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Le redoublements dans les écoles primaires rurales publiques d'Haïti et leurs incidences socio-économiques

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Academic year: 2021

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(1)

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u FACULTE DES SCIENCES D'EDUCATION

S * ^

IsL

L

) C \

p s s l

™ESE

PRESENTEE

A L'ECOLE DES GRADUES

DE L'UNIVERSITE LAVAL

COMME EXIGENCE PARTIELLE

POUR L'OBTENTION

DU GRADE DE MAITRISE EN SCIENCES DE L'EDUCATION (M.A.)

(ADMINISTRATION SCOLAIRE)

PAR

ANDRE PHILIPPE

LES REDOUBLEMENTS DANS LES ECOLES PRIMAIRES RURALES PUBLIQUES

D 'HAÏTI

ET LEURS INCIDENCES SOCIO-ECONOMIQUES

(2)

g o u f d ' a l l e r t o u j o u r s pl u s l o i n ; A mon co u ra ge u x p è re , A u g u s t e , qui d e p u i s d éjà 50 a n s s 'a d o n n e i n la s s a b l e m e n t à la d i f f i c i l e tâ ch e de montrer aux j e u n e s g é n é r a t i o n s h a ï t i e n n e s comment " s u r v i v r e " ; Je la d éd ie a u s s i à mon épouse b ie n -a im é e , B e t t y , qui a accepte de p a r t a g e r avec mot l e s s a c r i f i c e s im p o sé s par c e t t e re c h e rc h e ; A ma f i l l e M a r i e - C a s s a n d r e , p o i r q u 'e l le découvre le p l a i s i r " d 'a p p r e n d r e à a p p re n d re " e t q u ' e l l e vie n n e à comprendre que l 'é d u c a t i o n e s t un voyage a u s s i long que la v i e .

(3)

AVANT-PROPOS

Dans le foisonnement des réformes, expériences et bouleversements

qui, depuis le début des années 70, ne cesse de caractériser le système

éducatif haïtien, il nous apparaît nécessaire, sinon urgent, de porter

notre réflexion sur un des problèmes les plus cuisants de ce système, à

savoir, la déperdition scolaire au premier cycle rural public. Ce problè­

me, nous voulons l'aborder sous son aspect quantitatif, c'est-à-dire, en

essayant de mesurer les incidences socio-économiques des redoublements sur

le fonctionnement interne du système.

Si cette recherche contribue à mettre en évidence le gaspillage énor­

me de ressources humaines et financières que représentent les taux élevés

de redoublement dans l'enseignement primaire rural haïtien, si elle aide

les responsables de la politique éducative dans une éventuelle lutte contre

la déperdition scolaire en Haïti, nous aurons sans doute atteint notre ob­

jectif principal.

Qu'il nous soit permis d'exprimer notre profonde gratitude à notre

directeur de thèse, Monsieur Oean Moisset, professeur au Département

d 'Administration et Politique scolaires de l'Université Laval. Sa

compétence, son dévouement et son sens critique nous ont été d'un atout

(4)

de recherche ont largement contribué à la réalisation de cette thèse.

D'autres amis et collaborateurs se sont prêtés de bonne grâce à la

concrétisation de cette recherche. Il s'agit de Maître Roger Lamour, Ins­

pecteur Départemental du Sud (Haïti), qui, dans des circonstances souvent

difficiles, nous a apporté une collaboration soutenue dans la cueillette

des informations nécessaires auprès du Département de l'Education Nationale

(D.E.N.); MM. Antoine Ambroise du Département de Science Politique, Roland

Ouellet, du Département d 'Administration et Politique scolaires de l'Uni­

versité Laval, pour leurs suggestions et assistances fort appréciées. Nous

leur disons toute notre reconnaissance.

Nous exprimons enfin nos hommages et notre gratitude à notre épouse

bien-aimée Betty L. pour sa patience et sa compréhension. Elle a non seu­

lement aidé à la dactylographie de cette thèse, mais elle a su admirable­

ment s'adapter aux conditions mouvantes imposées par la réalisation de

(5)

— i i i —

AVANT-PROPOS... i

LISTE DES TABLEAUX... vi

LISTE DES DIAGRAMMES ET GRAPHIQUES... vii

INTRODUCTION... 1

PREMIERE PARTIE; 1. LA POSITION DU PROBLEME 1.1 Situation socio-économique d'Haiti... 4

1.2 Situation actuelle de l'enseignement en Haïti... 7

1.3 La déperdition dans l'enseignement primaire en Haïti.... 11

1.3.1 Quelques généralités et faits saillants... 11

1.3.2 Aspects quantitatifs et financiers... 12

1.3.3 Définition et circonscription du problème... 18

1.3.4 Objectifs de l'étude... 19

1.4 Pertinence de la question... 20

1.4.1 Pertinence théorique: les limites des études an- 20 térieures... 1.4.2 Pertinence sociale: les incidences socio-écono- 22 miques de l'étude des coûts des redoublements.... 1.4.3 Pertinence politique: contribution à une nouvel- 23 le orientation de l'Ecole Haïtienne... DEUXIEME PARTIE: 2. REVUE DE LA LITTERATURE ET CADRE DE REFERENCE 2.1 Introduction... 25

2.2 Différentes approches du problème du redoublement... 25

2.2.1 Le redoublement vu dans une perspective pédagogi- 26 g u e ... 2.2.2 Le redoublement vu dans une perspective économi- 31 q u e ... 2.2.3 Le redoublement et les études statistiques de 33 l'UNESCO... 2.3 Cadre de référence... 34

2.3.1 Les limites de l'étude... 35

2.3.2 Les concepts-clé de l'étude... 37

2.3.2.1 Le concept de redoublement... 38

2.3.2.2 Le concept de rendement de l'enseignement 38 2.3.2.3 Le concept de coût de l'enseignement.... 40

TABLE DES MATIERES

(6)

TROISIEME PARTIE: 3. ASPECTS METHODOLOGIQUES DE LA RECHERCHE

3.1 Introduction... 48

3.2 Stratégie de cueillette des données... 49

3.2.1 Documents statistiques utilisés... 49

3.2.2 Lacunes et faiblesses de ces documents... 50

3.2.3 Avantages offerts par ces documents... 51

3.3 Instruments de mesure utilisés dans cette recherche... 54

3.3.1 Population visée par l'étude... 54

3.3.2 Définition des termes et outils statistiques uti- 55 s é s ... 3.3.3 Méthodes de calcul impliquées pour la description 56 et la mesure du phénomène du redoublement... 3.3.3.1 La méthode des cohortes reconstituées... 57

3.3.3.2 Méthode d'évaluation du rendement réel 64 de la cohorte considérée... 3.3.3.3 Méthode d'évaluation des coûts impliqués 66 dans notre étude... 3.4 Rappel des objectifs visés par l'étude... 67

QUATRIEME PARTIE: 4. ANALYSE ET INTERPRETATION DES DONNEES 4.1 Introduction... 69

4.2 Plan d'analyse 70

4.3 Présentation des données statistiques relatives à l'en- 72

semble des écoles primaires rurales publiques d'Haïti entre 1975/76 et 1981/82...

4.4 Niveau global de redoublement dans l'enseignement pri- 77

maire rural public entre 1975/76 et 1981/82...

4.5 Flux réel des effectifs scolaires au premier cycle rural 80

entre 1975/76 et 1981/82...

4.6 Evolution d'une cohorte de 1,000 élèves inscrits au pre- 87

mier cycle rural entre 1975/76...

4.7 Profil de redoublement dans l'enseignement primaire rural 95

public haïtien de 1975/76 à 1981/82...

(7)

V

-Page

4.8 Analyse combinée de rendement et de coût de l'enseignement 99

primaire rural public haïtien entre 1975/76 et 1981/82..

4.9 Diagnostic sommaire de la situation actuelle de l'ensei- 111

gnement primaire rural public d'Haïti...

