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La diversité culturelle et le droit constitutionnel canadien au regard du développement durable des cultures minoritaires /

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(1)

LA DIVERSITÉ CULTURELLE ET

LE DROIT CONSTITUTIONNEL CANADIEN

AU REGARD DU DÉVELOPPEMENT DURABLE

DES CULTURES MINORITAIRES

Par

SERGE ROUSSELLE Faculté de droit Université McGill Montréal (Québec)

Une thèse soumise à l'Université McGiIl pour satisfaire en partie aux exigences du diplôme de Docteur en droit civil (DeL)

(2)

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(3)

REMERCIEMENTS

Je tiens à exprimer ma profonde gratitude à la professeure Jane Matthews Glenn d'avoir accepté de diriger ma thèse. Je la remercie de son soutien indéfectible et de l'encouragement constant qu'elle m'a prodigué à terminer ce programme de doctorant. Ses conseils bienveillants et son éternelle gentillesse ont été grandement appréciés.

J'adresse aussi mes remerciements les plus sincères à mes collègues de la Faculté de droit de l'Université de Moncton et d'ailleurs qui, au gré d'échanges et de discussions, ont joué un rôle stimulant tout au long de mon travail de rédaction et à ma secrétaire dévouée, Suzanne Léger, qui a assuré la mise en page de cette thèse.

(4)

RÉSUMÉ

Dans le contexte d'une libéralisation des échanges commerciaux sur le plan

international qui a contribué à une importante réflexion sur l'apport fondamental de la diversité culturelle au développement durable, nous examinons la justification des droits scolaires des minorités de langues officielles et des droits ancestraux et issus de traités des peuples autochtones garantis dans la Loi constitutionnelle de 1982. Nous analysons leur contenu à la lumière des décisions pertinentes de la Cour suprême du Canada afin de confirmer notre hypothèse de départ selon laquelle le plus haut tribunal au pays peut fournir aux pouvoirs publics d'ici et d'ailleurs la marche à suivre pour que cohabitent dans un pays libre et démocratique des droits culturels particuliers à certaines communautés et une citoyenneté commune propre à l'ensemble de la population.

Notre analyse fait apparaître que, tout en puisant dans la justification historique, égalitaire et culturelle de l'existence des droits en cause, la Cour privilégie une démarche fondée sur trois principes fondamentaux: la responsabilité étatique d'agir équitablement dans le

«

meilleur intérêt» des minorités culturelles en prenant appui sur une approche souple et flexible dans l'interprétation des droits reconnus, la participation équitable à la gestion et à l'accès aux ressources par les groupes minoritaires et, enfin, la cohésion sociale de l'ensemble pour que subsiste l'unité dans la diversité par le jeu d'une conciliation des intérêts existants, laquelle doit se faire, au premier chef, par la voie d'une négociation politique en vue de trouver des solutions durables.

Dans la perspective du développement durable des cultures, les droits culturels spécifiques à des groupes minoritaires doivent donc favoriser une citoyenneté commune dans le respect de la diversité culturelle tout en étant compatibles avec les valeurs d'une démocratie libérale et en faisant la promotion de ces valeurs.

(5)

ABSTRACT

Within the framework of international trade liberalization which has given rise to considerable thought about the fundamental contribution of cultural diversity to sustainable development, we explore the upholding of the educational rights of recognized linguistic minorities and of the aboriginal and treaty rights of First Nations under the Constitution Act, 1982. We examine the se rights in the light of relevant judgments of the Supreme Court of Canada in order to confirm our initial hypothesis that the highest court in the land can show governments here and abroad the steps to take to ensure that the cultural rights specific to sorne communities and the citizenship common to the population as a whole can coexist in a free and democratic nation.

Our analysis shows that, while relying on the historical, equality and cultural - based justification of the existence of these rights, the Court favours an approach centred on three fundamental princip les: the dut y of the State to act equitably in the "best interest" of cultural minorities through a flexible approach to the interpretation of established rights; a fair participation in the management of and access to resources by minority groups; and finally, the fostering of social cohesion in order for unity in diversity to be maintained through a reconciliation of existing rights which must be achieved, first and foremost, by political discussion aimed at finding durable solutions.

From a cultural sustainable development perspective, the specific cultural rights of minority groups must thus favour a common citizenship within a context of respect for cultural diversity, while still being compatible with and promoting the values of a liberal democracy.

(6)

TABLE DES MATIÈRES

CHAPITRE 1 - INTRODUCTION

1. Mise en contexte ... 1

2. Mondialisation, commerce et culture ... 4

3. À la défense de la diversité culturelle dans le monde ... Il 4. Diversité culturelle et développement durable ... 18

5. Une identité ouverte face à l'altérité ... 28

6. Problématique ... 31

7. Hypothèse ... 33

CHAPITRE 2 - UNE INTERPRÉTATION TÉLÉOLOGIQUE DES DROITS CONSTITUTIONNELS 1. Les principes généraux d'interprétation applicables ... 44

2. Une interprétation en fonction de l'objet visé ... 48

2.1 Le contexte historique ... 48

a) Le Canada: un pays à naître ... 48

b) Le Canada: un acte de naissance constitutionnel (Loi constitutionnelle de 1867) ... 56

c) Le Canada: un premier siècle d'histoire (1867-1967) ... 61

d) Le Canada: un pays à définir (1967-1982) ... 71

e) Le Canada: une nouvelle approche? (1982-... ) ... 91

2.2 Le contexte philosophique ... 99

2.3 Le contexte linguistique ... 107

a) Les droits scolaires (l'article 23 de la Charte) ... 108

b) les droits existants des peuples autochtones ... 122

(7)

(ii) Les droits issus de traité ... 137

CHAPITRE 3 - LA DÉFINITION DES DROITS SCOLAIRES 1. La portée de l'article 23 ... 140

1.1 La méthode du critère variable ... 140

1.2 Un pouvoir exclusif de gestion et de contrôle en matière identitaire ... 144

1.3 La programmation scolaire: une question d'identité culturelle ... 150

1.4 Des structures et des services distincts ... 154

2. Le rôle de l'État ... 161

2.1 Le financement: une question d'égalité réelle ...

161

2.2 Une obligation positive: l'unité dans la diversité ... 165

3. La justification par le nombre ... 173

3.1 Le critère numérique justificatif.. ... 173

3.2 Les facteurs à considérer ... 177

CHAPITRE 4 - LA DÉFINITON DES DROITS EXISTANTS DES PEUPLES AUTOCHTONES 1. Les droits ancestraux ... 181

1.1 Les droits ancestraux autres que le titre aborigène ... 181

1.2 Le titre aborigène ... 207

1.3 Une nécessaire compatibilité avec la souveraineté étatique ... 228

2. Les droits issus de traité ... : ... 238

3. Des droits existants reconnus et confirmés ... 259

3.1 Une atteinte à première vue ... 268

3.2 La justification de l'atteinte par l'ÉtaL ... 273

(8)

b) L'obligation pour la Couronne d'agir honorablement ... 279

(i) La consultation ... 281

(ii) L'indemnisation et l'atteinte minimale aux droits ... 286

(iii)La priorité des droits reconnus et confirmés ... 287

CHAPITRE 5 - CONCLUSION 1. Les principes de la Cour suprême ... 294

2. La justification des droits ... 295

2.1 Le rôle de l'histoire ... 296

2.2 L'importance de l'égalité réelle ... 299

2.3 La valeur intrinsèque de la culture ... 301

3. Les moyens de mise en œuvre des droits ... 308

3.1 Une responsabilité étatique ... 308

a) Une obligation positive d'agir équitablement dans le « meilleur intérêt» des minorités ... 308

b) Une approche contextuelle souple etflexible pour un développement durable des cultures minoritaires ... 313

3.2 Des conditions d'intégration équitable ... 319

a) Une participation équitable à la gestion ... 319

b) Un accès équitable aux ressources ... 324

3.3 Une nécessaire cohésion sociale ... 326

a) La conciliation ... 326

b) La négociation ... 333

4. Des justifications et des moyens porteurs d'avenir pour des pays libres et démocratiques ? ... 338

ANNEXE - Article 23 et 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 ... 341

(9)

CHAPITRE 1 - INTRODUCTION

1. Mise en contexte

Au cours des dernières années, plusieurs organismes internationaux et une multitude de pays ont souligné et défendu l'importance de la diversité culturelle dans le monde. Devant les enjeux d'une mondialisation qui transforme les bases traditionnelles des échanges tant économiques que sociaux et la menace d'uniformisation culturelle qui pourrait en découler, ils ont réagi par la double voie d'une concertation et d'une mobilisation en faveur de la diversité culturelle dans le monde.

