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A l'occasion d'un trentenaire : sur l'interprétation des figurations anthropomorphes du paléolithique supérieur

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A l’occasion d’un trentenaire : sur l’interprétation des

figurations anthropomorphes du paléolithique supérieur

A. Darpeix

To cite this version:

A. Darpeix. A l’occasion d’un trentenaire : sur l’interprétation des figurations anthropomorphes

du paléolithique supérieur. Bulletin de la Société historique et archéologique du Périgord, Société

historique et archéologique du Périgord, 1939, pp.5-22. �halshs-00776221�

(2)

1788

A. DARPEIX

lliHIDilE DE LA SOCIIh~ lliSTOIUQUE Er ARCII~OLOUIQU& OU PERIGORD

~

L'OCCASION

D'U~ TRE~TENAIHE :

SUR L'INTERPRÉTATION

DES

FIGURATIONS ANTHROPOMORPHES

PÉRIGUEUX

Imprimerie RIBES. 14, rue Antoine·Gadaud. IQ39

.

1

(3)

A L10CCASION D'UN TRENTE:NAtRE! ~

SUR L'INTERPRÉTA

TI

ON

DE

S

F

I

GURATIONS

ANTHROPOMORPHES

DU PALÉOLITHIQUE

SUPÉRIEUR

\

Millan Brun Anne-Lise

Signature numérique de Millan Brun Anne-Lise DN : cn=Millan Brun Anne-Lise, o=UMR 7194, ou=Bibliotheque, email=biph@mnhn.fr, c=FR Date : 2013.01.15 11:28:35 +01'00'

(4)

1 ""'u ' • '•"""""

Éxtrait du Bulletin de la Société bistol'ique ct archéologique du Périgord

-A.

DARPEIX

ltEMDRE DE LA SOCilhK HISTORIQUE ET ARCIIIÎOLOGJQUE DU PÉRIGORD

A t'OCCASION D

'UN

TRENTENAIBE

:

SUR L

J

INTERPRÉTATION

DES

FIGURATIONS ANTHR-OPOMORPHES

DU

PALÉOLITHIQUE

SUPÉRIEUR

!>~R

i

GUEUX

imprimerie R1szs, 14, rue Antoine·Gadaud.

(5)

'

A r:ocCAS[ON D'UN TIŒNTENAiltE :

SUH L'INTERPRÉTATION DES FIGURATIONS ANTI-IROPO.MORPHES

DU PALÉOLITHIQUE SUPÉRIEUR

Il y a trente ans 1, notre regretté collègue, mon beau-père, P. Bourrinet, recueillait à Teyjat (Dordogne), au cours de ses fouilles de l'Abri Mège, un

«

hàlon de commandement>> 2 orné de figures animales ct de personnages semi-humains gravés. Cc remarquable objet, découvert clans un niveau

magdalénien qui avait déjà donné un hel outillage en pierre, en os, en corne, des œuvres d'art diverses, des harpons à

une seule rangée Ide barbelures, présente un double inlérèt archéologique : d'abord, par la perfection de gravures qui montrent l'évolution artistique lrès avancée des hommes

magdaléniens ct leur extrèmc habileté de graveurs; ensuite,

par certaines représentations, de caractère étrange, qui po-sent de bien curieux et troublants problèmes relatifs à la vic

mentale de ces primitifs 3, En reprenant les excellentes observations et interprétations fa iles par P. Bourrin et et ses savants collaborateurs : le docteur Capilan, l'abbé Breuil, D. Peyrony, mon intention est de rappeler, à l'occasion du trentenaire de la mise au jour de cc très intéressapt bois de cerf troué ct orné, les circonstances de la découverte et de (1) Communication faite à la séance du jeudi 1er septembre 1938 de la S o-ciété historique et archéologique du Périgot·d, à l'occasion du trentenaire de

la découverte, par P. Bourrin et, du • bâton de commandement N de l'Jbri Mège,

à Teyjat (Dot·dogne). Dale de la découverte : !2 août 1908).

(2) En désignant ainsi ce bel objet énigmatique, nous ne faisons que nous

conformer à l'usage : mais de nombreuses hypothèses plus ou moins ingé -nieuses ont été pt·oposées relativement à l'emploi de ces bâtons pernés, en bois

de renne ou de cerf.

(3) L. Capilan, H. !lt·euil, P. Bourrinet, D. Peyrony: L'Abri ilfège, uno

station magd,,lénienne à Teyjat (Dordogne) (Revue de l'Ecole d'Anthropo-logie de Paris, !906, p. 196).

(6)

6

-rendre hommage au préhistorien consciencieux, habile et éclairé que fut Bourrinet, et à ses trois collnboratP.IJrs dont les interprétaticns, basées, en H)08, -.ur un petit nombre de faits, devaient, par la suite, recevoir la confirmatio11 de faits

nom·eaux 1. Je tenterai e.13Ulle de résumer ce C_itlÏ parait

acquis, en l'état actuel de nos connaissance< wt la signifi-cation de l'ar! figuré préhistorique, plus particulièn111ent Pll

ce qui concerne les

~ravures

ou représentations semi-h

umai-nes du paléolithique supérieur.

