• Aucun résultat trouvé

La diffusion des figurines de terre cuite chypriotes en Méditerranée orientale à l'époque archaïque

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "La diffusion des figurines de terre cuite chypriotes en Méditerranée orientale à l'époque archaïque"

Copied!
11
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: hal-01501419

https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-01501419

Submitted on 10 Apr 2017

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Méditerranée orientale à l’époque archaïque

Sabine Fourrier

To cite this version:

Sabine Fourrier. La diffusion des figurines de terre cuite chypriotes en Méditerranée orientale à l’époque archaïque. Figurines de terre cuite en Méditerranée grecque et romaine, 2007, Izmir, Turquie. pp.135-144. �hal-01501419�

(2)

La diffusion des figurines de terre cuite chypriotes

en Méditerranée orientale à l’époque archaïque

Sabine Fourrier CNRS, Hisoma UMR 5189 (CNRS, Lyon 2), Maison de l’Orient et de la Méditerranée – Jean Pouilloux, Lyon, France

RÉSUMÉ Entre le milieu du viie et le milieu du vie s. av. J.-C., des figurines chypriotes sont importées en grand nombre en Méditerranée orientale grecque. Quel que soit leur lieu de décou-verte, tous les lots entrent dans les mêmes groupes de production. L’étude de ces derniers montre qu’il s’agit, pour l’essentiel, de figurines d’origine salaminienne, réalisées dans des techniques variées : modelage en plein, et moulage en plein et en creux. Ces œuvres, déposées dans des sanctuaires, sont consacrées par des Grecs. Leur diffusion, loin d’être aléatoire, suit des réseaux d’acheminement, sans doute tenus par des Grecs de l’Est.

mots clefs : Chypre archaïque, Méditerranée orientale, groupe de production, diffusion, sanctuaire, réseau. SUMMARY The Diffusion of Cypriote Terracotta Figurines through the Eastern Mediterranean during the

Archaic Period

Between the 7th and 6th centuries BC, a great number of Cypriote figurines were imported to the Greek Eastern Mediterranean. Whatever their place of discovery, all these figurines belong to the same production groups. The study reveals their mainly Salaminian origin. They were manufactured in a varieties of techniques: hand-modeling and casting, solid and hollow. These figurines, deposited in sanctuaries, were dedicated by Greeks. Their diffusion, far from being random, follows East Greek transportation networks.

keywords: Archaic Cyprus, Eastern Mediterranean, production-groups, diffusion, sanctuary, transportation network.

(3)

Au cours de la seconde moitié du viie et de la première moitié du vie s. av. J.-C., des figurines

de terre cuite chypriotes sont consacrées en grand nombre dans des sanctuaires grecs de Méditerranée orientale1. Tous les lots de trouvailles, quelle que soit leur provenance,

partagent un faisceau de points communs, qui indiquent qu’ils sont issus d’un même réseau de production et de diffusion.

Il s’agit, tout d’abord, d’importations de masse (fig.  1)2. Si les découvertes varient en

quantités absolues d’un site à l’autre, elles ont partout la même importance proportionnelle : les figurines chypriotes sont nombreuses, parfois même plus nombreuses que les productions grecques contemporaines. Par ailleurs, ces figurines, qui semblent avoir rarement fait l’objet d’imitations locales3, sont importées pendant une période relativement brève, qui n’excède pas

un siècle. Elles disparaissent brutalement, partout, vers le milieu du vie s. av. J.-C. Dans tous

les sanctuaires où elles sont consacrées, les figurines chypriotes sont associées à des orientalia,

notamment de petites sculptures de calcaire de type chypriote, dont une partie, le groupe dit de « style mixte » ou « chypro-ionien », témoigne d’une production spécifique, à mon avis une production chypriote pour l’exportation4. Enfin, même s’il y a des variations dans leur

compo-sition, tous les lots de figurines chypriotes sont attribuables aux mêmes centres de production, ce qui invite à considérer que leur diffusion suit les mêmes réseaux d’acheminement.

1. 

