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Peuples et Nations des Balkans Ancel J. (1930, rééd. 1992). Peuples et nations des Balkans. Géographie politique. Paris CTHS

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Espace géographique

Peuples et Nations des Balkans

Ancel J. (1930, rééd. 1992). Peuples et nations des Balkans. Géographie

politique. Paris : CTHS

Violette Rey

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Rey Violette. Peuples et Nations des Balkans. In: Espace géographique, tome 22, n°1, 1993. pp. 95-96;

https://www.persee.fr/doc/spgeo_0046-2497_1993_num_22_1_3149

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La présentation insiste beaucoup sur une «nouveauté» de l'ouvrage: il serait fait par des géographes qui, enfin, s'intéressent aux pouvoirs. Voilà qui est sympathique. À ceci près:

a) que «les» géographes n'ont pas vraiment attendu ce colloque pour s'intéresser aux pouvoirs; b) qu'un bon tiers des participants ne sont pas géographes — ce ne furent d'ailleurs pas nécessairement les mieux inspirés; c) qu'il y a bien des façons de s'intéresser aux pouvoirs.

L'une consiste à les flatter à la langue de bois. Il en est plusieurs essences. La première est râpeuse, comme celle de M. Grigorov, directeur du Plan bulgare, proclamant que «les pouvoirs locaux... reçoivent la pleine liberté et l'autonomie de décider de leur propre avenir» (p. 30). À cet égard, les deux textes sur l'Allemagne de l'Est sont une caricature; on n'aura certes pas la cruauté d'évoquer la fin de 1989 pour juger d'auteurs s'exprimant deux ans avant; mais enfin: «Les résultats s'avèrent positifs et les disparités s'estompent peu à peu (p. 98)... La RDA est un pays socialiste (sic) ayant une économie hautement développée et un niveau de vie croissant... elle a atteint ce niveau en un temps relativement court. Les progrès. . . ne sont pas seulement généraux, mais sont aussi décelables dans toutes les régions (p. 99)... plus de trente années de politique de planification ont permis de libérer la structure territoriale de la RDA des contradictions fondamentales entre les régions. Les différences qui subsistent encore n'agissent pas comme une entrave à la croissance économique et

n'influencent pas négativement le niveau de vie» (p. 106) (Oelke et Reiner, de l'Université de Halle); «le centralisme démocratique... n'est nullement en contradiction avec la volonté... du parti et ■du gouvernement de faire participer aux affaires

politico-administratives un maximum de citoyens, partout dans le pays... (les pouvoirs locaux encouragent) la compétition "plus belles nos villes et nos communes: participe!", à laquelle la

participation permettra aux habitants de façonner une image toujours plus agréable de leur lieu de résidence» (R. Sevrin, des

Facultés Catholiques de Lille) — avouons que cela a bonne mine. La seconde, moins claquante mais tout à fait plate, illustrée

entre autres par B. Barbier, est celle du géographe itinérant qui gobe sans complexe tout ce que son hôte lui propose, même (surtout?) s'il est plutôt conservateur, en échange de nouvelles invitations: et de vous débiter des tranches de lois, sans jamais se demander comment elles sont appliquées et ce qu'en pensent les plus intéressés. Cette apparatchique myopie nous éclaire peu, sauf sur la communauté transfrontalière des nomenclatures universitaires de petit rang.

Une troisième sert à jongler avec le charabia sténomarxiste pour nous faire prendre le «localisme» (à l'échelon communal!)

comme produit incontournable d'un pouvoir de classe qui ne parvient pas à être pour-soi, si vous voyez ce que je veux dire: Diafoirus est toujours là, mais il jargonne en marxo-croate. À côté de cela, il est en ce recueil des textes fort honnêtes, informés, cherchant à approfondir la question du contenu réel des pouvoirs consentis aux collectivités locales au milieu des années 1980. Ils nous aident à prendre la mesure de ce qui restera à faire, de toutes façons, aux nouveaux pouvoirs: tout, ou presque; et mieux encore, puisqu'il leur faut gérer maintenant les oppositions locales et les particularismes libérés, voire exacerbés, par la glasnost puis les changements de pouvoirs. Les textes sur l'URSS et la Hongrie se signalent par leur

pondération, quelque profondeur, leur souci de prudents équilibres; coïncidence? à la date du colloque, c'étaient les deux seuls pays de la perestroïka... L'un des diagnostics les mieux distan- ciés, et les plus sévères, est celui que porte Marie-Claude Mau- rel au terme d'un bon article sur les campagnes polonaises: «s'il y a un pouvoir local, il n'apparaît en rien comme l'émanation de la base, la représentation des intérêts d'une

collectivité territoriale, mais comme le monopole d'une élite dirigeante, soumise aux pressions d'en haut, et tenue d'intégrer des rationalités qui subordonnent cet échelon local à des priorités macroéconomiques» (p. 86). Cela, et le reste, justifient le mal que se sont donné les deux organisateurs de l'ouvrage. Roger Brunet, CNRS, GIP RECLUS, Montpellier Peuples et Nations des Balkans

Opportune réédition d'un ouvrage majeur (1), pour qui veut approfondir la question balkanique, en mieux connaître les structures profondes. Sa lecture permet aussi de mesurer les filtres de perception qu'un auteur introduit implicitement dans son texte, en fonction de sa sensibilité et de son époque. Inutile de chercher ici une délimitation des «Balkans»; pour l'auteur, il s'agit d'un «entre-deux», de la croisée des chemins maritimes et terrestres qui vont d'Europe en Asie, incluant la Roumanie, et où la «pénétration européenne» depuis le xixe

siècle s'en dispute les carrefours.