CINQUIEME PARTIE - 5. CONCLUSION

5.1 Rappel des points saillants de l'étude... 116

5.2 Quelques pistes de solutions pour l'avenir... 121

(8)

LISTE DES TABLEAUX

1.1 REPARTITION, PAR GROUPE D'AGE, DES TAUX D 'ALPHABETISME, 1971

1.2 EFFECTIFS D'ELEVES ET PROPORTION DE REDOUBLANTS PAR NIVEAU.

OCTOBRE 1976. ENSEIGNEMENT PRIMAIRE RURAL PUBLIC.

1.3 POURCENTAGE DE REDOUBLANTS DE L'ENS. PRIMAIRE RURAL HAÏTIEN

QUI REDOUBLENT LA MEME ANNEE POUR LA 2EME ET 3EME FOIS, PAR ANNEE D'ETUDES ET AU COURS DE L'ENSEMBLE DU CYCLE.

1.4 POURCENTAGE DE REDOUBLANTS DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE EN

HAÏTI. GARÇONS ET FILLES.

1.5 POURCENTAGE DE REDOUBLANTS DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE.

GARÇONS ET FILLES.

4.1 EFFECTIFS PAR ANNEE D'ETUDES DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE

RURAL PUBLIC (FILLES ET GARÇONS).

4.2 REPARTITION EN POURCENTAGE DES EFFECTIFS SCOLARISES DES

ECOLES PUBLIQUES PAR ANNEE D'ETUDES EN MILIEU RURAL, DE 1975/76 A 1981/82.

4.3 POURCENTAGE DES REDOUBLANTS DANS CHAQUE ANNEE D'ETUDES DE

1975/76 A 1981/82.

4.4 EVOLUTION DU NIVEAU DE REDOUBLEMENT DANS LES EPRP POUR LA PERIODE ALLANT DE 1975/76 A 1981/82.

4.5 EFFECTIFS, REDOUBLEMENTS, PROMOTIONS ET ABANDONS DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE RURAL PUBLIC. PERIODE 1975/76 A 1981/82 (FILLES ET GARÇONS).

4.6 TAUX DE REDOUBLEMENT, DE PROMOTION ET D'ABANDON OBSERVES DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE RURAL PUBLIC. PERIODE 1975/76 A 1980/81.

4.7 PROFIL DES ELEVES REDOUBLANT LA MEME CLASSE D'UNE COHORTE DE 1,000 ELEVES. ENS. PRIMAIRE RURAL PUBLIC. DE 1975/76 A 1981/82.

4.8 PROGRESSION DES EFFECTIFS DE LA PREMIERE (75/76) JUSQU'A LA DERNIERE ANNEE D'ETUDES (81-82) DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE

RURAL PUBLIC D 'HAÏTI, EN PRENANT POUR BASE 62,430 = 1,000.

4.9 DEPENSES DE L'ETAT HAÏTIEN POUR L'EDUCATION PAR TYPE D'ENSEI­

GNEMENT. BUDGET DE FONCTIONNEMENT, 1976/77. EN MILLIERS DE GOURDES.

4.10 REPARTITION DE L'AIDE ETRANGERE CONSACREE A L'ENSEIGNEMENT RURAL EN HAÏTI. 1976. 7 13 14 15 15 73 74 77 79 82 85 96 102 105 Page 107

(9)

— v i i — DIAGRAMME 3.1 DIAGRAMME 3.2 GRAPHIQUE 4.1 DIAGRAMME 4.1 DIAGRAMME 4.2 DIAGRAMME 4.3 DIAGRAMME 4.4 GRAPHIQUE 4.2 DIAGRAMME 4.5

LISTE DES DIAGRAMMES ET GRAPHIQUES

FLUX D'ELEVES ENTRE LES ANNEES D'ETUDES 1 ET 2 POUR LES DEUX ANNEES SCOLAIRES T ET T + 1.

RECONSTITUTION DE L'HISTOIRE D'UNE COHORTE PAR ANNEE SCOLAIRE ET PAR ANNEE D'ETUDES.

POURCENTAGE D'ELEVES PAR ANNEE D'ETUDES DANS LES ECOLES PRIMAIRES PUBLIQUES EN MILIEU RURAL.

1975/76, 1978/79, 1981/82.

MOUVEMENT DES ELEVES INSCRITS EN ANNEE D'ETUDES 1 DANS LES EPRP D'HAITI DE 1975/76 A 1976/77.

CONVERSION DES DONNEES REELLES EN POURCENTAGE EN PRENANT POUR BASE 64,230 = 100.

FLUX REEL DES EFFECTIFS DANS L'ENS. DU PREMIER CYCLE. PERIODE 1975/76 A 1981/82 (ZONES RURALES, FILLES ET GARÇONS).

EVOLUTION D'UNE COHORTE DE 1,000 ELEVES DANS L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE RURAL PUBLIC SELON LES TAUX DE REDOUBLEMENT, DE PROMOTION ET D'ABANDON OBSERVES AU TABLEAU 4.6.

PROFIL DE REDOUBLEMENT PAR ANNEE D'ETUDES DANS LE PREMIER CYCLE RURAL HAÏTIEN. DE 1975/76 A 1980/81.

DIVERS INDICATEURS QUI PERMETTENT D'EVALUER LE RENDEMENT DE L'ENSEIGNEMENT AU PREMIER CYCLE RURAL EN HAÏTI, TEL QU'IL RESSORT DU DIAGRAMME 4.4.

58 62 75 81 84 89 91 97 Page 100

(10)

5IGLES

ACDI : AGENCE CANADIENNE DE DEVELOPPEMENT INTERNATIONAL

BID : BANQUE INTERAMERICAINE DE DEVELOPPEMENT

BIE : BUREAU INTERNATIONAL DE L'EDUCATION

CEP : CERTIFICAT D ’ETUDES PRIMAIRES

CONADEP : COMITE NATIONAL DE DEVELOPPEMENT ET DE PLANIFICATION

DARNDR : DEPARTEMENT DE L ’AGRICULTURE, DES RESSOURCES NATURELLES ET DU

DEVELOPPEMENT RURAL

DEN : DEPARTEMENT DE L ’EDUCATION NATIONALE

DRIPP : DEVELOPPEMENT REGIONAL INTEGRE DE PETIT-GOAVE ET

PETIT-TROU DE NIPPES

EPRP : ECOLES PRIMAIRES RURALES PUBLIQUES

PNUD : PROGRAMME DES NATIONS-UNIES POUR LE DEVELOPPEMENT

TNS : TAUX NET DE SCOLARISATION

UARD : UNITE D ’ANALYSE ET DE RECHERCHE DEMOGRAPHIQUES

(11)

INTRODUCTION

De prime abord, le problème des échecs scolaires - à l'intérieur du­

quel s'inscrit le phénomène du redoublement - semble relever uniquement du

domaine de la psycho-pédagogie. Parents et maîtres se sont vite accoutumés

à associer succès scolaire et quotient intellectuel des enfants, et se con­

tentent la plupart du temps de constater que ceux qui sont intelligents

réussissent à l'école tandis que les autres sont voués soit à l'abandon

précoce des études, soit au redoublement.

Mais, devant le nombre croissant d'élèves qui échouent chaque année,

devant l'augmentation significative des dépenses d'éducation, les adminis­

trateurs et les responsables de l'enseignement ont peu à peu pris conscien­

ce que le phénomène des échecs et des retards scolaires ne peut être envi­

sagé uniquement sous un angle psycho-pédagogique, il doit être également

confronté sous un angle socio-économique.

En effet, les échecs scolaires allongent la durée normale de la sco­

larité, obligeant les élèves à "doubler" une ou plusieurs classes, quand

ils ne les contraignent pas à l'abandon pur et simple en cours de route.

Un certain nombre d'années/élève se trouve ainsi dépensé en plus du minimum

(12)

une disparité criante entre, d'une part, leur effort financier en faveur de

l'éducation (inputs) et d'autre part, les résultats de cet effort mesuré

par la quantité d'élèves qui complètent leurs études et par le niveau

d'instruction de la population (outputs). Ce sont toutes ces constatations

qui placent le problème du rendement de l'enseignement et de la déperdition

d'effectifs au coeur des recherches actuelles en Pédagogie.

