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ARTheque - STEF - ENS Cachan | L’ingénierie concourante : un modèle en meilleure adéquation avec les processus cognitifs de conception

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Academic year: 2021

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L’ingénierie concourante :

un modèle en meilleure adéquation

avec les processus cognitif

S

de conception

Françoise Darses

Les réflexions sur la mise en œuvre de l’ingénierie concourante dans les systèmes de production peuvent bénéficier de la contribution de l’ergonomie cognitive des situations de conception. Les études développées dans ce champ se donnent pour objectif de décrire les processus mentaux de résolution des problèmes de conception. Les méthodologies s’appuient sur l’observation de l’activité de concepteurs intervenant dans divers domaines (architecture, design, informatique, ingénieries - en aéronautique, en construction navale, dans l’industrie automobile, etc. -). C’est l’analyse des traces du processus de conception (et en particulier, l’analyse des verbalisations des concepteurs et des documents produits), qui permet de faire des hypothèses sur la dynamique cognitive que suivent les concepteurs pour développer leur produit.

L’objectif de cet article est double : on veut montrer sur quels points le modèle de conception sous-tendu par l’ingénierie concourante est en bonne adéquation avec les processus cognitifs des concepteurs. Cette démonstration est étayée par les connaissances dont on dispose actuellement sur le processus mental de conception (sections 1 à 5) ; puis on souhaite mettre en évidence quelques spécificités du processus de

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conception que, de notre point de vue, les organisations actuelles en ingénierie concourante gagneraient à prendre en considération (section 6).

1. DE L’ANALYSE DU PROCESSUS DE CONCEPTION INDIVIDUELLE A L’ANALYSE DU PROCESSUS DE CONCEPTION COLLECTIVE

L’activité de conception et les processus cognitifs qui la sous-tendent commencent à être assez bien décrits1 par les psychologues et les ergonomes cogniticiens, qui poursuivent depuis une quinzaine d’années environ des recherches sur cette question. Ces recherches ont considérablement profité de l’héritage précieux des travaux, initiés en particulier par Alexander2, qui ont exploré, décrit et formalisé le processus de conception architecturale.

L’intérêt de l’ergonomie cognitive pour le processus de conception industriel est plus récent, et a pris naissance avec la nécessité de produire des outils d’assistance aux concepteurs véritablement adaptés à leur démarche cognitive. En effet, les premiers outils de CAO étaient avant tout des outils d’exécution et de mise au propre de produits réellement conçus de manière traditionnelle dans les bureaux d’étude (Lebahar, 1985 ; Whitefield, 1986). Une meilleure connaissance du processus spontané de conception s’est alors avérée indispensable pour faire évoluer ces outils vers une assistance du processus amont de conception3.

La particularité de ces études est qu’elles ont toutes été centrées sur l’analyse de l’activité d’un seul individu impliqué dans un processus de conception : on examine les démarches cognitives de l’architecte (voir note 2 pour les références), de l’ingénieur automaticien qui programme un robot (Visser, 1987 ; Visser, 1990), des informaticiens qui développent des programmes (Hoc, 1983 ; Détienne, 1990 ; Guindon, 1990a ; Rist, 1990 ; Burkhardt & Détienne, 1995), de l’ingénieur qui configure un réseau informatique (Darses, 1994), de l’ingénieur mécanicien qui réalise un nouvel outillage (Ullman et al., 1989), du designer qui dessine un élément de cockpit d’hélicoptère (Lebahar, 1996), du gestionnaire qui réalise un planning (Boufflet, 1992) ou du

1Pour des revues de la question, on pourra consulter par exemple Falzon et al (1990), Darses (1994) ou

Visser (1994).

2 On pense aux recherches d’Alexander (1964) sur les pattern, modèles fonctionnels, symboliques et

génériques de bâtiments, ainsi qu’aux travaux nombreux et féconds sur le processus architectural comme par exemple ceux de Akin (1979), Eastman (1969, 1970, 1973), Lawson (1978, 1979), Lebahar (1983), Malhotra et al (1980) ou Thomas & Carroll (1979).

3 Pour une revue de la question, on peut par exemple consulter Waern (1988), Kharrufa et al. (1988),

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planificateur qui décide de l’allocation de ressources (Descottes & Delesalle, 1986 ; Descottes & Latombe, 1985).

L’organisation de la conception de produits en ingénierie concourante diffère de la plupart de ces situations de conception individuelle au moins sur deux points essentiels :

(i) par l’envergure des projets de conception concernés, généralement importante en terme de durée et de complexité du produit à concevoir et donc du nombre d’acteurs impliqués dans le processus et de la diversité des corps de métiers représentés (Giard & Midler, 1993 ; Midler 1993 ; Moisdon & Weill, 1994) ;

(ii) par les dimensions psycho-sociales des collectifs de conception, ceux-ci répondant à des lois de fonctionnement propres aux groupes auxquelles un concepteur isolé n’est pas soumis : degré de confiance dans les autres, reconnaissance de la compétence personnelle, épanouissement individuel procuré par les relations professionnelles, répartition des pouvoirs, etc.

Nous n’aborderons pas ici l’analyse de ces derniers facteurs car ils nous paraissent relever, tant du point de vue des méthodes d’investigation que des concepts d’analyse, de disciplines connexes à l’ergonomie telles que la sociologie, la psychosociologie ou la psycho-dynamique du travail. En revanche, l’ergonomie est directement interpellée pour analyser l’impact de l’organisation en ingénierie concourante sur les pratiques opératives du collectif de conception.

