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Henry-Emile Chevalier et le feuilleton canadien-français (1853-1860)

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HENRY-EMILE CHEVALIER ET LE FEUILLETON CANADIEN-FRANCAIS (1853-1860)

par

Claude Beauchamp

mémoire présenté à la

Faculté des études supérieures et de la recherche dans le cadre de l'obtention

du diplôme de Maîtrise ès arts

Département de langue et littérature françaises Université McGiII, Montréal

juillet 1992

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RESUME:

Proscrit par le Coup d'Etat du 2 décembre 1851 en France, Henry-Emile Cheval:er débarque à Montréal en mars 1853. Dès son arrivée, il s'active dans le réseau journalistique de Montréal ainsi qu'à l'Institut canadien de Montréal. En mars 1853, B s'associe à Georges-Hlppolythe Cherrier qui vient de fonder

la

Ruche littéraire illustrée. Ce mémOire propose une biographie plus définitive de Chevalier, une analyse de la place de l'exotisme dans son oeuvre romanesque canadienne <1853-1860) et de son apport au développement du f6uilleton au Canada français.

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A,aSTRACT:

Henry-Emile Chevalier was forc&d in exile by the December 1851 Coup d'Etat in France. In March 1853, "e came to Montreal and joined Georges-Hippolythe Cherrier who had just started a new periodical called

1-.a

Ruche Littéraire Illustrée. In addition, dLlring his stay in Montreal, Chevalier worked for several periodicals, was an aC\lve member of the Institut canadien de Montréal, and wrote many novels and s~lrials depicting Canada's exoticism. This thesis will provide the most accu rate bli\'jlgraphy of Chevalier up to date, it will also present an analysis of the exoh .. ~ism in his novels and seriais (1853-1860), and of his contribution to the evolution of seriais in French Canada.

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~-.

Nous remercions d'une façon particulière le professeur Vvan Lamonde qui fut un guide patient, critique et juste. \1 nous a offert une écoute généreuse et a su "jazzer" tous ces moments qui resteront des souvenirs inoubliables d'un travail fascinant.

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TABLE DES MATIERES

Introduction 1

Chapitre 1: Henry-Emile Chevalier et Montréal (1853-1860) 6 Chapitre 2: La Ruche littéraire et la profession d'homme de

lettres 29

Ctlapitre 3: L'exotisme dans les feuilletons et les romans de

Chevalier 62

Conclusion 99

Annexe A 103

Annexe B 107

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1

A partir de 1850, la vIe culturelle de Montréal connaît un essor important. L'élargissement du réseau scolaire, le mouvement associationniste, la fondation de nombreuses bibliothèques et de divers lieux de diffusion du savoir, tel l'Institut canadien de Montréal, le développement de la presse, autant d'exemples qui permettent une expression plus large de la vie culturelle montréalalse.

En littérature, entre 1850 et 1860, on ne fait pas encore profession d'écrivain, même si on commence à s'Interroger à propos d'une littérature nationale; le système de diffusion reste très restreint et étroitement lié au journal. A cette époque, les Intellectuels canadiens-français s'Intéressent plus

à

la politique et aux questions socio-économiques.

En 1853, le Français Henry-Emile Chevalier, proscrit par le Coup d'Etat du 2 décembre en France, débarque à Montréal et s'active immédiatement dans le milieu journalistique ainsi qu'à l'Institut canadien de Montréal. " ~e lie

rapid~ment à Georges-Hyppolite Cherrier qui vient de fonder la Ruche littéraire et en deviendra propnétaire en 1859 Chevalier restera à Montréal de 1853 à 1860 et, durant cette période, il publiera des textes sur "histoire du Canada français. les moeurs de ses habitants et des tribus autochtones, bref tout un exotisme canadien-français qui fait de lUi une figure incontournable de la littérature canadienne-française de cette époque.

On cite parfois Chevalier lorsqu'il est question des lettres canadiennes-françaises des années 1850 Quelques dictionnaires lui ont consacré une notice biographique intéressante, mais souvent incomplète et aucune étude véritable n'existe sur Henry-Emile Chevalier ou sur ses écnts. Chevalier milita ardemment pour fonder une littérature nationale au Canada français et il reste le romancier le plus productif de la décennie de 1850 au Canada français. Dans cette mesure, "originalité première de notre travail sera de mieux faire connaître Chevalier et ses écrits durant son passage à Montréal.

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2

Nous avons choisi de limiter notre étude de la naissance de Chevalier, en , 828, à son départ de Montréal, en 1860. Une étude complète Jusqu'en 1879 aurait dépassé le cadre de ce travail, en revanche, la pénode choIsie est importante dans la mesure où c'est durant son pé::ssage à Montréal que Chevalier développe sa conception du Canada Nous montrerons la part importante que mérite Chevalier dans l'histoire des lettres canadiennes-françaises tant par l'Impulsion qU'II donne au roman-feuilleton canadien-français, par son Implication dans le milieu mtellectuel de Montréal que par ses textes qUI exploitent un exotisme canadien-français, d'où le titre de ce mémoire: Henry-Emile Chevalier et le feuilleton canadien-français (1853-1860).

Le premier chapitre de ce mémOire constitue la blograph'e la plus détaillée à ce jour SUi Chevalier Nous avons passé en revue les différentes études qui existent sur Chevalier depuis les premières biographies publiées à Paris dans le Grand dictionnaire umyersel du XIXe siècle, de Larousse, et le Dictionnaire universel des contempora!Os, de Vapereau, à la fin du XIXe siècle. Ces biographies restent superficielles bien que celle de Vapereau nous indique les collèges fréquentés par Chevalier La première étude sur Chevalier est celle d'Edmond Lareau parue dans son HJstQm~ de la littérature canadienne: cette étude influencera la cntique de 1874 Jusqu'à l'article de Beatrice Corrtgan paru en 1944 Lareau sera le premier à saisir l'importance de Chevalier pour les lettres canadiennes-françaises, mais des préjugés contre le genre et parfois l'homme l'empêchent d'être objectif En 1910, Edouard-Zotique Massicotte publiera "Emile Chevalier et Montréal vers 1860" dans La Revue populaire. Cet article reprendr3 à son compte la cntlque de Lareau, mais Il reste très superficiel en plus de mal situer les relations familiales de Chevalier. La seule véritable étude sur Chevalier est l'esqUisse biographique et analytique de Beatnce Corngan parue dans The Romantic Revlew sous le titre: "Henn-Emile Chevalier and his Novels of North America" Corngan dresse la première

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bibliographie des oeuvres de Chevalier et offre un premier regard objectif sur l'homme et ,'oeuvre Il faudra ensuite attendre les années 1960 avant de retrouver quelques notes mtéressantes sur Chevalier Davld-M Hayne et Paul Wyczynskl, dans les Archives des lettres canadlenne.s, seront les premiers cntiques modernes à montrer "Importance de Chevalier pour le genre romaneSQue au Canada français Les différentes notices biographiques publiées entre-temps resteront superfiCielles et parfoIs fautives, Jusqu'à la notice de Marc La Terreur du Dictionnaire blQgraphiQue QU Canada. Depuis cette notice et celle du Dictionnaire des auteurs de l'AmériQue du Nord, Chevalier est mieux connu En 1984, dans Les Romanciers français et le Canada et , en 1986, dans "Avant Agaguk, deux romans esql.llmaux éCrits par des Français", Paulette Collet est la première à amener des pistes d'analyse différentes en centrant son propos sur l'exotisme de Chevalier. Or, comme il n'est pas l'objet principal de son étude, l'analyse reste au ",veau de l'esquisse. En 1984 également, Lise Gaboury-Dlallo tentera une analyse dans un article Intitulé. "L'Exotisme chez Henn-Emile Chevalier", mais son propos a le désavantage malheureux de chercher à en cerner trop; elle n'offre aucune piste nouvelle. Notre étude sera donc la première à analyser en profondeur le passage et le travail de Chevalier à Montréal.