C'est ainsi que se sont hissées dans l'agenda international les questions relatives à la sauvegarde et à la promotion de la diversité culturelle dans le contexte d'une mondialisation envahissante et globalisante des lois du marché en vue de combattre l'uniformité linguistique, l'uniformité culturelle, voire l'uniformité conceptuelle menaçantes!.

Force est de reconnaître que la mondialisation et la libéralisation du commerce se présentent souvent sous le mode de l'hégémonie d'un modèle culturel, soit celui du moule unique du capitalisme libéral désireux d'étendre son pouvoir sur une mise en commun d'un mode uniforme d'être, d'exister, de se comporter et de consommer.

1 Boutros Boutros-Gali, Lutter contre l'uniformité linguistique, culturelle et conceptuelle, Discours du

Secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie lors de la Cérémonie d'ouverture de la 3" Conférence des ministres de la Culture, Cotonou, le 14 juin 2001 (transcription disponible en ligne: <http://www.imperatif-francais.org/dossiers.php?id dossier=2335».

(10)

Dans un tel contexte, il n'est pas surprenant qu'un des enjeux majeurs des dernières négociations commerciales internationales a souvent porté sur la place de la culture et sur ce qu'on appelle maintenant les produits culturels dans les échanges mondiaux2. Ainsi, c'est parce que le soutien gouvernemental - actuel ou souhaité - à la culture a été débattu dans le cadre de négociations commerciales internationales et qu'il risque de contrevenir à des règles - actuelles ou futures - d'investissement et de commerce que s'est posé avec encore plus d'acuité l'enjeu de la mondialisation au regard du respect de la diversité culturelle.

Autrement dit, dans le contexte de la mondialisation, on semble se trouver devant un danger d'homogénéisation croissante, tout en ayant une conscience accrue de l'hétérogénéité de nos sociétés plurielles, phénomène pouvant s'expliquer par la crainte d'une perte d'identité qui incite à une redécouverte des traditions autochtones3.

2 On pense ici, entre autres, aux négociations relatives à l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) au début des années 1990, au projet d'Accord multilatéral sur l'investissement (AMI) à la fin des années 1990, ou encore aux négociations actuelles ayant cours à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et à celles concernant la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA). Voir entre autres à ce sujet: Jacques Renard cité dans le Rapport de conclusions du Colloque d'experts sur la culture, le marché et la mondialisation organisé en collaboration avec la Commission nationale française pour l'UNESCO avec le soutien des Gouvernements canadien et français, Paris, 14-15 juin 1999 (texte disponible en ligne: <http://www.unesco.org/culture/industries/htlm fr/reunion3.shtml»; Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, La diversité culturelle dans la ZLBA -Position du Canada, février 2003 (texte disponible en ligne: <http://www.dfait-maecLgc.ca/tna-nac/cpp neg-fr.asp»; Organisation Mondiale du Commerce, Communication du Canada - Première communication du Canada pour les négociations, Conseil du commerce des services, Session extraordinaire, 14 mars 2001 (S/CSS/W/46) (texte disponible en ligne: <http://www.dfait-maeci.gc.ca/tna-nac/TS/service prop-fr.asp» [Communication du Canada à l'DMC].

3 « La mondialisation a apporté une internationalisation dans des domaines tels que la mode, la culture

de masse et la consommation dans certains de ses aspects. En même temps, elle a stimulé la revalorisation, l'affirmation et, dans certains cas, la récupération, par les peuples, des éléments culturels qui les caractérisent et les définissent dans le monde. » : Réseau international sur la politique culturelle (RlPC), Document de travail, Deuxième rencontre ministérielle annuelle, Oaxaca (Mexique), les 20 et 21 septembre 1999 (texte disponible en ligne: <http://206.191.7.19/meetings/1999/challenges f.shtml» [RlPC, Document de travail]. Voir également à ce sujet: Conférence intergouvernementale sur les politiques culturelles pour le développement, Document de base: Les enjeux de la diversité culturelle (point 14), Stockholm, du 30 mars au 2 avril 1998 (texte disponible en ligne: <http://www.unesco.org/culture/laws/stockholm/html fr/backgr2.shtml».

(11)

En ce sens, un des grands paradoxes de la mondialisation et de la libéralisation des échanges commerciaux est d'avoir mené à une nouvelle prise de conscience de l'importance de la diversité culturelle, des menaces qui pèsent sur elle et du manque de règles existantes pour la préserver et la promouvoir4.

Cette pnse de conscience reconnaît la valeur de la richesse culturelle de chaque peuple comme source d'identité collective et individuelle constituant non seulement une dimension essentielle des groupes et des individus, mais aussi une dimension fondamentale de leur développement durableS.

Dans la perspective d'un pareil développement, pour contrer une démarche politique, idéologique et esthétique unidimensionnelle fondée sur l'application d'un modèle dominant, le maintien et la promotion de la diversité culturelle est apparue comme une condition sine qua non de l'émancipation des groupes et des individus6.

Dans le cadre de négociations économiques multilatérales, une défense vigoureuse des identités culturelles a pris le devant de la scène pour contrecarrer l'uniformisation pouvant découler de stratégies économiques sans égard à la différence. Comme le disait en 1999 la ministre du Patrimoine canadien Sheila Copps,

4 Hélène Ruiz Fabri (Université Paris 1 - Panthéon Sorbonne), Un accord international sur la diversité culturelle: objectifs, contenu, chances de succès, Deuxièmes rencontres internationales des organisations professionnelles de la culture, Paris, les 2, 3 et 4 février 2003, aux pp. 1-2 (texte disponible en ligne: <http://www.comitedevigilance.org/listepays.htm>).

5 RIPC, Document de travail, supra note 3.

6 Professeur Evangelos Venizelos, Ministre de la culture de la République Hellénique, Deuxièmes Rencontres Internationales des Organisations Professionnelles de la Culture, Paris, le 4 février 2003 (texte disponible en ligne: <http://www.comitedevigilance.org/listepays.htm>).

