• Aucun résultat trouvé

L'impact du sens donné à la vie sur le rétablissement de quatre femmes victimes de viol

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "L'impact du sens donné à la vie sur le rétablissement de quatre femmes victimes de viol"

Copied!
105
0
0

Texte intégral

(1)

ln compliar)ce with the

Canadian Privacy Legislation

sorne supporting forms

may have been removed from

this dissertation.

hile these rms

may

be includ

in the document page cou nt,

their removal does not represent

(2)
(3)

DÉPARTEMENT DE TRAVAIL SOCIAL UNIVERSITÉ Mc GILL DE MONTRÉAL

L'IMPACT DU SENS DONNÉ À LA VIE

SUR LE RÉTABLISSEMENT QUATRE FEMMES VICTIMES VIOL

THÈSE PRÉSENTÉE

COMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN TRAVAIL SOCIAL

PAR

CHANTAL BARBANT

OCTOBRE 2002

(4)

1+1

National Library of Canada Bibliothèque nationale du Canada Acquisitions and Bibliographie Services Acquisisitons et services bibliographiques 395 Wellington Street Ottawa ON K1A ON4 Canada

395, rue Wellington Ottawa ON K1A ON4 Canada

The author has granted a non-exclusive licence allowing the National Library of Canada to reproduce, loan, distribute or sell copies of this thesis in microform, paper or electronic formats.

The author retains ownership of the copyright in this thesis. Neither the thesis nor substantial extracts from it may be printed or otherwise

reproduced without the author's permission.

Canada

Your file Votre référence ISBN: 0-612-88086-9 Our file Notre référence ISBN: 0-612-88086-9

L'auteur a accordé une licence non exclusive permettant à la

Bibliothèque nationale du Canada de reproduire, prêter, distribuer ou

vendre des copies de cette thèse sous la forme de microfiche/film, de

reproduction sur papier ou sur format électronique.

L'auteur conserve la propriété du droit d'auteur qui protège cette thèse. Ni la thèse ni des extraits substantiels de celle-ci ne doivent être imprimés ou aturement reproduits sans son autorisation.

(5)

REMERCIEMENTS

Un merci spécial à notre superviseure, Samantha Wehbi, pour sa disponibilité, ses conseils judicieux, ses encouragements et son enthousiasme communicatif. Merci aussi à l'I.YA.C. de nous avoir autorisées à mener notre recherche auprès de leur clientèle et merci surtout aax participantes car sans elles cette recherche n'aurait pu se concrétiser. Enfin merci aux êtres qui nous sont chers et qui donnent du sens à notre

(6)

RÉSUMÉ ... ... ... ... 1 INTRODUCTION... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... . 2 CHAPITRE 1

ÉTAT DES CONNAISSANCES ... 7 1.1 La violence sexuelle faite aux femmes au Canada. .. ... ... . .. . . 7 1.2 L'impact du viol... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... 9 1.3 Le rétablissement ... ... ... .. . .. . ... ... . . .. .. . . .. ... ... . . . .. . . .. ... .. 15 lA Le sens donné au traumatisme... ... ... ... ... . .. ... ... ... .. . ... ... . .. .. 16 1.5 Le sens donné à la vie... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... 18 CHAPITREH

LE CADRE THÉORIQUE ... 21 2.1 viol ... , ... 21 2 2 . r Les myt es, es prejuges et es croyances ... .. h l ' . , 1 24

2.3 L'impact du viol... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... 26 2.4 Le rétablissement ... '" ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .... . 27 2.5 Le sens donné à la vie... ... ... 29 CHAPITRE III LA MÉTHODOLOGIE ... , ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. 33 3.1 3.2 3.3 3.4 L'échantillonnage ... .. La collecte des données ... . L'analyse des données ... ..

L es conSl em iOns e ques ... , ... .. 'd' t' 'thi CHAPITRE IV

LES RÉCITS ET LES ÉLÉMENTS QUI DONNENT DU SENS À

36 37 39 43

LA VIE... ... 44 4.1 Les récits des participantes... ... ... ... ... ... ... ... ... ... 44 4.2 Les éléments qui donnent du sens à leurs vies ... ... 60

CHAPITRE V

LES RÉSULTATS DE L'ANALySE ... 66 5.1 Le viol et la vision féministe ... 67 5.2 L'impact du viol sur les participantes... ... ... ... ... ... ... ... ... .... 68

(7)

5.2 L'impact du viol sur les participantes... ... ... ... ... ... ... ... ... .... 68

5.3 Le processus de rétablissement ... 70

5.4 Le sens donné au traumatisme ... , ... , .. . . . .. 74

5.5 Ce qui est essentiel dans la vie... ... ... ... ... ... ... ... .... 75

5.6 Les éléments qui donnent du sens donné à la vie... ... ... 76

5.7 Les rôles sociaux concernés ... ... ... ... ... ... ... ... ... 83

CONCLUSION ... '" ... " ... ... ... ... ... 86

APPENDICE A LETTRE D'INVITATION AUX PARTICIPANTES POTENTIELLES 92 APPENDICEB FORM'ùLAIRE DE CONSENTEMENT... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .. 94

APPENDICEC SCHÉMA D'ENTREVUE... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... ... .... 95

(8)

RÉSUMÉ

Nous avons mené une recherche phénoménologique auprès de quatre femmes victimes de viol afin de découvrir l'impact des éléments qui donnent du sens à leur vie, sur leur rétablissement. Les résultats de notre recherche montrent que dans l'ensemble les éléments du sens donné à la vie ont été bénéfiques au

rétablissement des femmes. Les éléments identifiés sont l'importance de leurs enfants, la philosophie de vie, les buts à atteindre, les relations interpersonnelles significatives, l'autonomie financière et aider autrui. Ces divers éléments avaient été identifiés dans deux recherches précédentes. Cependant, deux nouveaux éléments sont apparus dans notre recherche, soit l'amour de leur travail et le développement des capacités d'analyse. Notre cadre théorique fait appel au travail social, à la sociologie, à la psychologie, à la psychiatrie et à la philosophie. Nous avons une vision féministe.

We have conducted a phenomenological research with four women victims of rape in order to discover the impact of the elements which give meaning to their lives, on their recovery. The results of our research demonstrate that overall the elements of the meaning oflife have been beneficial for women's

recovery. The elements that were identified are the importance of children, the philosophy of life, the goals to achieve, the significant relationships, the tlnancial autonomy and helping others. Those e1ements have been identitled in two previous researches. However two new eIements appeared which are the attachment to their job and the development oftheir skills analysis. Our theoretical framework appeals to social work, sociology, psychology, psychiatry and philosophy. Our vision is

(9)

INTRODUCTION

Dans notre pratique de travailleuse sociale, nous touchons à plusieurs domaines du travail social, que ce soit la psychothérapie, la médiation ou l'adoption. En psychothérapie, nous intervenons principalement auprès d'une clientèle victime d'actes criminels (1). Cette clientèle est particulièrement ébranlée par le drame qu'elle a vécu puisque celui-ci, par son intensité et sa gravité, risque de bouleverser entièrement sa vie (Fortin, 1996, Rousseau, 1997, Côté, 1996, Janoff-Bulman, 1992). C'est un domaine qui nous passionne car nous y avons le privilège d'être régulièrement, pour ne pas dire quotidiennement, témoins de transformations intérieures profondes, teHes une meilleure estime de soi, un changement de perception du drame vécu qui s'avère libérateur, un nouveau sens à la vie, pour ne nommer que ceux-ci. Ces transformations intérieures permettent à la personne de mieux dépasser le traumatisme et d'ainsi se rétablir. Plusieurs auteurs, dont Janoff-Bulman et

Cyrulnik (1999) ont souligné combien les ressources personnelles sont importantes et bien que celles-ci aient été souvent étouffées par le drame vécu, elles ne demandent qu'à être sollicitées.

Les victimes de violence sont fort nombreuses. Tous les jours des actes de violence sont perpétrés et ce, à travers le monde entier. Bien que nos civilisations évoluent et que de nouvelles politiques sont implantées pour réduire la violence, c'est un processus tellement lent qu'il est tristement réaliste d'affirmer qu'il

1. Les victimes d'actes criminels sont des personnes qui ont subi des délits tels que stipulés dans les articles du Code criminel.

(10)

y aura encore pendant des décennies voire plutôt des siècles, des victimes de violence. C'est un problème à la fois, d'actualité et d'avenir sur lequel il faut agir et qui nous tient à cœur.

