• Aucun résultat trouvé

Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité : évaluation des qualités psychométriques en milieu organisationnel

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité : évaluation des qualités psychométriques en milieu organisationnel"

Copied!
64
0
0

Texte intégral

(1)

Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité:

Évaluation des qualités psychométriques en milieu organisationnel

Mémoire

Claudie-Anne Bernier

Maîtrise en sciences de l'orientation - Recherche et intervention

Maître ès arts (M.A.)

Québec, Canada

(2)

Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité:

Évaluation des qualités psychométriques en milieu organisationnel

Mémoire

Claudie-Anne Bernier

Sous la direction de :

(3)

iii Résumé

Cette étude vise à évaluer les qualités psychométriques d’une adaptation francophone de l’Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité (ERSP ; Grant, Franklin, & Langford, 2002) dans un contexte de développement professionnel en milieu organisationnel. Pour ce faire, une analyse de la structure factorielle, une analyse d’items comparative et des analyses de validité convergente et discriminante avec des échelles de personnalité et de flexibilité cognitive liées au construit ont été réalisées. Une comparaison entre les résultats des hommes et des femmes à l’échelle totale et aux deux sous-échelles est également réalisée. Les résultats montrent que l’outil adapté possède une structure factorielle similaire à celle de l’échelle originale en termes de nombre de facteurs et de correspondance entre les items et les facteurs. Les résultats quant à l’analyse d’items indiquent cependant une différence significative entre les alphas de la version originale et de la version adaptée. La validité discriminante est appuyée, mais les indices de validité convergente ne se sont pas avérés concluants, faute de relations significatives entre les résultats à l’ERSP adaptée et ceux des échelles de personnalité et de flexibilité cognitive reliées au construit. Tel qu’attendu, aucune différence significative entre les résultats des hommes et des femmes n’a été observée. Les résultats de l’étude sont discutés, notamment en ce qui a trait aux changements effectués à l’échelle originale et quant à la conceptualisation initiale du modèle de Grant et al. (2002). Enfin, les limites de l’étude sont exposées et des pistes de recherches futures sont proposées en lien avec la pertinence de l’utilisation de l’instrument dans un contexte organisationnel.

(4)

iv

Table des matières

Résumé ... iii

Liste des tableaux ... v

Liste des figures ... vi

Remerciements ... vii

Introduction ... 1

Chapitre 1 : Contexte historique ... 4

1.1 La gestion du talent ... 4

1.2 Le développement individuel ... 5

Chapitre 2 : Conscience de soi ... 8

2.1.1 L’état de conscience de soi ... 8

2.1.2 La disposition à l’état de conscience de soi (Self-Consciousness). ... 10

2.1.3 Études empiriques sur la conscience de soi ... 13

2.2 Conscience de soi privée (Private Self-Consciousness) et concepts apparentés. ... 14

Chapitre 3 : Considérations psychométriques ... 19

3.1 L’Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité ... 23

3.2 Hypothèses ... 28 Chapitre 4 : Méthodologie ... 31 4.1 Participants ... 31 4.2 Procédure ... 31 4.3 Instruments ... 32 4.4 Analyses statistiques. ... 35 Chapitre 5 : Résultats ... 37 Chapitre 6 : Discussion ... 43 6.1 Implications cliniques ... 46 6.2 Limites ... 48

6.3 Pistes de recherches futures ... 49

Conclusion ... 50

(5)

v

Liste des tableaux

Tableau 1. Analyse factorielle de l’ERSP-A....………...….…………38

Tableau 2.Caractéristiques descriptives à des items de l’ERSP-A……….……….39

Tableau 3. Statistiques descriptives des items de l’ERSP-A………....39

Tableau 4. Matrice de corrélations inter-items de l’ERSP-A………41

Tableau 5. Données descriptives de l’échantillon et coefficients de corrélations entre les dimensions de l’ERSP adaptée et les scores aux échelles du PRF JPI, HPI et MPA……….. 42

(6)

vi Liste des figures

Figure 1.Modèle général de régulation de soi dans l’atteinte d’objectif en relation avec la réflexivité sur soi et la perspicacité………9 Figure 2. Analyse factorielle confirmatoire de l’ERSP-A………..….38

(7)

vii Remerciements

Ce mémoire n’aurait pas été possible sans l’implication soutenue de Claudia Savard. Je te remercie pour ton engagement, ton adaptation face à mes nombreux questionnements et ton accompagnement tout au long de ces deux dernières années. Dans ce contexte peu ordinaire de rédaction de mémoire, je reconnais tous les efforts que tu as mis, toi aussi, pour finalement en arriver ici. Je remercie également mes proches, particulièrement Jean-François, qui m’ont suivie dans cette aventure peu banale, qui m’ont écoutée, rassurée et m’ont aidée à avancer. Finalement, un merci tout spécial à mon employeur qui m’a donné une occasion de me dépasser au travers de ce projet et qui a mis en places les conditions de succès, en libérant temps et ressources lorsque nécessaire.

(8)

1 Introduction

L’investissement dans les ressources performantes ou potentiellement performantes dans les organisations représente aujourd’hui d’importants investissements financiers pour de nombreuses compagnies (Thornton III, Rupp, & Hoffman, 2015). Plusieurs stratégies de développement professionnel sont utilisées, variant selon la culture et les valeurs de l’entreprise, afin d’arriver à maximiser les compétences des employés et ainsi améliorer la performance organisationnelle. Le développement professionnel est défini comme l’apprentissage de nouvelles habiletés ou d’un niveau supérieur d’une habileté existante (Avolio & Hannah, 2008; Maurer, Lippstreu, & Judge, 2008). Les entreprises misent notamment sur le développement professionnel des ressources internes en offrant des possibilités de formation, de coaching ou de mentorat (Lewis & Heckman, 2006). Le développement professionnel à l’interne semble donc être une stratégie viable qui favorise l’employé et l’employeur (Bersin, 2016a; Nelissen, Forrier & Verbruggen, 2016; Thornton III et al., 2015). Dans un contexte de gestion du talent, où l’investissement dans le capital humain est une stratégie concurrentielle non négligeable, les organisations actuelles gagnent donc à investir dans le développement professionnel des employés qui démontrent un potentiel intéressant (Thornton III et al., 2015).

Lorsqu’intégrés aux orientations stratégiques, les programmes de développement des compétences permettent aux employés ciblés de reconnaître leurs forces, mais également d’identifier les aspects qu’ils ont à améliorer afin d’être plus performants dans le travail ou d’accéder à un poste de niveau supérieur. Les objectifs de développement ne peuvent être atteints sans des conditions de succès favorables. Des facteurs personnels (motivation, habiletés cognitives, comportements), environnementaux (culture de l’entreprise, soutien de l’employeur, du patron, de la famille) et contextuels (budgets, alignements stratégiques, rendement de l’entreprise) sont donc importants à considérer dans l’évaluation du potentiel de succès d’un projet de développement professionnel d’un employé (Maurer, Weiss, & Barbeite, 2003). Pour mesurer le succès du développement professionnel, des auteurs se sont intéressés au niveau d’engagement d’un individu dans la prise en charge de son développement, d’autres au lien avec l’apprentissage de nouvelles compétences ou d’autres encore à l’évaluation directe des habiletés essentielles à la performance par le moyen de

(9)

2

centres d’évaluation axés sur le développement (London, 1993; Maurer et al., 2003; Thornton III et al., 2015). L’intégration d’une mesure observable s’intéressant aux indicateurs de succès du développement professionnel ne semble pas avoir fait l’objet de nombreuses recherches (Arthur Jr., Day, McNelly, & Edens, 2003; Avolio & Hannah, 2008; Thornton III et al., 2015). De tels indicateurs pourraient pourtant être favorables à l’identification de candidats potentiels pouvant bénéficier du développement ainsi qu’au succès des interventions axées sur le développement pour lesquelles les entreprises peuvent dépenser des millions de dollars (Avolio & Hannah, 2008).