(12)

« plus que jamais il faut trouver un équilibre entre la libre circulation des biens et des services et la préservation de la diversité culturelle.7 »

À cet égard, il est intéressant de noter que Renato Ruggiero, en 1998, dans un de ses derniers discours comme directeur général de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), en faisant nommément référence à la diversité culturelle, avertissait les États membres «qu'ils ne devaient pas sous-estimer la pression qui s'exerce de plus en plus sur le système mondial pour qu'il fournisse des réponses à

des questions qui préoccupent sérieusement bon nombre de citoyens mais dont la réponse ne peut provenir du seul système commercial international. 8 »

2. Mondialisation, commerce et culture

Dans le cadre de grandes négociations commerciales internationales, s'est donc posé le problème fondamental des répercussions de la mondialisation sur la culture, ce qui a suscité une réflexion internationale sur l'importance de la diversité culturelle pour l'avenir de notre planète. Devant pareille situation, au cours des dernières années, de nombreuses rencontres internationales ont pris fait et cause en faveur de la préservation et de la promotion de la diversité culturelle comme un des objectifs principaux de la communauté internationale. C'est pourquoi, partant d'un contexte dans lequel certains États ont craint de perdre la liberté d'action leur

7 Sheila Copps, Discours d'inauguration, Réseau international sur les politiques culturelles, II" Réunion ministérielle annuelle, Oaxaca, Mexique, les 20 et 21 septembre 1999 (transcription disponible en ligne: <http://206.191. 7.19/meetings/l999/copps f.shtml».

8 Renato Ruggiero, Allocution d'ouverture par le Directeur général de l'OMC, Conférence ministérielle de l'OMC, Genève, le 18 mai 1998 (transcription disponible en ligne: <http://www.wto .org/frenchlthewto f/minist fJmin98 f/anniv t/dg f.htm».

(13)

permettant de protéger leurs expressions et leurs productions culturelles contre certaines règles internationales du commerce, deux réactions se sont produites.

D'une part, afin de ne pas se priver de leur marge de manœuvre en matière de politiques culturelles, certains pays sont convenus de ne pas prendre d'engagement de libéralisation dans les secteurs des biens et des services culturels. Dans cette logique, conscient que le libre jeu des forces du marché est loin de garantir l'objectif d'une diversité culturelle à 1 'heure de la mondialisation, les États et gouvernements ont le droit et le devoir d'adopter des politiques essentielles à la diversité des expressions culturelles de chaque société, de sorte qu'ils choisissent de s'abstenir de tout engagement portant sur quelque secteur d'activités culturelles que ce soit9•

Parmi ceux qui ont choisi cette voie, mentionnons la majorité des États membres de l'OMC lors du cycle de l'Uruguay, ainsi que les États et les gouvernements membres de la FrancophonielO• Il faut noter à ce sujet que, dans un cas

comme dans l'autre, le Canada fait partie de ces États. D'ailleurs, dans le cadre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis (ALE) et de 1'Accord de Libre-échange nord-américain (ALÉNA), une disposition Spéciale prévoit une mesure

9 Déclaration finale, Première rencontre internationale des associations professionnelles du milieu de la

culture du 10 au 13 septembre 2001 ayant pour thème « Diversité culturelle, politiques culturelles et accords internationaux de commerce », Montréal, le 13 septembre 2001 (texte disponible en ligne: <http://www.cdc.ccd.orglFrancais/Liensenfrancais/evenements/dec\aration.html» (rencontre organisée par la Coalition pour la diversité culturelle, un organisme fondé au printemps 1998 à l'occasion de la bataille contre l'AMI, soit l'Accord multilatéral sur l'investissement: voir à ce sujet, OCDE, Direction des affaires financières, fiscales et des entreprises, Le texte de négociation de ['AMI, le 14 février

1998).

10 Voir: Agence intergouvernementale de la Francophonie (AIF), Projet d'instrument juridique

international sur la diversité culturelle - Argumentaire (texte disponible en ligne: <http://www.agence .francophonie.org/diversiteculturelle/fichiers/argumentaire diversite.pdf».

(14)

d'exemption pour les industries culturellesll. Il en va de même dans les accords bilatéraux que le Canada a conclus avec le Chili, Israël et le Costa Rica12.

De même, les négociations actuelles du cycle de Doha de l'OMC et des négociations relatives à la Zone de libre-échange des Amériques (ZLÉA) ont permis au gouvernement canadien d'adopter des positions de principes fermes en la matière. Ainsi, dans une proposition de texte de préambule pour l'accord de la ZLÉA déposée par le Canada à la table des négociations en 2001, le ministre du Commerce international Pierre Petitgrew précise que les 34 gouvernements des pays participant à la ZLÉA reconnaissent « que les Parties doivent conserver la capacité de préserver, de développer et de mettre en œuvre leurs politiques culturelles respectives dans le but de renforcer la diversité culturelle, étant donné le rôle essentiel que les produits et services culturels jouent dans l'identité et la pluralité de la société ainsi que dans la vie des personnes.13 »

Il Soit l'article 2005 de l'ALE auquel est assujetti l'ALÉNA selon l'annexe 2106, Voir à ce sujet:

Canada, Parlement, Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, Le Canada et l'avenir de l'Organisation mondiale du Commerce: Pour un programme du millénaire qui sert l'intérêt public, Rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, Bill Graham, député et Président, Juin 1999, c. 7 [Le Canada et l'avenir de l'OMC] (texte disponible en ligne : <http://www.parI.gc.ca/infocomdoc/36/lIfaitistudies/reports/faitm09/20-f.htm> ).

12 Ministère des Affaires étrangères et du Commerce internationale (MAECI), 200I-Consultations

relatives à l'OMG, Réunion ministérielle de Doha (Qatar), Commerce et culture - Document d'information (texte disponible en ligne : <http://dfait-maecLgc.ca/tna-nac/Culture-Info-fr.asp>).

13 Ministère des Affaires étrangères et du Commerce internationale, Zone de libre-échange des

Amériques (ZLEA) - Ébauche du texte, positions et propositions du Canada et foire aux questions - La diversité culturelle dans la ZLEA - Position du Canada (texte disponible en ligne: <http://www.dfait-maeci.gc.ca/tna-nac/C-P&P-fr.asp». Dans cette foulée, la huitième réunion ministérielle de la ZLÉA à Miami a produit une déclaration ministérielle le 20 novembre 2003 dans laquelle les participants précisent ce qui suit: «[n]ous réaffirmons la nécessité de respecter et de valoriser la diversité culturelle, comme l'énoncent la Déclaration et le Plan d'action du Sommet des Amériques de 2001 »

(15)

Dans la même veine, le ministre Petitgrew a fait connaître en mars 2001 la position du Canada dans le cadre des négociations sur l'Accord général sur le commerce des services en vue des négociations à l'OMC : «le Canada ne prendra aucun engagement qui limite sa capacité de réaliser ses objectifs en matière de politique culturelle, et ce, jusqu'à qu'un nouvel instrument international destiné expressément à préserver le droit des pays de promouvoir et de conserver leur diversité culturelle puisse être mis en place. 14

»

D'autre part et dans cette logique, à la suite de nombreuses rencontres internationales, le projet de consacrer juridiquement la diversité culturelle dans le cadre d'un instrument international s'est imposé au cours des dernières années. C'est ainsi qu'au Canada, dès 1999, dans sa Réponse du gouvernement au rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international intitulée On vous écoute Le Canada et l'avenir de l'Organisation mondiale du commerce, le gouvernement déclare qu'il convient que le pays devrait «s'employer à faire adopter un nouvel instrument international sur la diversité culturelle. [ ... ]. L'accord reconnaîtrait le rôle particulier que jouent les biens et les services culturels, ainsi que le droit des gouvernements de préserver et promouvoir la diversité culturelle.15 »

En fait, un tel projet d'instrument international n'aurait pu VOIr le jour n'étaient-ce de certaines organisations internationales, appuyées par leurs membres,

14 Communication du Canada à l'OMC, supra note 2 au point 9.

15 Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, On vous écoute Le Canada et

l'avenir de l'Organisation mondiale du commerce, Ottawa, 1999 (texte disponible en ligne:

<http://dfait-maeci.gc.ca/tna-nac/canwto-fr.asp>). Pour plus d'information, voir aussi: Le Canada et

(16)

qui ont consacré temps et énergie à défendre la diversité culturelle. À cet égard, parmi ces organisations internationales auxquelles participe activement le Canada, il convient de mentionner en particulier l'UNESCO, la Francophonie (l'Organisation internationale de la Francophonie) et le Réseau international sur la politique culturelle (RIPC).

