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Attitudes et pratiques des professionnels de la santé vis-à-vis la promotion de l'allaitement maternel exclusif au Niger : cas de la communauté urbaine de Niamey (CUN)

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Academic year: 2021

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(1)

ATTITUDES ET PRATIQUES

DES PROFESSIONNELS DE LA SANTÉ

VIS-À-VIS LA PROMOTION DE

L'ALLAITEMENT MATERNEL EXCLUSIF

AU NIGER : CAS DE LA COMMUNAUTÉ

URBAINE DE NIAMEY (CUN)

Thèse présentée

à la Faculté des études supérieures de l'Université Laval

dans le cadre du programme de doctorat en santé communautaire

pour l'obtention du grade de Philosophiae Doctor (Ph.D.)

FACULTE DES SCIENCES INFIRMIERES

UNIVERSITÉ LAVAL

QUÉBEC

2009

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Cette étude s'inscrit dans un cadre général de promotion de la santé dans le domaine de la nutrition des jeunes enfants. Dans une perspective d'intervention, cette recherche vise à documenter les attitudes et les pratiques des professionnels de la santé (PS) en milieu hospitalier et identifier celles qui contribuent à la stagnation du taux d'allaitement maternel exclusif (AME) dans la Communauté urbaine de Niamey (CUN).

Le cadre conceptuel sur lequel repose la démarche montre que les attitudes et les pratiques des PS peuvent être influencées par leurs connaissances, leurs caractéristiques sociodémographiques et les ressources et facteurs liés à leur milieu de travail.

L'étude exploratoire a été menée selon une approche qualitative. Les données ont été collectées en deux phases. Les attitudes et les pratiques des PS ont été observées dans un échantillon de formations sanitaires publiques de première ligne dans la CUN. Puis, des discussions de groupes ont été organisées avec des infirmiers, des sages-femmes, des assistants sociaux et des médecins/pédiatres. Le matériel recueilli a fait l'objet d'une analyse de contenu selon une démarche inductive qui a permis de tirer certaines conclusions et faire quelques recommandations.

Les résultats indiquent une opinion positive des PS qui ne se reflète pas dans leurs pratiques. En effet, la promotion de FAME n'est pas faite dans les formations sanitaires de la CUN car les PS ont des pratiques relativement indifférentes et inadéquates. Des obstacles aux niveaux structurel/organisationnel, programmatique, individuel et contextuel liés à l'entourage des mères pourraient expliquer cette constatation.

Les participants ont fait plusieurs suggestions. Bien que tous les obstacles soient importants et méritent d'être pris en compte, le manque de formation et de connaissances suffisantes et les conditions et ressources liées au contexte de travail ressortent comme les plus problématiques. Cependant, les PS étant les intervenants centraux, leurs suggestions doivent toutes être considérées. Pour viser l'adoption de comportements appropriés par les

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PS, une réorganisation globale des activités de promotion de l'AME au sein des formations sanitaires de la CUN s'impose. Les interventions à tous les niveaux doivent se faire de façon concomitante, sous forme de programme intersectoriel.

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ABSTRACT

This health promotion study deals with the nutrition of young children. Adopting an action perspective, it aims to document health professionals' attitudes and practices with regard to exclusive breastfeeding promotion in hospital settings and to identify those that contribute to the stagnation of exclusive breastfeeding (EBF) rates in the urban community of Niamey (UCN).

The conceptual framework on which the research is based demonstrates that attitudes and practices of HP can be influenced by their knowledge, their socioeconomic characteristics as well as by the resources and factors related to their workplace.

A qualitative approach was used for this exploratory study. Data were collected in two phases. HPs' attitudes and practices were first observed in a UCN sample of front line public healthcare facilities and group discussions organized with nurses, midwives, social workers and doctors\pediatricians followed. The data were treated using a content analysis using an inductive approach, thus allowing to draw some conclusions and make some recommendations.

Results indicate a positive opinion of HP that does not reflect appropriate behaviour in their practices. Indeed, the EBF promotion is not done in UCN healthcare facilities as HP have relatively inadequate and indifferent practices. Obstacles at structural\organisational, programming and individual levels as well as a contextual one in relation with mothers' family circles might explain this finding.

Many suggestions were made by the participants. All obstacles are important and need to be taken into consideration. Lack of training and sufficient knowledge as well as workplace conditions and resources were deemed most problematic. However, since HP are central actors, all their suggestions need to be considered. To encourage adoption of appropriate behaviours by HP, a global reorganization of EBF promotion activities in UCN

(5)

healthcare facilities is imperative. Concomitant interventions at all levels are needed according to a multi sectorial approach.

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La thèse de doctorat présentée ici a été réalisée grâce au soutien de plusieurs personnes physiques et morales à qui je souhaite rendre hommage pour leurs différentes contributions.

Tout d'abord j'exprime ma profonde gratitude à l'Agence Canadienne du Développement International (ACDI) qui, par son soutien financier à travers le Programme Canadien de Bourses de la Francophonie (PCBF), m'a permis de poursuivre des études doctorales. Un merci spécial au personnel de l'agence d'exécution du PCBF notamment l'Association de Universités et Collèges du Canada (AUCC). Plus particulièrement, j'ai une grande reconnaissance pour Madame Jeanne Gallagher, conseillère principale et Monsieur Pierre Marchand qui a été mon conseiller pédagogique. Merci pour votre disponibilité et vos conseils qui ont été combien précieux.

Je tiens à souligner l'engagement et la disponibilité de ma directrice la professeure Maria De Koninck (PhD) du Département de médecine sociale et préventive à l'Université Laval qui a accepté de diriger cette thèse malgré ses multiples occupations. Je la remercie infiniment pour la confiance qu'elle m'a accordée et pour m'avoir fait profiter de ses compétences tout au long de la supervision de ce travail. Son appui est inestimable et ce fut un privilège pour moi de bénéficier de son encadrement. Encore un gros merci.

Je voudrais aussi remercier la professeure Anne-Marie Hamelin (Ph.D, M.H.Sc, Dt.P.) du Département des Sciences des aliments et de la nutrition de l'Université Laval qui a codirigé la thèse. Ses commentaires ont été d'une grande utilité et sa contribution indispensable. Merci beaucoup pour toute la collaboration.

Je voudrais également remercier le Dr Herbert Degbey de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) au Gabon, les professeures Françoise Côté et Ginette Lazure de la Faculté des Sciences infirmières à l'Université Laval à Québec. Merci beaucoup d'avoir accepté d'évaluer cette thèse.

(7)

La présente thèse n'aurait été possible sans la participation des professionnels de la santé de formations sanitaires de la Communauté urbaine de Niamey. Mes remerciements particuliers vont à tous les participants à cette étude. Je tiens également à remercier le ministère de la Santé publique du Niger ainsi que tous les responsables des formations sanitaires incluses dans cette étude pour m'avoir autorisée à réaliser la collecte de données.

J'aimerais aussi remercier l'Université Laval ainsi que le programme de doctorat en santé communautaire au sein duquel j'ai rencontré des collègues, des enseignants et un personnel administratif très humanistes. Merci à tous pour votre soutien et vos encouragements.

Je ne saurai terminer cette section sans mentionner les miens. Pour éviter des oublis, je dis un très grand merci à ma très grande famille de parents et amis au Niger ou ailleurs. Je n'oublierai jamais vos encouragements, votre soutien permanent et votre présence réconfortante malgré la distance qui nous sépare. Merci beaucoup d'avoir été avec moi tout le long de mon cheminement et d'avoir partagé mes joies et mes peines. J'espère un jour pouvoir partager les fruits de se sacrifice avec vous.

Finalement je rends grâce à Dieu pour m'avoir donné la santé et le courage d'accomplir ce projet.

Que Dieu bénisse toutes les personnes qui m'ont aidé d'une façon ou d'une autre à passer au travers mes études doctorales. AMEN!!!