Force est de constater cependant que le processus collectif de conception reste encore peu exploré par l’ergonomie. Certes, des réflexions approfondies ont été menées sur la conduite des projets de conception, d’une part dans l’objectif de définir les apports et les modalités de l’intervention ergonomique lors de la conception de situations de travail (Daniellou, 1988 ; Daniellou, 1992 ; Daniellou & Garrigou, 1991 ; Theureau & Pinsky, 1984) et d’autre part dans le but de préciser la mise en œuvre de démarches de conception participatives (Sen, 1988 ; Noro & Imada, 1991 ; Garrigou, 1992 ; Maugey, 1996 ; Damodaran, 1996). D’autres études d’obédience ergonomique sur la conception de produits abordent surtout les dimensions socio-techniques et organisationnelles du problème (Bucciarelli, 1987 ; Wallace & Hales, 1987).

L’importance des aspects collectifs du travail a été mentionnée dans les études ergonomiques dès les années 60, mais ils n’ont été que récemment pris comme objet central de recherche (Leplat, 1993) : ce n’est que depuis les années 90 que s’est précisée, en relation avec les évolutions

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socio-techniques, la portée cruciale de ce thème pour la compréhension du travail et que fleurissent les recherches ergonomiques sur les activités collectives4. L’étude de P. Béguin relatée dans cet ouvrage est à notre connaissance la seule recherche ergonomique cherchant à élucider les mécanismes du processus collectif de conception (voir aussi Béguin 1994).

Une façon de contribuer aux réflexions sur l’activité collective de conception est d’utiliser en outils de prospective les connaissances dont on dispose sur le processus cognitif individuel de conception. Il nous paraît en effet raisonnablement plausible d’étendre aux situations collectives certaines des caractéristiques cognitives de l’activité individuelle de conception. Un autre argument qu’on peut également invoquer est qu’un concepteur impliqué dans une situation d’ingénierie concourante doit indubitablement pouvoir développer sa pratique de conception au sein du collectif sans que pèsent sur lui des contraintes structurelles telles qu’en seraient affectées ses activités mentales spontanées : il faut donc connaître et tenir compte des démarches individuelles de conception lors de la mise en place de nouvelles organisations du travail.

Bien que soient connues les limites du modèle séquentiel classique de conception (en termes de coûts et de délais, et en particulier pour les produits innovants), essentiellement attribuées aux trop fortes démarcations entre divisions fonctionnelles et filières métiers qui freinent la communication entre concepteurs (Moisdon & Weill, 1994 ; Zarifian, 1996), on gagnera à identifier plus précisément ce qui caractérise le processus de design. C’est, de notre point de vue, le meilleur moyen d’esquisser des pistes pour une mise en œuvre optimale de l’ingénierie concourante.

2. QUI EST CONCEPTEUR ?

L’ergonomie cognitive n’identifie pas les activités de conception en rapport à une fonction sociale ou un statut. Ce sont les caractéristiques formelles de certaines situations professionnelles qui permettent de qualifier l’activité de conception : elles résultent de l’interaction entre les caractéristiques de la tâche à réaliser (tâche prescrite par les donneurs

4 En témoignent les nombreuses récentes publications (voir par exemple, Rasmussen et al 1991,

Robertson et al. 1990, Six & Vaxevanoglou 1993, Terssac & Friedberg 1996), l'émergence de champs de recherche dédiés au travail collectif comme le Computer Supported Cooperative Work (CSCW) ou l'Intelligence Artificielle Distribuée (IAD), animés par des conférences internationales et par l'édition de revues ou de numéros spéciaux consacrés spécifiquement au travail collectif.

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d’ordres) et les caractéristiques de l’espace-problème mentalement construit et exploré par les concepteurs (c’est cet espace-problème qui fonde l’activité réellement développée).

Ces caractéristiques sont maintenant bien décrites et faciles à identifier (voir par exemple Newell & Simon, 1972 ; Goel & Pirolli, 1989 ; Dasgupta, 1989 ; Darses, 1994 ; Falzon 1995) : le problème à traiter est incomplètement défini, ce qui entraîne une prise en compte progressive de données nouvelles ; les solutions à un problème de conception ne sont pas uniques (contrairement à un problème de diagnostic, par exemple) mais font partie d’un ensemble de solutions acceptables (il est impensable de pouvoir comparer toutes les solutions alternatives pour en extraire la « bonne » solution) ; on peut appliquer des méthodologies de conception, mais il n’y a pas de procédures guidant pas à pas le développement de la solution ; la définition du problème n’est pas préalable à l’élaboration de la solution : l’un et l’autre sont construits simultanément et en interaction ; pendant la formulation des spécifications, l’évaluation des solutions est difficile à réaliser autrement que par un travail mental de simulation cognitive, sur la base de simulations graphiques ou de maquettes rendant mal parfois la réalité ; l’évaluation du produit est donc différée aux phases de développement, les éventuelles remises en question de choix de conception pouvant s’avérer fort coûteuses.

Si l’on s’appuie sur la description que l’on vient de donner des activités de conception, on voit que nombreux sont les partenaires du processus de conception qui peuvent être désignés comme des concepteurs : par exemple, l’opérateur de fabrication qui modifie un outillage dans l’objectif de réduire un temps de démontage ou d’améliorer la qualité est un concepteur, comme l’est aussi le chef d’atelier qui établit de nouvelles procédures opératoires.