Parmi les indicateurs identifiés, la conscience de soi est un des phénomènes qui contribue au succès du développement professionnel (Grant, Franklin, & Langford, 2002; Judge & Bono, 2001 ; Maurer et al., 2008; Maurer et al., 2003; Thornton III et al., 2015). La conscience de soi est composée de la capacité à réfléchir sur soi ainsi que de la capacité à comprendre ses états internes. Afin d’évaluer le construit particulier, une échelle de conscience de soi, L’Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité (ERSP; Grant et al., 2002), a été adaptée en français avec une population de travailleurs dans une démarche de développement professionnel. Le but était d’utiliser cette mesure à des fins d’évaluation de la disposition au développement. L’utilisation d’une mesure de la conscience de soi apparaît pertinente pour les organisations, afin d’ajuster les stratégies pour aider le développement de leurs employés. Il est plus avantageux en termes de temps et d’investissement de miser sur le développement de compétences d’employés démontrant des caractéristiques personnelles favorisant ce développement. Un tel outil pourrait ainsi permettre une meilleure utilisation des ressources financières et humaines. Élaborée par des psychologues à des fins privées, l’adaptation de cette échelle n’a pas fait l’objet d’aucune étude de validation officielle. L’utilisation en milieu organisationnel d’une mesure non validée peut avoir des impacts sur les recommandations du conseiller d’orientation responsable de l’évaluation de l’individu (Geisinger et al., 2013).

L’objectif de cette étude est donc de valider une adaptation francophone de l’Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité (ERSP-A; Grant, et al., 2002) dans un contexte de développement professionnel, auprès d’un échantillon de travailleurs. Divisé en six sections, ce mémoire présente en premier lieu l’intérêt scientifique pour le développement

(10)

3

professionnel par un bref historique des avancées réalisées dans ce domaine. Au deuxième chapitre, l’assise théorique et l’étendue des connaissances actuelles entourant l’instrument à valider sont exposées. Le rôle de la conscience de soi à l’intérieur du développement professionnel est amené, en lien avec les outils mesurant le construit. En se dirigeant vers l’évaluation des qualités psychométriques de l’échelle de conscience de soi traitée dans ce mémoire, les considérations psychométriques recommandées par l’American Psychological Association (APA) sont présentées au troisième chapitre. Puisqu’un appui statistique est nécessaire lors de l’élaboration d’un outil ou lorsqu’il est adapté dans une nouvelle langue, une nouvelle culture ou un nouveau contexte, une partie du chapitre est réservée aux fondements psychométriques de l’utilisation et de l’adaptation d’un outil de mesure. À la fin du chapitre, l’outil évalué dans le cadre du mémoire est présenté et les hypothèses découlant de la recension des écrits sont étayées. Le quatrième chapitre décrit de façon détaillée la méthodologie de l’étude, incluant les participants, la procédure, les outils utilisés ainsi que les méthodes d’analyse de données. Le cinquième chapitre présente les résultats des analyses statistiques et ceux-ci sont comparés à ceux obtenus avec la version originale de l’instrument à l’étude. Les qualités psychométriques, plus précisément les données quant à la fidélité, la structure factorielle, l’analyse des items et l’homogénéité de ceux-ci sont également rapportées, toujours en comparaison avec l’outil original. Ensuite, des indices de validité convergente et discriminante sont présentés en lien avec des échelles spécifiques d’inventaires de personnalité et un test de raisonnement abstrait. Enfin, le sixième chapitre porte sur l’interprétation des résultats à la lumière des hypothèses et en lien avec les connaissances répertoriées sur le sujet et trait des implications cliniques tout en soulignant les limites à l’étude et les pistes de recherche futures à explorer. Ainsi, ce travail vise la compréhension critique de l’utilité de l’ERSP-A dans un contexte organisationnel.

(11)

4 Chapitre 1 : Contexte historique

1.1 La gestion du talent

Les pratiques de gestion du talent ont amorcé leur apparition dans le secteur des ressources humaines il y a près de deux décennies, alors que les employés ont été reconnus comme un facteur primordial de succès dans les organisations. La gestion du talent faisait alors référence à une branche de la gestion des ressources humaines qui veillait à attirer, utiliser et retenir les meilleurs employés dans l’organisation. C’est sous les termes « guerre des talents » que le phénomène a d’abord été reconnu dans la pratique managériale. Ce sont des consultants de la firme McKinsey, dans les années 90, qui ont verbalisé le phénomène que déjà quelques organisations avaient commencé à observer (Collings, 2015; Michaels, Handfield-Jones, & Axelrod, 2001). Le fait d’acquérir et d’utiliser les ressources internes performantes était un avantage compétitif qui, contrairement à d’autres stratégies d’affaires, était difficilement reproductible par les entreprises rivales. Cette gestion stratégique des employés performants avait effectivement été identifiée comme un des facteurs différenciant les organisations à succès des autres (Collings, 2015). Ainsi, la gestion du talent a fait son apparition dans les discussions stratégiques, ce qui a mené à l’élaboration de programmes organisationnels en ce qui a trait à l’acquisition, à l’évaluation et à la rétention des talents (Collings, 2015).

Le phénomène de plus en plus présent dans la pratique n’était jusque-là que très peu soutenu dans la littérature scientifique (Chambers, Foulon, Handfield-Jones, Hankin, & Michaels III, 1998). Alors que le champ de recherche était encore à un stade embryonnaire, les auteurs qui considéraient la gestion des talents comme un pan de la gestion des ressources humaines ont été critiqués sous prétexte de ressasser du déjà-vu. Effectivement, d’autres études dans le domaine utilisaient le terme gestion des talents comme un synonyme de la gestion des ressources humaines globale (Collings, 2015). Encore aujourd’hui, le consensus autour de la définition et de l’opérationnalisation du concept n’a pas été atteint, ce qui limite l’apport de données probantes quant aux liens entre la gestion du talent et la performance organisationnelle (Collings, 2015). Bien que la recherche ait tout de même évolué au cours des années, la gestion du talent est toujours considérée comme un champ de recherche en

(12)

5

croissance, qui n’est certes pas amenée à disparaître (Gallardo-Gallardo, Jijs, Dries, & Gallo, 2015; Gunnigle, Lavelle, & Monaghan, 2013; Khilji, Tarique & Schuler, 2015).

1.2 Le développement individuel

Au départ, les organisations ont commencé par voir la gestion des talents comme l’acquisition de personnel ultra performant dans les postes clés, et ce, malgré l’absence d’appui scientifique soutenant la définition du concept. Lorsque la communauté scientifique s’est intéressée au sujet, il a plutôt été démontré que, si un individu avait obtenu d’importants résultats dans un poste similaire ailleurs, c’est en partie grâce aux facteurs contextuels présents dans l’entreprise pour laquelle il travaillait (Collings, 2015). Déplacé dans un nouveau milieu, avec d’autres conditions et une autre culture organisationnelle, le talent pour lequel on avait recruté l’individu ne sera peut-être pas autant mis à profit, faute de conditions favorables. L’investissement dans un employé déjà en poste dans l’entreprise, quant à lui, a démontré de plus grands bénéfices à long terme que l’acquisition d’un individu très performant venant de l’externe (Collings, 2015; Salas & Weaver, 2016).

L’intérêt scientifique pour la gestion du talent a également permis de faire évoluer la conception de l’humain au cœur des organisations. Au-delà de la reconnaissance qu’un employé performant est bénéfique pour l’organisation et qu’il doit être récompensé pour y rester, les études ont cherché à comprendre ce qui fait qu’un individu reste dans son poste et que sa performance y est maximisée. Les récentes études sur le sujet font émerger l’importance de cette considération humaine qui a été longtemps négligée au profit de la vision utilitaire des ressources humaines (Collings, Doherty, Luethy, & Osborn, 2011). Les organisations ont dû, en ce sens, trouver des moyens plus adaptés aux réels besoins de leurs employés pour les retenir et maximiser leur potentiel (Bersin, 2016b; Farndale, Pai, Sparrow, & Scullion, 2014). Plusieurs façons d’investir dans le développement ont vu le jour dans les organisations. La formation, le mentorat, le coaching et la création d’opportunités d’avancement en sont des exemples (Thornton III et al., 2015). Il a été démontré que l’investissement dans le développement du capital humain a des effets positifs sur les employés en termes d’acquisition de compétences, de promotions et de réduction du stress, tout en ayant des effets positifs sur la rentabilité et la productivité des organisations (Salas & Weaver, 2016). L’investissement dans les activités de développement peut être perçu comme

(13)

6

un risque par les organisations parce qu’il augmente l’employabilité de ses employés qui peuvent quitter leur emploi pour un compétiteur à tout moment. Bien que cette perception soit contrebalancée par l’envie d’être plus compétitif grâce à des employés plus compétents, le rapport coûts-bénéfices peut paraître trop grand (Nelissen et al., 2016). Pourtant, dans le contexte de travail actuel, les stratégies de rétention des employés centrées principalement autour du salaire et de la sécurité d’emploi ne suffisent plus à assurer la rétention, encore moins l’engagement et la performance des employés, comme le font le développement des compétences, l’utilisation des compétences ou la flexibilité de l’horaire par exemple (Bersin, 2016a; Nelissen et al., 2016). Les études sur le sujet démontrent que l’investissement dans le développement des employés à l’interne serait lié à une augmentation de la perception de l’employabilité certes, mais pas à un plus grand nombre de départs vers un compétiteur (Nelissen et al., 2016).

