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STATUT JURIDIQUE ET REPRESENTATION ARTISTIQUE DE L'ANIMAL

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-01470876

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01470876 Preprint submitted on 17 Feb 2017

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STATUT JURIDIQUE ET REPRESENTATION

ARTISTIQUE DE L’ANIMAL

Patricia Signorile

To cite this version:

Patricia Signorile. STATUT JURIDIQUE ET REPRESENTATION ARTISTIQUE DE L’ANIMAL. 2014. �hal-01470876�

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Présentation Patricia SIGNORILE

STATUT JURIDIQUE ET REPRESENTATION DE L’ANIMAL DANS L’UNIVERS ARTISTIQUE

« S’il n’existait point d’animaux la nature de l’homme serait encore plus incompréhensible. »

Georges Louis Leclerc de Buffon, Discours sur la nature

des animaux, 1753

La célèbre formule d’Aristote, « l’homme est un animal politique », renvoie à plusieurs interrogations qui tentent toutes de définir la nature de l’homme et de son essence, Léonard de Vinci appelle de ses vœux « le jour (…) où les personnes

comme (lui) regarderont le meurtre des (…) animaux comme ils regardent aujourd’hui le meurtre des êtres humains. »1

Le souci éthique n’est donc pas contemporain de notre époque, cependant celle-ci se distingue par une interrogation relative au statut juridique et à la question de la représentation de l’animal dans les pratiques artistiques contemporaines. L’évolution du statut juridique de l’animal est le signe évident d’un changement des mentalités.

Les sociétés post-industrialisées ont instauré à l’égard de l’animal des rapports inédits de violence à grande échelle (élevage intensif, expérimentation animale, extinction des espèces sauvages). Cette violence envers les animaux suscite de nombreux débats et intéresse toutes les disciplines, de la littérature en passant par la philosophie, l’art, la politique, le droit.

Les animaux ont des droits2. C’est d’ailleurs, le titre de la thèse que défend Tom Regan dans sa contribution à la réflexion morale contemporaine. En effet, selon cet auteur si l’exploitation des hommes par les hommes est prohibée, l’exploitation des animaux sous toutes ses formes doit l’être tout autant.

1 Les animaux aussi ont des droits, Boris Cyrulnik, Elizabeth de Fontenay, Peter Singer, Ed. Seuil, mai 2013

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L’utilisation iconographique des animaux est très diversifiée, variable en fonction des époques et des lieux. Mais, elle doit toujours son omniprésence à une forte charge symbolique, source de fascination, d’effroi, de mimétisme anthropocentrique qui fait dire à Elias Canetti dans Le territoire de l’homme qu’à « chaque fois qu’on regarde un animal avec attention, on a le sentiment qu’un

homme y est caché et qu’il se paie notre tête ».

L’animal est vraisemblablement le premier sujet de l’histoire de l’art. De fait, l’animal est représenté sur de multiples supports (os, mosaïque, métal, pierre, parchemin, etc.) et ce probablement depuis les origines de l’humanité, comme le montrent les peintures murales de la grotte Nerja (Andalousie), découvertes en 1959 et qui dateraient de 42 000 ans à 43 000 ans avant notre ère.

Des divinités égyptiennes à l’art héraldique, des études d’animaux de la Renaissance italienne à la peinture du XIXe siècle (De Vinci et les chevaux ou Delacroix et les fauves), en passant par Chardin, Soutine, Dali et d’autres encore, c’est essentiellement l’art contemporain qui marque une rupture dans l’utilisation de l’image de l’animal. Les artistes ne se contentent plus de le représenter comme par le passé. L’animal devient un matériau ou un acteur central de l’œuvre. Du perroquet empaillé juché sur un perchoir de Joan Miro3 en passant par Thomas Grünfeld qui greffe jusqu’à trois espèces dans sa série des « Misfits » (Gummis) ou Xiao Yu qui a fait scandale au Musée de Berne en 2001 avec son œuvre « Rua » exposant une tête de fœtus humain, munie d’yeux de lapin cousus, greffée sur un corps de mouette, ces artistes projettent des fantasmes en même temps que les signes de potentielles dérives. Paradoxalement, ils les produisent en voulant les dénoncer, - même si cette mise en scène de l’animal permet avant tout de montrer les travers des sociétés modernes -, comme le faisait Jean de La Fontaine grâce ses fables.