Cette acception des situations de conception élargit le point de vue courant, hérité du taylorisme, qui limite le substantif « conception » aux activités prescriptives des phases les plus conceptuelles5 du processus menées par des professionnels hautement qualifiés qui ne participent pas au développement même du produit, et encore moins à sa fabrication. Ce point de vue novateur sur le statut des concepteurs trouve un écho favorable dans l’organisation en ingénierie concourante, dont les principes conduisent naturellement à considérer comme concepteurs des partenaires qui étaient traditionnellement considérés comme les exécutants de prescriptions édictées en haut lieu : on pense en particulier

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aux acteurs de la phase de développement (méthodes et fabrication), mais aussi aux sous-traitants, jusqu’aux usagers eux-mêmes6.

3. PREGNANCE DE LA SOLUTION DANS LE PROCESSUS MENTAL DE CONCEPTION

Dans un légitime souci de rationalisation et de structuration du processus de conception, l’approche classique de conception met l’accent sur l’expression des fonctionnalités du produit en amont de la spécification technique des besoins. À ce niveau, il est demandé aux concepteurs de définir de façon relativement abstraite les grandes fonctions et les contraintes que le futur produit doit satisfaire, en se gardant bien d’évoquer des solutions précises. La mise en œuvre de méthodologies telles que l’analyse de la valeur et l’analyse fonctionnelle, par exemple, est préconisée à ce stade.

Ce double objectif - formulation des fonctions et des contraintes associées - est un des intérêts de l’approche fonctionnelle, mais comporte un implicite paradoxe qui contrecarre la démarche de conception spontanée des concepteurs. Les analyses cognitives mettent en effet en évidence que l’évocation de traits concrets de solution s’impose aux concepteurs, quand bien même ceux-ci seraient tenus par les méthodologies de la conduite du projet de produire uniquement des descriptions fonctionnelles de cet objet.

Un exemple de cette naturelle et irrépressible propension à « penser solution tout en pensant fonction » est donnée par Nicolas (1996) qui rapporte une réunion au cours de laquelle des ingénieurs d’une grande firme automobile, chargés de l’analyse fonctionnelle de mise à niveau d’un autoradio, débattent théoriquement des

fonctionnalités du produit (dans

l’exemple ci-dessous, la disponibilité du Traffic Annoucement) mais ne peuvent, dans la réalité, s’empêcher d’évoquer des concrétisations très précises de solutions (en italique dans le texte de l’exemple) :

Concepteur :

« Dans l’autoradio, par exemple, on a la perte d’info, de la disponibilité du TA, donc du Traffic Annoucement ».

(...)

Concepteur : « Et à ce

moment-là, on peut avoir un TA… plus de TA possible ou quelque chose je ne sais pas un… soit du

texte en français ou quelque chose d’un peu plus succinct qui va remplacer le nom de la s t a t i o n c o m p l è t e m e n t .

Éventuellement avec un

clignotement avec le nom de la station, ce qui fait qu’il y a une

certaine exhaustivité vis-à-vis de ce qui était affiché avant ».

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C’est aussi ce qui a été observé dans le domaine de l’architecture (Darke, 1984 ; Lebahar, 1983) ainsi que dans le domaine de la programmation informatique (Guindon, 1990b), en ingénierie aérospatiale (Visser, 1993) ou en ingénierie mécanique (Ullman et al., 1988) : très vite est choisie une idée de solution, une conjecture sur le produit futur, qui va servir de base pour la construction de la solution. La démarche spontanée des concepteurs est donc naturellement orientée vers l’énoncé de solutions, tandis que les méthodologies et l’organisation même des processus linéaires et séquentiels de conception contraignent à des descriptions fonctionnelles des solutions.

Deux faits cognitifs concourent à cette propension à « penser solution », et expliquent ce paradoxe dans lequel se trouvent pris les concepteurs. Le premier est le recours (implicite ou explicite) à des solutions développées dans le passé, analogues au problème en cours : les concepteurs s’appuient sur ces solutions connues dont ils transfèrent des caractéristiques très contextualisées à la situation traitée (Visser, 1992 ; Burkhardt & Détienne, 1995). L’évocation d’une solution précise est donc inévitable.

Le second fait cognitif est lié à la formulation des contraintes qui, on l’a dit plus haut, fait partie intégrante des phases de définitions fonctionnelles. Or les contraintes ont cette particularité (Darses, 1995) de susciter d’emblée l’expression de traits de solutions à un niveau de description précis et détaillé. On a montré (Darses, 1994) que les concepteurs, même aguerris, ont tendance à satisfaire immédiatement les contraintes formulées et par conséquent, à se compromettre rapidement sur des idées de solution qui satisfont les quelques contraintes initialement sélectionnées (Guindon, 1990b ; Darke, 1984). L’extrait de dialogue donné précédemment est exemplaire de ce processus. Ainsi, les concepteurs se trouvent face à une injonction paradoxale : tenus d’énoncer seulement les fonctions des produits, ils sont cependant irrémédiablement conduits à évoquer, du fait même de la formulation des contraintes associées aux fonctions, des idées de solution…

L’organisation en ingénierie concourante tend à dissiper le paradoxe que l’on vient de décrire. En effet, la participation en amont de filières traditionnellement en charge de développements concrets de la solution (méthodes, fabrication), tout comme l’implication précoce des sous-traitants chargés de manufacturer les composants, impliquent de développer le produit en prenant explicitement en considération les niveaux concrets des solutions. Une formulation plus exhaustive des contraintes peut être faite et les dépendances entre paramètres de la

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solution peuvent être exprimées, explorées et gérées. La complexité de l’ingénierie concourante tient évidemment dans les modalités d’intégration des contraintes : on traitera de cette question dans les sections 5 et 6.