En ce qui a trait à l'UNESCO, forte de ses 190 États membres, elle a pour objectif principal de contribuer au maintien de la paix dans le monde et de resserrer les liens entre les nations, grâce à la culture notamment, pour assurer le respect universel des libertés et droits fondamentaux 1 6. Dans cet esprit, l'UNESCO, dont l'Acte constitutif demandait déjà en 1945 de défendre «la féconde diversité [des] cultures », «juge prioritaire la cause d'une diversité durable mise à l'épreuve par l'accélération de la mondialisation.l? »

16 Le but de l'Organisation a été défini comme suit dans le texte officiel de sa création en 1945: « [c]ontribuer au maintien de la paix et de la sécurité en resserrant, par l'éducation, la science et la culture, la collaboration entre nations, afin d'assurer le respect universel de la justice, de la loi, des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion, que la Charte des Nations Unies reconnaît à tous les peuples. )} (texte disponible sur le site officiel en ligne de l'UNESCO: <http://portal.unesco.orglfr/ev.php-URL lD=6206&URL 00= 00 TOPIC&URL SECTION=201.html».

17passage tiré du site officiel en ligne de l'UNESCO traitant de la culture: <http://portal.unesco. orgl

culture/fr/ev.php-URL lD=2450&URL 00=00 TOPIC&URL SECTION=201.html>. D'ailleurs, assumant son rôle au niveau de la protection juridique international du patrimoine culturel, l'organisme gère, entre autres, la Convention de la Haye pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé et ses protocoles (1954), la Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriétés illicites des biens culturels (1970), la

Convention du patrimoine mondial (1972), la Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique (2001) et la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (2003). On peut consulter ces différentes conventions en ligne par l'entremise du site officiel de l'UNESCO: <http://portal.unesco.org/culture/fr/ev.php-URL ID=2309&URL 00=00 TOPIC&URL SECTION= 201.html>.

(17)

Ainsi, quoique la diversité culturelle fasse partie intégrante de la mission de cet organisme depuis sa création18, elle en est devenue, à proprement parler, une

préoccupation de premier plan dans le contexte de la mondialisation depuis le dépôt de son Rapport de la Commission mondiale de la culture et du développement: Notre diversité créatrice19 en 1996 et, particulièrement, depuis sa Conférence intergouvernementale sur les politiques culturelles pour le développement à Stockholm, en 1998.

Dès 1999, la 30e Conférence générale de l'UNESCO concluait à l'importance de développer la diversité culturelle, l'une des principales richesses de l'humanité, entre autres par sa fonction de forum intellectuel « sur les questions de protection de la diversité culturelle et de l'impact des négociations internationales sur les produits culturels.20 »

Dans cette ligne de pensée, la même année, en collaboration avec la Commission française pour l'UNESCO et avec le soutien des gouvernements

18 Comme l'a bien exprimé le Directeur général de l'organisme, Koïchiro Matsuura, la diversité

culturelle a toujours été un sujet d'intérêt pour l'UNESCO compte tenu que « en tant que seule organisation de la famille des Nations unies à détenir un mandat en matière de culture, l'UNESCO doit jouer un rôle de premier plan vis-à-vis de tout ce qui intéresse, concerne, la culture sur le plan international» : UNESCO, Réunion du Comité d'experts sur le renforcement du rôle de l'UNESCO en vue de promouvoir la diversité culturelle, Paris, le 21 septembre 2000 (transcription disponible en ligne : <http://www .unesco.org/bpi/fre/unescopresseI2000/00-91 f.shtml> ).

19 Commission mondiale de la culture et du développement, Notre diversité créatrice, Paris, 1996 (texte

disponible en ligne: <http://www.unesco.orglculture/policies/ocd/html fr/chapterl.shtml». Signalons que cette Commission a été créée conjointement par les Nations Unies et l'UNESCO en décembre 1992 afin d'étudier les liens entre la culture et le développement et de préparer un rapport à cet égard (pour plus de détails, voir en ligne : <http://www.unesco.orglculture/policies/wccd/index.shtml>).

20 D'ailleurs, lors de cette 30· session, la Conférence générale de l'UNESCO a « conclu que la diversité culturelle était l'une des principales richesses de l'humanité et, qu'à ce titre, elle devait être affirmée et développée.)) (transcription disponible en ligne: <http://mcc.gouv.qc.ca/international/diversite-culturelle/unesco.html> ).

(18)

canadien et français, l'UNESCO a organisé conjointement avec le Secrétariat du Commonwealth un symposium intitulé Vers un pluralisme constructif et une première table ronde annuelle des ministres de la Culture ayant pour thème «2000-2010 : Diversité culturelle : les enjeux du marché » a eu lieu.

Depuis, de nombreux autres rencontres internationales sous les auspices de l'UNESCO ont été organisées, dont les tables rondes annuelles des ministres de la Culture, mais c'est surtout le travail de son Comité d'experts sur le renforcement du rôle de l'UNESCO en vue de promouvoir la diversité culturelle à 1 'heure de la mondialisation, en septembre 2000, qui a retenu l'attention en recommandant, entre autres, la préparation d'une déclaration sur la diversité culturelléI.

Toute cette activité de réflexion a mené à l'adoption unamme de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle par les 185 États membres représentés à la 31 e session de la Conférence générale de l'UNESCO en 200122• Selon les termes mêmes de l'UNESCO, cette déclaration doit être considérée comme l'acte fondateur d'une nouvelle éthique, la communauté internationale se dotant pour la première fois d'un instrument normatif de grande envergure qui «réaffirme sa

21 UNESCO, Réunion du Comité d'experts sur le renforcement du rôle de l'UNESCO en vue de

promouvoir la diversité culturelle à l'heure de la mondialisation, Conclusions générales,

21-22 septembre 2000, salle IV, CLT/CIC/BCIIDC.DOC 8F [UNESCO et diversité culturelle] (texte disponible en ligne: <http://www.unesco.org/culturelindustries/html fr/paris2.shtml».

22 Pour consulter en ligne le texte de cette Déclaration universelle sur la diversité culturelle, ainsi que

son plan d'action, voir: http://unesdoc.unesco.orglimages/0012/001271/127160m.pdt: Notons qu'une première de ce genre au niveau régional, la Déclaration sur la diversité culturelle du Conseil de l'Europe avait été adoptée par le Comité des Ministres de cet organisme le 7 décembre 2000 lors de leur 733" réunion (voir le texte de cette déclaration en ligne: <http://cm.coe.intlta/decl/2000/ f2000dec2.htm> ).

(19)

conviction que le respect de la diversité culturelle et du dialogue interculturel représente le meilleur gage du développement et de la paix »23.

Lors de l'adoption de cette déclaration, Koïchiro Matsuura, le directeur général de l'organisme, a souhaité que ce texte puisse «revêtir un jour la même force que la Déclaration universelle des droits de l'homme »24.

3. À la défense de la diversité culturelle dans le monde

Depuis l'adoption de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle, des organisations internationales, dont l'UNESCO elle-même, ont pris fait et cause en faveur de l'élaboration d'un instrument juridique international contraignant sous les auspices de l'UNESCO visant la défense de la diversité culturelle dans le monde25.