Les cochons qu’élève Wim Delvoye en Chine sont tatoués vivants sous anesthésie alors qu’ils ne sont que des porcelets. Puis, ils sont tués pour devenir objet ou support, ils sont naturalisés, leur peau est tannée. L’animal exposé devient ainsi objet d’art, à la fois support et surface graphique. L’artiste, par ces actions, cherche à ouvrir le débat sur la question de l’exploitation animale.

Déjà dans les années 90, Damien Hirst avec le Brit Art produit une œuvre très controversée. Il s’agit d’une vache et de son veau coupés dans le sens de la longueur et séparés en deux dans deux aquariums distincts. Le visiteur peut circuler et observer les parties internes. Une autre installation montre les morceaux d’une

3 En 1936.

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vache découpée en rondelles et exposée dans douze blocs de plexiglas verticaux. Quant à l’artiste Olek Kulik, en 2008, il décide durant une performance de renoncer à sa condition humaine pour devenir chien. Il se balade nu à quatre pattes au bout d’une laisse, allant jusqu’à déféquer dans un musée et mordre un visiteur.

L’animal, est donc une tendance forte des performances de ces dernières années, l’animal est devenu un agent de l’œuvre parfois un support, on le retrouve jusque dans les pièces de théâtre, le cinéma, la danse contemporaine, bien sûr la littérature et la liste n’est pas exhaustive... Déjà en 1970, l’artiste belge Marcel Broodthaers enregistrait un dialogue avec son chat. Dans les années 2000, la vidéo de Céleste Boursier-Mougenot montre une dizaine d’oiseaux qui deviennent des musiciens sur des guitares électriques transformées en perchoirs. En 2005, dans un registre tout à fait différent, l’installation « Flying Rats » de Kader Attia, provoque un scandale pendant la Biennale d’art contemporain de Lyon, avec cent-cinquante pigeons dans une vitrine, qui dévorent des silhouettes d’enfants conçues en pâte alimentaire pour oiseaux.

Par ailleurs, acteur régulier de spots publicitaires, l’animal est également présent sur les cimaises des musées. En 2011, les Arts décoratifs consacraient une exposition dédiée à l’animal dans le mobilier, la mode ou les bijoux, suivi de « Bêtes off » à la Conciergerie. En 2012, le Grand Palais a présenté « Beauté animale, de Dürer à Jeff Koons ». L’exploration des différences et des similitudes entre l’homme et l’animal, le sauvage, le monstre et la créature fantastique, mais aussi l’histoire des « zoos humains », ont été présentées en 2011-2012 dans une exposition au musée du Quai Branly : « Exhibitions, l’invention du sauvage ». Si, l’animal possède des qualités plastiques, graphiques et symboliques indéniables, il permet aussi la mise à distance des faits de société. Cependant, le débat passionnel, de son utilisation en tant qu’objet ou image pollue les œuvres pour laisser place au scandale et à la réaction du public. En définitive, la figure animale amène à s’interroger sur les limites de l’art contemporain en même temps qu’elle pose le problème du statut de l’animal.

Le statut de l’animal : ni homme ni objet répond Georges Chapouthier dans l’un de

ses ouvrage qui porte d’ailleurs ce titre. L’Occident a mis près de 2000 ans à admettre que l’animal n’est ni une sorte d’homme, tel le Renard du Roman (Goethe, « Roman du Renard »), ni un objet, comme le suggère Descartes, mais une créature douée de sensibilité.