Afin de cerner l'Implication sociale de Chevalier à Montréal, nous avons dépouillé' le Courrier des Etats-Unis, du 3 avril 1851 au 12 mars 1853, dans le but d'y allalyser le travail de Chevalier dès son arnvée à New York, en mai 1852, jusqu'à son départ pour Montréal, en mars 1853. Nous avons ensuite dépouillé les Journaux montréalais sUivant: la Ruche littéraire, de février 1853 à

JUin 1859, le Pays, du 1 er janvier 1853 au 2 novembre 1859; la Patrie, du 26

septembre 1854 au 17 JUillet 1858 - ainSI que l'édition hebdomadaire du 13 juin 1857 au 17 Juillet 1858; 1aMQO!teur canadien, du 1 er Janvier 1853 au 4 octobre 1855; la Minerve, sporadiquement entre le 1 er Janvier 1853 et le 1 er janvier

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avons aussi parcouru les archives du fonds de l'InstItut canadien de Montréal, de 1853 à 1859 inclusivement, afin de cerner l'Implication de Chevalier à l'Institut. Le Pays, qui rapporte le compte rendu des réunions de l'Institut, nous fut aussi très utile.

Le second chapitre explique ce qu'est

.Ia...Bl.l2e

littéraiIe et quelle part y occupe Chevalier. Nous y évaluons l'apport de Chevalier grâce à une table des matières de cette publication que nous avons dressée (Annexe B) On trouvera aussi une lIste des journaux parus à Montréal entre 1830 et 1860, liste qui nous a permis de situer la Ruche littéraire (Annexe A). Ce chapitre se termine par la conception personnelle de Chevalier sur le travail de journaliste et, plus généralement, sur le travail d'écrivain au Canada français avant 1860.

Finalement, le troisième chapitre traitera de l'ensemble des textes que Chevalier produisit durant son séjour à Montréal. Nous montrerons que ses écrits font la promotion d'un exotisme canadien~françals et qu'ainsi il est le seul romancier au Canada français, entre 1853 et 1860, à s'inspirer presque exclusivement des particulantés de la société canadienne. Il devient ainsi le premier romancier à favoriser une littérature nationale de façon active et c'est dans cette mesure qu'il mérite une place dans l'histoire de la littérature

canadienne~ française du XIXe siècle

Dans ce travail, nous présentons Henry-Emile Chevalier de la façon la plus complète jusqu'à présent. En plus de notre étude, le lecteur trouvera, à la fin de ce travail, l'état présent des études sur Chevalier ainsi que la bibliographie la plus exacte de sas productions

Afin de simplifier la lecture, nous avons choiSI d'uniformiser le titre de

la

Ruche littéraire. Au début de la publication en 1853. Cherrier avait choisi d'intituler sa revue la Ruche littéraire illustrée. Pour des raIsons économiques, elle deviendra la Ruche littéraire et PQlitlQu~ Jusqu'à son premier arrêt en janvier 1855 Lorsqu'ils €;n reprennent la publication, en 1859, Chevalier et

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Cherrier l'intitulent plus simplement la Ruche littéraire. A moins d'indications contraires, nous avons généralement utilisé le titre la Ruche IiUéraire.

Nous aimerions profiter de l'occasion pour remercier madamô- Sarah Montgomery, archiviste de référence des Archives nationales du Canada, qui nous a offert si gentiment son aide, et monsieur Roger Le Moine qui nous a fourni quelques renseignements sur la franc-maç-:Jnnerie.

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CHAPITRE

PREMIE.8:

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6

Gabriel Chevalier, marchand tanneur, et Geneviève Adrienne Chauchefoin se marièrent le 10 mai 1819 à Gigny, département de l'Yonne en France. Sept ans plus tard, elle donnait naissance à Jean-Baptiste-Henry-Emile Chevalier, le 13 septembre 1828, à deux heures du matin dans la demeure familiale à Châtillon-sur-Seine. Un oncle Chevalier ainsi qu'un oncle Chauchefoin étaient présents'.

Henry-Emile Chevalier fit ses études aux collèges de Châtillon-sur-Seine, de Chaumont et de Troyes. En 1847, il s'engagea comme volontaire dans les dragons. Déjà, à cette époque, il collabore à divers journaux et, en 1851, il fonde le Progrès de la CÔte-d'Or2 . Dans sa dédicace de la "Huronne de Lorette", on apprend qu'il prit aussi part avec Lucien Coutant, homme de lettres et président de la Société de sphragistique de France (SOCiété intéressée par les sciences naturelles), à des travaux en archéologie3 . A la suite du coup d'Etat du 2 décembre 1851 en Fr ance, il fut emprisonné à Dijon - à cause d'un article trop virulent - et puis exilé. Chevalier parle quelquefois dans ses productions de l'exil et de la prison: ccSoyez sans inquiétude, mademoiselle; je ne suis ni un fripon, ni un faussaire; mais j'avais été incarcéré pour délit politique [H']», rétorque Alphonse à Angèle dans le Pirate du St-Laurent après qu'elle l'eût recueilli et soigné4 . Chevalier souffrit de la prison, mais encore plus de l'exil: où qu'il aille. il se dira toujours Français et parlera de l'Europe comme de son lieu d'appartenance: ccOn dit que l'amour du lieu qui nous vit naître est un préjugé, mais crions-le de toutes nos forces, c'est un magnifique préjugé, supérieur, à notre sens, aux plus nobles affections.,,5

Vers le milieu du XIXe siècle, la cÔte orientale américaine se présente comme le refuge des exilés. Pour plusieurs, les Etats-Unis représentent

à

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..

7

cOMmunautés: juive, polonaise, anglaise, française et italienne, s'établissent dans les villes côtières - surtout New York - et y recréent un milie'J quasi européen:

The bulk of immignants, probably s~eking a climate and environment similar to that of their nativity, landed at Northern ports and either settled in and about the large coastal cities [ ... ). Aliens constituted about the third of the mid-century population of Boston and Philadelphia and nearly half that of New-York. Into these cities man'~ of the refinements

0:

Old World culture were transplanted by exiled intellectuals.6

Arthur Charles Cole fait une observation intéressante: il

y

avait plus de 54000 Français en 1850 aux Etats-Unis; tout près de 20 000 sont arrivés vers 1851. De ce nombre, écrit Cole, «Sorne had been refugee revolutionnists resident in England, whom the French government wisely furnished with funds to proceed to more distant shores." 7 En va-t-il de même pour Chevalier? A-t-il fait un séjour en Angleterre, lui qui affectionnait particulièrement Lord Byron, avant de ve"ir en Amérique? Peut-être y aurait-il perfectionné ses connaissances de la langue anglaise, ce qui lui aurait permis plus tard de faire de la traduction en Amérique?

La période qui s'étale entre la sortie de prison de Chevalier et son arrivée aux Etats-Unis reste encore nébuleuse. Du reste. il arrive à New York dans une communauté francophone très importante et aussi, bien organisée:

Des Français. que leur dévouement

à

la liberté condamne à l'exil, vont arriver prochainement sur nos rivages: leurs compatriotes de New-York doivent se tenir prêts à les recevoir et à leur prêter secours au besoin.8

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8

C'est en ces termes que P.A. Gerdy exposa le but d'une réunion tenue au Shakespeare-Hotel de New York, le 14 février 1852, qui avait pour but d'amasser des fonds afin d'aider les exilés. Il n'est pas surprenant de retrouver l'éditeur du Courrier des Etats-Unis, Paul Arpin, comme vice-président9 du comité, car le Courrier des Etats-Unis, alors l'un des

journaux importants d'Amérique, est avant tout républicain; les éditeurs acceptent aussi de publier des idées différentes des leurs :

La majorité des Français aux Etats-Unis est sincèrement républicaine, et ceux qui sont bonapartistes, orléanistes ou légitimistes, reconnaissent que les Editeurs du Courrier des Etats-Unis, en gardant une conviction qu'ils expriment sans

détour, ouvrent largement les colonnes de leur journal aux opinions les plus opposées

à

la leur.1o

Mais le Courrier est beaucoup plus qu'un journal politique; il est le représentant de la communauté francophone new yorkaise de l'époque, On y trouve de tout: des faits divers, des nouvelles, des correspondances d'un peu partout, des feuilletons (Dumas, Sand, etc.) ainsi que différentes critiques de la vie sociale et culturelle de New York. C'est aussi un lien entre l'Europe et l'Amérique car les dépêches qui arrivent de l'Europe par la voie maritime sont publiées prioritairement. Comme le journal fait un compte rendu rigoureux de ces dépêches, il tient aussi un horaire strict de tous les bateaux en provenance de l'Europe ou partant de j'Amérique. Le Courrier, comme plusieurs journaux de l'époque, vend des livres dont il annonce l'arrivage par tel ou tel navire, On peut se procurer les productions récentes de plusieurs auteurs français dont: Dumas, Sue, Hugo, Lamartine, Balzac, Sand, Mérimée, etc. Eventuellement, il serait intéressant d'analyser l'importance de cette plaque tournante qu'est New York en regard du commerce et de l'approvisionnement en imprimés pour le Canada français.

