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La gestion des buts personnels comme stratégie d’intervention auprès d’intervenants psychosociaux se disant affectés négativement par leur profession

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Academic year: 2021

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MÉMOIRE DOCTORAL PAR ARTICLES PRÉSENTÉ À

LA FACULTÉ DES LETTRES ET SCIENCES HUMAINES

COMME EXIGENCE PARTIELLE DU DOCTORAT EN PSYCHOLOGIE (D.Ps.)

PAR LAÏA JULIÓ

LA GESTION DES BUTS PERSONNELS COMME STRATÉGIE D’INTERVENTION AUPRÈS D’INTERVENANTS PSYCHOSOCIAUX SE DISANT AFFECTÉS

NÉGATIVEMENT PAR LEUR PROFESSION

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DOCTORAT EN PSYCHOLOGIE (D.Ps.)

PROGRAMME OFFERT PAR L’UNIVERSITÉ DE SHERBROOKE

LA GESTION DES BUTS PERSONNELS COMME STRATÉGIE D’INTERVENTION AUPRÈS D’INTERVENANTS PSYCHOSOCIAUX SE DISANT AFFECTÉS

NÉGATIVEMENT PAR LEUR PROFESSION

PAR LAÏA JULIÓ

M. Léandre Bouffard, Directeur de thèse Université de Sherbrooke

Mme Micheline Dubé, Évaluatrice externe Université du Québec à Trois-Rivières

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Ce document est rédigé sous forme d’articles scientifiques, comme stipulé dans les règles institutionnelles pour les mémoires et les thèses par articles de l’Université de Sherbrooke et dans le règlement facultaire des études de 2e et 3e cycles de la Faculté des lettres et sciences humaines. Les articles ont été rédigés selon les normes éditoriales des revues pour lesquelles ils ont été soumis. Le lecteur est invité à consulter les appendices pour obtenir de plus amples renseignements sur les normes éditoriales particulières des articles

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Sommaire

Ce mémoire doctoral s’intéresse aux effets du processus de réalisation des buts personnels sur le bien-être psychologique, la satisfaction de compassion et la fatigue de compassion des professionnels de la relation d’aide. Depuis les 20 dernières années, les risques professionnels associés au domaine de la relation d’aide sont de plus en plus reconnus dans la littérature scientifique et dans les milieux de pratique. À partir des travaux de Figley sur la fatigue de compassion (1995; 2002), un important corpus de recherche a permis de mieux établir l’ampleur du phénomène. Par exemple, des taux de prévalence entre 9 % et 13 % auraient été rapportés dans des études sur la fatigue de compassion chez les intervenants psychosociaux américains (Craig & Sprang, 2010; Sprang, Clark, & Whitt-Woosley, 2007). Toutefois, les connaissances demeurent limitées quant aux interventions efficaces orientées vers la prévention des risques, la diminution des effets préjudiciables et la promotion du bien-être chez les professionnels de la relation d’aide. C’est dans cette perspective que le présent mémoire doctoral, composé de deux articles, s’inscrit. L’objectif principal du mémoire doctoral est d’aborder le processus de réalisation des buts personnels comme angle d’intervention novateur, permettant à la fois de réduire la fatigue de compassion et de favoriser le bien-être et la satisfaction de compassion chez les professionnels de la relation d’aide. Dans le premier article, une recension des écrits portant sur la façon dont le processus de réalisation des buts personnels contribue au bien-être est présentée, via l’exemple d’une

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intervention de groupe validée : Gestion des buts personnels (Bouffard, Dubé, Lapierre, & Bastin, 1996; Dubé, Bouffard, Lapierre, & Marcoux, 2014). Au terme de l’article, une recommandation est émise et des applications possibles de l’intervention sont discutées. Le deuxième article vise à évaluer l’efficacité de l’intervention Gestion des buts personnels pour favoriser le bien-être psychologique et la satisfaction de compassion, et pour réduire la fatigue de compassion chez les professionnels de la relation d’aide. Pour ce faire, une étude quasi expérimentale de cinq semaines incluant prétest, post-test et groupe de contrôle a été conduite. Une version adaptée du programme Gestion des buts personnels a été appliquée à un groupe d’intervenant(e)s en relation d’aide issu(e)s d’organismes communautaires montréalais (n = 13). Des indices de bien-être psychologique (satisfaction de vie globale et satisfaction professionnelle, sens à la vie, présence d’affects positifs et négatifs) et le niveau de satisfaction/fatigue de compassion ont été évalués, avant et suivant leur participation au programme. Une mesure visant à évaluer les progrès des participants quant aux étapes de réalisation d’un but a également été prise, à des fins de vérification expérimentale de la démarche Gestion des buts personnels. Au moyen d’analyses de variance mixtes, les scores obtenus par les participants du groupe d’intervention Gestion des buts personnels ont été comparés à ceux du groupe de contrôle (n = 9) aux deux temps de mesure (prétest et post-test). Des données qualitatives ont également été recueillies, afin de mieux documenter les effets de la démarche. Les hypothèses de l’étude ont été partiellement validées. Un résultat d’interaction a été observé entre le processus de réalisation des buts personnels et la satisfaction de compassion. Au terme de leur démarche, les participants du groupe

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Gestion des buts personnels ont expérimenté une hausse de satisfaction de compassion (F (1, 20) = 5,21, p = 0,03, η2= 0,21). Contrairement aux prédictions, l’intervention Gestion des buts personnels n’a pas induit une diminution de la fatigue de compassion ni une hausse de bien-être psychologique statistiquement significatif (seuil de signification établi à α = 0,05). Cela dit, une tendance allant dans le sens des hypothèses de départ a été constatée. Ces résultats sont discutés à la lumière du matériel qualitatif tiré des rencontres avec les participants. Cette étude révèle entre autres l’importance d’étudier plus en profondeur l’interaction entre le processus de réalisation des buts et la satisfaction de compassion dans le traitement de la fatigue de compassion. En somme, les deux articles de ce mémoire doctoral apportent des contributions significatives, tant sur l’avancée des connaissances théoriques que sur la pratique professionnelle. Au point de vue théorique, les résultats discutés mettent en lumière la complexité des liens qui unissent la gestion des buts personnels et la satisfaction de compassion. Pour ce qui est de la contribution à la pratique professionnelle, ce mémoire doctoral apporte un éclairage nouveau sur les interventions à privilégier en matière de fatigue de compassion. Les résultats suggèrent l’importance de développer des interventions de groupe orientées vers le développement de la satisfaction de compassion.

Mots clés : Fatigue de compassion, satisfaction de compassion, buts personnels, bien-être psychologique, intervention de groupe

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Table des matières

Sommaire………iv

Remerciements………viii

Avant-propos……….1

Introduction………8

Premier article. Processus de réalisation des buts personnels et bien-être subjectif : synthèse et applications………24

Introduction au deuxième article ……….58

Deuxième article. Le bien-être, la satisfaction de compassion et la fatigue de compassion chez les professionnels de la relation d’aide: les effets d’une intervention de groupe axée sur la gestion des buts personnels………61

Conclusion générale………...111

Références ……….118

Appendice A. Normes de présentation des revues et preuve de soumission…………126

Appendice B. Cahier du participant : formulaire de consentement libre et éclairé et questionnaires ………138

Appendice C. Documents de présentation de l’étude pour le recrutement des participants ………154

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Remerciements

La rédaction de ce mémoire doctoral a représenté un défi important dans mon parcours scolaire. Plusieurs personnes m’ont soutenue pendant ce processus et j’aimerais leur témoigner ma reconnaissance.

Je tiens d’abord à exprimer ma plus profonde gratitude à mon directeur de mémoire doctoral, Léandre Bouffard, qui m’a guidée tout au long du processus, avec la patience et l’humour qui le caractérise. Son regard critique, sa rigueur, mais aussi sa passion et l’étendue de ses connaissances m’ont grandement inspirée. Je me considère très chanceuse d’avoir pu bénéficier de son soutien et de son encadrement.

