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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Les formes communicationnelles publiques de l'éducation à la sécurité

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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A. GIORDAN, J.-L. MARTINAND et D. RAICHVARG, Actes JIES XXVI, 2004

LES FORMES COMMUNICATIONNELLES PUBLIQUES

DE L’ÉDUCATION À LA SÉCURITÉ

Myriam ZANARDI

GRESEC, Université Stendhal – Grenoble 3

MOTS-CLÉS : COMMUNICATION – RISQUE – SÉCURITÉ – NORME – ACTION – RESPONSABILITÉ CITOYENNETÉ – VALEUR – EXPOSITION

RÉSUMÉ : Jugement et rationalité sont au centre de la construction de la civilité, qui, bien loin de se manifester en cas de danger, par l’entremise des institutions de répression, se décline au jour le jour, dans une maîtrise des risques, dont l’individu est un agent à part entière. Cet article se propose de montrer comment l’individu au sein d’un réseau institutionnel est figuré et débouche sur la conclusion que l’apprentissage et la connaissance s’appliquent par-delà les lieux institués, par l’action et la communication sur l’action.

ABSTRACT : Judgement and reason are the forms of the construction of civility, apart from appearing in case of emergency through repressive institutions, expands from day to day in a risks control individual has a share in. This article’s purpose is to describe the individual’s representation in an institutionnal system, and to come to the conclusion that apprenticeship and knowledge apply beyond the established places, by action and communication on action.

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1. INTRODUCTION

Lorsque nous pensons aux campagnes nationales, nous imaginons le citoyen au centre. Or, sa place n’est pas aisée à délimiter, tant de nombreuses informations, et de nombreuses institutions sont communiquées. Cela pose trois problèmes de fond : la place du citoyen dans le réseau constitué ; le rôle qu’on attend de lui ; l’idéologie que ces communications, finalement, véhiculent.

Ces trois points découlent d’une réflexion autour de la politique territoriale de la sécurité et de la manière dont les incivilités ont pu émerger et être prises en charge dans le cadre de la communication municipale. Dans cette contribution, nous réunissons nos analyses sur des articles de journaux municipaux, des plaquettes de communication, un exemple d’exposition, autour d’une procédure particulière, le Contrat Local de Sécurité. Néanmoins, cette procédure est nationale, dans la mesure où elle institue un traitement public du problème des incivilités et un traitement d’ensemble, où la société doit s’impliquer. Il importe, alors, de comprendre ce que cet item signifie, pour soi, pour le citoyen qu’on est censé représenter, pour la société et son bon fonctionnement, pour les autres institutions éventuellement, et pour les autres individus, plus largement.

Notre hypothèse, en la matière, est que le geste (Leroi-Gourhan, 1964), l’action (Arendt, 1958), qui apparaissent de prime abord comme étant le registre principal de ces communications, recouvrent une dimension idéelle (Godelier, 1984), idéologique plus encore, qui dépasse la figure du citoyen, pour construire une figure de l’être civil.

Plusieurs formes peuvent être repérées, au sein d’une même opération de communication, et leur juxtaposition, voire leur articulation, sont à penser. Avec l’hypothèse, là encore, qu’elles sont mobilisées pour fournir un message commun, un message toujours exprimé de la même manière, ce qui nous conduit à dire que ces formes correspondent, elles aussi, à des formes stabilisées d’expression de la communication publique : l’organisation de la société, l’organisation par la médiation institutionnelle, comme étant un Bien, et une valeur à porter. C’est là que l’individu, derrière le citoyen, est interpellé.