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9

Chevalier débarque à New York en mai 1852 : ccf ... ] En France, j'avais travaillé à la formation de plusieurs organisations sociétaires; [ ... } Aussi, dès mon débarquement à New-York en mai dernier. souhaitai-je vivement voir fonctionner le North American Phalanx [ ... ]n 11. Cette

communauté que Chevalier visite vers le 9 janvier 1853 ressemble beaucoup aux Quakers où chacun vit pour le groupe. Chevalier écrit: cc[ ... ] L'idée de Fourrier [sic] n'était pas absolument mienne: [ ... ] Croire que le North American Phalanx est un phalanstère comme l'a compris. développé et tracé le grand réformateur, serait une grosse erreur [ ... ]" 12. Chevalier n'était pas fouriériste; cependant, l'idée d'harmonie universelle rejoignait assez bien ses vues.

Dès le 6 décembre 1852, Chevalier tient, dans le Courrier des Etats-Unis, une chronique de critique SUI les théâtres de New York13. Il s'y

fera parfois mordant, mais généralement se limitera au simple compte rendu. Etrangement, il signera cette chronique sous le couvert du pseudonyme: X.Y.Z., jusqu'à sa dernière chronique qu'il signe de son nom. Il reprendra ce pseudonyme à Montréal dans la Ruche littéraire.

A part cette chronique qu'il tient régulièrement. Chevalier ne publie. antre son arrivée à New York et son départ du Courrier des Etats-~, le 12 mars 1853, que six articles signés dans le Courrier. Le premier texte de Chevalier s'intitule: "Umon douanière du Midi de l'Europe"14 et est signé Emile Chevalier. 1\ y rend compte d'un article paru dans le Constjtutjonnill de Paris à propos de la Belgique et qui évoque une cccombinaison qui regrouperait commercialement autour de la France la Belgique, l'Espagne et une partie au moins de l'Italie, en laissant à chaque état la plénitude de son indépendance politique.)) 15 Chevalier y voit un problème de taille: ces peuples ne consentiront jamais à établir à leurs frontières le système

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(

10

douanier français, trop prohibitif

à

son aVIs. Le 26 octobre 1852, il publie sous sa signature: "De l'Aérostation"16, un article sur E. Petin et ses découvertes sur l'aérostation. Le lendemain, 27 octobre, il publie son premier ouvrage littéraire en Amérique, la nouvèlle : "Une première nuit de noces"'7, qu'il signe encore Emile Chevalier. Un jeune marié fait le cauchemar que sa femme le trompe avec son meilleur ami. Il publie ensuite une nouvelle qui est signée Em. Chevalier et qui s'intitule : "Origine du journalisme"18. Un jeune homme veulant épouser une jeune fille dont il est épris doit trouver du travail afin de satisfaire aux demandes de la belle-famille. Il décide de recueillir les nouvelles qui circulent dans la ville et de les publier. En inventant le journalisme, il fait fortune et peut ainsi se marier. Le 27 décembre 1852, Chevalier publie une courte biographie de Washington sous le titre: "Ephémérides Américaines"19. Finalement, le 11 mars 1853, il publie un compte rendu de la première livraison de la Ruche littéraire de Montréal dans lequel il féh{;ite l'éditeur Cherrier pour son travail. Il y critique Un épisode de la vie d'un faux dévot de Lécuyer, en affirmant que, tout en connaissant mal le "Tartuffe des bords du Saint-Laurent"20 , il est certain que cette nouvelle est «longue, emphatique et, parfois fastidieuse»21 et que l'auteur utilise abusivement les italiques. Enfin, Chevalier offre à l'éditeur Cherrier tout le concours qu'il est possible de lui donner.

Chevalier ne quittera pas New York avant la mi-mars 1853, car il tient sa chronique sur les théâtres de cette ville jusqu'au 12 mars. Cette date est en fait une charnière dans l'évolution du Courrier des Etats-Unis :

MM. Ch. Lassalle, propriétaire du Courrier des Etats-Unis et E. Masseras, propriétaire du Phare de New-York, ont décidé de réunir, à dater de lundi prochain 14 mars, les deux journaux qu'ils dirigent respectivement.

l ... ] A dater de

ce jour [12 mars], MM. P. Arpin, iédacte~r en chef, A.F.

(18)

Gandon et H. Emile Chevalier, cessent de contribuer à la rédaction du Courrier des Etats-Unis .2~

1 1

Arpin précisera aux lecteurs du Courrier qu'entré républicain à la rédaction, il en sort républicain, même s',1 demeure un correspondant d'un journal maintenant devenu bonapartiste.

Chevalier se fera plus optimiste dans sa dernière revue des théâtres, datée du 11 mars et cette fois signée de son nom:

En terminant cette Revue, qu'il me soit permis d'adresser mes adieux au monde artistique de New-York. Si parfois, dans mes appréciations, j'ai blessé quelques susceptibilités, j'en demande bien pardon à ceux qui se seront cru froissés; mais j'espère qu'ils ne me garderont pas rancune. A mes lecteurs aussi j'envoie un humble adieu; puissent-ils vivre cent ans, avoir une postérité plus nombreuse que les grains de sable du rivage et souvent échangent leurs chers dollars contre un billet de spectacle. 23

Comment Chevalier connut-il le Canada? Plusieurs hypothèses sont possibles. Peut-être rencontra-t-il quelqu'un à New York qui aurait pu agir comme intermédiaire entre lUI et quelque rédacteur montréalais. C'est ce qui s'était produit dans le cas d'Alfred-Xavier Rambau24 . Ce dernier arriva à New York en 1832 et travailla pour un certain Peugnet. Pierre-Dominique Debartzch, qui venait de fonder L'Echo du pays, était un ami de Peugnet et fit venir Rambau au Canada.

Bien avant 1853, les journaux francophones new yorkais, dont ~

Courrier des Etats-Unis, alimentaient les journaux canadiens-français. Ainsi, les rédacteurs montréalais étaient à même de connaître les nouveaux journalistes et écrivains venus d'Europe. De toute éVidence, nous ne croyons pas le trajet de Chevalier - Europe-New York-Canada unique en son genre; que penser des Félix Vogeli et des Frédéric Ossaye? Marc-A. Perron écrit: ceLa carrière d'Qssaye est certes caracténstique de celle de nombreux Européens, venus au Bas-Canada vers le milieu du XIXe siècle, qui ont oeuvré dans des domaines

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12

spécialisés et relativement nouveaux comme l'agronomie, la médecine vétérinaire ou encore le journalisme agricole»25.

Il serait douteux que Chevalier vînt au Canada avant de travailler d'abord au ~ et au Moniteur canadien, puis avec Cherrier à la Ruche littéraire. Du reste, il est certain que Chevalier est connu

è

Montréal avant son association

à

la Ruche littéraire. En effet, dans une lettre d\~ janvier 1853 adressée au rédacteur du ~, Chevalier écrit :

C'est avec un vif sentiment d'estime pour votre personne que j'observe la ligne démocratique du Pays ; recevez par

ma bouche les félicitations du républicanisme européen. Je voudrais pouvoir vous consacrer périodiquement ma plume, mais mes engag~ments avec mes éditeurs en France, et le Courrier des Etats-Unis et l'Orléanais en

Amérique ne m'en laissent guère le loisir. Cependant, je tâcherai de vous envoyer quelques lettres littéraires ou politiques.[ ... ]26

Cette lettre que la rédaction du ~ publie en épigraphe

à

la légende "Sur la tour de l'Est dans l'ancien Château des Ducs de Bourgogne à Châtillon-sur-Seine (Côte d'Or)"27, prouve que des pourparlers ont eu lieu, vers le mois de janvier 1853, afin que Chevalier pût se joindre à la rédaction du

f.an.

De plus, il collabore déjà à la rédaction du Moniteur canadien car le 7 janvier 1853, Chevalier y publie, sous le titre "Mort du général Washington

à

l'âge de 68 ans", ses "Ephémérides américaines" déjà parues dans le Courrier des Etats-Unis.