Dans notre pratique, que ce soit par des références de l'organisme d'Indemnisation aux victimes d'actes criminels (I.V.A.C.) (1) ou par d'autres sources, nous intervenons auprès d'une clientèle qui est majoritairement féminine et qui pour la plupart a été agressée sexuellement. Selon le rapport annuel de ITV.A.C. de 1999,54% des 2236 demandes d'aide acceptées, sont faites par des femmes. De ce chiffre, 34% des femmes ont été victimes d'agressions à caractère sexuel, et c'est là le principal crime commis envers les femmes. Souhgnons aussi que les agressions sexuelles envers les femmes sont très nombreuses et sont répandues à

travers le monde entier. Car ainsi que le dit Bunch (1997) :

La violence qui frappe les femmes et les jeunes fines est à l'heure actuelle la violation la plus répandue des droits humains fondamentaux. Tantôt flagrante, tantôt subtile ( ... ) eHe est si profondément enracinée dans les cultures du monde entier qu'eHe est presque invisible. (Bunch ,1997, p. 41)

Nous avons donc choisi d'étudier cette population et la problématique des agressions sexuelles, plus particulièrement cene du viol afin que les résultats de notre recherche soient utiles à un grand nombre de personnes. Le Conseil du statut de la femme (C.S.F.) (1995) précise que l'acceptation usuelle de l'expression

1. IVAC : Cet organisme a été créé suite à l'application, le 1er mars 1972, de la loi sur

l'indemnisation des victimes d'actes criminels par laquelle l'État québécois s'est responsabilisé face aux problèmes sociaux causés par la criminalité. Depuis la mise en vigueur de cette loi, les personnes victimes de violence ayant subi une lésion corporelle, un choc mental ou nerveux suite à un acte criminel peuvent bénéficier des avantages prévus à cette loi. L'lV.AC relève de la Commission sur la santé et la sécurité au travail (CS.S.T.) (Rapport annuel de nV.AC, 1999)

(11)

«

agression sexuelle» est « le fait de contraindre, de faire subir et d'imposer à une personne des exigences, des pratiques et des conduites d'ordre sexuel contre son gré » (CS.F., 1995, p. 12) Le viol est une agression sexuelle où il y a eu pénétration.

Les interventions en travail social, et plus particulièrement en psychothérapie, visent à aider la clientèle à se rétablir, c'est à dire à améliorer ou à

restaurer son fonctionnement social. C'est le but principal de nos interventions et il est important de se rappeler que c'est la clientèle qui peut nous dire si son rétablissement la satisfait et est complété. Dans le cadre de nos interventions, nous précisons à la clientèle qu'eUe ne peut s'attendre à retrouver son état antérieur avant le traumatisme puisque celui-ci l'aura changée profondément. Cependant, elle peut retrouver un bon fonctionnement à tous les niveaux et même dépasser parfois celui qu'elle avait précédemment.

Les bouleversements actuels de notre société poussent les personnes à redéfinir leurs croyances. Nous sommes particulièrement intéressées à

découvrir comment ces remises en question affectent les croyances des femmes victimes de viol, et plus précisément celles liées au sens qu'elles donnent à leur vie. Le sens donné à la vie nous interpelle car comme Frankl (1988) et Janoff-Bulmann (1992) l'ont démontré, il a un impact significatif sur le rétablissement des personnes traumatisées. Suite à son expérience dans un camp de concentration, le psychiatre Frank} a d'ameurs développé la logothérapie qui a pour base la raison de vivre des gens ou le sens donné à leur vie, et son impact sur leur rétablissement. Pour sa part, Janoff-Bulman précise que les personnes traumatisées peuvent tirer des leçons de vie et des apprentissages de cette épreuve.

n

ajoute en accord avec Schwartz (1996) que l'inévitable souffrance qu'engendre le drame vécu peut être transformée en une

(12)

souffrance qui a un sens et une signification, que ce soit un bienfait pour soi ou pour autrui. Janoff-Bulmann (1992) affirme également que le traumatisme contribue à

définir plus précisément le sens donné à la vie. Malgré ces constats importants pour

l'intervention, aucune recherche publiée n'a été faite afin de déterminer l'impact du

sens donné à la vie sur le rétablissement des femmes en général et en particuher sur

celui des femmes victimes de viol. Deux recherches, soit celles de Blais (1998) et de Morris (1994), ont identifié certains éléments du sens donné à la vie et qui se révèlent importants pour les femmes, mais sans en étudier l'impact sur leur rétablissement. Pourtant, les résultats de la présente recherche démontrent bien que les éléments qui

donnent du sens à la vie des femmes victimes de viol ont eu un impact important sur

leur rétablissement et c'est là l'argument central de notre thèse. Pour mener à bien notre recherche, notre questionnement est de: Déterminer pour des femmes victimes

de viol, quels sont les éléments qui donnent du sens à leur vie et l'impact de ceux-ci

sur leur rétablissement?

Dans le cadre de cette thèse, nous présentons dans un premier temps l'état des connaissances afin de préciser les études empiriques qui ont été faites sur le phénomène étudié, notamment la violence sexuelle faite aux femmes au Canada, l'impact du viol, le rétablissement, le sens donné au traumatisme du viol et le sens donné à la vie. Puis nous précisons le cadre théorique de la recherche qui présente comment les différents auteurs consultés expliquent notamment le viol, les mythes, les préjugés et les croyances qui y sont liés. Le cadre théorique apporte aussi des nuances sur l'impact du traumatisme par Silove (1999) et Cyrulnik (1999). Nous précisons de

(13)

vie, particulièrement selon Frankl (1988). Par la suite, les divers aspects méthodologiques propres à recherche sont identifiés, telle l'approche

phénoménologique et l'entrevue semi-dirigée. Suite à la méthodologie, se retrouvent les résultats de la recherche et l'analyse de ces résultats en lien avec la documentation consultée.

(14)

CHAPITRE!

ÉTAT DES CONNAISSANCES

L'état des connaissances présente la violence sexuelle faite aux femmes au Canada, puis l'impact du viol sur les femmes tel qu'identifié par Wiehe (1995), Koss (1987), Côté (1996) et Lebowitz et Roth (1994), ainsi que les facteurs aidant à leur rétablissement. Le travail social a contribué à l'avancement de ces connaissances, tout comme la psychologie et la sociologie. Enfin, nous présentons deux études qui ont cherché à identifier quel est le sens que les femmes donnent à leur vie même si ces femmes n'ont pas été violées puisqu'il n'existe rien à ce propos.

1.1 La violence sexuelle faite aux femmes au Canada

Une recherche menée par le Conseil du Statut de la Femme (1995) intitulée« La violencefaile auxfemmes à travers les agressions à caractère sexuel », cite une enquête menée en 1993 par Statistiques Canada, qui a tenté de cerner le portrait de réalité canadienne en la matière. Cette enquête est une des premières dans le genre (1). Selon les résultats obtenus, 66% des actes de violence subis par les femmes et considérés comme des infractions en vertu du Code Criminel, étaient des agressions sexuelles. La moitié des Canadiennes ont subi au moins un acte de violence physique ou sexuelle. De plus l'enquête précise que près de 60% des

l.L'enquête faite au téléphone auprès de 12.300 femmes âgées de 18 ans et plus a permis de recueillir des données sur les actes de violence physique et sexuelle que les femmes ont subies depuis l'âge de 16 ans.

(15)

femmes qui ont été agressées sexuellement, l'ont été plus d'une fois. Cependant, le tallx de signalement de ces cas n'est que de 6%. Selon le Rapport du groupe de travail sur les agressions à caractère sexuel publié en 1995, ]1 ya « une relation étroite entre le taux de dévoilement et le lien entre la victime et l'agresseur }) (Groupe de travail, 1995, p. 31) À ce sujet, l'enquête de Statistiques Canada de 1993 a révélé que 39% des femmes ont été agressées sexuellement par leurs conjoints. Ceci corrobore les propos de Bunch (1997) qui précise que la violence de leurs proches menace les femmes:

Pour des dizaines de millions de femmes, ]a maison est un lieu de terreur. Ce n'est pas la violence d'étmngers que les femmes ont le plus à craindre, c'est la brutalité quotidienne infligée par des parents, des amis et des compagnons. Les sévices domestiques constituent de loin la forme la plus universelle de violence contre les femmes (Bunch" 1997, p. 42)

n

existe peu d'informations sur le viol coHectif. Cependant le groupe de travail mentionné plus haut, cite un sondage réalisé par le comité

Badgleyen 1984 qui indique que sur l'ensemble des agressions, une fille sur onze, soit 9%, avaient été agressées par plus d'un homme. Au Québec, selon ce même groupe de travail, les chiffres recensés en 1993 par les C.AL.AC.S. (Centre d'aide local contre les agressions à caractère sexuel) indiquent que 10% des agressions qui leur sont rapportées, sont des viols collectifs. L'enquête de Statistiques Canada révèle que:

(16)

Le viol et les autres agressions à caractère sexuel sont des actes fréquents, contrairement à la conception traditionnelle qui veut que ces délits soient inusités compte tenu de leur gravité, de leur ignominie et surtout, de leur quasi-absence de signalement Sous cet éclairage, ces délits sont loin d'apparaître comme atypiques dans une société mais bien plutôt comme constitutifs des rapports sociaux. (C.S.F.,

1995 , p. 47)

Finalement, Wiehe (1995) spécifie que les victimes de viol se retrouvent dans toutes les classes sociales et parmi tous les groupes d'âge. Ce qui précède montre bien l'ampleur du viol, nous en présentons maintenant l'impact.