Les groupes de production

L’identification « chypriote » proposée depuis longtemps, en particulier depuis la publi-cation magistrale des petits objets de Lindos par Blinkenberg5, n’est aujourd’hui pas plus

1. Hermary 1991 ; Sørensen 1991 ; Fourrier 2001.

2. Chios : au moins 12 figurines (Boardman 1967). Cnide : au moins 90 figurines (les découvertes issues de fouilles anciennes ont été dispersées, à Laon, Amsterdam, Berlin, Istanbul et Saint-Pétersbourg [voir notamment Hermary 1990] ; le sanctuaire d’Emecik a fait l’objet d’explorations récentes [en particulier, Berges, Tuna 2001 ; les figurines de terre cuite ont été publiées par Kleibl 2006]). Délos : 24 figurines (Fourrier 1999). Égine : 7 fragments (Furtwängler 1906 et Margreiter 1988). Éphèse : 5 frag-ments (Muss 2007b ; voir aussi la contribution de M. Dewailly, U. Muss dans le vol. II). Érythrées : au moins 1 figurine (Akurgal 1993). Milet : 592 fragments (Henke 2005 et Henke 2009). Naucratis : au moins 7 figurines (la plupart illustrée par Petrie 1896). Rhodes, Camiros : 12 figurines (voir notamment Jacopi 1933) ; Ialysos : 85 figurines (Di Vita 1990) ; Lindos : 240 fragments (Blinkenberg 1931 et Sørensen 1991) ; Vroulia : 2 figurines (Kinch 1914). Samos : 439 fragments (la plupart des figurines sont publiées par Schmidt 1968). Smyrne : 1 statuette publiée (Gjerstad 1978) ; une tête moulée en creux, inédite, est exposée au musée archéologique d’Izmir.

3. Une terre cuite moulée découverte à Éphèse ferait exception (voir M. Dewailly, U. Muss dans le vol. II). En outre, d’après les résultats d’analyses physico-chimiques, plusieurs figurines de Samos seraient des imitations locales. Parmi ces dernières, seuls les personnages de type « assyrien » (« Mantelmann » selon la typolo-gie allemande) forment une série cohérente (Karageorghis et al. 2009 ; voir mon compte rendu critique : Fourrier  2010). Certains exemples de ce type, découverts à Milet, seraient également de production locale (Henke 2009, p. 208). En revanche, toutes les figurines analysées de Cnide paraissent de production chypriote, même les personnages de type « assyrien », et il semble qu’elles ont toutes été fabriquées à partir de la même argile, dont la provenance précise à Chypre n’est pas connue (Kleibl 2006, p. 154-156).

4. Fourrier  2001. Des analyses ont montré que le calcaire des statuettes de ce groupe était chypriote  : Kourou et al. 2002.

(4)

LA DIFFUSION DES FIGURINES DE TERRE CUITE CHYPRIOTES EN MÉDITERRANÉE ORIENTALE À L’ÉPOQUE ARCHAÏQUE 137

satisfaisante qu’une identification « grecque » pour une œuvre de petite plastique samienne ou milésienne par exemple. L’île de Chypre est, à l’époque archaïque, divisée en un certain nombre de royaumes distincts, que caractérisent une civilisation matérielle et, notamment, des productions artisanales, céramiques et coroplastiques propres. G. Schmidt, dans sa publi-cation des trouvailles de Samos, et L. Wriedt Sørensen, en reprenant l’étude du lot lindien conservé à Copenhague, ont proposé des attributions plus précises6. Des recherches récentes

sur la coroplastie chypriote archaïque permettent désormais d’identifier plus sûrement l’origine de ces productions7.

1.1. Les productions de Salamine

Les productions de Salamine sont les plus nombreuses et les mieux diffusées. Elles sont attestées à Chios, Cnide, Délos, Égine, Éphèse, Érythrées, Milet, Rhodes, Samos, Smyrne et Naucratis. Elles présentent une grande variété typologique et technique, depuis de petites figurines modelées en plein jusqu’à des statuettes moulées en creux.

1.1.1. Les figurines modelées en plein

Les figurines, qui n’excèdent pas une vingtaine de centimètres de haut, sont réalisées à l’aide d’un boudin de pâte qui est pincé et plié, de manière à obtenir la forme souhaitée (fig. 2)8. Le

recours à des éléments modelés à part et rapportés est rare. Ce groupe, illustré par les riches trouvailles des nécropoles de Salamine, est bien documenté dans le monde grec par les décou-vertes de Cnide, Délos, Rhodes (Lindos) et Samos.

1.1.2. Les figurines moulées en plaquette

Seul l’avant de la figurine est imprimé dans un moule, l’arrière étant lissé ou, dans le cas des figurines les plus grandes, fait d’une feuille de pâte placée dans une simple forme puis ajustée sur le contour. Dans certains cas, notamment pour les représentations de personnages en char, seul le visage est moulé, le reste du personnage étant modelé. Plusieurs sous-groupes stylis-tiques peuvent être distingués dans la production salaminienne. La plupart d’entre eux sont attestés parmi les découvertes du monde grec.