Chevalier débarque à Montréal vers le 15 avril 1853. On lit dans

la

ML~~ du 21 avril 1853 : cele second No. de la Ruche littéraire nous a été

remis hier soir. Nous voyons que la direction en est maintenant confiée à M. H. E. Chevalier, homme de lettres français, arrivé la semaine dernière en cette ville.,,28 Le Pays du 16 avril 1853 publie la lettre suivante de Chevalier:

(20)

Messieurs les Editeurs du Pays et du Moniteur Canadien.

Messieurs,

Je penserais manquer aux règles de la plus simple politesse si je ne vous témoignais publiquement ma reconnaissance pour le fraternel accueil que vous avez fait, ainsi que plusieurs de vos estimables compatriotes,

à

une des victimes de la persécution despotique.

Merci, messieurs! Jamais je n'oublierai votre bienveillance à mon égard, et si, un jour, de légitimes désirs peuvent s'exaucer; si je re~ourne aux liens de mon enfance, je serai fier de dire aux Français qu'il y a par-delà l'Atlantique une population généreuse, charitable, hospitalière, qui parle notre langue. et qUI revendique notre origine autant par sa bonté, son affabilité et sa courtoisie e'lvers les étrangers, que par son droit de descendance.

Croyez bien, messieurs, que mes concitoyens. eux aussi. seront fiers d'apprendre que partout où il y a une goutte de sang français, se trouve toujours cette délicatesse exquise de procédés qui avait valu

à

nos pères la confiance et l'admiration du monde entier.

Croyez encore que. durant mon séjour au milieu de vos charmantes populations, je ferai mon possible pour mériter cette estime que vos sympathies m'ont déjà accordée.

Agréez, messieurs, l'expression de ma gratitude, H. Emile Chevalier.

Montréal, le 16 avril 1853.

Toujours dans le Pays du 16 avril, on lit:

La deuxième livraison de la Ruche littéraire paraîtra vers le commencement de la semaine prochaine. Par suite d'arrangements faits avec M. Cherrier. M. H. Emile Chevalier prendra désormais la direction de cette intéressante publication. Nous osons espérer que sous l'impulsion que lui donnera M. Chevalier, la Ruche

deviendra bientôt une oeuvre aussI estimée que recherchée.

13

Chevalier arrive donc à Montréal grâce à la bienveillance des "Editeurs" de deux journaux litiéraux importants de la ville, J.A. Plinguet du ~ et C.-J.-N. De Montigny du Moniteur. Nous pouvons soupçonner justement que

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(

14

ce sont eux qui présentent Cherner29 à Chevalier. Peut-être un arrangement avait-il été fait au préalable assurant à Chevalier, s'il venait à Montréal, la direction de la Ruche littéraire? L'affirmative est fort possible. Chevalier est alors, dès son arrivée, mêlé au milieu culturel de la ville.

Chevalier entre aussi en contact avec des réfugiés dès son arrivée à Montréal. Le 22 septembre 1853, se tint à Montréal ulle manifestation à l'académie de danse d'un certain Adams, rue Notre-Dame, en faveur du capitaine Ingraham, «qui par sa bravoure arracha Martin Koszta, réfugié hongrois à Smyre, aux violences iniques du consul autrichien,,30. Il semble que Chevalier ait été amené par Charles Daoust, rédactem du ~, membre de l'Institut canadien et, plus tard, député de Beauharnois. Chevalier y prononça un discours sur l'honneur américain. Une assemblée similaire était tenue le même SOir au Metropolitain Hall de New York.

Alors qu'il est à Montréal, Chevalier effectue quelques voyages. Vers le début d'août 185331 , il se rend à Québec à Bord du Rowland Hill. Il Y retournera au début de septembre 185332. Vers le 10 août 1853, Chevalier se rendra aussi

à

New York afin d'assister

à

l'exposition qui a lieu alors au Palais de Cristal (Crystal Palace). \1 y rencontre un certain Pooler, sûrement un représentant de la Commission géologique du Canada : «Grâce aux bons offices de M. Pooler, le représentant du comité canadien, j'ai pu me procurer tous les renseignements nécessaires sur les nombreux spécimens d'art, d'industrie ou de minéralogie fournis à l'Exhibition par la noble colonie ang lai se.» 33

Chevalier a donc un intérêt certain pour la géologie. II est cependant difficile de dire dans quel but il effectua ces voyages. Tourisme, Commission géologique, affaires, autant de pistes possibles qui permettraient d'avancer quelques éléments de réponse. Peut-être était-ce aussi pour rencontrer un ou divers correspondants de la Ruch.~?

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1

15

En plus de son travail à la...Ruche, de sa collaboration au~, à la Patrie et au Moniteyr Canadien, Il est à l'emploi de la Commission géologique du Canada en qualité de traducteur. Nous avons cherché la présence de Chevalier dans le fonds d'archives de cette Commlsslon34 , mais Chevalier ne figure nulle part Il faut toutefOIS dire que les renseignements sur la Commission des années 1840 à 1860 sont minces Il existe des registres de membres seulement depuis la fin du XIXe siècle Nous émettons l'hypothèse qu'il ait effectivement traduit des rapports de la Commission géologique, lui qUi s'intéressait à l'archéologie et qui connaissait Thomas Sterry Hunt, le chimiste et le minéralogiste de la Commission géologique du Canada. En effet, le 4 décembre 1856, lors des élections annuelles de l'Institut polytechnique35 , Chevalier fut élu premier vice-préSident de l'Institut et président de la classe de littérature. Il y retrouve Thomas Sterry Hunt, élu second vice-président de l'Institut et président de la classe de sciences

Ce travail de traducteur peut être considéré comme ,'une des sources importantes de renseignements où pUisa Chevalier. Les arpenteurs de la Commission se rendaient dans un endroit précis et devaient étudier la géologie du territoire environnant en consignant les données dans des carnets de notes - "field notebooks"- qUi prenaient souvent l'allure d'un journal "personnel". Ces carnets, au nombre de 2500, dans les archives, couvrent la période de 1842 -date de fondation de la Commission - à 1900.

[ ... ]while they contain much technical information, sorne of these early note books will also prove of interest ~o

historians and anthropologists for there are vivid descriptions of the native ,"habitants, as weil as of the terrain and animai life 36

Entre 1855 date du premier arrêt de publication de la Ruche et 1859 -date de reparution de la Ruch~ ., Chevalier diverSifie ses activités Dans une annonce parue dans la Ruche, sous le titre "ens8Igriement", on lit:

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/

f

M. H. E. Chevalier, rédacteur en chef de la Ruche litté,-aire ,

pouvant disposer de quelques heures, les consacrerait volontiers à donner des leçons de langue ou littérature française. Prix de chaque leçon d'une heure, pour un ou plusieurs élèves .$1.37

16

En octobre 1854, dans la Patrie, on annonce que Chevalier donne des cours: ccM. H.E. Chevalier, rédacteur en chef de la Ruche littéraire, bien connu à Montréal par ses talents distingués, commence, lundi prochain, dans les salles de l'Institut Canadien, un cours de littérature française»38. Ces cours commencèrent lundi le 16 octobre 1854 et on annonçait dix-huit leçons

à

raison d'une leçon par lundi.

Dès le premier arrêt de Ja Ruche, Chevalier devient rédacteur de la Patrie. Il

y

publie ses "Célébrités contemporaines", le feuilleton "L'Hôtel du Cygne" et tient une chronique sur les théâtres presque identique à celle qu'il tenait au Courrier des Etats-Unis. Le Pays du 27 novembre 1855 nous apprend que Chevalier est,

à

cette époque, enseignant

à

l'école de M. Philips

à

Montréal.

Les quatre années de la carrière de Chevalier qui précèdent la réouverture de la Buche, seront marquées par son appartenance

à

l'Institut canadien de Montréal. Dès le 21 avril 1853, Chevalier avait été admis - nous n'avons pu trouver qui se fait le proposeur - comme membre de l'Institut, devenu depuis peu le refuge du libéralisme radical. Il y retrouvera, entre autres, son éditeur Cherrier39 déjà admis depuis le 28 octobre 1852.