La seule volonté de l’organisation pour développer un employé n’est toutefois pas garante de résultats ; plusieurs dimensions sont reconnues comme étant liées au développement individuel dans une organisation. La perception d’efficacité personnelle, l’engagement organisationnel, le soutien de l’environnement, la motivation, la métacognition et la perception de contrôle en sont des exemples (Judge & Bono, 2001; Judge, Erez, & Bono, 1998; Maurer et al., 2008, 2003; Thornton III et al., 2015). L’investissement de l’individu dans son propre développement apparaît également comme un concept notoire dans le succès des activités de développement. Sur la base du modèle d’orientation d’apprentissage et d’orientation de développement des employés de Maurer (2002), les recherches effectuées auprès d’un échantillon de travailleurs ont démontré que l’implication dans le développement est reliée à la participation antérieure à des activités de développement, aux capacités d’apprentissage, à l’orientation vers l’apprentissage, à la perception du besoin de développement et au soutien perçu de l’environnement de travail. Cette étude a cherché à inclure les différences individuelles afin d’expliquer l’engagement dans la prise en charge du développement. En effectuant une étude auprès de 713 travailleurs avec différents profils démographiques, les auteurs ont également démontré que les traits de personnalités consciencieux (individus minutieux, organisés et ayant tendance à suivre les règles) et d’ouverture à l’expérience (caractérisé par la curiosité intellectuelle) auraient un effet médiateur sur la motivation et sur l’implication dans les activités de

(14)

7

développement (Hogan & Hogan, 1992; Maurer et al., 2008). Caractérisé par la planification, le sens des responsabilités et la fiabilité, le trait de personnalité consciencieux corrèle avec la motivation à apprendre, l’engagement dans l’atteinte d’objectifs et le sentiment d’efficacité à se développer (Colquitt & Simmering, 1998; Martocchio & Judge, 1997). L’ouverture à l’expérience, qui représente des caractéristiques de curiosité et d’ouverture d’esprit, est également en relation avec le succès du développement puisqu’elle place l’individu dans une attitude positive face aux activités de développement. L’ouverture à l’expérience permettrait donc aux individus de voir la valeur ajoutée du développement (Barrick & Mount, 1991 cités dans Maurer, 2008). Ainsi, ces différences individuelles nuancent la disposition avec laquelle un individu entrevoit le succès de son développement (Maurer, 2008). De par leur définition, ces traits de personnalité nuancent également la disposition à entrer dans un mode introspectif. Ce mode introspectif, nommé la conscience de soi, est également impliqué dans le succès du développement (Grant et al., 2002). Ce sont ces différences individuelles qui viennent nuancer la profondeur avec laquelle l’individu réfléchira sur lui-même, ainsi que la facilité avec laquelle la personne intègrera les observations faites. La conscience de soi amène donc une réflexion sur soi plus juste, ce qui permet d’adapter les comportements pour s’améliorer et augmenter les chances d’atteindre l’objectif. Le construit de conscience de soi sera développé dans la prochaine section (Auzoult, 2012; Carver & Scheier, 1982).

(15)

8 Chapitre 2 : Conscience de soi

Bien que la littérature sur la définition et la conceptualisation de la conscience de soi date, les modèles théoriques sont toujours d’actualité. Par ailleurs, plusieurs auteurs mentionnent la nécessité d’actualiser le construit de conscience de soi, tel que proposé par Fenigstein, Scheier et Buss (1975) par le biais d’études contemporaines (Ashley & Reiter-Palmon, 2012; Grant et al., 2002). Enfin, peu d’études se sont intéressées à ce construit dans le secteur de la psychologie organisationnelle, malgré le parallèle intéressant avec l’atteinte d’objectifs de développement (Grant et al., 2002; Thornton III et al., 2015).

2.1.1 L’état de conscience de soi

Le concept de conscience de soi (Self-Awareness) est graduellement apparu dans la littérature en psychologie sociale et cognitive depuis la fin du XIXe siècle grâce aux recherches exploratoires de James, de Cooley et de Mead (pour une revue de littérature, voir Auzoult, 2012). Ces précurseurs ont intégré aux connaissances scientifiques sur la conscience une conception du construit divisée à deux niveaux. Un premier niveau dans l’expérience perçue du monde extérieur et un deuxième niveau où le soi devient un objet en lui-même (Mead, 1934, cité dans Auzoult, 2012). Lorsque l’individu porte son attention vers l’extérieur, il s’ouvre aux stimuli externes, prenant conscience de ce qui l’entoure. Il est alors en mode réactif vis-à-vis ce qu’il observe. Lorsque l’attention est portée vers les aspects internes, c’est alors que l’individu se conçoit en tant qu’objet (Mead, 1934, cité dans Auzoult, 2012). Le foyer d’attention est alors porté vers l’intérieur de soi. Duval & Wicklund (1972) ont démontré qu’il était possible d’avoir du contrôle sur le déplacement du foyer d’attention vers l’intérieur, entre autres par la présence d’un miroir, l’audition de sa propre voix ou la présence d’observateurs (Brockner & Hulton, 1978; Carver & Scheier, 1978; Scheier, Fenigstein, & Buss, 1974; Wicklund & Duval, 1971 cités dans Rimé & LeBon, 1984). Lorsque le foyer d’attention est dirigé vers l’intérieur, cela permet à l’individu de s’autoréguler par rapport aux standards intégrés de comportements ou d’attitude (Auzoult, 2012; Duval & Wicklund, 1972; Gibbons, 1990; Silvia & Duval, 2001). L’écart entre les standards et la perception de soi provoque un affect guidant l’ajustement des comportements afin d’amener la perception de soi le plus près possible des standards intériorisés (Duval & Wicklund, 1972).

(16)

9

Dans la même optique, les chercheurs adhérant à la théorie sociale cognitive se sont intéressés au rôle de la réflexion sur soi dans l’atteinte des objectifs fixés. Ils ont relevé l’importance de la capacité à réfléchir sur soi-même, à prendre conscience de ses pensées et à les gérer pour arriver à performer, et ce, dans plusieurs sphères de vie (Bandura, 1991; Carver & Scheier, 1982; Grant et al., 2002; Zimmerman & Labuhn, 2012). La croyance en sa propre capacité à atteindre les buts aurait un impact sur la perception du niveau de difficulté de l’objectif fixé, sur le type de stratégies utilisées pour les atteindre, sur la persévérance lors de difficultés et sur la quantité d’efforts déployés dans une activité (Bandura & Wood, 1989; Wood & Bandura, 1989). Dans ce processus, ils ont démontré que la réflexion sur soi était nécessaire à l’autorégulation. C’est grâce à cette autorégulation que l’individu peut s’évaluer et ajuster ses comportements en fonction de l’atteinte de l’objectif souhaité (Auzoult, 2012; Bandura, 1991; Carver & Scheier, 1982; Faber, 1989; Grant et al., 2002; Trapnell & Campbell, 1999; Zimmerman & Labuhn, 2012).