C'est le 12 aoùt 1908 que P. Bourrinet découvril à l'abri Mègc, à Teyjat, l'objet dont je présente un moulage (fig. 1). L'original est au musée des Amiquités Natwnales de

Saint-Germain-en-Laye. Mais d'e},.cellents moulages peuvent être

observés dans plusieurs musées de France, notamment à

Toulouse, aux Eyzies, à Périgueux, et dans des collections

particulières. Ces musées possèdent également le développ

e-ment de ce bàton, réalisé dans les ateliers de Saint-Germain, permettant de voir sur une seule face l'ensemble des figures

qui ornent la belle pièce (üg. 2).

Chose curieuse, è'est dans une partie de la couche

archéo-logique où les traces d'occupntion se raréfiaient et où les

récoltes ne paraissaient pas devoir ètre fructueuses, que

l'heureux inventeur découvrit l'andouiller de cerf élaphe

re-couvert de gravures. Avec de grandes précautions, il réussit

à l'extraire en parfait état. Seule, la pression d'une pierre avait provoqué la formation d'une contusion cupuliforme, visible vers le gros bout, au centre d'une gravure

représen-tant une tête de biche finement gravée.

Le fouilleur m'a souvent dit la grande émotion qu'il avail ressentie au moment de la découverte de la précieuse reli-que, sa crainte de la détériorer, les précautions minuti.euses prises pour l'exhumer, sa joie de J'obtenir intacte. Les pré

oc-cupations et l'émoi de P. Bourrinet furent tels que le soir de la découverte il en

«

oublia » de diner.

(1) L. C~pit~n,,ll. Breuil, P. BouJ•ril_lel, Pey1'0ny : Ohservations sur un b:ltun do commiJ.ndomont orno do ligures anima/os ct de personnages scmi~ humaiJJs (Rovuo de l'Ecolo d'Anthropologie de Paris, 1909, p. 62).

Fig. 4

Le bàton de l'abri Mège et son développem ent

(7)

7

-Ce bois de cerf élaphe, grand andouiller basilaire de

O

m

31

de longueur rectiligne, profondément raclé sur toute sa

sur-face, est percé de deux trous : l'un ovale, presque circulaire,

J'autre fusiforme. Le raclage, puis le polissage lrès soigné

du bois de cerf ont permis à l'artiste magdalénien de gra\·er

de nombreuses silhouelles très étudiées qui recouvrent

pres-que tout l'objet. On peut y remarquer une charmante el·d

é-licate tète de biche, un fuseau de trois serpents accolés, un

grand cheval au galop, un petit cheval incomplet, trois cygnes. Enfin, trois autres figures complètent la décoration.

Figures étranges, ne rappelant en rien le déjà vu, qui firent

écrire par l'auteur de la découverte à l'abbé Breuil : «Mo

n-sieur l'abbé, celte fois, je crois bien avoir trouvé le diable

dans l'abri

».

EL les trois figures furent, provisoirement, désignées sous le nom de « diabloli,ps ».

Cc sont ces trois gravures sur lesquelles je voudrais plus

particulièrement rappeler l'attention. Voici la description qu'en donnent les auteurs: «Elles sortent complètement de

l'ensemble des images auxquelles on est accoutumé; leur

authenticité ne laisse place à aucun doute, ct leur tracé pr

o-fond el net ne permet aucune incertitude dans la lecture des

silhonelles. Toutes trois sont composées d'une tète cornue à longues oreilles pointues, d'un cor·ps globuleux hérissé de poils, el de deux jambes seulement. Quelques variantes

existent bien dans le détail, mais sans aucune importance.

Le moins ~oigné est celui qui sc trouve placé au verso; le plus éLudié est situé sous la tète du cheval. La corne à cr

o-chet récurrent qui couronne chacune des têtes est celle du

chamois; le resle de la tète est moins caractérisé. Le

pre-mier semble avoir la gueule fendue comme un carnassier;

le second a un museau court comme celui d'un lièvre; Je

troisième en possède un, effilé comme celui du renard. Ces

détails n'ont probablement pas grande importance, non plus

que la figuration d'une corne unique, tandis que les de'ux oreilles sont représentées dans les trois individus. De la masse poilue du corps, peu de chose à dire, sinon qu'il ne

repose pas sur des pieds d'animaux, mais sur des jambe.s

(8)

8

-à ce sujet, puisqu'elles sont flgurées comme deux pointes

effilées sans aucune forme; mais il n'en est yas de même

pour les deux autres. Le plus pelil laisse lrès distinctement deviner les cuisses, le genou, les talons et les pieds : le mol

-let est peu renflé. L'altitude du personnage est celle du saut

ou de la danse à pieds joints. Dans Je troisième personnage, le poil descend jusqu'au genou, très saillant et arrondi· les

jambes sont grêles, mais les pieds sont très soignés cl

~or

­

lent, à l'extrémité, la représentation, parfaitement nclle, de quatre orteils. L'altitude est plus fléchie que ·dans la figure

précédente (fig. 3).

J?ig1tre 5

Les trois

«

diablotins » du bâton de commandement de l'abri Mège

Au moment

ct:

la d_écouvcrle, on pouvait seulement

rap-procller de ces cllablolms le bonhomme à tête d'ours dansant

d~ Mas d'Azil ~ et une silhouette étrange de Gourdan 2,

pu-bhés par E. PJClte; des croquis représentant des êtres hu

-mai.ns portant des tètes à museaux, observés par Cartailhac el Breuil à Allamira en 1902, el à Marsoulas; des figures an

-(:1) E. Piette. Gravuro du Mas d' Azil (Bulletin de la Société d'anthropo-logie do Paris, 1902).