Au début du mOIs de novembre 1854, Chevalier fut élu bibliothécaire de l'Institut. C.J.N. de Montigny travailla à ses côtés comme assistant bibliothécaire. Dans "ce milieu prêtrophobe", selon l'expression de Philippe Sylvain40 • Chevalier se signala assez rapidement. Le 2 novembre 1854, Chevalier propose le sujet de discussion suivant: «Le mariage civil serait-il

(24)

-17

préférable au mariage religieux?))41 et Il s'inscrit dans l'affirmative. Dans la même veine, Chevalier se fit remarquer lors d'une des séances de la Convention sur l'éducation, qUI tenait ses réunions à l'Institut, en proposant de refaire le système scolaire au profit des écoles mixtes. Le Pays du 28 novembre 1854 rapporte à ce ~ujet:

[ ... ] Après la lecture du rapport dans les deux langues, [.

J,

M. le Président suggéra de laisser le rapport sur la table jusqu'à la prochaine séance, et de le faire publier dans l'intervalle, afin que chaque membre de la Convention et les personnes du dehors puissent en prendre connaissance et venir discuter à la prochaine séance. [ .. ~ M. H.E. Chevalier se leva pour opposer la suggestion du président, en disant que le sujet était d'une telle importance qu'il fallait se hâter d'agir, afin d'en venir au plus tôt avec un bon plan d'éducation. Il s'étendit au long sur la nécessité des écoles mixtes, comme moyen de faire disparaître la démarcation et l'esprit de haine et de jalousie qui existe[sic] entre les différentes sectes religiEiuses 1\ dit aussi que l'éducatIon des femmes en ce pays, comme partout, devrait être cultivée avec le plus grand soin, car se[sic1 sont les femmes qui forment le coeur et l'esprit des enfans[sic]; c'est d'elles 1U'ils reçoivent leurs premières et leurs plus fortes impressions. et c'est sous ce rapport que la femme a l'avenir de la SOCiété entre les mains.

\1 professa aussi un cours de littérature qu'il présente à la séance du 11 mai 1854 : «Le secrétaire donne lecture d'un rapport du Comité de Régie, soumettant une lettre de M. H. Emile Chevalier, qUi offre d'ouvrir une chaire de

littérature et d'histoire sous le patronage de l'Institut.»42 , Par le p~ du 10 janvier 1855 au 18 janvier 1856, il est possible de

suivre l'activité de Chevalier au sein de l'Institut. En 1855, il assista à la séance du 10 janvier alors qu'il agit comme président remplaçant et qu'il donna 24 livres au fond de la bibliothèque43 Lors des séa.nces du 21 et du 28 mars, alors que l'Institut débattait sur le rapport entre les Journaux et I~ censure, Chevalier proposa un amendement par lequel il souhaitait que l'Institut continue de

(25)

18

recevoir les journaux religieux ou autres qui seraient envoyés gratuitement, pourvu que ces journaux ne soient pas obscènes ou immoraux. Le résultat du vote nous demeure inconnu. Il fut présent à la réunion du 5 avril ainsi qu'à celle du 19 avril lors de laquelle il seconda la proposition de F. Chagnon d'admettre comme membre J.A. Labadie, notaire de Montréal. Il fut présent lors des séances du 26 avril, du 3 mai et du 14 mai ( Le Pays du 19 mai 1855 reproduit le rapport du bibliothécaire produit par Chevalier). Finalement, lors de la séance du 3 janvier 1856, certains membres exprimèrent le désir que quelques membres soient appelés à faire des lectures publiques durant l'hiver dont Chevalier.

Lors de la séance du 11 décembre 1856: ceE. Chevalier donne avis qu'il proposera au temps voulu par les règlements Henry Chapman pour membre actif de l'Institut,,44. Chapman n'était pas étranger à l'Institut car il avait été présent, avec entre autres Chevalier, Charles Daoust et Louis-Antoine Dessaulles, à la réunion du comité pro-Lamartine tenue

à

l'Institut le 19 novembre 185645. Chapman fut admis à l'institut le 8 janvier 185746.

Le pays du 22 janvier 1857 annonce dans ses faits divers : cc Lecture.

Nous rappelons à nos lecteurs que demain, vendredi, M. Chevalier fera une lecture sur le territoire et la Compagnie de la Baie d'Hudson. I l En fait, la

question que débat Chevalier était la suivante: «Serait-il avantageux pour le Canada de posséder le territoire dont jouit maintenant la Compagnie dite de la Baie d'Hudson en vertu d'une charte accordée par Charles 1II,,47? Il s'inscrit dans l'affirmative. Cette "lecture" devait être présentée comme un "essai" devant l'Institut, c'est-à-dire, comme le définit Yvan Lamonde : cc[une] conférence privée, une présentation faite par un membre en règle de l'Institut à l'intention des seuls membres, et ce

à

l'occasion d'une "séance ordinaire" de l'association. 1148

(26)

-19

Cependant. lors de la séance du 18 décembre suivant, Chevalier demande qu'il lui soit permis plutôt de faire une lecture publique sur cette question49 :

[ ... ] l'usage des termes lecture publique, lecture, lectureur indique avant tout un phénomène de mimétisme culturel, d'emprunt d'une terminologie qui réfère à un phénomène d'abord anglo-saxon, [ ... ]. Les contemporains parlent donc de lecture et non de conférence publique.5o

.Lf

Pays annoncera cette "lecture" le 27 janvier 1857 : eeNous rappelons au public que ce soir M. Chevalier discourra sur la baie d'Hudson et fera lecture d'un ouvrage de M. G. Franchère au sujet de la traite des pelleteries. - La séance aura lieu à l'Institut-Canadien à

ah.

du soir.,,51 Le lendemain, la Patrie en donnera un compte rendu:

La salle de l'Institut Canadien était peu garnie.[ ... } Le sujet choisi par M.Chevalier était peu propre, croyons-nous, à attirer le monde, non pas qu'il ne fût essentiellement instructif, mais il tombait dans la catégorie des choses dites et redites. Sujet usé en un mot. Chacun doit avoir lu, en effet, les articles remarquables du Pays sur la baie d'Hudson. M.H.E. Chevalier les a répétés au public. Disons en passant, qu'on éprouve plus de plaisir à les lire soi-même, car le lectureur ne lit pas bien. Sa voix a quelque chose d'affecté qui déplaît. Ses contractions de figure faisaient un effet déplorable, et la ponctuation, ou plutôt les temps d'arrêt, si nécessaires dans une lecture, nous ont paru peu observés. Pourquoi, par exemple, parler

fourrure d'une voix caverneuse, presque sépulcrale, et

puis imiter tout-à-coup le bruit du clairon en dépeignant les neiges éternelles, les fleuves congelés et le vaste territoire de la baie d'Hudson?[ ... ] Cette critique paraîtra peut-être sévère, mais elle traduit fidèlement nos impressions. Nous estimons trop, d'ailleurs, M.Chevalier, pour lui cacher notre opinion et ne pas l'éclairer sur un défaut qu'il peut corriger facilement.

(27)

(

20

Chevalier présentera une seconde lecture devant l'Institut, annoncée dans le Pays du 24 février 1859, s'intitulant: "La Langue française et la nationalité canadienne". Le 24 mars, le Pays en annonce une troisième ayant pour titre: "La Presse franco-américaine". Elle sera remise au 29 mars et, finalement, au 31 mars: cc- Ce soir, M. H. E. Chevalier lira devant

l'Institut-Canadien un travail littéraire, intitulé la presse franco-américaine ,,52 Ces deux "essais" de Chevalier constitueront ses premiers textes de fond

à

être publiés dans la Ruche renaissante.

A partir de 1855, Chevalier sera souvent malade et plusieurs de ses feuilletons seront retardés; il ne faut pas s'en étonner avec le nombre d'emplois qu'il occupe afin de faire vivre sa famille. Le 30 mars 1856, Chevalier et sa femme, [Sophronie] Bouvier, inhument dans le cimetière de la paroisse de St-Rémi de Lasalle un enfant ondoyé53. Chevalier eut au moins un autre enfant, une fille, durant son séjour

à

Montréal. Dans la Patrie du 6 février 1858, une correspondance de Chevalier nous apprend qu'il fut dérangé par un importun à son domicile devant sa femme et 5a fille. La Guêpe du 11 février explique un peu cette affaire de défi en duel entre Chevalier et un certain de la Marteillère. De la Marteillère, insulté par Chevalier, se rend à son domicile désireux de régler l'affaire et semble y avoir fait tous les temps. Chevalier, insulté

à

son tour de toute cette brouille dans son salon, sort de la Marteillère et, selon la Guêpe, las deux hommes auraient prononcé le mot duel. Dès le lendemain, tout tombe

dans l'oubli. C'est aussi dans ce numéro qu'on peut lire la première description de Chevalier:

Monsieur E.H. Chevalier ce n'est pas Gargantua: c'est tout

simplement un jeune garçon-bourgeois, d'autres disent

"garçon-café "de trente ans, haut de cinq pieds huit

pouces trois lignes et demie moins un quart portant barbe et moustache

à

la façon d'Eugène Sue[ ... ]

(28)

~---•

21

Toujours en 1858, le pays du 7 septembre rapporte que Chevalier fut admis la veille à l'étude du droit par le bareau des examinateurs de Montréal. Chevalier, peut-être épuisé d'occuper plusieurs emplois temporaires, tente sa chance au bareau. Il ne terminera pas ses études.