Le présent rapport se veut une contribution dans une éventuelle lutte

contre la déperdition scolaire en Haïti. Il constitue une étude quantita­

tive de l'ampleur, de l'évolution et du profil du redoublement dans l'en­

seignement primaire rural haïtien. Et il sera articulé en cinq étapes.

Dans une première partie, nous situerons le pays de l'étude dans son

contexte véritable de sous-développement socio-économique, pour ensuite

présenter la problématique de notre recherche et établir la pertinence du

sujet abordé.

Suivra au chapitre II une revue de la littérature pertinente où nous

ferons l'inventaire, d'une part, des différentes approches du problème du

redoublement dans le monde, et d'autre part, des concepts et éléments rete­

nus pour asseoir notre analyse (cadre de référence).

Le chaptire III portera sur la discussion des aspects méthodologiques

de la recherche et la définition des "outils" statistiques utilisés dans

notre démarche; tandis que le chapitre IV sera consacré à l'analyse et

l'interprétation des données statistiques recueillies, pour ensuite débou­

cher sur un diagnostic sommaire de la situation actuelle de l'enseignement

(13)

Enfin, dans une dernière partie (chap.V), en guise de conclusion,

nous dégagerons les points saillants de l'étude et proposerons certaines

avenues susceptibles de colmater ce gaspillage de ressources humaines et

financières que représente le redoublement dans les écoles rurales publi­

(14)

LA POSITION DU PROBLEME

Pour mieux circonscrire le problème des redoublements dans les EPRP

d'Haïti, il nous apparaît non seulement utile, mais nécessaire de situer

l'ensemble du système scolaire haïtien dans son contexte économique et so­

cial .

1.1 Situation économique d'Haïti

"De tous les pays de l'Amérique Latine, Haïti est le plus sous-déve-

loppé". Ce jugement peut paraître extrêmement sévère, certes - il vient de

la Bangue Inter-Américaine de Développement (BID) - mais il n'est pas sans

justesse. Un rapide coup d'oeil sur le relevé signalétique qui suit nous

(15)

Population Superficie Industries Agriculture---Population rurale----Population urbaine---Densité démographique Taux d 'accroissement-Espérance de

vie---Mortalité infantile (1 à 4 ans)

Nombre

d'hôpitaux---Nombre d'habitants pour un médecin

Taux

d'analphabétisme---Taux de scolarisation (6 à 24 ans)

Revenu per capita

5.700.000 habitants

28,750 km2

rhum, mélasse, tourisme, transformation/assemblage

café, riz, coton, cacao, sucre

75% 25% 195 hab./km^ 2.89 47 ans/hommes - 50 ans/femmes 170/1,000 habitants 44 15.000 78% 22% 200 $ US

(16)

Comme toutes les moyennes statistiques, les données socio-économiques

qui composent ce relevé signalétique ne sont que des indicateurs de sous-

développement. Elles laissent à peine entrevoir les multiples disparités

et contradictions qui séparent et opposent entre elles, d'une part, les ré-

qions urbaines et rurales du pays, et d'autre part, les différentes classes

sociales haïtiennes. S'il est vrai, en effet, que le revenu annuel par ha­

bitant ($200) est un des plus bas du monde, il n'en demeure pas moins

qu'environ 1% de la population se partage plus de 44% du revenu total tan­

dis que 61% de la population vit avec $60 par année. On se trouve ainsi

face à un grave problème de "distribution extrêmement inéquitable" de la

richesse du pays, problème qui, au-delà des considérations sociales, a des

répercussions négatives sur le développement économique du pays aussi bien

que sur son éducation. En effet, comme l'indique une étude de l'UNESCO

(1957, p . 186).

"Le développement de l'instruction dans un pays est peut-être encore plus étroitement lié à la répartition du revenu dans ce pays qu'au montant du revenu par

habitant. Lorsque le revenu est concentré entre les

mains d'une petite partie de la population, l'instruc­ tion tend à être le privilège de quelques-uns, et une grande partie de la population demeure analphabète. D'autre part, lorsqu'un plus grand nombre de personnes savent lire et écrire et que l'instruction en général est plus répandue, l'écart diminue, entre les ressour­ ces du groupe d'habitants ayant un revenu élevé et celles de personnes à faible revenu, et l'on tend vers une répartition plus égale de l'ensemble du revenu na­ tional" .

Bien qu'elle date déjà de quelques années, cette constatation, faite

par l'UNESCO à propos de l'analphabétisme dans le monde, nous apparaît per­

tinente et fondamentale pour bien comprendre la situation actuelle de l'en­

seignement en Haïti. En effet, malgré le fait que toutes les constitutions

du pays ont, depuis 1805 jusqu'à nos jours, consacré et réitéré les princi­

(17)

-7-spectacle d'un peuple à majorité illettré et opprimé, victime d'une distri­

bution extrêmement inéquitable des revenus, vivant en dessous du seuil de

la pauvreté absolue, et en proie à des problèmes de malnutrition chroni­

que. Et dans la mesure où un pays sous-développé est un pays sous-ensei-

gné, il nous semble tout à fait logique que son sous-développement se ré­

percute dans son système scolaire.

1.2 Situation actuelle de l'enseignement en Haïti

Si nous nous référons au recensement général de la population en 1971,

on sait que le taux d'alphabétisme, c'est-à-dire le pourcentage de person­

nes de 10 ans et plus sachant lire et écrire, en Haïti est de 22%. Malgré

les progrès réalisés par rapport aux années 1950 - où le taux d'alphabétis­

me atteignait seulement les 10% - la situation de l'enseignement en Haïti

révèle des carences importantes comme le montre le tableau suivant:

Tableau 1.1: Répartition, par groupes d'âge, des taux d 'alphabétisme. 1971.

Haiti total Pop. urbaine Pop. rurale

Age Les deux Les deux Les deux

sexes m a s c . fém. sexes m a s c . fém. sexes m a s c . fém.

(1) (2) (3) (4) (5) (6) (7) (8) (9) (10) 10-14 27 28 26 61 68 55 17 19 15 15-19 33 36 31 66 78 59 22 26 19 20-24 30 36 24 61 76 51 19 26 13 25-29 24 31 17 55 70 45 15 22 8 30-34 20 28 14 52 67 42 12 19 6 35-39 16 22 11 48 61 38 9 15 4 40-44 15 20 11 48 59 39 8 12 4 45-49 14 18 10 47 58 39 7 11 3 50-54 14 17 10 49 59 40 6 10 2 55-59 13 17 9 48 60 38 6 9 2 60-64 11 14 8 44 57 36 4 7 1 65-69 10 13 7 42 55 34 3 6 1 70-74 9 12 8 40 52 34 4 6 1 75et+ 9 11 8 40 52 35 3 5 1 10et+ 22 27 18 56 68 48 13 18 9

(18)

Ce tableau permet quelques constatations intéressantes sur les taux

d 'alphabétisme par groupe d'âge, en même temps qu'il met en évidence des

différences très sensibles entre régions urbaines et régions rurales. Plus

que la moitié des gens, en milieu urbain, sont recensés comme alphabétisés,

tandis qu'ils représentent 13% seulement en milieu rural.

Mais on ne saurait parler de taux d 'alphabétisme sans parler aussi de

fréquentation scolaire, laquelle se mesure par le taux de scolarisation.

Sur la base des données nationales de 1978/79, ce taux de scolarisation,

c'est-à-dire le rapport population scolaire / population scolarisable de 6

à 24 ans est de 48% dans les villes et de 13% dans les campagnes. Le total

des élèves de l'enseignement primaire est de 8% par rapport à la population

totale du pays, alors qu'en République Dominicaine, notre plus proche voi­

sin, il est, selon Wiesler (1978, p.14), de 20% et au Mexique, 18%. Par

ailleurs, selon les résultats de l'enquête de 1980/81 menée par le D.E.N.

(1981, p.34) sur un total de 887,400 enfants de 6 à 12 ans seulement

378,100 du même groupe d'âge seraient inscrits dans les écoles primaires,

ce qui représente un taux net de scolarisation (TNS) de 42,6%. Autrement

dit, il y aurait 509,300 enfants de 6 à 12 ans qui ne fréquentent aucune

école primaire. Comparant ensuite l'enseignement primaire urbain et l'en­

seignement primaire rural, la même enquête révèle un TNS de 72% en milieu

urbain contre un TNS de 30,2% en milieu rural.

