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L'intervention psychosociale en art-thérapieh[ressource électronique] : un outil de médiation du lien conjugal en contexte de maladie d'Alzheimer

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Academic year: 2021

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© Nancy Couture, 2019

L’intervention psychosociale en art-thérapie : un outil

de médiation du lien conjugal en contexte de maladie

d’Alzheimer

Thèse

Nancy Couture

Doctorat en service social

Philosophiæ doctor (Ph. D.)

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L’intervention psychosociale en art-thérapie : un

outil de médiation du lien conjugal en contexte de

maladie d’Alzheimer

Thèse

Nancy Couture

Sous la direction de :

Sophie Éthier, directrice de recherche

Patrick Villeneuve, codirecteur de recherche

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RÉSUMÉ

La maladie d’Alzheimer affecte un nombre grandissant de personnes au Québec et ailleurs dans le monde. Les impacts de la maladie sur les personnes qui en sont atteintes et sur leurs proches sont nombreux et les couples qui y sont confrontés rencontrent des défis qui leur sont spécifiques. Le conjoint se voit investi d’un rôle d’aidant qu’il endosse « naturellement ». Ainsi, l’union passe d’un rapport conjugal à une relation aidant-aidé. Les identités conjugale et individuelles sont donc menacées par l’arrivée de la maladie.

Or, l’offre de services publics tient peu compte des réalités conjugales et s’adresse essentiellement aux individus. Pourtant, le bonheur est lié à la satisfaction conjugale et les bénéfices psychosociaux que procure la vie en couple sont plus grands que les coûts qui lui sont associés.

C’est dans ce contexte que ce projet de recherche doctorale a été élaboré. Il vise d’abord à concevoir et à documenter une intervention psychosociale en art-thérapie auprès des couples touchés par la maladie d’Alzheimer. Puis, dans un deuxième temps, il cherche à saisir en profondeur l’expérience des couples qui ont bénéficié d’une telle intervention. Finalement, le projet souhaite porter un regard réflexif sur une pratique d’intervention qui allie deux identités professionnelles; le travail social et l’art-thérapie.

Les cinq couples de participants ont été recrutés par le biais d’organismes communautaires qui s’adressent aux aînés. Une rencontre pré-intervention a d’abord eu lieu. Puis, l’intervention, inspirée de l’approche par le processus en art-thérapie, s’est déroulée au domicile des couples et s’est échelonnée sur une période de 10 semaines. Pendant les rencontres d’une durée de 60 à 120 minutes, les couples étaient invités à créer, parfois individuellement, parfois conjointement. Un rapport détaillé de chaque séance a été rédigé, constituant ainsi des récits des démarches vécues par les couples. Tous les couples ont également été conviés à tenir un journal de bord entre les séances. Une entrevue post-intervention a ensuite permis de recueillir le vécu et les perceptions des couples sur leur expérience. Le contenu de cette dernière entrevue réalisée avec chaque couple a été enregistré et retranscrit pour l’analyse. En somme, plus de 80 heures d’intervention et de rencontres ont été réalisées auprès des couples. À ce corpus de données s’ajoutent le contenu des journaux

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de bord complétés hebdomadairement par trois des couples participants ainsi que plus de 90 œuvres créées par les couples tout au long des séances. Finalement, un groupe de pairs a partagé sa compréhension des expériences vécues par les couples et contribué à l’analyse. Les échanges avec ce groupe ont aussi été enregistrés et retranscrits. Toutes ces données ont été analysées selon la méthode d’analyse par questionnement analytique développée par Paillé et Mucchielli (2012).

Les conclusions suggèrent que l’art-thérapie est une approche d’intervention favorable à la consolidation des unions conjugales qui font face à la maladie d’Alzheimer. Certains couples ont exprimé avoir ressenti du plaisir, s’être rapprochés, avoir développé une sensibilité à la réalité de l’autre et avoir pu donner un sens à leur situation. La recherche permet de soumettre des hypothèses sur les modalités optimales de l’art-thérapie auprès de cette population ; elle suggère notamment de maintenir un outil, journal de bord ou autre, qui permet aux couples de s’exprimer entre les rencontres. Quelques pièges à éviter ont aussi été identifiés. Par exemple, certains conjoints parlent de leur proche devant lui. L’intervenant a intérêt à prévoir des mécanismes pour éviter que cela se produise; une rencontre individuelle avec chaque partenaire avant le début de la démarche conjugale serait une solution à envisager.

La recherche a permis aussi d’identifier huit fonctions à l’expression artistique dans un contexte d’intervention psychosociale en art-thérapie : ludique, apaisante, expressive, libératrice, stimulante, révélatrice, identitaire et transformatrice.

De plus, la recherche suggère que l’expression artistique est un outil de médiation du lien conjugal qui est affecté par la maladie d’Alzheimer et ce, à plusieurs niveaux. Bien qu’elle facilite la gestion des conflits, la médiation dépasse le rôle de l’arbitrage pour devenir un outil qui permet d’aller à la rencontre de soi, de l’autre, d’un nous qui est re-solidarisé face à la maladie.

Finalement, le regard réflexif porté sur la double identité professionnelle de l’intervenante-chercheure, travailleuse sociale et art-thérapeute, s’ouvre sur la perspective d’une identité globale transcendante : celle d’une intervenante.

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ABSTRACT

Alzheimer's disease touches a growing number of people in Quebec and around the world. Impacts of the disease on people affected and on their loved ones are numerous. Couples confronted with the disease also face specific challenges. The spouse becomes invested in a role of caregiver endorsed "naturally". Thus, the union goes from a marital relationship to a caregiver-patient relationship. Marital and individual identities are therefore threatened by the arrival of the disease.

Yet, public services take very little account of marital realities and aim primarily at individuals. However, happiness is linked to marital satisfaction, and the psychosocial benefits of living in a relationship are greater than the costs associated with it.

It is in this context that this doctoral research has been conducted. It aims in the first place at designing and documenting a psychosocial intervention in art therapy for couples affected by Alzheimer's disease. It then seeks to capture in depth the experience of the couples who benefited from such an intervention. Finally, the project wants to reflect on a practice of intervention that combines two professional identities; social work and art therapy.

The five participating couples were recruited through community-based organizations that serve seniors. To start, a pre-intervention meeting was held. Then, the intervention, inspired by the process approach in art therapy, took place at the couples' homes and was spread out over a period of 10 weeks. During the 60 to 120 minutes meetings, couples were invited to create; sometimes individually, sometimes together. A detailed report of each session was compiled, thus representing the stories of each couple's approach. All couples were also invited to keep a logbook between sessions. A post-intervention interview then collected the experiences and perceptions of each couple. The content of this last interview was recorded and transcribed for analysis. In total, more than 80 hours of intervention and meetings were done with the couples. We can add to this corpus of data the contents of the diaries completed weekly by three of the participating couples, as well as more than 90 works of art created throughout the sessions. Finally, a peer group shared their understanding of the experiences lived by the couples and contributed to the analysis. Exchanges with this peer group have

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also been recorded and transcribed. All this data was analyzed according to the analysis method of Paillé and Mucchielli (2012).

The findings suggest that art therapy is a type of intervention which is helpful in strengthening the marital unions for people who face Alzheimer's disease. Some couples expressed that they found pleasure in the process, got closer, developed a sensitivity to the reality of the other, and made sense of their situation. The research allows for theory proposals about optimal methods of art therapy with this population; it suggests among other things the use of a logbook, or any other type of diary, which allows couples to express themselves between meetings. Some pitfalls to avoid were also identified. For example, some spouses talk about their loved ones in front of them. The facilitator should then provide means to prevent this from happening; an individual meeting with each partner before the beginning of the process would be a solution to consider.

The research also helped identify eight functions of the artistic expression in a context of psychosocial intervention in art therapy: playful, soothing, expressive, liberating, stimulating, revealing, identity affirming and transformative.

In addition, research suggests that artistic expression, on several levels, is a mediating tool for people affected by Alzheimer's disease, helping their marital bond. Although it facilitates the management of conflicts, mediation goes beyond the role of arbitration to become a tool that allows us to meet the self, to meet the other, and an "us" that is re-united in the face of the disease.