1.2 L'impact du viol

. Bien des recherches ont été menées sur l'impact du viol, ce qui permet d'en avoir un portrait assez complet Dans un premier temps, nous présentons ce que Wiehe (1995) a relevé à ce sujet, puis ce qui est dit de l'état de stress post-traumatique que vivent ces femmes, selon Côté (1996), Koss (1987) et Wiehe. Nous précisons également quel est l'impact d'un traumatisme sur les croyances de la personne selon Janoff-Bulman (1992), et plus particulièrement pour la femme qui a été violée selon Lebowitz et Roth (1994).

Wiehe (1995) a su regrouper les recherches de maints auteurs tels Kilpatrick, Herman, Koss, Janoff-Bulman, Gidyzc, Parrot, Burkhardt et Katz, qui ont étudié la problématique du viol et cite pour illustrer ses propos les témoignages de femmes qui ont été violées. Toutefois, Wiehe ne mentionne pas quels sont les statuts des auteurs cités. Ceux-ci se sont penchés sur le syndrome du traumatisme du viol, le développement du syndrome de stress post-traumatique suite au viol, les

(17)

justifie les mythes entourant le viol et l'impact du viol sur les croyances des femmes. Certains de ses auteurs ont comparé l'impact pour des femmes violées par un étranger et celles violées par quelqu'un qu'enes connaissent, d'autres auteurs ont étudié l'impact de viols multiples ou traumatismes antérieurs, et finalement certains

auteurs se sont penchés sur la gestion de la colère et l'impact sur les femmes de la violence utilisée lors d'un De ce fait son livre lntimate betrayal : Understanding

and responding to the trauma ofacquaintance rape est une excellente source de

référence pour connaître ce que vivent les femmes victimes de viol. Selon Wiehe l'impact viol peut être ressenti pendant des années. Le viol affecte la confiance qu'ont les femmes envers les hommes, leur capacité à vivre une relation intime avec un homme et il fait surgir un fort sentiment de colère à leur endroit qui se révèle difficile à gérer pour les femmes. La perte de confiance affecte également leurs relations conjugales surtout lorsqu'elles ont été agressées par un homme qu'elles connaissent. Certaines vivront une sexualité compulsive et auront de multiples relations sexuelles avec plusieurs partenaires. Ceci peut-être être le signe d'une confusion à tracer les frontières entre l'affection, la relation sexuelle et l'abus. Wiehe poursuit en précisant qu'à ces réactions s'ajoutent des sentiments de culpabihté, une perte de confiance en soi, des réactions de peur et d'évitement, une humeur

dépressive, des problèmes de toxicomanie, des problèmes de sommeil et d'appétit, des problèmes physiques dont les plus fréquents sont des maux de tête et de dos, ainsi que des problèmes gastriques et intestinaux.

Wiehe (1995) explique que les femmes violées par un étranger vont vivre trois phases suite à ce traumatisme. Une phase aigue où les sentiments de choc, le déni et l'incrédulité seront présents. Une phase de

(18)

réorganisation où la femme essaie de reprendre du contrôle et de l'assurance dans ses relations, et ce, à tous les niveaux. Une phase de résolution où la femme commence à

intégrer l'expérience du viol à sa vie et essaie également, d'aider d'autres femmes ayant vécu la même chose. Par ailleurs, Wiehe affirme qu'il est rare que les femmes,

qui ont été violées par un homme qu'eUes connaissent, dénoncent ce viol rapidement après avoir été agressées. Ce délai prolongé avant le dévoilement les rend plus

susceptibles d'être bloquées dans une phase de désorganisation incluant des

symptômes d'anxiété et de dépression qui peuvent devenir chroniques et débilitants. seront également, plus sujettes à de nouvelles victimisations. outre l'impact du viol sera plus important selon les liens qui unissaient la femme à l'agresseur. En effet, la signification que ces femmes donnaient à cette relation, la confiance qu'eUes avaient en cet homme vont affecter leur identité et leur estime de soi. De plus,

l'entourage de ces femmes prendra parti soit pour cette dernière ou pour J'agresseur et ce faisant blâmera les femmes. Par ailleurs, Wiehe indique que les victimes de viol collectif sont encore plus susceptibles de retarder le dévoilement du viol car elles chercheront à nier la réalité de celui-ci et de l'agression subie. De ce fait, elles ne seront pas capables de reconnaître les symptômes qu'elles ressentent et elles vivront encore plus de difficultés.

Quant au syndrome de stress post-traumatique, il est maintenant reconnu que bien des victimes d'actes criminels, dont font partie les victimes de viol, vont vivre ce syndrome qui apparaît suite à un événement

traumatique (Côté, 1996, Brunet, 1996, Wiehe, 1995, Koss, 1987). Le syndrome de stress post-traumatique est défini comme « une menace sérieuse pour la vie ou l'intégrité physique du sujet ou pour cene d'un proche, et provoque chez le sujet de

(19)

l'effroi, de l'impuissance ou de l'horreur» (Bmnet, 1996, p.146). Bmnet précise que les symptômes de ce syndrome sont la revivIscence, l'évitement et l'hyperactivité neurovégétative et, ces dits symptômes durent plus d'un mois et perturbent façon significative le fonctionnement social. De plus, Koss ajoute que les femmes victimes

de viol vont vivre une perte d'intérêt face à leurs activités et à leurs proches. Wiehe précise que lorsque les femmes violées vivent un syndrome complexe de stress post-traumatique, des symptômes additionnels apparaissent Ainsi les femmes peuvent se soumettre totalement au contrôle de d'autres personnes, elles peuvent vivre de la dissociation qui peut se manifester par des problèmes de mémoire, de la désorientation et aller jusqu'à la fonnation de multiples personnalités. Ces femmes peuvent

également éprouver une grande sensation de vide intérieur comme si plus personne ou plus rien n'était là. Elles peuvent aussi avoir le sentiment d'un avenir sans espoir.

BriHon, Marchand et Stephenson (1996) précisent qu'il existe deux éléments qui expliquent le développement différentiel du trouble de stress post-traumatique (TSPT) soit les caractéristiques de l'événement post-traumatique et les caractéristiques individuelles. Côté (1996) affinne que l'incidence de l'état de stress post-traumatique chez les victimes d'un crime dépend de la gravité des blessures, de l'intensité de la peur d'être tué ou blessé et de la relation avec l'agresseur. L'auteur ajoute que le viol est le traumatisme qui conduit Je plus souvent au développement des symptômes d'état de stress post-traumatique et si la violence est importante, les

symptômes reliés à la peur seront alors plus intenses selon Wiehe (1995). Côté mentionne que les facteurs de vulnérabilité sont augmentés lorsque l'agresseur est un proche de la victime, ce qui est le cas dans la majorité des agressions sexuelles comme nous l'avons vu précédemment

(20)

