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L'image de la femme dans le roman féminin québécois de 1960 à 1970

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(1)

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D' 1 • - - - - - ---,---~~--\

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L'

1

MAGE D'E LA FEMME DANS LE ROMAN FÉM 1 NIN QUÉBÉCO 1 S

..j

-

DE 1960 À 1970

...

by

Anne BROWN

A thesis submitted te the

Faculty of Graduate Studies and Research in partial fulfillment of the requirements

for the degree oÎ Doctor'of Philosophy

Department of French Language and Literature

~

McGill Univers'ity, Montreal

,

July 1987 '. •

-@

Anne Brown, 1987

...

r

..

(2)

-

.

, '

.

L'

1

MAGÉ DE' LA FEMME 'DANS LE ROMAN FÉM rN 1

N QUÉBËCO 1 s

l

...

'

.DE 1960

'~

1970

, 0 '"

.

"'-o ~ " ' 1

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, , • 0

.

.

-'.

L.·.

". , ,

(3)

"'fi. ... ~ , ~ , é~5::;j;,§ <: , "

Au ,cours des ahnées s,oixant~,_' les Lettres

québéèois~s son t marquées par une éc~oGon d,u' roman ~ féminin. On constate chez nos romancières un souci d'accorde+ une sorte 'de prépond~rance au .. personnage

,-~

féminin. C'est -ain~i que, contrairement à son d01,lble dans notre littérature d' avant· 1960, la femme fictive

\ ,

,

moderne n ',apparait plus comme !=,eléguée, à l'arrière-plan romanesque. Cette image de la femm's comme personnage f'

,

prin~ipal autour duquel s'oràonnent'tous les éléments du

.

,

réci t ~st nouvelle dans notre li ttéra ture. Elle semble

dénote,r chez nos auteures uri désir, conscient:. ou. non, de l

créer· oês héroïnes qui ne soient' 'pa-s . uniquément de

s~mp1es faire-valoir de leu~s maris et de leurs enfants.

Si le roman féminin des ·années soixante se

"

.

'caractérise par l'émergence de , la femme fictiv,é 1 on

+- •

observe qu' i-1 se distingue· 'aussi par l~ f~it qu'il anime rarement des héroïnes qui ont accès aU' b.onheur. Eh

~

-.

"'"

effet, la femme fictive que créent nos romanc~eres fait le plus souvent figure dt être

m~lheu·reux.

Céci

·"~mble

, naltre du fait que sa fàmille èt son milieu' S'obst{nen~' 1

à

,

. la définir, symboliquement ou concrètement-, c mme. ane inférieure. Il s'agit d'un monde masculin ré i par une

Î

loi unique., celle du Pèrè. Nos autèures s'i téressent . ~ . à

) .t:'b ~ ~1 .. :.mi / ~ , -~ 1 ~..

.:

~.

(4)

r

,.

.

..

".

"

montrer .que cet état de fait objectif t"ransforme "leurs héroïnes en êtres a~sèrvis au conformisme ambiant.

,

Ces héroïnes évoluent dans ,des romans intimistes

r,~~titivement sombres. ~~~'"

D'ün texte à l'autre, no~s retrouvons l'expression de 1 ' an~oisse , du - sentiment d' inutili t~, de la haine de soi et de l' Autr~ qui vont . j~squ' au déséquilibre me~tal. En m~me, temps, certaines

de ces

~~roInjs

sdnt

décrit~s

açmme' refusant de

s~

sownettre aux exigences des, rôles, féminins traditionnels.

Et el~,s animent une ;:-évol·te toute nouvelle dans ~otre

-. litt~rature. On ne trouve _ plus dans ces fictions la représentation du mythe de la bonne mère, de l' épouse ~

"

fidèle, 'de" la', jeune fill~, soumise, ~

incons~labl~, de la religieuse charitable.

, . /

de la veuve

cès

nouveau~' visages de la femme fictive ont une grande valeur symbolique, car ils ,montrent que la femme éqrivain de la période en question fait basculer les

.

o

anciens modèles et élabore une image' d'héroIne absolument

nouvelle. En étant montrées leur

asservissement, comme brisant le

personnages féminins expriment erté '. jamais encore

-accordée à des héroInes dans nos La mise en question 9U bonheùr féminin sous les formés décrites

..,

jusque-là annonce le r9lOan féminln québécois des années

f'

(5)

C

~ " \

'0\

" . , " - ... _.. . -::--~----.-;

-

1 0

ABSTRACT(

1\ 1 1

During the sixties,

dec~~e,

the literature of Québec ls, '!Jlélrked by, the emergence of the works of women

, ,

writers who qive precggence dto the female protagoniste Thus,

cont~ary

to her counterpart pri& to 1960, the

" .

fictitious woman of the sixties is no'l~nger relegated to the backgrou~d ~~t~e novel. Tpis image of the female as

-

..

a'principal character around ~hom all the eléments of the narrative unfold is naw to our literature. Our writ~s seE!m to desire, cons.ciously or not,.J:o create heroines

- ~

.