(8)

DEDICACE

Je dédie cette thèse spécialement

A

Mon très cher père, Moussa Abba

Ma très chère mère, Fatoumata Talata

Je ne finirai jamais de vous être reconnaissante,

Merci infiniment papa et maman,

(9)

TABLE DES MATIERES

RÉSUMÉ i ABSTRACT iii REMERCIEMENTS v

DÉDICACE vii TABLE DES MATIÈRES viii

LISTE DES TABLEAUX xiii LISTE DES FIGURES xiv LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS xv

INTRODUCTION 1 CHAPITRE 1 5

PROBLÉMATIQUE DE LA RECHERCHE 6

1.1 Situation socio-sanitaire du Niger 6

1.2 Causes de la malnutrition 7 1.3 Allaitement maternel exclusif et santé des enfants 11

1.4 Allaitement maternel exclusif et santé de la mère 13 1.5 Autre avantage de l'allaitement maternel exclusif : la réduction de la pauvreté 13

1.6 Allaitement maternel exclusif et santé des enfants : la situation au Niger 15 1.7 Situation particulière de la pratique d'allaitement maternel exclusif à Niamey 17 1.8 Déterminants des pratiques d'alimentation : l'allaitement maternel exclusif 18

1.8.1 Facteurs d'ordre personnel et social 22 1.8.2 Facteurs liés au contexte des soins de santé 23

CHAPITRE 2 25 RÔLE DES PROFESSIONNELS DE LA SANTÉ DANS LA PRATIQUE DE

L'ALLAITEMENT MATERNEL EXCLUSIF CHEZ LES MÈRES : QUELQUES

CONCLUSIONS D'ÉTUDES 26 2.1 Pratiques des professionnels de santé 26

2.2 Opinion et attitude des professionnels de la santé 29 2.3 Résultats d'études sur des facteurs influençant l'attitude et la pratique des

professionnels de la santé 32 2.3.1 Connaissances des professionnels de la santé 32

2.3.2 Caractéristiques sociodémographiques des professionnels 35

2.3.3 Ressources et facteurs liés au milieu de travail 37 2.4 Conclusion : quelques observations générales sur les études recensées 40

(10)

2.5 Justification du choix du thème 40

CHAPITRE 3 43 QUESTIONS DE RECHERCHE, OBJECTIFS ET CADRE CONCEPTUEL 44

3.1 Questions de recherche 44

3.2 Objectifs 45 3.3 Cadre conceptuel 45

3.3 Définitions des concepts 50

3.3.1 L'attitude 50 3.3.2 La pratique 51 3.3.3 La motivation 51 3.3.4 Les caractéristiques sociodémographiques 52

3.3.5 Les connaissances 52 3.3.6 Les ressources et facteurs liés au milieu de travail 52

CHAPITRE 4 54 MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE 55

4.1 Justification du choix de la démarche qualitative 55

4.2 Terrain de recherche 56 4.3 Population à l'étude 56 4.4 Échantillonnage 57 4.5 Techniques de collecte des données 61

4.5.1 L'observation directe..; 61 4.5.2 Les groupes de discussions 62 4.6 Déroulement de la collecte de données 62

4.6.1 Les observations 63 4.6.2 Les discussions de groupes 67

4.6.3 Les discussions informelles 67

4.7 L'analyse des données 67 4.8 La validation des résultats 69 4.9 Les questions éthiques 70 4.10 Les difficultés rencontrées sur le terrain de recherche 71

CHAPITRES 72 PREMIER ARTICLE : 73

Exclusive breastfeeding promotion in healthcare facilities in Niamey, Niger: to train,

retrain and inform health professionals and supervise their practices is vital 73

(11)

5.1 Conceptual framework and method 76

5.2 Study design 77 5.2.1 Data collection tools and analysis 77

5.2.2 Subject selection and ethical considerations 77

5.3 Results and discussion 78 5.3.1 Context and resources of the healthcare facilities 78

5.3.2 Practices of health professionals 82

CONCLUSION 86 ACKNOWLEDGEMENT 87

RÉFÉRENCES 88 CHAPITRE 6 93 DEUXIÈME ARTICLE : 94

Obstacles to exclusive breastfeeding promotion in healthcare facilities in the urban

community of Niamey, Niger: health professionals' opinions 94

ABSTRACT 95 INTRODUCTION 96

6.1 Method 96 6.2 Study design 97

6.2.1 Data collection tools and analysis ...97 6.2.2 Subject selection and ethical considerations 98

6.3 Results 98 6.3.1 Obstacles at the health professionals' level 99

6.3.2 Obstacles in the mothers' environment 104

6.4 Discussion 105 CONCLUSION 108 ACKNOWLEDGEMENT 109 RÉFÉRENCES 110 CHAPITRE 7 116 TROISIÈME ARTICLE : 117

Rehausser le taux d'allaitement maternel exclusif dans la Communauté urbaine de

Niamey, Niger : propositions des professionnels de la santé 117

RÉSUMÉ 118 INTRODUCTION 119

(12)

7.1.1 Déroulement de la recherche 120 7.1.2 Instruments de collecte et analyse 121

7.1.3 Précautions éthiques 122 7.2 Résultats - discussion 122

7.2.1 Sur le plan structurel/organisationnel 123

7.2.2 Sur le plan programmatique 127 7.2.3 Sur le plan pratique / comportemental 130

CONCLUSION 131 REMERCIEMENTS 132 RÉFÉRENCES 133 CHAPITRE 8 139 RÉSULTATS COMPLÉMENTAIRES 140

8.1 Pratique de l'allaitement maternel exclusif: incompatible avec le travail à

l'extérieur? 142 8.2 L'utilisation du biberon : un facteur défavorisant en régression? 143

8.3 L'expérience personnelle en AME : un facteur facilitant? 144

8.4 Le rôle des convictions 145

CHAPITRE 9 148 DISCUSSION GÉNÉRALE 149

9.1 Les caractéristiques sociodémographiques : 149

9.2 Les connaissances : 150

9.3 L'attitude : 155 9.4 La motivation : 155 9.5 Les ressources et facteurs liés au milieu de travail : 156

9.6 Les pratiques : 161 9.7 Conclusion 163 CHAPITRE 10 165 CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS 166 RÉFÉRENCES 173 ANNEXES 187 ANNEXE A : Code international de commercialisation des substituts du lait

maternel!'résumé) 188 ANNEXE B : Dix conditions pour le succès de l'allaitement maternel 189

(13)

ANNEXE C : Grille d'observation des pratiques des professionnels de la santé vis-à-vis la promotion de l'allaitement maternel exclusif (AME) dansdes établissements de

santé de la Communauté urbaine de Niamey 190 ANNEXE D : Guide pour des discussions de groupe sur la promotion de l'allaitement

maternel exclusif (AME) dans la Communauté urbaine de Niamey 192 ANNEXE E : Recrutement de participants à un projet de recherche en santé

communautaire 194 ANNEXE F : Feuillet d'informations et formulaire de consentement destinés aux

professionnels de la santé qui seront observés dans des établissements de santé de la

Communauté urbaine de Niamey 195 ANNEXE G : Feuillet d'informations et formulaire de consentement destinés aux

(14)

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1: Caractéristiques des participants aux discussions de groupes 60

(15)

LISTE DES FIGURES

Figure 1: Causes de la malnutrition chez les enfants (Bellamy, 1997, p 25) 10 Figure 2: Modèle des comportements d'alimentation des nourrissons (adaptation de Lutter

(2000) et traduction libre de Beaudry et al. (2006)) 21 Figure 3: Cadre conceptuel élaboré à partir de la documentation existante sur les facteurs

(16)

LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS

AAP: Académie américaine de pédiatrie

ACDI: Agence canadienne pour le développement international AME: Allaitement maternel exclusif

AUCC : Association des Universités et Collèges du Canada CSI : Centre de santé intégré

CUN : Communauté urbaine de Niamey DRSP : Direction régionale de santé publique

DSCN : Direction de la statistique et des comptes nationaux EBF: Exclusive breastfeeding

EDS : Enquête démographique et de santé EFH: Education for health

EPS : éducation pour la santé

F CFA: Franc de la Communauté financière africaine FR: Femmes relais

HF: Healthcare facilities HP: Health professional

IEC : Information - éducation - communication INS : Institut national de la statistique

IRA : Infections respiratoires aiguës JNV : Journées nationales de vaccination

MSP/LCE : Ministère de la Santé publique et de la lutte contre les endémies NCHS: National center of health survey

NVD: National vaccination days

OMS : Organisation mondiale de la Santé ONG : Organisation non-gouvernementale P/A : Poids pour l'âge

PAHO : Pan-american health organization

PCBF : Programme canadien de bourses de la francophonie PDS : Plan de développement sanitaire

(17)

PMCT: Prevention of mother-to-child transmission PN: Prenatal

PNUD : Programme des Nations-Unies pour le développement PRB : Population reference bureau

PS: Professionnel de la santé P/T : Poids pour la taille

PTME: Prévention de la transmission mère-enfant SIDA : Syndrome Immuno - Déficitaire Acquis T/A : Taille pour l'âge

UNICEF: Fonds des Nations-Unies pour l'enfance UN/SCN : United Nations Sub-Committee on Nutrition VIH : Virus de l'immuno - déficience Humaine WHA: World health assembly

WHO: World health organization WIC: Women, infants, and children

(18)

L'allaitement maternel - le geste le plus naturel pour une mère et son bébé -n'a pas été soutenu pour ce qu 'il est : la clé d'une bonne santé et d'un bon développement pour des millions d'enfants (Caroll Bellamy, 2004)

Toute mère qui choisit de nourrir son bébé exclusivement au sein pendant six mois a droit à des services et au soutien de son gouvernement, sa communauté et sa famille (Caroll Bellamy, 2004)

(19)

On estime à 26000 le nombre de décès quotidiens d'enfants de moins de cinq ans à l'échelle mondiale. La plupart de ces décès ont lieu dans les pays en développement dont le Niger, et sont associés à des pratiques alimentaires inappropriées et, ainsi, dus à des causes évitables comme la malnutrition. En effet, la croissance et le développement optimal de l'enfant nécessitent une nutrition adéquate. Plus du tiers des décès d'enfants de moins de cinq ans surviennent durant le premier mois d'existence pendant lequel les nourrissons sont supposés être exclusivement allaités et, protégés contre les infections (Veneman, 2007).