À noter la contribution du chercheur, en la matière : des séquences peuvent être observées, des séquences thématiques, chacune étant relative à une institution donnée. Ici, l’action s’insère dans le cadre précis du problème des incivilités, autant dire une nouvelle action qui s’ajoute à d’autres, préexistantes. Toutes sont à même de construire l’assurance et la compétence que les institutions sont toujours à même de nous servir. C’est la volonté de montrer qu’on est dans un État de droit, et c’est une condition à ce que les citoyens continuent à interpeller les institutions (1), à considérer qu’elles peuvent toujours les protéger (2) et leur accorder leur confiance (3). Quand bien même ils ne les interpellent pas, lorsqu’aucun danger se présente. Cela signifie qu’il y a donc autre chose à communiquer que le simple fait de dire ce que le citoyen doit faire en cas de danger (le devoir),

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comment la victime doit être entourée (le droit). Bien sûr que ces moments communicationnels existent, mais l’observateur attentif à l’ordre des communications remarquera qu’elles interviennent plus tardivement. Cela suppose donc de connaître les autres communications juxtaposées, mais cela signifie aussi de saisir le sens de l’ensemble de ces communications, de ces séquences.

Chacune d’elles renvoie à un usager, d’abord, citoyen, ensuite, susceptible d’apprendre : d’enregistrer des informations, et plus que cela, des valeurs. Le rôle propre du citoyen ; la simple connaissance des autres rôles, et des services que les autres institutions sont capables de fournir ; la manière, également, de les interpeller, font partie d’une communication civique. Une progression est à l’œuvre avec la communication institutionnelle, puisque les bénéfices que chacun peut tirer de l’organisation en réseau suppose d’adhérer à trois types de messages : la répartition des rôles ; une attribution respective ; et savoir se limiter (se restreindre à la stricte exécution de son rôle).

Ces points donnent lieu à deux enseignements majeurs : - une idéologie de la limitation : savoir renvoyer,

- une idéologie de l’exécution : savoir s’en faire le relais.

Le premier point peut être travaillé au travers des communications civique et institutionnelle, le deuxième est spécifié par l’expression de communication civile. Ce dernier suppose deux choses : s’en faire le modèle, appliquer ; et responsabiliser plus encore, c’est-à-dire inciter y compris les autres dans cette voie. C’est le sens de la responsabilité, qui recouvre les deux dimensions.

2. SAVOIR RENVOYER

Le citoyen est figuré par son rôle, un rôle dont nous travaillons la communication, puisque s’il est encadré par la loi, la proclamation de celle-ci ne garantit en rien l’application. Il faut donc d’autres éléments pour voir cette application s’imposer, et, parmi eux, réside la conviction du bien-fondé de ce rôle et de la manière dont il s’organise. Cette organisation renvoie à l’idée de société, et à sa construction en « réseau ». Le citoyen devient donc celui par lequel l’enclenchement du rôle des autres institutions va pouvoir s’accomplir. Et pas n’importe quel rôle, pas n’importe quelle institution : l’organisation étatique est définie par des rôles attribués, et précisément rétribués. Il s’ensuit que le citoyen doit connaître les rôles proprement dits, et la répartition de ces rôles par conséquent. Nous spécifions les deux aspects par les expressions de communication civique, pour le premier, de communication institutionnelle, pour le second.

Les campagnes se soldent par deux caractères principaux : savoir reconnaître les infractions ; connaître les démarches et les institutions référentes. Montrer ce qui se fait permet de décourager à se faire justice soi-même. Cet énoncé n’existe d’ailleurs que très peu et la priorité donnée à

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l’exposition des différentes actions entreprises a vocation à asseoir les institutions dans ce type de mission. Un double plan se dégage : la répartition, essentielle, entre les institutions de répression et celles relevant du champ éducatif ou au pouvoir socialisant, dont le citoyen, précisément, fait partie. Cette séparation est salutaire au plan de « l’agir public », d’où notre propension à parler de la sécurité comme savoir-faire généralisé, indépendamment des questions sur lesquelles il s’applique (ou des problèmes sur lesquels il est réactivé). Le citoyen ne réprime pas, les institutions doivent intervenir. Mais pour qu’elles interviennent, faut-il encore qu’elles soient missionnées, qu’elles soient interpellées, et cette interpellation est au centre de la rétribution citoyenne.

