire afin de s’assurer d’obtenir des énoncés valides. Le troisième chapitre décrit de façon détaillée chacune des étapes nécessaires pour obtenir ces résultats. Le quatrième chapitre compare les résultats obtenus grâce à la consultation d’expertes et d’experts à ceux obtenus grâce à !’observation en classe. Ce chapitre se termine en présentant différents systèmes d’observation et des pistes de réflexion quant à celui que l’équipe de recherche compte retenir. Finalement, le dernier chapitre propose une interprétation des résultats et suggère des tableaux récapitulatifs des éléments importants à considérer pour chacun des concepts à évaluer.

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CHAPITRE 1

CONTEXTE THÉORIQUE

Au Québec, un programme d’éducation sexuelle est offert depuis plus de 15 ans aux adolescentes et aux adolescents fréquentant l’école secondaire dans le cadre du cours de Formation personnelle et sociale (FPS). Malgré cet enseignement, les taux de grossesses non planifiées demeurent élevés dans la région de Québec et les jeunes ne semblent pas s’approprier la matière transmise tel qu’attendu. Suite à ces constatations, une équipe intersectorielle regroupant plusieurs intervenants qui travaillent dans divers organismes du centre-ville de Québec s’est constituée pour élaborer un programme d’Éducation Sexuelle fondé sur le Pouvoir d’Agir et de Réfléchir de jeunes de 12 à 14 ans. Ainsi est né le programme ESPAR.

Les lignes qui suivent dressent un portrait global de certaines composantes jugées importantes pour l’implantation efficace d’un programme d’éducation sexuelle soit, les caractéristiques structuro-pédagogiques des écoles et les caractéristiques structuro- pédagogiques des classes. Celles-ci peuvent être d’ordre relationnel, d’ordre matériel ou d’ordre organisationnel. En outre, elles présentent certains processus psychosociaux qui favorisent !’appropriation des messages éducatifs, c’est-à-dire l’esprit critique ainsi que l’entraide chez les jeunes. Le programme ESPAR a comme objectif collectif de développer ces valeurs chez les adolescentes et les adolescents. Les chapitres suivants décrivent de façon plus détaillée chacun de ces concepts, ainsi que les raisons pour lesquelles les chercheuses les privilégient lors de l’évaluation.

1.1 FACTEURS SUSCEPTIBLES D’INFLUENCER L’EFFICACITÉ D’UN

PROGRAMME D’ÉDUCATION SEXUELLE

La vie sexuelle est une facette importante et essentielle du développement à l’adolescence (Cloutier, 1996). Néanmoins, sexualité adolescente ne rime pas toujours avec prévention des grossesses non planifiées et prévention des maladies transmissibles sexuellement (MTS) et du SIDA. Bien que depuis 1987 un volet d'éducation à la sexualité soit offert dans toutes les écoles secondaires québécoises dans le programme de FPS, les taux de grossesses non planifiées ainsi que les taux

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d'avortements ne cessent d'augmenter. Ainsi, le taux de grossesses adolescentes est passé dans la province, de 12,6 à 19,8 pour 1000 entre 1980 et 1997 (Rochon, 1999a). À cela s'ajoute une augmentation des taux d'avortements chez les adolescentes québécoises de moins de 18 ans, qui sont passés de 5,9 pour 1000 en 1980 à 13,2 pour 1000 en 1997, (Rochon, 1999b). Devant ce constat, certains expertes et experts se sont questionnés quant à l'efficacité du volet d'éducation à la sexualité du programme de FPS (Desaulniers, 1995) et plusieurs hypothèses ont été invoquées afin d'expliquer son efficacité mitigée. Une étude menée par Arcand, Venne et Tapia (1998) montre par exemple que peu d'enseignantes et d’enseignants accordent le temps nécessaire à l'enseignement du volet d'éducation à la sexualité étant donné l'ampleur du contenu de l'ensemble du programme de FPS. Pourtant, la littérature souligne l’importance que les enseignantes et enseignants consacrent le temps suggéré et requis pour le programme (Desaulniers, 1995). De plus, sur le plan pédagogique, le volet axé sur l’éducation à la sexualité, tel qu’il est généralement enseigné, n'incite pas les jeunes à avoir une participation active lors des cours. Ces stratégies participatives sont pourtant reconnues comme des facteurs de succès de divers programmes d’éducation sexuelle (Johnson & Johnson, 1977; Slavin & Cooper, 1999). Enfin, la moitié des enseignantes et des enseignants consultés lors de cette étude rapportent n'avoir reçu aucune formation avant l'implantation du programme d'éducation sexuelle et aucun soutien suite à son implantation.

La littérature au sujet de l'éducation et de la prévention en matière de sexualité rapporte que d’autres caractéristiques sont déterminantes dans l'efficacité d’un programme éducatif. Avant tout, les thèmes abordés doivent tenir compte des préoccupations fondamentales des jeunes. En outre, il est suggéré d’intervenir tôt à l’adolescence avant que les conduites sexuelles soient bien établies chez les jeunes (Dryfoos, 1998). Il est également recommandé que l’enseignement couvre autant les éléments affectifs que cognitifs, reliés à la sexualité. À cet égard, une étude menée par des chercheuses de notre équipe montre que les adolescentes et les adolescents trouvent que !’information qu’ils reçoivent par le biais du cours FPS est souvent très technique et qu’elle tient peu compte de leurs préoccupations fondamentales (Boucher, 1999; Dufort, Guilbert, & Saint-Laurent, 2000). D’autres auteurs tels que Franklin et ses collaborateurs (1997) ainsi que Kirby (1999), précisent également que les programmes d'éducation sexuelle doivent être fondés sur une théorie et qu’ils doivent comprendre des sujets multiples

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(prévention des MTS-SIDA, mythes et croyances erronées face à la sexualité, etc.)· Ils doivent viser autant les adolescentes que les adolescents et ils doivent être adaptés à leur développement, à leur expérience et à leur culture. De plus, ils indiquent qu’il est important de favoriser le développement des habiletés sociales des jeunes (e.g., communication, affirmation de soi), tout en mettant l'accent sur les affects afin qu’ils se sentent impliqués et qu’ils s’approprient le contenu du cours. Les expertes et experts en éducation sexuelle tel que Kirby souligne l’importance de concevoir des programmes qui vont au-delà des changements de comportements individuels soulignant que les jeunes sont largement influencés par les milieux dans lesquels ils évoluent, que ce soit à cause de la pression des pairs, de celle de la famille et de celle des médias. Finalement, les méthodes d'enseignement doivent encourager les échanges et l'entraide afin de favoriser la participation active des élèves et l’intégration des messages transmis.