Finally, the reflection on the dual professional identity of the researcher, social worker and art therapist opens up to the perspective of a transcendent global identity: that of a practitioner.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ... III ABSTRACT ... V LISTE DES TABLEAUX ... X LISTE DES FIGURES ... XI LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS ... XIII REMERCIEMENTS ... XV AVANT-PROPOS ... XVIII

INTRODUCTION GÉNÉRALE ... 1

CHAPITRE 1 : POSITION DU PROBLÈME ET BUTS DE LA RECHERCHE ... 4

1.1 VIVRE AVEC LA MALADIE D’ALZHEIMER ... 4

1.1.1 La maladie... 5

1.1.2 Alzheimer et conjugalité ... 8

1.2 INTERVENIR EN CONTEXTE DE CONJUGALITÉ ET D’ALZHEIMER.DEUX DOMAINES D’EXPERTISE : LE TRAVAIL SOCIAL ET L’ART-THÉRAPIE. ... 13

1.2.1 Les principes fondateurs du travail social ... 13

1.2.2 Le travail social gérontologique ... 14

1.2.3 Le travail social auprès des couples ... 17

1.2.4 Travail social, conjugalité et gérontologie : à la croisée des chemins ... 19

1.2.5 L’art-thérapie : l’histoire de sa naissance ... 21

1.2.6 Enjeux identitaires de l’art-thérapie ... 23

1.3 BUTS ET PERTINENCE DE LA RECHERCHE ... 25

CHAPITRE 2 : ÉTAT DES CONNAISSANCES SUR L’INTERVENTION AUPRÈS DES COUPLES CONFRONTÉS À LA MALADIE ... 29

2.1 RECENSION DES ÉCRITS SUR L’INTERVENTION PSYCHOSOCIALE AUPRÈS DE COUPLES CONFRONTÉS À LA MALADIE ... 29

2.1.1 Intervention psychosociale auprès de couples faisant face au cancer ou autres maladies ... 30

2.1.2 Intervention psychosociale auprès de couples faisant face à la maladie d’Alzheimer ... 33

2.2 RECENSION DES ÉCRITS SUR L’EXPRESSION ARTISTIQUE ET LES PERSONNES ÂGÉES ... 40

2.3 RECENSION DES ÉCRITS SUR L’ART-THÉRAPIE ET LA MALADIE D’ALZHEIMER ... 41

2.4 ÉLÉMENTS À RETENIR POUR L’INTERVENTION ... 51

CHAPITRE 3 : CADRE THÉORIQUE... 53

3.1 LA THÉORIE SYSTÉMIQUE ... 53

3.2 LE CONSTRUCTIVISME ET L’INTERACTIONNISME SYMBOLIQUE ... 57

3.3 LA GESTALT-THÉRAPIE ... 60

3.4 L’ART ET SES FONCTIONS ... 64

3.5 SYNTHÈSE DES MODÈLES THÉORIQUES ... 67

3.5 L'INTERVENTION FAISANT L'OBJET DE CETTE RECHERCHE ET SON MODÈLE LOGIQUE ... 70

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4.1 POSTURE DE LA CHERCHEURE ET CONSIDÉRATIONS ÉPISTÉMOLOGIQUES DE LA

MÉTHODE... 81

4.2 L’ÉTUDE DE CAS ... 85

4.3 DEVIS DE RECHERCHE... 88

4.3.1 Les couples participants ... 88

4.3.2 Le groupe de pairs ... 89

4.3.3 Sources de données ... 90

4.3.4 L’analyse des données ... 92

CHAPITRE 5 : RÉSULTATS DE L’INTERVENTION ... 96

5.1 LES RÉSULTATS DE L’INTERVENTION AUPRÈS DES COUPLES... 96

5.1.1 Le premier couple : Thérèse et François ... 97

5.1.2 Le deuxième couple : Colette et Jean ... 134

5.1.3 Le troisième couple : Martine et Jocelyn ... 149

5.1.4 Le quatrième couple : Marie et Daniel ... 165

5.1.5 Le cinquième couple : Jacqueline et Gérald ... 190

5.2 COMPTE-RENDU DE LA RENCONTRE D’ANALYSE AVEC LE GROUPE DE PAIRS ... 223

5.2.1 Une expérience au caractère humain ... 224

5.2.2 Des impacts observés à plusieurs niveaux ... 225

5.2.3 L’art-thérapie comme moyen d’accéder à la dynamique relationnelle du couple ... 227

5.2.4 Le travail social et son intérêt pour le couple : une approche systémique ... 228

5.2.5 Les questionnements soulevés par la démarche : des défis et des obstacles à considérer ... 229

5.2.6 À retenir de l’expérience... 231

5.3 L’EXPÉRIENCE DE L’INTERVENANTE-CHERCHEURE ... 233

5.3.1 Une expérience sensible ... 234

5.3.2 Une expérience source de connaissances ... 235

5.3.3 D’abord art-thérapeute ou travailleuse sociale? ... 236

5.3.4 Des questionnements ... 237

CHAPITRE 6 : DISCUSSION ... 239

6.1 PREMIER BUT DE LA RECHERCHE :CONCEVOIR ET DOCUMENTER UNE INTERVENTION EN ART -THÉRAPIE AUPRÈS DE COUPLES DONT L’UN DES PARTENAIRES EST ATTEINT DE LA MALADIE D’ALZHEIMER ... 240

6.1.1 L’intervention psychosociale en art-thérapie... 240

6.1.2 Les défis rencontrés ... 249

6.1.3 Recommandations et suggestions ... 252

6.2 DEUXIÈME BUT DE LA RECHERCHE :COMPRENDRE CE QUE VIVENT LES COUPLES CONFRONTÉS À LA MALADIE D’ALZHEIMER LORSQU’ILS BÉNÉFICIENT D’UNE INTERVENTION PSYCHOSOCIALE EN ART -THÉRAPIE. ... 254

6.2.1 L’expérience vécue par les couples ... 255

6.2.2 Les effets de l’intervention psychosociale en art-thérapie sur les couples participants ... 259

6.2.3 L’intervention psychosociale en art-thérapie comme outil de médiation des relations en jeu chez les couples dont l’un des partenaires est atteint de la maladie d’Alzheimer... 270

6.3 TROISIÈME BUT DE LA RECHERCHE :AMORCER UNE RÉFLEXION SUR UNE PRATIQUE D’INTERVENTION QUI ALLIE DEUX IDENTITÉS PROFESSIONNELLES; LE TRAVAIL SOCIAL ET L’ART -THÉRAPIE. ... 281

6.4 RETOMBÉES DE LA RECHERCHE ... 285

6.4.1 Des perspectives pour l’intervention ... 285

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6.5 LES LIMITES ET LES FORCES DU PROJET ... 289

6.5.1 Limites de la recherche ... 289 6.5.2 Forces de la recherche ... 291 CONCLUSION GÉNÉRALE ... 294 BIBLIOGRAPHIE ... 298 ANNEXE A ... 317 ANNEXE B ... 321 ANNEXE C ... 325 ANNEXE D ... 326 ANNEXE E ... 327 ANNEXE F ... 328 ANNEXE G ... 329

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Outils art-thérapeutiques utilisés auprès des couples………...……… 73

Tableau 2 : Modèle logique de l’intervention………..…... 79

Tableau 3 : Stratégies de collecte des données……..………. 90

Tableau 4 : Méthodes d’analyse des données………. 95

Tableau 5 : Portrait des couples participants……….. 97

Tableau 6 : Portraits des membres du groupe de pairs……….. 223

Tableau 7 : Les fonctions de l’expression artistique dans une intervention psychosociale en art-thérapie….………. 270

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LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Le vase de Rubin……… 62