Les données ci-dessus suggèrent trois (3) remarques importantes, à

savoir :

1 - qu'il existe un déséquilibre inquiétant entre population

(19)

-9-2 - qu'en dépit du fait que la fréquentation scolaire reste obliga­

toire jusqu'à 14 ans de par la constitution de 1971, cela reste

théorique faute d'établissements suffisants et d'une politique

cohérente de scolarisation.

3 - que les régions à prédominance rurale sont défavorisées par rap­

port aux régions urbaines sous la plupart des aspects du dévelop­

pement de l'éducation en Haïti.''

Un simple coup d'oeil rapide sur le fonctionnement interne des écoles

primaires à travers le pays nous révèle, par ailleurs, plusieurs autres

faits à prendre en considération au début d'une recherche comme celle-ci.

1 - un très faible rendement du système scolaire en place (cf.

D.E.N. 1982 pp. 12-13): à peine 38% des élèves scolarisés de mi­

lieu rural atteignent la 4ème année qui est considéré comme le

seuil minimal d'une alphabétisation durable; et 1% seulement de

ces mêmes élèves obtiennent le certificat d'études primaires

(CEP). Pour le milieu urbain, ces pourcentages sont plus élevés,

soit 70% et 48%. Cependant, il faut tenir compte du fait que 80%

de la population vit en milieu rural.

2 - une trop grande rigidité de la structure actuelle du système pri­

maire: elle n'offre qu'une seule possibilité: le CEP après un

cycle de 6 ou 7 ans. Seule une infime proportion d'élèves y

accède.

1. De façon générale, les villes sont toujours plus scolarisées que les

campagnes, ne serait-ce qu'en raison de la forte concentration des établissements scolaires dans les villes. Précisons aussi que la pro­ portion d'élèves qui fréquentent les écoles rurales est de beaucoup plus faible que celle des écoles urbaines.

(20)

3 - un système de promotion scolaire trop rigoureux et trop sélectif,

surtout pour chacune des premières années de l'enseignement pri­

maire, d'où:

a) rejet hors du système d'une proportion considérable d'enfants

qui ne peuvent s'adapter et se découragent.

b) régression rapide à l'analphabétisme lorsque l'abandon inter­

vient au tout début du cycle, parce que les mécanismes de la lec­

ture et de l'écriture ne sont pas encore fixés.

c) taux inquiétants de redoublement et d'abandon scolaires d'un

bout à l'autre du cycle: ce sur quoi nous allons nous pencher de

façon plus minutieuse dans notre problématique.

k - des programmes scolaires inadaptés, sans objectifs précis, sans

une orientation pédagogique qui permettrait aux maîtres de les

appliquer d'une manière cohérente et rationnelle.

5 - une méthodologie pédagogique basée sur des attitudes tradition­

nelles négatives comme l'autoritarisme du maître, la passivité de

l'élève, la mémorisation à outrance de connaissances purement li­

vresques .

6 - des difficultés linguistiques au niveau de la communication péda­

gogique pour une grande majorité d'enfants qui entrent à l'école

sans aucune connaissance théorique ou pratique de la langue fran­

çaise.

7 - carence flagrante de personnel enseignant gualifié dont la pro­

portion demeure extrêmement faible, si on se base sur des critè­

res tels: diplôme de l'école normale primaire, certificat d'ap­

titudes pédagogiques. Cette proportion est, selon Wiesler (1978,

p.27), de 36% dans l'enseignement primaire urbain et de 29% dans

(21)

-11-8 - carence aussi de matériel didactique adapté au contexte haïtien,

de locaux scolaires appropriés et fonctionnels.

Autant de problèmes qui ne vont pas sans entraîner des conséquences

extrêmement lourdes en termes de ressources humaines et financières gaspil­

lées; conséquences encore plus lourdes en termes de limitation des capaci­

tés d'accueil dans un pays où de toute évidence la précarité des ressources

financières de l'Etat ne lui permet pas de garantir une instruction élémen­

taire à tous les enfants soumis à l'obligation scolaire."'

1.3 La déperdition dans l'enseignement primaire en Haïti

1.3.1 Quelques généralités et faits saillants

Parmi tous les problèmes soulevés plus haut, celui du très faible ren­

dement interne de l'enseignement primaire rural caractérisé par des taux

élevés de déperdition scolaire nous apparaît le plus grave, pour ne pas

dire le plus préoccupant.

Sans doute, l'abandon précoce des études (drop-out) et le redoublement

de classe (grade répétition) n'épargnent aucun système scolaire dans le

monde. Une enquête réalisée et présentée à la 32ème Conférence Internatio­

nale de l'Education en 1970 par le BIE considère la déperdition comme un

problème mondial. Mais un tel problème s'avère plus inquiétant lorsqu'il

affecte un pays pauvre comme Haïti où, non seulement une proportion impor­

tante d'enfants (57,4%) ne fréquente aucune école primaire, mais encore où

la majorité de ceux qui sont engagés dans les études y redouble plusieurs

fois et abandonne sans en avoir atteint les objectifs, engouffrant ainsi

inutilement des ressources déjà insuffisantes.

1. L'article 22 de la Constitution de 1955 déclare: "La liberté de l'en­

seignement s'exerce.... sous le contrôle et la surveillance de l'Etat, qui doit s'intéresser à la formation morale et civique de la jeunes­

se. L'instruction primaire est obligatoire. L'instruction publique

(22)

II devient alors pertinent de connaître l'ampleur et les incidences

d'une telle déperdition en attendant que des études explicatives soient me­

nées sur le terrain. C'est ce que nous nous proposons de faire dans les

pages qui suivent.

1.3.2 Aspects quantitatifs et financiers

S'il faut en croire H. Wiesler (1978, p.43) plus qu'un tiers des élè­

ves abandonnent déjà l'école après la première année d'études. Et c'est

aussi un tiers des places environ qui se trouve occupé chaque année, au

premier cycle rural public, par des redoublants. Autrement dit, 30% des

élèves dont se composent les effectifs scolaires seraient des redoublants

qui occupent ainsi des places dont d'autres enfants ne peuvent pas profi­

ter. Force nous est alors de reconnaître sans ambages que le nombre d'en­

fants d'âge scolaire admis au premier cycle rural pourrait augmenter de 30

à 35% chaque année - sans augmenter les coûts - s'il n'y avait pas de re­

doublement. Ce n'est malheureusement pas le cas, comme en témoigne une en­

(23)

-13-Tableau 1 . 2 ; Effectifs d'élèves et proportion de redoublants par niveau. Octobre 1976. Enseignement primaire rural public.

Effectifs d 'élèves

Année d'étude

Enfantine P r é p .1 Prép.2 E l é . 1 Elé .2 Moy.1 Moy .2 T O T A L

Effectif total dont 31,265 19,609 13,575 9,912 6, 527 4,094 2,694 107,676 Redoublants 1 fois 13,800 4,335 2,550 1,737 1, 192 702 257 24,573 2 fois 3,210 700 311 167 82 27 6 4,503 3 fois 929 83 24 33 16 — — 1,085 Nombre de redoublants 17,939 5,118 2,885 1,937 1, 290 729 263 30,161

Source: La scolarisation en Haïti. Etude statistique réalisée dans

l'"U-nité d'Analyse et de Recherche démographiques" par H. Wiesler. P-au-P. 1978 p. 42.

L'impression d'ensemble qui ressort de ce tableau est, d'une part,

l'importance énorme des déperditions en termes de redoublements: plus d'un

tiers des effectifs de première année seraient des redoublants. Par ail­

leurs, on remarque que les taux de redoublement sont en général les plus

élevés au début du cycle, baissant ensuite plus ou moins régulièrement pour

atteindre leur valeur minimale en dernière année du cycle.

Pour mieux saisir l'importance du problème posé; transposons ces chif­

(24)

Tableau 1.3: Pourcentage de redoublants de l'ens. primaire rural haïtien qui redoublent la même année pour la 2ème et 3ème fois, par année d'études et au cours de l'ensemble du cycle.