1.2 L’IMPORTANCE DE VISER DES CHANGEMENTS COLLECTIFS

Les études portant sur les programmes de prévention s'adressant aux jeunes démontrent qu'il est important de créer un soutien environnemental et un climat social qui privilégie l'apparition d’une culture commune qui, par exemple, remet en question certains stéréotypes et certaines façons de faire (Levine, 1998). Moos (1974) notamment, mentionne que l'individu est en constante interaction avec son environnement et que le climat social l’influence quant à sa façon de penser et de se comporter. Dans cet esprit, Levine (1998) identifie différents éléments qui permettent de mettre en valeur la composante environnementale d'un programme de prévention auprès des jeunes en milieu scolaire. Il mentionne l’importance du soutien à accorder aux enseignantes et enseignants promoteurs du programme. Ce soutien doit être présent sous différentes formes, par exemple, tant sur le plan matériel, par la présence de matériel didactique, que sur le plan relationnel, par l’appui et le support de la direction et des collègues. De plus, il est d’avis que tous les jeunes d'une même cohorte doivent profiter du programme de prévention afin qu'il se crée une véritable culture commune entre ceux-ci, un climat qui favorise notamment le développement de leur esprit critique et le développement de l'entraide dans l'adoption de nouveaux comportements préventifs. De fait, selon Trickett (1991), pour arriver à créer un climat social qui reflète les besoins des élèves, ainsi que ceux des enseignantes et des enseignants d'une école, chacun doit participer activement au projet éducatif. L'objectif commun doit être

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orienté vers un changement par la praxis, c’est-à-dire par l'action et la réflexion de tous les individus évoluant dans cet environnement (Freire, 1974,1998). Il s’agit de mettre l’accent sur le pouvoir d'agir et de réfléchir (empowerment) des individus, ou comme le souligne Breton (1989), il faut donner la possibilité aux personnes de devenir des agents actifs de leur propre destinée.

Somme toute, les recherches évaluatives, qu’elles soient québécoises ou étrangères, qu’elles portent sur les programmes d’éducation sexuelle ou sur les programmes de prévention en matière de sexualité, doivent considérer les mêmes éléments. Les instigatrices et instigateurs de nouveaux programmes, pour qu’ils soient plus efficaces que ceux ayant antérieurement fait l’objet d’évaluation doivent se préoccuper du contenu du programme, des stratégies pédagogiques et s’assurer de la collaboration des enseignantes et des enseignants. Sur le plan du contenu, le programme gagne à s’appuyer sur une théorie, à aborder divers thèmes reliés aux préoccupations des jeunes, à toucher aux dimensions affectives et sociales aussi bien que cognitives de la sexualité. Sur le plan pédagogique, il est suggéré d’intervenir tôt dans le cursus scolaire tout en se préoccupant d’offrir un programme adapté au développement des élèves. Il est également suggéré de concevoir des programmes qui intéressent aussi bien les filles que les garçons, qui tablent sur la participation active des élèves et sur le renforcement de l’entraide. À cet égard, deux pédagogies méritent d’être soulignées soit I 'empowering

education, qui a en plus l’avantage de favoriser les changements collectifs à travers la

réflexion et la praxis, et !’apprentissage coopératif qui valorise l’entraide entre les élèves. Les recherches portant sur l’éducation sexuelle en milieu scolaire font également ressortir l’importance de s’assurer de la collaboration des enseignantes et des enseignants qui auront à diffuser le programme suite à son élaboration de celui-ci, afin qu’il respecte les caractéristiques des différents milieux. Il ressort également que l’implantation d’un programme d’éducation sexuelle en milieu scolaire s’avère une étape cruciale pour sa réussite. L’évaluation de l’implantation permet d’offrir une rétroaction aux enseignantes et enseignants, de même qu’elle permet à ceux-ci de suggérer des améliorations au programme. Finalement, la littérature scientifique sur la prévention fait ressortir l’importance de viser non seulement des changements individuels, mais des changements collectifs, les attitudes et comportements des jeunes étant tributaires des pressions du milieu.

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1.3 LE PROGRAMME ESPAR ET SON ÉVALUATION

Suite à ces constatations, une équipe dirigée par mesdames Francine Dufort et Edith Guilbert, en consultation avec un comité intersectoriel de Québec et en collaboration avec une sexologue, a conçu un programme d'éducation sexuelle en milieu scolaire s'adressant aux jeunes de première et deuxième secondaires. Le programme d'Éducation Sexuelle fondé sur le Pouvoir d'Agir et de Réfléchir (ESPAR) sera offert dès l'hiver 2002 dans quatre écoles de Québec-Centre. Les chercheuses ont ciblé cette région car en 19941, les taux de grossesse et d’avortement chez les adolescentes de 15-19 ans étaient de 74,4 et 48,4 pour 1000, tandis qu’ils étaient respectivement de 30,4 et 19,7 pour 1000 pour toute la région de Québec. Ce nouveau programme a pour but de favoriser le pouvoir d'agir et de réfléchir des jeunes afin de promouvoir leur bien-être personnel et collectif en matière de sexualité. L’éducation fondée sur le pouvoir d’agir

(empowering education) s’est révélée efficace en ce qui a trait à la prévention et

l’éducation à la santé auprès d’adolescentes et d’adolescents issus de milieux défavorisés (Wallerstein & Sanchez-Merki, 1994) ainsi que sur les comportements et les attitudes reliés à la sexualité d’autochtones d’une réserve américaine ayant participé à un programme d’éducation sexuelle basé sur le modèle d’empowement de Freire (Goodman, 1998).

Sur le plan individuel, le programme ESPAR vise à amener les jeunes à faire !’acquisition de connaissances et d’habiletés. De plus, il vise le changement d’attitude et la reconnaissance des affects reliés au développement sexuel à l’adolescence. Ensuite, il tente de favoriser le développement de la réflexion critique en matière de sexualité ainsi que le développement d’habiletés individuelles. Finalement, il vise la participation personnelle des jeunes à des projets de classe.

Sur le plan collectif, ESPAR poursuit différents objectifs. Tout d’abord, il cherche à développer une culture commune chez les adolescentes et les adolescents en ce qui a trait à la sexualité. Cette culture peut s’illustrer chez les jeunes par l’apparition de valeurs et de croyances collectives qui remettent en question certains stéréotypes sexuels qui prévalent dans leur entourage. Le programme vise aussi le développement

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de l'esprit critique des jeunes, particulièrement au sujet de certains préjugés et mythes en matière de sexualité. En outre, il a pour but le développement de l'entraide chez les jeunes qui peut s'illustrer par le respect, le souci d'autrui et la reconnaissance de l'importance des autres dans leur vie. Enfin, il favorise la participation active des élèves à travers la réalisation d’un projet collectif. Essentiellement, ESPAR a comme objectifs collectifs de :

> Favoriser le développement de l’esprit critique en matière de sexualité. > Développer l’entraide et le soutien entre les adolescentes et les

adolescents, en apportant une attention particulière au respect des différences culturelles.