4. CONSTRUCTION OPPORTUNISTE DE LA SOLUTION

Parce que les problèmes de conception sont larges et complexes, c’est-à-dire non circonscrits à des problèmes locaux, les projets de conception vont être structurés en sous-systèmes quasi-indépendants qui seront traités au travers des spécifications techniques de besoins. Charge alors aux divers sous-groupes de concepteurs de mener à bien la conception de tel ou tel sous-système. Cette structuration du process est généralement pensée dans un mouvement descendant, par décomposition d’un but général en sous-buts associés, comme le montre la figure 1.

planification descendante Sous-but interaction But Sous-but solution détaillée

Figure 1 : Organisation du processus de conception par une planification descendante

On sait bien sûr que ces sous-buts interfèrent du fait des contraintes qui lient les différents objets techniques. Si certaines de ces contraintes sont identifiées au cours de la planification descendante de la conception, nombreuses sont celles qui n’émergent que tardivement. Dans les organisations classiques de projet, ces tardives découvertes d’interactions entre sous-buts sont gérées comme des perturbations qu’on laisse aux concepteurs le soin de réguler informellement, tout comme on leur laisse le soin de trouver les compromis adéquats sans pour autant bouleverser

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l’organigramme de l’allocation des tâches et rendre l’organisation prescrite obsolète. C’est ce que rapportent par exemple Moisdon & Weill (1994), qui examinent le travail des techniciens d’une entreprise automobile : les auteurs notent que c’est au travers des communications informelles inter-métiers (qui sont fréquentes, spontanées et coopératives) que les multiples problèmes techniques émergeant chaque jour sont réglés, par compromis, et sans recours à des décisions hiérarchiques. Or la mise en évidence des contraintes inter-buts contribue activement à structurer le problème : c’est en effet en identifiant ces contraintes qu’on peut être amené à redéfinir des buts inadéquats, à regrouper sous un même objectif des actions connexes ou à reconstruire une planification inappropriée en réorganisant les sous-problèmes à traiter : le concepteur découvre de nouveaux buts plus généraux à poursuivre alors qu’il est en train d’examiner des contraintes ou des données de bas niveau. On parle d’organisation opportuniste du développement de la solution afin de rendre compte de cette démarche. C’est par l’observation directe et l’analyse de protocoles que les ergonomes ont pu mettre ce fait en évidence car la plupart du temps, les concepteurs eux-mêmes n’ont pas conscience de ce mouvement ascendant de structuration de leur problème, et si on s’en tient à des seuls interviews, on constate qu’ils rationalisent leur mode de conception (voir Visser, 1987 pour un exemple).

Les analyses cognitives du processus de conception spontané ont montré (voir par exemple Visser, 1990 ; Bisseret et al., 1988) que le développement d’une solution est systématiquement organisé par une articulation entre des mouvements descendants et des mouvements ascendants (voir figure 2) : tout en s’appuyant sur des séquences strictement planifiées de buts et de sous-buts, les concepteurs tirent parti des données issues des situations pour construire un plan d’action.

Cette organisation opportuniste n’est pas reconnue par les managers comme inhérente à la résolution des problèmes de conception, qui encouragent toujours une planification descendante du processus. Généralement considérée comme une déviance à la rationalité du processus et une déstabilisation potentielle de la maîtrise du projet, la planification ascendante est subie plutôt que sciemment intégrée au modèle du processus de conception. L’organisation en ingénierie concourante conduit inévitablement à infléchir considérablement une vue strictement descendante du processus : la participation précoce de partenaires de la conception qui interviennent aux niveaux détaillés de la solution favorise grandement l’émergence de processus ascendants ; le rapprochement des divisions fonctionnelles et la coexistence de plusieurs

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filières métiers incitent à repérer les interactions entre sous-problèmes et conduisent donc à structurer les problèmes dans un mouvement ascendant. Même si on sait la complexité d’un développement opportuniste des solutions7, on pense que les structures organisationnelles de l’ingénierie concourante sont plus propices à intégrer cette caractéristique inhérente à l’activité cognitive des concepteurs.

planification ascendante planification descendante Sous-but But Sous-but solution détaillée Sous-but Sous-but

Figure 2 : Organisation du processus de conception et développement de la solution par une articulation entre démarche descendante et démarche

ascendante de planification

5. ÉLABORATION DE LA SOLUTION PAR SIMULTANEITE DES POINTS DE VUE SUR L’OBJET

Les modèles classiques du processus de conception confondent trois axes de développement des solutions : l’axe du cycle de vie d’un projet, concrétisé par les différentes phases de conception, l’axe du raffinement des solutions qui croît au fur et à mesure que le temps du projet avance, et

7 Cette complexité est bien connue par les chercheurs en intelligence artificielle et en psychologie qui

ont implémenté dans des systèmes à base de connaissances ce raisonnement opportuniste œuvrant dans les tâches de résolution de problème en s’appuyant l’architecture du tableau noir (modèle « blackboard »). Voir par exemple les travaux de Hayes-Roth & Hayes-Roth (1979), et ceux de Lassri & Maitre (1989) ou de Monceyron (1991). Pour une présentation du modèle, voir Nii (1986a&b) ou Darses (1994).