En mars 1859, toujours associé à Cherrier, Chevalier reprend la publication de la Ruche dont il est maintenant devenu le propriétaire. Ellp. s'intitule alors la Ruche littéraire et ses bureaux sont installés dans ceux du

fans".

Déjà. en jL.n 1859, la Ruche Ijtté[aire ferme définitivement. En 1859, Chevalier collabore activement au ~:

A cette date [février 1858], [Charles] Daoust était encore rédacteur du Pays, mais il s'était assuré la collaboration de l'émigré français Henri-Emile Chevalier. Pour sa part, le propriétaire de la feuil/e libérale, Plinguet, sans doute alarmé par l'effet des anathèmes épiscopaux sur la circulation du journal, avait cédé les droits à la Société Dorion et Cie en juin 1858. Un an plus tard, Daoust se retirait à son tour du Pays, tandis que Chevalier restait seul rédacteur jusqu'au mois de novembre 1859, moment où le jeune Médéric Lanctôt prit la relève.55

Il Y publiera la traduction des "Trappeurs de la baie d'Hudson" de J.H. Robinson; la suite s'intitulant "Le Chasseur noir"; fit le compte rendu des théâtres de la ville; avant de remettre sa démission le 30 octobre 1859. Le

Pays

du 2 novembre reproduit sa lettre:

(29)

(

Montréal 30 octobre 1859

MM. les directeurs du journal Le Pays MESSIEURS LES DIRECTEURS: -L'Etat

de ma santé ne me permettant plus de prendre une part active à la politique, j'ai l'honneur de vous envoyer ma démission de rédacteur du Pays , journal auquel je resterai, néanmois, attaché et comme démocrate et comme actionnaire.

Daignez agréer, messieurs, l'assurance de ma

très haute considération, H.E. CHEVALIER.

22

A partir de cette date, l'activité de Chevalier demeure inconnue jusqu'en mars 1860: ccM. Henri-Emile Chevalier. ancien rédacteur du Pays s'est embarqué samedi dernier [17 mars 1860], à bord du Glasgow ,pour l'Europe. Que les vents lui soient favorables?,,56

Henry-Emile Chevalier retourne en Europe à 32 ans, l'année même où se fonde, à Québec, l'Ecole patriotique et littéraire de l'abbé Casgrain. La France avait changé: on amnistia les exilés du coup d'Etat dont fut victime Chevalier. Son romantisme a été délaissé au profit du réalisme. Balzac n'est plus et bientôt les naturalistes connaîtront de grands succès.

Peu de temps après son retour en France, Chevalier collabore au

fan

ainsi qu'à L'Opinion nationale, à Paris. Il publie aussi divers ouvrages ayant majoritairement comme thème le Canada et l'Amérique. Certaines de ces productions seront des reprises de textes parus à Montréal. par exemple:

ai

hommes pour une femme (L'Ile de Sable) et La Huronne (La Huronne de Lorette). D'autres avaient sans doute été commencés à Montréal. sans jamais être publiés:

Deux nouveaux ouvrages concernant l'histoire canadienne paraîtront prochainement. L'un est une oeuvre anecdotique intitulée: La Sorcière de St-Charles, épisode de la Révolution canadienne; l'autre est purement historique: il portera le titre de 37 et 38. Ces deux livres sont dus à la

(30)

,-plume de M. H.E.Chevalier, qui dans ce moment travaille à une histoire du Canada depuis l'Union des deux provinces jusqu'à nos jours! Des documents privés, inédits jusqu'à ce jour, donneront sans doute aux dernières productions de

M.

Chevalier un intérêt tout particulier et qui captivera l'attention des amis de la littérature et de la politique rationnelle.57

23

En 1858, ces productions ne sont pas encore teminées. Cans le Pays du 20 avril 1858, on lit:

1837-38 par Chevalier à paraître prochainement. L'auteur serait obligé aux personnes qui possèdent quelques renseignements spéciaux sur ces remarquables époques de l'histoire canadienne, de les lui communiquer. Quoique son ouvrage soit presque terminé, il s'estimera heureux d'y faire les additions ou altérations qu'on voudra bien indiquer en le favorisant d'informations ou détails nouveaux.

De retour à Paris, Chevalier fut le directeur d'une Correspondance franco-étrangère qui tenait ses assises au 19, rue Lourmel. On retrouve une de ses lettres dans le fond Alphonse Lusignan aux Archives nationales du Canada58 . Premièrement, cette lettre montre que Chevalier a continué

à

entretenir des relations avec le Canada après son départ; ce qui, deuxièmement, nous apprend qu'il recevait des informations dont il se servait

pour écrire ses Drames de l'AmériQue du Nord:

Depuis longtemps, je n'ai point reçu de nouvelles de mon vieil ami G. H. Cherrier. Si vous le voyez, soyez assez bon pour me rappeler à son souvenir, et dites-lui que j'attends toujours le dernier rapport sur les Pêcheries canadiennes qu'il m'a promis.

Et dans le but d'inclure des pièces canadiennes à un de ces ouvrages intitulé La Littératl'''e et l'esprit français en AmériQue, il demande

à

Lusignan: "[ ... ] si vous désirez m'envoyer quelques pièces de prose ou poésie (imprimé) de vous ou de vos amis, je serai enchanté de leur ouvrir mon recueil.» Finalement, on y apprend que Louis Fréchette a fait ses débuts dans la Ruche littéraire: "Si j'ai bonne mémoire, M. Fréchette est une [ ...

J

connaissance à moi. Il a fait ses

(31)

(

(

24

débuts dans la Ruche et je possède, en un coin de ma bibliothèque, un petit volume de lui, intitulé Mes Loisirs, où l'on peut cueillir de bien jolies fleurs .•• 59

Après 1870, il fait partie de la commission municipale du XVe arrondissement de Paris et devient inspecteur général des approvisionnements. Enfin, ses aspirations politiques durent être comblées le 30 juillet 1871, alors qu'il est élu au second tour, par 920 voix, membre du conseil du quartier de Grenelle. Il y sera réélu en novembre 1874. Il meurt

à

Paris,

à

l'âge de 51 ans, le 25 août 1879.

(32)

-25

NOTES DU PREMIER CHAPITRE

1. Mairie de Châtillon-sur-Seine, registre d'état civil: table décennale 7 (1823-1833) et registre de 1828 au numéro 171.

2. Nous n'avons aucune information sur ce journal. Nous avons cherché son existence dans: Eugène Hatin, Bibliographie historique et critique de la presse périodique franQaise, Paris, Librairie de Firmint Didot et frères, fils et cie, 1866, 660p.; Bibliothèque nationale(département des périodiques), Catalogue collectif des périodiques du début du XVIIe siècle

à

1939, Paris, Bibliothèque nationale, 1969, tome III, J-O.; Centre national de coopération des bibliothèques publiques, presse régionale franQaise, Catalogue collectif des périodiques microfilmés, Massy, 1990, 257p.; Edna Brown Titus, éd., Union List of Seriais in Librairies of the United States and Canada, New York, The H.W. Wilson Company, 1965, vol.4, NoR.

3. Henri-Emile Chevalier, "Huronne de Lorette", la Ruche littéraire et politique, août 1854, p.421. Dans le Moniteur canadie~ du 22 septembre 1853, une note de Chevalier, dans le quatrième chapitre des "Souterrains du château de Maulnes", indique que Lucien Coutant était aussi membre de la Société archéologique de Bourgogne et que Chevalier avait participé avec lui

à

des travaux d'archéologie autour du "Puit des Romain", près de chez lui. 4. Henri-Emile Chevalier, le Pirate du St-Laurent, Montréal, Lovell, 1859, p.46.