La malnutrition forme un cercle vicieux avec les infections et donc l'état de santé des enfants (Bellamy, 1997; Engle et al., 1997). En effet, la maladie provoque la perte de l'appétit et une malabsorption des nutriments conduisant ainsi à un état de malnutrition; en mangeant moins adéquatement l'organisme est affaibli et la résistance aux infections est alors compromise. La malnutrition intervient dans environ la moitié des décès des enfants dans les pays en développement (Pelletier et al., 1994; Schroeder et Brown, 1994). L'OMS à travers son initiative de prise en charge intégrée des maladies de l'enfant vise à réduire la mortalité infantile par une prise en charge des maladies infectieuses graves grâce à l'association de programmes de vaccination, de prévention et promotion de la santé, mais aussi de programmes de nutrition (Lambrechts et al., 2000; Tulloch, 1999). Parmi les programmes de nutrition figure celui de la promotion de l'allaitement maternel, plus spécifiquement l'allaitement maternel exclusif.

En effet, depuis le début des années 1970, on observe un intérêt croissant pour la pratique de l'allaitement maternel à travers le monde, notamment après la période creuse de l'après-guerre (Beaudry et al., 2006). A alors été déclenchée une grande mobilisation impliquant aussi bien des gouvernements, des scientifiques, des associations professionnelles, des organisations non gouvernementales, que des industries d'aliments infantiles afin de «prohiber la promotion abusive de la vente d'aliments pour bébés qui peuvent être utilisés pour remplacer le lait maternel » (WHO, 1981, p.7). Un des objectifs visés était de lutter contre la forte mortalité infantile qui y était associée en particulier dans

(20)

promouvoir, protéger et soutenir l'allaitement maternel. Il s'agit principalement :

• Du « Code international de commercialisation des substituts du lait maternel » (annexe A) adopté par la 34e session de l'Assemblée mondiale de la santé en 1981,

qui fixe les règles de commercialisation des substituts du lait maternel, des biberons et des tétines, et vise à réduire l'influence et la pression commerciale des industries à travers la promotion directe auprès du public (WHO, 1981). De plus, les résolutions 39.28 et 47.5 de l'Assemblée mondiale de la santé passées respectivement en 1986 et 1994, stipulent qu'il ne doit y avoir aucun don gratuit ou subventionné de substituts de lait maternel ou autres produits protégés par le code dans aucun système de soins de santé (WHA, 1986; WHA, 1994)

• De la « Déclaration d'Innocenti » signée par plus de 30 pays en 1989 (OMS, 1990) qui, focalise sur le besoin de protéger, promouvoir et soutenir l'allaitement maternel en spécifiant le rôle des services liés à la maternité. Cette déclaration qui inclut les « Dix conditions pour le succès de l'allaitement maternel » (annexe B) a été endossée par la 55e Assemblée mondiale de la santé en 1992 et constitue la base de

« l'Initiative des hôpitaux amis de bébés » de l'OMS/UNICEF (OMS/UNICEF, 1992).

• La « Stratégie mondiale pour l'alimentation du nourrisson et du jeune enfant » élaborée conjointement par l'OMS et l'UNICEF et adoptée récemment par tous les États membres de l'OMS lors de la 55è Assemblée mondiale de la santé (OMS, 2003), qui réaffirme les éléments du « Code international de commercialisation des substituts du lait maternel » et de la « Déclaration d'Innocenti ». Elle recommande comme une mesure de santé publique, de :

Faire en sorte que le secteur de la santé et les autres secteurs pertinents protègent, encouragent et soutiennent l'allaitement maternel exclusif pendant six mois et la poursuite de l'allaitement jusqu'à l'âge de deux ans ou au-delà et donner aux femmes les moyens nécessaires (dans la famille, dans la communauté et au travail) pour y parvenir.

(21)

définis parmi lesquels le premier et le quatrième qui sont respectivement « l'éradication de l'extrême pauvreté et de la faim » et « la réduction de la mortalité des enfants de moins de 5 ans » (WHO, 2006). Différentes stratégies sont utilisées pour relever ces défis. Dans les 42 pays qui comptent 90 % des décès d'enfants de moins de 5 ans dans le monde, dont le Niger, il est considéré urgent que les interventions les plus accessibles et les plus abordables soient promues et adoptées (UNICEF, 2003; Black et al., 2003; Jones et al., 2003; Bryce et al., 2003; WHO, 2006). Parmi les stratégies reconnues efficaces figurent les bonnes pratiques alimentaires chez les nourrissons et les enfants, dont, entre autres, l'allaitement maternel exclusif (WHO, 2006; Jones et al., 2003).

Plusieurs études ont démontré l'importance de promouvoir l'allaitement maternel exclusif pour assurer un bon état nutritionnel, la croissance et le développement, et donc la santé et la survie des enfants. Or, pour avoir les pratiques appropriées, les mères ou les familles en général, ont besoin de certaines ressources dont le soutien et l'assistance des professionnels de la santé. En effet, le rôle essentiel de ces derniers est bien souligné à plusieurs reprises par l'OMS et l'UNICEF (OMS, 1981; OMS/UNICEF, 1992; OMS, 2003) ainsi que par d'autres instances telles que l'Académie Américaine de Pédiatrie (AAP, 2005).

Notre étude vise à comprendre le rôle joué par les professionnels de la santé quant à la promotion de l'allaitement maternel exclusif en milieu hospitalier dans la Communauté urbaine de Niamey. Ainsi, pour répondre à notre préoccupation principale, nous avons exploré les attitudes et pratiques des professionnels de la santé afin d'identifier celles qui pourraient nous aider à comprendre la situation stagnante de la pratique de l'allaitement maternel exclusif par les mères de la Communauté urbaine de Niamey. Les résultats de l'étude peuvent contribuer à faire avancer les connaissances sur les aspects de la question sur lesquels il est nécessaire d'intervenir afin d'améliorer les activités de promotion de l'allaitement maternel exclusif au niveau des professionnels de la santé.

(22)

mère et la famille, un aperçu sur les facteurs déterminants cette pratique ainsi qu'une brève description de la situation socio-sanitaire et celle de l'allaitement au Niger et dans la Communauté urbaine de Niamey.

Le deuxième chapitre consacré à la recension des écrits situe le rôle des professionnels de la santé, à travers leurs pratiques et attitudes, dans la promotion de l'allaitement maternel exclusif et le choix des mères concernant cette pratique. Les questions et objectifs de recherche ainsi que le cadre conceptuel font l'objet du troisième chapitre. Le quatrième chapitre décrit les aspects méthodologiques. Les cinquième, sixième et septième chapitres présentent des résultats principalement sous forme d'articles soumis pour une publication dans des revues scientifiques. Le premier article relate nos observations menées dans un échantillon de formations sanitaires de la Communauté urbaine de Niamey. Le deuxième article traite des obstacles à la promotion de l'allaitement maternel exclusif, identifiés par les professionnels de la santé ayant participé aux discussions de groupe. Le troisième article présente les suggestions de pistes faites par les participants pour rehausser le taux de pratique de l'allaitement maternel exclusif. Le chapitre huit fait l'objet de résultats complémentaires. Le neuvième chapitre est consacré à une discussion générale des résultats. Enfin, dans le chapitre dix, la conclusion générale fera la synthèse des points essentiels de l'étude et quelques recommandations seront formulées.

(23)
(24)

Malgré l'évidence montrant que l'allaitement maternel exclusif contribue efficacement au bon état de nutrition et à la santé des enfants, jouant ainsi un grand rôle dans la prévention de la malnutrition et la réduction de la mortalité, cette pratique demeure presque inexistante au Niger même si l'allaitement général est courant. Or, ce pays a une population très jeune et détient en même temps des indicateurs nutritionnels et sanitaires particulièrement mauvais. Après un bref aperçu sur la situation socio-sanitaire du Niger ainsi que les causes de la malnutrition, nous présenterons dans ce chapitre les liens entre la santé des mères et des enfants et les pratiques d'allaitement en mettant un accent particulier sur le cas du Niger.