Nous saisissons le contenu de cette rétribution, mais un écueil subsiste. Les attributions se présentent comme étant juxtaposées : le citoyen, d’un côté ; l’acte lui-même (appeler la police), la victime (et les modalités qui la concernent), de l’autre. À noter que le volet consacré à la victime se positionne plus tardivement dans l’ordre des informations communiquées. La rationalisation de cet ordre se tient : nous assistons à l’explicitation d’une chaîne, dont le volet pénal est le stade ultime, celui pour lequel toutes les autres « solutions », et champs d’action, ont été épuisés. Or, ce sont ces champs d’action qui sont prioritaires, à l’information, et à la communication. Cette dernière consiste, avant tout, à lever le sentiment d’impunité, et retrouver une confiance dans les institutions, et leurs actions. Nous pouvons expliquer que celles-ci soient mises au premier plan. Nous pouvons, ainsi, y voir un déplacement de Que faire ? à Qui doit faire ?

Ce n’est plus un comportement, mais une conduite qui est communiquée : qu’attend-on de tout individu, en toutes circonstances, en situation de danger ? Ensuite, un rôle à part entière est abordé : le rôle du citoyen, et sa pratique attendue, afin que les autres mobilisations mises en place puissent avoir lieu. Comment reconnaître une situation de danger ? Qui appeler ? Quel numéro composer ? Mais l’attitude induit un jugement sur ces faits et les comportements, y compris autour de ceux qui les sanctionnent ou aident à les sanctionner. La communication civique, d’une part, la communication institutionnelle, d’autre part, se montrent comme étant une voie vers la communication civile, et l’organisation de la civilité, plus largement. Nous touchons, ici, au message principal que nous voulions faire passer dans cette contribution, à savoir que l’action n’implique pas que le corps, mais l’être tout entier, son « esprit », à comprendre une pensée sur son action, qui, évidemment, trouve ses réminiscences ailleurs, dans la construction de la socialité : un agir, à la fois, commun et collectif. C’est-à-dire qu’il faut agir ensemble, et il faut agir séparément, chaque action respectée venant favoriser le vivre-ensemble, et la sécurité plus simplement.

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3. SAVOIR EXÉCUTER

Que l’on nous comprenne sur le sens de nos expressions. Elles engagent sur l’idée qu’autre chose se joue derrière ce qui est exposé, et ce qui est énoncé. Les « catégories » proposées sont spongieuses. Mieux : il ne faut pas s’arrêter à des catégories informatives, mais privilégier la manière dont les informations sont organisées et le sens qu’elles construisent. L’accent est mis sur le « bien faire ». Et le « bien faire » consiste à reconnaître le Mal. À ce sujet, l’un des volets concerne la reconnaissance d’une incivilité (« Qu’est-ce qu’une incivilité ? »), par rapport à d’autres régimes que l’on connaît déjà. Ici, l’« apprentissage » de l’incivilité, et de ses régimes de résolution, s’émet en rapport avec l’« infraction », le dernier régime instauré en date. Mais autre chose est à l’œuvre : l’éducation, l’apprentissage de la qualification de phénomènes autour de soi, et, surtout, d’un jugement à leur conférer, qui va définir l’emprise de l’être humain, ou de l’être social, sur ces derniers.

Ce quotidien est bien connu de tous. Mais il est inconnu dans son acception juridique, ou dans la valeur, sanctionnable, que le Droit confère à ces faits. L’apprentissage, ici, porte sur la délinquance, soit pour reconnaître qui est victime, soit pour se reconnaître victime. La délinquance est apprise, là où la déviance était pointée. Mais le champ de la déviance n’a pas disparu, elle fait également partie des apprentissages. Une conscience se construit autour de situations jugées anormales qui exigent un comportement exceptionnel. Elle n’est plus la sensibilisation, nous pouvons parler d’éducation à la « sensibilité ». Il s’agit bien d’éduquer les sens, qui reviennent à réserver un certain jugement à certaines matérialités, idées, etc. Nous sommes dans l’éducation de la pensée.