""

who are more than mere props for their' husbands or their cbildren. Furthermore, these heroines are portrayed as ' 'rarely ,having access to happiness. Indeed, more often

),.--,,'/,

tf~n not, they are described as unhappy. Their distress seems to spring"from the fact that their family and their

v

milieu persist in de:fini~9' them,

,

~ymbolically or concretely, as inferior beings. ,Their world is a q

-masc~line one governe~ by patriarchal'law. Ou~ author$

.,

,

.

take great care, in showing us thàt .;it is ~his law tnat

,

transforms many of their female char~cters into ~igures

wQo terid to submit to the prevalent

attitudes~nd-mores

,of their time.

.. '/ .~ . . ~_.:~ • • • ~~. t", . " .,~,_.r'Oq " "., ' .• , .•. :~\', .. ;i'~,t,_ . __ ~ ... n.,. _.'t

..

(6)

'0

"

0

\

..

.

, ., , ~~~ t ,;: ;' .. ; 11,..,4j"',);, " " .~ ,f 1 ~,

These heroines· lead , repetitivet-Y - dismal. and somber lives. From one, narrative, to the next, "

.

t,he

t? •

'central character expresses fee~ings of unwort~iness, of hatred of ... self and

of

others 'tha'b Qften culmina tes , in mental inst'ability.' CQn'currently 1 • certain protagorlists

.... ,

a~e ~hown te rebel against traditfon,al female roles. If}

doing sa, t'bey illustrate a new kind of character in our l i terature. One does not find in these 'works the

répresenta~ion of the fol~owing myths: the good mother,

t.he faitl).ful wife, the submissive Idaughter,

the -inconsolable 'widow, the charitable nun. ,

The new depictions of the female protagon~st have a

great~

sYJllb,elic valu.e' for> the;; show

th~.t

1 wOl1len

aut~o;s

..

, '

of. the sixties, repud.iate old models and elaborate an ~

'-. ' - , 0

image of the heroine that is absolutely novel to our .fiction. I~deed,.' in re~ogn~zing, their condition of servitude and in breaking the traditional mould, these' characters illustrate a freedom ne~r before acco~d~d to . women in Qur, literat~re. This' transformation of the

, '

. female chara..cter· as detail:ed in these. works foreshadows the writings aùthored by Québécois women in the followihg decades. : ,

.

\ " , 1

(

"

>

(7)

q

,

, "

.

" o • ~f '

, .

TA!LE DES ,MAT 1 ÈRES

, (!) "

• " - 1 ~ , , INTRODUCTION • ... t . . . '" • • • • • • • • • • • • • • • • • ' , . • .. • • • • • • • . . . . • • • • 1 c. " ,

..

b

'L'IMAGE' DE LA FEMME DANS LA FAMILLE

, ~, ' .

-CHAPITR~ l L'IMAGE DE LA MÈRE'

CHEZ

LES~ROMANCI~RES

QU~B~C9ISES'DE 1960 À 1970 ••••••••.••••••••

- La représentation iittéraire du personnage de,la

mère avant" "1960 ••• a • • • • • : • .-4 • • .J • • • • • • • • • • • • • • • • • • • • 8 ' • •

4 '

- Les modifications de l'image de la mère de

1960

27

28

à 1970

dans la littérature féminine .••.••..•...••...•

34

.

~

La mère fictive et le marché du

travai~

••

~

: .•

• ,L'apparition de thèmes ,noùVeaux .•••••.•••.•.•

o

- Variantes'de la maternité telle

que véc~e

dans les

romans féminins de

1960 à 1970 •.••.••••••••••••••.. ~.

~

.. ' • Le .per.sonnage de la mère adoptive .•••..•••• .'

~

~

• Le

perso~age

de la mère par

te

sang •••

< • • '~ • • • \

• La mauvaise mère ••..••.••..•••••••.•••• ' ••• , .••

'. • La

Olqe

victime de ses conditions de v:Le ••••. '

, "

• La ,mère dénaturée •. , '.

ô • • • • • • • • • • • • • ~ • • • • • • • • • '

• La bonne mère

• • • • a • ,a • • • • • • • • • • • • • • • • • • al • • • • • •

CHAPITRE II L'IMAGE DE

L'~POUSÈ

DANS LES ROMANS

ftMININS dUS!B~COIS ENTRE 19.60 E'1'" 197'0

..

,

.,

.

.. ,

~~" ,

-~ ,

-. Les

nouv~a~

visages de l' épJJuse

f~ctive

•••••••••

,,~

•• '.

- Les héroInes devant le mariage .... ' ••••••

. I.,..~'

...•.

, ~

.-.

~.

,

- L'image de la femme mariée comme victime de'

, '

l'autorité maritale ' .... ~ ... " ... ... , , , / ,

.

4,4, 56, 60 62 71 7,'}.' 103 13:9, 131

.

' 17.8' ·l82 '187 . '. ,20~' 1 i i l ' . "

.

" ,

.