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l’axe abstrait-concret qui décrit l’objet de conception. Cette confusion inhérente au modèle classique de la conception est en contradiction avec les processus cognitifs de conception, comme on va le montrer ici.

La conduite d’un projet de conception suit des étapes officiellement définies (études préliminaires, études de base, études de détails, réalisation, essais et démarrage), ce qui permet évidemment de poser des jalons contractuels indispensables entre les partenaires du projet. Cet « encadrement » de la pratique de conception a des conséquences méthodologiques importantes sur le modèle même de développement des solutions : il promeut un modèle du processus « en cascade » dont les implications sont nombreuses. Une des premières implications de ce modèle est qu’il établit formellement la séparation entre l’analyse des problèmes (phases amont) de la prise de décision et de l’action (phases aval). Or, comme on l’a vu dans la section précédente ainsi qu’en section 2, la résolution d’un problème de conception ne peut, par essence, s’accomplir en deux phases consécutives d’analyse de problème puis de résolution du problème : parvenir à définir le problème, c’est avoir trouvé la solution. Ceci a été montré très tôt par tous les théoriciens de la résolution de problèmes de conception (Reitman, 1964 ; Simon, 1973 ; Greeno, 1978 ; Cross, 1986).

S’ajoute une précédence naturelle du raffinement des solutions : plus on avance dans le temps, plus la solution est détaillée. Cet axe de raffinement se confond de fait avec l’axe du phasage du projet (figure 3). En quelque sorte, à chaque phase correspond une solution qui diffère de la précédente par son niveau de détail.

solution 2 solution 3 solution 1

conduite de projet : phasage

raffinement de la solution : détail

étude de faisabilité étude fonctionnelle spécification technique de besoins développement fabrication

Figure 3 : Phasage du projet et raffinement de la solution : deux axes superposés

À ces deux axes se rajoute une troisième dimension qui engendre une confusion de notre point de vue dommageable. En effet, les modèles classiques du processus de conception se fondent sur l’hypothèse qu’une solution de conception se développe au travers de transformations

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linéaires et séquentielles des données opérées sur un axe abstrait-concret (figure 4). solution 2 spécifications structurelles solution 3 spécifications physiques solution 1 spécifications fonctionnelles

transformation des points de vue : abstrait-concret

Figure 4 : Modèle transformationnel du processus de conception

L’idée schématique est que les spécifications fonctionnelles et conceptuelles du produit (réalisées au travers de l’étude de besoin et de faisabilité et de l’étude fonctionnelle), doivent être déclinées en spécifications structurelles (au cours de la phase de spécifications techniques de besoins) pour aboutir enfin (en phase de développement) en spécifications physiques de l’objet. Par exemple, on définira les propriétés fonctionnelles d’un nouveau véhicule en précisant qu’il sera une voiture urbaine, acheté plutôt comme un second véhicule, etc. ; puis on étudiera les spécifications structurelles (l’habitacle aura tel volume, la puissance du moteur sera de n cm3) définitions qui seront traduites en spécifications physiques et concrètes du produit (le moteur sera fait de tel et tel matériau et sera composé de telle et telle pièces, etc.).

Le principe sous-jacent est que tout objet technique peut être décrit sous divers « points de vue » (on parle aussi de niveaux d’abstraction), chaque point de vue offrant une description de l’objet certes partiale, mais néanmoins complète (Rasmussen, 1979). Par exemple (Hoc, 1987), on peut entièrement décrire une machine à laver en terme de fonctions physiques (circuit de chauffage, entraînement du tambour, fonctionnement de la pompe, etc.). Mais on peut aussi choisir de la décrire dans sa fonction conceptuelle (fonctions de lavage et essorage, fonctions de chauffage et de contrôle de la température de l’eau, etc). Cette description des objets techniques en niveaux d’abstraction est au cœur des modèles transformationnels de conception de l’objet, dans lesquels la conception est vue comme une transformation rationnelle et organisée d’un point de vue en un autre. De nombreux systèmes d’aide à la conception sont fondés sur des modèles transformationnels (Freeman & Newell, 1971 ; Korf, 1980 ; Tsang et al, 1990).

Suivant ce principe, chaque niveau d’abstraction produit donc une solution à part entière, validée à la fin de chaque étape (modèle en

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cascade). La précédence entre les niveaux d’abstraction des solutions implique donc une séquentialité dans l’intervention des acteurs du processus. De fait, chaque acteur a la responsabilité de traiter un niveau d’abstraction spécifique et unique.

On voit donc qu’on aboutit à un modèle du processus de conception où sont confondues trois dimensions du développement des solutions8 : (i) l’organisation contractuelle du projet, (ii) la définition de plus en plus détaillée, complète et précisée de la solution, et (iii) le mode de transformation des données, vu comme un cheminement unilatéral sur un axe abstrait-concret. Mais surtout, ce modèle produit une discrétisation des solutions en complète dépendance avec le phasage contractuel du projet :

SOLUTION 2 SOLUTION 3 SOLUTION 1

conduite de projet : phasage raffinement de la solution : détail

étude de faisabilité étude fonctionnelle spécification technique de besoins développement fabrication spécifications structurelles spécifications physiques spécifications fonctionnelles

transformation des points de vue : abstrait-concret les trois

axes sont confondus

Figure 5 : Modèle classique du processus de conception : les trois axes de développement des solutions sont confondus

Or les études cognitives ont montré que le processus spontané de développement d’une solution de conception ne se conforme pas aux relations de précédence décrites ci-dessus. Comment le concepteur opère-t-il, cognitivement parlant, les changements de représentation entre points de vue sur l’objet ? Développe-t-il des solutions successives, chacune relevant d’un niveau d’abstraction chaque fois différent comme le suggère le modèle classique ?