Le premier comprend les personnages de type «  assyrien9  ». Le type le plus fréquent

est celui du guerrier, représenté debout, à cheval, ou encore en groupe sur un char. C’est à ce type qu’il faut rattacher les nombreuses trouvailles de chevaux harnachés, montés ou attelés. Les personnages, tête nue ou coiffés d’un bonnet pointu, barbus ou imberbes, ont des visages ronds, aux grands yeux effilés vers les tempes, un nez au bout retroussé et des lèvres

6. Schmidt 1968 souligne les liens entre les trouvailles samiennes et celles d’Arsos, petit sanctuaire extra-urbain du royaume de Salamine à Chypre. Sørensen  1991 insiste sur l’importance des productions salaminiennes.

7. Fourrier 2007.

8. Pour la définition de ce groupe, voir Fourrier 2007, p. 25-26.

9. Cette appellation, commode mais impropre, apparaît dans la publication des terres cuites des fouilles fran-çaises de Salamine (Monloup 1984, p. 173-179). Ce sont les groupes Salamine-B.1 et Salamine-B.2 de Fourrier 2007, p. 26.

(5)

charnues (fig. 3). Des exemplaires ont été recueillis à Chios, Cnide, Délos, Érythrées, Milet, Rhodes (Camiros, Ialysos et Lindos), Samos et Naucratis. On en trouve également sur la côte levantine10.

Le deuxième sous-groupe, s’il n’est pas inconnu à Salamine même, est surtout illustré par les trouvailles du sanctuaire extra-urbain d’Arsos11. Le type le plus fréquent est, cette fois,

féminin  : les personnages, debout, sont vêtus d’une tunique collante et richement parés (fig.  4). Là encore, les lieux de découverte sont nombreux  : Chios, Cnide, Délos, Milet, Rhodes (Camiros, Ialysos et Lindos), Samos et Naucratis.

Un dernier sous-groupe salaminien, rare parmi les trouvailles de Chypre même12, est

documenté à Délos, Éphèse, Milet, Rhodes (Lindos) et Samos (fig. 5). Les figurines, moulées en plaquette pleine, ont les deux bras le long du corps et ne portent aucun bijou. Le visage, s’il garde sa forme ronde, a des traits plus accusés, qu’accentuent notamment les plis, marqués, des commissures des lèvres.

1.1.3. Les statuettes moulées en creux

Les œuvres – certaines atteignent la taille naturelle –, sont fabriquées à l’aide de différents moules partiels, les éléments du personnage étant assemblés après cuisson. On peut distinguer des sous-groupes qui partagent les mêmes traits stylistiques.

Parmi les statuettes du premier sous-groupe13, attesté à Chios, Cnide, Milet, Rhodes

(Ialysos et Lindos), Samos et Smyrne, on retiendra en particulier les représentations de person-nages masculins, debout, portant une victime figurée en miniature, contre la poitrine (fig. 6). C’est dans le sous-groupe suivant14 que les caractéristiques du style salaminien trouvent

leur plus belle expression : les têtes ont des formes pleines, aux joues rondes, au nez retroussé, aux yeux effilés vers les tempes, souvent soulignés, et, lorsque la peinture est conservée, d’épaisses paupières de couleur sombre (fig. 7). Des exemplaires ont été mis au jour à Chios, Cnide, Égine, Éphèse, Rhodes (Camiros) et Samos.

1.2. Autres productions chypriotes

Les productions autres que celles de Salamine sont en nombre très réduit et leur diffusion est, pour l’essentiel, limitée aux grands lieux de trouvailles de terres cuites chypriotes que sont Rhodes et Samos. À Rhodes comme à Samos, les trouvailles sont isolées par rapport à la masse des importations salaminiennes.

1.2.1. Les productions d’Idalion

Une figurine d’Ialysos et cinq fragments de Samos représentent des personnages féminins à ceinture frangée, qui me paraissent issus d’un atelier du royaume d’Idalion (fig. 8)15.