,1 . • , . • , " . " ) .. ~

.

,

...

_/1 o 0 " " .<

(8)

,

,

~, . ~;,( '"",1

.

'

o

" J

.

..

i

L'image de,la.femme mariée. comme victime de ,

la violence mati t,ale ...•••.•• ~ •••.•••..••.•••••• ~ • •. '

\

- Le thème

de,

l'adu~tère dans le roman féMini~ _

de 1960 rà '1970 ~ •••• -••••• -. ••••••••••••••••••••••••••• I! L' é'pouse, 'infidèle •. ' •.•• "' •.•••.•..•.•.. ~ ••.•. ,

.

L'~' 'd~l i " '" . • , 'epouse e a ssee .•.••....•...•.•....•••. \ . ' -, .

- .Le

p~rsonna'~e

de l'épouse et le plaisir '

, ,> ' . amoureux:

1.... . .... , ...

~

. . . ..

~

. . . .( . ',,'

, '

.

.

2is

~ 258 258 280 3Il

CHAPITRE III - L'IMAGE DE LA FILLE DANS LE RGMAN FtMININ

. QUÉB:e:COIS ENTRE 1960 .ET' 1970 '~ •• .- •••••••• ' ••

.

, .. , '1 , > 352 , ,

, - Le thème ~u r.~pport fille-père ••...•• .-. ~ . • . • . . . • • • • . 355

. '

.

,

• Le' thème du .rapport confiant entre 'la '

fillè fipti~e et, son père •.•••.•.••.••.••••. , - ·Les héroïnes bafouées dans leur amour filial ••.•••..

, "

" \

r,)

• La fille. fictive et 'le père esclave de .

l"opinic;>n publique •.•• ~ ... ,.. •...•• ••.•••... 362 ',. Les hérGines comme victimes, de l'abandon

moral o'u physique du père ...•••••..••••. '. Le thème de' la fi:~le fictive victime .

. d '~n 'père ~lcool,ique o~ violent ...••..••••..

..

, .' , 1

366

377

-, La

fille fictive et son apprentissaqe ....• : . . . 386 \ . • Les héroines et le modèle l:radi tionnel

de la jeune ,fillè •.•.••••••••••.•••••.•••••• 38t; 1 \ _ . , • Lê ~~~m7' d~ l' adoJ.:escénte révoltée ... 1 407 1 Q ,

.

\

- ,

~

.

l i l h ~. ,.. lit'

(9)

1

.

'

L

1

I~AGE

DE'

LA

FE~ME

SEULE»DANS

LA

SOCIÉTÉ

0'

'.

CHAPITRE IV . L' IMAGE DE LA FEMME SEULE DANS LE ROMAN

FtMININ QutB~COIS' D~S' ANNŒS. SOIXANTE •••• .,. 431

- Les nouveaux visages~de la célibat~ire fictive ~... 435

-. La céli-bataire :fictive objet de mépris oJa de . .

scandale. • ... -. 4 ~4 ,- Le thème de la dévalorisation du personnage de

la religieuse ... l' • • 466

L'IbENTITÉ DES HËROINES

CHAPITRE

v -

L'IDENT;Te.~~~OïNES

. . .

.

... .

489

,

- Le mépris du corps

. .

. . .

. . .

.

.

.

. .

. .

. . .

.

. .

.

.

. . .

..

. .

492

- La haine de soi ... ~ . . . ,. . . . " .. 514

- ~léments d'une réflexion des héroInes -sur la

con~i tion féminine • ~ ... ~ •• ' •• ' ... .

o 530 CONCLUSION ••••••••• " ••.•••••. " •.•••••••••••••••..•••••.••••. 557 b ... - ~) \ , BIBLIOGRAP~IE .• : ... ')~ ••••••••••••••••••••••••••••••••

.

' . '

"

586 a iv

)

r~ ,~, 1 _ ' ,

.

...

(10)

1

~.O

..

Of ,. , T

o

" '. -

.

o

REMERe 1 EMENTS

~. '-À!i

... ··t ... ·

"

.

, r \ '

Je tiens à exprimer. ma' qratitude' au ~

. Professeur Gabrielle " Pasca16pour ses conseils' et

Q ~ ,

son encouragement dans l'élaboration du présent

1

travai~~ Je remercie les membres. de mon comité

\ consei~, les Professeurs Ândré' Smi th et Jean-Pierre

\ , ~

'Puquettè.

l,.

\

"

Je tiens égalem~nt ~ remercier Rita Demers-Pédemay poul;' < ',la pa tiencé qu 1 el~e a montrée 'lors du

montaqe technique de ce travail.

, \

, , Je dédie la présente ~hèr

'.

à mes paren~s-Bertha Laviolette et Gec;lrqe Brown-ainsi qu'à mon

, , mari, Robert Gellert.

1

;.

v

\

A't B.\

,i , >

.

,

(11)

--/

c

SIGLES, EMPLOYÉS

'--J J ' )

AT AidébaJta.11 ou R.a Uewr..