Janoff-Bulman ( 1992) précise que l'individu ayant subi un tTaumatisme voit les conceptions du monde qu'il s'était forgé voler en éclats. Sa vision positive du monde place à tm monde négatif et très menaçant. ailleurs, l'idéologie culturelle véhiculée par les médias, l'entourage des femmes et le milieu de travail, nie le viol et maintient les femmes comme des objets sexuels à la disposition des hommes(Lebovvitz et Roth, 1994). En effet, une étude de LebO\vitz et où eUes ont analysé des récits de viol, a permis d'identifier plusieurs croyances justifient le comportement violent des hommes. Une d'entre eUes prône que la

sexualité des femmes est la propriété des hommes, ainsi la sexualité féminine

« acquires its value according to male use, then although, women technicaUy possess . the commodity of their sexuality, it is not really intended for ownership or use» (Lebowitz, Roth, 1994, p. 375) Les femmes sont désappropiées de leur sexualité. Les auteures soulèvent la dichotomie . existe entre la sexualité féminine et la valeur des femmes. Si une femme a eu des relations sexuelles, eUe a moins de valeur que si eUe est vierge et si eUe a été agressée, elle perd également de la valeur et mérite encore moins d'être protégée. Cette vision de la sexualité féminine et des femmes réduit leur valeur en tant qu'être humain et renforce le pouvoir des hommes. La

socialisation des femmes y participe également. Les femmes sont éduquées pour devenir dépendantes d'autrui et lorsqu'eUes sont autonomes eUes sont sujettes à discrimination, entre autres choses au niveau professionnel. La société prône que la femme a moins de valeur qu'un homme et ne doit pas aspirer à avoir les mêmes activités. Si eHe insiste pour le faire alors elle devient responsable s'il lui arrive un malheur, telle viol. Lebowitz et Roth indiquent que les femmes agressées deviennent conscientes que le viol est une forme de contrôle social et cette vision plus claire est

(21)

stressante. Ces auteures soulignent combien les pressions culturelles qui imposent aux felmnes d'être désirables, d'êtres responsables de sexualité masculine et de devoir renoncer à leur propre sexualité, les d'autant plus vulnérables au viol. Ces mêmes pressions expliquent pourquoi il est si difficile pour les femmes de bien

identifier qu'elles ont été violées et de demander que justice soit faite et lorsqu'enes le font, l'idéologie culturelle rend d'autant plus persistants les effets négatifs du

traumatisme subi. Déjà le traumatisme du viol a déstabilisé leur perception

monde qui est bon~ à cela s'ajoute dorénavant la conscience d'une idéologie cultureUe où el1es sont menacées par le désir de domination des hommes. Cette nouvelle

conscience est à eHe seule source d'un second niveau de traumatisation issu de la peur des hommes et de la colère qu'elles ressentent à leur endroit.

Par ailleurs, Lebo'\ivitz et Roth (1994) indiquent que la plupart des théoriciens et des chercheurs travaillant dans le domaine du traumatisme croient que les êtres humains ont des représentations internes d'eux-mêmes et du monde qui peuvent entrer en conflit les unes avec les autres. Les personnes en sont plus ou moins conscientes et cela varie au cours de leur vie. Ces représentations internes sont aussi nommées croyances. Les auteures expliquent qu'un événement traumatique peut annuler des croyances dominantes et éveiller celles qui étaient latentes, ceci afin de trouver une signification au traumatisme vécu. Les personnes vont choisir des croyances qui coHent mieux à réalité qu'elles viennent de vivre et qui incluent maintenant l'événement traumatique. Ainsi le viol peut réactiver des croyances propres aux mythes et aux préjugés qui justifient viol subi. À ce sujet, les réactions de l'entourage (la famille, les amis, la police, etc) peuvent s'inscrire dans ces mythes venant ainsi les renforcer.

(22)

Comme nous l'avons vu l'impact du viol est majeur et jJ est donc important de bien intervenir pour aider les femmes à se rétablir. À ce sujet, nous présentons

des femmes.

facteurs qui ont été identifiés à ce

1.3 Le rétablissement

et . aident au rétablissement

Selon Koss (1987), plusieurs facteurs contribuent ou nuisent au rétablissement des femmes victimes de vioL Parmi les facteurs bénéfiques, se

retrouvent le soutien social de l'entourage de la femme victime de viol, et sa capacité

à s'adapter aux changements de comportement de la femme violée. Les

caractéristiques personneHes de la femme peuvent être des atouts ou des difficultés de plus en vue du rétablissement. Les principales caractéristiques retenues sont sa

capacité de faire face et de s'adapter aux exigences de la vie, son sentiment de pouvoir et de contrôle sur sa vie, et enfin, les différentes expériences éprouvantes de son passé. De plus, la thérapie individuelle et/ou de groupe aident également au rétablissement des femmes. À ce sujet, Wiehe (1995) mentionne qu'une relation de confiance et d'ouverture avec la ou le thérapeute favorisera rétablissement des femmes victimes

Bien entendu, ces thérapeutes devront avoir une bonne connaissance de l'impact du viol de même que de bonnes qualités d'empathie. Pour aider les femmes qui ont tardé à dévoiler le viol, Wiehe précise les phases initiales du

rétablissement, soit la stabihsation de l'état de crise et l'établissement d'un environnement où la femll1e se sentira en sécurité, puis reconstruction et le recadrage du viol ceci afin d'aider les femmes à diminuer stress et l'anxiété qui y

(23)

sont liés, et troisièmement l'importance d'aider femmes à restaurer leurs relations avec leur environnement ceci afin de faire renaître l'espoir et un sens à leur vie.

Comme l'ont mentionné Lebowitz et Roth (1994), l'idéologie culturelle dominante réalité du 'viol et empêche les femmes de demander que justice soit faite, de ce Koss (1987) insiste pour que des actions soient prises au

sein de la communauté changer cette idéologie, ce à travaillent les centres de crise pour femmes 'victimes d'a!,Tfessions sexuelles. Ces changements sont bénéfiques au rétablissement des femmes.

Dans ce qui précède les auteures ont su identifier plusieurs facteurs aidant au rétablissement des femmes, mais aucun de ceux-ci ne vise spécifiquement le sens donné à la vie. Aucune recherche n'a étudié ce volet particulier. Par contre, plusieurs auteurs ont étudié l'importance du sens donné au traumatisme dans le processus de rétablissement des personnes.

1.4 Le sens donné au traumatisme

La recherche menée Lebowitz et Roth (1994) identifie les principaux facteurs qui influencent le sens donné àun tnuIDmtisme. Ces auteures indiquent:

Although different authors emphasize different pathways from which meaning emerges, typicaHy meaning is seen as accruing primarily frOID the interaction of life

history, personality procllvities, the particulars of the traumatic event. (Lebowitz et Roth, 1994: 363)

(24)

Le sens donné au traumatisme provient donc de ]' intéraction entre 1 'histoire de vie de la personne, sa personnalité et les caractéristiques de

l'événement traumatique. plus, Lebowitz et notent que milieu socio-culturel de personne et celui où l'événement traumatique a eu lieu influenceront aussi le sens donné à cet événement. De son côté Rousseau (1997) u .... ,,,,,,,,, le besoin

,.., ... ",'Î""' ...

,rl de l'être humain de trouver un sens aux événements de sa vie car ceci pennet

de les inscrire dans l'histoire d'une communauté, d'une famille et d'une personne {{ C'est-à-dire intégrer ce qui s'est passé au reste de l'expérience de Cette

intégration, qui établit une continuité entre

Je

passé et le présent, permet de continuer à vivre ». (Rousseau, 1997, 2)

Janoff-Bulman (1992) explique que la personne survivante d'un drame réévalue le traumatisme en termes de bénéfices ou d'apprentissages apportés afin de lui donner un sens, une raison d'être dans sa vie. Ce faisant le traumatisme et la souffrance qu'il génère pennettent d'enrichir vie intérieure ou spirituelle. Ce constat est expliqué remarquablement bien par Scharwcz (1996), eUe nous dit:

In Hebrew, the very word for suffering, tzara, embodies possibihty. As Rabbi Benjamin Blech (199 l ) points out in a recent work, « Rearrange the letters of tzara and you have the word tzohar, a wiudow. Through pain one can see

through grief one cau gain remarkable vision. The pain of suffering can be turned into the pane ofinsight (Scharwcz, 1996, p.90).

C'est dire qu'à travers la souffrance, la personne traumatisée acquérir une vision remarquable et nouvelle de sa vie intérieure. Ceci laisse présager que sa vie prend un nouveau sen.s, une nouvelle profondeur. Comme nous

(25)

l'avons mentionné plus haut, il n'y a pas de recherches qui ont étudié le sens que les femmes victimes de viol donnent à leur vie. Cependant, deux recherches ont retenu notre attention puisqu'eUes identifient des éléments liés au sens dOilllé à vie des femmes.

1.5 Le sens donné il la vie

La première recherche est une recherche-action menée par Blais (1998). Elle a exploré l'univers de 34 femmes vivant autour du seuil de pauvreté et ce, dans une perspective historique et critique de l'épidémiologie

psychosociale comme mode de connaissance. Sa recherche faite dans le cadre de son doctorat a été menée avec raide d'organismes communautaires du réseau de santé et des services sociaux de Montréal. Dans le cadre de sa recherche, eUe a identifié le sens que donnent à la vie ces femmes. Elle a relevé du discours des femmes les valeurs qui donnent un sens à leur vie. Blais précise que ces valeurs émergent:

dans un espace intime et« privé », (c'est que les femmes) puisent le sens à

donner à la vie, qu'elles puisent aussi leur raison d'être au monde social. C'est là qu'eUes pensent à ce qu'eUes sont ( ... ) et à ce qu'elles font, ou ont « à faire sur cette terre (Blais, i 998, p. ] 02).

