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Avant-Propos. Environnement et développement : concevoir la durabilité

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Academic year: 2021

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HAL Id: hal-02570300

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02570300

Submitted on 11 May 2020

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Avant-Propos. Environnement et développement :

concevoir la durabilité

Georges Bertrand

To cite this version:

Georges Bertrand. Avant-Propos. Environnement et développement : concevoir la durabilité. Les Cahiers d’Outre-Mer. Revue de géographie de Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux, 1997, Environnement et développement., pp.3-6. �hal-02570300�

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Cahiers d'outre-mer

Avant-Propos. Environnement et développement : concevoir la

durabilité

Georges Bertrand

Citer ce document / Cite this document :

Bertrand Georges. AvantPropos. Environnement et développement : concevoir la durabilité. In: Cahiers d'outremer. N° 197 -50e année, Janvier-mars 1997. Environnement et développement. pp. 3-6;

https://www.persee.fr/doc/caoum_0373-5834_1997_num_50_197_3634

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AVANT-PROPOS

ENVIRONNEMENT ET DEVELOPPEMENT : CONCEVOIR LA DURABILITE

" Ils ne savaient pas où ils étaient, ils ne savaient pas où ils allaient et cependant ils discutaient inlassablement de l'itinéraire

G. Chaucer Onzième Conte de Canterbury En accompagnement des grandes interrogations et des aspirations qui ont suscité entre autres manifestations, la conférence mondiale de Rio en 1992, les colloques scientifiques consacrés à l'environnement et/ou au développe¬ ment se suivent... et se ressemblent beaucoup dans la mesure où ils restent essentiellement fondés sur l'existant, même si ce dernier est devenu interdisci¬ plinaire. Ils vont rarement jusqu'à proposer et à mettre à l'épreuve des démarches scientifiques renouvelées, spécifiques à la problématique complexe du développement durable. Toutefois, les idées avancent et les comportements scientifiques évoluent. L'interdisciplinarité s'y discipline. Un nouveau champ d'investigation s'ouvre. Le temps est venu de la réflexion conceptuelle et méthodologique.

Pour ma part, ce mouvement naissant me conduit à m' interroger sur les mécanismes profonds mais ambigus de la convergence proclamée entre l'environnement et le développement, couple a priori paradoxal, et sur la signification conceptuelle de cette sorte d'avatar qu'il a récemment procréé : le développement durable.

Du paradoxe...

D'abord strictement naturel et naturaliste, l'environnement est devenu de plus en plus «humain» et social et prend actuellement une forte coloration culturelle et esthétique. Le développement s'est, quant à lui, dégagé par à-coups d'une pratique d'aménagement technocratique et économiciste, pour lui aussi revêtir des aspects plus sociaux et, de toute évidence, plus humanistes, prenant même en compte des considérations d'ordre écologique.

Ce rapprochement est capital, révolutionnaire et irréversible. Il marque les mentalités et les comportements tout en provoquant des effets divers, voire opposés. Si la convergence est réelle, elle demeure mal maîtrisée, tout particu¬ lièrement dans le domaine de la recherche scientifique où il ne suffit pas de parler d'environnement et de développement durable pour modifier de confortables habitudes disciplinaires. Par exemple, on ne passe pas plus

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facilement d'une géographie physique et humaine à une géographie de l'environnement qu'on ne glisse d'une géographie tropicale surannée à une géographie du (sous)-développement.

Le seuil à franchir est complexe. Il est à la fois épistémologique, méthodologique, sémantique et.... idéologique. L'environnement et le déve¬ loppement constituent une sorte de couple de rencontre qui s'est constitué, presque par nécessité, à un moment précis de l'histoire des sociétés et de la nature ; c'est-à-dire au moment où il a fallu surmonter, par souci d'efficacité, des savoirs et des pratiques par trop cloisonnés et obsolètes.