(2) E. Pieue. 11ovuo Préhistorique, 1906, nP 1, fig. 2.

9 _.·

thropomorphes ou humaines de la caverne des Combarelles !,

Que représentaient ces gravures? S'agissait-il de caricatures

primitives? Etait-on en présence de rcprésénlalions d'ètres

imaginaires? L'artiste avait-il gravé des faces d'hommes

masquées? L'archéologie préhistorique, seule, n'était pas en

mesure de répondre ù ces questions. C'esl à l'elli.nographie que des termes de comparaison furent demandés. Ils

incli-nèrent les auteurs à penser qu'il convenait plutôt de retenir la troisième hypothèse que le docteur Capilan avait proposée dès les premières découvertes analogues faites dans les ca-vernes ornées. A l'appui de leur inlerprélalion, Capilan,

Breuil, Peyrony et Bourrinet citent de nombreux faits ellm o-graphiques : déguisements de chasse, déguisements

cérémo-niels observés chez plusieurs peuples sauvages,

Néo-Gui-néens, Bushmens, Esquimaux, Indiens d'Amérique du Nord,

Australiens. Ces faits sont d'ai!Teurs plus longuement

rap-portés, au cours de plusieurs chapitres, par Carlailhac et

Breuil dans la luxueuse publication: La Caveme d'Altamira,

à Sanlillane (Espagne). En conclusion, les auteurs pensent

que les diablotins de Teyjat établissent que les Magdaléniens connaissaient les déguisements de chasse ou les mascarades sacrées, que l'on veuille voir dans ces gravures des danseurs

masqués ou des êtres irréels.

C'est donc en sc fondant sut· les faits artistiques observés chez les Primitifs actuels, leurs déguisements, mascarades

et danses sacrées, que l'on a cru trouver la signification des troublantes figurations de silhouettes humaines à tètes d'ani~

maux des cavernes ou abris de J'âge dn Renne. Des décou~ vertes postérieures devaient singulièrement fortifier celle thèse. Avant de les rapporter, disons quelques mols sur

l'importance des représentations figurées au Paléolithique supérieur.

Une élude détaillée de l'art figuré à l'àgc du Renne nous enlraincrail beaucoup trop loin, Il nous faudrait analyser

· (1) Capitan, nreuil, Peyron~·· Cong1·ès lnlci·national d'Anthrop11logic, Mo. naco, 1906: Ji'igurcs anthi•opomorphcs ou humaines do la cavcrno des Com• b3relles (Dol'dogno),

(9)

- i

o

-ttne quantité de tra·vaux et de grandes monographies, parmi lesquels ceux de l'abbé Breuil figureraient au premier rang.

Depuis que, vers 1840, fut découvert dans la grotte de Cha

f-faud (Vienne), le premier objet d'art connu de l'âge du Renne,

- un os gravé sur lequel on distingue deux biches percées chacune d'une flèche à l'épaule 1, - el que l'importance et la qualité de rart quaternaire furent mises en relief par Edouard Lartet, dans l'article publié en 1864 par la Revue Archéologique, les découvertes se sont mullipliécs, qu'il

s'agisse d'objets mobiliers décorés ou d'abris ct de cavernes

ornés. Ces découvertes onl fait l'objet de travaux parmi l es-quels on pourrait notamment citer ceux de Lartet el Christy, Girod, Massénat, Pielte, F. Regnault, Daleau, G. Lalanne, de

Mortillet, Cartailhac, E. Passemard, Capitan, Breuil, P

ey-rony, Bourrinet, marquis de Vibraye, F. Delage, Norbert Casteret, Lémozi, Bardon, Bouyssonie, A. Viré, René de

Saint-Périer, Garrigou, comte Bégouen et ses fils, Oclobon, Alcalde del Hio, de Sauluola, H. Obcrmaier, Hernand

ez-Pacheco, elc ... , relatifs aux gisements el grolles ornées du Périgord, des Pyrénées el d'Espagne.

Ces nombreuses éludes onl montré un art puissamment original, largement diiTusé, qu'il s'agisse de gravures, de

peintures, de sculptures, de modelages. Certes, nos lroglo

-dylcs n'ont pas toujours réalisé des chefs-d'œuvre. Souvent,

on observe des essais malhabiles, des esquisses qui parai s-sent être faites par des débutants, des dessins où défauts de

perspective ou de forme apparaissent au premier coup d'œil,

1e

véritables pages de croquis où voisinent l'œuvre parfaite el l'ébauche, comme sur les galets calcaires recueillis dans

l'atelier d'art préhistorique de Limeuil2. Mais, à côté de ces

productions gauches, que de réalisations artistiques au trait habile, où les formes et les attitudes des animaux sont par

-faitement observées l Dans ces œuvres au surprenant r éa-lisme, le souci de la vérité, la sùrelé de la

t

ec

hniqu

~,

la

(i) Salomon Reinach. l1•·portoirc de l'Art ']Ua ternaire, 1913.

(2) Or L. Capitan et abbé J. flouyssouir. Un atelier d'art préhistoriqur, Limeuil: Son gisement à gravures .çur pierres do l'lige du Ronno.- Publi·

cations de l'Institut International d'Anlhropologio, Pm·is, 1924.