Merci à Micheline Dubé pour le partage enthousiaste de ses connaissances quant à l’animation du programme Gestion des buts personnels.

Merci à toutes les participantes et aux organismes dont elles sont issues d’avoir nourri ma réflexion et d’avoir rendu ce projet possible. Leur implication a été essentielle à ce projet.

Finalement, un gros merci à mes proches. À ma famille et à mes ami(e)s, merci pour vos encouragements et votre présence. À mon amoureux Julien, merci d’avoir cru en moi et de m’avoir soutenue au quotidien.

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Le travail en relation d’aide est singulier, dans la mesure où il implique d’intervenir auprès de personnes vulnérables et demande une mobilisation constante des ressources empathiques du professionnel traitant (Kinman & Grant, 2016). Il a été démontré que ce type de travail exerce un impact sur les professionnels de la relation d’aide, notamment chez ceux qui interviennent auprès des victimes de traumatismes (Craig & Sprang, 2010; Musa &Hamid, 2008), chez les intervenants en protection de l’enfance (Conrad & Kellar-Guenther, 2006), chez les psychologues (Aukstinaitytė & Zajančkauskaitė-Staskevičiene, 2010), chez les psychiatres (Sprang et al., 2007) et chez les travailleurs sociaux (Adams, Boscarino, & Figley, 2006).

Les répercussions recensées chez les professionnels de la relation d’aide se situent à plusieurs niveaux et prennent des formes variées (Figley & Stamm, 1996). D’abord au niveau personnel, des impacts cognitifs, émotionnels et comportementaux ont été rapportés (Berzoff & Kita, 2010). Par exemple, au plan cognitif, des difficultés de concentration, la remise en question de certaines croyances fondamentales, une perte de sens et, chez les intervenants qui travaillent auprès d’une clientèle traumatisée, des reviviscences traumatiques (p. ex. cauchemars, flash) ont été notées.

Au plan émotionnel, une diminution de la confiance professionnelle (p. ex. discours dénigrants envers soi-même, doutes quant à ses compétences), ainsi qu’une minimisation des difficultés vécues au travail ont été ciblées.

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les habitudes de vie des professionnels ont été constatés, dont la diminution des loisirs pratiqués, la baisse d’initiatives personnelles et la hausse ou l’apparition de comportements addictifs et autodestructeurs (Berzoff & Kita, 2010; Geoffrion, Morselli, & Guay, 2016).

Pour ce qui est des impacts au plan physique, des troubles du sommeil, une altération de l’appétit et des symptômes intéroceptifs d’anxiété (p. ex. accélération du rythme cardiaque) ont été identifiés chez certains professionnels de la relation d’aide affectés par leur travail (Adams et al., 2006). En ce qui concerne les répercussions au niveau interpersonnel, l’isolement et le repli sur soi, la méfiance envers autrui, l’irritabilité dans les rapports aux autres et une distance/perte d’intérêt dans les relations avec les proches ont été constatés (Figley & Stamm, 1996; Geoffrion et al., 2016).

Finalement, au niveau du travail, plusieurs conséquences sur la qualité de la relation entre le professionnel et le client auraient été ciblées, en raison d’une capacité réduite à faire preuve d’empathie de la part du professionnel, d’un sentiment de détachement et de déconnexion vis-à-vis du client, de l’évitement des sujets difficiles dans les rencontres, d’une tendance à la minimisation et à la banalisation du vécu du client, d’émotions négatives à l’endroit du client (p. ex. irritabilité face à ce qui est perçu comme un manque de mobilisation), mais aussi en raison d’une suridentification ou d’un surinvestissement du client, d’une prise en charge excessive, d’un non-respect du cadre et des limites thérapeutiques, d’un non-respect du rythme de changement du client et

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d’un sentiment d’impuissance (Negash & Sahin, 2011). Outre les préjudices causés au lien thérapeutique, des impacts dans le milieu de travail ont également été répertoriés, tels qu’une diminution du rendement et de la qualité du travail accompli, ainsi que l’évitement des collègues et du milieu de travail (p. ex. absentéisme) (Adams et al., 2006).

Depuis les 20 dernières années, la reconnaissance des impacts préjudiciables décrits plus haut est grandissante chez les professionnels-cliniciens et dans la communauté scientifique, ce qui a permis le développement d’un vocabulaire visant à illustrer de façon plus précise la réalité des travailleurs en relation d’aide (Newell, Nelson-Gardell, & MacNeil, 2016; Thomas & Wilson, 2004). Ainsi, des termes tels que « fatigue de compassion », « stress traumatique secondaire » et « trauma vicariant » s’ajoutent maintenant à l’« épuisement professionnel » pour tenter d’expliquer les conséquences au plan physique, psychologique et émotionnel pouvant affecter les professionnels de la relation d’aide (Baird & Kracen, 2006; Newell & MacNeil, 2010; Rae-Jenkins & Baird, 2005).

Avec la sensibilisation accrue pour le phénomène, plusieurs interventions ayant pour objectif la prévention et la réduction des impacts préjudiciables du travail en relation d’aide sur le professionnel ont été mises sur pied dans la dernière décennie (Molnar, Sprang, Killian, Gottfried, Emery, & Bride, 2017). Parmi celles-ci, on compte entre autres des programmes visant à promouvoir la santé et le bien-être via l’intégration

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d’un mode de vie équilibré (Dane, 2000) et le développement de stratégies d’« auto-développement » (Mathieu, 2012), l’accès à de la supervision et au auto-développement professionnel (Sprang et al., 2007), ainsi que des stratégies de reconnaissance et de régulation émotionnelle (Miller & Sprang, 2016).

Toutefois, l’efficacité de ces interventions est controversée dans la littérature, étant donné d’importantes lacunes au plan méthodologique qui rendent l’interprétation des résultats non concluante (Molnar et al., 2017). En effet, dans une méta-analyse portant sur l’efficacité des interventions sur la fatigue de compassion, le stress traumatique secondaire et la traumatisation vicariante, aucune des 159 études analysées n’a satisfait les critères d’inclusion de la revue systématique (Bercier & Maynard, 2015). Les principaux critères d’inclusion utilisés étaient les suivants : (1) l’objectif principal de l’étude devait être d’évaluer une intervention visant à diminuer les symptômes de fatigue de compassion, de stress traumatique secondaire et de traumatisation vicariante chez des professionnels de la santé mentale, (2) l’étude devait employer un devis expérimental ou quasi expérimental avec randomisation et condition de contrôle. Ces résultats de recherche ont amené Bercier et Maynard (2015) à conclure que « des recherches additionnelles sont requises pour permettre aux professionnels de la relation d’aide et à leurs employeurs de choisir et d’implanter un programme d’intervention validé empiriquement qui leur correspond » [traduction libre] (p. 6). Ainsi, le besoin de mesurer systématiquement l’efficacité des interventions visant à favoriser un mieux-être

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professionnel et à réduire les impacts préjudiciables associés au travail en relation d’aide demeure criant. C’est dans cette perspective que le présent mémoire doctoral s’inscrit.

Ce mémoire doctoral est constitué de deux articles, dont l’objectif général est d’évaluer la pertinence d’employer le processus de réalisation des buts personnels comme stratégie d’intervention chez les professionnels de la relation d’aide souffrant de fatigue de compassion. Le mémoire doctoral est organisé en quatre parties. La première partie comprend l’introduction. Une typologie des principales difficultés associées aux professions d’aide y est présentée. Pour ce faire, les concepts de traumatisation primaire et secondaire sont définis. Les termes « fatigue de compassion » (FC), « traumatisation vicariante » (TV), « stress traumatique secondaire » (STS) et « épuisement professionnel/burnout » (ÉP) sont ensuite discutés. Puis, le taux de prévalence de la FC et certains facteurs de risques associés sont abordés, tout comme les effets positifs associés au travail en relation d’aide, regroupés sous l’appellation « satisfaction de compassion » et « croissance post-traumatique ». Finalement, les diverses avenues d’interventions au plan individuel, de groupe et organisationnelles mises en place à ce jour pour prévenir ou réduire les effets associés à la fatigue de compassion sont exposées et critiquées.