Blais a relevé quatre valeurs essentieHes qui donnent un sens à

la vie des femmes. L'auteure a noté que pour la majorité des femmes «les enfants constituent la source première d'identité et de fierté personnelle}) (Blais, 1998, p.l 03) C'est dans rôle de mère que les femmes retirent la source première de

(26)

au deuxième rang. Au troisième rang vient l'implication pour aider autrui qui prend souvent la forme de bénévolat. La quatrième valeur identifiée est l'amitié

s'établit principalement avec le conjoint et une ou des amies.

Pour sa part, Morris (1994) dans sa thèse de doctorat, a identifié sept thèmes importants pour trois femmes âgées entre 59 et 69 ans et qui ont contribué

à donner un sens à leur vie après qu'eUes aient envisagé sérieusement le suicide. Ces femmes se disent satisfaites de leur vie. Morris a utilisé l'approche phénoménologique dans une perspective de psychologie. Sa question de recherche principale est « What do the participants recount as having been mos! influential, helpful, important, and even essential, in facihtating their moves from states of despair toward hope, to satisfying states of meaningfulness?» Les thèmes identifiés sont: la philosophie de vie incluant les valeurs spirituelles et les buts à atteindre; les relations

interpersonnelles significatives harmonieuses, positives et intimes; aider autrui; l'acceptation des autres et de la réalité même s'ils sont négatifs et l'intégration positive de ceux-ci à la vie des femmes; l'autonomie qui provient des ressources personnelles des femmes; les actions saines faites par les femmes afin de prendre som d'elles et le développement personnel épanouissant défini en anglais par le terme {( thriving ».

Il y a des concordances entre ces deux recherches soit l'identification par les deux auteures des relations interpersonnelles significatives ou l'amitié, l'aide à autrui et les valeurs spirituelles ou la philosophie de vie comme étant des éléments significatifs pour les femmes qu'elles ont interrogées.

L'état des connaissances démontre bien le nombre élevé de femmes agressées sexuellement et ce principalement par quelqu'un de connu. De

(27)

plus, l'impact du viol est majeur et se fait sentir à tous les niveaux, dont les croyances

des femmes. Plusieurs facteurs ont été identifiés pour aider les femmes à se rétablir

mais aucun ne vise le sens donné à leur vie. Peu de choses sont connues à ce sujet.

En effet, aucune recherche n'a étudié ce phénomène. Seules quelques-unes se sont penchées sur le sens donné au traumatisme et d'autres sur le sens donné à la vie pour des populations féminines restreintes.

(28)

CHAPITREll

LE CADRE THÉORIQUE

Notre cadre théorique est éclectique et fait appel au travail social, à la sociologie, à la psychologie, à la psychiatrie et à la philosophie afin d'avoir une vision globale du phénomène étudié. Afin de mieux appréhender le

contexte du viol, d'avoir une vision élargie de son impact et du rétablissement pour les femmes victimes de viol, nous présentons les théories qui y sont propres et les

critiques faites aux théories existantes, deux aspects auxquels a contribué de près le travail social. De plus nous présentons les propos de Janoff-Bulman (1992) sur le rétablissement, l'importance du sens donné à la vie selon Frankl (1988) et la théorie

« soi en relation» qui explique pourquoi les relations interpersonnelles sont

importantes pour les femmes. Nous précisons également les définitions retenues pour les concepts propres à cette recherche qui sont les croyances, le rétablissement et le sens donné à la vie. Le concept du viol a déjà été défini dans l'introduction.

2.1 Le viol

Les féministes se sont penchées sur la construction des rapports sociaux et leur impact sur les femmes. Enes ont également cherché à

expliquer comment les agressions sexuelles se situent dans ces rapports sociaux. La recherche du C.S.F. (1995) sur la violence faite aux femmes à travers les agressions sexuelles, présente clairement les conceptualisations féministes et leur évolution. Nous en reprenons l'essentiel.

(29)

Les féministes des années soixante-dix, telles Millet, Michell et Rowbotham expliquent que la violence des hommes est surtout issue des structures sociales, politiques, économiques et idéologiques. Ces structures garantissent et légitiment le rapport de force entre les hommes et les femmes. Cependant, Millet et Firestone reconnaissent le rôle important de recours à la force physique des hommes pour faire violence aux femmes et ainsi les dominer. premières féministes à souligner la violence sexuelle à l'endroit des femmes et à l'étudier ont été Griffin, Brownmiller et Daly. Griffin écrit le premier document féministe précisant les composantes du contexte social entourant le viol :

( ... ) la construction de la féminité crée la fragilité et la vulnérabilité des femmes et les prédispose ainsi a être moins en mesure de se défendre devant les attaques (o.) le pouvoir se constitue, s'élabore et s'exerce par l'interconnexion entre sexualité, agression, violence et masculinité ( .. 0 ) (Il existe une contradiction) dans les

rôles sociaux que les homme sont appelés à tenir: ils sont enjoints à tenir

simultanément, les rôles de « chasseur» et de défenseur des femmes(CoS.F. 1995 :14).

De son côté, Brownmiller définit le viol en ces termes:

Une invasion sexuelle du corps par la force, une intrusion dans l'espace intérieur intime, personnel, sans consentement ( ... ) constitue une violation délibérée de l'intégrité psychique et physique, et est un acte hostile et dégradant de violence qui mérite le nom de viol. (C.SoFo 1995 : 15)

Et finalement, Daly indique que l'objectif unique et ultime du pouvoir des hommes est ({ l'assujetissement des femmes et cela, malgré les

manifestations multiples et différentes de la violence. }) (CoSoF., 1995, p. 16)

France, Guillaumin souligne que la contrainte sexuelle des hommes est un moyen de coercition et d'appropriation des femmes et Plaza fait partie des auteures qui

(30)

sexuel. En Angleterre, selon Harmer la violence des hommes est un ingrédient essentiel de contrôle social. Les féministes américaines précisent que les femmes ont intériorisé la menace du viol :

( ... ) tous les hommes n'ont pas à être des agresseurs sexuels pour bénéficier et conserver les privilèges liés à la violence, à savoir: le maintien de leur position de

dominants~ de la même façon, il suffit que seules certaines soient agresées pour que toutes les femmes subissent les effets de cette violence, à savoir: le maintien dans leur position de dominées.

n

faut donc aussi comprendre que le sort des unes est

fermement lié au sort des autres (C.S.F. :1995 :19).

Les années quatre-vingts ont été marquées par la « tentative de trouver une perspective capable de contenir toutes les formes de violence, d'abus et d'exploitation des femmes et de les relier à la lutte incessante des hommes afin de conserver et de renforcer leur postion dominante comme groupe. )} (C.S.F., 1995, p.20)

Bunch (1997) partage la vision féministe et affirme que la violence antiféminine est en fait un contrôle social exercé sur les femmes. Cette violence se révèle essentielle pour maintenir les femmes dans un état

d'asservissement. Cette auteure précise que le contrôle social prend également d'autres formes tels le manque d'instruction, la dépendance économique, le pouvoir politique limité, le peu de moyens de contrôler la fécondité, les interventions sociales dont les fernrnes sont

r

objet et l'inégalité entre hommes et femmes aux yeux de la loi. Par ailleurs, Bunch (1997) constate que les « les ennemis les plus tenaces de la dignité et de la sécurité des femmes sont les forces culturelles visant à préserver la

(31)

domination masculine et la soumission féminine souvent défendues au nom d'une vénérable tradition» (Bunch, 1997, p. 43) Il nous apparaît intéressant, pour mieux comprendre la violence sexuelle faite aux femmes, de clarifier les forces culturelles qui se reflètent dans les mythes, les préjugés et les croyances.