Année

1ère 2ème 3ème 4ème 5ème 6ème 7ème

Année Année Année Année Année Année Année

1976 23,1 15,3 11,6 10,3 7,6 3,5 2,3

Source: Pourcentages calculés à partir des données fournies dans le tableau 1.2

Signalons, en passant, que jusqu'en 1982, le redoublement était permis

pour toutes les années d'études du cycle primaire haïtien, sans limitations

réglementaires. Ce qui explique qu'en 1976, 19% des redoublants des écoles

primaires rurales redoublaient deux fois et plus. De plus, le lecteur no­

tera que la tendance des élèves à redoubler plus d'une fois est plus mar­

quée en première année d'études, diminuant régulièrement au cours du cy­

cle. Il serait intéressant de chercher, dans une étude ultérieure, les

facteurs explicatifs d'une telle situation. Qu'il suffise de mentionner

qu'en zones rurales, les enfants n'ont la plupart du temps aucune connais­

sance de la langue d'enseignement quand ils arrivent à l'école. Dans ces

conditions, le redoublement de la première année d'études s'avère un mal

nécessaire --- certains parlent de mesure curative --- pour permettre à

l'élève de se familiariser un tant soit peu avec la dite langue d'enseigne­

ment.

Mal nécessaire, au dire des uns, remède pédagogique, au dire des au­

tres: cela ne doit pas nous empêcher de mesurer l'ampleur du phénomène des

redoublements et d'en apprécier les conséquences financières et socio-éco-

(25)

-15-Tableau 1.4: Pourcentage de redoublants dans l'enseignement primaire en Haïti. Garçons et filles.

Année 1975 1976 1977 1978

16,9 11,4 17,2 17,3

Source: Tableau établi à partir des sources nationales et des données statistiques de l'UNESCO: op. cité, 1982, p.145.

Pris isolément, ces pourcentages peuvent paraître insignifiants. Mais

risquons une simple comparaison avec d'autres pays voisins de l'Amérique

centrale.

Tableau 1.5: Pourcentage de redoublants dans l'enseignement primaire. Garçons et filles. Pays 1975 1976 1977 1978 Cuba 8,1 2,8 ---- ----El Salvador 7,3 7,5 7,5 7,8 Guatemala 14,8 14,1 15,2 15,2 Haïti 16,9 11 ,4 17,2 17,3 Jamaïque 3,6 4,4 ---- ----Mexique 11,7 11,1 9,8 ----Nicaragua 13,6 13,4 13,3 13,9 Panama 12,4 10,8 10,9 11,0

(26)

Un simple coup d'oeil sur le tableau précédent nous permet de consta­

ter qu'entre 1975 et 1978, Haïti tenait les pourcentages de redoublement

les plus élevés parmi les huit (8) pays considérés. En 1975 par exemple,

ces pourcentages étaient 5 fois plus élevés qu'en Jamaïque et 2 fois plus

qu'à Cuba. Si on établit à 12.3% le pourcentage moyen pour l'ensemble des

pays concernés en 1977, Haïti accuse un écart de pourcentage de 4 sur les

autres.

Aussi, voit-on ce paradoxe que dans certaines régions rurales où à

peine 14% des enfants d'âge scolaire peuvent accéder à l'école, la moitié

de ce nombre ne peut s'y adapter et se décourage dans le cours même du pre­

mier cycle. Qu'il nous soit permis de signaler ici quelques faits et chif­

fres décrits de façon tragique dans le Rapport Annuel 1976/77 du Service de

l'Enseignement Rural:

"Les écoles que contrôle le Service de l'Enseignement Rural disposent de 19,648 bancs de 3 places pour un effectif de 136,381 élèves. Le nombre de places assi­ ses dont disposent les écoles se chiffre à 58,944. Il s'en suit que 57% des élèves n'ont pas de place pour s'asseoir. Pour suppléer à cela, certains d'entre eux apportent leur chaise, d'autres utilisent des roches, sur lesquelles ils disposent un bout de planche et en­ fin ils se mettent à six sur un banc de trois places ou restent debout au cours".

La situation devient encore plus paradoxale quand elle est mise en

rapport avec l'effort financier de l'Etat Haïtien pour la même époque à peu

près. En effet, en 1976/77 — année-type^ utilisée pour les besoins de no­

tre recherche — les dépenses globales pour l'éducation en Haïti s'éle­

vaient approximativement à $23,854,000 dont:

1. C'est l'année pour laquelle nous avons pu recueillir les données sta­

(27)

-17-$ 7,438,000 en budget de fonctionnement: traitements, fourni­

tures scolaires, transports, santé, etc... soit

12% du budget global de fonctionnement pour la même

année fiscale.

$ 5,756,000 en budget de développement ou d'immobilisation:

constructions, équipements, projets, etc... soit 4%

du budget global d'investissement pour la même an­

née fiscale.

De plus, on estime à:

$ 4,660,000 la part d'assistance étrangère multilatérale et bi­

latérale consacrée à l'éducation, et à:

$ 6,000,000 le montant d'aide privée extérieure provenant d'or­

ganisations catholiques et protestantes, organisa­

tions laïques internationales, montant à répartir

entre les deux natures de dépenses mentionnées plus

haut.

Un tel effort financier, consacré à l'éducation, représentait 5% du

PNB et 20% de toutes les dépenses publiques pour l'année fiscale 1976/77

(H. Wiesler, 1978, p.68).

Dans le contexte d'un pays sous-développé comme Haïti, et compte tenu

de la situation désastreuse de son système scolaire dont nous avons esquis­

sé quelques traits au tout début du chapitre, de telles dépenses représen­

tent un gaspillage effarant de ressources humaines et financières, gaspil­

(28)

1.3.3 Définition et circonscription du problème

Emprunté au langage des économistes, le vocable "déperdition" est uti­

lisé en éducation pour décrire les divers obstacles gui empêchent un systè­

me éducatif d'atteindre ses objectifs. Plus particulièrement, les planifi­

cateurs et les statisticiens de l'éducation emploient ce terme pour décrire

les effets combinés du redoublement et de l'abandon sur la progression d'un

groupe d'élèves au cours d'un cycle d'enseignement. Dès lors, on admet que

le but des élèves entrant dans un cycle déterminé est d'arriver au bout de

ce cycle dans les délais prescrits. On admet également que dans l'ensei­

gnement primaire rural haïtien - qui constitue le cadre de notre étude -

chacun des 7 niveaux d'études comporte des objectifs à atteindre chaque an­

née par les élèves; et qu'à l'issue de chaque année, des examens sanction­

nent les études réalisées, fixant ainsi le nombre des élèves admis à pour­

suivre leur scolarité. Dans ces conditions, les admis au cours n en fin

d'année t constituent l'ensemble des promus au cours n + 1 l'année suivante

t + 1. Les non-admis, eux, forment l'effectif des redoublants du cours n

l'année t + 1. Lorsqu'à l'intérieur d'un cycle d'études et au cours d'une

année scolaire donnée, un élève inscrit l'année précédente ne figure ni

comme redoublant ni comme promu, on dit qu'il a abandonné. Ainsi, sont

considérés comme entraînant une déperdition aussi bien les abandons préma­

turés ou les désertions avant la fin des études correspondant à un degré

que le redoublement ou le fait pour un élève de rester dans la même classe

2, 3, parfois 4 ans de suite.

Si nous avons ainsi décomposé le phénomène de la déperdition scolaire

pour mieux mettre en relief ses deux dimensions ou manifestations - qui

sont le redoublement et l'abandon - c'est pour arriver à délimiter ce qui

fera l'objet précis de notre étude: à savoir, les redoublements dans les

(29)

-19-pour la population (coûts sociaux), c'est-à-dire les dépenses absorbées par

les contribuables en général. Pour des raisons de validité, nous n'entre­

rons pas dans le calcul des coûts privés de l'enseignement rural en Haïti,

c'est-à-dire les dépenses supportées directement par ceux qui en bénéfi­

cient. Non seulement parce que des données fiables font défaut, dans une

économie de subsistance comme en Haïti, mais aussi parce que des mesures

correctes s'avèrent difficiles à établir quand il s'agit d'évaluer les taux

des écolages, les contributions en nature, les constructions d'écoles fai­

tes par des particuliers, etc...