La deuxième partie présente le premier article qui s’intitule « Processus de réalisation des buts personnels et bien-être subjectif : synthèse et applications ». Cet article se veut un exercice d’intégration de la recherche, qui permet d’appuyer

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scientifiquement le processus de gestion des buts personnels comme stratégie d’auto-développement pertinente. À travers une synthèse des écrits et par l’illustration de l’intervention Gestion des buts personnels (GBP) (Bouffard et al., 1996; Dubé, Lapierre, Bouffard, & Alain, 2007; Lapierre et al., 2011), l’article met en lumière la façon dont les différentes étapes qui composent le processus de réalisation des buts (élaboration, planification, poursuite, évaluation) favorisent le bien-être. Aussi, des applications possibles de l’intervention Gestion des buts personnels sont discutées et une principale recommandation visant à bonifier le programme est émise. L’article a été soumis en novembre 2016 et publié en juillet 2017 à la Revue québécoise de psychologie, avec pour auteure Laïa Julió, l’auteure de ce mémoire doctoral. Voici la référence de l’article :

Julió, L. (2017). Processus de réalisation des buts personnels et bien-être subjectif : synthèse et applications. Revue québécoise de psychologie, 38(2), 81-99.

Afin de faciliter la cohérence entre le premier et le second article, une section de transition a été insérée. Le contenu du premier article est résumé, le rationnel derrière l’utilisation du programme GBP auprès des professionnels de la relation d’aide est expliqué et les modifications apportées au programme d’origine GBP pour le rendre plus adapté à cette clientèle sont présentées.

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La troisième partie est constituée du deuxième article. Il s’intitule « Le bien-être, la satisfaction de compassion et la fatigue de compassion chez les professionnels de la relation d’aide : les effets d’une intervention de groupe axée sur la gestion des buts personnels ». Ce second article est de nature empirique. Il a pour objectif d’évaluer, par une étude quasi expérimentale avec deux temps de mesure (prétest et post-test) et groupe de contrôle, l’efficacité d’une version adaptée du programme Gestion des buts personnels en termes de réduction de la fatigue de compassion et de promotion du bien-être/de la satisfaction de compassion chez 22 intervenants en relation d’aide issus d’organismes communautaires de la région de Montréal (groupe expérimental : n = 13 ; groupe contrôle : n = 9). L’article a été soumis par l’auteure du présent mémoire doctoral pour publication à la revue Pratiques psychologiques (Appendice A).

La quatrième et dernière partie est composée de la conclusion générale du mémoire doctoral. Une synthèse des deux articles y est d’abord présentée. Puis, les implications au plan clinique et empirique sont discutées afin de mieux orienter les recherches futures.

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En milieu professionnel, on remarque un usage de plus en plus répandu des termes associés aux difficultés vécues par les intervenants en relation d’aide, tels que la fatigue de compassion (Newell et al., 2016). Il est possible de voir en cette émergence des concepts le témoignage d’un besoin, chez cette population, que leurs difficultés soient reconnues et un désir d’adopter les meilleures pratiques pour s’en protéger. Toutefois, une confusion au plan théorique rendrait laborieuse l’opérationnalisation de ces construits et l’implantation subséquente de programmes d’interventions efficaces (Cox & Steiner, 2013; Newell & Nelson-Gardell, 2014). En effet, plusieurs chercheurs déplorent le flou conceptuel entourant les principales difficultés propres au travail en relation d’aide et la façon dont les termes sont fréquemment utilisés comme synonymes dans la littérature scientifique (Baird & Kracen, 2006; Craig & Sprang, 2010; Newell & Nelson-Gardell, 2014). C’est dans cette optique que certains auteurs ont proposé une typologie visant à clarifier ces définitions et il est maintenant possible de les conceptualiser avec plus de précision (Baird & Kracen, 2006; Thomas & Wilson, 2004).

Les impacts du travail en relation d’aide : une typologie

Des impacts positifs et négatifs du travail en relation d’aide ont été répertoriés chez les professionnels traitants (Linley & Joseph, 2007). Du côté des impacts négatifs, quatre principaux termes sont communément cités dans la littérature scientifique pour décrire les difficultés que les professionnels de la relation d’aide sont susceptibles de ressentir de par la nature de leur travail: l’épuisement professionnel (ÉP), la

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traumatisation vicariante (TV), le stress traumatique secondaire (STS) et la fatigue de compassion (FC) (Molnar et al., 2017; Newell et al., 2016; Rothschild & Rand, 2006; Phelps, Lloyd, Creamer, & Forbes, 2009). Certains concepts alternatifs ont été développés et utilisés par le passé, dont la « covictimisation », « la contagion émotionnelle », « la victimisation secondaire » et le « stress traumatoïde » (Newell et al., 2016). Ils seraient toutefois rarement employés dans les écrits actuels et ne seront donc pas abordés ici.

L’épuisement professionnel/burnout (ÉP). L’épuisement professionnel est décrit comme un phénomène psychosocial d’épuisement au plan physique, émotionnel et psychologique en réponse à des stresseurs chroniques et cumulatifs au travail. L’épuisement professionnel se développerait de façon graduelle et comporterait trois principales dimensions : l’épuisement, le cynisme/dépersonnalisation et le sentiment d’inefficacité (Maslach, Schaufeli, & Leiter, 2001; Maslach, 2003a; 2003b). Trois principaux groupes de facteurs de risque impliqués dans l’ÉP ont été identifiés : (1) les facteurs individuels (p. ex. âge, sexe, niveau d’éducation, traits de personnalité, stratégies d’adaptation, sentiment d’efficacité personnelle); (2) les caractéristiques liées à l’emploi (p. ex. la charge de travail du professionnel, la pression des échéanciers, nombre d’heures travaillées, relations interpersonnelles au travail, la clientèle desservie); et (3) les caractéristiques organisationnelles du milieu de travail (hiérarchie, règlements, ressources, aspects sociaux, économiques et culturels) (Maslach et al., 2001).

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L’ÉP est abordé pour la première fois dans la littérature scientifique vers les années 1960 et au début des années 1970 (Maslach & Schaufeli, 1993). Dans les années 1980 et au début des années 1990, l’intérêt pour le sujet du stress au travail s’accentue et la recherche sur l’ÉP provoque une hausse de conscientisation quant aux effets préjudiciables possibles du travail clinique pour les professionnels de la relation d’aide. L’idée selon laquelle le travail auprès d’une clientèle vulnérable peut provoquer un impact négatif sur le professionnel, au-delà de l’ÉP ou des notions de contretransfert se développe alors (Newell & Nelson-Gardell, 2014). En effet, contrairement au concept de fatigue de compassion (FC), l’ÉP n’est pas une condition exclusivement liée au travail en relation d’aide dans la mesure où il ne s’inscrit pas spécifiquement dans le cadre d’une relation thérapeutique et n’implique pas un processus de traumatisation secondaire. Il semblerait que l’engagement empathique auprès d’une clientèle vulnérable, caractéristique inhérente au travail en relation d’aide, produise des symptômes particuliers illustrés par la FC.