La démarche et la problématique, que pratique l'enseignant à l'Institut des hautes études internationales, séduisent par l'ac-

(1) Ancel J. (1930, rééd. 1992). Peuples et nations des Balkans. Géographie politique. Paris: Comité des Travaux historiques et scientifiques, 220 p., 3 fig. (La nouvelle édition est précédée d'une préface de P. George).

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tualité de l'attitude géographique. Conscient d'une nécessaire pluridisciplinarité pour aborder la très complexe question d'Orient, il n'en fait ni l'histoire ni la sociologie; mais il y

participe par sa contribution à titre de géographe, en analysant les objets spatiaux construits par les sociétés politiques et sur lesquels ces sociétés doivent édifier leurs territoires.

Très au fait de la diversité des genres de vie dans leurs liaisons avec les milieux géographiques locaux, J. Ancel en dresse un tableau synthétique passionnant. La description

volontairement qualitative, littéraire, impressionniste, est continuement sous-tendue par une connaissance précise des faits; l'usage des noms vernaculaires, dont l'excès est parfois reproché aux spécialistes, facilite la compréhension de ce qui constitue la

structure de l'aire culturelle, articulant les éléments singuliers au fait général. Néanmoins, «pour déterminer les consciences nationales, il est évident que le milieu géographique (et les genres de vie associés) ne suffit point» (p. 136).

Le propos de J. Ancel — identifier les assises géographiques de ce qui devient la structure territoriale des jeunes États balkaniques — s'appuie sur une expérience personnelle de la péninsule qui l'a laissé face à deux questions essentielles. «Où trouver les causes de la formation des États modernes (considérés comme la forme politique des Nations)? [...] Comment peut naître la Nation (cette grande solidarité de longue durée)?» (p. 107). D'où son choix de traiter prioritairement des «mises en situation» et des «liaisons géographiques», par les routes et par les carrefours, avant d'aborder les «associations humaines» et la construction territoriale.

À la recherche des forces de cohésion qui fondent les Nations actuelles, J. Ancel démolit l'argument de la race — sans contenu, vu la permanence ici des brassages ethniques, l'argument de la langue — tissant des liens trop vastes et

ténus pour créer un État, l'argument de la religion — composante secondaire, dans la mesure où les églises autocé- phales suivent la constitution des États plus qu'ils ne la précèdent. Preuves à l'appui, la manipulation statistique et cartographique est dénoncée, avec sa volonté de mettre de fausses limites précises à ce qui n'en a pas. En bref, les forces de cohésion restent faibles dans ces communautés éparses, à genre de vie distincts et juxtaposés, et en général beaucoup moins fixées et enracinées qu'on ne le croit. En d'autres termes, la répétition sur de courtes distances du même éventail des genres de vie, l'unité «civilisationnelle», ne crée pas l'intégration.

Avec sa conclusion sur la «démocratie rurale balkanique», l'ouvrage exprime une confiance dans le paysan qui, partout, s'implante en roi, et dans les peuples devenus des nations politiquement majeures. L'espérance de cette conclusion se démarque des incertitudes qu'exprimait à la même date de Martonne sur le futur de l'Europe centrale. Dans quelle mesure une conviction trop étroitement attachée au modèle de l'État-nation à la française a-t-elle été l'inspiratrice de l'optimisme de J. Ancel, alors que ce modèle nécessite très longue durée d'incubation et s'avère principe de guerre à la fin du xxe siècle? «L'anti-autrichianisme» de la culture politique française de l'époque, qui transparaît dans l'analyse de la

«pénétration européenne» dans les Balkans influence également l'interprétation qu'il propose sur les Balkans mais en stimule aussi la réflexion.

Ouvrage à relire et à méditer en ces heures, douloureuses pour tous les peuples des Balkans, qui dès la fin 1989, aspiraient à «rentrer en Europe».

Violette Rey, École normale supérieure de Fontenay-Saint- Cloud, Équipe PA.R.I.S.

Doin / Reclus, 1993 Le Directeur de la publication: Thierry Verret

Tous droits de traduction, d'adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays Doin, éditeurs Paris Dépôt légal: 1993 n° d'ordre 1203 1er trimestre 1993

Composition et mise en pages: GIP RECLUS, Maison de la Géographie, Montpellier Reproduction photomécanique: IMPRIMERIE MAISONNEUVE,

BP 39, 57162 MOULINS -LÈS -METZ Cedex, Tél. 87 34 65 43 Printed in France. Commission paritaire n° 52227 © L'Espace géographique, 1993, n° 1

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