Le modèle de régulation de soi s’applique ici lorsqu’un objectif de développement est fixé (Figure 1). En vue d’atteindre l’objectif, les comportements se modulent via deux étapes : le contrôle et l’évaluation. Ces étapes distinctes visent une diminution de l’écart entre

Établissement de l’objectif

Développer un plan d’action

Actions

Ajustement des comportements Contrôle

(Implique la réflexivité sur soi) Évaluer

(Associé à la perspicacité)

Atteinte de l’objectif

Figure 1. Modèle général de régulation de soi dans l’atteinte d’objectif en relation avec la réflexivité sur soi et la perspicacité (Grant et al., 2002)

(17)

10

la perception du progrès et le standard de performance (Carver & Scheier, 1982). La première étape, le contrôle, est l’activité métacognitive où l’individu est en mode d’auto-observation. Cette étape de réflexion sur soi informe l’individu de l’avancement de l’activité par rapport à l’objectif visé. La seconde étape, l’évaluation, fournit des informations sur les émotions ressenties face au progrès. L’individu utilise les informations perçues à l’étape précédente et les intègre à ses référents. C’est ici qu’il évalue son degré de satisfaction face à sa progression.

Ces deux étapes de l’autorégulation permettent à l’individu de se comparer à des standards, intrinsèques ou extrinsèques, pour guider ses comportements, selon ce qu’il comprend de son évaluation (Carver & Scheier, 1982; Froming & Carver, 1981; Grant et al., 2002; Zimmerman & Labuhn, 2012). Tel que représenté à la Figure 1, cette auto-évaluation en cours de progression favoriserait l’atteinte d’objectifs puisque les comportements inadéquats sont perçus, réfléchis et ajustés en cohérence avec l’objectif fixé.

La vision de soi-même dans un état de conscience de soi peut être faite sous différents angles, mais il semble que ce sont des différences individuelles qui auraient un impact sur la facilité avec laquelle une personne entre dans cet état de conscience de soi (Auzoult, 2012; Carver & Scheier, 1978; Fenigstein et al., 1975). Ainsi, certaines personnes seraient plus disposées que d’autres à porter leur focus attentionnel vers l’intérieur. Cette disposition à la conscience de soi sera élaborée dans la prochaine section puisqu’elle est la base de l’élaboration du questionnaire qui fait l’objet de la validation du présent mémoire.

2.1.2 La disposition à l’état de conscience de soi (Self-Consciousness).

Tel que mentionné précédemment, l’état de conscience de soi peut être amené par des éléments situationnels. Il est également facilité par une disposition qui est relative à des différences individuelles. Cela explique pourquoi certains individus ont constamment le réflexe d’analyser leurs comportements, de réfléchir sur eux-mêmes ou de ressasser leurs pensées, tandis que d’autres ne le font pas (Fenigstein et al., 1975). La facilité avec laquelle un individu entre dans un état de conscience de soi est d’abord expliquée par les différents cheminements personnels à travers desquels il y a une présence plus ou moins grande d’inducteurs de conscience de soi (situations où l’individu est observé par un public, filmé

(18)

11

ou enregistré, par exemple), mais aussi par certains traits de personnalité (Fenigstein et al., 1975; Rimé & LeBon, 1984).

Grâce aux recherches de Fenigstein et al. (1975), il a été avancé que les gens entraient dans un état de conscience de soi de différentes façons. D’abord, certains ont la tendance à se centrer sur leurs états internes. Ici, les sensations, les humeurs, les processus réflexifs ou les émotions sont évalués par l’individu (Auzoult, 2012; Buss & Scheier, 1976; Fenigstein, 2009; Gibbons, 1990; Silvia & Duval, 2001). On parle alors d’aspects privés de la conscience de soi. D’ailleurs, cette ouverture à soi, à ses propres pensées et à ses propres émotions s’apparente à un trait de personnalité couramment étudié dans le domaine de la personnalité, soit l’ouverture à l’expérience selon le modèle des « Big-Five » (Costa & McCraie, 1992). La conscience de soi est également très fortement étudiée dans le domaine de la psychologie, et qui sert d’assise à une approche thérapeutique reconnue : la pleine conscience (mindfulness; Kabat-Zinn, 1982; Kabat-Zinn, Libworth & Burney, 1985). La pleine conscience est également un processus d’observation orienté vers le soi où le focus de l’attention est porté vers les états internes (Kabat-Zinn, 1982; Kabat-Zinn, Libworth & Burney, 1985). Bishop et al., (2004) conceptualisent la pleine conscience en deux dimensions : l’autorégulation et l’orientation vers l’expérience. Ils ramènent donc l’état de pleine conscience à un processus métacognitif où le focus de l’attention est contrôlé et orienté vers les états internes. Ces états internes sont accueillis non pas dans une perspective de jugement et d’évaluation, mais plutôt d’observation (Bishop et al., 2004). La particularité de la pleine conscience est que cette observation est ancrée dans ce qui est vécu dans le moment présent (Bishop et al., 2004). Cette spécificité quant au moment où les états internes sont vécus et le moment où la réflexion est faite n’est cependant pas distinguée par Fenigstein et al. (1975).

Une autre façon d’entrer dans un état de conscience de soi selon Fenigstein et al. (1975) est en portant attention aux aspects publics ; la personne se voit plutôt à travers le regard des autres. Une conscience de soi orientée vers les aspects publics fait donc référence à ce que l’individu peut dégager et qui peut être perceptible pour autrui. Par exemple, de par son style, ses expressions verbales, son langage gestuel, sa posture, son apparence physique ou ses comportements, l’individu prend conscience de lui-même en référence à la façon dont

(19)

12

les autres le voient. Il réfléchit davantage sur son image en société et sur l’impact qu’il laisse aux autres (Auzoult, 2012; Buss & Scheier, 1976; Fenigstein et al., 1975; Rimé & LeBon, 1984).

2.1.3 Conceptualisation et évaluation de la conscience de soi

Afin d’avoir une mesure observable de la nature de la disposition à la conscience de soi d’un individu selon la conceptualisation décrite précédemment, Fenigstein et al. (1975) ont élaboré l’échelle de disposition à la conscience de soi, la Self-Consciousness Scale (SCS). Leurs recherches ont démontré que le concept mesuré se décline plutôt en trois facteurs. Tel qu’attendu, les deux premiers facteurs sont la conscience de soi privée et la conscience de soi publique. Les autres items de l’échelle représentent le concept d’anxiété sociale. Ce concept, qui serait une résultante de la conscience de soi publique, fait référence à un inconfort expérimenté en présence d’un public (Auzoult, 2012; Fenigstein et al., 1975). Ce modèle à trois facteurs a été remis en question dû à l’instabilité dans le nombre de facteurs qui émergent des études empiriques selon les populations évaluées dans les différentes études. (Auzoult, 2012; Silvia & Philips, 2011; Trapnell & Campbell, 1999). Les écarts relevés dans la structure factorielle de l’échelle via différentes études ont poussé l’exploration d’autres conceptualisations du construit de conscience de soi privée.

Ainsi, afin de répondre aux lacunes de la SCS (Fenigstein et al., 1975), Burnkrant et Page (1984) ont conceptualisé la conscience de soi privée en deux facteurs : la réflexivité sur soi (Self-Reflection) et la conscience du soi interne (Internal State Awareness). Le premier facteur désigne une tendance générale à réfléchir sur soi-même et le deuxième décrit une prise de conscience des états physiologiques et émotionnels vécus (Auzoult, 2012). Burnkrant et Page (1984) ont démontré la présence de ces deux facteurs suite à deux études ayant pour but de confirmer la structure factorielle de l’échelle de conscience de soi. Les auteurs ont utilisé la version originale de la SCS (Fenigstein et al., 1975) pour leur étude, réalisée auprès d’un premier échantillon de 360 femmes adultes et d’un deuxième échantillon composé de 180 étudiants collégiaux. Les résultats ont démontrés qu’une structure à quatre facteurs était plus adéquate que la structure à trois facteurs obtenue dans les études de Fenigstein et al., 1975 . Ces quatre facteurs sont la conscience de soi publique, l’anxiété sociale, la réflexivité sur soi et la conscience du soi interne (Burnkrant & Page, 1984).