1.1 Situation socio-sanitaire du Niger

Au Niger, un des cinq pays dont l'indice de développement humain est le plus bas au monde (PNUD, 2004), le contexte est tel que le taux annuel d'accroissement de la population est de 3,3 %, pour un nombre total estimé à 11.856.493 habitants en 2004; cette population est très jeune : 49,5 % a moins de 15 ans et 21,3 % moins de 5 ans (MSP/LCE, 2004; Attama et al., 1999). Le pays détiendrait aussi l'un des plus forts taux de fécondité au monde avec une moyenne de 7,1 enfants par femme (PRB, 2009).

Cette progression rapide de la population s'effectue dans un contexte socio-économique très difficile car la pauvreté1 est largement répandue au Niger (MSP/LCE, 2004; DSCN,

1994). Selon le rapport de l'enquête nationale sur le budget et la consommation des ménages de 1989/1990 - 1992/1993, données les plus récentes, 86 % de la population vit en milieu rural et 63 % des Nigériens vivent en dessous du seuil de pauvreté, c'est-à-dire que par ménage (en moyenne 8 personnes), ils disposent en moyenne de moins de 24000F CFA (environ 60$ CAN) par mois pour faire face à toutes leurs dépenses (DSCN, 1994). Ceci n'est pas sans conséquence sur les conditions de vie dont, entre autres, la situation

1 Dans son rapport sur la pauvreté dans le monde en 1990, la Banque mondiale fait état du seuil de pauvreté

de revenu par personne et par an de 275 à 370$ US pour les pays à faible revenu dont le Niger (DSCN, 1994), donc l'équivalent de moins de 1$US par jour.

(25)

connu une évolution : en 2000, 47,6 % de la population avait accès à un centre de santé situé entre 0-5km, comparé à 49,8 % en 2003 (MSP/LCE, 2004).

Selon les indicateurs de l'UNICEF, le Niger enregistrait en 2004 un fort taux de mortalité infanto juvénile (probabilité de mourir entre la naissance et 5 ans) de 259%o, et un taux de mortalité infantile (probabilité de mourir entre la naissance et 1 an) de 152%o (Veneman, 2006). En 2007, ces chiffres sont respectivement de 253%c et 148%c (Veneman, 2007). Selon les prévisions du plan de développement sanitaire (PDS)2 2005-2009 du

ministère de la Santé, sur 3.358.000 naissances attendues de 2005 à 2009, 11 % des nouveau-nés décéderont avant leur premier anniversaire, et 27 % avant le cinquième (MSP/LCE, 2004). Près de la moitié des enfants seront malnutris. Le PDS classe la malnutrition comme étant une priorité de santé publique au Niger (MSP/LCE, 2004).

En effet, les mortalités infantile et infanto-juvénile très élevées sont liées à une prédominance des maladies infectieuses et parasitaires, ainsi qu'à un fort taux de malnutrition protéino-énergétique, alors que les soins curatifs et préventifs pour les enfants sont insuffisants (MSP/LCE, 2004). Le seuil de malnutrition de l'enfant nigérien est, de façon, constante dans plusieurs zones vulnérables, largement au dessus des seuils d'alerte d'intervention dû aux déficits alimentaires chroniques ainsi qu'aux conséquences des maladies infectieuses et parasitaires fréquentes, dans un contexte de système de soins déficient et de méconnaissance culturelle des besoins nutritionnels du jeune enfant (MSP/LCE, 2004).

1.2 Causes de la malnutrition

Selon la définition de l'OMS (1982), la malnutrition est « un état pathologique résultant de la carence ou de l'excès, relatif ou absolu, d'un ou plusieurs nutriments essentiels, que cet état se manifeste cliniquement ou ne soit décelable que par des analyses biochimiques,

2 Le PDS est le plan de la politique de santé pour les 5 années à venir. Il s'inscrit dans le plan cadre des

Nations Unies, dans le Document de Stratégies de Réduction de la Pauvreté (DSRP) et dans les orientations stratégiques du MSP/LCE 2002-2011.

(26)

anthropométriques ou physiologiques ». Même si la malnutrition est fréquente et constitue un des principaux problèmes affectant la santé et le bien-être des enfants dans les pays en développement en général et au Niger en particulier, elle est rarement citée comme cause majeure et directe des décès.

Dans son cadre conceptuel sur les déterminants de la malnutrition (figure 1), l'UNICEF souligne le caractère plurisectoriel de cette dernière. Ainsi, les causes de la malnutrition ont été classées en causes immédiates (au niveau de l'individu : ration diététique inadéquate et maladies); en causes sous-jacentes (au niveau de la famille : insuffisance d'accès aux aliments, inadéquation des soins aux mères et aux enfants, inadéquation des services de santé, d'assainissement et d'approvisionnement en eau); en causes fondamentales (au niveau de la société : quantité et qualité des ressources existantes, ressources potentielles et leur mode de contrôle) (Jonsson, 1995; Bellamy, 1997). L'on constate que, bien que nécessaires pour aboutir à un bon état de nutrition, un apport alimentaire adéquat et l'absence de maladies ne sont pas des conditions suffisantes. Tel qu'illustré dans la figure 1, les familles doivent non seulement avoir accès aux aliments requis, à des services de santé adéquats et à un environnement sain, mais elles doivent aussi pouvoir offrir aux mères et aux enfants les divers soins dont ils ont besoin pour assurer leur apport alimentaire et leur état de santé, donc leur état nutritionnel.

Les pratiques de soins aux enfants se réfèrent à l'ensemble des comportements des gardiens qui sont généralement les mères, vis-à-vis les enfants. Ces soins incluent non seulement ceux associés aux pratiques alimentaires (allaitement maternel et alimentation complémentaire), à celles d'hygiène, mais aussi à la préparation des aliments, aux soins de santé à domicile et aux soins psychosociaux (Engle et al., 1997; Bellamy, 1997; Ramakrishnan, 1995). Engle et al. (1997) soulignent que les besoins de base pour l'alimentation, la santé et la protection, demeurent les mêmes pour tous les enfants dans toutes les cultures.

Cependant, des différences peuvent être observées dans la façon dont les soins sont dispensés pour satisfaire ces besoins. Les pratiques de soins diffèrent aussi selon l'âge et les

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premières années, lesquelles constituent une période stratégique dans la vie d'un enfant. La mortalité est particulièrement élevée durant la première année de vie, ce surtout dans les pays en développement (Bellamy, 2000).

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Figure 1: Causes de la malnutrition chez les enfants (Bellamy, 1997, p 25)

Résultats

Causes immédiates au niveau de l'individu

Insuffisance d'accès A Inadéquation des soins ( \ f ^ ^ m M m ^ ) /Causes sous-jacentes

/ \ u niveau de la famille

Causes fondamentales au niveau de la société

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Par rapport aux pratiques de soins, Greiner dans la revue de l'UN/SCN (UN/SCN, 2004) souligne l'importance de l'allaitement maternel exclusif, en relevant qu'il existe des preuves scientifiques que, chez les jeunes enfants de moins de 6 mois, le don d'aliments et autres liquides que le lait maternel les substitue à ce dernier. Ce recul de l'allaitement maternel serait responsable de la majorité des problèmes de retard de croissance (T/A) dans les pays en développement.

1.3 Allaitement maternel exclusif et santé des enfants

Tel que déjà mentionné, l'allaitement maternel exclusif est largement reconnu comme étant la pratique optimale d'alimentation et de soins pour les jeunes enfants durant les premiers mois de la vie (WHO, 1998; AAP, 1997; Bellamy, 1997). La recommandation en vigueur est :

Non seulement l'initiation de l'allaitement dans la demi-heure suivant la naissance, mais aussi la pratique de l'allaitement maternel exclusif, c'est-à-dire uniquement le lait maternel sans eau ni aucun autre liquide ou aliment sauf indication médicale, et l'encouragement de l'allaitement au sein à la demande de l'enfant. Il est également recommandé de donner le colostrum3, continuer

l'allaitement jusqu'à l'âge de 2 ans ou plus et introduire les aliments de complément à partir de l'âge de 6 mois (OMS/UNICEF, 1992; AAP, 1997; WHO, 1998; OMS, 1999; Bellamy, 1997; AMS 54.2, 2001).

L'Académie américaine de pédiatrie concluait récemment que les données > sont suffisantes pour affirmer qu'en plus de diminuer la fréquence et la sévérité des infections telles que les maladies gastro-intestinales et respiratoires, l'allaitement a le même effet sur plusieurs autres maladies infectieuses (AAP, 2005). En effet, contrairement à l'allaitement artificiel, le lait maternel contient les anticorps nécessaires qui protègent contre les infections et il assure un apport optimum en substances nutritives, donc une meilleure croissance des nourrissons et une baisse de la morbidité et la mortalité infantiles comme celles dues aux infections gastro-intestinales (AAP, 1997; AAP, 2005; Kramer et Kakuma, 2002; Oddy, 2001; Hanson et al., 2003; OMS, 1990). De plus, il ne nécessite aucune manipulation, amoindrissant ainsi le risque de contamination.