23 Extrait tiré du site officiel en ligne de l'UNESCO: http://portal.unesco.orglculture/fr/ev.php-URL ID=2450&http://portal.unesco.orglculture/fr/ev.php-URL DO=DO TOPIC&http://portal.unesco.orglculture/fr/ev.php-URL SECTION=201.html.

24 UNESCO, Communiqué de presse intitulé « La Conférence générale a adopté la Déclaration

universelle sur la diversité culturelle )), Paris, 2 novembre (Noo2001-120) (texte disponible en ligne: <http://www.unesco.org/bpi/fre/unescopresse/200 1/0 1-120f.shtml».

25 Il convient de noter que d'autres regroupements ou organismes ont également pris fait et cause pour la diversité culturelle sans toutefois aller jusqu'à réclamer un instrument juridique international sur le sujet. C'est notamment le cas des 34 chefs d'État et de gouvernement qui ont pris part au 3e Sommet des Amériques, du 20 au 22 avril 2001, et qui, dans la Déclaration de Québec, ont précisé que la diversité culturelle caractérisant leur région « est source de grande richesse pour nos sociétés. Le respect et la valorisation de cette diversité doivent constituer un facteur de cohésion qui fortifie le tissu social et le droit de nos nations. )) (texte de la déclaration disponible en ligne: <http://www.paroussie. com/sagesse/mondialisationldeclaration de guebec.htm». De même, en juillet 2002, les États membres de l'Organisation des États américains ont soulevé l'importance de la diversité culturelle à la 1 ère Conférence interaméricaine des ministres et hauts responsables de la Culture tenue en Colombie les

12 et 13 juillet 2002. La Décaration de Cartagena de Indias qui en a résulté reconnaît au paragraphe 5

« [l]a nécessité d'une plus grande coopération interaméricaine afin de maximiser les avantages de la mondialisation et de mitiger ses effets négatifs dans la préservation et la promotion de la diversité culturelle dans les Amériques. )) (texte de la déclaration disponible en ligne: <http://www.oas.org/ consultaeduc/consulta old/cult-declaracion-f.asp». Enfin, notons que les dirigeants mondiaux réunis au Sommet mondial pour un développement durable en Afrique du Sud du 26 août au 4 septembre 2002 ont entériné la Déclaration de Johannesburg sur le développement durable qui précise au point 16 qu'ils « sont déterminés à faire en sorte que notre riche diversité, qui constitue notre force collective, soit mise à profit pour nouer des partenariats constructifs axés sur le changement et visant à atteindre notre objectif commun, à savoir le développement durable. )) (texte de la déclaration disponible en ligne : <http://www.agora21.orgljoannesburglrapports/onu-joburg.pdf.».

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C'est le cas, entre autres, des 55 chefs d'États et de gouvernements membres de la Francophonie qui, au Sommet de Beyrouth en octobre 2002, ont déclaré être «décidés à contribuer activement à l'adoption par l'UNESCO d'une convention internationale sur la diversité culturelle, consacrant le droit des États et des gouvernements à maintenir, établir et développer des politiques de soutien à la culture et à la diversité culturelle.26 »

Ce point de vue non équivoque s'inscrit dans la logique même des termes de la Déclaration de Cotonou de la troisième Conférence ministérielle de la Francophonie sur la Culture, tenue les 14 et 15 juin 2001 sous le thème « La diversité culturelle »,

qui, en vue du Sommet de Beyrouth, avait constitué le premier texte adopté par une organisation internationale visant à favoriser explicitement l'adoption d'un instrument international sur la diversité culturellé7•

Dans la Déclaration de Cotonou, non seulement les pays membres de la Francophonie s'engagent-ils à promouvoir la diversité culturelle au sein des forums internationaux, dont l'UNESCO, mais ils estiment que «la façon de préserver la diversité culturelle demeure de s'abstenir de prendre des engagements de libéralisation

26 Déclaration de Beyrouth, IXe Conférence des chefs d'État et de gouvernement des pays ayant le français en partage, Beyrouth, les 18, 19 et 20 octobre 2002 à la p. 7 (texte disponible en ligne: <)1ttp://www.francophonie.orgidocuments/word/declarationslDec1aration de Beyrouth.doc».

27 Déclaration de Cotonou, Troisième Conférence ministérielIe de la Francophonie sur la Culture, Cotonou, les 14 et 15 juin 2001 (le texte de cette Déclaration ainsi que celui de son plan d'action sont disponibles en ligne: <http://confculture.francophonie.orgldossierpresse/dossier confculture.pdf». Cette Déclaration précise explicitement que «[n]ous convenons que la Francophonie doit aussi appuyer le principe d'un cadre réglementaire international à caractère universel favorable à la promotion de la diversité culturelIe. Cet instrument international consacrerait la légitimité des États et gouvernements à maintenir, établir et développer les politiques de soutien à la diversité culturelIe. »

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en matière de biens et services culturels, notamment dans le cadre de négociations d'accords internationaux de commerce, comme à l'OMC.28»

Cette prise de position s'inscrit dans un long cheminement ayant, entre autres, mené cette organisation à défendre et à promouvoir la diversité culturelle dans le contexte d'une mondialisation croissante. Ainsi, dès le Sommet de Moncton en 1999, les membres ont pris fait et cause, tant dans leur déclaration finale que dans leur plan d'action, pour la promotion, dans le processus d'intégration mondiale en cours, du «respect de la diversité culturelle, facteur indéniable de l'enrichissement du patrimoine universe1.29 »Ils donnaient ainsi suite à la Déclaration de Monaco adoptée par la première conférence des ministres de l'Économie et des Finances de la Francophonie en avril 1999, qui reconnaissait dans son cinquième paragraphe « l'importance de la promotion de la diversité linguistique et culturelle face aux défis de la mondialisation et la nécessité de prendre en compte cet objectif dans la définition de règles multilatérales dans le domaine du commerce et de l'investissement.3o »

Par ailleurs, une autre invitation pressante qu'a reçue l'UNESCO pour amorcer la préparation d'une convention contraignante visant à préserver la diversité culturelle provient du Réseau international sur la politique culturelle (RIPC). Le RIPC est une tribune internationale informelle où les ministres responsables de la culture d'une 28 Ibid.

29 Déclaration de Moncton et son plan d'action, VIII" Sommet des Chefs d'État et de gouvernement

ayant le français en partage, du 3 au 5 septembre 1999, Moncton, au point 4 de la Déclaration et à l'axe n002 du plan d'action (textes disponibles en ligne: <http://democratie.francophonie.org/artic1e.php3?id

artic1e=314&id rubrigue=553&artsuite=O».

30 Déclaration de Monaco, 1ère Conférence des ministres de l'Économie et des Finances de la

Francophonie, Monaco, les 14 et 15 avril 1999, au 5e paragraphe (texte de la déclaration disponible en ligne : <http://www.francophonie.org/Monaco/textes/dec1ara.rtf.>).

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soixantaine de pays peuvent chaque année échanger sur les questions de politique culturelle et sur les moyens de favoriser la diversité culturelle dans un contexte de plus

1 d· l' ,31 en p us mon la Ise .

Ainsi, outre la Francophonie, les ministres du RIPC, dont le ministre canadien, lors de leur 5e réunion annuelle au Cap (Afrique du Sud) en octobre 2002, sont convenus de travailler pour que l'UNESCO inscrive comme priorité à son agenda un instrument international sur la diversité culturelle32. Quelques mois plus tard, réunis à Paris en février 2003, les ministres membres du groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation du RIPC déclaraient ce qui suit:

[c]e projet donnera l'occasion à l'UNESCO, maison mondiale de la culture, d'être le lieu privilégié de la définition et de l'élaboration de politiques culturelles novatrices aptes à promouvoir le développement de toutes les cultures dans un environnement de paix, de coopération et de compréhension entre les nations et à l'intérieur des nations33.