La traumatisation vicariante (TV). Le terme « traumatisation vicariante » (TV) a été développé dans les années 1990 principalement à partir des travaux de Laurie Anne Pearlman (McCann & Pearlman, 1990) sur les survivant(e)s d’inceste et de violences sexuelles. À l’origine, la TV était dépeinte comme une expérience émotionnelle difficile vécue par un(e) thérapeute impliqué(e) dans le traitement d’un(e) client(e) victime d’un trauma, en raison de son engagement empathique constant auprès de cette personne (McCann & Pearlman, 1990). Dans un contexte de relation d’aide, la traumatisation

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vicariante se définit aujourd’hui comme une transformation durable au niveau cognitif vécue par le professionnel après avoir été en contact de façon prolongée avec des victimes de traumatismes (Pearlman & Saakvitne, 1995). Ces changements cognitifs affecteraient les croyances fondamentales du professionnel concernant la sécurité dans le monde, la vulnérabilité personnelle et la bienveillance humaine (McCann & Pearlman, 1990). Un exemple serait la confiance ébranlée d’une thérapeute envers les hommes, en réponse aux récits répétés de victimes de viol. Dans cet exemple, la croyance selon laquelle la plupart des êtres humains sont fondamentalement bons et que le monde est un endroit sécuritaire pourrait être mise à mal. Selon certains auteurs, la traumatisation vicariante serait couramment vécue par les professionnels de la relation d’aide, étant donnée leur exposition plus fréquente aux victimes de trauma (Baird & Kracen, 2006). D’autres suggèrent qu’en l’absence d’une prise en charge, la traumatisation vicariante pourrait entraîner une perturbation complète de la capacité à prendre soin d’autrui et de soi-même, par un épuisement des ressources psychologiques (Pearlman & Saakvitne, 1995; Rothschild & Rand, 2006; Newell et al., 2016).

Le stress traumatique secondaire (STS). Le concept de STS a été développé au cours des années 1990 principalement par Charles Figley, via ses travaux sur l’État de stress post-traumatique (ÉSPT) (Figley, 1995). La question principale guidant ses recherches était de déterminer si le fait d’interagir avec une victime de traumatisme pouvait exercer un impact sur le professionnel traitant. Le STS était alors conçu comme étant un ensemble de « comportements et émotions normaux provenant du désir d’aider une

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personne importante ou un(e) client(e) ayant vécu une expérience traumatique » [traduction libre] (Figley, 1995, p. 7). En effet, semblable au concept de TV proposé par Pearlman (Pearlman & Saakvitne, 1995), le STS était vu comme résultant d’un engagement empathique de la part d’une personne envers une victime de trauma. Selon la définition actuelle, le STS s’apparenterait à l’ÉSPT tel que défini dans le DSM-5 (American Psychiatric Association, 2013). Ainsi, les symptômes que l’on retrouve dans l’ÉSPT (pensées intrusives, souvenirs traumatiques, cauchemars, insomnie, irritabilité, fatigue, troubles de concentration, évitement du matériel évoquant le trauma, et hypervigilance) sont ressentis dans une moindre mesure chez les personnes souffrant de STS (Bride, Radney, & Figley, 2007; Figley, 1995; Rothschild, 2000). Au contraire de la TV où les symptômes sont internes et cognitifs, le STS se distingue par des symptômes « observables » comportementaux et émotionnels (Baird & Kracen, 2006; Newell & MacNeil, 2010). Selon la définition employée de nos jours, le STS ne serait pas spécifiquement lié à l’empathie ni au désir d’aider autrui. Un individu ayant été témoin d’un traumatisme vécu par autrui pourrait ainsi être affecté par des symptômes de STS, sans se sentir investi d’un désir de venir en aide à la personne traumatisée (Rothschild, 2000). Une exposition prolongée à des récits traumatique et le fait d’avoir vécu soi-même un évènement traumatisant par le passé sont deux facteurs de risque pouvant favoriser le développement du STS (Baird & Kracen, 2006).

La fatigue de compassion (FC). La FC est le terme le plus récent utilisé pour dépeindre les réactions psychologiques préjudiciables vécues par un professionnel de la relation

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d’aide en raison de son travail. Le concept s’est développé à partir des travaux précédents effectués sur la TV et le STS (Newell et al., 2016). Le rôle de l’empathie se trouve au cœur de ce construit développé par Figley (1995; 2002). La FC est décrite comme l’éventail de symptômes pouvant se développer lorsqu’un individu est engagé émotionnellement auprès d’une personne/population vulnérable, de façon répétée et tous contextes confondus (Adams et al., 2006; Figley, 2002). Selon le modèle de Figley (1995; 2002), il y aurait dans la FC la cooccurrence des symptômes de STS (p. ex., évitement, pensées intrusives, hypervigilance) et de symptômes associés à l’épuisement professionnel (p. ex., désengagement vis-à-vis du travail, impuissance) (Adams et al., 2006; Bride et al., 2007). Ultimement, en plus des symptômes de STS et d’EP, la FC produirait une érosion de l’empathie chez la personne touchée, pouvant nuire au processus thérapeutique (Adams et al., 2006).

Dans cet écrit, le concept de FC sera privilégié comme variable à l’étude pour plusieurs raisons telles que sa définition générale et inclusive qui regroupe un large éventail de symptômes (Bride et al., 2007; Figley, 2002; Turgoose & Maddox, 2017), la possibilité d’évaluer les symptômes via un questionnaire établi (Stamm, 2010), et l’accent mis sur le rôle de l’empathie dans le développement des symptômes chez les professionnels de la relation d’aide (Figley, 2002).

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La prévalence de la fatigue de compassion

La majorité des études sur la prévalence de la FC comportent des lacunes au plan méthodologique, en raison des difficultés mentionnées ci-haut concernant la façon dont les construits sont définis et opérationnalisés (Molnar et al., 2017), mais aussi en raison d’une réticence chez les professionnels de la relation d’aide à révéler des propos pouvant être stigmatisants ou pouvant affecter leur sécurité d’emploi (Hensel, Ruiz, Finney, & Dewa, 2015). Il paraît donc difficile de se positionner clairement sur l’étendue du phénomène. Cependant, dans des études réalisées auprès d’intervenants psychosociaux américains, le taux de prévalence de FC rapporté aurait été de 9 % (Craig & Sprang, 2010) à 13 % (Sprang et al., 2007). En effet, plusieurs suggèrent que la FC serait saillante chez plusieurs professionnels de la relation d’aide vu la sollicitation constante de leurs ressources empathiques (Adams et al., 2006; Sprang et al., 2007) et qu’une plus forte prévalence serait constatée chez les personnes œuvrant auprès des victimes de trauma (Craig & Sprang, 2010; Musa &Hamid, 2008; Sodeke-Gregson, Holttum, & Billings, 2013). Par exemple, dans une recherche réalisée auprès de 363 intervenants en protection de l’enfance, une prévalence de FC de 50 % a été rapportée par Conrad et Kellar-Guenther (2006). Aussi, 25 % des travailleurs sociaux impliqués auprès des victimes des attentats terroristes de 2011 à New York rapportaient être affectés par la FC (Boscarino, Figley, & Adams, 2004). Au Québec spécifiquement, le taux de prévalence de FC chez les psychologues se situerait autour de 10 % (Robert, 2014).

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Les effets positifs du travail en relation d’aide : la croissance post-traumatique et la satisfaction de compassion

Même si la plupart des recherches qui s’intéressent aux impacts du travail en relation d’aide sur les professionnels ciblent davantage les répercussions négatives, certains bienfaits ont également été répertoriés (Linley & Joseph, 2007). Deux termes sont fréquemment utilisés dans la littérature pour témoigner de ces effets positifs : la croissance post-traumatique vicariante et la satisfaction de compassion.

La croissance post-traumatique vicariante (CPTV). La croissance post-traumatique est caractérisée par des changements positifs au plan personnel, interpersonnel et spirituel/transcendantal qui surviennent chez un individu à la suite d’une expérience difficile transformatrice (Tedeschi & Calhoun, 1996). Par exemple, une plus grande appréciation de la vie, plus d’ouverture à de nouvelles opportunités et des relations interpersonnelles plus satisfaisantes ont été rapportées par des individus ayant vécu des évènements difficiles ayant transformé leurs croyances fondamentales. La croissance post-traumatique vicariante décrit l’expérience d’un individu, qui sans avoir été directement exposé à l’évènement difficile, expérimente ces mêmes transformations positives (Arnold, Calhoun, Tedeschi, & Cann, 2005). La CPTV est un phénomène reconnu qui a été répertorié chez plusieurs professionnels de la relation d’aide, dont les psychologues, psychothérapeutes et travailleurs sociaux (Manning-Jones, de Terte, & Stephens, 2015).