> Encourager les jeunes à se mobiliser et à passer à l’action commune.

Pour ce faire, ESPAR s'inspire de deux modèles théoriques auxquels sont rattachées des stratégies pédagogiques particulières; ces modèles sont I’empowering education et !’apprentissage coopératif. Le modèle de Yempowering education, élaboré par Shor (1992), à la lumière des écrits de Paulo Freire (1974), encourage une pédagogie orientée autant vers les individus que vers le changement social. Le but est de donner aux élèves le pouvoir de changer les choses importantes pour eux. Ce type d’enseignement favorise la participation active des élèves afin que les cours reflètent leurs conditions culturelles et sociales d’existence. Il porte son attention sur un enseignement démocratique où les élèves ont un rôle dynamique à jouer. Le second modèle théorique est celui de !'apprentissage coopératif (Slavin & Cooper, 1999); il met l'accent sur le travail d'équipe, sur la coopération ainsi que sur la réalisation de tâches et d’objectifs communs à tous les élèves. L’apprentissage coopératif évite d’encourager la compétition entre les élèves lors des différents projets éducatifs, ce modèle favorise plutôt !’utilisation des forces individuelles de chacun des membres du groupe pour arriver aux résultats pédagogiques souhaités (Johnson & Johnson, 1978). Ce modèle éducatif facilite l’émergence de liens sociaux et affectifs entre les adolescentes et les adolescents ainsi qu’un sentiment de solidarité dans le groupe.

1 Les statistiques plus récentes par territoire ne sont pas encore disponibles étant donné la complexité à les compiler, néanmoins les intervenantes de Québec-Centre, notamment celles pratiquant dans les cliniques de planification des naissances, sont d’avis qu’il n’y a pas d’amélioration notable de la situation.

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Le programme ESPAR sera évalué dès l’hiver 2002. L’évaluation portera d’abord sur le processus d’implantation, de même que sur l’atteinte des objectifs collectifs. L’évaluation sera effectuée à l’aide d’études de cas en retenant le groupe-classe comme unité d’analyse. À l’instar de Yin (1994), l’équipe de recherche soutient que l’étude de cas permet d’évaluer et de valider l’atteinte des objectifs. Ainsi, comme le suggère Levine (1998), les chercheuses veulent considérer les caractéristiques environnementales de l’école et des classes qui peuvent influencer l’implantation du programme. Parallèlement, sur le plan collectif, ESPAR veut encourager le développement de l’esprit critique et de l’entraide chez les adolescentes et adolescents en ce qui concerne leur sexualité. La mobilisation et la réalisation d’actions communes, de même que l’atteinte des objectifs individuels feront l’objet d’évaluations ultérieures.

Comme le recommande la littérature sur l'évaluation (Slavin, 1992; Stage & Russel, 1992; Posavac, E.J. & Carey, R.G., 1997), l’équipe de recherche privilégie plusieurs méthodes de collecte de données et diverses sources d’information afin de vérifier la convergence des faits. Dans cette étude, la triangulation méthodologique se fonde entre autres sur la consultation de documents statistiques; sur des entrevues semi-structurées avec les élèves, les enseignantes et enseignants, les directrices et directeurs d’école; sur !'administration de questionnaires sur la conscience critique (LeBossé & Dufort, 2000) et sur le climat de la classe (Moos & Trickett 1974); et, finalement, sur !'utilisation de grilles d'observation structurées. Cohen et Manion (1985) considèrent la triangulation méthodologique particulièrement appropriée à l’étude de cas car cette dernière fournit une vision plus globale d’un effet éducationnel et elle permet d’élucider des phénomènes complexes rencontrés. La présente démarche de recherche porte sur l’élaboration de grilles d’observation.

1.4 INTRODUCTION AUX CONCEPTS ÉVALUÉS À L’AIDE DES GRILLES D’OBSERVATION

En ce qui concerne la partie de l’évaluation qui est effectuée à l’aide des grilles d’observation, l’équipe de chercheuses décide de s’attarder à quatre concepts, deux étant associés à l’implantation du programme et deux autres étant reliés aux objectifs collectifs du programme. D’abord, comme le démontrent des travaux s’intéressant au milieu scolaire (Moos, & Trickett, 1974, 1987; Trickett, 1991), certaines caractéristiques

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des écoles et des classes sont susceptibles d’avoir une influence marquée sur l’implantation d’un programme. Ces caractéristiques peuvent être de nature relationnelle, matérielle ou organisationnelle. Pour les fins de cette étude, elles sont qualifiées de caractéristiques «structuro-pédagogiques» et elles sont représentées par exemple par, le style de gestion de l’école ou de la classe, les relations entre les enseignantes et enseignants et la direction, les relations entre les enseignantes et enseignants et les élèves, !’environnement physique de l’école et de la classe. L’équipe souhaite élaborer une grille d’observation pour évaluer les caractéristiques structuro-pédagogiques des écoles et une autre pour évaluer les caractéristiques structuro-pédagogiques des classes où se déroulent le cours d’éducation sexuelle. En effet, la classe est un micro- milieu dans une école. L’atmosphère, l’ambiance et les relations entre les jeunes peuvent varier grandement d’une classe à l’autre; c’est pourquoi l’équipe juge important d’observer différentes classes et ce, à divers moments au cours de l’année scolaire. Il est intéressant d’observer l’enseignement ainsi que les jeunes à différentes périodes car, avec !’évolution du programme d’éducation sexuelle, les comportements et les interventions des personnes sont susceptibles de se modifier.

Une troisième grille d’observation structurée est élaborée afin de vérifier le développement de l’esprit critique chez les adolescentes et les adolescents. Comme mentionné précédemment, le programme d’éducation sexuelle vise à accroître l’esprit critique des jeunes en matière de sexualité et par le fait même à augmenter leur pouvoir d’agir et de réfléchir. Voici des exemples d’habiletés qui se présentent chez un jeune qui fait preuve d’esprit critique, d’après DeVito (1993) : il peut s’analyser lui-même et analyser le comportement des autres par rapport à leurs conduites sexuelles; il ne tire pas de conclusions sans avoir recueilli suffisamment d’information; il fait des liens entre la matière enseignée et la vie de tous les jours; il peut modifier ses comportements et sa manière de penser. Le développement de l’esprit critique devrait amener les groupes d’élèves à prendre conscience des conditions sociales qui influencent leurs comportements notamment en matière de sexualité. De cette façon, les jeunes ont plus de pouvoir ou d’emprise sur leur vie et sur les décisions importantes qui les concernent. Ainsi, comme le mentionne Freire (1974, 1998) et Breton (1989), le pouvoir d’agir et de réfléchir permet aux personnes de devenir agents de leur propre destinée et les actions de groupe contribuent à augmenter leurs habiletés à modifier des comportements à risque dans leur vie.