1

-" A Amadou

SE Au ~euJ.R. de

.e

1 en.6-eJt CR Ce qu '.il -6aut de Jtegtr.eU

?

DV V..(,!J-mo.(. que -je V.0!J f

/ ) DA Vaux. -ametr. / K Ka,tIunandou

\

DE La dotr.me~e éveielée FL La -6-(1t du .e.oUP-6 -gaILOM 4-( FP La

-6ietVl

de peau

NL La I1lLÜ ~-i. .tangue

SI La ~a..i601l de .e. 1 -i.nc.on~oJLt

EP L 1 eau ut ptr.o~oHde

. CC Le. c.ltemùl de .e.~te

CS Le C.Oe.WL -6auvage ,-GE Le gtr.attd éUx,j..Jt JN Le 10WL e..6t Ilo-i.tr. LP Le polLtique LT Le témoin

..

TJ Le temp.6 de-6

1

e.ux.

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Lu hauu CJU.6

(12)

\-LI . RQ !J LI LI MPA MT M

MAD'"

ME NM PA .. P PB PN QV TB FZ MTA SYE VF

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Lu ltempa1t.t:6 de Québec 4).<.le joyeu.6e

MairLtenallt et :taud OLIIU!

M~e-Anne ma douee

Non MOIt6.{.eWl

P eLLlt et amo Wl

Poupée

POUlUl!Ute dal1~

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PJUt1c~.6e de luUt

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Qualtd j' atvta.i. payé tOit v~age

Tête

Blanche

Une ~Oltê.t POUlt Zoé ...

Un mât :touehcU.t R.' azLVL

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Une .6tU..6011 daM

ta

vi..e d'Emmanuel

t'i...6age de -6-ièwle

V.{.vlte! V.{.vlte!

..

-u

(13)

c

c,

--.

"

,

(

«Quand [la femme] vivra par elle,et pour elle, ( ... ) elle sera poète ell-e aussi! Ses mondes d'idées'différeront-ils des nôtres? Elle trouvera des choses étran.,ges, insondables, repoussantes, délicieuses; nous les prendrons, nous les' comprendrons.»

Arthur aimbaud.

J

Le:t:tI/.e à Paul VemeltY,

C~ev~e, lS'mai 1871

- ',.

(14)

o

1 NTRODUCT 1 ON

(15)

c

o

, ,

.

Le roman féminin n'est plus, comme dans le passé"

considéré comme un genre mineur.

,

Il est, en effet,

/l'

reconnu maintenant au mêm(- ti tre

,gué

le roman masculin ,

~ 0 ' \

comme étant, outre une expresS(0n puremènt esthétique, un

moyen de- connaissance

·profondè",,~e

l'être humain et du

monde.

Notons, par

ail~éurs,

qu'à toutes les époques de

notre histoire littéraire,

la femme

écrivain s'est

prévalu~

d'un nombre assez important de chefs-d'oeuvre.

On sait, par exemple, que c'est Félicité Angers

qUi

a

----~ ~

créé «le premier personnage de

roman

né au Canada- .

f.rançais»'

(1).

Précisons qu'il s'agit de la" première'

aéroIne. de

notre littérature.

La 'critique s'entend

d'a~lleurs

pour dire" qu'avant 1881, date, de la parution

~

. de Angéline de

Montbrun

(2),

notre

roman

restait

\

, 0

embryonnaire et n'

app~tenai

t

qu'à

deux groupes:

les

..

l

romans

patriotiques et les

romans

d'aventure.

si

l'oe'uvre de celle qui cachait son nom sous le pseudonyme

de Laure Conan échappa à cette classification c'est,

~I

sernble-t-il, parce· qu'el,le a C'été la première parmi nos

.

\ ~

romanciers

à

acco;der' de

1 '

i~portance

à

l'étude'

, ".

psycholoqique de ses personnages. En

ouvr~n~

«l'ère de la

2

(16)

.

(-o

l,

f

l

3

.

psychologie, du personnage considéré

pa~

lui-même- (3),

Laure Conan établissait simultanement un lien entre la

production romanesque du dix-neuvième siècle et celle dû

vingtième siècle.

,Le

roman québécois tout

féminin, voire du

débuta ainsi avec cette

auteure.

,

,

An éline

n'est cependant pas

l'uniqu~

texte féminin

à

avoir ait date dans notre littérature.

Périodi,quement, en ef1et, d'aut.res écrits féminins ont

contribué

à

l'évolution-de notre r'Qman.

.

SQr ce point,

mentionnons

que

dans '\ Le

survenant

( 4 ) ,

Germaine

Guèvremont, par exemple, s'éloigne ,des sentiers battus et

1

réussit ainsi

à

devenir:

La première au Canada français,

à

dessiner un

p~sage

terrien qui ne

, soit pas la projection d'un rêve

nationaliste,

ou

d'un

rêve

de

possession, mais un paysage humain

et

le

lieu

d'une

existence

possible (5).

"

, \

.