1 1

-sohriélé du tracé, la pureté du dessin, l'élégance des allil~ldes. le modelé et le fini des figures d'un galbe très pur, sontllldé-niables. Ils témoignent de la grande habileté manuelle des artistes de leur sens de l'observation, de leur excellente

;némoi;c visuelle, de leur parfaite connaissance de.s

formes~·

Oui, les chasseurs de rennes furent de grands artistes. Et Il

ne nous parait pas douteux que d'aussi remarquables résul

-tats furent l'aboutissement d'une lopgue période d'efforts et d'essais, tentés dans un but qu'il est très intéressant de r

e-chercher.

Or chose étonnante, le Magdalénien, qui s'est révélé excel-lent

~

b

serva

t

enr

dans la représentation d.es

ani~~1aux,

a peu fiauré ses semblables, cl encore les dcssms qu tl nous en a

l

a~ssés

sont-ils, en général, gauches, mal venus, de facture

barbare d'interprétation délicate.

-. Faut-ii croire que les troglodytes, en raison mèmc de leur . (1) Il ne nous est pns possible de signaler ici les tt·ès nombreu.: tt·avaux originaux qu'il conviendt•ait de consultet· à cet ~ujot. On tt·ouvera ct-d~sso~:

des indications bibliogt·aphiques relillh·es aux gr~>nds o~vragos Jiluslo é~ q

rep~~oduisent les œuvres d'art les plus remat•quables de 1 Age du Renne . J. Oécheletto. Manu~/ d',11·cheolog. oe · pre 11s '1 · 10 11 ··que celtique et gal/o, -ro· tna'inc, 11 vol A. Picao·d, Pat·is (Prcmiet' volume);

M. Boule. Los llummes Fossiles, Masson. Paris; . •

S l' . ch Ré!JOI'toirc do Fart quaternaire. E. Leroux, Parts, 19{3,

• • \Cilla . p .

Tb ~lainage. Los Religions de la J'rél!istoirc. A. Pic;H·d, at'.'8: J. de Mot·gan. L'l/umanitô préhistorique. Renatssa~ce du Ltvt e,

G'. Gouo•y. Origine et P:volution do 1'1-Jommo. A. Pt().1.rd;

. H. Verneau. Les origines do l'Humanité. nieder, Parts.; ~ .

. G.-1·1. Luquet. l 'A J 1 ·t ct la Religion des Hommes Fossiles. Masson, i!l.6,

. R. de Saint-Périeo·. L'M·t préhistorique. Rietlet'.

s.

Blanc. La préhistoiJ'C,

Monogt•aphies sut• les grottes de Gt·imaldi.

Peintures ct gravures mut•ales des cavcmcs paléolithiques, nolamm~nl:

E. Cartailhac cl Il. Breuil. La Caverne d'Altamira à S,wtillano, pres San

-tander 1 Espagne). Monaco, 1DUG;

L C~pitan, Il. Breuil, O. Pey•·ony. L.1 caverne do /?ont-do-Caume, aux Eyzies (Dordogne). M6naco, 1910; .

H:

Breuil, 1-1. Obermaier, Alea ide del Roo. La Pasioga, il Puente-Viesgo,

SantaJÏdcr (Espagne). Monaco," i91S; , . ,

L. C~pitan, Il. Breuil et O. Peyo·on;r. Les Combarollcs, aux EyzieS

(Vol-dogne). Mâssbn, 19l!4, '

(10)

,

.

1 2

-mala·dresse, d'une sorte d'inaptitude à reproduire les formes

~lumaines,

auraient renoncé à fixer sur les parois des caver-nes ou les objets mobiliers, les traits des êtres humains? Cela nous parait improbable. II est difficile d'admellrc que

les artistes paléolithiques qui, par ailleurs, ont affirmé une gt•andc mallrise dans leurs figurations, ne savaient pas faire le çlessin anatomique de l'homme. Sans doute peut-on, dans une certaine mesure, incriminer l'inexpérience d'artistes surtout habitués à tracer ou à sculpter des figures d'animaux, mais nous croyons que si les magdaléniens n'ont pas fidèle-ment reproduit le visage humain comme ils dessinaient les tètes des hèles, c'est qu'ils ne J'ont pas voulu, que cela ne

leur paraissait pas nécessaire, ou qu'ils croyaient avoir de fortes raisons de ne pas Je faire.

Que sont donc les figurations anthropomorphes qu'ils

nous ont laissées? On en rencontre snr les objets mobiliers 1.