On a montré (Darses, 1994) que les changements de représentation ne s’opèrent pas de façon linéaire et séquentielle sur l’axe abstrait-concret. Dès la phase de formulation du cahier des charges et tout au long des phases amont du processus sont énoncées des spécifications qui décrivent

8 Une interprétation similaire est proposée par Morand & Nicolle (1993) pour l'analyse de la

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déjà des points de vue très concrets et « achevés » de la solution : le choix d’un matériau précis, l’intégration d’un composant pré-défini, la surface d’un espace dans un édifice, l’application d’une cote normalisée, etc. Il en est de même pour certaines spécifications structurelles qui peuvent être définies d’emblée ou en tout cas, très tôt dans le processus. On constate donc que le concepteur opère en mêlant spontanément les points de vue sur l’objet, en entremêlant les différents niveaux d’abstraction. Cette manière de faire s’explique en particulier par les faits cognitifs qu’on a décrits dans les sections précédentes : prégnance de la solution et résolution opportuniste du problème.

spécifications structurelles spécifications physiques SOLUTION 1 spécifications fonctionnelles spécifications structurelles spécifications physiques SOLUTION 2 spécifications fonctionnelles SOLUTION N spécif. fonction--nelles spécif. structu--relles spécif. physiques

points de vue : abstrait-concret

raffinement de la solution : détailconduite de projet : phasage

Figure 6 : Modèle d’intégration des points de vue dans le processus de conception

Un tel fonctionnement cognitif conduit à modifier le modèle du processus de conception, et amène à différencier les trois axes précédemment confondus. On voit alors qu’une solution de conception ne s’applique pas à un seul et unique niveau d’abstraction, mais est composée de spécifications de tout niveau : fonctionnelles, structurelles aussi bien que physiques. Cet état de solution, peu développé au début du processus, est progressivement complété au décours du temps sans nécessaire précédence d’un point de vue sur un autre, jusqu’à être parfaitement défini à l’intérieur de chacun des points de vue. Comme le montre la figure 6 (Darses & Falzon, 1997), la nature d’une solution de conception, à un temps t et à une phase p du processus, change considérablement par rapport au modèle classique, du fait de l’intégration de différents niveaux d’abstraction dans chaque état de solution.

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Ce modèle9 est en meilleure adéquation avec la réalité du processus cognitif des concepteurs. En outre, et c’est son intérêt pour notre propos, il rend bien compte du processus concourant de conception : simultanéité et mise en confrontation des points de vue lors du développement de solutions (du fait de l’éclatement des filières métiers), dissociation entre le phasage contractuel et la nature de solution produite au profit de solutions intégrant différents niveaux d’abstraction, et convergence de points de vue sur l’objet du fait de la diversité des acteurs impliqués. Revisiter le modèle classique du processus de conception, comme nous tentons de le faire ici, est un enjeu qui dépasse bien la simple conceptualisation de modalités organisationnelles. En effet, l’établissement d’un nouveau modèle met en lumière la nécessité d’investir des paradigmes nouveaux pour la conduite de projet (Zarifian, 1996). On voit, au travers du modèle proposé, que le paradigme de la coopération est la question centrale des situations d’ingénierie concourante : l’enjeu est de mettre en place des structures organisationnelles appropriées pour que tous les points de vue des acteurs aient la possibilité de converger et de concourir au développement de chaque niveau de solution. Dans la section suivante, nous proposons quelques pistes qui pourraient contribuer à intégrer le paradigme de la coopération dans le processus de conception.

6. ENCOURAGER L’EMERGENCE, LA CONFRONTATION ET L’INTEGRATION DES POINTS DE VUE DES ACTEURS : COMMENT FAVORISER LA CO-CONCEPTION ?

Quelles modalités de coopération doit-on promouvoir pour favoriser l’émergence, la confrontation et l’intégration des divers points de vue sur l’objet à concevoir10 ? Comment faire converger les points de vue techniques portés par les acteurs selon leur filière métier, points de vue dissemblables selon leur fonction - manager, chef de projet, technicien, sous-traitant, usager -, points de vue asynchrones du fait que les temps du projet sont différents pour chacun ? Quels principes organisationnels encourager ? Nous proposons deux pistes de réflexion, à partir de travaux récemment développés en ergonomie cognitive11 : assister en particulier

9 Ce modèle est proche en certains points des modèles en spirale (Boehm, 1986).

10 Ce que nous dénommons ici « point de vue » (en référence à la section 5 de cet article, et pour mettre

l'accent sur le fait que, dans le cours du projet de conception, c'est bien un point de vue sur l’objet qui est mis en débat) est évidemment sous-tendu par ce qu'on appelle généralement les savoirs.

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les situations de co-conception et développer les activités méta-fonctionnelles.

6.1. Co-concevoir : une situation de synchronisation cognitive

Deux types de situations de coopération, inégalement délicates à accompagner, sont à l’œuvre dans les organisations en ingénierie concourante : les situations de conception distribuée et les situations de

co-conception (Darses & Falzon, 1996).