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Finalement, une quatrième grille d’observation est élaborée afin d’évaluer la présence d’entraide chez les jeunes prenant part au programme. L’équipe de recherche espère encourager le développement d’un bon climat social dans la classe ainsi que le développement d’un soutien entre les élèves. Ces éléments favorisent le changement de certaines normes sociales présentes chez les jeunes. La présence d’un climat de soutien et d’entraide dans une classe permet aux adolescentes et adolescents de savoir qu’ils peuvent compter sur leur entourage pour affronter les problèmes de leur existence. De plus, lorsqu’il y a de l’entraide dans un groupe de personnes, cela permet de rompre avec les conceptions stigmatisantes et individualisantes des problèmes (Lavoie, 2001). À la base, les concepts de soutien et d’entraide mettent l’accent sur les forces de chacun afin d’en arriver à une vision du groupe plus résistante et plus puissante.

À la lumière de cette introduction, les paragraphes suivants présentent une description plus détaillée de chacun des concepts susceptibles d’être évalués à l’aide de grilles d’observation. Tout d’abord, un exposé se référant aux caractéristiques structuro- pédagogiques des écoles et des classes est présenté. Par la suite, la notion d’esprit critique est abordée. Enfin, les différentes facettes du soutien et de l’entraide sont explorées.

1.4.1 Distinctions entre les études portant sur les écoles et celles portant sur les classes

Malgré le fait que l’on rencontre plusieurs similitudes entre !’environnement de l’école et celui de la classe, il existe quelques distinctions qui méritent d’être soulignées. Traditionnellement, les recherches qui étudient !’environnement de l’école mettent davantage l’accent sur les théories organisationnelles des écoles et les méthodologies qu’elles utilisent pour faire fonctionner adéquatement leur milieu (Anderson, 1982). Cela peut être expliqué en partie par le fait que deux des instruments les plus utilisés, soit !’Organizational Climate Description Questionnaire de Halpin et Croft (1963) et le College Characteristic Index de Stern (1970), prennent leur origine de travaux faits sur le climat organisationnel de grandes entreprises. L’école est donc, dans ces cas-ci, analysée comme une organisation formelle. En ce qui concerne les études portant sur la dynamique ou le climat des classes, elles analysent principalement des variables d’ordre

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psychosocial (Anderson, 1982). En ce sens, des aspects davantage microscopiques peuvent être considérés et analysés comme l’attitude ou le comportement d’un élève en particulier dans le groupe classe ou encore la fréquence d’apparition ou l’intensité de comportement présent chez les jeunes. Une autre distinction que l’on note est le fait que la majorité des études qui analysent l’école se sont concentrées sur les institutions d’études supérieures, tandis que les études qui portent sur les classes génèrent plus souvent des données sur les niveaux scolaires primaires et secondaires.

Considérant ce type de raisons, l’équipe de recherche choisit de diviser les grilles d’observation structurées qui analysent les caractéristiques structuro-pédagogiques en deux : une pour les caractéristiques structuro-pédagogiques de l’école et l’autre pour celles de la classe. De plus, il est intéressant de signaler que la littérature à ce sujet n’est guère étoffée, ce qui motive encore davantage les chercheuses à s’attarder à ces concepts. Il sera enrichissant d’observer jusqu’à quel point des caractéristiques d’ordre relationnel, matériel et organisationnel peuvent influencer l’implantation d’un programme d’éducation sexuelle dans une école.

Les sections qui suivent résument ce que l’on retrouve dans la littérature scientifique en ce qui a trait aux dimensions environnementales des écoles et des classes retenues et ce qu’elles peuvent influencer lors de l’implantation d’un programme dans une école.

1.4.1.1 Caractéristiques structuro-pédagogiques de l’école

Selon Trickett (1991), différentes caractéristiques structuro-pédagogiques des écoles jouent un rôle central lors de l’implantation d’un programme de prévention en milieu scolaire. Ces indicateurs peuvent être d’ordre relationnel, matériel ou organisationnel. Par exemple, cela peut impliquer autant le style de gestion de l’école que la présence de vandalisme et de taxage.

En recensant les programmes de prévention qui s’adressent aux jeunes, Levine (1998) a relevé des composantes environnementales qui favorisent leur efficacité. Le climat de l’école joue un rôle prépondérant sur ce plan. Howard, Howell et Brainard, (1987) ont effectué plusieurs recherches sur le climat social de l’école. Ils identifient différents facteurs importants à considérer lorsque l’on s’attarde au climat d’une école. Entre ____________________________________________________________________________________ 12

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autres, Howard et ses collaborateurs font référence au respect, à la confiance et à la cohésion qui régnent entre les différentes personnes présentes dans l’école. Ils mentionnent également le sens moral et de la discipline qui règne à l’école et la présence du souci de l’autre. Le succès de l’implantation d’un programme est fortement relié à un contexte social soutenant. De fait, une école où règne un climat social positif est une école où la productivité et la satisfaction des gens sont présentes. Par ailleurs, l’école est vue comme un endroit où les personnes qui y travaillent (direction, personnel, élèves) vivent un sentiment d’appartenance, se sentent concernées par ce qui leur arrive et ce qui arrive à leur entourage. À ce titre, Fisher et Fraser (1983) ont démontré que le niveau de satisfaction au travail des enseignantes et enseignants influence !’environnement scolaire et par le fait même, l’attitude et les résultats des jeunes. Un contexte soutenant dans l’école favorise l’émergence d’une culture commune entre les jeunes et les différentes intervenantes et intervenants œuvrant dans l’école. Voici des exemples des facteurs relevés dans la littérature comme favorisant le développement d’un bon climat social dans une école (Howard et al.,1987; Moos & Trickett, 1987) :

• Un respect mutuel des idées et des compétences qui prévaut entre les différentes actrices et acteurs de l’école;

• Un esprit de confiance, un sentiment de pouvoir compter et s’appuyer sur les autres en cas de besoin;

• Un sentiment d’appartenance à l’école présent chez la majorité des personnes impliquées dans l’école;

• La capacité d’identifier et de travailler pour régler les conflits qui se présentent dans l’école;

• L’accessibilité à des ressources matérielles et didactiques pour les intervenants de l’école.

Comme il est possible de le constater par ces exemples, différentes actrices et acteurs doivent être impliqués activement dans l’école afin que se développe un bon climat social. Une étude de Howard (1985) démontre que la présence d’un climat positif dans une école de la Californie a fait augmenter la performance académique des élèves et a fait chuter le vandalisme et le taux d’absentéisme des élèves. Pour qu’un tel changement se produise et persiste, il faut qu’il y ait des changements dans les normes sociales des élèves ainsi que des enseignantes et enseignants. En d’autres termes, il ____________________________________________________________________________________ 13

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n’est pas suffisant de développer différents outils de prévention qui semblent efficaces, il faut que les personnes se sentent concernées et qu’elles soient prêtes à modifier certaines de leurs façons de penser et d’agir (Levine, 1998). De plus, il doit y avoir consensus entre les différentes intervenantes et intervenants qui sont reliés de près ou de loin au programme, sinon les objectifs de prévention risquent de ne pas être atteints ou du moins, de ne pas demeurer à long terme (Elias, Gara, Schuyler, Branden-Muller, & Sayette, 1991).