C'est le cas pour celles que l'on peut observer sur le bàlon de l'abri Mège. D'autres ont été, comme les gravures ou peintu-res d'animaux, découvertes sur les parois ou au plafond des abris ou des cavernes. Quelques-unes, rares, sont isolées. D'autres, plus nombreuses, sont groupées, et leur ass ocia-Lion, soit à d'autres dessins anthropomorphes, soit à des. objets ou à des animaux, pose d'intéressants mais délicats problèmes d'interprétation. On pourrait citer comme exem-ples : le chasseur d'aurochs, de Laugerie-Basse (magic de chasse?), la Femme au Renne ou la« Femme enceinte» du mème gisement, gravure en rapport, selon toute

vraisem-J~l

a

nc

e,

avec la magie de la fécondité. La l'resqpc de Cogul (Espagne orientale)

~epré

se

ntant

neuf femmes exécutant au

-(t) Nous laissons volonlail'emenl. de coté les sculptures aurignaciennes, ba

s-reliefs ou statuettes réaliste; qui fournissent des renseignements plus ou

~

o

ins

exacts sur l'anatomie et la plastique des modèles, mais dont l'étude

nous écaJ·teJ•ait de noll•e Fujet. Le but de ces statuettes l'este obscur. Dans

son étude IJ•ès intéressante sur • Les staluellos féminines paléolithiques dites

Vénus stéatopyges •

(19

~8)

,

·

~J

mo

Luce Passcmard écril : "Sans vouloir entt•er dans des détails, sans aborde1• d•s explications étayées sur les bases bien fra

-g

ii~B

,

nous avons le sentiment qu'il ne nous est pas possible de séparer les

peliles statuettes féminines du paléolilhiquc, d'une manifestation certainement

a

tÏu

c

h~

e

à l'idée de la sexualité pt·ise dans le sens le

p

lu

~

général •·

13

-··t 11 f est un autre exemple Lour d'un homme une danse I l ue c ' . Ice de la

fécon-. f ·t son"er à la célébration de la pmssal qur m o <

dilé 2. . e fi"urations à laquelle sc r

alla-Une troisième catégone cl o d' d Ogurcs représentant

1, Il lins>> comprcn es

chent nos « c ta J 0 .

t

~

1·1xtes qui tiennent à

1 · . s à carac eres n •

des personnages Jizane ',< . 1 Ils présentent des caraclè -la fois de

~'

h

omm

e

et d_e 1

al:~uac~

des caractères animau: : res humams:

corpS,

(

J

amJ~

il

~oit

toujours possible de dire

tète avec museau, sans qu t pas des hommes . 1 résenté Ce ne son

quel . est ,.1 l'amma rep t des lèles cl , ammaux.' . . Mais cc ne sonl pas des pmsqu 1 son le loutc évrdenc. e, l' ar l"stc 'l dessiné peint ou

t ' '

animaux car,

c

.

.

C ètres semi-humains sonl des gravé un corps humall1. es ,

hommes affublés de

m

as~

u

es

.

t ils figuré avec tant de soin Pourquoi les préhistonques on - l ? Quel but

pour-. t cl s êtres anthropomorp les . .

des . ammaux . . l 'l ? e Sans re eprendre par 1 lélail e

c

'

les discusstons

smvmen -I s . . ll recherche on peul dire que, auxquelles a donné heu c_c e. . 't cqu,is que le primitif

'è "énérale tl parai a

d'une mam re o .' b'le artistique, désintéressé.

n'obéissait pas surtout a un

·

710

1 bablement pas à embellir En particulier, il ne songeai

~r?

, l'exécution de travaux

, cuper ses lOisus a ,

sa demeure ou a oc . ' éable passe-temps. Sinon, qui n'eussent été pour lui

~u

un agr dans la plupart des cas, t ourrail-on exphquer que, . . f

t

commen p . . l étonnement adtmraLJ ' on

les belles œuvres qm font no re

la fJ·esque de Cogul : Anthropologio,

(l) Breuil. Sur l'inlet·prétation de

t. XX et t. XX!ll. tte• d'animaux femelles gra

-. d s de nom b!'euses gro · • r

(9

~

) La représcnlntwn, an . d s préhistoriques de a-bi bl ent la préoccupatiOn . 1

vides souligne vraisem a em . . ' Dans la !l"I'OIIo do a

. . . d'es èccs utiles a 1 homme. .

voriser la multlphcalton P 1 b,

~l

è

ge

une jument a vcntoe · . de mètres de 1 a ti ' •

mairie, à Teyjat, à une centame 1 ·t· ue Dans celle même grotle, é cascade sla agmi Jq 1

très 1·ebondi est grav e sur .

1 t flairant une var 10. é 1 n taureau suivan c

une très belle graVUI'C repr sen c u D l llos rPpréseutalions ne sont

• 1 • po précédent. e e

Une aulJ'e vache SUIL e gtou , l r·on d'une scène de ce

~

ebr

e

"t t ' notamment fa réa IS3 1 o· b'

pas rares : on pourrai Cl 61 . . li du Fourneau du "' :e d Roc (Hem'l Mat·Lm), ce e d pal• le sculpteut• solutréen u , .

1 modelage magdalénien u

f . bisons d argt o •, •

(O. Peyronyj, celle dos ameux ." , ·cnle également une scène de pré

-rap-Tuc d'Audoubert (llégouen) qui repJé:;

prochement sexuel.

(11)

-

14

-élé

~

é

couvertes

dans des endroits .

au heu de les mettre a' I l' . peu accessibles, comme si

c a c Ispositio cl L '

de les soustraire a' la d n e ous, la règle était

c c vue u plus tr· d

gravures el peinltJre L . 5I.an nombre? A Niaux

s son a plus· . . '

de l'entrée de la caverne. A Fonl-dicurs cenlallles de mètres

après l'étroit passacre du '<

R 1 .

e-Gaumc, on les rencontre

Béd er 1ac, on n'JI 'acco èd . , u . )JCon

»

· Aux T roi. s-Frères à

. e a cerlmnes craJ .· '

avoir pratiqué la rcpl L' cl o' et les ornées qu'après ' a lOn ans cl'él 't b

d Audoubert la <~alerie cl

roJ s oyaux. Au Tuc d'ff' . ' o es !Sons d'arcril l d'

J . lCJ le. Cel

«

appétit cl l . . o c cs accès lrè's

. . e c andeslunté )) '

rn

.