Une autre femme. Gabrielle Roy, joua:

elle aussi, le rôle

de~précurseur

dans notre littérature.

En effet! Avant la

-'

parut~on

de Bonheur d'occasion (6),

<J

,

"

la

région

métropoli taine

( .•• )

n'avait servi de c,dre

à

aucun

(17)

• 1 ,.,

..

,

-.

,

\) 4 \

\

roman de valeur, enèore moins à an chef-d'oeuvre (7).

Nous devons ainsi à cette romal\cière "d'avoir orienté

~

.

notre roman vers l'étude du milieu urbain.

e:,

Françoise Loranger , appartient, au même

ti~

que" Gabrielle Roy et Germaine Guèvremont, au rang des

écrivai~ québédOis qui ont contribué à l'évolution des \ettres

québéc~ises.

Gilles

Ma~cot:te

n'a pas tort de dire que la raison pour laquelle nous devons retenir le nom de Françoise Loranger, c'est parce que son-· roman .Mathieu (8)

donne vie à

un

personnage dont la

conciliat~n psycholog~que (angoisse, haine de soi, désir de blesser, passion intellectu.elle contrariée) semble fasciner toute une génération nouvelle d'écrivains (9) .

Quant à Anne Hébert, poétesse et romancière é~éri te , ~

rappelons quefon recueil de nouvelles Le torrent (10)

J

«inspira ,là notre

littératu~e

ses

structure~

d'échec et ~

d'absence» (rl).

citations . ci-dessus suffisent pour nous convaincre d'un état de fait objectif.: la femme écrivain

\ pl. ? .... , ? ,

.'.5 __

... _____________

'~'

....

~! . . . . ' _ _ _ _ _ ...:...:..."--~~l .. _'----... ,-.,---.--~~ "

(18)

1

o

5

a un, rôle essentiel à jouer dans notre littérature, car

elle n'est pas sans l'enrichir et la transformer, Force

est de constater cependant que si la contribution

f~minine aux lettres québécoises est incontestable, avant

1960 le statut numérique de la romancière était chez nous

inférieur à celui du

\

romancier, Sur ce point, notons

r

.qu'en 194"5, le Québec comptait enV1ron cinq romancièr~s

(12) ,. Or, à compter de 1960, période critiqJe de

7

transition et de changements, le pourcentage de

.

~

Québécoises qui publient des romans se mUltiplie. 1:J )

un article intitulé Les personnage~ féminins

Dans dans

quelques romans québécois

,

André Renaud signale

l'ampleur. de l'essor que connaît le roman féminin à

l'époque qu'on a convenu d' appeler au Québec la

Révolution tranquille. Il fait justement remarquer,

entre autres, qu'en 1960

.-sept romans canadiens sont l'oeuvre'

de romancières; neuf, l'année

suivante et sept aussi en 1962. En

trois ans donc, les romancières

canadiennes publient' vingt-trois

ouvrages soit exactement vingt-deux

de plUS qu'en deux siècles de

littérature. EnJeffet, Laure Conan

a publié Angéline de Montbrun (en]

1881 ( ... ) et,' après Laure Conan,

i l faudra\ at:tendre le moment où Gaétane 'de Montreuil, ( ... ) fera, à,

son tour quelque~ romans. En somme

c'est le v.ingtième siècle, et les dernières décades, en particulier,

(19)

l'

)

o

" ~, rV~ t~ ) .. ' t 1" ~~. 1 5 - , , J" , " 6 '--J

qui ont enregistré l' appari tion de la romancière au Canada français

(13).

Remarquons, par ailleurs,-qu'entre 1960 et 1970,

période de considéraales seulement donna 'naissance

1?ouleverséments

cà une nouve!le

qui non identité nationale" mais fut aussi une grande pério,de de richesse

l ,

litt&raire, environ soixante-dix romans québécois sont le ~

produit d'un imaginaire féminin. C'est 1 "essor prodigieux que connaît à compter de 1960 la production romanesque féminine, jumelé au ·fa.:l,.t que les romancières

ont contribué , à transfor.mer notre littérature, qui nous a " amenée à vouloir analyser le r'oman féminin québécois à . •

"

l'heure de la Révolution tranquille.

,

""

Bien qu'~l ne nous appartienne pas ,ici d'en

l '

suiv:z::e'" l'évolution,. qu'il nous suffise, de dire que, la , , 1

plùpart idéole/ques ,québécois'

0 , '

des hiS1:oriens ou

~

s'entendent pour dire que cette révolution a é).vant tout été un phénomène d' ordre" cul'ture~ qui

a

permis' au Québec· d'accéder enfin

à

«i'âg~ de là ,parole»' (14). La

,

libéra'tion de c"et'~e, parole touche de près l'évolution 4

même ae notre 'littérature, qui-. elle', se trouve subitement

" f

«e~ .bUllition~

(15) et semble aussi-permettre

1

'éclosion'

,

de l'expression artistique et lit~éraire des femmes.

.. "j

(20)

o

Q (

o

...