Figure 2 : Le déroulement des séances d’art-thérapie……… 75

Figure 3 : Dessin à relais……… 101

Figure 4 : Couple sous la pluie……… 101

Figure 5 : Triple mandala……… 103

Figure 6 : Protection……… 106

Figure 7 : Les visages du conflit………. 106

Figure 8 : La vie de mon conjoint……… 109

Figure 9 : Ma conjointe……… 110

Figure 10 : Peurs, pertes et ce qu’il reste de bon………. 113

Figure 11 : Les pertes……….. 113

Figure 12 : Les peurs………... 114

Figure 13 : Ce qu’il reste de bon………. 114

Figure 14 : L’ascenseur dans le roc……… 115

Figure 15 : Passage du mal-être au bien-être……….. 116

Figure 16 : Dessin libre……… 116

Figure 17 : Mon histoire de vie………120

Figure 18 : Mon histoire de vie modifiée……… 121

Figure 19 : Tempête de vie et gazouillis………. 123

Figure 20 : Time out! Time in!... 125

Figure 21: Time out! Time in!... 125

Figure 22: Chemin de vie de couple……… 127

Figure 23 : Chemin de vie de couple (2e partie)……….. 128

Figure 24 : Honorer le couple que nous formons……… 129

Figure 25 : Images choisies par madame……… 135

Figure 26 : Images choisies par monsieur……….. 135

Figure 27 : Dessin à relais……….. 136

Figure 28 : Gribouillis……… 137

Figure 29 : Gribouillis……… 137

Figure 30 : Mandala……… 138

Figure 31 : Gribouillis………. 142

Figure 32 : Chat sur un coussin……….. 143

Figure 33 : Renard………... 144

Figure 34 : Cabane d’oiseaux……….. 145

Figure 35 : Dessin à relais……….. 146

Figure 36 : Œuf………... 147

Figure 37 : Dessin à relais……….. 151

Figure 38 : Collage………. 152

Figure 39 : Gribouillis……… 153

Figure 40 : Gribouillis……… 153

Figure 41 : Chez-nous……… 154

Figure 42 : Mandala de fruits………. 155

Figure 43 : Animal imaginaire……… 156

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Figure 45 : Paysage………. 159

Figure 46 : Masques……… 161

Figure 47 : Visage……… 162

Figure 48 : Cabane d’oiseaux……….. 164

Figure 49 : Dessin à relais……….. 167

Figure 50 : Abri……….. 169

Figure 51 : Abri……….. 170

Figure 52 : Collage………. 171

Figure 53 : Collage………. 172

Figure 54 : Chien………. 173

Figure 55 : Œuvre abstraite………. 174

Figure 56 : Gribouillis………. 175

Figure 57 : Pieuvre……….. 176

Figure 58 : Les hauts et les bas de la vie………. 177

Figure 59 : La vie continue………. 178

Figure 60 : Dessin libre……… 179

Figure 61 : Dessin spontané……… 180

Figure 62 : En vacances sur une île………. 180

Figure 63 : Dessin spontané………. 181

Figure 64 : Triple mandala……….. 183

Figure 65 : Dessin libre……… 184

Figure 66 : Notre vie……… 185

Figure 67 : On est sur le même tableau………186

Figure 68 : Mon univers……….. 193

Figure 69 : Collage……….. 194

Figure 70 : Paysage………. 196

Figure 71 : Collage……….. 196

Figure 72 : La barque……….. 198

Figure 73 : Le repos………. 199

Figure 74 : Conversation visuelle……… 201

Figure 75 : Cimetière joyeux……….. 202

Figure 76 : Pied……….. 204

Figure 77 : Infini………. 204

Figure 78 : Gribouillis………. 205

Figure 79 : Gribouillis………. 205

Figure 80 : Gribouillis………. 206

Figure 81 : Mollo Tonio! Les enfants c’est important!... 209

Figure 82 : Ouverture……….. 209

Figure 83 : Collage……….. 211

Figure 84 : Collage……….. 212

Figure 85 : Cercle de la vie……….. 214

Figure 86 : Souplesse………... 214

Figure 87 : Collage……….. 216

Figure 88 : Temps d’être………. 217

Figure 89 : Dessin libre……… 219

Figure 90 : Images choisies par madame………. 220

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LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS

AATQ Association des art-thérapeutes du Québec

ACT Acceptance and Commitment Therapy

CHSLD Centre d’hébergement de soins de longue durée CLSC Centre local de services communautaires MSSS Ministère de la Santé et des Services sociaux OEMC Outil d’évaluation multi-clientèle

OMS Organisation mondiale de la santé

OTSTCFQ Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec

TCC Thérapie cognitivo-comportementale

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À Berthe, ma muse. Puisses-tu être allée rejoindre ton Claude pour te blottir dans ses bras.

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REMERCIEMENTS

Pour être mené à terme, un projet d’études doctorales nécessite un soutien et un encadrement indéfectibles. J’ai eu le privilège d’avoir les deux, ce qui m’a permis d’en arriver à rédiger ces lignes et à y mettre un point final.

Ce soutien et cet encadrement indéfectibles m’ont d’abord été offerts par Sophie Éthier, ma directrice, et c’est à elle que j’adresse mes premiers remerciements. Alors que ma recherche en était encore à l’étape d’un projet, tu m’as encouragée et invitée à plus de rigueur et de précision. Et tu ne m’as pas lâchée depuis. Sophie, ton authenticité, ton engagement, ta créativité et ta sensibilité ont été des sources d’inspiration pour moi tout au long du projet et elles continuent de l’être encore aujourd’hui. J’ai beaucoup appris en travaillant avec toi : en tant que chercheure, en tant que professeure, en tant que femme. Merci pour ta grande disponibilité et ta confiance. Tu vas me manquer.

La direction de ma démarche a été soutenue par la co-direction assumée par Patrick Villeneuve. Merci Patrick pour ta rigueur et ton apport inestimable à mes écrits. De grands détours ont été faits depuis les premières orientations de la recherche, mais tu as toujours su respecter mes choix tout en m’amenant à les préciser. Avec tes questions pointues, tu m’as invitée à plus de cohérence et à me positionner clairement alors que j’hésitais parfois à le faire. J’ai senti que tu n’en laisserais pas passer et ça, c’est rassurant pour une étudiante. Je tiens à souligner aussi l’apport de Jacinthe Lambert et Claudine Parent, qui ont fait partie des comités d’évaluation de mes examens doctoraux et qui ont nourri ma réflexion par leurs questions pertinentes et leurs conseils judicieux. Je ne peux non plus passer sous silence la contribution des membres du jury, Jocelyne Labrèche, Claudine Parent et Mona Trudel. Vos commentaires constructifs m’ont permis de faire quelques pas de plus dans ma pensée et dans la précision de mes propos. Cet apport est très précieux et je vous remercie pour votre implication dans la réussite de mon projet.

L’analyse des résultats de la recherche a été grandement bonifiée par l’apport inestimable du groupe de pairs qui a été constitué. Je suis profondément reconnaissante envers ces collègues qui ont su éclairer l’expérience des couples avec leur sensibilité, leur perspicacité et leur

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xvi

intelligence. Merci à vous, Valérie Lebeau, Fiona Peterson, Nadine Pinton et Michelle Martineau.

Les études doctorales ne se confinant pas à l’intérieur des murs du campus, ma vie familiale et sociale en a vécu les répercussions. Sans le soutien de mon entourage, je n’aurais pas vu la fin de ce projet et c’est précieux pour moi de pouvoir remercier ici les personnes les plus importantes de ma vie. Mes premiers mots s’adressent aux Cossette. Marie-Jeanne, Jocelyn et Nathalie, sachez que vous avez fait la différence. Un merci infini pour votre soutien, vos encouragements, mais surtout pour avoir cru en moi sans jamais douter de mes capacités à y arriver. J’ai puisé souvent à cette source. Merci aussi à ma famille pour son soutien. Merci maman de m’avoir transmis ta détermination, ta curiosité et ta rigueur. À mon père, parti trop tôt, je dois mon respect pour l’autre et le désir de faire une différence par mon action et ma réflexion. Je leur en suis très reconnaissante. Merci aussi à mes sœurs. Patricia, ta simplicité et ton perpétuel désir de croître m’inspirent. Mélanie, j’aime à penser que je partage un peu de ta détermination.

Merci à mes amies, Annie et Robert, Marlène et Sylvain, Annie et Denis, Fannie et Hugo, Jocelyne et Gérald, pour les discussions passionnées, pour les rires libérateurs et pour les encouragements sans limite. Je tiens également à souligner le soutien de mon équipe de travail. Les professeures de l’UQAT, ma belle équipe de femmes engagées, je vous remercie de m’avoir donné les conditions idéales pour mener à terme ce projet.

