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GRANDE BRETAGN E
HuNT, R . W ., The History of Grammar in the Middle Ages. Collected Papers, ed . G . L . Bursill-Hall, Amsterdam, 1980, XXXVI-214 pages (# Amsterdam Studies in the Theorie and History of Linguisti c Science », Serie III, Volume 5).
Ce volume rassemble un certain nombre d'études consacrées pa r R . W . Hunt à divers aspects du développement de la grammaire latine, du XI' au XIV' siècle . Il s'agit non de textes inédits, mais de l a réunion d'articles dispersés dans des publications déjà anciennes pou r la plupart ; leur consultation est ainsi rendue beaucoup plus aisée , d'autant que l'éditeur, G . L . Bursill-Hall, a complété cette réimpres-sion d'une intéressante introduction, d'une bibliographie et de troi s index .
Les trois premières études (Studies on Priscian in the eleventh an d twelfth centuries I et II ; Absoluta, the Summa ofPetrus Hispanus on Priscian Minor) portent sur les gloses et commentaires consacrés, au x XI' et XII` siècles, à l'ouvrage le plus volumineux de Priscien, le s Institutiones grammaticae . L ' intérêt marqué à l'égard de ce grammai-rien de l'antiquité tardive n'est certes pas nouveau : après le succès d e Donat, prépondérant durant les premières décennies de la réform e carolingienne, celui de Priscien s'est affirmé vers la fin du IX' et a u cours du Xe siècles . Toutefois, les divers textes ici analysés par R . W . Hunt (Glosule et Note Dunelmenses anonymes, Summa supe r Priscianum de Pierre Helias, gloses liées à l'enseignement de Raoul d e Cambrai, Absoluta de Petrus Hispanus) nous paraissent illustrer u n renouvellement de la tradition grammaticale, qui caractérise l e XII' siècle, après s'être élaboré au cours du siècle précédent. U n premier signe de cette évolution est perceptible dans le choix mêm e du texte à commenter : les Institutiones grammaticae, manuel fort détaillé et fort long, étaient, à la fin du Xe siècle encore, délaissées a u profit d'ouvrages de taille beaucoup plus restreinte — et en cela plu s proches de ceux de Donat — : l'Institutio de nomine, pronomine et verbo et les Partitiones duodecim versuum Aeneidos, que l'on rencontr e dans de très nombreux manuscrits et catalogues de bibliothèques de s IX' et Xe siècles . Le renouvellement est non moins évident dans le s transformations que connaît la théorie grammaticale : s'y sont en effet
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peu à peu introduits les modèles de réflexion élaborés par la dialec-tique . Cette discipline, tout à fait balbutiante à l'époque carolingienn e et encore à la fin du X e siècle, ne trouva réellement sa place, dan s l'outillage intellectuel des clercs, qu'au siècle suivant ; ainsi, les prédé-cesseurs de Pierre Helias ont fourni à ce grammairien les élément s d'une systématisation de l' analyse linguistique fondée sur les bases offertes par le développement considérable de la logica : sa Summ a super Priscianum illustre bien le passage d'une grammaire analytique à une grammaire spéculative . Enfin, l'intérêt pour la syntaxe nou s semble être également un élément nouveau qui mérite d'être noté . Au cours de la période antérieure, seules l'orthographe, la morphologie e t la métrique avaient fait l'objet d'une étude systématique, donnant lie u à la rédaction de commentaires et de manuels ; du reste, seules auss i les Institutiones grammaticae de Priscien, parmi les manuels anciens, faisaient une place à l'étude syntaxique . A partir du XII` siècle, l'enri-chissement et l'élargissement du champ de la grammatica conduisen t les auteurs à s'intéresser tout spécialement aux deux livres (XVII e t XVIII) des Institutiones de Priscien précisément consacrés à la syntax e et désormais considérés comme un ensemble particulier sous le titre d e Priscianus minor : de ce renouvellement des objets et des méthode s témoignent l'enseignement de Raoul de Beauvais et la Summa d e
Pierre l'Espagnol (Petrus Hispanus) .
Le quatrième article de R . W . Hunt ici repris, The Introductions t o the `Actes ' in the twelfth Century, analyse les modèles suivis pa r différents auteurs (Thierry de Chartres, Pierre Hélias, Guillaume d e Conches, auteurs anonymes) pour introduire à l'étude de textes divers , relevant d'elles diverses elles aussi (grammaire, rhétorique, logique o u astronomie) . L'unité des artes ressort clairement de cette comparaison , puisque, malgré des distinctions de détail, ces accessus suivent u n modèle relativement univoque, issu du développement du savoir dialectique et appliqué en définitive non seulement aux disciplines pro -fanes, mais également à la réflexion théologique . Cette unité n'est d u reste pas chose nouvelle : à l'époque précédente, elle s'était faite a u profit de la grammatica, qui occupait alors la position prédominant e réservée à la logicaau XII` siècle .
La cinquième étude (Hugutio and Petrus Helias) montre briève-ment et à partir de quelques exemples précis que Pierre Hélias doi t être compté parmi les auteurs dont Hugutio s'est inspiré pour se s Derivationes magnae.
Les deux derniers textes sont plus particulièrement consacrés à l a grammaire « anglaise », qu'il s'agisse du bénédictin du XII e siècle, Osbern de Gloucester, auteur d'un Liber derivationum, ou des maîtres
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grammairiens d'Oxford et de leur production à la fin du XIII e et a u XI V' siècles .
Ces quelques remarques ne peuvent donner qu'une idée approxi-mative de la qualité et de la richesse de l'érudition déployée dans c e volume sur un sujet, l'analyse de la grammaire médiévale, auquel font encore trop souvent défaut les éditions de textes et les publication s d'études .
Paris