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La satisfaction de compassion. Le concept de satisfaction de compassion fait référence au plaisir et à la valorisation que procure le fait d’aider autrui (Stamm, 2010). L’action de prendre soin produirait une gratification importante et soutiendrait un sentiment de compétence; de « devoir bien accompli » pour le professionnel (Figley, 2002). Selon certains, la satisfaction de compassion et la CPTV pourraient exercer un « effet tampon » protecteur, qui contrebalancerait les impacts préjudiciables du travail en relation d’aide (Collins & Long, 2003; Gentry, Baggerly, & Baranowsky, 2004; Hunter, 2012). À ce sujet, Hunter (2012) estime que plus de recherches sont nécessaires pour déterminer quels facteurs contribuent à cette expérience positive qui protège cliniciens et clients de la FC.

Facteurs de risque et de protection de la FC

L’intérêt pour l’étude des prédicteurs de la FC chez les professionnels de la relation d’aide est croissant dans la littérature scientifique (Molnar et al., 2017) et plusieurs facteurs de risque/de protection potentiels tels que les traits de personnalité (p. ex. optimisme), le sentiment d’efficacité personnelle et des variables associées à l’environnement de travail (p. ex. climat organisationnel, rôle professionnel) sont ciblés dans les recherches actuelles (Hensel et al., 2015). Dans une méta-analyse de 38 recherches effectuée par Hensel et ses collègues (2015), 17 facteurs de risque/de protection pour le développement de la FC et du STS ont été identifiés chez des thérapeutes impliqués auprès de victimes de trauma. Parmi ceux-ci, la proportion de temps consacrée au travail avec les victimes de traumatisme, avoir soi-même un

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historique de trauma, être de sexe féminin, le soutien social (p. ex. famille et amis), le soutien au travail (p. ex. collègues et superviseurs), l’implication émotionnelle, la croissance post-traumatique vicariante (CPTV) et la supervision ont se sont avérés significatifs. Au sujet de la CPTV, dans des entretiens effectués auprès de 21 psychologues œuvrant auprès d’une clientèle traumatisée, 18 d’entre eux ont rapporté des changements positifs permanents quant à leur vision du monde et leurs croyances, ainsi qu’une augmentation de compassion et de sensibilité (Arnold et al., 2005). Aussi, un facteur de protection crucial selon plusieurs serait le développement de stratégies efficaces « d’auto-développement » (self-care) (Alkema, Linton, & Davies, 2008; Craig & Sprang, 2010; Merriman, 2015). Une bonne connaissance de ces facteurs de risque et de protection apparaît importante, dans la mesure où elle permet le développement d’interventions pertinentes et ajustées pour les professionnels de la relation d’aide (Phelps et al., 2009).

La prévention et les pistes d’intervention visant à réduire les effets de la fatigue de compassion

Dans la dernière décennie, le nombre d’interventions créées pour réduire et/ou prévenir les effets de la fatigue de compassion, du stress traumatique secondaire et du trauma vicariant a augmenté (Bercier & Maynard, 2015). Les approches d’intervention sont d’ailleurs variées en termes de modalités (p. ex. individuelles, de groupe, organisationnelles), de facteurs de risques ciblés et d’angles d’intervention employés (p. ex. augmentation de la résilience, hygiène de vie, stratégies de coping). Dans les

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paragraphes qui suivent, les principaux traitements développés à ce jour pour intervenir auprès des professionnels de la relation d’aide affectés par la FC seront présentés.

La psychothérapie traditionnelle. Divers modèles théoriques de psychothérapie sont employés comme traitement pour la FC. L’un de ces modèles théoriques est la thérapie cognitive comportementale (TCC), dont les postulats de base suggèrent entre autres une relation entre les pensées, les émotions et les comportements (Payne, 2005). Les interventions issues de cette approche comprennent la désensibilisation systématique, l’activation comportementale, l’auto-observation, la psychoéducation, les stratégies de gestion du stress, la restructuration cognitive et la résolution de problèmes. Employées auprès de professionnels de la relation d’aide affectés par la FC, les interventions TCC agissent sur la façon dont ces derniers interprètent leurs réalités et ciblent leurs stratégies d’adaptation (Inbar & Ganor, 2003). Par exemple, « s’entraîner à résister au stress » (stress inoculation training) est une intervention TCC en trois parties qui emploie la psychopédagogie sur la FC, le développement de stratégies d’adaptation et l’exposition aux stresseurs comme méthodes de traitement (Inbar & Ganor, 2003). L’efficacité de cette intervention a été testée auprès de travailleurs en centre d’aide à l’enfance dans une étude pilote par Dane (2000). Bien que d’après l’auteur, aucune conclusion définitive ne puisse être tirée de l’étude étant donnée l’absence de prétest et de post-test permettant de mesurer les symptômes initiaux et finaux de FC, l’intervention aurait été utile d’après l’appréciation subjective des participants.

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La formation et le développement professionnel. Le rationnel derrière l’emploi de stratégies qui utilisent la formation et le développement professionnels est de soutenir le sentiment d’efficacité personnelle chez le professionnel, de par un accès à des connaissances supplémentaires sur la clientèle traitée et sur les façons efficaces d’intervenir auprès d’elle (Prati, Pietrantoni, & Cicognani, 2010; Sprang et al., 2007). En appui à ces méthodes d’intervention, une étude réalisée par Finklestein, Stein, Greene, Bronstein, et Solomon (2015) suggère qu’un nombre réduit d’années d’études et qu’un faible sentiment d’efficacité personnelle serait corrélé à un taux plus élevé de TV. Étant donné la nature corrélationnelle de l’étude, il est toutefois difficile de se prononcer sur l’impact réel de ces facteurs sur la FC.

La psychopédagogie. Le partage de notions psychopédagogiques est employé dans certaines interventions préventives, dont la visée est d’éduquer les intervenants en relation d’aide à propos de la FC pour qu’ils puissent, par leurs connaissances du concept et de leurs « signaux d’alarme personnels », développer des outils pour recadrer leurs expériences (Reivich & Shatté, 2002). Par exemple, dans un programme sur le STS développé par Gentry et al. (2004), 73 infirmières aux soins d’urgence ont appris à identifier leurs symptômes de STS, ainsi qu’à mieux les réguler. Suite à leur participation au programme, une diminution significative de STS a été constatée. Un autre exemple d’une intervention utilisant l’angle psychopédagogique serait « l’entraînement à la résilience vicariante » (Shew, 2010). Shew (2010), s’est penchée sur l’efficacité de l’entraînement à la résilience vicariante dans une étude

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semi-expérimentale employant des mesures pré-test et postest, réalisée auprès de 25 professionnels à risque de développer des symptômes de FC. Dans cette étude, les participants assistaient à une conférence de trois jours où des notions psychopédagogiques sur la FC et sur la résilience leurs étaient transmises. Après les quatre semaines du programme, 71 % des participants ont rapporté un changement positif en lien avec leurs symptômes de FC. Aussi, dans une étude portant sur la FC et la STS dans les unités de soins pédiatriques, Meadors et Lamson (2008) ont démontré une amélioration significative dans la sensibilisation à la FC et STS et dans l’identification de stratégies pour faire face aux stresseurs dans le milieu de travail chez les participants, à la suite de leur participation à un séminaire éducationnel sur ces thèmes.