Dans les situations de conception distribuée, les acteurs du process sont simultanément - mais non conjointement - engagés à coopérer ; ils accomplissent des tâches préalablement allouées et poursuivent donc des buts (ou du moins des sous-buts) qui leur sont propres, bien qu’ils aient évidemment pour objectif de participer le plus efficacement possible à la résolution collective du problème. Comme l’analyse Zarifian (1996, page 15), « cette version faible de la coopération repose sur une meilleure coordination des actes de travail (...) ; [il faut] faire en sorte que les actions soient mieux liées entre elles. (...) On maintient un travail séparé et divisé (...) mais on vise à améliorer les passages de relais et les dialogues entre ces travaux séparés ».

Ce sont donc des problèmes de synchronisation opératoire qui se trouvent au cœur de ces situations (Amalberti & al., 1992 ; Falzon, 1994a ; Darses & Falzon, 1996) : il faut gérer l’interdépendance temporelle entre les buts et les tâches des opérateurs, et synchroniser le déclenchement, l’arrêt, la simultanéité, le séquencement, le rythme des actions à réaliser entre les partenaires de l’activité collective. La dimension fondamentale est donc ici le temps : pas nécessairement le temps objectif (c’est-à-dire celui de l’horloge), mais le temps du système (par exemple, entreprendre l’action quand la machine affichera telle valeur) ou le temps du partenaire (par exemple, entreprendre l’action quand le partenaire commencera telle action).

Assister cette forme « faible » de coopération se déclinera donc plutôt comme la recherche de meilleurs moyens méthodologiques de coordination (Schmidt & Simone, 1996). Ces phases de conception distribuée préservent le principe de séparation des tâches et des responsabilités des organisations classiques des projets de conception (Zarifian, op. cit.), et ne posent pas de difficultés conceptuelles majeures. Là où l’affaire se corse, c’est que ces phases de conception distribuée sont entrecoupées de réunions d’avancement du projet, au cours desquelles sont confrontés, débattus et rendus cohérents les travaux de

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chaque équipe (Barthes, 1995). Ces phases de mise en commun, qu’on appellera phases de co-conception, engendrent une forte coopération dont l’assistance est délicate.

C’est surtout dans ces phases de co-conception qu’achoppe l’organisation en ingénierie concourante. Là, les partenaires de la conception développent la solution conjointement : ils partagent un but identique et contribuent à son atteinte grâce à leurs compétences spécifiques, ceci avec des contraintes très fortes de coopération directe pour garantir le succès de la résolution du problème. Il s’agit pour eux de construire ce que Zarifian dénomme « un espace d’intersubjectivité », ou ce que Terssac & Chabaud (1990) appellent le « référentiel opératif commun ». Cet espace s’élabore par des processus de synchronisation cognitive (Amalberti & al., 1992 ; Falzon, 1994a ; Darses & Falzon, 1996). Quels sont-ils ? Nos études (Darses & Falzon, 1994 ; Darses & Falzon, 1996 ; Darses & Sauvagnac, 1997a & b) dont nous ne rappelons ici que les résultats principaux donnent les premières indications de la façon dont cette synchronisation se réalise.

Une des premières caractéristiques de la synchronisation cognitive repose sur la dynamique même de la synchronisation : celle-ci est à l’initiative et à la charge de tous les acteurs, et non le résultat d’un effort de cohérence produit par le seul chef de projet comme on l’imagine souvent. Du point de vue organisationnel, on doit donc encourager tous les acteurs à émettre des propositions, indépendamment de leur fonction ou de leur niveau d’expertise. On a noté que, dans la mesure où les relations entre personnes sont confiantes, c’est très spontanément que participent aux débats tous les acteurs du process, quand bien même diffère leur niveau d’expertise. Comme on le verra plus loin, une telle dynamique de synchronisation cognitive est tout à fait intéressante à exploiter pour favoriser l’innovation technologique.

Les concepteurs doivent se synchroniser sur deux points : les objets qu’ils traitent et les actions qui sont opérées sur ces objets. On pense souvent que les objets traités par les collectifs de concepteurs sont surtout des

propositions de solutions : mais en réalité, l’évaluation des solutions tient

une très grande place dans les débats. Ces évaluations de solutions ne sont pas seulement critiques : elles sont aussi l’expression d’enrichissements ou d’alternatives constructives, élargissant ainsi les

divers champs d’application de la solution considérée.

Les évaluations de solutions donnent surtout l’opportunité aux partenaires de justifier les contraintes qu’ils ont privilégiées et d’argumenter leurs points de vue ; ce faisant, on favorise la formulation et la décompilation

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de critères de choix. Des savoirs implicites (à la fois des savoirs d’usage

et des savoirs généraux sur les objets techniques) sont ainsi explicités et transmis aux acteurs du processus. On a noté (Darses & Sauvagnac, 1997a) que ces situations de « décompilation » des contraintes sont

idéales pour faire le lien entre les points de vue fonctionnels sur la

solution (points de vue qui ne sont pas toujours bien saisis par tous les participants) et les points de vue plus techniques, structurels, qui sont beaucoup plus accessibles aux acteurs de la conception, et donc, plus aisément débattus. À notre avis, c’est ici que se réalise la construction des savoirs intermédiaires et c’est un des moyens de promouvoir les apprentissages croisés (Hatchuel, 1994).