(20)

13

Dans le but de présenter une relation claire avec les facteurs métacognitifs (niveau de conscience de soi où l’individu est conscient de son état de conscience; Morin, 2005)associés aux processus de régulation de soi dans une perspective de développement, d’autres auteurs ont cherché à développer un outil de mesure actualisé (Grant et al., 2002). En ce sens, ces auteurs ont proposé une mesure reprenant les deux facteurs proposés par Burnkrant et Page (1984) sous les noms de réflexivité sur soi (self-reflection) et de perspicacité (insight). Le premier élément de la disposition à la conscience de soi, telle que conçue par Grant et al. (2002), reflète la capacité d’une personne à observer ses pensées, sentiments et comportements. Ils y distinguent le besoin de réflexion ainsi que l’engagement dans la réflexion. Le deuxième élément (la perspicacité) évoque, quant à lui, la lucidité et l’intégration de ces observations, ce qui reflète la conceptualisation de Burnkrant et Page (1984). Ils intègrent ainsi à leur conceptualisation de la conscience de soi les notions socio-cognitivistes de régulation et d’évaluation.

2.1.3 Études empiriques sur la conscience de soi

La notion de conscience de soi a fait l’objet de plusieurs recherches dans le domaine de la psychothérapie, sous le concept de conscience psychologique (processus métacognitif par lequel un individu relie ses pensées, ses sentiments et ses actions, dans le but d’apprendre sur le sens et les causes de ses comportements; Appelbaum, 1973). Il a été avancé que cette conscience de soi était essentielle à l’atteinte d’objectifs dans une perspective de progrès et de développement dans un contexte psychothérapeutique (Appelbaum, 1973; Conte et al., 1990; Farber, 1989). Des études ont démontré qu’une plus grande connaissance de soi amène une meilleure différenciation et une meilleure intégration des informations tout en permettant un accès aux informations cognitives sur soi (Trapnell & Campbell, 1999). Une personne qui a une conscience de soi élevée fait d’ailleurs une auto-évaluation plus précise, est moins sensible à la suggestibilité et a moins tendance à se comparer aux autres. Les gens ayant une forte conscience de soi ont une connaissance de soi plus juste, puisqu’ils inspectent régulièrement leurs états internes, motivations et buts (Buss, 1980; Carver & Scheier, 1982; Gibbons, 1990; Nasby, 1989). Le parallèle avec le développement de compétences dans le milieu organisationnel est possible puisqu’on y retrouve un objectif similaire visant un changement intrinsèque, conditionné par une autorégulation (Faber, 1989; Trapnell &

(21)

14

Campbell, 1999; Zimmerman & Labuhn, 2012). Cette justesse dans l’évaluation de soi peut mener à mieux identifier les points à développer, les pistes de solutions ainsi que les moyens pour y arriver. L’individu peut ainsi se fixer des objectifs plus réalistes et opter pour des stratégies adéquates pour les atteindre (Bandura, 1991).

Indicateur clé du succès du développement, le concept conscience de soi a timidement été abordé dans le contexte de développement professionnel. C’est plutôt sous l’angle de la performance managériale que plusieurs études l’ont abordé (Managerial Self-Awareness; Atwater & Yammarino, 1992; Fletcher, 1997; Taylor, 2010). La conscience de soi est, dans ce contexte particulier, conçue comme le niveau d’entente entre soi-même et les autres et sur la perception des comportements de leader (Atwater & Yammarino, 1992; Taylor, 2010). Pour arriver à mesurer la performance managériale, une auto-évaluation est comparée à l’évaluation des subordonnés, collègues et patrons. Il a été démontré qu’un haut degré de conscience de soi managériale est lié à une perception de soi plus fidèle et valide, à de bonnes relations de travail et à plus d’intérêt face aux rétroactions (Atwater, Ostroff, Yammarino, & Fleenor, 1998; Bass & Yammarino, 1991; Furnham & Stringfield, 1994; Nasby, 1989; Wexley, Alexander, Greenawalt, & Couch, 1980; Wohlers & London, 1989). À l’inverse, un degré plus faible de conscience de soi managériale est lié à une fuite ou une minimisation des rétroactions, à des déraillements de carrière (évincement d’une position lié à l’inefficacité) et à des attitudes négatives face au travail (Ashford, 1989; Hogan, Hogan, & Kaiser, 2011; Lombardo, Ruderman, & McCauley, 1988; Taylor, 2010). La capacité à anticiper avec justesse la perception des autres permet à un leader de cerner les aspects qu’il a à développer (Taylor, 2010). Or, le processus cognitif qui permet cette évaluation est un pan négligé de la littérature sur la conscience de soi managériale (Taylor, 2010).

2.2 Conscience de soi privée (Private Self-Consciousness) et concepts apparentés. Les deux facteurs de l’échelle de conscience de soi (Fenigstein et al., 1975) ont été étudiés en lien avec la personnalité (Scandell, 1998). Principalement, Scandell (1998) a cherché à alimenter les connaissances sur la conscience de soi privée en lien avec la personnalité, en s’appuyant sur le modèle de personnalité à cinq facteurs et en prenant soin de distinguer la variance unique de chacun des facteurs (Costa & McCraie, 1992; Scandell, 1998). Pour ce faire, il a réalisé une étude dans laquelle plus de 100 participants ont complété

(22)

15

le NEO-FFI (Costa & McCraie, 1992) ainsi que l’Échelle de conscience de soi (SCS; Fenigstein et al., 1975). Les résultats de l’étude montre que le facteur d’Ouverture à l’expérience du modèle à cinq facteurs de Costa & McCraie (1992), qui représente l’ouverture aux émotions, aux idées ainsi qu’une recherche d’expériences intellectuelles, était alors positivement lié à la réflexion (telle que mesuré par une auto-cotation des adjectifs listés dans la taxonomie de Goldberg; 1982, cité dans Trapnell & Campbell, 1999).

D’autres conceptualisations de la personnalité, telles que le modèle de Jackson (1994; 1999; Jackson et al., 2000) et de Hogan & Hogan (HPI; 1992) permettent l’évaluation de ce trait de personnalité. Effectivement, des relations ont été démontrées entre le facteur Ouverture du modèle à cinq facteurs et les échelles Changement (appréciation de nouvelles expériences et l’adaptabilité au changement) et Compréhension (curiosité intellectuelle, la volonté de connaître le rationnel derrière les idées) du Personality Reseach Form (PRF; Jackson, 1999). Dans un autre inventaire de personnalité nommé le Jackson Personality Inventory – Revised (JPI-R; Jackson, 1994), l’échelle Champ d’intérêt réfère à la diversité des intérêts et à la curiosité face à différents sujets. Cette définition rejoint le sens du facteur Ouverture à l’expérience et cela peut expliquer les corrélations positives qui ont été retrouvées dans la littérature entre les deux facteurs (Jackson, 1994; Jackson et al., 2000; McCraie & Costa, 1992; Paunonen & Jackson, 1996). En basant son modèle sur celui du Big Five, Hogan & Hogan (1992) associent leurs dimensions de Curiosité (l’intérêt démontré vers des sujets intellectuels, la vivacité d’esprit et la créativité) et de Style d’apprentissage (l’appréciation des activités académiques et la valeur reliée à la formation) à l’Ouverture à l’expérience.

L’étude de Scandell (1998) a également démontré une relation négative entre l’amabilité et la conscience de soi privée, tel que mesuré par le NEO-Five Factor Inventory (Costa & McCrae, 1992) et la SCS-PR (Fenigstein et al., 1975). Un résultat faible au facteur Amabilité du modèle à cinq facteurs (tendance au scepticisme, à la pensée critique, à la compétitivité et à l’égocentrisme ; Costa & McCraie, 1992) était associé à un résultat élevé à l’échelle de réflexion sur soi (Scandell, 1998). Il est suggéré qu’une réflexion orientée vers soi visant à comprendre les différents états internes puisse amener l’individu à ne conserver que les informations à son sujet qu’il juge pertinentes (Carver & Scheier, 1982). En ne

(23)

16

considérant pas les informations jugées non pertinentes et puisqu’une conscience de soi privée élevée inspire une connaissance de soi approfondie, un scepticisme par rapport aux informations provenant de l’extérieur n’est pas totalement surprenant (Scandell, 1998; Trapnell & Campbell, 1999).