5. Henri-Emile Chevalier, "L'Ile de Sable", la Ruche littéraire et politique, juillet 1854, p.308.

6. Arthur C. Cole, The Irrepressible Conflict 1850-1865, New-York, The Macmillan company, 1951, p.122.

7. ibidem. p.128.

8. le Courrier des Etats-Unis, 17 février 1852. 9. ibidem.24 février 1852.

10. ibi.d:., 6 février 1852. 11.

m,

12 janvier 1853. 12.

m.

13.

l.b.i.d.,

6,11,20 décembre 1852; 3,17,24,31 janvier 1853; 1,7,14,23 , février 1853; 7 mars 1853. 14.

il:lli1..,

21 juin 1852. 15. mkL,. 16.

m,

26 octobre 1852 17.

m,

27 octobre 1852. 18.

m,

11 novembre 1852. 19.

m,

27 décembre 1852. 20.

iDkL,

11 mars 1853. 21.

m.

22.

m,

12 mars 1853. 23. itlli;l.

(33)

(

(

26

24. Philippe Sylvain, "Alfred-Xavier Rambau", Djctionnaire biographiQue du Canada, Québec, Presses de l'Université Laval, 1985, tome VIII, p. 816. 25. Marc-A. Perron, "Frederic-M.-F. Ossaye" Dictionnaire biographiQue du Canada, Québec, Presses de l'Université Laval, tome IX, p.287.

26. le Pays, 15 février 1853. 27. ibidem.

28. la Minerve, 21 avril 1853.

29. Georges-Hippolyte Cherrier est le frère d'André-Romuald Cherrier,connu sous le pseudonyme de "Pierre-André". Tout comme ses frères André-Romuald et Trefflé, il a fait ses études au Collège de Montréal. A ce sujet: Aurélien Boivin, "Un Episode gallico-canadien [ ... ]", Dictionnaire des oeuvres littéraires du Québec, Montréal, Fides, tome " p. 735. On sait peu de chose de Georges-Hippolyte Cherrier (fils), le directeur de la Ruche. Ses parents, Georges-Hippolyte Cherrier et Marie-Anne Roy, se sont mariés le 17 juin 1811 dans la paroisse Notre-Dame de Montréal. Cherrier, fils, quant

à

lui, s'est marié

à

Caroline Decouagne, dont les parents se nommaient François Decouagne et Eloïse Héneau-Deschamps, le 5 novembre 184fi

à

Berthierville. Le jeune couple inhuma son premier enfant, Marie-Anne Héloïse Caroline Cherrier à l'âge de 4 ans et 9 mois le 21 juillet 1851 (Archives nationales du Québec

à

Montréal, registres d'état civil). Les Cherrier eurent au moins un autre enfant, un fils (anononcé dans le Moniteur canadien du 7 septembre 1854). Un détail est intéressant. John Lovell était l'ami intime de Cherrier. En effet, on retrouve sa signature sur l'extrait de mariage de Cherrier. C'est d'ailleurs Lovell qui imprima la presque totalité des oeuvres de Chevalier lors de son séjour

à

Montréal.

30. le pays, 24 septembre 1853.

31. la Ruche littéraire, août 1853, p.416. 32. ibidem, septembre 1853, p.479.

33.

i.bkL,

p.41 7. cc Lors des grandes expositions internationales qui suivent

celle de 1851 [Great Exhibition of the Work of Industry of Ali Nations, tenue

à

Londres], les minéraux et les fossiles de la Commission géologique du Canada forment chaque fois le noyau de la participation du Canada»»: Luc Chartrand; Raymond Duchesne; Raymond Gingras, Histoire des sciences au Québec, Montréal, Boréal, 1987, p.138.

34. Archives nationales du Canada, RG-45. Sur les débuts de la Commission: C. Gordon Winder, "Sir Edmond Logan", Dictionnaire biographiQue du Canada, Québec, Presses de l'Université Laval, 1972, tome X, pp.486-492.

35. Elections annoncées dans La Patrie le 5 décembre 1856. Sur les débuts de cet Institut, lire le pays du 1 er juillet 1856. Sur Hunt on lira: Raymond Duchesne, "Thomas Sterry Hunt", Dictionnaire biographiQue du Canada, Québec, Presses de l'Université Laval, 1990, 'tome XII, pp.498-499.

,

(34)

r

,

27

36. Archives nationales du Canada, Division des archives gouvernementales, Collection de l'inventaire général. Archives de la Commission géologique du Canada(RG-45}, index du fonds, p.TR-7.

37. la Ruche littéraire, février 1854. 38. la Patrie, 13 octobre 1854.

39. Archives nationales du Québec à Montréal, fonds de l'Institut canadien de Montréal, procès-verbal du 28 juin 1855. Cherrier quittera l'Institut le 25 juin 1855, selon le registre des membres. Cependant, ce n'est qu'à la séance du 28 juin qu'il lira une lettre (coffrant sa résignation comme membre de l'Institut». Quant à Chevalier, il ne quittera pas les rangs de l'Institut.

40. Philippe Sylvain,"Lamartine et les catholiques de France et du Canada", Bevue d'histoire de l'AmériQue française. (1950-1951): 380.

41. Annoncé dans le Pays le 7 novembre 1 854. 42. le Pays, 13 mai 1854.

43. Les titres donnés par le

E..au

sont: Armorial historiQue de France par Milleville(1); Las Cnatro Postrimerias dei Hombre(8}; New Spanish aod English Dictionnary(1); A Winter in Madeira(1); Poems by Amelia(1); Kick-Knacks(1); Histoire du Directoire(1); Nicholas Nickelby(1); Eçarté( 1 ); Antonia. Angelica Catalani-Un baron comme il y en a peu(1); Beatrice( 1); Saturnin Fichet. les plaisirs du roi. le chiftonier de Pa~(2); Official CataloQue of the New-York Exhibition(1).

44. Archives nationales du Québec à Montréal, procès-verbaux de l'Institut canadien de Montréal, le 11 décembre 1856. Henry Chapman s'était fait connaître à Montréal vers 1840. Auparavant, il exerça son métier d'imprimeur dans le Haut-Canada. Il imprima en 1831, à Niagara, un ouvrage de John Galt (1779-1839) intitulé The Lite of Lord Byron. (Roger Hall; Nick Whistler, "John Galt" , Dictionnary of Canadian Biography, Toronto, University of Toronto Press, tome VII, p.339.) Vers 1845, Chapman s'associe avec Thomas Ryan (1804-1899), un homme d'affaires et tous deux fondent la Ryan. Chapman and Company, General Merchants , compagnie qui oeuvrait également à

Montréal et à Québec. (Gerald J.J. Tulchinsky; Alan A. Dever, "Thomas Ryan", Oiçtionnary of Canadian Biography, Toronto, University of loronto Press, tome XI, p. 781.) En 1846, avec John Glass et Thomas Kay, il se joint à John Young (1811-1879) qui venait de fonder The Free Trade Association in Montreal. (G. Tulchinsky; Brian J. Young, "John Young", DictjQnnary of Canadian Biography, Toronto, University of Toronto Press, tome X, p. 724.). 45. la Patrie, 21 novembre 1856.

46. le Pays, 20 janvier 1857.

47. Archives nationales du Québec à Montréal, procès-verbaux de l'Institut canadien de Montréal, le 11 décembre 1856.

48. Yvan Lamonde, Gens de Parole, Montréal, Boréal, 1990, p.88.

49. Archives nationales du Québec à Montréal, procès-verbaux de l'Institut canadien de Montréal, le 18 décembre 1856.

(35)

(

(

28

50. Yvon Lamonde, QP.CIt.,

pA'.

51. le Pays, 27 janvier 1857. 52. ibidem, 31 mars 1859.

53. Archives nationales du Québec à Montréal, registres d'état civil, St-Rémi de Lasalle, index 1830-1877, bobine 485, no 72 sépultures.

54. la Ruche littéraire, mars 1859, p.2.

55. Philippe Sylvain, "Charles Daoust", Dictionnaire biographique du Canada, Québec, Presses de l'Université Laval, 1977, tome IX, p.213.

56. L'Ordre, 21 mars 1860. Le 19 mars, L'Ordre annonçait dans sa rubrique "Par le Télégraphe" que le Glasgow était parti de New York le 17 mars en après-midi pour l'Europe, avec 10 passagers de chambre et 30 de ponts. 57. la Patrie, 28 septembre 1855.