La promotion de la santé et du bien-être (auto-développement). Souvent autoadministrées, ces interventions sont celles qui sont le plus fréquemment employées pour le traitement et la prévention de la FC (Molnar et al., 2017). Les stratégies d’auto-développement incluent la pratique du yoga et de la méditation de pleine conscience, veiller à conserver un équilibre entre le travail et la vie privée, intégrer la pratique régulière d’activité physique et une alimentation saine, etc. Le rationnel qui sous-tend cette approche est le suivant : prendre soin de lui-même permettrait au professionnel de « recharger ses batteries », ce qui le rendrait plus disponible pour ensuite prendre soin d’autrui (Molnar et al., 2017). Selon plusieurs, les stratégies d’auto-développement seraient les plus efficaces autant du point de vue de la prévention que du traitement de la FC (Coetzee & Klopper, 2010; Dane, 2000; Neville & Cole, 2013). Par exemple, le

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programme de réduction du stress par la pleine conscience (MBSR, Kabat-Zinn, 2003) est une intervention documentée de type « self-care » qui est de plus en plus recommandée pour la prévention et le traitement de la FC (Thieleman & Cacciatore, 2014). L’approche de la promotion de la santé et du bien-être paraît particulièrement bénéfique dans le cas de la FC, puisqu’elle encourage le professionnel de la relation d’aide à se montrer plus compatissant envers lui-même. D’ailleurs, le manque de compassion envers soi est considéré par certains comme un facteur de risque plus important dans le développement de l’ÉP et de la FC que le type de matériel amené par le client (traumatique ou non) et le contexte organisationnel (Newell et al., 2016).

À ce jour, une seule méta analyse portant sur l’efficacité de ces interventions a été effectuée (Bercier & Maynard, 2015). D’après Bercier et Maynard (2015), en raison des lacunes méthodologiques des interventions recensées, il serait impossible de se prononcer sur leur efficacité en termes de réduction de symptômes de la FC. Ainsi, il est difficile autant pour les professionnels eux-mêmes que pour des institutions telles que les organismes communautaires, de savoir quelle intervention mettre en place pour prévenir les effets de la FC (Bober & Regehr, 2006). Il paraît donc pertinent de réfléchir aux interventions fondées empiriquement qui ont démontré leur efficacité auprès d’une clientèle variée, pour évaluer leur applicabilité et leur efficacité auprès des professionnels de la relation d’aide affectés par la FC. À cet égard, il pourrait être opportun de se pencher sur le processus de réalisation des buts personnels comme angle d’intervention novateur auprès des professionnels de la relation d’aide.

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Premier article

Processus de réalisation des buts personnels et bien-être subjectif : synthèse et applications

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Titre courant: BUTS PERSONNELS ET BIEN-ÊTRE SUBJECTIF

Processus de réalisation des buts personnels et bien-être subjectif : synthèse et applications

Personal goals striving process and subjective well-being : overview and practical implications

Laïa JULIÓ, candidate au Psy.D. Université de Sherbrooke

(819) 570-8015 laia.julio@Usherbrooke.ca

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Résumé

Cet article présente une synthèse des connaissances portant sur la relation entre le processus de réalisation des buts personnels et le bien-être subjectif. Les différents facteurs qui favorisent l’atteinte d’un but et les étapes qui caractérisent la démarche vers la réalisation d’un but sont discutés. Puis, les impacts qu’exerce le processus de réalisation des buts sur le bien-être subjectif sont décrits. Finalement, le programme d’intervention de groupe Gestion des buts personnels, qui porte sur la réalisation de buts est présenté, afin d’illustrer les applications cliniques possibles des données empiriques présentées.

Mots clés : buts personnels, bien-être subjectif, intervention de groupe.

Abstract

In this article, an overview of the relationship between the goal striving process and subjective well-being is presented. Different factors promoting goal attainment and the steps towards the achievement of a goal are discussed. The impacts of each step towards goal attainment on subjective well-being are described. A clinical application of the research results presented is offered through the example of Gestion des buts personnels, an existing group intervention designed to foster goal achievement.

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Introduction

Avec l’essor de la psychologie positive depuis les 15 dernières années, on constate un intérêt grandissant pour le thème du bien-être et du bonheur dans la littérature scientifique (Diener, 2013; Eid & Larsen, 2008; Seligman & Csikszentmihalyi, 2000; Veenhoven, 2012). En recherche, une attention particulière est portée aux facteurs pouvant contribuer au bien-être subjectif et des programmes d’intervention visant à accroître le bonheur se développement continuellement (Bolier, Haverman, Westerhof, Riper, Smit, & Bohlmeijer, 2013).

Le bien-être est un terme complexe aux facettes multiples et les différentes façons de le conceptualiser créent une forme d’ambigüité dans les écrits. En effets, plusieurs termes connexes tels que « bien-être subjectif », « bonheur », « satisfaction face à la vie » et « bien-être psychologique » sont souvent employés comme synonymes dans la littérature (Kahneman, 1999; Veenhoven, 2012), et ce, malgré certains efforts effectués pour clarifier la terminologie (Huta & Waterman, 2013; Ryan, Huta, & Deci, 2008). Dans le présent écrit, nous utiliserons le terme « bien-être subjectif », qui réfère à la façon dont une personne évalue son propre bien-être (Diener, 1984).

Parmi les différentes façons de conceptualiser le bonheur en psychologie, deux principales perspectives se distinguent : l’hédonisme et l’eudémonie (Huta & Waterman, 2013). Du point de vue de l’hédoniste, le bien-être subjectif se caractérise par

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l’appréciation subjective du plaisir, de la satisfaction et du bonheur. Suivant ce courant de pensée, Diener (1984) propose une définition du bien-être subjectif comme étant l’évaluation qu’un individu fait de sa propre vie. Cette évaluation serait basée sur trois principaux critères, soit la présence élevée d’émotions positives, la présence réduite d’émotions négatives et un sentiment de satisfaction face à la vie (Diener, 1984; Diener & Lucas, 1999; Diener, Oishi, & Lucas, 2003). D’après la perspective eudémonique, le bien-être subjectif et le bonheur proviendraient plutôt de la réalisation chez l’humain de son plein potentiel et d’une vie pleine de sens (Ryan et al., 2008; Schmuck & Sheldon, 2001). La théorie de l’autodétermination, qui postule que la réponse aux besoins psychologiques fondamentaux d’autonomie, de compétence et de connexions à autrui est essentielle au bien-être subjectif, appartiendrait à ce cadre conceptuel (Deci & Ryan, 1985).

Indépendamment de la perspective qu’ils ont choisi d’adopter, plusieurs auteurs des deux dernières décennies ont démontré que la réalisation des buts exerce une influence sur le bien-être subjectif (Brunstein, 1993; Diener, 1984; Emmons, 1989; 2005; Little, 1989). La visée de cet écrit est d’illustrer cette relation entre le bien-être subjectif et le processus de réalisation des buts, via l’exemple du programme d’intervention de groupe Gestion des buts personnels (GBP) (Bouffard, Dubé, Lapierre, & Bastin, 1996; Dubé, Lapierre, Bouffard, & Alain, 2007; Lapierre et al., 2011). Pour ce faire, une définition des buts sera d’abord offerte. Puis, les principales étapes qui caractérisent le processus de réalisation d’un but, de la mise en place du but jusqu’à

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l’atteinte du but, seront décrites. Ensuite, pour chacune de ces étapes vers l’atteinte d’un but, deux principaux sujets seront discutés. Dans un premier temps, les moyens pour un individu d’optimiser ses chances d’accomplir son objectif seront considérés au regard de la littérature existante. Dans un deuxième temps, la façon dont chacune des étapes vers l’accomplissement d’un but peut mener à un mieux-être sera abordée. Finalement, la pertinence de l’intervention GBP sera discutée au regard de la littérature existante sur le sujet et une recommandation à son sujet sera émise.