,

.

" " 7 "

C'est ainsi que d'un point de-vue numérique, et, pour.la "

première fois

dans

l'nistoire de, notre roman,

la

romanèière des années soixante contribue presque au même

()

ti tre

qu(:!

son· homologue masculin

à

notre productipn, '. .

romanesque.

Cette richesse d'oeuvres romanesques féminines

1

nous a

poussée

à

nous poser une première série de

questions.

Évoluant dans une société qui cherche

à

se

mod~rniser,

les écfits de

nos

roma.ncières

sont-ils

Q '

imprégnés, comme ceux des romah,ciers assez larQement

connus (Hubert Aquin, Jacques Godbout, Gratien

Gé~inas,

Réjean

Ducharme,

Claude

j"asmin) ,

d'une

idéologie

nationaliste?

Al' instar de Jacques Pelletier, peut-on

affirmer que dans le roman féminin des années soixante

comme dans toute notre littérature:

le courant de la décolonisation

oonstitue la

~endance

majeure de la

'production

roman~sque

s'imposant

même,

aux

écrivains

moins

«militants» (16)?

Une première lecture des roman$ féminins de la

'"

décennie

romanesque

en

question nous

a permis dé

, '

constater

qUe

nos écrivalnes

sont

en

marge

des

préoccupati~ns

centrales

qui

animent les oeuvres de leurs

contemporains masculins.

En·

éfff;!t, à

l' exception \ de

-" .

(21)

c

, ..

. .

8

Simone Làndry-Gu11let qûi, dans L' itinéraire ( 17) , représente un personnage.

-

épisodique de' militant , indépendantiste et de

Anne-Ma~ie

qui, dans

Ma~te;~nt

et touj ours (18),. crée une héroi'ne qui, elle! se donne pour

,

mission celle de transformer la société, aucune, de nos rom4ncières ne Sembl/, préo.ccupée' par la question de-1 ; identi té /,collecti ve qué~écoise. ,C'est dire que' les

c

préocqupations d'ordre social liées à ~la condition québécois.

d'opprimé

nu

peuple Itelles , , qu'elles

':3 ~ ..

apparaissent chez leurs confrères Sont absentes de leurs romans. , Cet état de choses nous monti~ q4e nos auteures

e. • ,

) font preuve d'un, non-engagement à p~u ~'près total.

"

Con~rairement

au romart' masculin des art'nées

s~ix~nte,

ie roman féminin,

lui,

ne s'inscrit donc pas dans, le sillage d'une «littérature de combat» (19) qui ,privilégiait,

" , ' . \ t

entre autres, la problématique de la décolonisation':'::

\

entre

.

.

Comment expliquer. l'écart qui semble la production

roman~que

féminine

se èreuser, des années soixànte et 'la proçiuction mascul.il}e?

• 1

Un pr~mier élément ...

d' eXP1~ation se tr~uve dans notre histoire, car ~.' apathie

politique de nos romancières est explicable

à la~ière

de la donnée suivante:. elles évoluent dans une

s6Cié~é

, ,

-où tradi t10nnellement on encourageait la femme à croire que la pOlitiquer devait être uniquement' l'affaire des

0,

~

/ ,

, ' l

(22)

,

-,

\

o

hommes.

. En'

1965

Hermine Beauregard s'interroge sur

. ,

l'ap~thie Politi~ùe

des Québéco1ses et conclut:

'~

.Les

~roblèmes

raciaux

(anglais/

français) n'ont que modelé légèrement

le profil de la Canadienne; ( ••. ) les

_ femmes

du

Québec

ont

pou~

la

' . politique et le gouvernement d-e leur

/ . pays, la plus parfaite indiff,érence

~ 4 .(20').

. Un,

deuxième

élément

d'explication

de

l'indifférènce dont fait preuve la romancière"québécoise

b

à

,l'égard du sort collectif de -son peuple peut être,

.

comme

' r

le

s.iqnale Michel Mercier, attrlbué au fait, qu'en

, 9énéral,

" .

Le

roman

féminin

répuqne

à

, s'aventurer hors du milieu sociâl et

familial

qui est

f~milier ~.

son

auteur (21).

C'est' ainsi que dans la perspectiver d'un point de vue

tout

à

fait différent des romanciers, les ,romancières,

elles, créent des romans intimistes et

placen~

au

c~tre

de leurs intrigues des héroïnes sur' lesquelles reposent

-toute l'action.

Bien que celles -ci soient montrées ,corrone

t>

a,.yant une certaine liberté d'action individuelle, leur

, ~

permettant par exemple de travailler et de voyager, ce

...

,qu;1 nou~

a paru ,comme l'emportant. sur toutes autres,

(23)

.G

10

c'est leurs préoccupations

Jl

~ ,- p

d'ordre "intime. Ces

personnages sont, en effet, rarement a déc,rits COrnnfe

_ L ..

dépassant des soucis liés à la vie privée. " En sonune,

leur libération que signale entre autres leur

participation à la vie de la cité reste

principalement--comme c'était le cas des héroines avant 1960~nourrie par

des préoccupations d'ordre personnel.