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Lorsque avant l'âge de 6 mois les enfants commencent à consommer des aliments complémentaires, ils sont plus à risque de malnutrition et d'infections, et ce particulièrement dans les pays en développement (Engle et al., 1997; WHO, 1998). Une analyse Profiles (Profiles Niger, 2006) soulignait que la pratique inadéquate de l'allaitement maternel constitue une des principales causes de la malnutrition dans le pays. On sait donc maintenant qu'il n y a aucun bénéfice à donner d'autres aliments ou liquides en dehors du lait maternel entre 0 et 6 mois, âge auquel les enfants doivent faire l'objet de pratiques de soins adéquats principalement par rapport à l'alimentation et l'hygiène (Cohen et al., 1994; Dewey et al., 1999).

L'allaitement maternel exclusif permet de baisser la fréquence des infections et le taux de malnutrition même au-delà de 6 mois. Par exemple, concernant ses effets sur la mortalité infantile en Amérique Latine, une étude a montré que 55 % des décès d'enfants dus aux maladies diarrhéiques et aux infections respiratoires aiguës peuvent être prévenus en allaitant les enfants exclusivement entre 0 et 3 mois, et partiellement pour le reste de l'enfance (Betran et al., 2001). Selon cette même étude, 13,9 % de tous les décès d'enfants survenant avant l'âge de 1 an en Amérique Latine seraient évités chaque année si ces enfants étaient allaités exclusivement pendant les 3 premiers mois, et partiellement pour le reste de la première année. D'autres études ont aussi conclu que la pratique de l'allaitement maternel exclusif jusqu'à l'âge de 6 mois est aussi associée à un faible risque d'infections gastro-intestinales (Kramer et al., 2003; Oddy, 2001; Oddy, 2002; Kramer et Kakuma, 2002; Kramer et al., 2001). Au Niger, 15,5 % des décès d'enfants de moins d'un an sont attribuables à la mauvaise pratique de l'allaitement maternel. Ce qui représente un chiffre annuel de 9626 décès d'enfants de cette tranche d'âge, si aucune action n'est entreprise (Profiles Niger, 2006).

Au niveau mondial (dans les 42 pays où l'on retrouvait 90 % des décès d'enfants de moins de 5 ans en 2000), parmi plusieurs types d'interventions susceptibles d'être efficaces pour prévenir des décès d'enfants de moins de 5 ans, il est ressorti que la pratique optimale d'allaitement (allaiter exclusivement les 6 premiers mois et poursuivre encore 6 mois d'allaitement additionné d'aliments complémentaires adéquats) sauverait la plus grande

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proportion des enfants qui meurent chaque année. Ainsi, si 90 % des enfants de moins de 5 ans étaient allaités, l'on préviendrait 13 % des décès annuels à travers le monde, comparativement à par exemple 7 % pour l'utilisation de matériel imprégné d'insecticide, ou à 3 % pour l'eau potable, l'hygiène et l'assainissement (Jones et al., 2003). Comme l'ont conclu ces auteurs, les interventions nécessaires pour accomplir l'objectif du millénaire de réduire la mortalité des enfants de deux tiers en 2015 sont disponibles mais elles ne sont pas mises à la disposition des populations qui en ont besoin c'est-à-dire les mères et les enfants. Les résultats de toutes ces études constituent donc des données probantes pour promouvoir l'allaitement maternel exclusif et, protéger, encourager et soutenir l'allaitement maternel en général, tel que recommandé par l'OMS et l'UNICEF (OMS, 1990). La promotion et le soutien de l'allaitement maternel exclusif constituent une stratégie utile et économique pour une croissance et un développement optimal des enfants.

1.4 Allaitement maternel exclusif et santé de la mère

En plus des avantages pour l'enfant, l'allaitement maternel exclusif comporte aussi plusieurs bienfaits pour les mères allaitantes parmi lesquels ceux au niveau de la santé. Sur le plan scientifique, il est reconnu que les femmes qui ont allaité ont moins de risque de développer le cancer du sein et des ovaires (Labbok, 2001). De plus, d'autres données probantes établissent le lien entre un allaitement adéquat surtout l'allaitement maternel exclusif pratiqué de façon optimale pendant les six premiers mois, et le retour des menstruations, le contrôle de la fertilité des mères et l'espacement des naissances (Labbok et al., 1994; Labbok, 2001). Cet effet sur l'aménorrhée associé à la pratique adéquate de l'allaitement maternel exclusif contribue à la réduction des pertes en fer et donc la diminution des risques d'anémie ferriprive durant cette période (OMS, 1999). Sur le plan psychologique, la pratique de l'allaitement particulièrement le contact postnatal précoce, renforcerait le lien affectif entre la mère et l'enfant (Kennell et Klaus, 1998; OMS, 1999).

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Récemment, le Comité permanent des Nations Unies sur la nutrition (UN/SCN, 2004) soulignait qu'en plus d'être un objectif en soi, la nutrition est un volet critique dans la recherche de l'atteinte des Objectifs de développement du millénaire. Certains de ces objectifs sont d'éradiquer la faim et l'extrême pauvreté, et de réduire la mortalité infantile. Aussi, la malnutrition des enfants est reconnue comme étant liée à la pauvreté, au bas niveau d'éducation et une insuffisance d'accès aux services de santé (UN/SCN, 2004). Elle rend l'enfant vulnérable en nuisant au système immunitaire, au développement physique et mental, et en réduisant la capacité d'apprentissage, la qualité générale de vie et à plus long terme la productivité à l'âge adulte, contribuant ainsi à entretenir la situation de pauvreté (UN/SCN, 2004).

Or, il est établi que le lait maternel a des effets positifs sur les économies de la famille d'autant plus qu'il fournit tous les nutriments et l'énergie dont le nourrisson a besoin durant les 6 premiers mois de sa vie, la moitié entre 6 et 12 mois et le tiers entre 12 et 24 mois (PAHO, 2002). Il n'est donc pas nécessaire d'investir de l'argent pour acheter d'autres laits ou des aliments pour l'enfant entre 0 et 6 mois. Au delà des ménages, la pratique de l'allaitement maternel exclusif, permet de réduire les coûts de la prise en charge des enfants malnutris et malades dans le système de santé et ceux de l'importation des laits artificiels, surtout dans le contexte de mondialisation où les pays pauvres sont très exposés aux politiques économiques des industries multinationales (Kickbusch et De Leeuw, 1999; Marzouki, 2005). Ainsi, en plus d'être le mode d'alimentation le plus sain pour les enfants entre 0 et 6 mois, l'allaitement maternel exclusif est également le plus économique particulièrement pour les ménages à faible revenu, par conséquent pour les pays en développement. Au Niger, selon une analyse Profiles, on évalue à 193 milliards de FCFA la valeur monétaire annuelle du lait maternel consommé par les enfants. Les pertes annuelles sont estimées à 100 milliards de FCFA (environ 240 millions de SCAN) dues au manque de pratique de l'allaitement maternel exclusif, équivalent à près de deux fois le budget annuel du ministère de la Santé publique (Profiles Niger, 2006).

De même, des études aux États-Unis et au Québec ont permis d'estimer que des économies substantielles seraient réalisées quant à l'utilisation du système de santé pour

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des infections respiratoires, gastro-intestinales et des otites moyennes, si les enfants étaient exclusivement allaités (60 % des enfants dans le cas du Québec) durant les 3 premiers mois de la vie (Weimer, 2001; Guillemette et Badlissi, 2001). La pratique de l'allaitement maternel exclusif assurerait aussi la sécurité alimentaire et sanitaire de l'enfant au moins les 6 premiers mois de la vie (Hamelin et Beaudry, 2001). Elle contribuerait également de façon indirecte à la sécurité alimentaire de la famille et en conséquence à la réduction de la pauvreté. Avec la promotion de l'allaitement maternel exclusif, il est certain que l'on agirait efficacement sur la santé des enfants et la réduction de la pauvreté à travers les effets positifs sur les conditions de vie de la mère et de tout le ménage, et sur l'économie des pays. Le 5e rapport sur la situation nutritionnelle dans le monde (UN/SCN, 2004) souligne

d'ailleurs que la pauvreté est biologiquement transmise d'une génération à l'autre à travers la malnutrition.