58. Archives nationales du Canada, MG29 D 27, volume 1, correspondance

C-D.

59. Nous avons tenté sans succès de trouver le texte de Fréchette dans la Ruche.

,

(36)

CHAPITRE SECOND:

(37)

29

[ ... ] la décennie de 1850, décennie qui apparaît d'ailleurs de plus en plus décisive dans la mise en place des formes culturelles du dix-neuvième siècle'

Qu'est-ce que la Ruche littéraire de Cherrier et de Chevalier et quelle place

y

occupe Chevalier? Ce sont là les deux principales questions auxquelles nous répondrons dans ce chapitre.

Vers 1850, s'établissent à Montréal des lieux de diffusion du littéraire, souvent de tradition anglophone: salles de nouvelles (news room), bibliothèques d'associations, bibliothèques de paroisses, bibliothèques professionnelles et bibliothèques scolaires, autant de lieux favorisant la connaissance de l'imprimé, tant local qu'étranger, peur un public grandissant:

L'alphabétisation au Québec franchit une étape décisive entre 1840 et 1880 [ ... ]. Une hypothèse conservatrice basée sur le fait que les grandes villes connaissent un taux d'alphabétisation plus fort et sur le fait que ce taux est supérieur pour les angle-protestants permet d'avancer que la majorité des Montréalais est alphabétisée vers 1840.2

Et l'élargissement de la presse le montre bien. A partir de La Presse Québécoise de Beaulieu et Hamelin3 , nous avons mis en évidence quelques statistiques au sujet de la presse montréalaise de 1830 à 1860 (Voir annexe A). Le tableau A montre le nombre d'années de publication des journaux par décennie.

(38)

30

TABLEAU A : Nombre d'années de publication des journaux, rar décennie (%). nbre d'année(s) 1 n* 1 1830-1840 / n / 1840-1850 1 n / 1850-18f:0 1 20 46,S 31 44,2 20 29,4 2 12 27,9 12 16,6 9 13,2 3 1 2,3 7 9,7 9 13,2 4 1 2,3 4 5,5 4 5,8 5 4 9,3 5 6,9 5 7,3 6 0 0 2 2,7 1 1,4 7 2 4,6 2 2,7 2 2,9 8 0 0 0 0 1 1,4 9 1 2,3 1 1,3 2 2,9 10 2 4,6 9 12,5 15 22

• "n" représente le nombre de titre(s) par décennie

Durant la décennie de 1830 à 1840, la majeure partie des journaux publiés s'avère des publications éphémères : 74% des journaux ne durent que d'une à deux années; tandis que les jourllaux de durée plus longue (neuf à dix années) ne constituent que 6,9% de l'ensemble. Dans la décennie suivante, 1840

à

1850, les journaux de courte durée (une

à

deux années) représentent 60,8%; alors que le nombre de journaux de longue durée double pour atteindre 13,8%. Finalement, durant la décennie qui nous intéresse, 1850

à

1860, les journaux de courte durée ne représentent plus que 42,6%, tandis que les journaux de longue durée passent à 24.9%. Entre 1850 et 1860, ,es journaux ayant une longévité de 3 à 8 ans sont sensiblement plus présents que dans la décennie précédente. Durant la décennie de 1850 à 1860, la mise en place de lieux de diffusion facilitera la publication des journaux.

Le développement des bibliothèques de collectivité à Montréal connaît, chez les francophones, un essor qUi n'est certes pas négligeable4. Entre 1840 et 1850, 5 bibliothèques ont été fondées chaz les francophones de Montréal et 10 chez les anglophones. Entre 1850 et 1860, 29 bibliothèques francophones ont vu le jour, tandis que les anglophones en fondaient 10 nouvelles. La décennie suivante, 1860 à 1870, verra la fondation de 16 nouvelles

(39)

31

bibliothèques francophones et 10 anglophones. Montréal passe de 15 bibliothèques à 39 en dix ans : signe éloquent de ,'essor de la culture de l'imprimé dans cette ville. Logiquement, la longévité des journaux étant conditionnelle à leur diffusion, la fondation des 39 nouvelles bibliothèques, entre 1850 et 1860, est sûrement un indice qu'un plus large réseau de diffusion s'installe, permettant ainsi de rejoindre un plus vaste public.

Cet essor des lieux de diffusion de l'imprimé est étroitement lié au mouvement associationniste. Après les rébellions de 1837-1838, la sociabilité associative se diversifie : de patriotique et professionnelle qu'elle était, elle devient plus sociale et culturelle avec des sociétés du type de l'Institut canadien de Montféal, société calquée sur le modèle anglophone des différents Institutes. Ces lieux nouveaux de l'expression culturelle ouvrent une voie différente - entre autres gri..tce

à

leurs biliothèques -

à

la diffusion des idées et de la culture. la fondation de nouvelles biliothèques entre 1850 et 1860 n'est sûrement pas étrangère à la disponibilité d'une nouvelle aide gouvernementale. En effet, Yvan lamonde a démontréS que de 1841 à 1855, le nombre des demandes financières par des associations se situe à environ 5 par années alors qu'en 1856, le nombre passe à plus de 32 pour atteindre 60 vers 1859, et se restabiliser en moyenne à 5, à partir de 1861 jusqu'en 1866. Si les journaux ont une durée moyenne plus élevée entre 1850 et 1860, c'est qu'il y a mise en place d'un réseau de diffusion des imprimés grâce entre autres à la fondation, qui passe en bonne partie par le mouvement associationniste, de plusieurs bibliothèques.

En plus des biliothèques et de la presse, les librairies de Montréal sont en plein essor: Armour and Ramsay (1842), Robert Graham (1842), Robert Miller (1842), James Ruthven (1842), R.W. Mackay (1844), Chalmers (1845), Robert Weir (1845), Benjamin Dawson (1847), Sadlier (1849), chez les anglophones; E.R. Fabre (1823), Beauchemin (1842), J.B. Rolland (1842), Z. Chapleau (1849), chez les francophones6.

(40)

32

Le système scolaire lui aussi s'élargit : les lois de 1841, 1843 et 1845 en confirment de plus en plus la confessionnalisation, avant que la législation de la décennie de 1850 n'assure un véritable décollage. Les Collèges se multiplient: Collège de Joliette (Joliette 1846), Collège Masson (Terrebonne 1847), Collège St-Laurent (Montréal 1847), Collège Ste-Marie (Montréal 1848), Collège de Rigaud (Rigaud 1850).

De plus, la population de Montréal triple entre 1831 et 1861 : de 27 297, elle passe

à

90 323 habitants: (eLa croissance démographique contribue donc à spécialiser les formes culturelles, à caractériser des types, des lieux et des publics.)) 7

C'est dans ce contexte social et culturel particulier qu'est fondée, en février 1853, la Ruche littéraire. Si l'on compare la présentation typographique de la Ruche de 1853

à

celle de 1859, on constate tout le chemin parcouru, durant cette décennie de 1850 à 1860, par l'imprimerie montréalaise au niveau de la mise en page, de la qualité de l'impression et des caractères.

La Ruche littéraire est le second projet de Cherrier; il avait déjà eu l'intention de publier le Phare littéraire, avec Louis-Joseph Racine8. Peu après la publication du premier numéro de Ia.Ruche, Eugène L'Ecuyer dut défendre son Episode de la vie d'un faux dévot . probablement prévu pour le Phare -contre maintes attaques venant partiCUlièrement de la Minerve. Alors qu'il répondait

à

ces attaques, L'Ecuyer rétorqua que si le Phare littéraire n'avait pas vu le jour, Racine en était le seul responsable. Paradoxalement, ce dernier engagea alors un duel, non contre L'Ecuyer. mais plutôt contre Cherrier: ((exemple patent des disproportions que pouvaient prendre, en ces temps, les disputes ... Iittérairesl,,9.

Cherrier ne répondit qu'une seule fois à Racine, dans le Pays du 24 mars

1853. L'Album de la Minerve étant disparu, Cherrier avait voulu le remplacer

Figure

TABLEAU  A : Nombre  d'années de  publication  des journaux,  rar décennie  (%).
Table  des  matIères  de  la  premIère  séne  Z  .............  359-360
Table  des  matières  Z  ......  - ......  160B

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