Où la chose devient intéressante est que cet apprentissage, alors qu’il est occasionné lors d’une communication autour d’une procédure politique, d’une opération de communication, sur un problème donné, va être appris pour lui, ou devant s’appliquer et être pensé en toutes circonstances, indépendamment de toute situation de danger. Nous approchons une attitude sociale, et de la socialité, plus encore. L’éducation revêt, ici, un autre sens, qui va porter sur ses semblables : inciter à s’autoriser à communiquer ces valeurs aux autres.

L’idée d’« exposition » est complexe, car il s’agit de faire connaître, et il s’agit de valoriser ce régime, afin qu’on y adhère, qu’on le trouve « bien », jusqu’à le trouver « normal » : l’instaurer dans ses rapports quotidiens, l’instaurer comme une évidence. Où il était la règle de ne pas agir (les résistances à déposer plainte, porter à témoignage, appeler les institutions à la rescousse), au contraire, il s’agit d’imposer celle où chacun serait interpellé par le « mal faire » et saurait « que faire » en cette circonstance, et, plus encore, jugerait nécessaire de mettre en application sa prérogative. Bref, il « regarderait » son rôle comme une valeur, celle notamment de porter la société, le système dans lequel il vit. Nous touchons au deuxième point central que nous souhaitons

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soulever : il ne s’agit en aucun cas de mettre en œuvre, de mettre en action, un geste réflexe. Il s’agit de décliner une action, une pratique, de tout son être, de la porter, et de porter une rationalisation, et rationalité, par rapport à celle-ci.

4. CONCLUSION

La communication n’est pas la sensibilisation, mais la consciencialisation, que nous n’établissons pas comme une « prise de conscience », mais comme une action déjà consciente où il s’agit de prendre ses responsabilités, mais, surtout, être à la hauteur des valeurs auxquelles on croit. Voilà, à notre avis, la différence profonde de l’être civil, avec le citoyen. Certes, le citoyen peut répondre à la « pratique » (réglementée) qu’on attend de lui. Certes, celle-ci peut être une attestation de l’agir d’État. Mais qu’en est-il de la valeur accordée à l’État ? Le réflexe ne nous semble pas avoir la portée de la réflexivité, qui est une condition essentielle de la socialisation, ou du rapport (apprendre aux autres), premièrement ; deuxièmement, elle suppose l’évitement de la déviance, avant même la délinquance (ce qui est, au fond, recherché) : elle est cet autocontrôle, pacification des mœurs, civilisation, et, finalement, civilité, tant recherchés.

Nous introduisons une nouvelle distinction (ou une nouvelle nuance) au débat. L’action réflexe à laquelle équivaut aussi le comportement citoyen offre une passivité formelle. Sur le fond, ou sur le plan de la pensée, en revanche, il doit être actif : il sait ce qu’il fait, il sait ce à quoi, surtout, son geste renvoie. Cherchant à encourager l’idéologie sociétale dans laquelle il vit, son geste est pleinement pensé : il ne concerne pas seulement la situation circonstanciée du moment (1), mais l’engagement véritablement que cette action produit (2), en dehors de lui (3e aspect). Il abandonne son intérêt personnel (la crainte des représailles en fait partie) au profit de sa portée collective (il porte plainte quand même). Bref, la communication publique s’adresse aux esprits, à la rationalisation de chacun : non seulement l’individu agit en pleine conscience, mais en pleine conscience de la portée de son action au plan général (ou collectif). À ce moment, nous préférons parler d’attitude, en lieu et place de la conduite.

BIBLIOGRAPHIE

ARENDT H. (1983). Condition de l’homme moderne (1958). Paris : Calmann-Lévy. GODELIER M. (1984). L’idéel et le matériel. Paris : Fayard.

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