1.6 Allaitement maternel exclusif et santé des enfants : la situation au Niger

Au Niger, les infections respiratoires aiguës (IRA), les maladies diarrhéiques et la malaria constituent les premières causes de mortalité des enfants de moins de 5 ans (MSP/LCE, 2004; Attama et al., 1999) et l'on sait que ces infections sont aggravées par leur mauvais état nutritionnel. Selon l'UNICEF, au Niger, 40 % des enfants de moins de 5 ans souffrent de retard de croissance, 40 % d'insuffisance pondérale et 14 % d'émaciation sous les formes modérée et grave, c'est-à-dire que respectivement les indices T/A, P/A et P/T4 sont inférieurs de 2 écarts-types à la médiane de la population de référence NCHS5

(Veneman, 2005). Cette situation est alarmante car dans une population en bonne santé et bien nourrie, le taux de retard de croissance (malnutrition chronique) serait de 2,3 % (Attama et al., 1999).

En effet, les pratiques alimentaires concernant les jeunes enfants ne sont pas bonnes en général et constituent l'un des facteurs déterminants qui affectent la morbidité et la

4 T/A : indicateur d'un retard de croissance (taille petite pour l'âge)

P/A : indicateur d'une insuffisance pondérale (poids insuffisant pour l'âge) P/T : indicateur d'une emaciation (poids insuffisant pour la taille)

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mortalité des enfants. Pour la pratique de l'allaitement maternel au niveau national, la durée médiane est satisfaisante et estimée à 21,4 mois pour environ 65 % des enfants (INS et Macro International Inc., 2007). Cependant, bien que l'allaitement soit très répandu et prolongé en moyenne jusqu'à 21 mois, il est en général non exclusif avant l'âge de 6 mois. En effet, l'on peut dire que l'allaitement maternel exclusif est inexistant au Niger avec un taux de pratique de seulement 1 % entre 0 et 6 mois qui est demeuré le même entre 1992 et 2004 (Kourguéni et al., 1993; Veneman, 2005). Avant l'âge de 6 mois, une très large proportion des enfants reçoit autre chose en plus du lait maternel : 63 % reçoivent de l'eau en plus du lait et 22 % reçoivent d'autres types de liquides ou d'aliments de complément en plus du sein (ENS et Macro International Inc., 2007).

Dans une étude réalisée à Kollo situé à 30 km de Niamey, les mères expliquaient ce don d'aliments prélactés par diverses raisons telles que la nécessité pour un enfant de boire de l'eau, pour calmer la faim de l'enfant pendant que la montée de lait n'a pas encore lieu, pour calmer les pleurs de l'enfant, sur conseil des professionnels de la santé, ou simplement par tradition pour purger l'enfant avec des décoctions de plantes, ou le protéger des mauvaises langues avec de l'eau bénite (Moussa Abba, 2000). Or, ce type d'allaitement peut être néfaste pour la santé de l'enfant. En effet, d'une part, l'enfant ne reçoit pas dans les 24 heures qui suivent sa naissance le colostrum contenant les anticorps de la mère et, qui constitue « son premier vaccin ». D'autre part, il reçoit divers liquides (eau, jus de fruits, décoctions de feuilles ou racines d'arbres, etc.), l'exposant ainsi à des agents pathogènes et donc aux infections à cause du manque d'hygiène lié aux compléments alimentaires introduits. De plus, étant en partie rassasié, il ne peut plus prendre suffisamment de lait maternel pour satisfaire ses besoins nutritionnels et bénéficier des effets protecteurs.

Récemment, les résultats de l'Enquête Démographique et de Santé (EDS) 2006 (INS et Macro International Inc., 2007) indiquent que le pourcentage de pratique de l'allaitement maternel exclusif entre 0 et 6 mois au Niger serait passé à 14 % tandis que selon l'UNICEF, ce chiffre serait plutôt encore de 1 % en 2006 (Veneman, 2007) et 9 % en 2007 (Veneman, 2008). D'après des explications reçues auprès d'informateurs clé dans le domaine de l'allaitement au Niger, la différence entre ces données proviendrait de celle

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entre les démarches méthodologiques utilisées notamment dans les questions posées aux mères. Soulignons cependant que le taux de l'EDS (INS et Macro International Inc., 2007) est à considérer avec prudence car selon la même source, l'on constate qu'entre l'âge de 4-5 mois, la proportion d'enfants ne recevant que le lait maternel est seulement de 8 %. A la lumière de ces chiffres qui montrent une évolution relativement non significative de la situation, l'allaitement maternel exclusif demeure une pratique non courante au Niger. En effet, à titre comparatif, si le taux d'allaitement maternel exclusif au Niger est demeuré à 1 % entre 1996 et 2006, dans certains pays limitrophes ce chiffre a évolué de façon constante : par exemple, au Nigeria, il est passé de 2 à 17 %, au Burkina-Faso de 3 à 19 % et au Mali de 12 à 25%.

Les résultats de l'EDS de 1998 (Attama et al., 1999) indiquent que pour toutes les formes de malnutrition existantes (retard de croissance, emaciation, insuffisance pondérale) chez les enfants de moins de 3 ans au Niger, environ 7 % sont observées déjà avant l'âge de 6 mois (Attama et al., 1999), et 30 % des enfants de moins de 6 mois ont déjà eu la diarrhée. Ils commencent à être mal nourris dès les premiers mois de leur vie, et se retrouvent dans le cercle vicieux malnutrition - infections. En 2006 (INS et Macro International Inc., 2007), avant l'âge de 6 mois, pour le retard de croissance, l'émaciation et l'insuffisance pondérale, les chiffres sont respectivement de 6 %, 5 % et 4 %. Selon la même source et pour la même tranche d'âge, 18,4 % ont déjà eu la diarrhée.

1.7 Situation particulière de la pratique d'allaitement maternel exclusif à Niamey

Selon les données de l'EDS 1998 (Attama et al., 1999), la durée médiane de l'allaitement estimée à 21,5 mois à Niamey, est légèrement plus courte en milieu rural (20,8 mois), comparée à 18,9 mois pour les autres villes. L'EDS de 2006 indique que la durée médiane de l'allaitement maternel a baissé à 19,6 mois à Niamey (INS et Macro International Inc., 2007). Concernant la proportion d'enfants allaités dans les 24 heures suivant la naissance, elle est de 81 % à Niamey contre 36 % seulement en milieu rural. Du point de vue régional, les différences sont considérables: par exemple, dans le sud-est, à Maradi et Zinder/Diffa, les proportions d'enfants allaités dès le premier jour qui suit la

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naissance sont très faibles (respectivement 29,6 et 23,7 %) si on les compare au reste du pays (Tillabéry : 74,8 %, Dosso : 57,2 %, Tahoua/Agadez : 31,1 %). Cependant, la durée médiane de l'allaitement seul (exclusif), est identique pour l'ensemble du pays : 0,4 mois aussi bien à Niamey qui est la capitale où les services de santé et l'information sont plus accessibles à la population, que dans les autres villes et le milieu rural (Attama et al., 1999). Ce chiffre est demeuré le même en 2006 (INS et Macro International Inc., 2007). La comparaison de ces chiffres montre une diminution de la durée de l'allaitement dans la Communauté urbaine de Niamey alors même que celle de l'allaitement maternel exclusif n'a pas évolué.

En regard des données sociodémographiques notées dans les paragraphes précédents, le Niger est un des pires pays concernant l'état nutritionnel et l'état de santé des enfants âgés de moins de 5 ans. Or, pour atteindre l'objectif visé par la recommandation de l'OMS/UNICEF, il est important de comprendre les facteurs influençant la pratique de l'allaitement maternel exclusif afin de mieux la promouvoir et la soutenir. À travers la recherche présentée ici, nous avons essayé d'apporter notre contribution à l'étude des déterminants de cette pratique qui doit être le mode d'alimentation durant les premiers mois de vie.

1.8 Déterminants des pratiques d'alimentation : l'allaitement maternel exclusif

Le cadre conceptuel de l'UNICEF sur les causes de la malnutrition (Bellamy, 1997), montre l'importance des soins apportés aux enfants dont les pratiques d'allaitement et d'alimentation, comme déterminants sous-jacents de l'état nutritionnel. Or, afin d'avoir de bonnes pratiques, les mères ou les gardiens des enfants ont besoin de certaines ressources aussi bien au niveau de la famille que celui de la société. En effet, par rapport à ces pratiques, Lutter (2000) souligne que pour promouvoir des comportements optimaux d'alimentation du nourrisson, il est nécessaire d'intervenir au niveau de la famille et de la société, afin de changer l'environnement dans lequel se développent les comportements liés aux modes d'alimentation des nouveau-nés.

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L'allaitement est un des comportements reliés à l'alimentation du nourrisson. D'après la figure 2, l'on constate que pour qu'un enfant soit mis au sein et allaité d'une manière considérée comme optimale, la mère doit pouvoir prendre des décisions éclairées et avoir des opportunités d'agir selon ces décisions. D s'agit des déterminants immédiats du comportement éventuel de la mère. Les deux doivent être présents pour que l'allaitement ait lieu. Es sont à leur tour influencés directement par l'information que la mère reçoit concernant l'alimentation de son enfant et par le soutien physique et social dont elle bénéficie pendant la grossesse, l'accouchement et en période post-partum. Ces facteurs sous-jacents sont quant à eux influencés par les attitudes et les normes médicales, familiales et culturelles, les conditions démographiques et économiques, les pressions commerciales ainsi que les politiques et les normes nationales et internationales (Lutter, 2000).