Un tel énoncé ne surprend guère, puisqu'il faut souligner que le RIPC, créé à la suite d'une Rencontre internationale sur la politique culturelle à Ottawa en juin 1998 et qui avait fait le suivi de la Conférence de Stockholm, s'est rapidement mis au travail en faveur d'un instrument international sur la diversité culturelle. Dès septembre 2000, à Santorin en Grèce, lors de la Troisième rencontre des ministres du

31 Pour plus d'information, voir le site officiel en ligne du RIPC : www.incp-ripc.org.

32 Déclaration du Cap, Cinquième rencontre annuelle ministérielle du RIPC, Cap (Afrique du Sud), du

14 au 16 octobre 2002 (texte disponible en ligne: <http://206.191.7.19/meetings/2002/statement f.shtml».

33 RIPC, Communiqué de presse intitulé «Réunion ministérielle du groupe de travail sur la diversité

culturelle et la mondialisation du Réseau international sur la politique culturelle », Paris, les 5 et 6 février 2003 (communiqué disponible en ligne: <http://206.l91.7.19/w-group/wg-cdg/news0206 f.shtm1> ) [Communiqué de presse de février 2003 du RIPC].

(23)

RIPC, l'une des principales orientations que s'était donné le réseau était de poursuivre la réflexion sur un tel instrument34.

Ce faisant, les ministres du Réseau donnaient une suite favorable au document Réponses Internationales aux enjeux de la diversité culturelle35 du Groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation qu'ils avaient créé en 1999 lors de leur rencontre annuelle à Oaxaca au Mexique. Par la même occasion, ils donnaient le feu vert à son groupe de travail afin qu'il poursuive ses travaux entourant l'élaboration d'un nouvel instrument international de protection de la diversité culturelle. A suivi le rapport Portée et cadre d'un instrument international sur la diversité culturelle36, qui

a été remis à la rencontre annuelle des ministres tenue à Lucerne, en Suisse, en septembre 200 1, au cours de laquelle ils sont convenus de donner à son Groupe de travail un nouveau mandat de deux ans afin qu'il poursuive ses travaux sur cet instrument internationae7.

C'est dans ce contexte que, à leur 5e rencontre annuelle au Cap en Afrique du Sud, les ministres du RIPC ont pris connaissance du projet d'un Instrument

34 RIPe, Rapport de Santorin, Troisième rencontre annuelle ministérielle, Santorin (Grèce), du 27 au 29 septembre 2000 (texte disponible en ligne: <http://206.191.7.19/meetings/2000/santorini2/ statement f.shtml».

35 Groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation du RIPe, Réponses internationales

aux enjeux de la diversité culturelle, Santorin (Grèce), le 29 septembre 2000 (texte disponible en ligne: <http://206.191.7 . 19/meetings/2000/santorini2/consid f.shtml».

36 Groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation du RIPe, Portée et cadre d'un

instrument international sur la diversité culturelle, Lucerne (Suisse), septembre 2001 (texte disponible en ligne: <http://206.191. 7 .19/meetingsI200 lIpaper f.shtml».

37 RIPe, Rapport de Lucerne, Quatrième rencontre annuelle ministérielle, Lucerne (Suisse), du 24 au 26 septembre 2001 (texte disponible en ligne: <http://206.191.7.19/meetings/2001lstatement

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international sur la diversité culturelle38 préparé par le Groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation et sont convenus, d'une part, qu'il constituait « une base appropriée pour appuyer l'élaboration d'un accord exécutoire destiné à la protection et à la promotion de la diversité culturelle» et, d'autre part, que «l'UNESCO est l'institution internationale appropriée pour accueillir et mettre en œuvre l'instrument international sur la diversité culturelle.39 »

Soulignons que, parallèlement au RIPC, on trouve le Réseau international sur la diversité culturelle (RIDC) , qui comprend un réseau mondial d'artistes et de groupes culturels provenant de plus de 70 pays. Ce réseau, qui, selon ses propres termes, s'efforce de contrecarrer l 'homogénéisation culturelle occasionnée par la mondialisation4o, a été fondé à Santorin, en Grèce, du 24 au 26 septembre 2000 et se réunit depuis lors au cours des journées précédant la réunion annuelle des ministres de la Culture du RIPe.

Au nombre de ses principes fondateurs, il est précisé que :

les forces du marché à elles seules sont incapables d'encourager et de préserver la diversité culturelle, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale. Les États et les citoyens ont le droit et la responsabilité de mettre en oeuvre des politiques et programmes destinés à appuyer des activités artistiques et culturelles diversifiées et de les protéger d'interventions indésirables de forces extérieures, politiques ou économiques41•

38 Groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation du RIPe, Instrument international

sur la diversité culturelle, Cap (Afrique du Sud), octobre 2002 (texte disponible en ligne:

<http://206.191.7.19/meetings/2002/instrument f.shtml».

39 Déclaration du Cap, supra note 32.

40 Voir la page suivante du site officiel en ligne du RIDe: <http://www.incd.netlapropos.html>. 41 Voir la page suivante du site officiel en ligne du RIDe: <http://www.incd.netlapropos.html#a2>.

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C'est pourquoi, au dire de ce réseau, il faut envisager une mondialisation d'un genre différent, soit une mondialisation qui, tout en encourageant la production culturelle au sein des nations, favorise la coexistence dynamique de tout un éventail de cultures. À cette fin, pour contrecarrer les pressions croissantes visant à inclure la culture dans les accords commerciaux bilatéraux, régionaux et mondiaux, le RIDC croit, lui également, qu'un nouvel instrument international s'impose «pour offrir un fondement juridique permanent aux mesures gouvernementales qui favorisent la diversité culturelle.42 »

C'est dans ce contexte que, tout comme le RIPC avec qui il travaille régulièrement en tandem, ce réseau a présenté en janvier 2003 une Proposition de Convention sur la diversité culturelle, après en avoir proposé une première ébauche en mai 200243•

Tout cela, entre autres, mène au point culminant qu'a sans aucun doute constitué la 32e session de la Conférence générale de l'UNESCO de septembre-octobre 2003 qui a confié à Koïchiro Matsuura, son directeur général, le mandat d'élaborer et de soumettre à sa 33e session en octobre 2005 un avant-projet de convention internationale sur la protection de la diversité culturelle44.

42 Voir la page suivante du site officiel en ligne du RIDC : <http://www.incd.netJapropos.html#a1>. 43 RIDC, Proposition de Convention sur la diversité culturelle, Ottawa, janvier 2003 (texte disponible

en ligne: <http://www.incd.netidocs/CCDFjan2003Finale.pdf>).

44 UNESCO, Conférence générale, 32" session, Rapport de la Commission IV, Paris 2003, le 16 octobre

2003, 32C/74, (texte disponible en ligne: <http://unesdoc.unesco.orglimages/0013/001321/132141f .pdf#page=29». Pour plus d'information à ce sujet, voir également: UNESCO, Conseil exécutif, 166" session, Étude préliminaire sur les aspects techniques et juridiques relatifs à l'opportunité d'un

instrument normatifsur la diversité culturelle, Paris, le 12 mars 2003,166 EXl28 (texte disponible en ligne: <http://unesdoc. unesco.orglimages/0012/00 1297 /129718f.pdf».