Ce projet d’études était dès le départ un projet familial. Et ça n’aurait pu être autrement. De tendres remerciements vont donc aux deux hommes de ma vie : mon conjoint, Patrice et Félix, mon fils. Merci à vous deux d’avoir fait en sorte que je puisse consacrer (presque) chaque instant de ma vie à ce projet. Patrice, les mots ne suffisent pas à t’exprimer toute la gratitude et l’amour que je ressens envers toi. Il me faudrait te le dire en images. Si tu n’avais pas été là, ce projet n’aurait pas eu autant de sens, ni de profondeur. Tout comme ma vie. Merci d’avoir été là mais surtout, merci d’être ce que tu es. Et Félix, tu sais que je suis fière d’avoir fait un doctorat, mais toi, tu es et tu seras toujours ma plus grande fierté. J’espère que de m’avoir vue travailler si fort t’inspirera le goût de t’investir dans tes projets de vie à toi et surtout, de croire en toi.

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Finalement, je m’en voudrais de ne pas remercier les cinq couples qui ont accepté de participer à la recherche. Vous m’avez ouvert les portes de votre intimité et vous m’avez accordé votre confiance. Nous avons partagé des moments d’une profondeur inouïe, dans la légèreté et la liberté les plus totales. Merci de m’avoir inspirée et permis de grandir autant. Je ne vous oublierai jamais.

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AVANT-PROPOS

Avant d’amorcer la présente thèse, il m’importe de situer le lecteur quant à mon identité professionnelle puisqu’elle constitue la trame de fond du projet de recherche. En effet, c’est d’abord en travail social que j’ai été formée. Plusieurs années de pratique plus tard, j’ai été attirée par l’art-thérapie, un champ qui alliait deux de mes passions : l’intervention et l’art. J’ai donc entrepris, au milieu des années 2000, des études me menant à l’obtention du diplôme de maîtrise en art-thérapie de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT). Bien que l’art-thérapie ne constitue pas une profession au sens de l’Office des professions du Québec, l’Association des art-thérapeutes du Québec (AATQ) demande à ses membres de détenir ce diplôme pour pratiquer l’art-thérapie. Le projet doctoral a mis en œuvre une intervention psychosociale en art-thérapie, laquelle j’étais légitimée de réaliser puisque je portais les deux chapeaux professionnels pour lesquels j’ai été formée.

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INTRODUCTION GÉNÉRALE

La maladie d’Alzheimer représente à elle seule environ 70% de tous les troubles cognitifs qui affectent une proportion de plus en plus grande de la population âgée, au Québec comme dans plusieurs régions du monde (OMS, 2017). Ces données sont préoccupantes car la complexité de la maladie perturbe autant la personne qui en est atteinte que son entourage. Les couples en sont particulièrement affectés. Ils rencontrent plusieurs défis, notamment celui de préserver leur identité individuelle et conjugale.

La maladie d’Alzheimer est en somme un enjeu de santé publique dont on doit se préoccuper. Or, le travail social qui agit à la fois en gérontologie et en intervention conjugale représente actuellement une pratique quasi inexistante en ce domaine. C’est d’ailleurs ce contexte qui nous a menée à la présente recherche doctorale. En effet, l’idée a germé dans ce terreau fertile du travail social au sein d’une équipe de soutien à domicile d’un CLSC de la région de la Mauricie dans laquelle nous avons œuvré pendant un certain temps. La surcharge de travail jumelée à une organisation du travail nous orientant davantage vers la gestion de cas au détriment de l’intervention psychosociale directe ont fait naître en nous le sentiment de ne pas être en mesure d’offrir une réponse complète, satisfaisante et rassurante aux personnes âgées en perte d’autonomie et à leurs proches, en particulier aux couples confrontés à la maladie d’Alzheimer. Dans ce contexte, il nous semblait alors pertinent de nous pencher sur différentes solutions concrètes favorisant la mise en œuvre d’une intervention psychosociale mieux adaptée aux besoins particuliers de cette population. Nous avons eu alors l’intuition que l’art-thérapie auprès des couples dont l’un des partenaires est atteint de la maladie d’Alzheimer pourrait constituer une proposition intéressante.

Depuis longtemps, les travailleurs sociaux recourent à l’art dans leurs interventions. Cependant, au cours du dernier siècle, cette approche s’est développée pour se constituer en une profession qui emprunte ses principes et connaissances à la psychologie et aux arts visuels. Les connaissances dans ce domaine sont encore à parfaire, en particulier en ce qui a trait à l’intervention auprès des couples. Aussi, à notre mesure, nous souhaitons contribuer à la compréhension et à l’application de l’art-thérapie auprès des couples, plus spécifiquement

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ceux qui sont touchés par la maladie d’Alzheimer. Ultimement, nous souhaitons offrir à ces couples un espace symbolique de répit et d’espoir dans lequel ils pourront se retrouver. La présente thèse se décline en six chapitres. Le premier situe de manière plus détaillée la situation évoquée précédemment. Il explique la maladie d’Alzheimer à travers ses symptômes et ses conséquences, puis présente comment elle influence le vécu des couples qui doivent composer avec sa présence. Ce chapitre défend ensuite l’idée que le travail social conjugal et gérontologique est un carrefour au cœur duquel cette pratique tarde à se positionner. La situation n’est pas différente en art-thérapie alors que la pratique auprès des couples ne s’est quasiment pas développée. Nous l’expliquerons dans ce chapitre et en profiterons également pour introduire cette discipline encore peu connue. Finalement, c’est dans ce premier chapitre que le lecteur prendra connaissance des buts de la recherche. Ensuite, au second chapitre, l’état des connaissances sur l’intervention auprès de couples faisant face à la maladie est présenté. Dans un premier temps, la recension des écrits s’intéresse à l’intervention auprès de couples qui doivent composer avec la maladie de façon générale, puis, dans un deuxième temps, ceux qui doivent composer avec la maladie d’Alzheimer plus spécifiquement. Puisque le sujet de la thèse porte également sur l’art-thérapie, l’état des connaissances sur l’art-thérapie comme approche d’intervention en contexte d’Alzheimer est présenté. Une synthèse des éléments à retenir pour l’intervention auprès de cette population conclut ce chapitre.

Le troisième chapitre présente trois fondements théoriques de l’intervention psychosociale et de l’art-thérapie choisis pour encadrer l’intervention élaborée : la théorie systémique; le constructivisme et plus particulièrement l’interactionnisme symbolique; l’approche humaniste gestaltiste. Cette partie se termine par une synthèse des principes directeurs qui découlent de ces fondements théoriques et que nous retiendrons pour la conception de l’intervention auprès des couples ciblés par la recherche. Le cadre théorique est également constitué d’une présentation du concept de créativité et d’un survol de quelques fonctions de l’expression artistique.

C’est au quatrième chapitre que sont ensuite présentées la méthodologie de la recherche et la posture adoptée par l’intervenante-chercheure. La recherche prenant la forme d’une étude de cas exploratoire, cette approche est ensuite décrite. Par la suite, le devis de recherche est

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présenté, en précisant les objectifs et les modalités de l’intervention. Finalement, la méthode d’analyse à laquelle nous avons eu recours pour extraire le sens de l’expérience est décrite. Les résultats de l’intervention sont présentés au chapitre cinq. Dans une perspective phénoménologique, chaque démarche réalisée avec les cinq couples ayant participé à l’étude est présentée de façon à permettre au lecteur de saisir l’expérience vécue. Leurs perceptions de cette expérience sont également présentées. Les différents points de vue du groupe de pairs mis à contribution pour l’analyse des données recueillies sont partagés dans ce chapitre. Finalement, l’expérience est également présentée du point de vue de l’intervenante-chercheure.

Le dernier chapitre présente les principaux constats qui se dégagent de la recherche ainsi que différentes explications et clés de compréhension de l’expérience à l’étude. Ces dernières lignes se penchent également sur les retombées possibles de la recherche pour l’intervention auprès des couples et pour la poursuite du développement des connaissances dans ce créneau. Finalement, les forces et les limites de l’étude sont décrites.

À partir de l’expérience réalisée, nous avançons qu’une intervention psychosociale en art-thérapie a le potentiel d’amener les couples à mettre à distance la maladie, pour se retrouver en tant qu’individus mais aussi en tant que couple et, éventuellement, transformer leur relation à la maladie. Nous suggérons également que cela est rendu possible ou du moins facilité par l’art lorsqu’il est encadré par l’art-thérapie, dans un contexte d’intervention psychosociale, où la dimension relationnelle est au cœur des préoccupations.