2.2 Les mythes, les préjugés et les croyances

Le rôle des mythes et des préjugés est selon C.S.F. (1995), de justifier et rationaliser « une organisation sociale dans laquelle l'égalité entre les hommes et les femmes n'est pas encore acquise» (C.S.F., 1995, p. 61) Le Conseil indique que les mythes font appel à des explications biologiques et psychologiques, comme s'ils étaient « naturels» alors qu'en réalité, ils sont le produit d'un construit social. Le Conseil cite l'Honorable juge L'Heureux-Dubé de la Cour Suprême du Canada qui a souligné l'influence des mythes en matière d'agression sexuelle sur les principes juridiques. La juge a démontré combien le public, les services de police, les juges et les jurés sont influencés par des opinions discriminatoires envers les femmes. Notre intention n'est pas de faire une liste de tous les mythes et préjugés prévalant dans notre société. Nous en identifierons quelques-uns qui nous apparaissent importants et qui ont été relevés par le C.S.F. (1995) : Une femme ne peut être prise contre sa volonté, seules les femmes faciles peuvent être violées ou agressées; les femmes ont des fantasmes de viol et désirent secrètement être violées; les femmes qui dénoncent le viol qu'elles ont subi se sont fait prendre dans une relation illicite ou essaient de se venger de l'homme qui les a séduites.

(32)

Les mythes et préjugés sont partie intégrante du concept plus large de croyances. Lebowitz et Roth (1994) soulignent que les croyances sont portées

par une communauté et se retrouvent dans les idées et les métaphores qui émergent des productions culturelles et des institutions. Ces dites productions forment une idéologie cohérente et identifiable qui s'applique à chaque événement de la vie. L'élaboration des croyances par chaque personne peut s'expliquer par le concept de représentation, tel que défini par Durkheim et repris par Doml (1987). Nous retenons sa définition pour le concept de croyance, ainsi il :

( ... )se situe de plein pied dans le rapport entre la pensée collective et la pensée individuelle. C'est le sujet qui construit le réel par la représentation, mais cette

construction est profondément liée aux conditions objectives dans lesquelles vit cet individu (Dorvil, 1987, p.307).

Pour enrichir la compréhension du concept de croyance tel que nommé par Dorvil comme étant le concept de représentation, Lebowitz et Roth (1994) ont noté que les auteurs nomment de différentes façons les représentations internes que se font les êtres humains d'eux-mêmes et du monde qui les entourent. Certains les nomment shéma (Horowitz, McCann et Pearlman ) conceptions de base (Janoff-Bulman) et théorie personnelle de la réalité (Epstein). Chaque personne investit ou désinvestit dans la réalité selon représentation qu'eUe en a ou selon ses croyances. Certaines de ses croyances ont plus d'impact que d'autres selon

l'importance qui y est accordée par chacun et chacune. Parmi ces croyances, on retrouve les raisons d'être de la personne, ce pour quoi elle « croit être» dans ce monde, ou sens donné à sa vie.

(33)

2.3 L'impact du. viol

Silove (1999) questionne la nomenclature et les définitions retenues pour le syndrome de stress post-traumatique. Il indique que la classification utilisée est médicalisée et ne représente pas toute la complexité psychosociale que vivent les personnes traumatisées, plus particulièrement celles dont les droits humains ont été violés. Il souligne également, que la définition retenue correspond à la réalité occidentale et sa validité est questionnée dans son application pour d'autres cultures. Silove proposent de vérifier cinq aspects qui lui apparaissent significatifs chez les personnes traumatisées. Ces cinq aspects sont le sentiment de sécurité personnelle (personal safety), le maintien des liens affectifs et des liens d'appartenance

(attachment and bond maintenance), l'identité personnelle et le rôle social (identity and role functionning), la justice et le sens donné à la vie (existential meaning).

n

ajoute que dans des circonstances de vie normale, ces divers aspects de la personne évoluent et permettent à celle-ci, dans une société donnée, d'atteindre un équilibre personnel. Certains de ces aspects ont déjà été relevés par Wiehe (1995) concernant les femmes victimes de viol. Ainsi, cette auteure a indiqué que le sentiment de sécurité personnelle est ébranlé, que le maintien des liens affectifs et d'appartenance est affecté de façon importante, particulièrement si la femme est violée par un homme de son entourage et enfin que l'identité personnelle et le fonctionnement social sont également touchés.

Ce ne sont pas toutes les femmes victimes de viol qui seront bouleversées par ce drame. Afin d'expliquer cette réalité, Cyrulnik (1999) nous présente le concept de résilience. Il explique que certaines personnes ayant vécu des

(34)

événements traumatiques et ayant une personnalité résiliente arrivent à se faufiler à travers les coups du sort pour « se tricoter» quand même avec des appuis solides. L'auteur utilise la métaphore du tricot car eUe élimine la notion de force ou de

faiblesse de l'individu, et souligne l'aspect adaptatif et évolutif du moi. «Le concept de résilience, qui n'a rien à voir avec l'invulnérabilité, appartient à la famille des mécanismes de défense, mais il est plus conscient et plus évolutif, donc maîtrisable et porteur d'espoir. }} (Cyrulnik, 1999, p. 207). Cyrulnik (1999) explique quels sont les facteurs de résilience. D'une part l'équipement génétique doit être considéré. En effet, s'il contient une maladie la personne aura plus de probabilités de devenir vulnérable. Mais les principaux facteurs sont dans l'entourage de la personne, principalement au niveau affectif

En fait, la plus grande partie des facteurs de résistance d'un individu est tissée autour de lui par les organisations psychosociales qui, en lui tendant des perches, lui offrent des circuits d'épanouissement possible. Même sa vie psychique, son monde intime, est le résultat de cette triple pression (Cyrulnlk, 1999, p.53).

2.4 Le rétablissement

Dans le cadre de cette recherche, l'impact sur le rétablissement est questionné. Nous avons choisi d'utiliser le terme rétablissement mais les tennéS traitement et guérison sont aussi utilisés pour définir le même concept, selon Wiehe (1995). Cette auteure souligne que le terme rétablissement peut faire croire que la femme retrouvera l'état d'être qu'eUe avait avant le viol. Ceci ne pourra jamais se produire. Cependant, il est souhaité que les femmes regagnent et peut-être dépassent leur précédent niveau de fonctionnement et acquièrent de la maturité et des croyances

(35)

plus réalistes les concernant et concernant leur environnement, ce que nous retenons comme définition au concept de rétablissement.

Bien des aspects sont abordés dans l'intervention afin de contribuer au rétablissement de la femme victime de viol. Parmi les aspects touchés, il yale contexte de l'agression, les répercussions sur la victime aux niveaux physique, psychologique et relationnel, le réseau social, le fonctionnement au quotidien et la personnalité. La personnalité est empreinte de toutes les expériences de vie de la femme mais aussi de son hérédité familiale. Les croyances sont un volet de la

personnalité. Notre recherche s'attarde précisément aux croyances liées au sens donné à la vie qui n'ont pas été étudiées de façon spécifique pour les femmes victimes de viol. Janoff-Bulman (1992) donne quelques exemples de croyances qui influencent le rétablissement. Ainsi selon lui une croyance dans une certaine bonté humaine est nécessaire sinon il est impossible de vivre en paix car la peur d'être agressé devient omniprésente. De la même façon, une croyance dans une certaine justice qui punit les coupables de leurs gestes et les empêchent dans la mesure du possible, de récidiver, permet à la femme victime de viol de retrouver un certain pouvoir personnel, lui aussi essentiel à la paix intérieure.

Selon Janoff-Bulman (1992), afin d'intégrer le viol à leurs croyances antérieures et rétablir leur équilibre personnel, les survivants de

traumatisme utilisent des stratégies cognitives réévaluation et d'apppréciation du ou des événements traumatiques afin de maximiser les chances de percevoir de bonté dans leur monde, de trouver un sens aux événements traumatiques ou une raison d'être, et un sentiment de fierté et de valeur personnelle. Nous l'avons déjà mentionné, aucune étude n'a cherché à déterminer de quelle façon le sens donné à la

(36)

vie influence le rétablissement des femmes victimes de viol. Afin de mieux évaluer le rétablissement des femmes interrogées dans la présente recherche, les cinq objectifs identifiés par Janoff-Bulman (1992) décrits ci-dessous nous serviront de guides. Selon cet auteur lorsqu'ils sont atteints, le rétablissement est chose accomplie:

1. Avoir quotidiennement de l'énergie disponible pour faire ses activités; 2. Se sentir libéré(e) de la douleur et de la détresse psychologiques; 3. Être capable de gratitude et avoir du plaisir dans ce que l'on vit; 4. Avoir de l'espoir et des projets d'avenir;

5. Être capable de remplir raisonnablement divers rôles sociaux, tel que conjoint( e), parent et membre de la communauté.