Ainsi, il semble logique de croire que les caractéristiques structuro-pédagogiques mentionnées ci-haut, peuvent favoriser la mise en place de nouveaux programmes d’éducation dans une école. En effet, une école qui préconise des valeurs telles que le respect, la confiance et l’innovation pédagogique est davantage susceptible d’obtenir des résultats positifs suite à l’implantation de nouveaux projets scolaires (Howard et al.,1987). D’autre part, comme le mentionne Levine (1998), une école qui introduit un nouveau programme de prévention doit supporter ses enseignantes et enseignants et ce, tant sur le plan de leur formation que sur le plan de la disponibilité du matériel pédagogique nécessaire à l’atteinte des objectifs du programme. Le soutien doit être présent dès le début de l’implantation et demeurer tout au long du programme. L’environnement physique de l’école doit également refléter les valeurs éducatives privilégiées dans le milieu, ainsi que celles préconisées parmi les jeunes. L’école doit être un lieu où il fait bon vivre et où la direction, le personnel et les élèves sentent qu’ils ont leur place et qu’ils ont un rôle actif à jouer (Howard et al.,1987).

En bref, les caractéristiques personnelles et relationnelles des gens impliqués d’une façon ou d’une autre dans l’école sont susceptibles d’influencer l’implantation d’un nouveau programme. Par ailleurs, des caractéristiques d’ordre matériel et structurel peuvent également jouer un rôle à cet égard. Howard et ses collaborateurs. (1987) mentionnent quelques-unes de ces caractéristiques : une facilité d’accès à différents locaux (bibliothèque, auditorium, etc.); un décor et des couleurs attrayantes dans l’école; des lieux propres et bien entretenus. Un environnement propre et intéressant sur le plan esthétique encourage le développement du sentiment de fierté face à l’école ainsi qu’un respect de celle-ci. Finalement, des caractéristiques d’ordre organisationnel sont également à considérer lors de l’implantation d’un programme. Par exemple, le style de gestion de l’école (démocratique versus autocratique), l’ouverture des enseignantes et

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enseignants face à l’innovation, l’ouverture des membres du conseil d’établissement face aux nouveaux projets éducatifs sont toutes des caractéristiques susceptibles d’influencer l’arrivée d’un nouveau programme dans une école. Il est donc important de considérer tous les types de caractéristiques structuro-pédagogiques impliqués de l’école (relationnelles, matérielles et organisationnelles) car elles peuvent toutes influer sur !’organisation de l’école.

La section suivante relève les caractéristiques structuro-pédagogiques des classes relevées dans la littérature sur l’évaluation de programmes scolaires.

1.4.1.2 Caractéristiques structuro-pédagogiques de la classe

Dans une école, le climat varie grandement d’une classe à l’autre en fonction des différentes caractéristiques présentes dans chacune d’elles. La qualité de la relation entre l’enseignante, l’enseignant et ses élèves, les caractéristiques des élèves de la classe, le style de gestion préconisé par l’enseignante et l’enseignant sont des exemples de caractéristiques structuro-pédagogiques qui influencent la dynamique de la classe (Moos & Trickett, 1987). De plus, l’atmosphère et les relations entre les élèves varient également d’une classe à l’autre et d’une journée à l’autre. Dans cet ordre d’idées, l’accueil d’un nouveau programme d’éducation sexuelle dans une classe peut être variable étant donné la dynamique présente entre les jeunes du groupe. Lors de l’implantation d’un nouveau programme d’éducation, les enseignantes et enseignants et les jeunes de la classe jouent un rôle primordial dans le succès et la réussite de celui-ci. Cependant, tout comme pour l’école, certaines caractéristiques d’ordre matériel et organisationnel ont également de l’influence (Trickett, 1991). En fait, la localisation du programme dans la grille horaire, la disposition des pupitres dans la classe et le nombre d’élèves présents sont des caractéristiques matérielles et organisationnelles qui peuvent favoriser ou nuire à l’implantation d’un programme éducatif (Moos & Trickett, 1987; Trickett, 1991). Ainsi, comme pour l’école, des caractéristiques structuro-pédagogiques de la classe d’ordre relationnel, matériel et organisationnel sont à considérer par les instigatrices et les instigateurs d’un nouveau programme pour en favoriser son arrivée. _____________________________________________________________________________________ 15

Les processus de conscientisation et de mobilisation impliquant les notions d’esprit critique et d’entraide, sont abordés dans les paragraphes suivants. Différentes visions

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sont suggérées puisque ces concepts peuvent être observés selon différentes perspectives.

1.4.2 Notions d’esprit critique et d’entraide

Le programme ESPAR s’inspire des travaux de Freire (1974, 1998) et de Breton (1989) menés auprès de groupes sociaux se trouvant dans des conditions de vie difficiles. Ces auteurs fondent leur démarche sur les processus de conscientisation et de mobilisation afin que les groupes défavorisés deviennent des agents de leur destinée et que par des actions collectives concrètes, des changements positifs puissent être effectués. Pour que cette mobilisation se produise, le groupe d’individus doit développer un esprit critique face à ce qui se passe autour de lui et les gens doivent s’entraider pour arriver à des changements. Les chercheuses responsables de l’évaluation du programme ESPAR veulent mesurer si le programme favorise le développement de l’esprit critique et de l’entraide chez les jeunes de divers groupes-classes.

1.4.2.1 Notion d’esprit critique

La littérature scientifique qui porte sur la notion d’esprit critique implique rarement la composante collective identifiée par Freire et ses successeurs. Comme le souligne Norris (1989), l’esprit critique fait souvent référence à une expérience individuelle, à un processus de la pensée personnelle qui se développe à travers différents contextes et qui se manifeste dans différentes situations. Voici un exemple pour illustrer la notion d’esprit critique d’un point de vue individuel comparativement à une vision collective. Dans un environnement scolaire, un élève, de façon individuelle, peut faire preuve d’esprit critique en remettant en question ce qui lui est enseigné pour s’assurer de la source de !’information ou du contenu de celle-ci. Cette habileté démontre que l’élève s’approprie de plus en plus la matière qui lui est transmise et qu’il a besoin de sources sûres pour juger de la crédibilité de !’information. Dans cette démarche, ni l’enseignante, l’enseignant, ni le groupe-classe n’est impliqué activement dans le processus de réflexion. Du point de vue de Freire, qui a une vision collective de l’esprit critique, pour que se développe l’esprit critique (conscientisation), il doit y avoir un dialogue entre l’enseignante, l’enseignant et l’élève, et entre ce dernier et ses partenaires de classe. Les élèves doivent prendre alors collectivement conscience des forces et des lacunes ____________________________________________________________________________________ 16

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de l’information transmises et passer à l’action selon ce qu’ils croient être positif pour leur vie.