10. Crouwel 1991.

11. Groupe Salamine/Arsos-B.4 (Fourrier 2007, p. 35).

12. Groupe Salamine/Arsos-B.6 (Fourrier 2007, p. 35).

13. Groupe Salamine-C.2 (Fourrier 2007, p. 27).

14. Groupe Salamine-C.3 (Fourrier 2007, p. 27). Voir également Hermary 1991, p. 143-146.

(6)

LA DIFFUSION DES FIGURINES DE TERRE CUITE CHYPRIOTES EN MÉDITERRANÉE ORIENTALE À L’ÉPOQUE ARCHAÏQUE 139

1.2.2. Les productions de Kition (?)

Il n’est pas certain que les figurines réalisées en technique mixte (le corps des personnages est monté au tour, la tête modelée sur tenon, le visage imprimé dans un moule), découvertes à Camiros et à Samos, soient issues des ateliers de Kition (fig. 9). Certes, ce groupe y est commun16, mais il s’agit d’une production plus largement levantine, bien attestée sur le

continent syro-palestinien, et l’on ne peut donc pas exclure une provenance phénicienne pour les lots découverts en Grèce.

1.2.3. Les productions de l’Ouest de Chypre

Plusieurs centres producteurs, partageant un même goût pour le modelage en creux, sont actifs dans l’Ouest de Chypre. Leurs productions ne sont guère diffusées hors de l’île. Je serais tentée d’attribuer à un atelier de Paphos une tête recueillie dans le temple d’Athéna à Milet17.

La plupart des autres terres cuites, découvertes à Rhodes (Lindos et Vroulia) et à Samos, sont proches de figurines fabriquées dans le royaume de Soloi. C’est notamment le cas des repré-sentations de personnages masculins aux traits sévères, modelés dans la pâte (fig. 10)18.

Il faut enfin mentionner des représentations de béliers et de taureaux modelées en creux. Ces terres cuites sont associées à des figurines sûrement chypriotes à Cnide, Délos, Rhodes (Lindos) et Samos, mais leur centre producteur à Chypre, si telle est bien leur origine, reste difficile à définir.

2. 

Les réseaux de diffusion

2.1. Les contextes de découverte

Les figurines de terre cuite chypriote mises au jour dans le monde grec sont des offrandes de sanctuaires. Seules exceptions : à Milet, quatre terres cuites proviennent du quartier d’habi-tation de Kalabaktepe19 ; à Camiros de Rhodes, une figurine moulée avait été déposée dans

une tombe de Papa-tis-Loures20.

Tous ces sanctuaires ont livré une riche moisson d’orientalia. Il est remarquable qu’à

Chios, les terres cuites chypriotes proviennent, à une exception près, du sanctuaire du port, riche d’importations orientales, et non du sanctuaire d’Athéna, sur la colline du Prophète Élie, où prédominent les productions locales21. À Délos, les kypriaka ont été

majoritai-rement recueillis, non pas dans le sanctuaire d’Apollon, où les offrandes cycladiques sont les plus nombreuses, mais dans des sanctuaires périphériques, comme l’Héraion ou le pseudo-Dioscourion22.

16. Yon, Caubet 1989, p. 29-31.

17. Kleiner 1966, pl. XIII, fig. 18. La tête entre dans le groupe Paphos-C.1 (Fourrier 2007, p. 79-80).

18. Groupe Soloi/Agia Eirini-B.2 (Fourrier 2007, p. 90).

19. Henke 2005, p. 57, cat. nos 1-2 ; p. 63, cat. no  5 ; p. 68, cat. no 26.

20. Jacopi 1933, p. 90, fig. 102.

21. Boardman 1967.

(7)

Certaines statuettes chypriotes occupaient une place de choix dans les sanctuaires, exposées dans la cella du temple, comme à l’Héraion de Délos23 ou dans le temple d’Athéna à Milet24.

Dans le temple d’Athéna à Smyrne, les pieds d’une statuette chypriote moulée en creux ont été retrouvés en place, contre le mur Sud, tandis que divers fragments étaient éparpillés dans la couche de destruction du bâtiment25.

Il est toutefois hasardeux de supposer une relation particulière entre le type des figurines chypriotes et la divinité à laquelle elles étaient consacrées. Les mêmes groupes sont attestés partout, quelle que soit la divinité maîtresse du sanctuaire : Athéna à Égine, Camiros, Ialysos, Lindos, Milet ou Smyrne ; Artémis à Éphèse ; Héra, à Délos ou Samos ; Aphrodite à Milet ; mais aussi Apollon à Cnide, Naucratis et sans doute Égine26.