COie: c est souvent cl . sa Inne 111Jeux e n-L' ans un endroit inall cl cl

Icule presque impénétrable ù .en u, ans un cliver

-placé d'ailleurs dans UJ1c ' 'ta.ns

L~l

com caché que l'artiste

· l)OSJ 1011 rort i '

ou pe111l. Il en est aii1s· , 1, ncommodc, a gravé

. ' I a ~ont de G

pourrawnl ètrc aisément n IL' J' amne. Les exemples

d'œuvres d'art, vers

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alors qné la présence la· Mairie à Tevl· al est 1 , e a )Il, comme à la grolle de

. . J.' ' P utol exccpl' 1

amene :t penser que ces . l IOnne le. On est ainsi pe1n ures ou crra ,

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sortes de sanctuaires 1 . .n 1111 rés>>. Dans ces'

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-. .

1 . essant lemo1crnaa .

mr, I mt paru nécessai· cl t> 'oc, ne saurait four

-re e rechcrch 1

pandus chez les peupl 1 er c ans les usages ré

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son susceptibles de ronse·. , cs ermcs de comJ)arai

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SldiOueltes humaines à têtes

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pru ent d'établir t

entre des peuples auss· d' . 111e parenté ethnique lJ 'LI' llcJues et les Escr . I IV. eisquepouv· aJen LI'c' tre les Palé

o-uunaux du Gro 1 l

du nord de l'Asie qni il ' en anc ou les Tchouktchis à l'âge de la Pierre il 'n· )la

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années, étaient encore

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ethnographiques. Pl é l e alfc des parallèles

ac s c ans des cond't'

gues, les hommes lorsqu''! ' . .1 IOns de vie analo

-soins essentiels

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s agit de la satisfaction de h

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1

5-Uquc. Üe sorle qud : rechercher des convergen'Ces indus"'

trielles ou artistiques, comparer des techniques, étudier les

mœurs, les habitudes, les croyances des sauvages actuels, les cérémonies qu'ils organisent, peuvent êlre d'excellents

moyens d'essayer de comprendre la menlalilé des préhisto -riques.

Or, le plus souvent, les Primitifs actuels attachent un sens

religieux on magique aux figurations dont ils sont les a u-teurs. Ici, il s'agit de rites, de cérémonies d'inilialion, qui

«incorporent le jeune homme::\ la Yie de la tribu». Femmes et étrangers sont strictement exclus de ces cérémonies. Ail-leurs, les figures assurent la protection du chef ou du clan;

d'autres fois, les rites, les mascarades sacrées sont en·rapport

avec la chasse, cet acle si impcirlanl chez les peuples chas

-seurs que le salut de la horde dépend souvent de sa réussite. Alors, on essaie de conjurer les èsp.].'ils des races animales,

pour se rendre la chasse favorable ou provoquer le succès

de telle autre activité indispensable, comme la pèche. Cette

magie de chasse se complète par la magie de la fécondité. Si, par des cérémonies appropriées, on cherche à éloigner

ou à détruire le fauve ennemi de·l'homme et des bètcs utiles, au contraire, on croit assurer la mulliplicalion el faciliter la

capture des espèces donl la chair, la corne, l'ivoire, la peau

sont indispensables à la subsistance de l'homme, à sa vie industrielle, à sa protection. Dans lous los cas, l'action des

hommes masqués, des sorciers présidant à des rites variés, est déterminante. On doil toutefois observer que, souvent,

les primitifs actuels se c0ntenlenl de croquis médiocres,

d'effigies grossières, comparés aux belles œuvres d'art ma~dalénicnncs 1.

A la lumière de ces faits ethnographiques, les manifesta·

tions artistiques des troglodytes deviennent explicables.

L'hypothèse de l'art utilitaire, de l'art servant de base à des

cérémonies nécessaires dans la lutte pour la vie, de l'art

fonction sociale, devient toul à fait acceptable. Elle a le mé ..

(1) H. \'el'neau. L'Homme : ra cos ct coutumes. Larousse, .l'al'i~. Homal'•,

q uable syntllèse elbnologiq ue, magnillquem~nl illualrée.

(12)

-16-rite d'expliquer les faits connus sans qu'aucune observalloii essentielle vienne la contredire. On comprend qu'elle ait été

admise .par la grande majorité des préhistoriens. Cela ne

signifie pas, d'ailleurs, que jamai!? aucune œuvre d'art n'a

été réalisée par un magdalénien désintéressé. Il est bien pro

-bable, au contraire, que les artistes troglodytes ont dù créer

avec joie telles œuvres particulièrement bien venues, sans

avoir pour unique objet, ni même pour but essentiel, la r

éa-lisation d'une œuvre nécessaire et, qu'en particulier, des

objets mobiliers, ornés de motifs géométriques, ont pu Nre

décorés avec plaisir, pour la joie des yeux. Nous n'avons pas

le droit, me semble-L-i!, d'admelfre que les magdaléniens

n'avaient pas de préoccupations esthétiques. D'ailleurs,

adapté à une fin utile et subordonné étroitement

à

des

céré-monies magiques, ce qui nous parait ètre le cas général, ·ou

simplement produit d'une facullé esthétique s'exerçant

par-fois à réaliser des figurations ornementales, cet art élève singulièrement, à nos yeux, le niveau mental des

rud~

s

chasseurs de rennes. El nous admettons volontiers, avec le

professeur M. Boule, que les artistes magdaléniens ont apporté à l'exécution de leurs gravures, peintures,

modela-ges et sculptures des préoccupations d'ordre esthétique

même lorsqu'ils leur attribuaient une valeur magique, donc

intéressée : l'une des préoccupations ne devant pas nécessai

-rement exclure l'autre.