Définir le terme d’esprit critique est une tâche que tentent de réaliser divers chercheurs et chercheuses ainsi qu’intervenantes et intervenants, en fonction de leur champ d’intérêt. Par exemple, dans la perspective du pouvoir d’agir, l’esprit critique se rapproche du processus de conscientisation de Paulo Freire (1974, 1998). Comme souligné plus haut, ce praticien de l’éducation populaire conçoit l’éducation comme une pratique démocratique de la liberté qui se base sur des méthodes pédagogiques actives où le dialogue, la critique et la formation du jugement des individus sont prioritaires. Certains auteurs tel que Desbiens (1999), adoptent plutôt une perspective philosophique; pour eux l’esprit critique renvoie à un examen d’un principe ou d’un fait, en vue de porter à son sujet un jugement d’appréciation. En ce sens, l’esprit critique est vu comme le fait de n’accepter aucune assertion sans en avoir d’abord questionné la valeur tant au plan de son contenu que de son origine

Ainsi, pour Freire et ses successeurs, dont Shor (1992), le processus de conscientisation consiste à ce que les personnes développent collectivement leur esprit critique; qu’elles prennent conscience des caractéristiques individuelles (ex. sentiment d’impuissance) et sociales (ex. accès limité à certains services), qui ont une influence cruciale sur leurs comportements ou sur leur hygiène de vie. Le processus de conscientisation consiste également à croire à la possibilité d’actions collectives pouvant mener à des changements sociaux dans le sens d’un meilleur accès à des ressources. Ces ressources peuvent aussi bien être d’ordre psychoaffectif, comme par exemple l’affirmation de soi et la confiance en soi, que d’ordre matériel, comme l’accès à des services de santé adéquats, par exemple. Par ailleurs, le processus de conscientisation ne peut aboutir à la mobilisation et l’action collective que si l’entraide entre les individus existe (Rappaport, 1977, 1981). Donc pour Freire (1974,1998), la conscientisation dans la perspective de « l’éducation pédagogique » est considérée comme une appropriation du pouvoir éducatif par les élèves en fonction de leurs besoins et de ce qu’ils vivent dans leur quotidien. Il insiste sur le fait qu’aucun apprentissage authentique et persistant ne peut se faire tant que les personnes ne sont pas engagées activement dans leur processus éducatif (Aronowitz, 1993). Cette démarche se réalise en trois grandes étapes. D’abord, il doit y avoir un processus de réflexion entre les jeunes au sujet de

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leur quotidien, des ressources et des lacunes qui se présentent à eux. En faisant une prise de conscience collective des problèmes de la société, les jeunes s’approprient d’une certaine façon leur éducation; ils développent leur esprit critique, ils deviennent des sujets actifs dans leur vie plutôt que des agents passifs. Cette réflexion de groupe se fait entre autres grâce à un dialogue critique entre les personnes, deuxième étape de la démarche. Freire discute du dialogue comme d’une relation sympathique entre les élèves et les enseignantes, enseignants dans un climat de confiance et de non- jugement. Considérant que la réflexion sans action n’apporte pas de changement et d’évolution, Freire propose l’action collective comme troisième étape. Les jeunes doivent effectuer une intervention sociale qui va dans le sens des valeurs qu’ils ont intériorisées et de la vision plus admirative et positive de leur culture dont ils ont préalablement discutée. Cette démarche collective permet aux individus de reprendre plus de contrôle sur leur vie et de devenir des agents de leur destin (Breton, 1989). Ainsi, la conscientisation et l’esprit critique pour Freire impliquent forcément une mobilisation de groupe.

En suivant la méthode de Freire, Shor (1992) a également élaboré une méthode pédagogique sociale qui implique activement les jeunes et qui leur permet de développer leur esprit critique, !-’empowering education donne le pouvoir aux jeunes de changer ce qui ne leur convient pas dans la société grâce à des actions coopératives et sociales. Cette pédagogie critique incite les personnes à participer activement à différents groupes ou organismes afin de pouvoir prendre la parole et de se faire entendre (Breton, 1993). Cette éducation orientée vers la conscientisation se fait tant sur le plan cognitif que sur le plan affectif. L’entraide entre les jeunes est valorisée et la participation active de chacun des élèves est favorisée.

Norris et Ennis (1989) s’intéressent également au développement de l’esprit critique. Ils nomment la notion de «pensée critique» et la décrivent en ces termes: « La pensée critique se définit comme toutes pensées raisonnables et réfléchies qui mettent l’accent sur quoi croire et sur quoi ne pas croire, dans le discours des gens qui nous entourent» (Norris & Ennis, 1989, p.45). Cela peut s’exprimer par la recherche et !’utilisation de raisons ou d’arguments valables et acceptables pour en arriver à tirer des conclusions logiques face à nos croyances et à nos actions. Cette pensée est dirigée consciemment vers un but et une action, donc elle est consciente et réfléchie. D’après ces deux mêmes

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auteurs, plusieurs éducatrices et éducateurs considèrent l’esprit critique sous le double aspect de la croyance et de l’action. Ainsi, selon Ennis (1985), l’esprit critique implique à la fois des capacités et des attitudes de la part des personnes. Cette définition décrit une personne qui reçoit une éducation critique comme étant autonome face aux décisions importantes de sa vie et comme étant respectueuse des autres et des différentes situations que la vie leur offre.

Finalement, Boisvert (1997, 1999), enseignant en psychologie, poursuit des recherches sur la formation de l’esprit critique chez des jeunes en milieu scolaire. Cet auteur s’inspire de différents chercheurs pour établir une définition de l’esprit critique (Romano, 1992; Kurfiss, 1988; Zechmeister & Johnson, 1992). D’abord, il fait référence à l’esprit critique comme étant une stratégie de pensée. De cette façon, la pensée critique est vue comme une des stratégies de pensée qui fait appel à plusieurs opérations cognitives coordonnées (Romano, 1992): solution de problèmes, prise de décision, pensée

critique, pensée créatrice, etc. Ensuite, il fait référence à Kurfiss (1988) qui définit la

pensée critique comme une investigation de la pensée ayant comme objectif d’explorer une situation ou un problème afin d’en arriver à une hypothèse ou à une conclusion justifiée qui intègre toute !’information qui est disponible à la personne. Finalement, l’esprit critique est présenté comme un processus dynamique qui implique nécessairement une activité (Zechmeister & Johnson, 1992; Brookfield, 1987). Ainsi, ces auteurs font référence à un processus actif qui est enclenché par un événement perturbateur pour la pensée. L’esprit critique permet de concevoir différentes perspectives pour faire disparaître l’inconfort ou la dissonance cognitive. Ce processus peut s’illustrer par un exemple en rapport avec l’éducation sexuelle. Si, lors d’un cours d’éducation sexuelle, un enseignant fait référence à des méthodes contraceptives qui vont à l’encontre des valeurs de certains jeunes (ex. abstinence), ces jeunes ressentent alors une dissonance. S’ils font preuve d’esprit critique, les jeunes s’informent des différents arguments évoqués par l’enseignant. Ils en discutent entre eux, ils sous- pèsent les options et choisissent selon leur analyse ce qui leur convient tout en respectant le point de vue de l’enseignant. La dissonance peut se résoudre s’ils respectent le point de vue de l’autre, même si celui-ci va à l’encontre de leurs valeurs et de leurs pratiques. Le processus actif et dynamique est ici observé dans la recherche et l’évaluation des éléments évoqués par l’enseignant. Boisvert considère d<