Bien que nous espérions que la lecture de la présente thèse doctorale mène tout lecteur à des conclusions semblables aux nôtres, nous souhaitons avant tout partager l’expérience vécue par des couples dont la relation conjugale est durement éprouvée par une maladie périlleuse, autant pour les individus qui en sont atteints que pour leurs proches. Nous avons fait le choix de privilégier une intervention psychosociale en art-thérapie. La sensibilité de la méthode et le fort potentiel offert par l’objet d’art qui y est central demeurent, suite à l’expérience, des motivations qui continuent de mobiliser notre désir d’intervenir auprès de cette population quelque peu laissée pour compte. Par cette recherche, nous espérons inspirer d’autres intervenants, qu’ils soient travailleurs sociaux, art-thérapeutes, ou autres, à accompagner des couples âgés vers une pacification de ce qui s’avère être l’étape ultime de leur vie.

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Je nouerai des ficelles à tes souvenirs qui s’étiolent

et le jour où ils s’envoleront moi j’en ferai des cerfs-volants mais oublie pas mon nom.

Ingrid St-Pierre Chanson Les ficelles

CHAPITRE 1 : POSITION DU PROBLÈME ET BUTS DE LA RECHERCHE

Ce chapitre présente la problématique à laquelle s’intéresse la recherche, sa pertinence sociale et scientifique et les buts qu’elle poursuit. Il se décline en trois grandes sections. La première présente le contexte dans lequel les couples qui font face à la maladie d’Alzheimer doivent cheminer, en décrivant d’abord la maladie et ses impacts pour les personnes qui en sont atteintes et leurs proches. La deuxième section s’intéresse au contexte d’intervention dans lequel se retrouvent ces couples. Elle rappelle d’abord les principes fondateurs du travail social, présente l’évolution et les conditions actuelles du travail social gérontologique et auprès des couples et trace le portrait de la pratique qui se retrouve au carrefour de ces deux champs du travail social. Dans cette section, l’histoire de l’art-thérapie et ses enjeux identitaires sont également introduits. Finalement, ce chapitre se conclut par une présentation des buts de la recherche et de sa pertinence sociale, scientifique et en regard des pratiques. 1.1 Vivre avec la maladie d’Alzheimer

Selon les statistiques les plus récentes publiées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), 47 millions de personnes sont atteintes de troubles cognitifs à l’échelle mondiale (OMS, 2017). Ce nombre devrait grimper jusqu’à 70 millions en 2030 et tripler d’ici l’an 2050. Au Canada, la situation est tout aussi préoccupante. La Société Alzheimer du Canada (2017) dénombre 564 000 Canadiens atteints d’un trouble cognitif et prévoit que ce nombre aura presque doublé d’ici 15 ans. La maladie d’Alzheimer est la plus fréquente, représentant à elle seule environ 70% de tous les troubles cognitifs (OMS, 2017).

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Ce sombre portrait révèle l’ampleur d’une situation qui touche à la fois les personnes qui sont atteintes de la maladie mais aussi leurs proches. Ce qui suit tente de traduire cette expérience afin d’en dégager les enjeux qui interpellent les différents milieux d’intervention.

1.1.1 La maladie

Découverte au début du siècle dernier, la maladie d’Alzheimer est une maladie neurologique dégénérative incurable (Micas, 2016; Nehls, 2017). Elle représente la troisième cause de mortalité aux États-Unis, apparaissant après les maladies cardiovasculaires et le cancer (Nehls, 2017). La maladie d’Alzheimer consiste en des lésions qui s’installent au cerveau plusieurs années – 20 ans dans certains cas – avant l’apparition des premiers symptômes (Micas, 2016). La très grande majorité des cas prend la forme sporadique et se développe après l’âge de 65 ans. Mais la forme héréditaire, une forme précoce de la maladie, apparaît dans 1% des cas (Eustache, 2015). Elle s’installe presque toujours avant que la personne n’atteigne la cinquantaine et son développement est plus rapide. Par ailleurs, la maladie d’Alzheimer présente un portrait plutôt complexe. Elle est accompagnée dans 60% des cas d’une autre maladie telle que le diabète, l’hypertension artérielle ou des troubles dépressifs (Schubert et al., 2006).

Bien que l’évolution de la maladie varie d’une personne à l’autre, plusieurs symptômes communs apparaissent, les plus courants étant les troubles de la mémoire (Eustache, 2015). Phénomène complexe, la mémoire comporte diverses modalités qui sont différemment altérées par la maladie. Par exemple, la mémoire de travail, celle qui retient et manipule les informations, est l’une des premières touchées par la maladie d’Alzheimer. La mémoire épisodique, système plus élaboré dans lequel s’impriment les souvenirs, est également altérée, en particulier pour la rétention des souvenirs récents. Les troubles du langage, oral et écrit, apparaissent également avec la maladie. Ainsi, la personne atteinte cherche ses mots ou fait de fausses associations. La maladie d’Alzheimer peut également entraîner des troubles visuospatiaux, des troubles des praxies (utiliser des objets adéquatement) et des troubles gnosiques, qui consistent à avoir de la difficulté à identifier et à reconnaître des personnes ou des objets familiers. Finalement, des troubles des fonctions exécutives sont associés à la maladie d’Alzheimer. La personne atteinte a alors notamment de la difficulté à organiser des pensées abstraites, à raisonner, à inhiber ses croyances. Conséquemment, son comportement

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social peut en être altéré (Micas, 2016; Eustache, 2015). L’ensemble de ces symptômes cognitifs entraîne peu à peu une perte d’autonomie dans la réalisation des tâches quotidiennes.

Des symptômes non cognitifs complètent ce portrait de la maladie d’Alzheimer. Il s’agit notamment des troubles psychocomportementaux, une perturbation des comportements chez les personnes atteintes qui peuvent prendre différentes formes telles que des cris, de l’errance intrusive, etc. Micas (2016) précise que ces troubles peuvent être « associés à la maladie, d’autres sont sensibles à l’environnement, ou bien la seule possibilité pour le patient d’exprimer une souffrance, son désaccord, ses réactions et son adaptation difficile à ses troubles, être l’expression d’une maladie somatique sous-jacente (infection…). » (p. 89). Bref, on ne peut pas toujours en expliquer le sens ou l’origine, mais ces changements dans les comportements des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont parfois observés. D’autres symptômes non cognitifs peuvent également être présents chez ces personnes : anxiété, apathie, agitation, déambulation, idées délirantes, troubles du sommeil, etc. (Micas, 2016).

Afin d’expliquer l’évolution naturelle de la maladie d’Alzheimer, quelques classifications ont été élaborées. Poirier et Gauthier (2011) se réfèrent à l’Échelle de détérioration globale de Reisberg qui contient sept stades, dont un stade prodromal, c’est-à-dire qui précède l’apparition des premiers symptômes. La Société Alzheimer du Canada (2018a) présente plutôt une évolution en quatre stades, allant du stade léger à sévère, en passant par le stade modéré et en se terminant avec le stade de la fin de vie. Dans le premier stade, les problèmes de mémoire sont discrets et n’entraînent pas de perte d’autonomie chez la personne atteinte. Ces conséquences apparaissent plutôt au second stade, là où on constate une aggravation des troubles de la mémoire menant notamment à l’incapacité de conduire une voiture ou de continuer à occuper un emploi. Le troisième stade est associé à une lourde perte d’autonomie, la personne atteinte ne pouvant plus assumer les tâches de la vie quotidienne parce que les différents symptômes se sont considérablement aggravés. Ces deux échelles d’évolution des symptômes présentent une gradation semblable de la maladie d’Alzheimer mais organisée différemment.

