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ARTheque - STEF - ENS Cachan | Une prise en compte de l'enfant dans une muséologie de l'Environnement

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Academic year: 2021

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UNE MUSEOLOGIE DE L'ENVIRONNEMENT

Jack GUICHARD

D. J.F.Cité des Sciences et de l'Industrie, Paris

MOTS CLEFS: ENVIRONNEMENT - ENFANT - MUSEE - EXPOSmON - NATURE.

RESUME : Comment l'enfant doit-il et peut-il être pris en compte dans une mise en œuvre muséographique des questions d'environnement? En tenant compte des pratiques de référence des enfants, et de l'expérience d'une muséologie interactive pour les enfants menée depuis 5 ans à l'Inventorium, la cité des Sciences et de l'Industrie de Paris développe un projet de "cité des enfants". Ce projet s'appuie à la fois sur la découverte de l'environnement technique et social, ainsi que sur l'environnement naturel.

SUMMARY : What can be the role of children in an exhibition on environmental problems ? Thanks to five years of experience, the team of the Inventorium at the Cité des Sciences et de l'Industrie in Paris has developed a project for a "cité des enfants". This project is designed to help children10discover not on!y their natura! environment but also their social and technical environmenl

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Les enfants sont les futurs citoyens du monde que nous leur préparons. Ils sont préoccupés par leur avenir, et donc en premier chef intéressés par les questions d'environnement qui vont être les questions primordiales des années futures.

1. IMPORTANCE DE LA SENSIBILISAnON DES ENFANTS, FUTURS CITOYENS DE DEMAIN

Si tout le monde considère qu'ils doivent recevoir des informations sur les questions d'environnement qui les préoccupent, tout le monde n'est pas d'accord sur le mode et le niveau d'approche des problèmes, déjà dans le domaine de l'éducation. La question est encore bien plus difficile dans celui de la muséologie.

Notre approche de cette question dans le domaine de la muséologie pour les enfants est déjà mise en œuvre dans le secteur des enfants de la cité des Sciences et de l'Industrie. Il se développe actuellement dans le projet de création d'une "cité des enfants", qui est inspirée de nos 5 années d'expérience de l'Inventorium, un lieu de découvertes scientifiques et techniques pour les 3 à 12 ans. Elle s'inscrit dans une logique muséologique qui consiste à s'appuyer sur la mise en place de concepts simples et fondamentaux au travers d'une démarche interactive pour notre jeune public. Le principe repose sur la nécessité de fournir aux enfants des éléments de base, afin qu'ils puissent demain dépasser la simple prise de position politique et qu'ils puissent avoir de vrais éléments de jugement. Il s'agit de leur faire connaître, mais surtout comprendre, des clés de lecture. Mais pourquoi ce parti pris ?

La démarche par rapport à l'environnement s'appuie à la fois sur l'environnement immédiat et sur l'environnement naturel en essayant aussi de développer une prise en compte de la citoyenneté. En ce qui concerne l'environnement naturel, elle consiste à découvrir des réseaux de relations àl'intérieur d'un milieu et entre l'homme et son milieu,àprendre conscience de la fragilité des équilibres naturels et à être impliqué, à formuler des jugements. Il est bien entendu possible de formuler ces principes sur une série de panneaux, par une collection d'objets, etc. C'est peut-être un moyen de rêver de "nature", mais est-ce vraiment le moyen de s'impliquer? Ce n'est certainement pas un moyen d'accroche pour les jeunes enfants, dont les mécanismes d'appropriation passent par une découverte active.

Aussi il est permis de se poser la question : peut-on confiner l'étude de l'environnement dans une exposition, hors du milieu naturel ? N'est-ce pas contraire à la démarche environnementaliste? L'éducationàl'environnement commence par permettreàl'enfant de connaître l'environnement. Il est nécessaire de commencer par analyser un milieu pour agir sur son environnement. Alors est-il possible de jouer la complémentarité ?

Lepremier aspect de l'approche muséologique de cette question consiste à envisager la mise en exposition comme une transposition du savoir scientifique en élément d'exposition, le visiteur devant

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pratiquer la démarche en sens inverse. Pour ce faireilne dispose que de ces pratiques de référence;il est donc nécessaire que le concepteur les connaissent.

2. TENIR COMPTE DES PRATIQUES DE REFERENCE DES ENFANTS

Une enquête (questionnaire et interview) sur une centaine d'enfants (8 à 12 ans) de milieu urbain (parisien) nous pennet d'approcher leurs conceptions de l'environnement et de la nature :

Elle révèle quelamoitié d'entre eux (49%)ne savent pas définir ce qu'est l'environnement, 28%le comprennent au premier niveau comme "ce qui nous entoure" (la ville, nos amis, nos voisins), les autres (23%)l'assimilent soit à nature, soit à pollution, soit à nature+ville. Il ne s'agit pas que d'une question de vocabulaire.