Les buts personnels

Se fixer un but est un moyen naturel qu’utilise l’humain pour satisfaire ses besoins, concrétiser ses valeurs, s’adapter à son environnement et effectuer des modifications comportementales dans une direction voulue (LaGuardia & Ryan, 2000; Locke & Latham, 2002). En effet, par la mise en place de buts, les individus se projettent dans le futur, organisent leurs actions en fonction des plans qu’ils dessinent pour eux-mêmes et se développent selon les résultats obtenus (Locke & Latham, 2002; Koestner, 2008). Dans la littérature scientifique en psychologie, les buts sont définis comme des représentations cognitives d’états ou de résultats possibles qu’un individu cherche à atteindre ou à obtenir (Austin & Vancouver, 1996). Pour orienter le comportement humain, ces projections mentales d’états désirés s’organiseraient selon une hiérarchie dynamique d’objectifs secondaires (Nuttin, 1985). Bien que souvent utilisés comme synonymes, les buts se distingueraient des objectifs par leur finalité plus large, plus générale. Les objectifs, ou sous-buts seraient quant à eux des plans d’action

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davantage ciblés dont la visée serait la réalisation du but général (MacLeod, 2015). Par exemple, un étudiant de niveau collégial pourrait avoir comme objectif d’obtenir un bon résultat à son examen de session, dans le but d’être ultimement admis dans le programme universitaire de son choix.

Le programme gestion des buts personnels (GBP)

La recherche sur la motivation humaine a permis de développer de nombreuses interventions visant à favoriser l’atteinte d’un but chez plusieurs populations. De telles interventions ont été répertoriées dans le domaine de la santé, pour appuyer les fumeurs souhaitant arrêter (Christiansen, Reeder, TerBeek, Fiore, & Baker, 2015), de la santé mentale, pour encourager l’adhérence au traitement chez les personnes ayant un diagnostic de trouble alimentaire (Brewin et al., 2016), de l’éducation (Lazowski & Hulleman, 2016) et du travail (Unsworth & Mason, 2016). Parmi les interventions qui visent à soutenir les individus dans la réalisation de leurs buts, le programme Gestion des buts personnels (GBP) s’est avéré efficace auprès de populations variées. Au cours des 20 dernières années, le programme GBP a été adapté, testé et validé auprès de personnes âgées en perte d’autonomie (Bouffard et al., 1996), de jeunes retraités (Dubé et al., 2007; Dubé, Lapierre, Bouffard, & Labelle, 2000), d’aînés ayant des idéations suicidaires (Lapierre et al., 2011), d’étudiants universitaires (Bouffard, Bastin, Lapierre, & Dubé, 2001), d’adultes récemment divorcés (Navratil & Lapierre, 2009) et de victimes d’agression sexuelle (Rivest, Dubé, & Dubé, 2009). Au terme de ces interventions, une amélioration significative en ce qui concerne la capacité des

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participants à progresser vers l’atteinte d’un but personnel a été notée. Des gains au niveau du bien-être subjectif ont également été constatés, comprenant entre autres une augmentation significative de la satisfaction de vivre, de l’estime de soi et du niveau d’espoir en la réalisation des projets (Rivest et al., 2009).

Le programme GBP est une intervention motivationnelle de groupe de soutien, dans laquelle les participants sont accompagnés à travers cinq grandes étapes de la réalisation d’un but personnel, soit l’élaboration, la planification, la poursuite, l’atteinte du but et l’évaluation du processus, une fois la démarche complétée. Cette intervention psychopédagogique d’une durée d’environ 10 semaines s’appuie sur des bases empiriques et théoriques provenant de la psychologie positive (Seligman & Csikszentmihalyi, 2000; Snyder & Lopez, 2009) et cognitive-comportementale (Rachman, 1997). L’intervention vise principalement à produire des effets bénéfiques en termes de bien-être subjectif auprès des participants, de par la réalisation d’un but personnel porteur de sens. Les différentes techniques utilisées pour soutenir concrètement les participants dans leur processus de réalisation d’un but seront présentées ici-bas et les modèles théoriques et empiriques dont elles sont issues seront discutés.

Les étapes du processus de réalisation d’un but

La littérature sur les buts (par exemple, Austin & Vancouver, 1996; Cantor & Fleeson, 1991) distingue diverses dimensions des buts, chacune d’elles étant associées à

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l’un ou l’autre des indices de bien-être subjectif (Dubé et al., 2000). Parmi celles-ci, on distingue le contenu des buts, l’organisation, certaines caractéristiques comme leur importance ou leur niveau de difficulté, ainsi que le processus menant à leur réalisation. Dans le présent article, nous nous limitons aux étapes du processus de réalisation d’un but, chacune d’elles contribuant au bien-être subjectif (Cantor & Sanderson, 1999; Gollwitzer, 1993; Little, 1983; Nuttin, 1985).

Étape 1 : l’élaboration du but et le bien-être subjectif.

Rehausser la motivation par la sélection autonome de buts concordants avec soi. L’élaboration d’un but est une étape cruciale qui permet entre autres de traduire une motivation vague en un objectif concret, de mieux orienter l’énergie déployée pour l’atteindre et de stimuler une autorégulation constructive des comportements dirigés vers sa réalisation (Dubé et al., 2000; Gollwitzer, 1993). Des recherches menées auprès de retraités (Dubé et al., 2000) et d’étudiants universitaires (Bouffard et al., 2001) ont démontré que les exercices d’élaboration des buts sont pertinents pour clarifier l’objectif poursuivi, pour diminuer l’anxiété associée à la poursuite d’un but et pour réduire l’égarement provoqué par la poursuite de buts trop nombreux (Dubé et al., 2000). D’ailleurs, le simple fait de caresser un projet personnel serait un prédicteur d’indices de bien-être subjectif, dont la satisfaction de vivre (Emmons, 1989) et l’espoir de le réaliser (Snyder & Lopez, 2009). Toutefois, selon certains auteurs, « tous les buts ne seraient pas créés égaux » (traduction libre : Ryan, Sheldon, Kasser, & Deci, 1996; Silva, Marques, & Teixeira, 2014). D’après la théorie de l’autodétermination de Deci et Ryan (1985) par

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exemple, des buts qui auraient été sélectionnés en respectant les besoins psychologiques fondamentaux d’un individu sembleraient plus faciles à atteindre et leurs impacts sur le bien-être subjectif seraient supérieurs (Deci & Ryan, 2000, LaGuardia & Ryan, 2000; Ryan, 2016; Silva et al., 2011). D’après ce cadre théorique, trois besoins psychologiques fondamentaux seraient à la base de la motivation humaine: le besoin d’autonomie, d’affiliation sociale et de compétence. Le besoin d’autonomie se définit comme le besoin pour un individu de décider volontairement de ses actions et qu’elles soient en congruence avec ses valeurs et intérêts réels. Le besoin de compétence concerne le besoin de se sentir efficace et capable d’atteindre ses objectifs. Le besoin d’affiliation sociale se définit comme le besoin d’appartenir à un groupe et d’avoir des liens sociaux significatifs et soutenants (voir Gagné & Forest, 2008 pour une révision). Ce modèle théorique aurait été validé entre autres au plan scolaire. Par exemple, Harter et Connell (1984) ont montré que la satisfaction des besoins d’autonomie, d’affiliation sociale et de compétence des étudiants universitaires favoriserait leur motivation et leur réussite scolaire. Des recherches suggèrent également un lien entre les trois besoins psychologiques, la motivation et la persévérance scolaires, dans la mesure où plus les étudiants universitaires rapportent être satisfaits dans ces besoins, plus ils déclarent être motivés et avoir l’intention de persister dans leurs études (Pelletier, Fortier, Vallerand, & Brière, 2001). En ce qui concerne les applications pratiques de la théorie de l’autodétermination, plusieurs interventions ont été développées, entre autres au niveau de l’intégration de comportements plus sains en matière de santé (Fortier, Duda, Guerin, & Teixeira, 2012).

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Le modèle de la concordance de soi de Sheldon et Elliot (1999) s’appuie sur la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 1985) pour expliquer la motivation humaine. Selon ce modèle, la poursuite de buts dits « concordants » avec soi (c’est-à-dire, autonomes et en accord avec les intérêts réels et les valeurs cardinales des individus) entraînerait plus de bénéfices sur le bien-être subjectif que la poursuite de buts qui n’auraient pas été sélectionnés de façon autonome. Sur le plan de la poursuite des buts, les buts concordants seraient corrélés avec des efforts plus soutenus dans la poursuite (persévérance), favoriseraient les progrès (Koestner, 2008) et sembleraient plus facilement atteignables (Werner, Milyavskaya, Foxen-Craft, & Koestner, 2016). Prises ensemble, ces deux théories suggèrent que l’élaboration autonome de buts concordants avec soi exercerait des effets positifs à deux niveaux. D’abord, la sélection de tels buts augmenterait les chances de les réaliser avec succès. Puis, une fois réalisés, ils procureraient un meilleur bien-être subjectif.