1.3.4 Objectifs de l'étude

A cette étape de l'étude, il convient de formuler clairement les ques­

tions auxquelles nous aimerions répondre dans le processus de notre analyse

et de préciser les objectifs visés par notre recherche.

L'analyse de la situation du système scolaire haïtien nous a amené à

nous poser les questions suivantes:

1 - Combien les redoublements coûtent-ils en moyenne par an à l'Etat

Haïtien au niveau de l'enseignement primaire rural public?

2 - Quel est le coût effectif moyen de formation d'un diplômé du pre­

mier cycle rural public, compte tenu des multiples redoublements

observés en cours de route?

3 - Quel est le rendement interne réel du système scolaire rural haï­

tien, compte tenu des années/élèves dépensées en excédent et im­

putables aux redoublants?

Compte tenu des questions ainsi soulevées, l'objectif général de notre

recherche sera de montrer les incidences des redoublements sur le rendement

interne de l'école primaire rurale publique en Haïti et sur les coûts

(30)

De manière spécifique, cette recherche nous amènera à :

1 - établir le flux réel des effectifs scolaires de 1975/76 à

1981/82, ainsi que les taux de redoublement, de promotion et

d'abandon y afférents.

2 - reconstituer l'histoire d'une cohorte de 1,000 élèves en fonction

des taux pertinents, pour ensuite,

3 - examiner le profil des redoublements à l'intérieur du cycle con­

sidéré.

4 - procéder, à partir de tableaux statistiques significatifs, à une

analyse combinée de rendement et de coût du système, compte tenu

des multiples redoublements observés en cours de route.

5 - établir un diagnostic sommaire de la situation scolaire en milieu

rural en vue de proposer certaines stratégies ou perspectives de

solutions face au gaspillage de ressources humaines et financiè­

res que représentent les redoublements en Haïti.

Postulat de base: Nous postulons que les redoublements au premier cy­

cle rural entraînent des coûts supplémentaires considérables pour la popu­

lation en même temps qu'ils diminuent sensiblement le niveau de rendement

interne de l'enseignement primaire rural public.

1.4 Pertinence de la question

Trois catégories de raisons ont présidé au choix du problème des re­

doublements dans le système scolaire rural haïtien.

1.4.1 Pertinence théorique

Jusqu'ici, la plupart des études menées sur le phénomène de la déper­

dition scolaire, notamment dans les pays industrialisés, ont négligé pres­

(31)

-21-abandons (drop-outs). Omission qui s'explique, d'une part, par le caractè­

re quasi automatique de la promotion d'une classe a l'autre: certaines ré­

glementations scolaires limitant systématiquement les possibilités de re­

doublement. D'autre part, par les progrès de l'enseignement individualisé,

de la pédagogie fonctionnelle et de l'école sur mesure. En effet, dans les

systèmes à promotion automatique, c'est-à-dire, où les élèves sont promus

automatiquement d'une année d'étude à une autre, l'année suivante et par

âge, les élèves en difficultés d'apprentissage sont ordinairement placés

dans des structures particulières où ils bénéficient d'un programme spécial

et de mesures compensatoires prévues à leur intention (encadrement, tuto-

r a t , récupération, etc...). Le problème du redoublement ne se pose donc

pas.

Par contre, dans la plupart des pays sous-développés comme Haïti,

étant donné la rareté (voire même l'inexistence) des moyens propices pour

dépister les élèves en difficulté d'apprentissage, tous les élèves se

voient soumis à la même compétition, partant pas de classification selon

les aptitudes. Dans ces conditions, le redoublement permet de respecter le

rythme de progression de chaque enfant dans l'atteinte des objectifs d'ap­

prentissage requis. Et c'est ainsi que dans le système scolaire haïtien,

les redoublements prennent une importance telle que chaque année environ un

tiers des élèves du primaire est constitué de redoublants.

Que de tels redoublements soient perçus par les uns comme un investis­

sement propre à favoriser la récupération des redoublants et déterminisme

social par les autres - dont Pierre Bourdieu (1970) - ils ne constituent

pas moins une remise en question de l'efficacité de l'école et de sa capa­

cité de réduire les inégalités en donnant plus de stimulation aux plus dé­

(32)

rieures sur la déperdition scolaire, de cette manifestation que nous appe­

lons redoublement, devient un argument percutant en faveur d'une étude des

redoublements pour le milieu haïtien. En outre, des enquêtes statistiques

englobant des continents, comme celles menées par 1'UNESCO, ne peuvent pas

toujours être appliquées à une localité précise ayant des caractéristiques

propres. D'où la nécessité de recueillir des données le plus près possible

du milieu haïtien, le plus près possible des élèves concernés.

1.4.2 Pertinence socio-économique

Même si les effets socio-économiques de l'éducation ne sont pas encore

définitivement établis, nombreux sont les pays du tiers-monde qui voient

dans l'éducation un levier puissant,pour déclencher un processus de déve­

loppement socio-économique. "Un pays sous-développé est un pays sous-en-

seigné", écrivait à propos Jean Fourastié (1963), un économiste expert de

l'O.C.D.E. Dans une telle optique, l'enseignement primaire constitue, se­

lon nous, le minimum vital dont chaque citoyen devrait bénéficier pour pou­

voir participer efficacement au développement de son pays. Il intéresse la

grande majorité de la population et fait actuellement l'objet de grandes

préoccupations en matière de réforme de la part des pouvoirs publics.

Or justement, les taux élevés de redoublement dans le cycle primaire

de l'enseignement haïtien signifient qu'une grande proportion d'enfants

n'atteignent pas les objectifs de formation fixés par les responsables de

l'éducation. De plus, dans la mesure où les redoublants occupent des pla­

ces dont d'autres enfants ne peuvent pas profiter, il faut croire que les

redoublements contribuent fortement à l'augmentation du coût de l'enseigne­

ment, compromettant les objectifs sociaux du pays. Lorsqu'à cause des

seuls redoublements un diplôme du premier cycle rural doit revenir environ

(33)

-23-raison plus que valable de chercher à faire la lumière sur ce gaspillage

faramineux d'énergies. Car, les charges financières devenant trop lourdes,

elles risquent de freiner le développement économique lui-même. Bref, non

seulement les redoublements représentent un gaspillage considérable de res­

sources financières, mais encore ils traduisent un traitement inadéquat des

ressources humaines que la présente étude se propose de mettre en lumière.

1.4.3 Pertinence politique

La présente étude veut se situer dans le cadre de la réforme de l'Eco­

le Haïtienne, réforme entreprise depuis bientôt une dizaine d'années dans

le but d'adapter l'éducation aux besoins nationaux. Cette réforme visait,

entre autres choses, à "offrir des chances égales à l'immense majorité des

défavorisés qui devront comme tous les fils d'une même Patrie, accéder à

une éducation fondamentale intégrale gui permette à tous de participer va­

lablement à l'enrichissement du Patrimoine Commun". (D.E.N. 1982, p. 9).

Nous osons croire qu'une connaissance des aspects socio-économiques

des redoublements scolaires mettra éventuellement à la disposition des res­

ponsables de l'éducation des éléments-clé pour concevoir et planifier des

stratégies rationnelles de lutte contre les déperditions scolaires. Bien

sûr, il faudra, dans l'élaboration de telles stratégies, connaître les

moyens propres à réduire les redoublements et les abandons; il faudra aussi

prévoir les incidences de ces "réductions" sur les dépenses unitaires, les

coûts effectifs de formation par diplômé. Cette recherche constitue un

premier pas dans cette direction. Elle sera centrée sur les incidences, en

termes de rendement et de coût, des redoublements dans l'enseignement pri­

(34)

Concernant la portée politique des déperditions scolaires, Pauli et

Brimer (1971) l'ont bien fait ressortir quand ils écrivaient:

"... en définitive, il s'agit de savoir si, face à la crise mondiale de l'éducation, on va continuer à sacri­ fier la majorité des enfants de chaque génération: plus qu'un problème pédagogique, c'est là une question poli­ tique" .