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À l’heure actuelle, il n’y a pas de traitement médical permettant d’en guérir. Les traitements médicaux disponibles contribuent à soulager certains symptômes et à retarder l’évolution dans certains cas et pour un certain temps seulement (Eustache, 2015; Institut universitaire en santé mentale Douglas, 2014; Micas, 2016; Nehls, 2017; Société Alzheimer du Canada, 2018b). Il semble que les progrès actuels de la recherche soient davantage perceptibles au niveau du diagnostic précoce qu’au niveau du traitement de la maladie (Aghourian et al., 2017; Belleville, Gauthier, Lepage, Kergoat et Gilbert, 2014; Eustache, 2015; Semah, 2018). Néanmoins, la recherche sur les causes de la maladie et ses possibles traitements se poursuit intensément (Micas, 2016). Il n’y a pas actuellement de consensus sur les causes de la maladie. Les hypothèses multifactorielles semblent en ce moment les plus concluantes (Eustache, 2015). Elles impliquent des facteurs génétiques mais aussi des facteurs dits modifiables tels que des problèmes de santé cérébrale ou d’autres facteurs liés à l’histoire de santé de la personne atteinte. Par ailleurs, le concept de réserve cérébrale ou cognitive présent dans la littérature (Eustache, 2015; Micas, 2016) réfère aux facteurs de protection qui favorisent la préservation des fonctions cognitives en compensant pour les lésions créées par la maladie. La recherche a donc permis d’identifier des éléments qui préviennent le développement de la maladie d’Alzheimer, tels que l’activité physique, l’éducation, la stimulation cérébrale, une alimentation saine et la qualité des liens sociaux qu’entretient la personne atteinte (Micas, 2016; Poirier et Gauthier, 2011).

Le portrait ainsi tracé de la condition médicale laisse entrevoir la souffrance associée à l’annonce d’un tel diagnostic pour quiconque est atteint de cette maladie. Plusieurs auteurs affirment que la vieillesse est une étape de la vie humaine qui entraîne son lot de remises en question et de transformation identitaire liées notamment aux changements dans les rôles sociaux occupés (Billé, 2012; Hétu, 2007; Houde, 1999). Dans ce contexte, la maladie d’Alzheimer pose un défi supplémentaire à la personne qui en est atteinte. Elle

brouille en effet et déstructure les interactions de la personne avec son entourage. Or ces interactions ne sont pas seulement le lieu de la gestion d’un quotidien plus ou moins agréable à vivre – ce qui n’est déjà pas négligeable –, elles sont, bien plus profondément, le lieu de l’élaboration d’une dynamique dont on soupçonne confusément le dysfonctionnement, et qui n’est en somme rien d’autre qu’une dynamique identitaire. (Billé, 2014, p. 104-105)

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Les proches sont affectés également car non seulement la relation qu’ils ont avec la personne atteinte est perturbée mais leur quotidien l’est aussi, sans compter la charge émotive qui accompagne cette nouvelle réalité (Éthier, Boire-Lavigne et Garon (2013). Feteanu et Sebag-Lanoë (2002) résument avec éloquence cette expérience :

La famille doit résoudre au quotidien une multitude de tâches pratiques liées à la perte de l’autonomie, à la dépendance et aux troubles du comportement. Elle doit aussi supporter les conséquences juridiques et administratives de la maladie. À cela s’ajoute la souffrance liée à l’appauvrissement des échanges avec l’être aimé malade et à l’angoisse de ne pas pouvoir faire face. L’aggravation inéluctable de la maladie provoque des sentiments de détresse, d’incompréhension, voire de colère. La famille doit faire le deuil d’un certain passé, le deuil des projets de vie, des loisirs et des aspirations antérieurs. Le fardeau familial est associé à un risque accru de conséquences négatives sur la santé mentale et physique. (p. 161)

C’est dans ce terreau altéré que la relation conjugale confrontée à la maladie d’Alzheimer doit continuer d’exister. Alors que la littérature a abondamment traité des impacts de la situation vécue sur les proches aidants, peu importe la nature du lien qu’ils ont avec la personne atteinte (Guberman et Lavoie, 2010; Miceli, 2013), elle s’est moins attardée au vécu spécifique des couples qui doivent composer avec la maladie. Toutefois, les écrits révèlent que la maladie représente une menace pour l’équilibre du couple qui y est confronté (Éthier et al, 2013; Lavoie et Rousseau, 2008; Mietkiewicz et Ostrowski, 2013; Moësan, 2010;). Les prochaines lignes sont consacrées à mieux comprendre ce vécu qui comporte des particularités qui lui sont propres.

1.1.2 Alzheimer et conjugalité

On observe que les personnes âgées de 65 ans et plus vivaient encore majoritairement en couple au Canada en 2011 (Milan, Wong et Vézina, 2014), et 77% d’entre elles n’avaient alors formé qu’une seule union. Cependant, les trajectoires conjugales se diversifient aussi dans cette tranche d’âge. On le constate notamment par l’augmentation du taux de divorce et de séparation chez les couples âgés (4% en 1981, 12% en 2011) mais également par l’augmentation des unions libres, des remariages et des unions de même sexe (Milan et al., 2014). Cette pluralité qui s’installe peu à peu chez les couples aînés canadiens se perçoit également dans plusieurs pays européens (Delbès, Gaymu et Springer, 2006). Le Québec ne fait pas exception à la règle : 67% des 65-69 ans sont en couple en 2011; les autres sont en

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union libre ou encore célibataires suite à un divorce, une séparation ou le décès du conjoint (Institut de la statistique du Québec, 2012).

L’augmentation de l’espérance de vie et les changements sociaux et culturels survenus dans les dernières décennies, notamment l’individualisme et les attentes envers le couple, expliquent en grande partie les risques de rupture qui guettent aussi les couples vieillissants (Smadja, 2011). Or, la dissolution d’une union dans cette population n’est pas sans conséquence. Des auteurs ont démontré que le bonheur est lié à la satisfaction conjugale et que les bénéfices psychologiques que procure la vie en couple sont plus grands que les coûts qui lui sont associés (Beaudry, Boisvert et Roussy, 2011; Bouffard, 2017). Wu et Schimmele (2007) ajoutent que le divorce à un âge avancé amène son lot de problématiques telles que l’isolement, l’appauvrissement financier, une diminution de la satisfaction face à la vie et des symptômes dépressifs. Il semble donc que l’adaptation au célibat soit plus difficile pour les personnes âgées.

En faisant abstraction des situations problématiques telles que les relations où la violence conjugale ou la maltraitance est présente, les derniers constats nous amènent à proposer qu’il est habituellement souhaitable que les couples âgés demeurent en couple. En plus des bienfaits déjà mentionnés, d’autres auteurs soumettent l’idée que le couple, en particulier lorsqu’il est âgé, contribue au sentiment identitaire des personnes qui le composent (Lavoie et Rousseau, 2008; Wu et Schimmele, 2007). Ce rôle de gardien de l’identité endossé par les conjoints revêt une importance particulière en contexte d’Alzheimer. En effet, puisqu’il porte en mémoire leur histoire conjugale et qu’il continue de partager une grande intimité avec son partenaire, le conjoint non atteint joue un rôle de validation de l’identité de la personne atteinte; une identité qui, nous l’avons vu, s’effrite (Éthier et al., 2013; Lavoie et Rousseau, 2008). Cela se traduit par exemple dans son désir de préserver l’autonomie de son partenaire en respectant ses valeurs et en lui offrant des possibilités de faire des choix, en dépit de la maladie.

Par ailleurs, il va sans dire que la relation conjugale est impérativement appelée à se transformer lorsque la maladie d’Alzheimer fait son entrée dans l’histoire du couple. Elle prend alors des allures de relation aidant-aidé et l’intégrité conjugale peut en être menacée.

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Une autre des menaces qui guette l’équilibre du couple est directement liée au vécu de l’aidant. La littérature relate abondamment les difficultés rencontrées dans l’expérience de proche aidant. Même si les conjoints qui endossent ce rôle ne représentent que 8% de tous les aidants, ils sont, avec les parents d’enfants, ceux qui consacrent le plus grand nombre d’heures hebdomadaires à aider leur partenaire. En effet, 31% des aidants soutenaient leur conjoint pendant 30 heures ou plus par semaine en 2012 au Canada (Turcotte, 2013). Ils sont donc davantage susceptibles de subir les conséquences de ce nouveau rôle qui entraîne un stress important. D’ailleurs, 46% d’entre eux ont déclaré ressentir au moins cinq symptômes de détresse psychologique, tels que s’être senti fatigué, inquiet ou angoissé, débordé, isolé, colérique, mécontent ou déprimé, avoir éprouvé une perte de l’appétit ou avoir développé des troubles du sommeil (Turcotte, 2013). Cela s’explique notamment par le fait qu’ils accomplissent un plus vaste éventail de tâches et qu’ils ne recourent à l’hébergement qu’en cas d’épuisement profond (Lavoie et Rousseau, 2008). Ils sont par ailleurs plus susceptibles d’avoir des besoins non comblés (Lavoie et Rousseau, 2008). Les aidants voient également augmenter le danger de développer des problèmes de santé physique importants et sont plus nombreux à risquer d’en mourir (Schulz et Martire, 2004). Ce portrait général s’accentue lorsque la personne aidée est atteinte de la maladie d’Alzheimer (Tremont, 2011).