2.5 Le sens donné il la vie

Selon les recherches de Janoff-Bulman (1992), les survivants possèdent une nouvelle forme de sagesse qui les éclaire sur ce qui est vraiment essentiel dans la vie, ils se sentent de meilleurs êtres humains, plus compréhensifs, aimants et patients. Ils se rusent dotés d'une nouvelle force car ils ont traversé une expérience fort difficile. Dans sa critique du syndrome de stress post-traumatique, SHove (1999) précise qu'il est important de vérifier l'impact du traumatisme sur le sens donné à la vie. De plus, Wiehe (1995) ajoute que les intervenants doivent aider les femmes victimes de viol à faire renaître un sens à leur vie. Ces commentaires abondent dans le même sens que ceux de Frankl (1988).

(37)

Frankl (1988) est psychiatre. Il a été prisonnier dans un camp de concentration lors de la deuxième guerre mondiale et depuis cette expérience il croit fermement que rien au monde ne peut mieux aider la personne à survivre aux pires conditions de vie que ne peut le faire sa raison de vivre. Franld ajoute que cette raison est unique à chaque personne et eUe n'est révélée qu'à eUe seule. Cette raison de vivre satisfait le besoin existentiel de la personne. Ce n'est pas le sens global de la vie qui importe mais celui que lui attribue une personne à un moment donné de sa vie. Selon Frank!, chaque être humain a la responsabilité de trouver un sens à sa vie et atlX défis qu'il rencontre. il se doit de prendre sa vie en main.

Frankl affinne que la vie de l'être humain est toujours dirigée vers quelque chose ou vers quelqu'un d'autre que soi-même. Ce psychiatre a

développé la logothérapie qui se penche sur la raison de vivre de la personne mais également sur ses efforts pour découvrir une raison de vivre. Ces efforts, selon Frankl, sont une force stimulante fondamentale chez l'être humain, c'est pourquoi il parle de «recherche d'un sens à la vie ». Selon la logothérapie, chaque être humain peut découvrir un sens à sa vie de trois façons: 1. à travers une œuvre ou une bonne action 2. en faisant l'expérience de quelque chose ou de quelqu'un (par exemple: la bonté, la beauté, la nature ou encore l'amour pour un autre être humain) 3. par son attitude envers une souffrance inévitable. Sur ce dernier point, Frankl précise que la personne peut transformer une tragédie personnelle en victoire ou une souffrance en réalisation humaine. Selon Guttmann (1996) la logothérapie est maintenant répandue à travers le monde et celui-ci en a présenté les outils d'intervention.

L'être humain ne trouve pas toujours de raison de vivre, Frankl (1988) parle alors de frustration existentielle, qui peut provoquer des névroses, que

(38)

l'auteur nomme {( noogénique », c'est-à-dire qu'au lieu d'être psychologique, cette frustration émane de la dimension spirituelle de l'être humain. Frankl afflrme que la personne n'est pas que le produit des conditions biologiques, psychologiques et

sociologiques, ou encore de l'hérédité et de son environnement. Pour lui, liberté

spirituelle est inhérente à la condition humaine et il souligne qu'il est important de ne

pas nier toute liberté à l'être humain, car même dans des conditions effroyables, l'être humain a des aptitudes incroyables pour les défier. L'être humain garde toujours la liberté de changer, on ne peut prédire avec certitude ce qu'un être humain deviendra. Cela lui appartient. Par ce qui précède on peut prévoir que le sens donné à la ,rie a un impact important sur le rétablissement des personnes.

Nous nous sommes inspirées de Blais (1998) afin de préciser le concept de sens donné à la vie. Il est défini par la raison d'être à la vie mais

également, la raison d'être au monde social. Ces raisons d'être peuvent être identifiées à partir de ce qui est important dans la vie pour les femmes, ce qu'eUes désirent réaliser dans leur \rie et ce qui les aide à traverser les épreuves.

Afin de préciser ce qui peut donner du sens à la vie des femmes, la théorie« self in relation », présentée par Surrey (1991), et traduite ici librement par soi en relation, explique le développement propre aux femmes. Cette théorie a été élaborée par des féministes et apporte un éclairage intéressant pour notre recherche.

En effet, cette théorie explique que le développement des femmes est intimement lié à

leurs capacités relationnelles et à leur capacité ct' empathie. Selon cette théorie, la

capacité d'empathie serait plus développée chez les femmes que chez les hommes, et

celle-ci est un concept central à l'organisation des relations interpersonnelles des

femmes. L'importance de ces relations fait partie du processus évolutif des femmes.

(39)

Jack (1987) ajoute que lorsque les relations interpersonnelles manquent d'intimité ou sont contraignantes, l'identité de base des femmes est menacée et c'est selon

l'auteure, une des causes de la dépression chez les femmes.

Nous avons vu que les féministes ont contribué largement à

l'explication du contexte du vioL Certes, le viol a un impact majeur sur les femmes, et ce à tous les niveaux, mais les femmes ne sont pas toutes ébranlées également parce que leur résilience est différente. De plus, il est possible d'évaluer le niveau de rétablissement des femmes interrogées pour notre recherche, grâce aux objectifs définis par Janoff-Bulman (1992). Comme ce fut souligné, le viol touche un nombre élevé de femmes, et il nous apparaît important de découvrir comment mieux les aider. Le sens donné à la vie peut avoir un impact significatif sur le rétablissement des femmes, puisque selon Frankl (] 988), le sens donné à la vie satisfait un besoin existentiel. C'est pourquoi le questionnement de notre recherche est de: Déterminer pour des femmes, victimes de viol, quels sont les éléments qui donnent du sens à leur vie et l'impact de ceux-ci sur leur rétablissement? Plus spécifiquement, nos intentions de recherche sont:

1. D'identifier les éléments du sens donné à la vie par les femmes victimes de viol, avant celui-ci et après celui-ci;

(40)

CHAPITRE III

LA I\fÉTHODOLOGIE

Ce chapitre identifie en premier lieu le cheminement de pensée qui nous a amenées à étudier Je sens donné à la vie. Puis nous indiquons pourquoi nous avons choisi la phénoménologie comme méthode de recherche. Par la suite, nous présentons comment nous avons procédé pour l'échantillonnage,

collecte de données et l'analyse de celles-ci et enfin queUes étaient nos considérations éthiques.

Nous aurions voulu étudier l'impact de toutes les croyances des femmes qui ont été violées, mais cela est impossible à réaliser dans le cadre d'une thèse de maîtrise. Nous avons donc identifié celles qui nous semblaient plus

importantes dans notre pratique de travailleuse sociale. Après un premier tri, nous avons gardé celles qui concernaient la culpabilité, la colère, la confiance ou la méfiance face à autrui ou à la vie, le pouvoir personnel et le sens donné à la vie. En effet, les écrits de Wiehe (1995) présentés plus haut indiquent que les sentiments de culpabilité, de colère, de confiance ou de méfiance sont très apparents suite au viol. L'auteure précise aussi que les thérapeutes intervenant auprès des femmes doivent les aider à trouver un sens à leur vie. De son côté Koss (1987) mentionne que le pouvoir personnel des femmes a un impact sur le rétablissement. Nos intérêts étaient beaucoup trop étendus et nous avons dü nous restreindre. Finalement, nous nous sommes

(41)

Nous avons choisi d'utiliser l'approche phénoménologique car celle-ci vise à définir l'essence d'un phénomène ou d'une expérience vécue. Elle met l'emphase sur ia conscience qu'a la personne du phénomène vécu. Ceci fait référence à la signification de l'expérience vécue qui comprend l'apparence extérieure de celle-ci mais aussi les aspects propres à la conscience intérieure individuelle, telles la mémoire, la perception et la signification. Husserl est à l'origine de cette approche qui a été développée et critiquée par Heidegger, Sartre, Merleau Ponty et bien d'autres (CresweH, 1998). La principale critique faite à Husserl s'adresse au concept

« d'époche» tel qu'il le définit. Husserl affirme que pour bien saisir l'ensemble d'un phénomène, le chercheur doit d'abord être conscient de toutes ses subjectivités et les mettre de côté. Mais c'est chose impossible à réaliser puisque les êtres humains, ne peuvent être conscients de l'entièreté de ce qu'ils sont et portent en eux, alors le chercheur ne peut non plus, être conscient de toutes ses subjectivités.(CresweU, et Stewart et Mickunas, 1990). Ceci n'empêche pas la nécessité de tenir compte de ses subjectivités connues de façon à avoir une meilleure compréhension du phénomène tel que vécu par la personne touchée.