Les

«

diablotins

»

,

de si nelle facture, ont donc parfaite-ment pu ètre gravés avec amour par leur auteur, même si ce

dernier entendait avant tout figurer des esprits, sortes de

loups-garous, ou des sorciers exécutant une danse rituelle. Au surplus, la gravure peut, en elle-même, n'avoir aucune

valeur magique, mais reproduire une scène observée, au

oours de laquelle des cérémonies magiques auraient eu lieu. Quoi qu'il en soit d'ailleurs, il s'agirait toujours d'hommes

travestis, en utilisant une dépouille d'animal, représentés

dans l'exercice de fonctions' spéciales, à caractère grave.

Cette interprétation a reçu la confirmation de nouvelles

découvertes. Des figuratio.ns comparables se comptent au

-jourd'lllli à Gourdan, Marsoulas, Allamira, le Mas d'Azil, La

- 17- 'l

t d Gaume Islun z;

.

c

barelles, Fon e ' . .

1 t

Madeleine, Teyjat, Les om l 1 Les Trois Frères. Mats I es

1 P

- Le Por e , •· pose pas

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F·igztre 4

t La Madeleine (Dordogne). Fouilles D. Peyrony •

Gravure sur gale . lit galet

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La Madeleine, son gJsem ' 1 ie 1.928,

(1) L. Capitan et D ..

Pey

.

rony~

l'fnstitul International d'anthropo og ,

S d'art PubhcatJons e .

(13)

1 8

-vent Capitan et Peyrony, le profil du tronc et de la tête d'une

femme ont été gravés (fig. 4). La tête est recouverte d'un masque. Le sein est très accusé au-dessous d'un bras replié

en avant; le corps est sillonné de stries obliques el parallèles

représentant peut-ètre le poil d'une peau dont elle était

affu-blée. La tête courte et forte avec museau projeté en avant a

un caractère bestial que nous ne saurions allribuer à aucune

espèce animale connue alors. Sur une autre face, existe un profil humain enlier représentant un homme également

masqué. Ici, pns plus que dans l'image précédente, la tète ne

peut èlre rapportée à aucune bête existant à ce moment-là. Alors, on est naturellement porté à supposer que les tr

oglo-dytes n'employaient pas seulement les dépouilles des hèles

entières pour se travestir, comme nous l'avons remarqué sur

les «diablotins>> du bâton de commandement de l'abri Mège,

à Teyjat, mais qu'ils devaient aussi fabriquer des masques

au gré de leur imagination, comme le font encore les Indiens

d'Amérique.

« Dans le même gisement, une gravure sur os représente

un personnage masqué ithyphallique. Le masque à museau ne tappelle cependant aucune tête animale connne >>.

· Figz~re 5

Les Trois Frères (galerie inférieure)

Figures hybrides et « petit sorcier». Dessin de K. Breuil.

Dans la caverne des Trois Frères (Ariège), explorée par le c.omte.Bégouen et ses trois fils, é.ttldiée en collaboration avec

1 9

-l'abbé Breuil, une gravure pariétale forme un groupe com-posé de trois êtres hybrides, irréels : l'un, une femelle de quadrupède a l'arrière-train d'un cervidé et l'avant-train

d'un bison; le second est un renne dont les palles

antérieu-res ne sont pas terminées par des pieds de renne (fig. 5).

Un troisième individu bizarre suit ces animaux. Il est

debout. Ses jambes, l'une droite, l'autre fléchie, sont hu

mai-nes, ainsi que sa croupe. La tète cor.nue est de bison. Il porte une queue de cheval. Cet être a des membres an té-rieurs d'animal, dont un bisulque. Il danse en jouant d'un

instrument, peut-èlre d'un arc musical. On a pu penser

qu'on était en présence d'une scène mythique dans laquelle

un homme masqué ou un être surnaturel charmerait par la vertu de sa danse el de sa musique des animaux également mythiques 1.

Mais peut-ètre la figure gravée

cC

peinte qui représente

avec le plus de relief et de force, le plus de détails aussi, un

troglodyte travesti, est-elle celle du «sorcier>> ou «dieu» de la même grolle des Trois Frères. Pas plus qu'en ce qui con-cerne nos bonshommes de Teyjat, nulle ambiguiLP.. Il s'agil

bien d'une figure humaine présentant des caractères ani-maux. C'est le sorcier - on ne peul douter de son sexe -qui a revètu son costume cérémoniel, ses ornements rituels.