Dans le champ philosophique, l'Histoire des animaux d'Aristote a influencé les philosophies romaine et hellénique. Au XVIIe siècle l’animal est assimilé selon la

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théorie cartésienne à un automate insensible. Au XVIIIème, La Mettrie en propose une version radicalisée, puisqu’il étend le principe de l’animal-machine de Descartes à l’homme qui n’est qu’une sorte d’animal supérieur, lui-même assimilé à la machine (L’Homme machine, 1748). Cependant, le siècle voit s’effondrer cette vision mécaniste sous l’impulsion de la philosophie empiriste de John Locke pour qui toutes nos idées proviennent de l’expérience, puis de celle de l’observation des animaux avec l’Histoire naturelle de Buffon pour qui « s’il n’existait point

d’animaux la nature de l’homme serait encore plus incompréhensible ».

D’autre part, pour les philosophes des Lumières, la lecture mécaniste de la vie animale devient absurde. Le caractère finalisé du comportement animal, que les

Lettres sur les animaux de Georges Leroy décrivent, les conduit à accorder aux

animaux non seulement la sensation mais encore des facultés de jugement, de pensée et de représentation. Comme tente de le démontrer Condillac dans le Traité

des animaux (1755), l’homme ne différe de l’animal que par son aptitude au

langage.

La question morale prend, sous la plume de Jean-Jacques Rousseau, un tour beaucoup plus marqué grâce au concept de pitié, cette capacité à s’identifier à tout être souffrant, qu’il soit humain ou animal. En plaçant la sensibilité à la source des droits naturels, Rousseau inclut tous les êtres pouvant souffrir dans la communauté morale. Cette disposition à la compassion engage, en effet, l’homme à ne « jamais (faire) du mal à un autre homme ni même à aucun être sensible, excepté dans le cas légitime où sa conservation se trouvant intéressée, il est obligé de se donner la préférence à lui-même », note-t-il dans le Discours sur l’origine et les fondements

de l’inégalité parmi les hommes (1755). La réflexion du philosophe Jeremy

Bentham dans l’Introduction aux principes de la morale et de la législation (1789) marque un tournant à propos des animaux en déplaçant le problème : « La question n’est pas : "Peuvent-ils raisonner ?" ni : "Peuvent-ils parler ?" mais : "Peuvent-ils souffrir ? ». Les animaux ressentent le plaisir et la douleur. Le fait de leur infliger des souffrances n’est pas un acte moralement neutre.

Le concept de pitié nourrit également la réflexion de Arthur Schopenhauer. Dans

Le Fondement de la morale (1841), un examen des fondements de la morale

kantienne bornée aux seuls êtres de raison le convainc de l’illégitimité de cette voie. Fidèle à l’idée rousseauiste selon laquelle « si je suis obligé de ne faire aucun mal à mon semblable, c’est moins parce qu’il est un être raisonnable que parce qu’il est un être sensible », A. Schopenhauer substitue le critère de la sensibilité à celui de la raison.

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Dans Jacques Derrida – Politique et éthique de l’animalité, Patrick Llored interroge le sens et les conséquences des analyses que Derrida consacre à l’animal. Si l’intérêt de Derrida s’enracine dans un rejet de l’anthropocentrisme et de l’occidentalocentrisme, Celles-ci renvoient aussi au fait qu’un certain rapport à l’animal est bien une condition de la pensée et de la construction de la des subjectivités occidentales, à travers l’expression de formes, de concepts qui élaborent l’identité humaine. Ainsi, la question de l’Animal est fondamentale pour tout système qui voudrait changer d’échelle de valeurs ou simplement se questionner sur celles-ci. L’identité n’est pas un concept simple mais une construction historique, culturelle, intellectuelle, et celle-ci n’a cessé de s’inventer à partir du rapport à l’Animal.