D'autres auteurs ont aussi rapporté l'influence des déterminants ci-dessus représentés dans le modèle de Lutter (2000) sur les décisions et les pratiques des mères quant à l'alimentation, dont le choix de pratiquer l'allaitement maternel exclusif. Ainsi, Yngve et Sjôstrôm (2001), dans leur revue de la littérature sur le cas de l'Europe, ont classé les déterminants des comportements des mères selon les catégories suivantes :

- les attributs démographiques (l'âge, le niveau d'éducation et l'ethnie de la mère, son statut marital, son statut d'emploi, son milieu géographique, le sexe de l'enfant, ...) - les attributs psychosociaux (les facteurs directement reliés aux processus intra et

interpersonnels de la mère, la confiance maternelle, les croyances relatives à la santé, le rôle et le support de groupes tels que la famille, les amis,...)

- les attributs des soins de santé et les contraintes biomédicales (règlements, politiques et pratiques à l'intérieur du système de santé, qui pourraient contraindre ou promouvoir l'allaitement maternel : par exemple les formations en compétences en allaitement, les cours prénatals, la santé périnatale de la mère et de l'enfant,...) - les attributs communautaires (les réseaux sociaux et les normes existant de façon

formelle et informelle, l'existence de groupes de soutien de pairs,...)

la politique publique (l'inclusion de l'allaitement maternel dans le curriculum de formation des professionnels de santé, les politiques locales, provinciales et

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fédérales ainsi que les lois qui régulent ou supportent les soins pré et périnatals et les soins aux enfants,...).

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Figure 2: Modèle des comportements d'alimentation des nourrissons (adaptation de Lutter (2000) et traduction libre de Beaudry et al. (2006))

Comportements reliés à l'alimentation du nourrisson

Déterminants immédiats.

Au niveau de l'individu Décisions de la mère x

Déterminants fondamental Au niveau de la société

Déterminants sous-jacents » Au niveau de la famille

Opportunités d'agir * selon ces décisions

Informations sur l'alimentation du nourrisson Soutien physique et social pendant la

grossesse, l'accouchement et en post-partum

Attitudes et normes médicales, familiales et culturelles

Conditions démographiques et économiques Pressions commerciales

Politiques et normes nationales et internationales

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Les variables associées à la pratique de l'allaitement peuvent être regroupées en facteurs d'ordre personnel de la mère (âge, niveau d'éducation, connaissances, croyances, ethnie,...), en facteurs environnementaux que sont le soutien social (soutien familial, réseaux sociaux,...) et les facteurs liés au contexte des soins de santé (politiques des soins de santé, pratiques à l'intérieur du système de santé, formation, attitude et soutien des professionnels de la santé,...).

1.8.1 Facteurs d'ordre personnel et social

L'influence des facteurs liés aux mères et à leur environnement social sur le choix du mode d'alimentation de leur enfant notamment les normes culturelles, a fait l'objet de plusieurs études. Parmi ces facteurs, plusieurs auteurs ont identifié certaines croyances, pratiques et caractéristiques comme ayant généralement une influence sur la pratique de l'allaitement maternel et particulièrement sur l'allaitement maternel exclusif.

Par exemple en Australie, selon Scott et al. (2006), les difficultés liées aux techniques d'allaitement particulièrement durant les quatre premières semaines, l'utilisation des sucettes, le retour au travail et le statut de fumeuse sont négativement associés à la durée de l'allaitement. D'autres études ont également rapporté des facteurs comme l'attitude de la mère vis-à-vis l'allaitement, ses expériences personnelles antérieures en allaitement, la relation mère - enfant et le support familial comme étant associés à l'initiation et la durée de l'allaitement maternel exclusif (Santiago et al., 2003; Ceriani Cernadas et al., 2003; Scott et al., 2006). De leur côté, Gilbert et Lepage (1996), O'Leary et al. (1997), Lepage et Moisan (1998), Santiago et al. (2003) ainsi que Simard et al. (2005) ont observé dans différentes régions notamment au Brésil, au Canada et au Québec, que les femmes qui avaient un niveau d'instruction plus élevé étaient plus disposées à initier l'allaitement et le faisaient sur une plus longue durée.

Au Bangladesh, Haider et al. (2000; 2002) ont conclu que les pairs avaient une influence sur les décisions des mères. En effet, ces études ont montré que l'initiation et la durée de l'allaitement maternel exclusif peuvent être significativement améliorées grâce à la

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stratégie de counseling par des pairs. Les auteurs ont même recommandé d'intégrer cette stratégie dans les programmes de santé maternelle et infantile dans les pays en développement. Des résultats semblables ont été notés par Nankunda et al. (2006) lors d'une étude pilote dans un district rural en Ouganda.

Au Nigeria, Davies-Adetugbo (1997) a exploré les facteurs socioculturels influençant la promotion de l'allaitement maternel exclusif. Le rôle des croyances culturelles ainsi que l'influence de l'environnement socioculturel (la famille particulièrement les femmes âgées, les amies et voisines) sur la décision de la mère en matière d'allaitement de l'enfant ont été rapportés. De façon générale, l'on peut souligner que les systèmes de croyances entourant l'allaitement maternel et au-delà, toutes les pratiques d'alimentation des enfants varient largement selon les contextes, les cultures, les communautés, et même les individus.

Ainsi, des mythes et croyances culturels souvent incompatibles avec une pratique optimale de l'allaitement maternel exclusif ont aussi été identifiés au Niger (Moussa Abba, 2000), dans d'autres pays en Afrique et ailleurs dans le monde : au Mali (Dettwyler, 1987); au Ghana (Mackie, 1991), en Egypte (Harrison et al., 1993), au Lesotho (Latham et Almroth, 1996), en Gambie (Semega-Janneh et al., 2001), en Tanzanie (Agnarsson et al., 2001), en Côte d'Ivoire (Yeo et al., 2005), en Ouganda (Nankunda et al., 2006) et au Mexique (Guerrero et al., 1999). Les croyances communes qui ressortent de tous ces contextes et qui nuisent à la pratique de l'allaitement maternel exclusif sont l'insuffisance du lait maternel (la quantité et la qualité) et le don de l'eau qui est considérée comme un supplément nécessaire et essentiel.

1.8.2 Facteurs liés au contexte des soins de santé

Les deux premières conditions pour le succès de l'allaitement maternel de « l'Initiative des hôpitaux amis des bébés » mettent l'accent sur le rôle des professionnels de la santé dans la promotion de l'allaitement maternel. Elles visent respectivement à « adopter une politique d'allaitement maternel formulée par écrit et systématiquement portée à la connaissance de tous les personnels soignants » et « donner à tous les personnels soignants

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les compétences nécessaires pour mettre en œuvre cette politique » (OMS/UNICEF, 1992).

Parmi les facteurs ayant contribué à augmenter les taux d'allaitement maternel exclusif, la littérature identifie les changements dans les attitudes, les compétences et la connaissance des professionnels de la santé, appuyées par les routines et pratiques de soutien au sein des hôpitaux (Prasad et Costello, 1995; Valdes et Schooley, 1996; Davies-Adetugbo et al., 1997). En effet, quatre revues systématiques ont montré que le soutien de professionnels de la santé compétents est efficace pour l'initiation et le maintien de l'allaitement maternel, qu'il soit apporté avant, pendant ou après l'accouchement, par téléphone, lors des rencontres face à face, des visites à domicile ou dans les centres de santé, individuellement ou en petits groupes, ou la combinaison de toutes ces situations (de Oliveira, Camacho et Tedstone, 2001; Sikorski et al., 2002; Guise et al., 2003; Hodnett et al., 2003). Récemment, une méta-analyse réalisée par Britton et al. (2007) a confirmé l'importance du rôle des professionnels de la santé en concluant qu'en plus des services de santé de routine, leur soutien supplémentaire s'est révélé efficace pour prolonger la durée de l'allaitement maternel exclusif.

1.9 Conclusion

L'allaitement maternel exclusif est une composante importante des pratiques d'alimentation des jeunes enfants. Ses avantages et bienfaits pour l'enfant, la mère, la famille et au delà la société, sont largement reconnus. Dès lors, il nous a semblé pertinent de nous attarder à l'étude des déterminants identifiés pour cette pratique, notamment ceux liés au contexte des soins de santé parmi lesquels les attitudes et les pratiques des professionnels de la santé qui font l'objet de notre étude.