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Cet auteur suggère également différents modes d’évaluation de la pensée critique dans un contexte éducationnel, notamment !’observation des élèves. Dans cet ordre d’idées, il définit !’observation systématique comme un outil permettant de saisir la globalité d’une situation en ayant comme objectif de poser un jugement prudent et circonstancié de la situation. Il est donc très important, selon Boisvert, de bien désigner ce que l’on désire observer et évaluer. Un exemple de grille d’observation et d’évaluation suggéré par cet auteur est présenté à l’annexe A. Il organise ses grilles en détaillant chacune des capacités reliée à l’esprit critique, d’après des énoncés opérationnalisables qui s’y rattache. Par exemple, pour la capacité : Présenter une position par une argumentation orale ou écrite, les énoncés observables qui s’y rattachent peuvent être : tenir compte d’un auditoire particulier, énoncer le point principal, considérer les alternatives, etc. De plus, chacun de ces énoncés peut être qualifié d’«adéquat» ou «à améliorer» et «suscité» ou «spontané», selon le cas. Il est intéressant de prendre en considération ses recommandations car il travaille depuis longtemps sur le développement et l’évaluation de l’esprit critique des jeunes en milieu scolaire. Il prétend que cette forme de pensée est importante à développer puisqu’elle permet aux jeunes de faire des choix personnels et éclairés pour leur vie. C’est notamment pour cette raison que l’équipe de recherche s’inspirera des grilles d’évaluation et d’observation de Boisvert (1999) pour élaborer les grilles d’observation structurées utilisées dans l’évaluation du programme d’éducation sexuelle ESPAR.

En conclusion, la notion d’esprit critique doit comprendre plusieurs éléments fondamentaux pour en arriver à un développement optimum chez un groupe de personnes. Il est possible de réunir la pensée de plusieurs auteurs sous trois conditions nécessaires à l’apparition de la pensée critique. D’abord, il doit y avoir la présence de la

réflexion du groupe de personnes par rapport à l’enseignement reçu. De plus, les

auteurs parlent de capacité, d’attitudes et d’habiletés à développer chez les personnes. Également, l’esprit critique est vu comme une stratégie de pensée qui amène les personnes à passer à un processus actif dans leur vie afin d’arriver à un changement et à une évolution de leur condition. En conclusion, l’esprit critique amène les personnes à exprimer les avenues propres à un événement ou à une situation, à remettre en question certaines informations et à concevoir différentes facettes d’un phénomène.

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La section suivante porte sur le soutien social et l’entraide, aspects importants pour la mobilisation et l’action collective des jeunes. Les chercheuses souhaitent que le programme favorise le développement d’un climat de soutien et d’entraide chez les adolescentes et les adolescents qui reçoivent le programme.

1.4.2.2 Notions de soutien et d’entraide

À l’adolescence, les pairs jouent un rôle très important dans la formation de l’identité et dans la façon de se comporter en société (Cloutier, 1996; Bernard, 1990). En prévention, pour ne pas tomber dans ce que William Ryan (1971) a appelé le victim blaming, c’est-à- dire de culpabiliser les personnes pour les conditions difficiles dans lesquelles elles se retrouvent, il est fondamental d’adopter une perspective d’éducation sociale qui dépasse les changements de comportements individuels. Il importe de créer des conditions pour que collectivement, les gens se mobilisent et s’approprient leur propre destinée (Levine, 1998). Deutsh (1962) et Johnson et Johnson (1978), pionniers de la recherche sur !’apprentissage coopératif, soulignent que la coopération permet aux jeunes d’une classe de travailler avec leurs pairs à l’atteinte d’objectifs communs plutôt que de travailler dans un climat de compétition. De surcroît, Johnson et Johnson (1978) notent que la coopération entre les élèves favorise le développement d’une attitude positive face à l’école ainsi que face aux tâches académiques. Pour sa part, Deutsh montre que sur le plan socioaffectif, !’apprentissage coopératif promeut la socialisation ainsi que la cohésion des jeunes (Deutsch, 1962). L’apprentissage coopératif permet de diminuer les préjugés et de questionner les stéréotypes (Atkinson, 1965; Johnson & Johnson, 1975). Il permet aux jeunes d’apprendre au sujet de leurs forces individuelles ainsi que de celles de leurs pairs (Aronson, Blaney, Slephan, Sikes & Snapp, 1978; Slavin, 1982; Buckmaster, 1994). Finalement, !’apprentissage coopératif favorise !’accroissement de l’estime de soi des adolescentes et des adolescents (Blaney, Stephan, Rosenfield, Aronson, & Sikes, 1977; Slavin, 1982). En fait, la coopération permet une augmentation des comportements prosociaux chez les jeunes (Johnson, Johnson, Johnson & Anderson 1976). De fait, !’apprentissage coopératif favorise le développement d’un climat d’entraide et de soutien dans un groupe; les personnes composant le groupe devenant plus aptes à faire des choix et à poser des actions positives (Slavin, 1982; Buckmaster, 1994, Deutsh, 1962). En fait, la présence d’un climat d’entraide entre les _____________________________________________________________________________________ 21

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jeunes favorise l’apparition de certaines valeurs à la base du programme d’éducation sexuelle, notamment le respect face à la différence ainsi que le souci d’autrui.

La notion d’entraide est en somme assez simple, c’est de l’aide mutuelle que l’on s’apporte dans un moment de besoin. Il est évident que l’entraide n’est pas un concept nouveau et que depuis le début de l’humanité, les gens s’entraident pour surmonter les difficultés. C’est du moins ce qu’expose Kropotkine dans son livre «L’entraide. Un facteur d’évolution» (2001, première édition, 1902). Selon lui, bien que l’entraide ne soit pas un facteur qui a reçu beaucoup d’attention parmi les scientifiques, il considère que ce facteur a joué un immense rôle dans l’évolution des sociétés humaines. Il souligne que c’est grâce à l’entraide que humains ont pu développer leur intelligence, leur connaissance et la vie sociale. Il postule donc que l’entraide et les bons rapports entre les individus sont beaucoup plus avantageux que la lutte réciproque.