Le travail collectif de synchronisation cognitive porte également sur la définition des buts à poursuivre : il faut bien sûr s’assurer que les buts d’action à court terme sont en accord, et il faut aussi faire en sorte que les hypothèses de travail et les objectifs à long terme soient connus de tous. Avoir connaissance d’éléments du problème qui paraissent d’évidence n’est pas une question banale : il est fréquent de constater à quel point les acteurs d’un processus de conception sont peu informés des objectifs des uns et des autres. C’est pourquoi il est nécessaire de systématiser la communication au travers de structures organisationnelles appropriées.

6.2. Instaurer les activités méta-fonctionnelles

De nouveaux principes d’organisation doivent être érigés pour faire face à deux limites auxquelles est actuellement confrontée la pratique actuelle de l’ingénierie concourante (Moisdon & Weill) : les projets ne peuvent être les seuls lieux de construction des connaissances, et il faut prendre en charge la dynamique des connaissances en dehors des projets ; (ii) les contraintes de délais du projet et de garantie de réussite se heurtent aux potentialités d’innovation : les acteurs ont tendance à limiter les incertitudes que comporteraient des solutions innovantes et à adopter une attitude prudente en n’utilisant que les solutions déjà éprouvées.

Il faut donc mettre en place des structures pour gérer les connaissances, capitaliser les savoirs et promouvoir l’innovation12. Sur la base de travaux développés en ergonomie cognitive (Falzon, 1994b ; Karsenty, 1995 ; Falzon & al, 1996 ; Leblond, 1996 ; Falzon & al, 1997), nous pensons que ces structures doivent s’appuyer sur les qualités des activités méta-fonctionnelles spontanément développées par dans les activités professionnelles.

12 Sur cette question, voir également dans cet ouvrage l’article de P. Leclair « Le problème de

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Les activités méta-fonctionnelles (Falzon, 1994b) sont des activités durant lesquelles les professionnels prennent du recul par rapport à une production technique immédiate pour examiner leur propre travail. Ce faisant, ils se donnent pour but de construire des savoirs et des outils (matériels ou cognitifs) qui seront destinés à « faciliter l’exécution de la tâche ou à améliorer la performance » (Falzon, op. cit., pp.3). Les activités méta-fonctionnelles ne répondent donc pas à des besoins d’action immédiats, mais, s’appuyant sur l’analyse du travail passé, anticipent les conditions d’exécution du travail futur.

Ce que les observations ergonomiques rapportent, c’est que ces activités méta-fonctionnelles sont à l’œuvre dans tous les domaines professionnels, et qu’elles sont spontanément développées, souvent de façon individuelle. Si elles sont encore fréquemment rejetées par la hiérarchie qui y voit l’occasion d’un débordement de ses prescriptions (voir des exemples dans l’article de P. Falzon, op. cit.), elles sont néanmoins de plus en plus instaurées par les organisations sous la forme de groupes de travail, parce qu’elles sont le seul moyen de gérer, construire et mettre à jour les savoirs techniques (voir des exemples dans Falzon & al, 1997).

Pour ce qui concerne les situations de co-conception, il nous paraît incontournable de développer les activités méta-fonctionnelles pour dépasser les limites décrites au début de cette section. C’est l’instauration et l’encouragement de ces activités dans les entreprises qui fera évoluer les compétences des acteurs, au travers du partage des savoirs et de la construction des savoirs intermédiaires sur les objets ; c’est leur mise en œuvre qui permettra la traçabilité des décisions de conception (Moran & Carroll 1996), outil précieux de capitalisation des savoirs et de gestion à long terme des projets ; c’est au travers des activités méta-fonctionnelles que pourra être géré le conflit prudence/innovation, en faisant en sorte que les propositions nouvelles issues des groupes projet puissent être retenues, développées, évaluées et testées indépendamment de la conduite du projet lui-même. J.C. Moisdon & B. Weill13 rapportent l’expérience très positive de la mise en place dans une entreprise automobile d’une « filière d’animation structurée » dont les missions étaient, outre celles que nous venons de citer, la veille technologique, l’analyse de la concurrence, la standardisation, l’optimisation du produit et du process et l’introduction dans le projet d’innovations validées. Les auteurs notent que cette structure a bien sûr permis de faire progresser les connaissances et les apprentissages croisés, mais qu’elle a également favorisé

13 Voir l’article « Dynamique des savoirs dans les activités de conception : faut-il compléter la gestion

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l’intervention de certains types d’expertise, étendu et consolidé le réseau de relations entre les concepteurs, tout en donnant l’opportunité que soient traités des problèmes jusque-là délaissés faute de temps.

7. CONCLUSION

Du point de vue de l’ergonomie cognitive, un des atouts de l’ingénierie concourante est de proposer un modèle organisationnel plus valide au regard des processus cognitifs qui sous-tendent les activités de conception : en particulier, la prégnance de la solution chez les concepteurs, la construction opportuniste de la solution et l’élaboration des solutions par simultanéité des points de vue sur l’objet. On ne pourra donc que se réjouir de voir reconnus et intégrés par les organisations les modes opératoires naturels des concepteurs, trop souvent désavoués dans les entreprises.

Néanmoins, si la mise en place de l’ingénierie concourante favorise la prise en compte du facteur humain dans l’entreprise, on ne peut nier que, avec cette reconnaissance, croît aussi la complexité des tentatives de rationalisation, formalisation et assistance des pratiques de conception. C’est le défi lancé à l’ingénierie concourante : inventer de nouvelles formes de travail. Deux dimensions nous semblent capitales à intégrer à part entière dans le processus de conception : placer la coopération au centre du modèle des projets de conception et développer les activités méta-fonctionnelles au sein des logiques projet.

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