Il faut rappeler toutefois que le rôle de proche aidant d’un conjoint n’est pas que sombre. Plusieurs auteurs ont également rapporté des effets positifs à ce nouveau type de relation qui s’établit entre deux personnes (Caradec, 2009; Éthier et al., 2013; Holosko et Feit, 2004; Tremont, 2011). Par exemple, des proches aidants ont mentionné apprécier ce nouveau rôle parce qu’il leur procure le sentiment d’être utile et qu’il permet de développer de nouvelles compétences, ce qui favorise le sentiment d’estime de soi. Une satisfaction face au sentiment de faire du bien à l’autre est aussi ressentie par les aidants. Il semble également que la relation aidant-aidé ajoute à la profondeur de la relation, les aidants se sentant plus proches de la personne aidée. De plus, le simple plaisir d’être ensemble est évoqué par les proches, de même que le sens de la vie qui est approfondi par ce nouveau rôle.

Dans ce contexte mitigé, le rôle d’aidant n’est pas toujours endossé librement. Une étude québécoise portant sur les normes et les valeurs déterminant l’organisation des solidarités familiales révèle qu’une pression sociale est exercée particulièrement à l’égard des conjoints

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afin qu’ils endossent le rôle d’aidant auprès de leur partenaire (Guberman, Lavoie et Gagnon, 2005). Les résultats du sondage téléphonique effectué auprès de la population illustrent les limites que posent les répondants quant à la nature et à la quantité de l’aide offerte à un proche. En effet, une vaste proportion d’entre eux croit que la famille ne doit pas assumer la responsabilité de l’aide au détriment de sa santé ou de la qualité de sa vie professionnelle et familiale. Les répondants conçoivent l’aide essentiellement en termes d’affection et de présence auprès du proche. Bref, la responsabilité souhaitée est davantage orientée vers le maintien des relations familiales plutôt que vers une aide instrumentale.

Cependant, il en va autrement lorsque la personne en perte d’autonomie a un conjoint : La forte majorité des répondants considère que les conjointes (85,4 %) et les conjoints (91 %) doivent accompagner leur époux ou leur épouse lors de rendez-vous à l’hôpital et chez le médecin. Également, plus de sept répondants sur dix estiment que les conjointes (76 %) et les conjoints (72 %) doivent préparer les repas et faire les travaux ménagers. Environ 60 % s’attendent à ce qu’ils donnent le bain, et vêtissent et dévêtissent la personne âgée. Des proportions non négligeables des répondants comptent même sur les conjointes et les conjoints pour donner des injections et changer les pansements. On s’attend également dans près de la moitié des cas (38 % pour les conjointes, 50 % pour les conjoints) à ce qu’ils réduisent leur temps de travail afin de prendre soin de leur époux ou de leur épouse. (Guberman et al., 2005, p. 35)

La désignation de l’aidant principal se fait donc selon un modèle hiérarchique où le conjoint occupe le premier rang.

Par ailleurs, les conjoints endossent eux-mêmes d’emblée ce rôle, qu’ils perçoivent comme étant une responsabilité morale (Éthier et al., 2013; Guberman et Lavoie, 2010; Lavoie et Rousseau, 2008). Caradec (2009) confirme le caractère irrécusable de ce rôle assumé par les conjoints : « Aux yeux des conjoints bien plus que des enfants, le soutien qu’ils assurent semble aller de soi, relever de la nature même de la relation, au point que ce que l’on appelle communément « relation d’aide » apparaît d’abord comme la continuation d’une relation de couple commencée depuis de longues années. » (p. 119).

L’auteur ne saurait si bien dire car un large consensus se dégage de la littérature à l’effet que la relation aidant-aidé est grandement teintée de la relation conjugale telle qu’elle était avant l’arrivée de la maladie (Badr, Acitelli et Taylor, 2007; Caradec, 2009; Harris, Adams, Zubatsky et White, 2011; Morgan et Laing, 1991; Roberto, McCann et Blieszner, 2013;

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Tremont, 2011; Winter, Gitlin et Dennis, 2011). En d’autres mots, la qualité de la relation conjugale avant la maladie détermine la façon avec laquelle le couple composera avec celle-ci. À titre d’exemple, Morgan et Laing (1991) ont documenté les caractéristiques des aidants dont la qualité de la relation conjugale avant la maladie était satisfaisante. Ces derniers présentaient une motivation plus élevée à dispenser les soins nécessaires pour maintenir un équilibre quotidien, ils éprouvaient un sentiment d’accomplissement dans leur rôle d’aidant ainsi que davantage de compassion envers leur conjoint et démontraient une plus grande ouverture à recevoir de l’aide et des services de soutien. Plus récemment, Harris et ses collaborateurs (2011) ont démontré que la qualité de la relation conjugale avant le diagnostic a des incidences sur la santé mentale et émotionnelle de l’aidant pendant la progression de la maladie. Les auteurs prédisent qu’une relation insatisfaisante avant le diagnostic mènera à plus de stress et de difficultés à assumer le rôle d’aidant, est associée à des symptômes dépressifs chez l’aidant, à une faible qualité de vie et à peu de satisfaction dans son nouveau rôle. Winter et ses collaborateurs (2011) ajoutent qu’une relation insatisfaisante précédemment au diagnostic risque de précipiter l’hébergement de la personne atteinte, en particulier lorsque l’aidant est un homme.

Le couple touché par la maladie voit également son intimité être affectée notamment par l’impact de la maladie sur la sexualité. La maladie d’Alzheimer entraîne une baisse du désir sexuel alors que des aidants disent vouloir maintenir une activité sexuelle, parfois perçue comme l’emblème d’une résilience face à la maladie (Harris et al., 2011; Mietkiewicz et Ostrowski, 2013). Il semble toutefois que la dynamique relationnelle déterminera la place de la sexualité dans le couple. Par exemple, lorsque le rapport d’aide est intense et que les soins octroyés à la personne atteinte prennent une place prédominante dans le couple, la relation adopte davantage les caractéristiques d’un rapport parent-enfant. Dans ce cas, l’aidant peut ressentir un certain malaise à maintenir une activité sexuelle avec son partenaire. Ainsi, préserver l’intimité, qu’elle prenne la forme de la sexualité ou simplement d’un échange affectif et complice, est un défi pour le couple confronté à la maladie d’Alzheimer.

En somme, la maladie d’Alzheimer, lorsqu’elle s’invite dans la relation conjugale, est un événement qui s’inscrit dans l’histoire du couple. Ce dernier aura plus de chances de préserver son intégrité conjugale s’il peut s’appuyer sur une histoire conjugale positive. Le

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conjoint, qui endosse d’emblée le rôle d’aidant dont on l’investit, joue un rôle de gardien de la biographie et de l’autonomie de son partenaire. Et bien que ce rôle puisse être vécu de façon positive par l’aidant, il peut néanmoins entraîner des conséquences importantes sur sa santé physique et mentale notamment. On peut donc conclure de ces recherches qu’il est impératif de soutenir les couples qui font face à cette situation car, rappelons-le, on vieillit généralement mieux en couple que seul.

La partie qui suit présente deux domaines d’intervention qui pourraient jouer ce rôle de soutien auprès des couples âgés : le travail social et l’art-thérapie. Le travail social est en bonne posture pour intervenir auprès des couples âgés puisqu’il occupe la première ligne des services publics offerts à la population âgée avec une présence dominante dans les services de soutien à domicile, notamment. Il est aussi reconnu pour son intervention auprès des systèmes tels que le couple. Nous le présentons en premier. Suivra l’art-thérapie, un domaine d’intervention moins aguerri pour intervenir auprès de la population ciblée.

1.2 Intervenir en contexte de conjugalité et d’Alzheimer. Deux domaines d’expertise : le travail social et l’art-thérapie.

Cette section vise à situer historiquement ces deux professions et présente les enjeux qui leur sont propres en regard de leur rôle dans l’intervention psychosociale qui s’adresse aux couples âgés.