Comme dans le cas de l’ouverture à l’expérience, d’autres conceptualisations de la personnalité permettent l’évaluation de ce trait. C’est le cas notamment de l’échelle Sensibilité interpersonnelle du HPI (degré selon lequel la personne se voit comme sensible socialement, délicate et perspicace; Hogan & Hogan, 1992). Un parallèle avec l’échelle Humilité du PRF (Jackson, 1999) est aussi possible puisque cette échelle mesure la capacité d’un individu à accepter ses torts. Un score élevé à l’échelle indique une tendance à accepter la critique et le blâme alors qu’un score bas traduit une tendance à avoir une opinion élevée de soi et à avoir plus de difficulté à se remettre en question. Des études ont d’ailleurs démontré des indices de validité convergente de l’échelle Humilité avec le facteur Amabilité du modèle à cinq facteurs (Costa & McCraie, 1992; Jackson, Paunonen, & Tremblay, 2000). Enfin, le PRF permet également de mesurer le trait d’amabilité (ou son contraire l’antagonisme) via les échelles Agressivité (tendance à argumenter, à trancher facilement et à se sentir irrité) et Défensif (tendance plus prononcée à se sentir offensé et à refuser la critique; Jackson, 1999; Jackson et al., 2000).

D’autres études soutiennent également l’idée qu’une conscience de soi privée élevée serait associée à davantage de stress et d’anxiété lors de situations particulièrement stressantes (Trapnell & Campbell, 1999; Wells, 1985). La justification derrière cette pensée est qu’un individu qui porte une attention particulière à ses états internes serait plus alerte quand un changement survient, se poserait plus de questions, ce qui amènerait un état transitoire d’anxiété plus prononcé (Wells, 1985). À l’inverse, le fait d’être perspicace face aux émotions vécues a été démontré comme étant négativement corrélé à la mesure d’anxiété utilisée (Grant et al., 2002). Les travaux de Grant et al. (2002) ont appuyé cette relation positive entre l’échelle de Réflexivité sur soi et l’Échelle de dépression, d’anxiété et de stress (Depression, Anxiety and Stress Scale; Lovibond & Lovibond, 1995 cité dans Grant et al.,2002). Ce lien positif entre la réflexivité sur soi et l’anxiété n’avait antérieurement jamais été observé. En effet, une étude de validité discriminante de l’échelle de Conscience de soi

(24)

17

privée (Carver & Glass, 1976; Fenigstein et al., 1975) avait conclu à une absence de corrélation avec le construit d’anxiété, tel que mesuré par le Test Anxiety Questionnaire de Mandler & Searason (1952). L’une des explications possibles dans la variabilité des résultats obtenus pourrait résider dans la méthodologie de ces études : dans l’étude de Wells (1985), l’administration du test était préalable à un événement stressant, tandis que dans celle de Carver et Glass (1976), le contexte de passation n’était pas manipulé.

Finalement, Carver & Glass (1976) ont démontré l’absence de lien entre la conscience de soi privée et des construits qui auraient pu expliquer une part de variance dans les résultats. Ainsi, les hypothèses selon lesquelles le besoin de performance (mesuré avec le Edwards Personal Preference Schedule; Edsards, 1957), l’anxiété (évaluée à l’aide du Test d’anxiété de Mandler et Searason; 1952) et la sociabilité (mesurée par le Temperament Survey-III; Buss et Plomin, 1975, cité dans Carver & Glass, 1976) soient liés à la conscience de soi privée ont été réfutées. Le besoin de performance1, l’anxiété2 et la sociabilité3 sont tous trois des dimensions auxquelles Hogan & Hogan (1992) et Jackson (1994; 1999) font référence dans leurs modèles de personnalité. Bien que la sociabilité soit parfois associée à la notion d’amabilité selon le modèle à cinq facteurs (Costa & McCraie, 1992), une distinction est à faire entre la recherche de situations sociales en termes de quantité d’interactions (sociabilité) et entre la qualité des interactions, ou la recherche de contacts plaisants et harmonieux (amabilité; Hogan & Hogan, 1992).

En bref, des relations positives sont retrouvées dans la littérature entre d’une part, la réflexion sur soi et d’autre part, l’ouverture à l’expérience et l’anxiété, alors que des relations négatives sont retrouvées entre l’amabilité et les deux facteurs de la conscience de soi privée,

1 Il est possible de faire le parallèle entre le besoin de performance tel que mesuré par le Edwards Personal Preference Schedule (Edwards, 1957) et l’échelle Ambition du HPI (degré auquel la personne se montre compétitive, assume des responsabilités de leader et est énergétique; Hogan & Hogan, 1992) ainsi qu’avec l’échelle Réalisation du PRF (indiquant le besoin de performance et de la recherche de dépassement personnel; Jackson, 1999).

2 L’anxiété est évaluée dans le HPI (Hogan & Hogan, 1992) par la dimension d’Ajustement où l’apparence de calme et l’acceptation de soi sont questionnées. L’échelle Anxiété du JPI-R de Jackson (1994) réfère quant à elle à la tendance naturelle à facilement s’inquiéter et appréhender le futur, ce qui rejoint la conceptualisation de l’anxiété dans l’étude de Carver & Glass (1976)

3 Le concept de sociabilité est vu dans le HPI sous la dimension Sociabilité (qui fait référence à l’appréciation et au besoin d’interagir avec autrui). On retrouve l’idée aussi dans l’échelle Exhibition du PRF (Jackson, 1999), qui relève la tendance à aimer être le centre d’attention. Dans le JPI-R, l’échelle Sociabilité indique la tendance à s’entourer, à apprécier les activités de groupe et à être actif socialement (Jackson, 1992).

(25)

18

ainsi qu’entre l’échelle de perspicacité et celle d’anxiété. Il n’existerait pas de liens entre les échelles de Conscience de soi privée et la sociabilité ou le besoin de performance. Afin d’évaluer les relations entre un concept abstrait comme la conscience de soi privée et les traits d’ouverture à l’expérience, d’amabilité et d’anxiété et aussi afin d’observer le rôle de la conscience de soi dans le développement professionnel, il est essentiel de comprendre le fondement derrière l’élaboration et l’utilisation de l’outil de mesure. Il est alors pertinent de préciser les bases psychométriques derrière l’évaluation d’une mesure. C’est ce sur quoi porte le chapitre suivant.

(26)

19 Chapitre 3 : Considérations psychométriques

La réflexivité et la perspicacité sont des construits étudiés dans la littérature pour leur apport dans divers phénomènes, tel dans le succès d’activités de développement personnel. Un construit est la représentation abstraite d’un ensemble de caractéristiques reliées, telles des attitudes ou des aspects de la personnalité par exemple (Hubley & Zumbo, 2013). Un construit est présumé exister puisqu’il module un phénomène observable, tel un comportement (Hubley & Zumbo, 2013). Afin d’apporter ce caractère observable au construit, des outils de mesures sont élaborés. De différentes natures, ils regroupent généralement un ensemble de questions représentant des manifestations concrètes et observables du supposé construit. Les tests et les questionnaires en sont des exemples. Lorsqu’un outil de mesure est élaboré, c’est un processus rigoureux et appuyé scientifiquement qui doit être suivi. Ceci, afin d’assurer des résultats les plus fiables, valides, sensibles et généralisables possible (Hubley & Zumbo, 2013).

L’usage de tels outils psychométriques dans le secteur des ressources humaines, principalement en sélection et en développement de personnel, est répandu. L’interprétation appropriée de mesures requiert bien souvent une expertise en psychométrie acquise via des programmes de formation en orientation ou en psychologie. Ce sont les concepteurs des tests qui qualifient le niveau de connaissances requis afin d’interpréter les résultats (Geisinger et al., 2013). Enfin, peu importe le niveau de connaissances requis pour l’interprétation des résultats, il revient également à l’utilisateur de s’assurer que la qualité et la pertinence de l’outil qu’il désire employer sont adéquates dans le contexte (Ordre des conseillers et conseillères d’orientation du Québec [OCCOQ], 2010).

Afin de faire la démonstration de la qualité de leur instrument, tout concepteur d’outil doit généralement fournir des preuves des qualités psychométriques de son instrument et spécifier le contexte précis dans lequel il peut être utilisé. Ainsi, des indices de fidélité et de validité des scores, la clientèle visée et l’usage défini devraient être des informations accessibles pour les utilisateurs. Selon l’American Psychological Association (APA) un conseiller d’orientation utilisant un instrument de mesure qui ne présente pas de bonnes qualités psychométriques, qui n’est pas utilisé auprès de la clientèle cible ou qui n’est pas

(27)

20

utilisé dans le contexte prescrit par le concepteur, détient une part de responsabilité dans la mauvaise interprétation des scores qui sont obtenus (Geisinger et al., 2013; OCCOQ, 2010).