2.2. Les dédicants et les réseaux de diffusion

Il est peu probable que des pèlerins chypriotes soient à l’origine des offrandes de terres cuites chypriotes dans les sanctuaires grecs  : le nombre des figurines, l’absence, à l’exception de Rhodes et de Naucratis, d’autres témoignages de relations suivies avec Chypre et les rares inscriptions, toujours en alphabet grec local, que portent les sculptures de calcaire de type chypriote27 invitent à rejeter cette hypothèse.

Comme les autres orientalia, les terres cuites chypriotes étaient consacrées par les citoyens

des cités sur le territoire desquelles étaient établis les sanctuaires. Il est probable que les statuettes moulées, qui sont surreprésentées parmi les trouvailles du monde grec par rapport à leur importance dans la production chypriote, ont séduit les dédicants, à une époque où les ateliers locaux ne fabriquaient pas d’œuvres aussi virtuoses.

Il n’est pas nécessaire, et il est sans doute faux, de supposer des relations directes entre Chypre et chacun des sites de Méditerranée orientale grecque qui a livré des kypriaka.

Plusieurs lieux, notamment Rhodes, ont pu jouer le rôle de centre de redistribution. C’est sans doute aussi le cas de l’emporion de Naucratis. De fait, plusieurs des cités grecques qui ont

livré une riche moisson de figurines de terre cuite chypriotes étaient actives à Naucratis : selon Hérodote (II 178), Égine, Samos et Milet y possédaient chacune un sanctuaire indépendant ; Chios, Rhodes et Cnide participaient à l’Hellénion.

La diffusion des terres cuites chypriotes en Méditerranée orientale grecque suivait donc un réseau tenu par des Grecs de l’Est : cela apparaît clairement à la lecture de la carte répertoriant les lieux de trouvaille (fig. 1) ; cela apparaît également dans le détail topographique des consécrations. C’est ce que j’ai essayé de montrer à propos du contexte délien, en suggérant que les sanctuaires périphériques de l’Héraion et du pseudo-Dioscourion, riches en offrandes de petite plastique chypriote, étaient des sanctuaires fréquentés par des Ioniens, à la différence du grand sanctuaire d’Apollon, de fréquentation sinon exclusivement, du moins majoritairement cycladique28.

23. Fourrier 1999, p. 382.

24. Mallwitz, Schiering 1968, p. 147.

25. Cook, Nicholls 1998, p. 24-27.

26. Pour l’identification de la divinité à laquelle était consacré le sanctuaire de Kolonna, voir Wurster 1974, p. 6.

27. Fourrier 2001, p. 42.

(8)

LA DIFFUSION DES FIGURINES DE TERRE CUITE CHYPRIOTES EN MÉDITERRANÉE ORIENTALE À L’ÉPOQUE ARCHAÏQUE 141

Vers le milieu du vie s. av. J.-C., les consécrations de figurines chypriotes dans les sanctuaires

grecs cessent brutalement. Un changement de mode ou de goût rend difficilement compte de la soudaineté et de l’extension de ce phénomène. L’une des hypothèses possibles, la plus séduisante, est que l’avancée perse en Asie Mineure, définitivement acquise avec la prise de Sardes, et qui entraîne la destruction de cités et l’émigration de populations, déstabilise les réseaux d’échanges ioniens29. La diffusion des figurines de terre cuite chypriotes en Grèce ne

peut pas être étudiée sans prêter attention aux dédicants, qui consacrent les œuvres, et aux réseaux marchands, qui les acheminent. C’est là sans doute une vue peu compatible avec une approche « primitiviste » de l’économie grecque archaïque, qui ne veut charger les bateaux que de matières premières, grains, vin ou huile. Pourtant, le grand nombre de petites plastiques chypriotes mises au jour dans le monde grec, la cohérence des lots, quel que soit le lieu de découverte, montrent que des objets manufacturés de ce type, à destination votive, étaient régulièrement transportés et non pas soumis aux aléas de leur usage comme lest. Il y avait des réseaux de distribution des produits de l’artisanat parce qu’il existait un « marché », aussi anachronique ce terme puisse-t-il paraître. Les offrandes votives, et notamment les orientalia,

avaient une importance vitale dans le fonctionnement des cités grecques archaïques. Elles étaient l’un des moyens de cette émulation, cette compétition de prestige à laquelle se livraient les élites dans les cités, tout particulièrement en Grèce de l’Est30.