Par ailleurs, à l’adolescence, les jeunes souhaitent le contact de personnes qui les acceptent tels qu’ils sont, ils ont besoin d’exprimer ouvertement ce qu’ils vivent sans craindre d’être jugés. Ils ont également besoin de sentir qu’ils ne sont pas les seuls à vivre des difficultés (Rosenbaum, Carty & Burns, 1994). Les pairs servent de modèle pour les adolescentes et les adolescents, voilà pourquoi il est intéressant qu’il se développe dans une classe un climat de soutien et d’entraide. Bernard (1990) souligne que le soutien social constitue une protection pour la santé physique et mentale des individus, particulièrement dans la période de l’adolescence. De plus, le soutien social entre les adolescents peut se présenter sous différentes formes dans une classe. Caplan (1974), qui a contribué à définir le construit, suggère que le soutien social est le produit d’activités sociales qui rehaussent chez les individus l’importance du sens du partage des tâches, l’importance d’être disponible pour apporter de l’aide et du support tant sur les plans matériel que cognitif ainsi que l’importance d’être disponible pour soutenir émotivement les gens qui en ont besoin. Cette conceptualisation a été reprise et systématisée par Gottlieb (1994) qui identifie trois grandes formes de soutien : le soutien instrumental ou matériel qui consiste en des services concrets, le soutien cognitif qui se traduit par des conseils et le soutien émotif qui consiste à apporter un réconfort ou du renforcement.

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Vaux (1988a) quant à lui, suggère que le métaconstruit du soutien social se divise en trois sous-construits : 1- la disponibilité de ressources de soutien dans le milieu de vie

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de l’individu, 2- la présence de comportements concrets de soutien, 3- la perception subjective de soutien chez l’individu. Définissons chacune de ces positions. En premier lieu, le soutien social analysé comme une disponibilité de ressources dans le milieu de vie de la personne est assez simple. Depuis plusieurs années, il est reconnu que les personnes qui ont accès à un milieu de vie soutenant et ce, tant pour le soutien lors des petits tracas quotidiens que pour celui souhaité lors des grands drames de la vie, bénéficient d’une meilleure santé et d’un plus grand bien-être et de satisfaction personnelle (Bowlby,1969). La disponibilité des ressources se définit comme une disponibilité de relations sociales qui, objectivement, sont toujours présentes en cas de besoin. En second lieu, la présence de comportements concrets de soutien fait référence à un échange de ressources ou de services entre au moins deux individus et cela afin d’accroître le sentiment de bien-être de la personne qui est dans le besoin. Cette interaction entre les personnes peut être vue comme un comportement de soutien et d’entraide seulement si l’aide est offerte dans un objectif d’apporter de la quiétude et du réconfort à la personne en besoin. Si le comportement d’entraide est offert par «l’aidant» pour tirer profit de la situation, il ne peut être qualifié comme tel (Thoits, 1982). Finalement, le soutien vu comme une perception subjective d’avoir à sa disposition des ressources de soutien, fait référence à la façon dont les gens interprètent cognitivement leur environnement (Heller & Swindel, 1983; Turner, Frankel, & Levin, 1983). En fait, selon ces auteurs, une personne peut interpréter un comportement d’aide comme un comportement de jalousie ou de tricherie. Il semble donc important que le soutien soit perçu comme tel par les personnes concernées pour qu’il y ait un effet bénéfique. Il est possible de transposer ces différentes façons de concevoir le métaconstruit du soutien social dans un environnement scolaire, puisque c’est cet environnement qui nous intéresse pour le présent travail. Une adolescente ou un adolescent d’une classe peut recevoir du soutien matériel, cognitif ou émotif de ses pairs, il ou elle peut percevoir subjectivement que ses pairs sont présents et qu’il ou elle pourrait recevoir facilement de l’aide.

Les notions de soutien et d’entraide sont utilisées indifféremment par certains auteurs. Pourtant une distinction existe et elle semble d’importance. L’entraide est en effet une forme de soutien mais qui possède la caractéristique d’être réciproque. Ce caractère de réciprocité semble revêtir des propriétés immunitaires supérieures à celles du soutien reçu ou donné. C’est du moins ce que les études de Riessman (1990) et de Maton et

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Salem (1995) laissent supposer. En outre, l’entraide apparaît comme un élément essentiel de la mobilisation et de la réalisation d’actions collectives (Breton, 1989; Freire, 1998). Le caractère de réciprocité ou d’échange mutuel de l’entraide est jugé primordial par les chercheuses pour l’atteinte des objectifs du programme ESPAR. Heller et ses collaborateurs (1991), de même que Trickett (1991), soutiennent également que l’aspect de réciprocité du soutien est important à considérer lors de l’implantation d’un programme fondé sur le pouvoir d’agir.

En conclusion, les chercheuses qui ont élaboré le programme d’éducation sexuelle s’attardent à l’évaluation de certaines caractéristiques de l’école et de la classe pouvant influencer l’implantation du programme en milieu scolaire. De fait, la littérature présente des dimensions relationnelles, matérielles et organisationnelles des écoles et des classes qui sont importantes à considérer lors de l’implantation d’un programme. Toutefois, dans la présente étude, ces dimensions doivent être décortiquées en éléments concrets pouvant refléter le milieu où le programme ESPAR sera implanté afin que ceux-ci représentent bien la réalité de ce cadre de recherche. En outre, les chercheuses veulent observer les effets que le programme est susceptible d’avoir sur le développement de l’esprit critique et de l’entraide chez les jeunes. Pour ce faire une attention particulière est portée à !’observation du caractère collectif du développement de l’esprit critique. Au niveau de l’entraide ce sont les caractères de réciprocité et d’échange entre les jeunes qui sont observés. De plus, une attention est apportée à !’observation des différentes formes de soutien (matérielle, cognitive, émotive) qui se présenteront entre les jeunes lors des cours. La littérature fournit des éléments qui sont parfois abstraits, parfois incomplets. Il importe donc d’obtenir le point de vue d’expertes et d’experts en sexualité adolescente ou en pouvoir d’agir afin que les éléments de contenu représentent bien la réalité du milieu où le programme d’éducation sexuelle sera implanté.

1.5 Objectifs de la recherche

La présente recherche souhaite investiguer l’opinion d’expertes et d’experts en éducation sexuelle ou en pouvoir d’agir afin d’obtenir le contenu théorique des éléments devant constituer des grilles d’observation et d’évaluation. Celles-ci conduisent à l’évaluation de quatre caractéristiques, soit les caractéristiques structuro-pédagogiques _____________________________________________________________________________________ 24

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