L'environnement désigne plutôt un objet matériel né d'un rassemble¬ ment d'éléments considérés jusqu'ici séparément. Il caractérise un état de cet objet plus ou moins statique, même si cet environnement se définit, in fine, comme un système dynamique. Le développement, quant à lui, implique une action en cours, donc un changement, un devenir et un avenir avec une très forte connotation positive de projet, donc de progrès. La dissymétrie conceptuelle est forte et a déjà donné lieu à des dérives. C'est ainsi qu'on a pu y voir une opposition entre d'un côté, l'expression d'un état conservatoire, patrimonial et, de l'autre, d'une dynamique progressiste.

Il y a bien eu, quelque part, confrontation entre deux systèmes de pen¬ sée. On ne passe pas impunément de l'un à l'autre. Flagrante, la contradiction ne doit pas être négligée, voire masquée ; au risque de faire du développement durable un faux-semblant œcuménique sans valeur opératoire. On ne construit pas un système de recherche scientifique, et à plus forte raison d'intervention sur les sociétés et les milieux, à partir d'un simple paradoxe.

... au paradigme...

Aujourd'hui à la confluence des questions d'environnement et de développement, s'est formée une zone de métissage des idées et d'hybridation des concepts, voire de simples notions et pratiques pas toujours clairement désignées, qui témoigne d'un renouvellement en cours des problématiques et des thématiques.

Des mots, maîtres-mots et/ou «mots valises», des expressions et des métaphores, s'y bousculent, le plus souvent dans le plus grand désordre séman¬ tique : mondialisation, globalisation, systémique, équilibres stables et instables, ressources renouvelables ou non renouvelables, patrimonialisation, crise et catastrophes, finitude, durabilité, interactivité, interdisciplinarité, etc. C'est dans ce vivier qu'il faut puiser pour construire un nouveau système conceptuel qui permettra de franchir le seuil épistémologique de première grandeur qui sépare encore les sciences de la société des sciences de la nature, sans parler des cloisonnements internes à chacune des disciplines considérées.

- Les discussions novatrices, courageusement lancées en septembre dernier au colloque «Dynamiques sociales et environnement» de Bordeaux, ont parfois achoppé sur des imprécisions et des incompréhensions entre les

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différents langages, utilisés en particulier entre la communauté des chercheurs et celle des opérateurs du développement. De fait, cette babélisation traduit une

absence de maîtrise des notions manipulées par les uns et par les autres. Une sorte de «traduction simultanée» est devenue indispensable. Elle ne peut être confinée au seul domaine scientifique. Elle doit revêtir une dimension inter¬ professionnelle pour répondre à l'attente de tous les acteurs du développement. Cela réclame un effort de théorisation et de conceptualisation impliquant l'ensemble des partenaires.

- Le «développement durable», expression devenue banale, est utilisé en toutes circonstances et sans autre précision, comme une référence quasi abso¬ lue. Elle paraît sceller une convergence harmonieuse entre les questions relatives à l'environnement et celles relatives au développement. Elle apparaît comme une sorte d'équilibre à atteindre, de but vers lequel tous les efforts doi¬ vent tendre, dans le plus grand flou conceptuel et méthodologique.

- Nous laisserons provisoirement de côté ce qui concerne la définition du développement lui-même ainsi que les approximations liées à la traduction de l'anglo-saxon «sustenable». Nous allons nous concentrer sur ce que devrait fonder scientifiquement le développement durable : la durée.

... autour de la durabilité...

- La durabilité, vieux nom français (signalé au XVIe siècle), exprime «le caractère de ce qui est durable» (Petit Robert, 1977) ; il définit «/' espace de temps au cours duquel un bien reste capable de satisfaire normalement un besoin», par exemple en technologie du bois elle constitue «la propriété que possède le bois de résister, à un degré plus ou moins grand, aux atteintes des organismes destructeurs : champignons, insectes, tarets, etc. L'aubier n'a pas la même durabilité que le bois parfait, ou «duramen» (Grand Larousse encyclopédique, 1 98 1). Ce terme a été repris en 1 974 par Jean Tricart dans le domaine de la géomorphologie et de l'éco-géographie .