L’intervention GBP et la concordance des buts. À l’étape de l’élaboration du but, l’intervention GBP propose d’abord aux participants d’amorcer une réflexion sur l’état actuel de leur vie. L’objectif est ici de mettre le participant en contact avec sa motivation au changement (p. ex. « Pourquoi vouloir changer?»; « qu’est-ce qui pourrait aller mieux? »). Pour soutenir les participants dans cette réflexion, un exercice visant à dresser un inventaire de tous leurs buts et aspirations personnelles est proposé. Les participants sont ensuite invités à partager cet inventaire dans le groupe. Une fois les buts personnels importants identifiés, des exercices de sélection et d’évaluation des buts

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prioritaires sont utilisés. Pour aider les participants à sélectionner leur but, certains critères d’évaluation tels que la probabilité d’atteinte, la charge d’efforts envisagée, le plaisir ou le stress généré par le but sont considérés. Ensuite, les participants sont invités à formuler concrètement le but prioritaire choisi en termes de comportements cibles clairs et précis. L’aide du groupe est ici sollicitée, afin d’aider les participants à mieux traduire leur but en un objectif concret. Finalement, le choix d’un but est effectué et un engagement face à soi-même et face au groupe est pris. Ces exercices visent à faciliter la transformation d’un désir vague en une décision claire et à stimuler un engagement authentique envers le but choisi. Le rationnel théorique et empirique derrière l’utilisation de ces exercices d’élaboration du but se base sur la théorie de l’autodétermination (Deci & Ryan, 1985) et du modèle de la concordance du self (Sheldon & Elliot, 1999); l’objectif étant de donner l’occasion aux participants de choisir un but pertinent et significatif pour eux, qui aurait le potentiel de les faire croître et de répondre à leurs besoins psychologiques de base.

Étape 2 : la planification du but et le bien-être subjectif.

Planifier intelligemment : la mise en place d’un objectif SMART/SMARTER. La planification des buts est une étape cruciale qui influence grandement les probabilités de leur réalisation. En effet, le succès dans l’atteinte d’un objectif dépend de sa planification détaillée. La littérature sur la question démontre que certains critères influencent positivement les chances de réalisation d’un but (Day & Tosey, 2011; Gollwitzer, 2014). Parmi ceux-ci, les plus importants sont souvent regroupés sous

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l’acronyme SMART (voir l’Appendice A pour un exemple). Un but planifié de façon SMART serait Spécifique (clair, simple à comprendre et précis), Mesurable (de façon à suivre et quantifier les progrès effectués), Atteignable (selon les ressources disponibles telles que le temps, l’argent, les dispositions personnelles, etc.), Réaliste/réalisable (le but général est déconstruit en plusieurs sous-étapes, de façon à ce que des objectifs proximaux soutiennent la réalisation du but général, plus distant) et s’inscrirait dans un cadre Temporel déterminé (créer un échéancier avec des dates butoirs pour chacune des sous-étapes). Certains bonifient l’acronyme SMART en SMARTER et ajoutent les critères de l’Engagement envers le but (les raisons pour lesquelles l’individu s’implique dans cette démarche; pourquoi le but est important) et des Récompenses que l’on s’attribue lorsque des progrès sont constatés (Brown, Leonard, & Arthur-Kelly, 2016). Il est à noter que certains déplorent le manque d’études systématiques portant sur la validité du cadre théorique SMART (Day & Tosey, 2011) et que d’autres remettent en question la possibilité de traduire tout but en objectifs SMART ou SMARTER (Brown et al., 2016).

Lutter contre les faiblesses de la volonté : les plans d’intention. La motivation est une ressource limitée, qui lorsqu’elle fait défaut, peut entraver la réalisation de buts importants (Baumeister, Vohs, & Tice, 2007). Pour faciliter l’atteinte d’un but malgré les limites de la volonté, certaines techniques peuvent être mises en place. Par exemple, des méta-analyses ont démontré qu’un plan d’action spécifique peut favoriser les chances de succès dans l’atteinte d’un but (Gollwitzer, 2014; Gollwitzer & Sheeran,

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2006; Armitage, 2004). Une stratégie cognitive reconnue, l’« implantation d’intentions », est une façon de déjouer le manque de volonté par l’automatisation de comportements orientés vers le but (Schweiger Gallo & Gollwitzer, 2007). L’implantation d’intentions consiste à créer des liens « réflexes » entre des indices situationnels et des comportements dirigés vers le but. Par exemple, une personne désireuse d’être plus active pourrait laisser ses chaussures de course à l’entrée de chez elle, bien en vue (indice situationnel), ce qui augmenterait les chances qu’elle aille jogger (comportement orienté vers le but). Les plans d’intentions permettent de mieux définir dans quelles situations l’individu pourra effectuer des comportements en lien avec la réalisation de son but (p. ex. identifier de bonnes opportunités de progresser vers le but). L’implantation d’intention peut également servir à déterminer la façon dont l’individu surmontera les difficultés appréhendées. Par exemple, une personne dont le but est de perdre du poids pourrait avoir formulé d’avance l’intention d’éviter la friture lorsqu’elle est invitée au restaurant. Aussi, la formulation d’intentions permettrait de garder accessible le but général et les sous-objectifs, de façon à se rappeler d’agir (Zimmerman & Meier, 2010). Une étude aurait démontré que les effets positifs des « plans d’intention » en termes de progrès vers l’atteinte d’un but à court et à long terme sont potentialisés lorsque ces plans sont soutenus par un sentiment d’efficacité personnelle et lorsqu’ils sont concordants avec soi (Koestner et al., 2006).

La planification d’un but et le bien-être subjectif. Il est possible de croire qu’en facilitant la réalisation du but visé, les étapes de planification d’un but contribuent

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indirectement au bien-être subjectif. L’augmentation du bien-être subjectif proviendrait alors de l’atteinte du but en soi. Toutefois, d’après certains auteurs, d’autres mécanismes permettraient d’expliquer les liens entre l’étape de planification d’un but et le bien-être subjectif (MacLeod, Coates, & Hetherton, 2007). Parmi ces mécanismes, le sentiment de satisfaction qui découle d’un progrès réalisé (Carver & Scheier, 1990), l’effet d’anticipation des résultats à venir (Loewenstein, 1996) et l’engagement accru face aux tâches à venir (Cantor & Sanderson, 1999) auraient été répertoriés. D’après MacLeod et ses collègues (2007), « de solides preuves empiriques émergentes mettraient en relation la planification des buts et le bien-être subjectif ». En effet, une meilleure planification d’un but aurait été associée à de plus hauts niveaux de bien-être subjectif (MacLeod & Conway, 2005; Nezlek, 2001; Prenda & Lachman, 2001) et en contexte scolaire, à une anxiété moindre face aux examens (Bouffard et al., 2001).

L’intervention GBP et la planification. Cette étape de l’intervention permet d’opérationnaliser le but sélectionné et élaboré lors de la première partie, par la spécification des moyens qui seront pris pour l’atteindre et des sous-étapes nécessaires à sa réalisation. Les participants sont également sensibilisés à l’importance de prévoir les obstacles potentiels, ainsi que les stratégies possibles pour les affronter. L’intervention GBP s’inspire des critères SMART/SMARTER et des plans d’intentions pour soutenir les participants dans la planification de leur but. En ce qui concerne les critères SMART/SMARTER, la démarche propose des exercices visant à déterminer de façon claire, précise et concise le but visé (critère de spécificité). Des outils permettant de

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