Nous avons complété notre enquête par la question, "qu'est-ce que c'est la nature1". Pour 40%d'entre eux la nature est synonyme de "fleurs", d'arbres, de plantes et, seulement pour 28 %, d'animaux. Mais pour 30%des enfants "la nature c'est la liberté et la beauté"! Ils disent "y-a du soleil, c'est agréable,... y-a pas de fumées, pas d'auto ... ", et l'un d'entre eux n'hésite pas à écrire "c'est la meilleure chose du monde, dont personne ne peut se passer."

Cette prise de conscience se confinne lorsqu'on leur demande pourquoi la protéger: ils répondent alors "pour qu'elle reste belle" (28 %), pour les animaux (20 %), et pour quelques uns pour garder les forêts, pour lutter contre la pollution, contre le béton, mais aussi pour empêcher les animaux de se manger entre eux. Au delà de cette sensibilité à la beauté du vivant, sans doute accentuée par les références publicitaires, il ne leur reste pas beaucoup de clefs pour imaginer comment protéger la nature. Pour 40%d'entre euxils'agit seulement de ne pas y jeter de déchets ; pour 32 % il convient de protéger les animaux en ne chassant pas ou "en leur donnant à manger afin qu'ils ne se mangent pas entre eux 1" Pour 28%il faut ne pas polluer en ne déversant pas d'eaux sales, en ne fabriquant pas de toxiques, mais aussi "en ne piétinant pas les fleurs", en "ne cassant pas les branches", ... ou en "ne faisant plus de villes 1" Enfin pour 24%des enfants la protection se résumeàne pas jeter de cigarettes dans la nature pour ne pas y mettre le feu. Enfin un enfant propose même de "l'entourer d'un grillage"!On constate donc une forte influence de la publicité et des médias sur les pratiques de référence des enfants, avec leur cortège d'idées fausses, mais surtout on découvre un gouffre entre l'enfant et le concept d'environnement.

L'enfant n'a aucune des bases nécessaires pour comprendre les questions d'environnement. Il lui manque les bases fondamentales de compréhension. A notre avis, il convient donc d'abord de lui faire comprendre les processus fondamentaux de la nature.

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3. UNE MUSEOGRAPHIE ADAPTEE AUX ENFANTS, POUR UNE PREMIERE APPROCHE DE L'ENVIRONNEMENT NATUREL

Dans la future "cité des enfants" nous avons choisi un exemple simple pour une sensibilisationàla diversité du vivant et aux inter-relations entre les êtres vivants dans un milieu ; l'exemple d'un milieu, l'étang.

Notre expérience de l'lnventorium, nous prouve que pour commencer par émerveiller au vivant.ilfaut du vivant. Par exemple une évaluation nous a montré que la présentation d'une vraie fourmilière à la place d'un film documentaire multipliait par 6 questionnement des enfants et ne diminuait pas de façon notable leur taux de découvertes, bien au contraire elle les incitaitàune recherche de réponse dans les éléments d'exposition associés: à partir d'un "modèle vivant", découverte de la répartition des êtres vivants, analyse des relations à l'intérieur de ce système, compréhension de certains des mécanismes fondamentaux, voire proposition d'idées d'action. Donc, au delà des objectifs traditionnels de sensibilisation, ce sont ces différents niveaux de lecture et d'appropriation de l'exposition que nous cherchonsà atteindre.

Cet exemple de l'étang peut paraître bien banal, mais pour comprendre son intérêt pour les petits citadins,ilconvient de se souvenir que pour la moitié d'entre eux il n'y vit que des poissons, seulement pour 28 % des plantes (roseaux ou nénuphars), pour 20 % des grenouilles et seulement pour 2%des libellules, des canards ou des algues. Quant aux relations à l'intérieur de ce système, 71% des enfants n'en ont pas la moindre idée, pour 17%c'est "l'amour" et seulement 12% les relations alimentaires. Dans ces conditions les problèmes d'environnement dans ce milieu se résument aux déchets (28%),à la pollution (32%),sans bien cerner de quoi il peut s'agir.

Au delà du choix de ce milieu, qui ne se veut pas exemplaire, bien qu'il nous ait semblé intéressant vu le contexte de notre exposition, nous souhaitons surtout apporter un témoignage sur le développement de certains outils adaptés à la problématique du vivant et de l'environnement, ainsi qu'aux pratiques muséographiques, testées avec les enfants.

4. DES OUTILS MUSEOGRAPHIQUES ADAPTES AUX ENFANTS DANS UN ESPACE INTER-ACTIF

Si l'approche du vivant passe par l'attrait de la vie, elle se développe au travers de l'observation. Il s'agit d'abord d'inciteràobserver : pour cela, nous avons développé un outil, 1'" avis de recherche". Il s'agit d'un dessin attractif pour attiser la curiosité et induire l'observation;ilest accompagné du nom de l'animal (ce qui répond à la question première des enfants) et d'une courte question induisant une réflexion sur une fonction ou une relation afin de susciter une observation plus attentive et des questions ultérieures. Mais l'originalité de cet avis de

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recherche n'est pas dans son contenu, mais dans son mode d'accès : une boite à ouvrir. Cet artifice multiplie par 5 son taux de lecture.