Il nous semble dès lors pertinent non seulement de connaître l'ampleur

du phénomène des redoublements en Haïti, mais d'en évaluer les coûts: ce,

dans l'espoir de contribuer lucidement à une réforme réaliste de l'éduca­

(35)

DEUXIEME PARTIE

REVUE DE LA LITTERATURE ET CADRE DE REFERENCE

2.1 Introduction

Maintenant que nous avons circonscrit notre problème de recherche, à

savoir, les incidences financières des redoublements dans l'enseignement

primaire rural public en Haïti, et que nous en avons indiqué certaines li­

mites ainsi que la pertinence socio-économique et politique, notre atten­

tion veut se porter sur les études ou recherches antérieures portant sur la

question, dans le but d'en dégager les éléments ou concepts qui serviront à

asseoir notre analyse. Bien entendu, il ne suffit pas de localiser et de

résumer les conclusions des études antérieures relatives à notre préoccupa­

tion, il faut aussi en faire une analyse critique. Tel sera notre propos

dans les pages qui suivent.

2.2 Différentes approches du problème du redoublement

Qu'ils soient statisticiens, sociologues, éducateurs, économistes ou

décideurs politiques, nombreux sont ceux qui, depuis une trentaine d'an­

nées, se sont penchés sur le problème complexe de la déperdition scolaire.

Et même à travers des approches différentes - tantôt descriptive, tantôt

évaluative, tantôt expérimentale -, ils s'accordent tous, en général, à dé­

(36)

demeurer le temps prescrit par les règlements ou sans parcourir le cycle

complet d'études dans les délais prévus par ces mêmes règlements. Ce fai­

sant, ils ont été amenés à envisager le problème des échecs et des retards

scolaires, tantôt dans une perspective pédagogique, tantôt sous l'angle de

l'économie de l'éducation et tantôt sous l'angle statistique, d'où trois

aspects à prendre en considération dans une revue pertinente de la littéra­

ture sur le problème des redoublements.

2.2.1 Le redoublement vu dans une perspective pédagogique

D'un point de vue pédagogique, le redoublement a d'abord été considéré

comme un événement consécutif à un échec: échec de l'élève qui n'a pas su

atteindre le niveau de performance acceptable pour être admis à la classe

supérieure.

Cependant les avis des éducateurs sont partagés quant aux avantages

que l'élève peut tirer du redoublement d'une classe, par opposition au pas­

sage à la classe supérieure. Cette étude étant limitée à l'évaluation

quantitative du redoublement, il n'entre pas dans notre propos d'examiner

les faits sur lesquels sont fondées ces opinions divergentes. Nous pensons

qu'il serait légitime néanmoins de résumer ici les arguments avancés en gé­

néral pour ou contre le redoublement.

Dans la plupart des pays, le programme d'études du premier cycle est

fragmenté en tranches successives attribuées chacune à une classe durant

une année d'études. Une telle fragmentation et l'obligation faite à cer­

tains élèves de redoubler telle ou telle de ces tranches impliquent plu­

sieurs hypothèses pédagogigues, lesquelles ont été résumées par Pauli et

(37)

-27-Tout d'abord, on suppose que la grande majorité des élèves sont capa­

bles d'apprendre le programme assigné à chague année d'études dans le temps

prescrit. Deuxièmement, on suppose que les facteurs déterminant le succès

scolaire sont fondamentalement liés à l'école elle-même et que, le meilleur

remède pour les élèves n'ayant pas réussi à atteindre le niveau de perfor­

mance minimale fixé pour une année d'études donnée est de reprendre la

classe en question. La raison invoquée est que les élèves qui n'ont pas

suffisamment maîtrisé les matières inscrites au programme de l'année d'étu­

des qu'ils viennent d'accomplir ne sont pas en mesure de maîtriser celles

que comporte le programme de la classe suivante. Troisièmement, on suppose

qu'il est possible, en se fondant sur les résultats obtenus par les élèves

aux épreuves qui leur sont imposées et sur les jugements portés par les en­

seignants, de déterminer à la fin de chaque année scolaire quels sont les

élèves qui ont acquis le savoir minimal jugé indispensable pour passer à la

classe suivante.

Les partisans du redoublement font valoir en général que celui-ci sert

fondamentalement à deux fins:

1 - remédier à l'insuffisance des résultats scolaires,

2 - et aider les élèves qui sont jugés ne pas être assez mûrs du

point de vue émotif.

Inversement, le passage automatique des élèves à la classe supérieure

aboutirait, selon eux, à abaisser les normes de l'enseignement, à découra­

ger les élèves d'apprendre et les maîtres à enseigner; à créer des problè­

mes pédagogiques en accroissant les écarts d'aptitudes entre les élèves

d'une même classe.

Les partisans du passage automatique rejettent les hypothèses pédago­

(38)

q u e , s'appuyant sur un certain nombre d'études qui concluent que l'ensei­

gnement donné en classe a peu d'effet indépendant sur la réussite scolaire,

ils soutiennent que les variables extérieures à l'école, telles que le

"background" familial et les caractéristiques personnelles, sont des fac­

teurs qui déterminent autant, voire davantage les progrès des élèves à

l'école (cf. Tsafak, 1978, pp.157 à 160). Au dire des éducateurs, permet­

tre à un élève qui apprend lentement de passer une année de plus sur le mê­

me programme n'est pas nécessairement le meilleur moyen d'améliorer ses ré­

sultats. D'ailleurs, les partisans du passage automatique contestent la

validité des épreuves dont on se sert généralement pour évaluer les progrès

des éléves.

Et c'est dans cette même optique que l'efficacité des redoublements

comme "remède pédagogigue" a été remise en question par Isabelle Deblé

(1964, p.13 ss.) qui écrivait:

"... il semble que l'apport des redoublants dans les classes n'augmente guère l'efficacité de l'enseigne­ ment, contrairement à ce qu'en pensent certains maî­ tres africains qui pratiquent le redoublement systéma­ tique en vue d'améliorer le niveau de leur classe".

Plus près de nous, dans l'espace et dans le temps, il y a Schiefelbein

(1981) qui, suite à une étude comparative menée dans plusieurs pays d'Amé­

rique Latine, établissait un lien étroit entre redoublement et abandon.

Les enfants qui ont redoublé une ou plusieurs classes sont aussi ceux qui

ont le plus tendance à "déserter" en cours de route, soit parce que leurs

parents jugent trop coûteux de leur faire poursuivre leur scolarité, soit

qu'ils sont trop âgés pour la classe où ils se trouvent. Le redoublement

apparaît ainsi comme une cause principale (root cause) d'abandon. Nous

croyons que l'auteur soulève ici un problème viscéral qui pourrait à lui

seul faire l'objet d'une recherche spécifique pour Haïti. Nous y revien­

(39)

-29-Les observations de Schiefelbein viennent par ailleurs corroborer cel­

les d'autres chercheurs tels Van Vliet (1963) et Levy (1971), qui, eux

aussi, se sont penchés sur le problème des redoublements dans le monde. Ce

dernier, par exemple, dans une analyse remarquable des facteurs d'abandon

scolaire effectuée dans 42 pays sous-développés de l'Afrique, l'Asie,

l'Amérique Latine et le Moyen Orient, arriva à la conclusion que la façon

la plus efficace de réduire, à court terme, les taux de désertion serait

l'élimination ou la réduction des redoublements. Et je cite "... un

accroissement de un pour cent du taux moyen de redoublement est lié à pres­

que un pour cent d'accroissement du taux cumulé d'abandon".

Une telle conclusion nous apparaît d'autant plus intéressante que les

taux d'abandon furent calculés indépendamment des redoublants de manière à

ce que les deux variables ne mesurent pas le même phénomène.

Bref, s'il faut en croire de tels chercheurs, le fait de reprendre un

niveau ou une classe donnée, ne semble pas aider à maîtriser les habiletés

académiques du niveau redoublé. Au contraire, l'anxiété des parents au su­

jet de l'échec scolaire de leurs enfants, vient par-dessus le marché créer

des problèmes d'adaptation ou d'ajustement personnel et social. L'enfant

retenu cherche éventuellement à se valoriser dans des domaines qui ne re­

quièrent guère de performance académique ou investit ses énergies dans des

champs différents et, inconciliables avec les intérêts scolaires.