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ROLE DES PROFESSIONNELS DE LA SANTE DANS LA PRATIQUE DE L'ALLAITEMENT MATERNEL EXCLUSIF CHEZ LES MÈRES : QUELQUES CONCLUSIONS D'ÉTUDES

De nombreux auteurs se sont intéressés au rôle des professionnels de la santé et à l'influence que pourraient avoir leurs attitudes et leurs pratiques dans le choix des mères quant aux modes d'alimentation de leurs enfants dont l'allaitement maternel en général et plus particulièrement l'allaitement maternel exclusif. Dans les paragraphes suivants, nous présenterons des exemples de résultats d'études consacrées au sujet qui, comme nous le verrons, suscitent une controverse entre les professionnels de la santé.

Beaudry et al. (2006) soulignent que :

Bien que la plupart des professionnelles de la santé reconnaissent maintenant ce que beaucoup de mères savaient déjà, soit que l'allaitement est le meilleur mode d'alimentation pour l'enfant, dans la plupart des cas elles n'en réalisent pas encore toute la portée (p. 10).

Plus spécifiquement, Philipp et al. (2001) écrivent aussi que:

Pediatricians are in an influential position when a new baby arrives. Words and actions from a trusted pediatrician will endorse, support and encourage breastfeeding (p.587).

2.1 Pratiques des professionnels de santé

Selon certains auteurs, les professionnels de la santé ne seraient pas toujours convaincus de l'importance de leur rôle dans la promotion de l'allaitement maternel (Bergman et al., 1993; Taveras et al., 2004). Ainsi, les pratiques dans certains établissements de santé ne conviendraient pas toujours aux besoins des enfants (Coreil et al., 1995; Guerrero et al., 1999; Alikasifoglu et al., 2001). En ce sens, dans une étude ethnographique sur les facteurs qui dissuadaient les mères d'allaiter exclusivement au sein, ces dernières vivant dans une zone périurbaine de Mexico ont désigné les médecins comme étant les personnes dont les conseils étaient les plus écoutés (Guerrero et al., 1999). Pour 42 % de ces mères, un

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médecin a, à un moment donné, conseillé de cesser d'allaiter pour diverses raisons et la moitié d'entre elles ont suivi le conseil. De même, dans une étude auprès de 1602 membres de l'Académie Américaine de Pédiatrie, seulement 65 % des répondants ont dit recommander l'allaitement maternel exclusif uniquement pour le premier mois après la naissance (Schanler, O'Connor et Lawrence, 1999).

Au Lesotho, des mères ont aussi cité les professionnels de la santé notamment les infirmières comme leur source d'information (dans 38 % des cas) pour donner de l'eau dès la naissance ou durant les premiers mois de la vie (Latham et Almroth, 1996). Dans cette étude, d'après les grand-mères interviewées, ce don d'eau n'était pas une pratique traditionnelle et proviendrait des conseils du milieu médical. Plus spécifiquement, selon plusieurs répondantes, l'ajout de sucre et de sel à l'eau donnée aux nourrissons serait également une conséquence de la promotion de la pratique de la thérapie par réhydratation orale qui est conseillée dans la prise en charge des cas de diarrhées.

Au Nigeria, Davies-Adetugbo (1997) a relevé suite à des groupes de discussion, que les croyances et les comportements des professionnels de la santé (des agents de santé communautaire) n'étaient pas favorables à la promotion de l'allaitement maternel exclusif, d'autant plus qu'aucun parmi ceux inclus dans l'étude ne croyait que cette pratique était possible même pour une journée. Par conséquent, les conseils qu'ils donnaient aux mères contredisaient la recommandation de l'OMS/UNICEF en justifiant que le don de l'eau était essentiel par exemple pour étancher la soif de l'enfant ou pour prévenir les problèmes d'indigestion et de constipation.

Pourtant, Aidam et al. (2005) ont conclu que, dans un contexte à forte culture d'allaitement maternel (comme c'est le cas au Niger), un counseling en allaitement bien mené aurait un impact substantiel sur la pratique de l'allaitement maternel exclusif. Les effets bénéfiques de la stratégie du counseling en allaitement et des pratiques en milieu hospitalier ont été observés dans d'autres milieux. Par exemple au Chili, l'étude de Valdès et al. (2000) a montré qu'un counseling anticipé et un suivi clinique mensuel du couple mère - enfant peut significativement améliorer le pourcentage d'enfants exclusivement

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allaités au sein jusqu'à l'âge de 6 mois chez des femmes qui avaient à concilier travail et allaitement, grâce particulièrement à la technique d'expression du lait maternel. Aussi, toutes les femmes du groupe d'intervention dans la même étude, étaient satisfaites de l'expérience, prêtes à la répéter et à la conseiller à des amies.

En Turquie, dans une étude longitudinale menée entre les mois de juin et décembre 1998 chez des nourrissons sains nés à la maternité d'un hôpital universitaire certifié « ami des bébés », les résultats ont montré que les pratiques hospitalières étaient de meilleurs indicateurs de la durée de l'allaitement maternel exclusif que les connaissances de la mère en matière d'alimentation des enfants, ou les facteurs psychosociaux (Alikasifoglu et al., 2001). Selon les auteurs, ces pratiques pourraient être attribuées à l'inadéquation des connaissances des infirmières et médecins quant aux « Dix conditions de succès de l'allaitement maternel ».

Des résultats similaires ont également été notés au Ghana (Aidam et al., 2005), au Brésil, au Honduras et au Mexique (Pérez-Escamilla et al., 1995), aux États-Unis (DiGirolamo et al., 2001) et au Canada (Joan Martens, 2000) où le taux et la durée d'allaitement exclusif étaient meilleurs chez les mères qui accouchaient ou dont les bébés étaient suivis dans les hôpitaux qui avaient des politiques conformes à celles de 1' « Initiative des hôpitaux amis des bébés », c'est-à-dire où les professionnels de la santé avaient des pratiques favorables à la promotion et le soutien de ce mode d'alimentation des nourrissons. Au Brésil, au Honduras et au Mexique notamment, les femmes qui accouchaient dans les maternités qui avaient un programme de promotion de l'allaitement maternel plus développé réussissaient mieux l'allaitement exclusif, c'est-à-dire qu'elles le pratiquaient plus longtemps (Pérez-Escamilla et al., 1995).

Plusieurs autres études ont aussi montré que la durée d'allaitement maternel peut être augmentée grâce à des pratiques favorables de la politique des « hôpitaux amis des bébés », notamment le fait d'initier l'allaitement dans l'heure suivant la naissance, de laisser la mère et l'enfant séjourner dans la même chambre, d'allaiter à la demande, d'interdire les suppléments et les substituts du lait maternel, de donner plus d'informations et de conseils

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sur l'allaitement, et de donner plus de soins personnalisés (Gray-Donald et al., 1985; Wright et al., 1996; Lutter et al., 1997; DiGirolamo et al., 2001).

À New-York dans le Bronx, les résultats d'un essai randomisé contrôlé avec 364 femmes indiquent que, les mères ayant bénéficié d'un suivi par des consultants spécialisés en lactation appréciaient le service et affirmaient qu'ils étaient déterminants dans leur décision d'initier et de maintenir la pratique de l'allaitement (Memmott et Bonuck, 2006). Au Canada, les résultats de deux enquêtes nationales rapportaient que l'influence des professionnels de santé s'observait plus auprès de certaines catégories de femmes notamment les immigrantes, les jeunes femmes, les femmes rurales et celles de milieux socioéconomiques favorisés (Maclean, 1998).

Cependant, Walker et Adam (2000) dans leur revue de littérature sur l'allaitement maternel en Afrique sub-saharienne ont noté que des encouragements positifs n'étaient pas suffisamment donnés aux mères par le personnel dans les infrastructures de santé comme les hôpitaux, les cliniques et les départements de santé de sorte qu'elles puissent faire face à l'influence exercée par les firmes de laits artificiels quant à l'adoption de ces aliments. Les auteurs ont également relevé que certaines politiques et pratiques hospitalières n'étaient pas de nature à favoriser des pratiques optimales d'allaitement maternel.

2.2 Opinion et attitude des professionnels de la santé

Afin de décrire et apprécier l'attitude des professionnels de la santé, plusieurs auteurs ont recueilli leur opinion sur les questions reliées à la pratique et la promotion de l'allaitement maternel.

Ainsi, dans l'étude de Schanler, O'Connor et Lawrence (1999), la majorité des pédiatres avaient une opinion neutre ou étaient d'accord avec l'énoncé selon lequel l'allaitement maternel et l'utilisation des formules de lait étaient des méthodes équivalentes pour l'alimentation des enfants. Dans l'étude de Taveras et al. (2004), 54 % des obstétriciens et 61 % des pédiatres étaient d'accord avec l'énoncé selon lequel «l'allaitement exclusif

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