D’ailleurs, le philosophe Michel Serres suggère d’intervenir au niveau du contrat. Sur le modèle du contrat social, il prône l’invention d’un contrat naturel par lequel seraient fixées les limites de l’action de l’humain sur la Nature et tous les êtres qu’elle contient, le sens des droits et des devoirs. En outre, il propose d’« oublier » le mot environnement. Ce terme « suppose que nous autres hommes siégeons au

centre d’un système de choses qui gravitent autour de nous, nombrils de l’univers, maître et possesseur de la nature. Cela rappelle une ère révolue, où la Terre, placée au centre du monde, reflétait notre narcissisme. […] Il faut bien placer les choses au centre et nous à leur périphérie ou, mieux encore, elles partout et nous dans leur sein, comme des parasites… Le parasite – notre statut actuel – (…)»

Dans ce contexte de crise idéologique, il semble que la conception anthropologique pose des questions de fond et que l’éducation par l’éthique représenterait un commencement d’action associé à des lois correctement conçues et appliquées. En effet, depuis 1804, date de promulgation du Code civil, notre société a encore évolué. La protection des animaux, souvent associée voire confondue avec la question des droits des animaux, prend racine au 19e siècle. Dans le Code civil napoléonien, les animaux sont assimilés à des biens meubles : « Sont meubles par leur nature les animaux et les corps qui peuvent se transporter d’un lieu à un autre, soit qu’ils se meuvent par eux-mêmes, soit qu’ils ne puissent changer de place que par l’effet d’une force étrangère » (article 528). La première loi de protection en Europe a été promulguée en 1822 en Angleterre (Act for the Prevention of Cruel

and Improper Treatment of Cattle). La France suit avec la loi Grammont de 1850

punissant les mauvais traitements commis publiquement envers les animaux domestiques, l’Allemagne avec une loi équivalente en 1871. Cependant, ces lois avaient pour objectif de protéger plutôt la sensibilité humaine, ne pas choquer les témoins involontaires de formes de cruauté à l’encontre des animaux. Il faut

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attendre 1976 pour que la France modifie dans le code rural le statut de l’animal en le reconnaissant comme « être sensible » – interdisant de ce fait toute forme de mauvais traitement et d’utilisation abusive – et 1999 pour qu’une nouvelle loi reconnaisse dans le code civil que les animaux, tout en restant des « biens », ne sont pas des « choses » au même titre que les objets inanimés (loi n° 99-5 du 6 janvier 1999). Le Conseil de l’Europe puis l’Union européenne se sont successivement penchés sur la question de la protection des animaux.

En France, l’Assemblée nationale a adopté dans la soirée du jeudi 30 octobre 2014 en 2ème lecture une disposition qui reconnaît aux animaux la qualité symbolique d’« êtres vivants doués de sensibilité ». Cette disposition précise néanmoins que « Sous réserve des lois qui les protègent, les animaux sont soumis au régime des

biens corporels », seuls les animaux domestiques sont concernés par l’évolution de

la loi. Sur le fond cela ne change donc rien. La mesure revêt surtout une portée symbolique puisque la qualification juridique de l’animal est toujours la même. Il s’agit d’un bien corporel ou d’un bien meuble. En réalité, le législateur a avec cette disposition, seulement conféré à l’animal une définition juridique dans le Code civil. Cette nouvelle disposition viendra ainsi compléter l’arsenal législatif en la matière puisque le Code rural dispose à l’article L214-1 que « Tout animal étant un

être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce ». Le Code pénal protège également

l’animal et prévoit un volet répressif. Les sanctions sont envisagées à l’article 521-1. « Un acte de cruauté envers un animal domestique, ou apprivoisé, ou tenu en captivité, est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende ». Est ce que l’acte de cruauté englobe la notion de manquement à des devoirs moraux ou matériels ? Qu’est ce que le manquement ? Quel est le tribunal auquel se référer selon la nature du manquement ? Si l’animal est sujet de sa vie au même titre que l’homme, a-t-il droit au respect moral dû à toute personne ? Qu’en est-il du statut de l’animal et de l’utilisation de son image ou de son être vivant ou mort dans les pratiques artistiques contemporaines ?

Pour répondre à ces questions et d’autres encore, Philippe MOURON juriste et Serge SCOTTO romancier, maître du célèbre teckel Saucisse, croiseront leurs regards et confronteront leur savoir et leur expérience sur la question animale et sur les fondements juridiques actuels qui gravitent autour des diverses pratiques artistiques et qui l’utilisent, directement ou indirectement.

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