Nous sommes aussi passé par l'ordinateur, dont l'attrait pour les enfants n'est plus à démontrer. Ainsiunlogiciel de découverte : le portrait robot des animaux de l'étang, permet aux enfants d'établir des relations morphologiques et de découvrir la diversité des formes de vie dans ce milieu.

Les enfants peuvent ensuite rechercher des réponses aux questions qu'ils se posent en consultant un audiovisuel inter-actif, "la vie dans l'étang", où ils choisissent un animal, puis un comportement (manger, respirer, se déplacer, se reproduire), et peuvent analyser les comportements et les relations entre les êtres vivants en utilisant les spécificités du média (ralenti ou accéléré, macrocinématographie).

Cette démarche d'analyse et de mise en relation, fondement de toute approche des questions d'environnement, peut bien entendu être renforcée par des documents d'autonomisation de visite destinés aux enfants venant dans le cadre d'un projet éducatif personnel ou scolaire.

L'ensemble des ces expériences menées à l'Inventorium de "la Villette", nous amène dans notre projet actuel qui ouvrira ces portes début 1992, à développer une démarche plus ambitieuse.

5. COMMENT DEVELOPPER UN PROJET, UN EXEMPLE DANS LA FUTURE CITE DES ENFANTS DE LA CITE DES SCIENCES ET DE L'INDUSTRIE

Dans le cadre de notre projet de cité des enfants, nous avons choisi de faire découvrir aux enfants à la fois leur environnement proche, immédiatement sensible, à partir d'un îlot d'exposition sur "rencontrer les autres" où ils pourront confronter leurs façons de vivre au quotidien, le rôle de l'environnement communicationnel dans les rapports entre les individus, avec un thème sur les "questions de communication", la découverte des systèmes techniques qu'ils rencontrent dans leur vie quotidienne, comme ceux dont dépendent les systèmes de production, dans "questions de machines", sans oublier une approche de l'environnement naturel, dans les "questions de vivant".

Une prise de conscience de l'environnement suscite une prise de conscience de la citoyenneté. Un moyen d'exercer sa citoyenneté peut consisteràoffrir aux enfants la possibilité de l'exprimer. Dans le cadre de la "cité des enfants", nous allons proposer aux enfants de concevoir et de réaliser leur propre télévision, dans le cadre d'ateliers à partir d'une salle de presse pour les enfants, gérée par un comité de rédaction d'enfants qui aura la charge de la conception et de la réalisation d'un magazine télévisé diffusé en interne dans la cité et peut être en partie par une chaîne de télévision : "Télé-cité".

Au travers d'une rencontre avec l'environnement : "Autour de l'étang", privilégiée par une scénographie-"phare", nous allons rassembler des éléments d'exposition complémentaires pour analyser et comprendre le système. Au delà de cette approche d'un système destinée à faire découvrir

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les bases et les relations d'équilibre d'un milieu, cet ensemble sera complété par une ouverture sur les problèmes d'environnement.

Notre approche de la mise en condition par un logiciel de jeu repose sur l'expérience de l'exploitation depuis 1983 d'un jeu sur minitel, "je suis un renard". Il s'agit d'une simulation où l'enfant "se met dans la peau d'un animal" et découvre au travers de son aventure dans la campagne ses relations avec le milieu et les autres êtres vivantsycompris l'homme.

Nous pensons aller plus loin en proposant une véritable "étude d'impact" sous la forme d'un nouveau logiciel. L'enfant choisit un milieu, yintroduit un animal (pour le niveau de jeu le plus facile), ou une activité humaine: pêche, usine, tourisme, agriculture, ... (pour le niveau le plus difficile). Comme dans une étude d'impact,ildécouvre, au travers d'une simulation accélérée, les résultats de son action et les déséquilibres provoqués. TI peut avoir recoursàdifférents avis (expert scientifique, économiste, etc ... ) pour choisir une solution afin de retrouver un nouvel équilibre écologique... Ainsi nous souhaitons faire comprendreà l'enfant la complexité des systèmes et les enjeux.

Enfin grâceàun bloc ressource à consulter assis, les enfants et les adultes qui les accompagnent pourront s'informer, et même participeràune enquête sur minitel sur une question d'environnement d'actualité où nous solliciterons leur avis.

Alors rendez-vous en 1992 pour connaître avec nous les résultats de ce second volet de cette démarche muséologique en direction des enfants.

BIBLIOGRAPHIE

GUICHARD (J.), 1989 - Démarche pédagogique, et autonomie de l'enfant dans une exposition scientifique, Aster n09, INRP, Paris.

GUICHARD (J.), ZANA (B.), 1989. Des aides pour la visite d'expositionsàcaractère scientifique et technique, Actes des 110l.E.S. ,Chamonix.

GUICHARD (J.), 1990 - Diagnostic didactique pour la conception d'objets d'exposition, Thèse de Doctorat, Genève.

Références

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