1.2.1 Les principes fondateurs du travail social

Le travail social est un vaste champ d’intervention qui s’intéresse à l’individu en relation avec son environnement et qui s’articule autour de trois méthodes : l’intervention auprès des individus et de la famille; l’intervention de groupe; l’organisation communautaire. Au cœur des valeurs qui orientent son action, on retrouve l’autodétermination, principe selon lequel la personne est capable de décider pour elle-même (Drolet, 2013). Les valeurs de justice sociale, de respect des droits et de la dignité de toute personne et la foi en la capacité de tout être humain à évoluer et se développer marquent également la profession (OTSTCFQ, 2012).

Le travailleur social joue différents rôles. Parmi eux, Drolet (2013) rappelle ceux-ci : le rôle d’accompagnement qui se traduit par du soutien lors de traversées difficiles; le rôle de coordination visant la planification et l’organisation de services et de ressources; celui de médiateur entre les ressources du milieu et les besoins de la personne; et finalement,

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s’appuyant sur un parti pris pour la personne, un rôle d’advocacy. Tous ces rôles peuvent se déployer, à divers niveaux, dans l’une ou l’autre des méthodes d’intervention, peu importe le milieu, la population ciblée et les problèmes rencontrés.

La diversité des rôles assumés par les travailleurs sociaux et la multitude des chemins qu’ils empruntent pour répondre aux besoins complexes des personnes et des groupes qu’ils accompagnent ouvrent la voie à une vision plurielle des fonctions de la profession. Payne (2006), cité dans Drolet (2013), esquisse un portrait de ces fonctions du travail social en les ramenant à trois perspectives : la dimension thérapeutique, l’ordre social et la transformation sociale. La première, plus proche de la psychologie, cherche à faciliter le développement personnel et relationnel d’un individu. La seconde soutient l’adaptation des personnes au système en place tandis que la dernière perspective vise plutôt le changement social. Les milieux où les travailleurs sociaux exercent leur profession sont donc multiples : les établissements du réseau public de la santé et des services sociaux, des organismes communautaires, des établissements pénitenciers, des ministères, des entreprises d’économie sociale, des coopératives, etc. Dans le réseau public de la santé et des services sociaux, les travailleurs sociaux sont appelés à répondre aux demandes formulées par des personnes qui présentent des profils aussi diversifiés que complexes. Parmi ces personnes, plusieurs sont âgées et présentent des profils gérontologiques nécessitant une intervention psychosociale. 1.2.2 Le travail social gérontologique

En dépit du vieillissement de la population que l’on appréhende depuis un certain temps déjà, peu d’écrits existent sur l’exercice de la profession du travail social auprès des personnes âgées. Il semble de plus que la gérontologie ne figure pas parmi les principaux intérêts des étudiants en travail social dans les universités québécoises (Pelletier et Beaulieu, 2016). Par surcroît, les changements démographiques entraînent un lot de préoccupations quant à l’organisation des services de santé et des services sociaux, mais le gouvernement ne semble toujours pas vouloir en faire une véritable priorité comme en fait foi la dernière réforme entreprise (MSSS, 2015; Pelletier et Beaulieu, 2016).

Dans les établissements du réseau de la santé et des services sociaux, en CLSC ou en CHSLD par exemple, on retrouve des travailleurs sociaux pour répondre aux besoins psychosociaux

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de la population aînée. Comme il s’agit d’une population qui présente des situations complexes (problèmes de santé physique, comorbidité, troubles cognitifs, essoufflement du réseau de soutien, isolement, éventuels besoins d’hébergement, etc.) autour desquels s’articuleront les interventions de divers professionnels, on fait appel à un gestionnaire de cas pour coordonner l’ensemble des services offerts.

Malgré le consensus qui semble se dégager à l’effet que les travailleurs sociaux possèdent le bagage de compétences nécessaire à l’exercice de ce rôle (Gagnon, 2013), il n’en demeure pas moins qu’ils éprouvent un malaise avec l’appellation « gestionnaire de cas » à laquelle ils associent des attributs administratifs déshumanisants (Couturier et Belzile, 2013). Couturier et Belzile (2013) défendent l’idée que ce rôle est tout à fait cohérent avec la philosophie de la profession du travail social et ce, en raison notamment de son caractère militant. Reconnaissant la transformation du travail social entraînée par ce changement de pratiques, les auteurs suggèrent néanmoins que les travailleurs sociaux ont un rôle à jouer pour que ces changements opèrent en faveur des intérêts de la population et que les services « soient continus, globaux, cohérents, collectifs, et que cette continuité soit d’abord et avant tout signifiante pour l’usager et pour l’intervenant. » (p. 162).

Or, en dépit du fait que l’attribution d’un rôle de gestionnaire de cas aux travailleurs sociaux puisse faire du sens, l’offre de services n’est pas pour autant orientée vers la réponse aux besoins de la population. En effet, on constate actuellement que les services offerts s’inscrivent davantage dans une logique de panier de services uniformisé plutôt que dans la logique d’une réponse personnalisée à des besoins spécifiques (Pelletier et Beaulieu, 2016). Pour évaluer les besoins des personnes âgées, un outil d’évaluation standardisé est utilisé à la grandeur du Québec : l’Outil d’évaluation multiclientèle (OEMC). Permettant de tracer le portrait général de l’état de la personne, l’OEMC est également un outil favorisant la planification des services offerts. Cependant, comme le soulignent Carrier, Morin et Garon (2012), « l’approche actuelle fait en sorte que c’est le producteur de services qui détermine à la fois les besoins de la personne et la réponse à ces besoins en établissant une offre de services préétablie. » (p. 52).

Les auteurs ajoutent qu’« alors que l’un des principes prioritaires de la gestion de cas est de faire en sorte que les services soient adaptés aux besoins de la personne, dans les faits, nous

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observons plutôt que ce sont les réponses aux besoins de la personne qui sont adaptés aux services existants. » (p. 52).

À ce tableau s’ajoute la réalité préoccupante des types d’intervention que les travailleurs sociaux réalisent auprès des aînés. Suite à l’introduction de l’OEMC et de la gestion de cas, au début des années 2000, les pratiques se sont significativement transformées de sorte qu’aujourd’hui, les travailleurs sociaux s’inquiètent de ne plus avoir le temps ou pouvoir prioriser de faire des interventions psychosociales auprès des personnes âgées en perte d’autonomie qui fréquentent les établissements (Lachapelle, Savard, Maltais, Tremblay et Bourque, 2011; Matte, 2000; Pelletier et Beaulieu, 2016). Cela s’explique notamment par l’augmentation des tâches administratives liées à la gestion de cas.

Finalement, alors que la spécificité du travail social repose sur le principe fondamental que la personne est en relation avec son environnement, il semble qu’une perspective individualiste teinte de plus en plus les pratiques (Dallera, Palazzo-Crettol et Anchisi, 2015). On la perçoit à travers les formes de services offerts, se limitant essentiellement à des soins à domicile pour la personne en perte d’autonomie et à des services de répit pour ses proches, à qui l’on propose toutefois, dans certains milieux, de participer à un groupe de soutien pour proches aidants. Les services et le soutien offerts ne sont pas pensés en termes d’accompagnement de la famille ou du couple pour traverser cette période de transition en s’assurant de préserver la qualité et la nature de leurs liens.

La pratique du travail social gérontologique dans le réseau public ne peut se faire sans la participation du milieu communautaire, dans lequel œuvrent également des travailleurs sociaux. En effet, le milieu communautaire est mis à contribution dans la dispensation des services permettant le maintien à domicile d’une population âgée en perte d’autonomie par le biais notamment des centres de jour, des centres d’action bénévole et des « popotes roulantes » (Pilon, 1997). Une partie importante des entreprises d’économie sociale ayant vu le jour dans les années 1990 offrent de plus des services d'aide à domicile.

Les aînés peuvent bénéficier des services traditionnels offerts par les organismes de sécurité alimentaire, vestimentaire ou de conseil budgétaire mais d’autres organismes s’adressant spécifiquement à cette population ont également vu le jour. Avec le soutien d’organisateurs communautaires, les aînés ont mis sur pied des milieux de vie et des organismes de défense

Figure

Tableau 1 Outils art-thérapeutiques utilisés auprès des couples
Figure 2 : Le déroulement des séances d’art-thérapie
Tableau 2 Modèle logique de l’intervention
Tableau 5 Portrait des couples participants 7

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