Si, conune 1 • écr i t Jacques Cotnam dans Le roman

québécois à l'heure de la révolution tranguille, la

littérature des années soixante a pour fonction URe

catharsis"catharsis- qui

t) \

s'évertue à exposer le mal dont

souffre l'homme québécois, à

l'identifier,

â

en ,découvrir les

racines secrètes et~profondes (22),

,

'on peut, à la lumière des écrits de' fe~es des années

1

soixante, . conclure que le «mal» dont souffrent - les'

,

Québécois est identifié différemment selon' que l'auteur

o •

est un honune ou une fenune. C'est en ce sens que, avec

une certaine maladresse et d'une façon très embryonnaire,

nos romancières introduisent une interrogation tout à

1

fait nouvelle dans notre littérature.

/

,

/

. . \ # ,

)

(24)

o

o

11

Cette interrogation porte essentiellement sur les'

.'

rôles étouffants dans lesquels la société confine

traditionnellemen~ la femme. A compter de 1960, nos romancières osent ainsi donc parler du «mal» féminin né de cet état de fait ,et, conune l'a si bien dit Hermine

Beauregard dans un artic~e intitulé De Maria Chapdelaine à'1!;laine Bédard

,

Celles "qui -o.nt osé élever la voix l'ont fait par la bouche de leurs --.. héroInes. Ce qu'Angélique de Montbrun avait laissé devin~r Diane Giguère, Claire Martin et

Marie-e, Claire Blais l'ont crié (23).

>:;,.

C'est

ainsi

qu'à ~a différence ·de leurs homolQgues

masculin~ qui sont absorbés par la problématique du nationalisme, nqs romancières ~ elles, mettent. l'accent, consciemment 'ou non, ::jiur la seule problématique des

femmes. Dans ces récits intimistes,- la thématique de ·la colonisation du peuple québécois est en effet occultée au profit des premiers balbutiements d'une émancipation des

per~onnages' féminins •. La lutte 4e nos héroïnes apparalt

dans ces textes' coÎnme se jouant ~ssentièlleme' un plan individuel et dans un cadre intimiste.

, C'est à parti'r de ces constatations avons choisi de nous limiter à un seul aspect

(25)

o

--- -~~~---o

Q, 0

12

féminin québécois, à savoir l'image de la femme dans ces

~

fictions des années soixante. La date de 1960 a été le point de départ de notre recherche car, comme on le sait, elle marque le début d 'un~ nouvelle époque dans notre histoire. Par ailleurs, nous avons déoidé de limiter f notre corpus à cette décennie à la fois parce qu'un

"

corpus de dix ans était déj à considérable et parce qu'

it,

nous a semblé raisonnable de maintenir une certaine distance entre la période actuelle et celle de notre corpus.

Dan!? notre analyse des romans féminins de la période choisie, nous observerons les variations que subit l'image de la femme. Des, constantes se, dégagent-elles de c~tte analyse? Une progrèssion marque-t-elle au contraire l'univers féminin décrit par ces romancières entre 1960 et 1970? Y a-t-il dans l'écriture féminine,

\

avec l'ouverture permise par la Révolution tranquille"

1

l'émergence d'une conscience féminine spécifiqu~? On cherchera à définir l'archétype féminin ·dans toutes ses

1

nuances (psychologiques et idéologiques) tel qu'il' se

dégage des r~m~ns féminLRs de l'époque choisie. On verra dans quelle mesure les romancières de cette période sont annonciatrices d'une image nouvelle de la femme dans la littérature et, entre aQtres, si cette métamorphose annonce le féminisme, actuel. Nous croyons en effet que

(26)

·0

la' fiction est un mi:t.'bir de la conscience collective, ou

\

comme le signale Claude Racine, que la littérature

ne rend pas compte de ce qui eSt4,(j

mais de ce' qui tente de devenir. <

~ Elle s'attache· à ce qui fait

)

problème, à. ce qui est mis en

question; ( ..• ) elle fait éclater les contradictions et les conf li ts

qui sont vécus plus ou moins

inconsciemment (24).

L' obj et général de notre étude ~ est d'analyser

tôutes les images de femmes qui se dégagent des romans

féminins entre 1960 et 1970. Dans la riche productiOn

romanesque féminine de l'époque en question, i l nous a

semblé nécessalre de délimiter notre corpus. Nous avons

o

donc exclu une vingtaine de textes pour des raisons

diverses: cinq d'entre

o eux,

,

par exemple, ne

développaient que superficiellement des personnages

féminins.

,J' Parmi ces romans, on trouve: Où g#ante la vie?