29. Gras 1995, p. 165.

(9)

Fig. 1.  – Carte de la Méditerranée orientale : lieux de trouvailles des fi gurines en terre cuite chypriotes (DAO : A. Flammin, HISOMA/université de Lyon 2).

Fig. 2.  –  a . Figurine de Délos, inv. A 2965 (cl. EFA, Ph. Collet) ; b . Figurine de Salamine, nécropole de Cellarka T. 29.8-T. 29.9 (cl. Département des Antiquités de Chypre).

Fig.  3.   –  a . Figurine de Délos, inv.  A  861 (cl. EFA, Ph.  Collet) ; b . Figurine de Salamine, fouilles françaises, inv. Sal.4779 = Tc1751 (cl. Mission française de Salamine).

2a  b a b 0 5 cm 0 2 cm 0 2 cm 0 2 cm

(10)

LA DIFFUSION DES FIGURINES DE TERRE CUITE CHYPRIOTES EN MÉDITERRANÉE ORIENTALE À L’ÉPOQUE ARCHAÏQUE 143

Fig. 4.  –  a . Figurine de Samos, inv. T 635-T 638 (cl. DAI Athènes, E. Feiler) ; b . Figurine de Salamine, Cyprus Museum inv. 1958/VI-9/1 (cl. Département des Antiquités de Chypre).

Fig. 5.  –  a . Figurine de Délos, inv. A 854 (cl. EFA, Ph. Collet); b . Figurine d’Arsos, Cyprus Museum inv. C 693 (cl. Département des Antiquités de Chypre).

Fig.  6.   –  a . Statuette de Samos, inv.  T  2602 (cl. DAI Athènes, G.  Hellner) ; b . Statuette d’Agios Georgios-Spatharikou , Cyprus Museum inv. 1938/XI-11/1b (cl. Département des Antiquités de Chypre).

Fig. 7.  –  a . Tête de Samos, inv. T 3834 (cl. DAI Athènes, G. Hellner) ; b . Tête de Salamine- Toumba , Fitzwilliam Museum inv. GR.22.1891 (cl. Fitzwilliam Museum, Cambridge).

a a b b a a b b 0 2 cm 0 2 cm 0 2 cm 0 2 cm 0 5 cm

(11)

Fig. 8.  –  a . Fragment de Samos, inv. T 345 (cl. DAI Athènes, E. Feiler) ; b . Figurine d’Arsos, Larnaca Museum inv. n o  690 (cl. Département des Antiquités de Chypre).

Fig. 9.  –  a . Figurine de Samos, inv. T 1799 (cl. DAI Athènes, E. Feiler) ; b . Figurine de Kition- Kamilarga , British Museum inv. 1905.10-19.8 (cl. British Museum).

Fig. 10.  –  a . Tête de Samos, inv. T 386 (cl. DAI Athènes, H. Wagner) ; b . Tête d’Agia Eirini, Medelhavsmuseet, Stockholm inv. A.I. Suppl. n o  2794 (cl. Medelhavsmuseet, O. Kaneberg).

a a

a

b b

Figure

Fig. 1.  – Carte de la Méditerranée orientale : lieux de trouvailles des fi gurines en terre cuite chypriotes (DAO :  A. Flammin, HISOMA/université de Lyon 2).

Références

Documents relatifs

Stéphane Joly et Jérôme Bouillon, « Un four de terre cuite architecturale de la fin du Moyen Âge ou de l’époque moderne à Gournay (Centre, Indre) », Revue archéologique du

La technologie des terres cuites dépend de la présence d’argile.. L’état naturel de l’argile

Les quatre échantillons réalisés sur la tête masculine révèlent une stratigraphie homogène : une préparation à base de calcite renfermant un peu de terre (notamment dans le

Outre de quelques décors géométriques (croisillons et damiers), dont certains sont combinés avec des fl eurs de lotus stylisées (British Museum C 850 = CVA Royaume-Uni 2, pl. 12,

Si vous n'avez pas de figurines, vous pouvez utiliser des petits objets sur lesquels vous collerez des yeux en papier pour donner

De fait, la forme générale de ces amphores (notamment, outre la lèvre repliée, le col haut), la technique du décor (qui marie une technique Bichr. en noir et rouge, et non pas noir

The second goal of the framework is to pro- duce a complete synchronous representation of the story: 3D position and orientation of figurines, position of the decor elements and

Le fait est que 34 ans après l’intervention militaire turque de 1974 il est désormais logique de penser que la quasi-totalité des 1619 Chypriotes grecs disparus ne sont plus en vie