Dans le cadre du présent mémoire, l’Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité (Grant et al., 2002) est utilisée. Puisque l’adaptation en langue française a été réalisée antérieurement au mémoire par des experts en psychologie d’une firme de consultation, les considérations liées à la traduction ne seront pas étayées. Toutefois, l’adaptation francophone n’a fait l’objet d’aucune étude de validation officielle. C’est donc ce qui sera fait dans le cadre de ce mémoire. Aussi, l’outil original a été élaboré dans un contexte de psychologie sociale et la version adaptée est utilisée dans un contexte de psychologie organisationnelle, plus spécifiquement dans le cadre d’évaluations en développement ayant pour but d’identifier le potentiel et les cibles de développement d’un employé.

Lorsqu’un outil est initialement conçu, certaines démonstrations de sa validité doivent être apportées par les concepteurs, tels que le proposent les standards de l’APA (Geisinger et al., 2013). Lorsqu’il est utilisé dans un contexte différent de celui auquel il est initialement destiné, comme c’est le cas ici, les caractéristiques énoncées par le concepteur ne s’appliquent pas nécessairement au nouveau contexte. Il est du devoir du professionnel de justifier la pertinence de l’outil pour le contexte qu’il vise. Les preuves de validité manquantes doivent être apportées afin de s’assurer que l’instrument de mesure est utilisé adéquatement. Bien qu’il n’existe pas de consensus à savoir combien d’indicateurs sont nécessaires pour statuer de la validité d’un instrument, plus le nombre d’indicateurs est élevé, plus la preuve sera solide (Borsa, Damásio, & Bandeira, 2012). Il en est de même si ce sont le nombre d’items ou l’échelle de réponse de l’instrument qui a été modifié. Bien qu’un outil adapté ait pu être jugé comme représentatif de la version originale par des experts de par la qualité de sa traduction, les preuves de la qualité des propriétés psychométriques originales ne peuvent s’appliquer au nouveau contexte d’utilisation. C’est pourquoi de nouvelles preuves de validité, accompagnées bien souvent de normes spécifiques à la nouvelle clientèle doivent être rapportées (Borsa et al., 2012; Geisinger et al., 2013).

Devant cette situation, l’APA propose aux utilisateurs de questionner quatre éléments lorsqu’ils font face à un nouvel instrument de mesure (Geisinger et al., 2013). Ces éléments sont les scores, le public cible, les stratégies d’élaboration et l’utilisation. Selon le contexte

(28)

21

et la théorie sous-jacente, plusieurs construits différents peuvent avoir des noms similaires. Ainsi, il est primordial de confirmer que l’outil identifié représente bien le construit permettant d’obtenir l’information désirée. Le public cible réfère aux caractéristiques de la population à laquelle l’instrument de mesure s’adresse. L’utilisateur d’un instrument de mesure doit s’assurer que l’instrument sera pertinent pour son client et que les normes sont adaptées aux répondants ciblés. Ceci permet d’assurer que les normes auxquelles sont comparés les résultats du client ont été obtenues auprès de gens qui lui ressemblent. Également, l’outil de mesure est conçu pour un certain public et donc l’interprétation des résultats qui en ressort y fait référence. Un utilisateur ne prenant pas en considération le public pour lequel l’outil est initialement conçu verra la valeur de son interprétation diminuer. Finalement, l’objectif de l’utilisation d’un instrument de mesure est le dernier élément à préciser par les utilisateurs. En ce sens que l’impact du résultat à l’outil sur l’individu peut être plus ou moins grand. Lorsque l’enjeu relié aux résultats est grand, l’utilisateur doit d’autant plus s’assurer que les qualités psychométriques, la pertinence des normes et la construction des items en lien avec le construit à l’étude soient élevées (Geisinger et al., 2013). Afin de porter un jugement pointu sur la qualité d’un outil, deux principaux éléments devraient être considérés selon l’APA : la fidélité et la validité.

La fidélité représente la cohérence d’un instrument et sa capacité à reproduire les résultats de façon stable dans le temps, entre deux versions ou entre différents observateurs. Plus des facteurs externes ont une influence sur les résultats, moins l’indice de fidélité est élevé. Ceci est expliqué, sous l’angle de la théorie classique des tests, par le fait que des erreurs aléatoires, soit des erreurs causées par les éléments imprévisibles qui ont un impact sur la variable à l’étude, viennent mettre de l’ombre sur le résultat réellement obtenu par le candidat ou ce que l’on appelle le score vrai (Hogan, 2012). Cet indice de fidélité est traduit par le degré auquel le score observé est influencé par des erreurs aléatoires. En d’autres mots, des scores fidèles se rapprochent du véritable score de la personne. Un instrument de mesure dont les résultats sont peu fidèles peut mener à des interprétations erronées de la performance du candidat. Dans le secteur de l’orientation en contexte de développement, des scores non fidèles peuvent se traduire, par exemple, par une mauvaise identification des cibles de développement de l’individu, un plan de développement décalé ou un positionnement

(29)

22

inadéquat du potentiel de la personne, ce qui pourrait résulter en une promotion ou à un changement de rôle inapproprié dans l’organisation.

Les indices de fidélités peuvent se mesurer de diverses manières, dépendamment des éléments contextuels entourant l’instrument de mesure. L’homogénéité ou la consistance interne permettent d’observer la cohérence qu’ont les items d’un instrument entre eux chez un même individu, ce qui signifie que tous les items mesurent bien le même construit. Notamment, l’homogénéité peut être calculée à l’aide d’un coefficient alpha de Cronbach qui permet d’établir jusqu’à quel point l’ensemble des items sont associés entre eux. L’analyse de l’homogénéité permet également de faire une analyse fine des items. La première étape vise à étudier les moyennes et les écarts-types des réponses d’un échantillon de participants à chacun des items afin de déceler si certains choix de réponse ont été systématiquement plus choisis que d’autres. Les deuxièmes et troisièmes étapes, soit l’étude des corrélations inter-items et des corrélations inter-items-total, visent à identifier si certains inter-items sont moins liés qu’ils ne le devraient, d’une part aux autres items, et d’autre part, au score total à l’instrument. Cette technique présuppose que si un item est moins corrélé avec les autres items, il s’éloigne de la dimension mesurée et diminue le degré d’homogénéité (Geisinger et al., 2013).

La validité représente, quant à elle, la justesse de l’interprétation des résultats par rapport aux fins attendues. En d’autres mots, le construit que l’outil cherche à mesurer est-il réellement celui mesuré (Geisinger et al., 2013). Les résultats à un instrument de mesure peuvent présenter des indices de fidélités acceptables, mais si aucune preuve ne peut appuyer la validité, alors la pertinence de l’outil sera difficilement défendable. Une telle situation indiquerait que les résultats à l’instrument de mesure sont consistants, en ce sens que l’outil mesure le construit de la même façon peu importe le contexte (ou le participant). Or, le construit qui est mesuré n’est pas celui visé. Dans le contexte de ce mémoire, des indices de la validité de construit devraient être obtenus.

La validité de construit informe notamment l’utilisateur de la relation entre le construit à l’étude et la structure interne de l’instrument de mesure. Ainsi, à l’aide d’analyses factorielles, les différentes dimensions qui ressortent de l’instrument de mesure seront identifiées et il sera alors possible de regarder la correspondance entre ceux-ci et la théorie sous-jacente. Il est également pertinent de regarder les relations avec d’autres concepts

(30)

23

(Geisinger et al., 2013). Lorsque l’outil mesure effectivement le construit qu’il est supposé représenter, il devrait y avoir présence de corrélations avec des outils mesurant des concepts liés (validité convergente). Selon la même logique, un concept reconnu dans la littérature pour ne pas être lié avec le construit à l’étude ne devrait pas présenter de corrélations (validité discriminante).