(26)

Dans les jours qui ont suivi cette décision, la Sixième Réunion ministérielle annuelle du RIPC a salué l'initiative de l'UNESCO et les ministres de la Culture présents ont pris l'engagement de lui apporter, à cet égard, tout l'appui possible pour l'aider à élaborer cette nouvelle convention internationale45• Depuis lors, l'UNESCO s'est mis à l'œuvre et travaille à la préparation de son avant-projet de convention sur la diversité culturelle en prévision de son échéancier d'octobre 200546•

4. Diversité culturelle et développement durable

Au-delà de la volonté de protéger les produits culturels et artistiques, cet élan de discussions, de comité d'experts et de documents internationaux en faveur de la diversité culturelle dans le contexte de la libéralisation des échanges commerciaux à l'échelle mondiale a, de ce fait, produit une réflexion précieuse sur l'apport de la

45 Déclaration d'Opatija, Sixième rencontre ministérielle annuelle du RIPC, Opatija (Croatie), 16-18 octobre 2003 (texte de la déclaration disponible en ligne: <http://206.191.7.19/meetings/2003/ statements f.shtml». À cet égard, notons que les ministres de la Culture ont profité de l'occasion pour examiner la nouvelle ébauche du projet de Convention internationale sur la diversité culturelle préparé par son Groupe de travail sur la diversité culturelle et la mondialisation (Je document daté du 29 juillet 2003 se trouve sur le site officiel en ligne du RIPC à l'adresse suivante: <http://206.191.7.19/ iicdldraft f.pdf». Dans cette optique, soulignons également que, lors de leur septième réunion ministérielle annuelle, les ministres du RIPC ont poursuivi sur leur lancée en réitérant leur

« engagement à appuyer l'UNESCO de toutes les façons possibles durant le processus d'élaboration de la Convention.»: Déclaration de Shanghai, Septième rencontre ministérielle du RIPC, Shanghai (Chine), du 14 au 16 octobre 2004 (texte disponible en ligne: http://206.191.7.19/meetingsI2004/ statement f.shtml).

46 En fait, les travaux d'élaboration d'une telle convention ont donné lieu à trois réunion d'experts

indépendants convoqués par le Directeur général de l'UNESCO entre décembre 2003 et mai 2004, le tout suivi de trois réunions intergouvernementales d'experts entre septembre 2004 et juin 2005. Cela a donné lieu à des propositions d'avant-projets qui sont toujours, en date du 15 août 2005, au stade d'élaboration et qui sont loin de faire l'unanimité entre les pays membres de l'UNESCO. À ce sujet, voir: UNESCO, Rapport préliminaire du Directeur général contenant deux avant-projets de convention sur la protection de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques, Paris, le 3 mars 2005 (CLT/CPCI2005/CONF.203/6) [Avant-projets de convention] ; UNESCO, Appendice 2 au Rapport préliminaire du Directeur général contenant deux avant-projets de convention sur la protection de la diversité des contenus culturels et des expressions artistiques, Paris, le 29 avril 2005 (CLT/CPC/2005/CONF.203/6 -Add.) [Appendice 2 aux avant-projets de convention].

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diversité culturelle et le rôle que peuvent jouer les États pour la préserver et l'encourager.

Dans cette optique, on a rapidement pris position en faveur de la diversité culturelle comme équivalent, pour l'humain, de la biodiversité dans la protection de l'environnement et, ainsi, comme nécessité d'un développement durable qui tient compte de la richesse de l'ensemble de la société dans laquelle nous vivons47• Devant

la croissance de la mondialisation des échanges, dans un colloque international en 1999, Sheila Copps, la ministre du Patrimoine canadien de l'époque, s'est inquiétée ouvertement des risques de disparition de la« biodiversité humaine »48.

Or, pour bien saisir la portée d'un tel énoncé, il faut comprendre ce qu'est le développement durable. En fait, ce concept est généralement associé au rapport de la Commission des Nations Unies sur l'environnement et le développement intitulé Notre avenir à tous, mieux connu sous le nom de Rapport Brundtland. Selon ce rapport, le développement durable est celui « qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs.49 »

47 Selon le site officiel en ligne de l'UNESCO, ce parallèle entre la diversité culturelle et la biodiversité

a été explicitement reconnu pour une première fois par la Commission mondiale de la culture et du développement dans son rapport Notre diversité créatrice, supra note 19 : <http://unesco.orglculture/ industries/trade/html fr/question 18.shtml>. Par ailleurs, notons que ce parallèle est établi clairement à

l'article premier de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle, supra note 22 à l'art. 1, qui prévoit que « la diversité culturelle est, pour le geme humain, aussi nécessaire qu'est la biodiversité dans l'ordre du vivant. »

48 Communiqué de presse intitulé « Les biens culturels face à la mondialisation des échanges: promouvoir la diversité» et ayant trait à un colloque d'experts sur « la culture, le marché et la mondialisation », organisé par l'UNESCO en collaboration avec la Commission nationale française pour l'UNESCO avec le soutien des Gouvernements canadien et français, Paris, 16 juin 1999 (communiqué disponible en ligne : <http://www.unesco.orglbpi/fre/unescopresse/99-130f.htm> ).

49 Commission mondiale sur l'environnement et le développement, Notre avenir à tous, Montréal, Éd.

(28)

Deux principes sont naturellement associés à cette définition, soit celui d'un développement intégré qui tient compte de l'environnement dans la globalité de ses éléments, qu'ils soient d'ordre physique, naturel, culturel, esthétique, économique, social ou autre, et celui d'un souci d'équité entre les générations qui est associé à la durabilité en voulant préserver un environnement capable de soutenir le présent et l'avenir.

En faisant référence au développement, on critique, implicitement du moins, l'économie actuelle fondée sur l'épuisement des ressources à terme, tout en optant pour une croissance raisonnée qui suppose une économie dont on veut éliminer les effets négatifs sur l'environnement. De même, en ajoutant la durabilité à ce développement, ce dernier prend de l'envergure par l'idéal d'une vision à long terme qui aspire à une solidarité entre les générations.

À ce sujet, à en faire une lecture attentive, le développement dont parle le Rapport Brundtland constitue le projet d'une nouvelle relation de l'humain avec son milieu, une nouvelle éthique éloignée de l'idée selon laquelle l'humain est fait pour dominer et contrôler une nature et des ressources inépuisables. En fait, comme le résume si bien le rapport lui-même, le développement durable est

«

un processus de transformation dans lequel l'exploitation des ressources, la direction des investissements, l'orientation des techniques et les changements institutionnels se font

«sustainable development» est parfois traduite par «développement soutenable» plutôt que par « développement durable ».

(29)

de manière harmonieuse et renforcent le potentiel présent et à venir permettant de mieux répondre aux besoins et aspirations de 1 'humanité. 50 »

Ainsi sont couverts le court terme, le moyen terme et le long terme par rapport aux qualités actuelles ou potentielles du système - générations actuelles et futures, un horizon local, régional, national et planétaire, des objectifs multidimensionnels qui sont à la fois conciliateurs des facteurs économiques, environnementaux, sociaux, culturels et éthiques (et ce, par l'intégration de données objectives - à l'aide des méthodes quantitatives - et subjectives - à l'aide des méthodes qualitatives ou relativistes)51.

Bref, cette nouvelle éthique du développement entend être globalisante, véritable projet de société qui se propose d'allier le bien-être économique à des activités sociales et culturelles valorisantes pour l'ensemble des individus et des communautés qui composent notre univers - qu'ils soient du Nord ou du Sud - tout en respectant une éthique environnementale qui assure la pérennité de nos ressources matérielles et immatérielles. On le sait, le développement durable est un concept qui cherche à optimiser notre bien-être collectif et individuel dans un cadre de vie de qualité actuelle et future.