Nous avons donc identifié nos subjectivités. Depuis nos 13 ans, nous nous questionnons sur le sens de l'existence. Pourquoi sommes-nous sur terre? Qu'y-a-t-il autour de nous, visible ou invisible? Qui guide nos pas? QueUes sont nos motivations profondes? Au cours de notre adolescence, nous avions une attirance marquée pour la spiritualité et nous avons cherché à connaître les différentes

religions. Ce faisant, nos connaissances nous ont amenées, au cours de la vingtaine à

dissocier de plus en plus spiritualité et religion. Au cours de la trentaine, la spiritualité devient pour nous le sens donné à ce que l'on vit. Ainsi la spiritualité inclut toutes les

(42)

croyances des êtres, selon leur propre perception, toutes aussi importantes et crédibles les tmes que les autres. Nous nous attardons dans notre pratique de travailleuse sociale à aider les gens à clarifier ce qu'ils veulent réaliser dans leur vie, ce qui est important à leurs yeux, ce qui les motive profondément et aussi sur qui ils comptent pour avancer sur leur chemin. Dans la quarantaine, le chemin devient pour nous tout aussi important que le but à atteindre et même plus important car nous sommes

toujours en chemin. Une fois un but atteint, un nouveau se dessine à l'horizon et ainsi va la vie. Donc pour nous, le sens donné à la vie évolue dans le temps selon les expériences vécues par chacune et chacun. Nous croyons que seule chaque personne connaît le sens qu'elle donne à sa vie. C'est la seule à détenir la vérité à ce sujet. Personne ne peut juger du bien-fondé du sens donné à la vie par chaque personne, car seme celle-ci doit réaliser ce à quoi elle aspire et ainsi progresser sur son chemin bien original. Toutes et tous nous pouvons nous enrichir des visions de chacune et chacun mais non les dénigrer.

Husserl (1970) précise que l'approche phénoménologique permet également d'élargir les découvertes faites à l'ensemble de la population car nous sommes tous interreliés et ce que nous vivons nous affecte les uns, les autres. Cependant, on ne peut prétendre que ces découvertes correspondent à la réalité de chaque personne, néanmoins, eUes nous donnent des pistes de réflexion fort intéressantes.

(43)

3.1 VécbantiUm:mage

L'organisme d'Indemnisation au,"'( victimes d'actes criminels (I.V.A.C) nous a permis de mener notre recherche auprès de sa clientèle après en avoir évalué la pertinence. Pour ce faire, nous lui avons fait part des objectifs de recherche et de la façon dont elle serait présentée à la clientèle. Nous avons eu également une conversation téléphonique avec le chef du service de réadaptation, et ce, à sa

demande.

n

désirait s'assurer que les femmes ne seraient pas re-victimisées par cette recherche comme cela avait été le cas lors de recherches menées auparavant.

n

a été rassuré par nos informations.

Notre corpus empirique est composé de quatre femmes qui ont été violées et sont en voie de rétablissement. Toutes les quatre ont été victimes de viol. Ceci nous a permis de former un corpus plus homogène car il existe plusieurs types d'agression sexuelle. La nature de l'agression sexuelle influence directement la gravité de l'impact ressenti par la victime. Nous souhaitions que les femmes de notre corpus aient sublun degré similaire de violence, mais l'une d'entre eUes a été victime de tentative de meurtre. De plus, nous souhaitions éliminer au départ, les femmes ayant des antécédents psychiatriques personnels ou familiaux, une histoire d'abus physique ou sexuel dans l'enfance ou l'adolescence et enfin celles ayant subi un traumatisme antérieur. Mais ITY.A.C. nous a fuit part qu'Us ne connaissaient pas toute l 'histoire des femmes et donc ne pouvaient nous garantir ces derniers points. Nous n'avons pas jugé bon de questionner les femmes à ce sujet bien que leurs récits nous éclairent parfois.

(44)

Précisons que l'I.YAC. se conforme à la loi C-127 de 1983 qui fait référence aux agressions sexuelles dans le sens large. Cette loi ne définit pas la nature de l'agression sexuelle, eUe précise cependant la gravité de l'agression sexuelle selon le degré de violence subi par la victime. C'est dire que la formation de notre corpus demandait aux conseillers de l'I.YAC. une recherche plus approfondie de leurs dossiers afin de vérifier quelles femmes avaient été violées; ce qu'ils ont fait. Fait surprenant selon eux, ils n'ont trouvé dans leurs dossiers ouverts, que quelques femmes qui avaient été victimes de viol et qui étaient en bonne voie de rétablissement. Ceci est essentiel pour notre recherche puisque nous questionnons l'impact sur le rétablissement. Comme il était hors de question pour ITYAC. de faire une recherche dans leurs archives, nous leur avons demandé si nous pouvions faire appel à

d'anciennes clientes afin de les inviter à participer à cette recherche, ceci afin de compléter notre corpus. LTYAC. a acquiescé à notre requête sans difficulté. Finalement, notre corpus comprenait une participante invitée directement par 1'1V.AC. et trois de nos anciennes clientes.

3.2 La collecte de données

Afin de recueillir tomes les informations nécessaires pour notre recherche, nous avons choisi l'entrevue semi-dirigée car comme le mentionne Lorraine Savoie-Zajc :

(45)

L'entrevue semi-dirigée consiste en une intç:raction verbale animée de façon souple par le chercheur. Celui-ci se laissera guider par le flux de l'entrevue dans le but d'aborder, sur un mode qui ressemble à celui de la conversation, les thèmes généraux sur lesquels il souhaite entendre le répondant, permettant ainsi de dégager une

compréhension riche du phénomène à l'étude (Gauthier, 1999, p. 266).

Bien avant la première rencontre, chaque participante a reçu la lettre d'invitation à la recherche et le formulaire de consentement tels que présentés dans les appendices A et B. Nous avons fait deux entrevues avec chaque participante. La première était d'une durée d'une heure et demie et la seconde d'environ une heure. Les entrevues ont été précédées d'un contact téléphonique où nous décidions de

r

endroit qui convenait le mieux à chaque participante. Lors de la première entrevue nous avons repris le texte de la lettre d'invitation afin de nous assurer que nos objectifs étaient bien clairs pour la participante. Puis nous avons fait la lecture du formulaire de consentement à la recherche qui était ensuite signé par nous deux. Nous avons débuté l'entrevue par des questions démographiques ceci afin de permettre à la participante de se sentir plus a ]' aise avec l'enregistrement, avant que nous ne posions les questions essentielles à la recherche. Puis, nous avons suivi le déroulement de l'entrevue tel que présenté à l'appendice C dans le schéma des entrevues.

À la suite de chaque entrevue, et ce aussitôt que possible, nous avons pris soin de noter nos observations concernant le déroulement de l'entrevue, le confort de la participante, sa capacité d'expression et le climat de

r

entrevue. Pour mieux nous préparer à la seconde entrevue, nous avons écouté la bande

d'enregistrement de la première entrevue et avons noté les éléments importants et les questions que nous voulions éclaircir afin de bien comprendre les propos de chacune. C'est ainsi qu'après un court accueil, débutait notre seconde entrevue. Chaque

(46)

question était éclaircie et chaque élément retenu par nous, était vérifié tel que présenté dans le schéma des entrevues.

n

nous apparaît pertinent de noter que la vérification des thèmes soulevés dans d'autres recherches nous a permis parfois, de découvrir des

éléments du sens donné à la vie qui se révélaient essentiels pour les participantes mais qu'eUes n'avaient pas abordé spontanément lors de la première entrevue, notamment des aspects de leurs valeurs spirituelles pour Madeleine et Dominique. Puis, nous avons dactylographié le verbatim complet et précis de chaque entrevue et avons noté lorsque requis, l'intonation de voix qui se modifiait. Il va sans dire que cette étape a nécessité beaucoup de temps mais nous a permis de plonger dans l'univers de chaque participante ce qui en a facilité l'analyse. Enfin, nous avons également noté toutes nos réflexions tout au long du processus de collecte de données, sans censurer nos idées, suivant ainsi les conseils de Bogdan et Biklen (1982) et de Lofland (1995).

3.3 L'analyse des données

Les commentaires de Weber (1986) nous ont inspirées tout au long de l'analyse. Ainsi nous avons tenté de ne pas abuser de notre pouvoir

d'intervieweures et de ne pas trahir les participantes dans leurs propos et dans les observations inhérentes aux entrevues, en indiquant nos pensées et nos comportements respectifs, et en prenant soin de bien résumer leurs discours dans les récits. Nous avons retenu et appliqué les quatre étapes identifiées par Giorgi (1988) propres à la recherche phénoménologique.

Références

Documents relatifs

[r]

[r]

[r]

[r]

[r]

[r]

[r]

Voilà  pourquoi  les  éducateurs,  psychologues,  écrivains,  artistes,  enseignants   spirituels  délivrent  des  messages  et  des  connaissances