Enfin, les résultats qui ressortent d’un instrument de mesure peuvent être affectés par certains biais de réponses. L’un de ceux-ci est la désirabilité sociale. Particulièrement lorsque l’évaluation a une portée importante pour l’individu qui la subit, il est possible que la personne tente de se faire valoir positivement. Cette gestion de l’impression peut être consciente ou inconsciente. Ainsi ses réponses peuvent être différentes de la façon dont il se représente réellement. Des stratégies sont alors utilisées par les concepteurs pour mesurer ce biais, notamment par l’ajout d’échelles de désirabilité sociale, comme c’est le cas par exemple dans le PRF (Jackson, 1999). Un autre biais de réponse pouvant affecter les résultats à un instrument de mesure est l’incohérence dans le style de réponse. Des réponses incohérentes peuvent suggérer une confusion dans l’autoperception, mais elles peuvent également suggérer que le répondant a répondu de façon aléatoire aux questions (Jackson, 1999). Afin d’appuyer la validité des résultats, le PRF (Jackson, 1999) et le HPI (Hogan & Hogan, 1992) intègrent une échelle de mesure observant le style de réponse.

3.1 L’Échelle de réflexivité sur soi et de perspicacité

Ces considérations psychométriques sont notoires dans la conception d’instruments de mesure et dans l’interprétation des résultats qui en découlent. De telles informations provenant des études de validation de l’ERSP (Grant et al., 2002) sont étayées dans la littérature et peuvent servir de base à l’évaluation des qualités psychométriques de l’ERSP adapté en français dans le milieu organisationnel.

D’abord, l’ERSP, conçue par Grant et al. (2012) a été élaborée pour répondre aux insatisfactions de l’Échelle de conscience de soi privée (PR-SCS) de Fenigstein et al. (1975). La PR-SCS présentait deux facteurs : la réflexivité sur soi et la conscience de soi interne. Or, la relation interfacteur est qualifiée d’instable puisque selon les études regardées, la relation entre les deux facteurs peut apparaître positive ou négative, significative ou non significative

(31)

24

(Creed & Funder, 1999; Fenigstein et al., 1975; Grant et al., 2002; Kingree & Ruback, 1996). Puisque la PR-SCS (Fenigstein et al., 1975) comportait des lacunes psychométriques, Grant et al. (2012) ont conceptualisé le construit de la conscience de soi privée autrement. En cohérence avec les travaux de Burnkrant & Page (1984) et de Trapnell & Campbell (1999), ils ont conceptualisé le construit sous trois dimensions : le besoin de réflexion, l’engagement dans la réflexion et la perspicacité. Suite aux analyses factorielles, les dimensions évoquant le besoin de réflexion et l’engagement dans la réflexion sont apparues sous le même facteur, ainsi représenté par la réflexivité sur soi (Grant et al., 2002).

Pour concevoir l’ERSP, les auteurs ont utilisé l’expertise de trois docteurs en psychologie afin de développer une trentaine de questions (10 par dimension) qui ont été jugées comme pouvant être associées à l’une ou l’autre des trois échelles par les experts (Échelle de besoin de réflexion, Échelle d’engagement dans la réflexion et Échelle de perspicacité). Les auteurs ont effectué une première analyse factorielle avec les données reçues de 260 étudiants. Suite à cette première analyse, sur les 30 items conçus, 20 items ont été retenus au total. Pour être conservé dans l’instrument, chaque item devait présenter un indice de saturation minimum (≥0,30) et n’être associé qu’à un seul facteur (exclusivité). Lorsqu’ils ne remplissaient pas ces critères, les items étaient éliminés. Les facteurs de besoin de réflexion et d’engagement dans la réflexion ne se distinguant pas dans l’analyse factorielle, ils ont été regroupés. Ainsi, seuls deux seuls facteurs sont retenus (Réflexivité sur soi et Perspicacité). Ainsi, le premier facteur (réflexivité sur soi) contient douze questions et obtient un coefficient alpha de Cronbach de 0,91. Huit items ont été retenus pour évaluer le deuxième facteur (la perspicacité), avec un alpha de Cronbach de 0,87. Dans cette même étude, Grant et al. (2002) ont également évalué le coefficient de consistance interne de chacune des sous-échelles auprès d’un échantillon de 121 étudiants. Des résultats assez différents ont alors été obtenus : 0,71 pour le facteur réflexivité sur soi et 0,82 pour l’échelle de perspicacité. L’alpha de Cronbach pour l’échelle totale n’est cependant pas présenté dans l’étude de Grant et al. (2002). Sur les deux études de validation réalisées par les auteurs de l’ERSP, un lien significatif entre les deux facteurs n’est apparu qu’une seule fois significatif (Grant et al., 2002).

(32)

25

Afin d’apporter des indices de fidélité, une étude test-retest a été menée avec un intervalle de sept semaines. Les coefficients de corrélation entre les deux passations se sont avérés satisfaisants pour les deux facteurs (r=0,77 pour réflexivité sur soi et de r=0,78 pour perspicacité). Enfin, les auteurs ont choisi d’étayer la validité convergente et de critère de l’instrument. En lien avec la PR-SCS (Fenigstein et al., 1975), des relations fortes entre le facteur de réflexivité sur soi et de conscience de soi privée ont été démontrées. Par contre la relation avec le facteur de perspicacité et la PR-SCS est ressortie modérée, mais négative. Les auteurs justifient ce résultat par les ambiguïtés qui résident dans la mesure de PR-SCS (Fenigstein et al., 1975; Grant et al., 2002). L’usage du PR-SCS comme instrument pour appuyer la validité de construit de l’ERSP n’était donc pas stratégique considérant ses faibles qualités psychométriques. Ainsi il n’existe pas vraiment de preuve de validité pour la dimension perspicacité.

Par ailleurs, d’autres études de validité de construit ont été réalisées avec l’ERSP (Grant et al., 2002). En effet, Grant et al. (2002) ont démontré que le facteur de perspicacité était positivement et modérément corrélé avec la flexibilité cognitive (la capacité à réfléchir à plusieurs concepts simultanément et à faire la transition entre ceux-ci; Scott, 1962) et l’autorégulation (Cognitive Flexibility Measure [Martin & Rubin, 1995] et Self-Control Schedule [Rosenbaum, 1980, cité dans Grant et al., 2002]). La flexibilité cognitive et la conscience de soi ont également été étudiées par Chung, Su & Su (2012) en lien avec l’attitude face au changement organisationnel. Leurs résultats indiquent que la flexibilité cognitive est liée négativement à la résistance au changement (réponses émotionnelles, cognitives et comportementales négatives face à un changement; Chung, Su et Su, 2012). En ce sens, un individu qui porterait une attention particulière et qui aurait une réponse positive face aux changements dans ses états internes pourrait être plus porté à comprendre ses émotions. Cela rejoint la définition de la perspicacité telle que conçue par Grant et al.(2002). Le lien positif et significatif entre la perspicacité et l’autorégulation va dans le même sens que le modèle d’autorégulation proposé par Grant et al. (2002). Aucune relation n’est ressortie entre la réflexivité sur soi et l’autorégulation, ce qui va à l’encontre de la proposition initiale voulant que la réflexivité sur soi fasse partie d’un processus d’autorégulation. Grant et al. (2002) ont également démontré une corrélation négative entre les deux dimensions de l’ERSP et des mesures de dépression, d’anxiété, de stress (Depression, Anxiety and Stress

Références

Documents relatifs

Je peux dire qu’il s’agit du désir d’avoir de l’espace pour des mouvements réflexifs et de se laisser affecter par le collectif dans la construction d’un espace où

Considérant que la réflexivité fait advenir le caractère expérientiel de l’expérience, et qu’elle peut être accompagnée, nos travaux de recherche nous ont amenés

Cet être-sous-la-main de l’inutilisable n’est pas encore purement et simplement privé de tout être-à-portée-de-la-main, l’outil ainsi sous-la-main n’est pas encore une

Que ce soit pour mieux connaître la réalité du métier, pour faire des liens entre les savoirs issus de la théorie et ceux issus de la pratique, pour faciliter l’insertion

b. Ceux qui ont vu cette vidéo ne peuvent peut-être pas s’empêcher de se demander comment on aurait garder un individu pareil sous clé. 2) Le cas ergatif, marqué

Reconnaître la possibilité d’un point de vue ou d’une disposition scolastique permanente et accomplie hors de ses conditions de production (donc dans l’action) conduit

Si les problèmes techniques sont bien évidemment abordés (pesée, prescription de nouvelles pratiques alimentaires et écarts au programme fixé), bien souvent les

In this paper, we propose a new method handling this problem: (i) a polynomial-time algorithm to count points in the union of a fixed number of parametric Z-polytopes of