Ainsi définie, cette expression de la durée, essentielle pour l'analyse des systèmes socio-écologiques, ne peut-elle pas être considérée et utilisée comme l'un des concepts centraux et centralisateurs de l'analyse fonctionnelle du couple environnement-développement ? Ce concept mixte est entièrement à construire. Nous pouvons déjà proposer quelques pistes de réflexion.

- La maîtrise du temps passe par la construction de grilles de référence multitemporelles qui permettent à chaque phénomène observé, à chaque disci¬ pline de se situer dans une échelle précise de durée et d'analyser les relations entre le temps physique, le temps biologique et le temps social.

- Le développement combiné avec l'environnement passe plus précisé¬ ment par la prise en compte des temps longs, c'est-à-dire des temps qui dépassent les temporalités habituellement retenues dans les études sectorielles (économie, histoire, démographie). Ces temps longs permettent de confronter, sinon de combiner, les temps sociaux aux temps naturels, que ces derniers soient biologiques, climatiques ou géologiques.

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- La recherche sur le développement durable doit être vigoureusement inscrite dans la flèche du temps. Le présent et le passé doivent être dépassés et analysés en fonction du devenir des systèmes socio-écologiques évoqués. Travailler sur la liaison environnement-développement, c'est par impératif catégorique, se hasarder à faire non seulement du prévisionnel mais surtout de la prospective de grand large. Cela signifie qu'il faut dépasser les certitudes factuelles de la recherche scientifique pour assurer une meilleure et périlleuse liaison entre les projets de développement. Les chercheurs ne peuvent pas lais¬ ser la prospective aux seuls développeurs !

- La compétence des chercheurs se fonde sur la recherche rétrospective qui constitue la seule façon de relier la dimension patrimoniale à la dimension prospective. Alors seulement les temps les plus longs seront maîtrisés et les chercheurs y assumeront une tâche essentielle.

- La durabilité conduit le chercheur à raisonner en terme de système, à la fois d'état et d'évolution des systèmes. On retrouve ainsi et on justifie une approche systémique qui a encore beaucoup de mal à s'imposer dans certaines démarches disciplinaires. La notion d'état est particulièrement précieuse car elle permet, non seulement de définir certaines situations d'équilibre dyna¬ mique entre l'état de l'environnement et l'état de la société, mais encore et surtout elle permet de marquer les différents pas de temps qui caractérisent cette association.

C'est ainsi que l'analyse de la durabilité conduit tout naturellement à la modélisation des systèmes socio-écologiques complexes, et, en ce qui concerne notre propos, à la modélisation des états du système, y compris les états de crise et/ou de catastrophe, en fonction de leur succession et de leur durée. Ce cadre conceptuel et méthodologique permet de préciser un certain nombre de notions flottantes à l'intérieur d'un système de référence temporel. Par exemple, la ressource ne sera plus dite «renouvelable» dans un absolu indé¬ finissable, mais bien par rapport à un certain «pas de temps» naturel (celui de sa reconstitution) et social (celui de son utilisation). La catastrophe s'inscrira et se relativisera dans une périodisation et un système spécifiques aux phéno¬ mènes naturels et sociaux pris en considération.

Alors peut-être saura-t-on un peu moins mal ce que le développement durable veut dire. La réunion de Bordeaux nous a plongés au milieu du gué. L'itinéraire est le bon. Il n'est plus question d'en changer. Nous ne pouvons qu'avancer. A l'intérieur de la géographie, comme entre disciplines voisines, ce cheminement demande des «passeurs de frontières».

Georges BERTRAND Professeur de géographie Université Toulouse -Le -Mirail

Président du Comité de Programme du PIR Environnement, Vie et Société du CNRS

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