50 Ibid. à la p. 55.

51 Voir à ce sujet l'excellente introduction du texte de Christine Ricard (en collaboration avec Patrick

Claudez), Développement durable. Agriculture durable: concepts « durables» ?, Paris, Ministère de

l'Agriculture et de la Pêche - Direction des Affaires Financières et Économiques - Bureau Évaluation et Prospective, mars 1994 aux pp. 13-18.

(30)

Faisant le parallèle avec la biodiversité, de nombreux intervenants favorables à la diversité culturelle défendent dans ce contexte cette notion comme l'un des principaux éléments d'un développement réellement durable52, voire comme une

priorité dans l'agenda d'un tel développement53 :

[d]e la même manière que la biodiversité - c'est-à-dire l'immense variété des formes de vie qui se sont développées depuis des millions d'années - apparaît comme indispensable à la survie des écosystèmes naturels, les «écosystèmes culturels» composés d'une mosaïque complexe de cultures de plus ou moins grande influence, ont aussi besoin de la diversité pour préserver le patrimoine des générations futures54•

C'est ainsi que, ensemble, la biodiversité et la diversité culturelle sont perçues comme la clé de la durabilité de nos écosystèmes, condition essentielle à tout développement durable55•

Dans cette optique, la diversité culturelle permet au développement durable de prendre racine selon les traditions, méthodes de travail et rythmes vitaux des peuples

52 Rapportflnal, Rencontre internationale sur la politique culturelle ayant pour thème « La culture sur la

scène mondiale », Ottawa, 1998 à la p. 7 [Rapport final de la première rencontre internationale sur la politique culturelle]; Rapport de Santorin, supra note 34; Portée et cadre d'un instrument international sur la diversité culturelle, supra note 36.

53 UNESCO, Rapport final de la Table ronde des ministres de la Culture «2000-2010: Diversité

culturelle: les enjeux du marché », Siège de l'UNESCO, 11-12 décembre 2000 (texte disponible en ligne: <http://www.unesco.orglculture/developmentlhighli ghts/texts/html fr/table l.shtml» [Rapport final de l'UNESCO] ; UNESCO et diversité culturelle, supra note 21.

54 Voir le site officiel en ligne de l'UNESCO où on répond à la question 18 «qu'appelle-t-on la

diversité culturelle? » : <http://unesco.orglculture/industries/trade/html fr/question 18.shtml>.

55 Koïchiro Matsuura, Discours du Directeur général de l'UNESCO à l'ouverture de la Table ronde

intitulée «Diversité culturelle et biodiversité pour un développement durable» co-organisée par l'UNESCO, le Programme des Nations Unies pour l'environnement et le Gouvernement français dans le cadre du Sommet mondial pour le développement durable à Johannesburg, le 3 septembre 2002 (transcription disponible en ligne: <http://unesdoc. unesco.orglimages/OO 12/00 1272/127279f.pfd».

(31)

en cause56. Autrement dit, pour reprendre les mots de Rafael Tovar de Teresa, la

diversité culturelle est indispensable, «parce que des groupes différents possédant chacun leurs aspirations et leurs traits culturels propres ne peuvent se développer en suivant des cheminements identiques. 57 »De cette façon, la diversité culturelle touche

aux fondements mêmes de l'existence humaine, en assurant à l'être humain sa dignité, sa liberté de créer et sa capacité de s'exprimer en fonction de son individualité et de son appartenance à un groupe auquel il adhère et s'identifie58•

À cet égard, dans le cadre d'une approche intégrée59, il faut reconnaître que les

fondements véritables d'un développement durable reposent, entre autres, sur une valorisation des connaissances et des pratiques à l'œuvre dans ce qu'il est convenu d'appeler le patrimoine culturel immatériel6o• Ce patrimoine peut se définir comme «un ensemble vivant et en perpétuelle recréation de pratiques, de savoirs et de représentations, qui permet aux individus et aux communautés, à tous les échelons de la société, d'exprimer des manières de concevoir le monde à travers des systèmes de valeurs et des repères éthiques.61

»

56 Rapport final de la première rencontre internationale sur la politique culturelle, supra note 52 aux

pp. 13 et 18.

57 Ibid. à la p. 12.

58 Rapportfinal de l'UNESCO, supra note 53.

59 Une telle approche intégrée a été clairement préconisée lors de la quatrième rencontre annuelle des

ministres de la Culture du RIPC qui a eu lieu à Lucerne en Suisse du 24 au 26 septembre 200l. Voir à

cet égard, le Rapport de Lucerne, supra note 37.

60 Déclaration d'Istambul,

me

Table ronde des ministres de la Culture portant sur «Le patrimoine

culturel immatériel, miroir de la diversité culturelle », Istambul, les 16-17 septembre 2002 au point 6 (texte disponible en ligne: <http://portal.unesco.org/fr/ev.php-URL ID=6209&URL DO=DO TOPIC &URL SECTION=201.html».

(32)

Cette dernière notion, creuset fondamental de la diversité culturelle62, nous

rappelle que la culture ne se limite pas aux aspects tangibles ou matériels, comme le sont les monuments, les objets et les immeubles, mais comprend également un aspect intangible ou immatériel tel que les langues, les traditions et les croyances63•

Pareille VISIOn cadre parfaitement avec la Déclaration de Mexico sur les

politiques culturelles, qui souligne que :

dans son sens le plus large, la culture peut aujourd'hui être considérée comme l'ensemble des traits distinctifs spirituels et matériels, intellectuels et affectifs qui caractérisent une société ou un groupe socia1. Elle englobe outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions, les croyances [ ... ]64.

De même, en faisant valoir le rôle déterminant de la culture dans le monde, la Banque mondiale considère maintenant que le patrimoine culturel, dont celui, immatériel, qui représente la totalité des habiletés et des connaissances d'une société, est fondamental pour assurer le développement durable65. Par conséquent, la diversité

62 Ibid. au point 6.

63 RIPC, Session plénière 1, Table ronde, « Le patrimoine cultuel en tant que facteur dynamique de la continuité culturelle », Troisième rencontre ministérielle annuelle, Santorin (Grèce), le 29 septembre 2000 (texte disponible en ligne: <http://206.191. 7 . 19/meetings/2000/santorini2/session 1 f.shtml».

64 Soulignons que cette définition de la culture, qui est comprise dans la Déclaration finale adoptée par

la Conférence mondiale sur les politiques culturelles de l'UNESCO à Mexico le 6 août 1982, a été reprise intégralement par ce même organisme dans le préambule de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle, supra note 22. Dans la même veine, la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme indiquait que « [l]a culture est une façon d'être, de penser, de sentir; c'est un ensemble de mœurs et d'habitude, c'est aussi une expérience commune; c'est enfin un dynamisme propre à un groupe qu'unit une même langue» : Canada, Rapport de la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme: Les langues officielles, livre l, Ottawa, Approvisionnements et Services Canada, 1967 aux paras.38-40 aux pp. xxi-xxii [Commission Laurendeau-Dunton Livre 1].

65 Banque mondiale, Culture and Sustainable Development: A Framework for Action cité dans RIPC,

Quatrième rencontre ministérielle annuelle, Session intitulée « Initiatives culturelles en matière de patrimoine culturel », Lucerne (Suisse), du 24 au 26 septembre 2001 (texte disponible en ligne: <http://206.191.7.19/meetings/2001/initiatives f.shtml».

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