Une autre recherche, cette fois menée au Cameroun à partir d'un échan­

tillon constitué au hasard et stratifié de 32 classes de 4ème année du ni­

veau primaire, dont 13 urbaines, 8 semi-urbaines et 11 entièrement rurales,

arrivait, elle aussi, à la conclusion que "les redoublants ont tendance à

redoubler davantage puis à abandonner le système". L'auteur, G. Tsafak

(40)

sens que ses auteurs prétendent lui donner et les redoublements deviennent

eux-mêmes une cause fondamentale de l'inefficacité de l'enseignement".

Ce lien entre redoublement et abandon - qui semble être une constante

dans les ouvrages recensés jusqu'ici - constitue, selon nous, une plaidoi­

rie sévère contre le rôle de "remède pédagogique" attribué au redouble­

ment. Malheureusement, dans le cas précis d'Haïti, qui nous concerne, le

manque de données statistiques relatives aux abandons ne nous aura pas per­

mis d'établir l'existence ou l'absence d'un tel lien. L'étude menée sur la

scolarisation en Haïti par H. Wiesler (1978) est d'ailleurs très réticente

sur ce sujet. N'empêche qu'elle mérite une attention particulière dans

cette revue de littérature.

Se basant sur le recensement général de la population et de l'habitat,

mené en Haïti en août 1971, Wiesler, un expert en statistiques de l'UNESCO,

a voulu mettre à jour les statistiques dites "scolaires" et faire le point

sur la situation du système scolaire haïtien dans son ensemble. Nous lui

reconnaissons, entre autres, le mérite d'avoir pour la première fois évoqué

l'importance dramatique et la complexité de la déperdition scolaire en

Haïti: déperdition de l'ordre de 90% pour l'enseignement primaire rural

public en 1976. Concernant plus précisément le problème des redoublements,

l'auteur reprend à son compte certaines constatations préalablement faites

par son collègue D'ENGHIEN (1977), sur la situation de l'enseignement rural

haïtien, à savoir qu'une pénurie de maîtres et de bâtiments scolaires dimi­

nuent fortement la qualité de l'enseignement: ce qui cause de nombreux re­

doublements, qui, à leur tour, font justement surcharger maîtres et lo­

caux. Il signale, en outre, parmi les nombreux facteurs explicatifs de dé­

perdition, le rôle exagéré des examens, le rôle plutôt néfaste que joue le

français dans l'enseignement primaire, une langue étrangère pour la quasi totalité des enfants.

(41)

-31-Compte tenu de son approche statistique et de son souci d'objectivité,

cette étude constitue, selon nous, un outil précieux dans la lutte contre

la déperdition scolaire en Haïti.

2.2.2 Le redoublement vu dans une perspective économique

Il n'y a pas que le point de vue pédagogique dans le problème des re­

doublements, il y a aussi l'angle économique à envisager. En effet, toute

activité éducative, qu'elle soit formelle ou informelle, passe par un em­

ploi délibéré de ressources rares susceptibles d'un résultat économiquement

significatif, même si le résultat obtenu n'est pas celui qu'on avait prévu

ou se trouve avoir des effets indirects qui n'étaient pas recherchés. Dès

lors, "pour l'économiste, l'éducation est avant tout un mode d'utilisation

de ressources rares susceptibles d'emplois alternatifs" (cf. André Page,

1971, p.10) et son étude repose essentiellement sur les notions d'input et

d'output. Les inputs se ramènent dans la plupart des cas à des moyens ma­

tériels, à des ressources humaines et à du temps qui pourraient être consa­

crés à d'autres activités, tandis que les outputs correspondent aux

"effets" directs ou indirects sur la capacité productive des hommes.

Notons sans tarder que la relation entre ces deux concepts (input/

output ) est fondamentale à notre analyse économique du rendement de l'en­

seignement primaire rural public d'Haïti. Nous y reviendrons d'ailleurs

plus loin dans la partie méthodologique de notre recherche. Quant aux au­

tres concepts et outils statistiques dans notre analyse, nous les avons

puisés à même l'ouvrage remarquable de LE THANK KH0I, intitulé "L'INDUSTRIE

(42)

En effet, cet ouvrage a le mérite de susciter une prise de conscience

profonde de l'optique économique dans l'aménagement de l'éducation:

celle-ci, insiste l'auteur, ne peut se borner à poursuivre des objectifs

socio-politiques ou moraux, elle doit être également envisagée sous un

angle économique comme une industrie qui par une combinaison de facteurs de

production doit maximiser sa contribution au développement économique d'un

pays.

Après avoir expliqué le rôle stratégique de l'éducation dans le monde,

l'auteur définit les besoins que l'enseignement doit satisfaire: besoins

individuels, économiques, et socio-politiques, puis étudie le rapport entre

la production de l'industrie et les facteurs de production. La production

de l'industrie peut être évaluée par le rendement quantitatif, qualitatif

et socio-économique. Dans une perspective économique, l'élève est considé­

ré comme le produit de l'industrie de l'enseignement; le maître, les pro­

grammes et les bâtiments comme les facteurs de production. La meilleure

combinaison de ces facteurs doit se faire au coût minimum pour un rendement

maximal. Enfin, l'auteur se penche sur les aspects financiers de l'éduca­

tion pour ensuite montrer le lien entre éducation et développement dans les

sociétés contemporaines.

Tout en lui reprochant d'avoir passé sous silence les limites de l'a­

nalyse économique face à la complexité et l'hétérogénéité des systèmes

d'enseignement, nous nous devons de signaler la remarquable rigueur scien­

tifique qui caractérise cet ouvrage sur l'économie de l'éducation, où nous

avons puisé des outils intéressants pour notre évaluation du rendement du

(43)

-33-2.2.3 Le redoublement et les études statistiques de 1'UNESCO

Par ailleurs, notre revue de la littérature pertinente au problème des

redoublements nous a permis de découvrir des études méthodologiques entre­

prises par l'UNESCO afin de mettre au point des techniques statistiques

permettant de comprendre et de mesurer la déperdition scolaire à travers le

monde. Parmi toutes ces études, nous en retenons une en particulier:

celle de Pauli et Brimer (1972) intitulée "Etude statistique sur les déper­

ditions scolaires".

L'intérêt de cette étude pour notre recherche vient de ce qu'elle pro­

pose une série de tehniques statistiques pour saisir, localiser et évaluer

les différentes manifestations de la déperdition scolaire. Ces techniques

convergent généralement autour de deux méthodes.

a) la méthode des cohortes apparentes qui consiste à comparer le nombre

des élèves inscrits dans une classe donnée à celui des élèves inscrits

l'année suivante dans la classe immédiatement supérieure, en supposant que

la réduction des effectifs de chaque année d'études correspond aux aban­

dons. Elle repose sur l'hypothèse que deux solutions seulement s'offrent à

l'élève: accéder à la classe supérieure ou renoncer à poursuivre ses étu­

des.

Nous reprochons à cette méthode une vision simpliste de l'évolution

des effectifs qui ne permet pas de découvrir les divers cheminements que

peut suivre une clientèle scolaire, tel par exemple le fait que tous les

élèves qui entrent dans la première année d'un cycle d'enseignement ne com­

plètent pas tous ce cycle dans le même laps de temps.

b) la méthode des cohortes reconstituées qui consiste à suivre - a partir

de données sur les taux moyens de promotion, de redoublement et d'abandon

aux différents niveaux - l'évolution d'une cohorte hypothétique de 1,000

Figure

Tableau  1.1:  Répartition,  par  groupes  d'âge,  des  taux  d 'alphabétisme.
Tableau  1 . 2 ;  Effectifs  d'élèves  et  proportion  de  redoublants  par  niveau.
Tableau  1.4:  Pourcentage  de  redoublants  dans  l'enseignement  primaire  en Haïti
Diagramme  3.1;  Flux  d'élèves  entre  les  années  d'études  1  et  2  pour  les deux  années  scolaires  t  et  t+1
+7

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