Il porle une queue postiche de cheval allachée au bas du

dos : ses crins sont noués au bout pour faire une petite

houppe. Une ramure de cerf orne sa tète. Il est affublé d'un masque avec une barbe de bison; le nez est en bec d'aigle,

les yeux ronds comme ceux de la chouelle. Il ]JOssède des

oreilles de loup. Ses mains sont gantées de la peau des pattes

d'un lion aux griffes acérées. La posilion de cet ètre masqué, presque à quatre pattes, esquissant le geste de « faire Je beau», indique une sorte de danse (fig. 6).

Il peÏ1se avoir pris ainsi toute la force magique, toutes les

qualités physiques des animaux qui lui ont servi à s'affubler:

(i) F. Guirand. Mythologie génél'flio,· mythologie préhistorique (:J. 11.

Luquet.

Comte Dégouon et Abbé Bl'euil. Figures hybrides de la Caverno des Trois Ji'rèros (4l'iè(le). (Revue 4nthropoiouique, !934),

(14)

1

-

·

20-Figure 6

(

Les Trois Frères. - Le <<sorcier n. Dessin d'après H. Preuil,

-

2i-l'audace du lion, l'acuité de vue de l'aigle pour le jour el du hibou pour la nuit, l'ouïe des loups, l'endurance du bison,

la vitesse du cheval et du renne.

« Sans nul doute, c'est un sorcier, et l'endroit élevé où il est placé, dominant les parois du sanctuaire où des centaines

d'animaux les plus divers sont représentés, fait encore r es-sortir l'importance qu'on a voulu donner à celte représenta -tion>>. (Cl0 Bégoucn) 1. ·

C'est le magicien, le sorcier, c'est-à-dire le chef de la tribu,

ou une sorte de divinité; peul-être l'artiste du groupe hu

-main, modeleur, graveur ct peintre, qui

«

aurait tracé avec

minutie et fidélité son propre portrait revêtu de ses attributs

rituels »; peut-être aussi l'initiateur, serions-nous tenté

d'écrire? Ne faudra-t-il pas, en effet, transmettre les secrets

de l'art et des cérémonies au futur artiste du clan? Celui-ci, par une initiation progressive deviendra, à son tour, le pr

o-lecteur de la tribu, le dépositaire des secrets permettant de conjurer les maléfices des génies malfaisants, le _vigilant

gardien des traditions, des formules magiques par lesquelles, en charmant les esprits bienfaisants, on assurera aux indi -vidus et à la collectivité des conditions de vie supportables.

D'ailleurs, quelle que soit l'interprétation admise, la vie

de ces lointains ancêtres, toute misérable et difficile qu'elle i'Clt, nous apparaît, à la lumière de ces constatations, pleine

de vir~ualilés, plus riche de pensées individuelles et de sens social qu'on n'eût pu le supposer. Industrieux, créateur ou perfecteur ingénieux d'un outillage simple, élégant, varié,

parfaitement adapté à son but; d'un niveau mental déjà élevé, ct riche de devenir, comme l'indique s.on art évolué, Lei nous apparaille Magdalénien artiste. Le sens esthétique subira hienlol une grave éclipse, probablement clue à des conditions d'existence toutes nouvelles, à une orientation (i) Comte Dégouen, Il. Breuil. Un dessin relevé dan.~ la caverne des Troi«

l<'rèi·es, ii Montesquiou-A vantès (Ariège). Compte-rendu des !éances de l'Aca•

démie des Inscriptions et Delies-Lettres, 1920;

Comte Bégouen. La Jllagio 1tUX Tomps Préhistoriques. Toulouse, 192~.

Comte Bégouon. Les grottes do Montesquieu-A vantès (Ariège): Tuc d' Au• doubcrt, Enlènc, Les 'l'rois-Frêros, Toulouse, 1936,

(15)

-

2~-diftérente de ljactivité de nouveaux groupes humaîns. Ma1s

tout ne sera pas perdu de ce que les cérémonies, les rites s'appuyant sur des réalisations d'art, font supposer d'intel

-ligence, de croyances, de faculté d'invention, de courants

de pensée collective, d'aptitudes à la civilisation. Ce qui restera deviendra la base d'une évolution sociale plus pou s-sée. Les magdaléniens, portant en eux l'aptitude au progrès 1,

perméables à l'expérience, possédant le sens esthétique,

n'étaient pas des arriérés ou des attardés. Leurs esprits, en pleine évolution, nous apparaissent, non comme« ligotés par

un réseau serré de bandelettes magiques », tels ceux de c

er-tains des primitifs contemporains, sortes de résidus de très anciennes races, mais au contraire, riches d'une « vigou

-reuse vitalité potentielle». (J. Brunhes).

Telles sont les réflexions que nous suggère l'examen des œuvres d'art de l'époque paléolithique el des représentations

anthropomorphes. Et il est tout à fait intéressant que, dès

les premières découvertes, parmi lesquelles on peul placer ce)le elu bàton de Teyjat, des savants aient eu l'intuition du rôle de premier plan, qu'avaient dû jouer, dans la vie sociale

des chasseurs de rennes, les figurations semi-humaines, au

nombre desquelles on compte les « diablotins », hommes

travestis de l'abri Mège, parmi les spécimens les plus su g-gestifs et les moins discutables.

A.

DARPEIX,

(1) Franck Delage, ChoB los troglOdJ'les : Un 11rt mystérieux (Mercure de France, 1910),

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