(25) de Reine Malottin; Le fou de la reine (26) de

Michèle Mailhot; Cancer (27) de Anne Bernard; Autour de

o

toi Tristan (28) de Claire France et, enfin, ~David Sterne

-(29) de Marie-Claire Blais. Par ailleurs, six autres ne

mettaient pas en scène de personnages québécois ou alors

les situaient à Il' étranger. . Ce sont La\ fragilité des

c>

ido~es (30) de Lucile Vallières; Toi et moi vers l'amour

(27)

c

t

.-

- - - -

----o

, 14

Reiné Malouin; L'été de la cigale (33) de Yvette Naub:9rt; Les Cormo;ans (34) de Suzanne Paradis, ~insi

que Les solitudes d'automne '( 35) de Claudette Lawrence. Enfin, nous inspilànt de Laurence Bardin qui précise dans L'analyse de contenu que

la représentation d'un opjet (choses, gens, idées) plus ou moins détachée de 1 sa réalité objective,

"~agée par les membres d'un groupe social avec une certaine stabili té (36),

,

o

nous avons voulu respecter la loi de l ' homogénéité en

élaguant de notre corpus les romans qui sont 1 t oeuvre de

néo-québécoises. Au nombre de douze, ces romans sont: La montagne secrète (37) de Gabrielle Roy; Le député (38) de Charlotte~ Savary; Dans le Muskeg (39) de

.

,

Marguerite Primeau; On a mangé la dune (40) de' Antonine Maillet; Fuir ( 41), Survi vre ( 42 ) et Rue Sherbrooke Ouest (43) de Alice Parizeau; Le passage (44) et Un été ,omme les autres (45) de Minou Petrowski; Le képi et 'la cravache (46) et Maudits Français! (47) de Nathalie Fontaine et enfin Un amour maladroit (48) de Monique

.

.

"

Bosco. Remarquons, par a~lleurs , que ces romans n' animent

~as

d' héroïnes qui en plus d'être Québécoises .

. f

ont un rôle important à" jouer dans le développ~ment même

(28)

l:

Les infusoires (49) de Monique Bosco. Si nous avons choisi d' inclure ce roman dans notre corpus c'est parce que justement l'auteure place au centre

d~

son récit une héroïne

québécois'~

st!r laquelle repose -toute l'action.

. ,

Ainsi donc, à l'exception de ce seul texte, les romans que nous avons retenus sont tous l'oeuvre de Québécoises de naissance qui développent sans conteste le traitement

de personnages féminins québécois évoluant dans leur • milieu.

Avant de parler ~e notre m!thodologie, précisons, qu'à notre surprise, nous aVGns 'aécouvert, en- abordant l'étude de l'image de la femme dans les romans féminins

1)

québécois des années soixante, une absence frappante d' ouvr~ges critiques sur ce sujet. Quelques, exceptions méritent cependant d'êt~e signalées. Dans une thèse inti tulée Le personnage féminin dans le roman québécois

li!

(Unive sity College 1971) (50), Jeannette Urbas, par

exemple

\

romans

a répertorié les personnages féminins' dans les uébécois entre 1940 et 1967. Cette thèse ne traite pas de'l'image de la femme mais elle a néanmoins servi comme document de base ~our notre recherche •

...

L'essai de Suzanne Paradis, Fenune fictive« femme réelle

(SI) ne constitue pas une étude exhaustive du personnage

féminin ou du roman féminin québécois. En effet, dans

la

/ '

"

K1

'or

(29)

1 i • \ -",~~---,,~----;~~~~~-~~~~~~~~~~~---""",'i ; {: 16 ,

troisième partie de cet essai qui porte essentiellement

sur le roman fémlni~ moderne, l' auteure n'aborde qu'une

'dizaine de textes. Ceux-ci sont, de plus, non seulement l'oeuvre de Québécoises mais aussi de néo-québécoises. L'essai de soeur Sainte-Marie-Sleuthère, La mère dans le roman canadien-français (52) ne porte que sur les images

de'mères les plus' fréquentes dans notre-roman entre 1930

.

et 1960, c'est-à-dire avant la période qui nous

intéresse. L'essai de Janine Boynard-Frot, Un matriarcat

en procès (53), se divise en trois parties et seule la

dernière intitulée ,Espace de femme, est consacrée à

l'analyse du personnage 'féminin. En outre l'auteure, qui

s'est inspirée de l'approche marxiste, a consti 'tué son corpus principalement autour de romans masculins entre

1860 et 1960. Cette absence marquante d'ouvrages

critiques sur l'image de la femme dans le roman féminin nous a encouragée dans notre projet

l'espoir de jeter quelque lumière

longtemps négligé par la critique.

"1 ,

de. recherche ,_ dans

sur un sujet

~

,.

~'"

L'objet précis de notre ét~ étant l'image de la

fenune et les rôles qui lui sont attribués, il import~i t

"-

ci'

établir une typologie. Cela nous a imposé l'approche

descriptive et thématiqUe des oeuvres . Notre démqrche

s'inspirera de l, 'ouvrag~ de Laurence" . Bardin sur la

théorie de L'ana1:lse

.

de contenu • Notre approche

.

descriptive comportera trois étapes:

(30)

'. ,

o

o

l i E le

J

déeollpage de

~ (la1 uentilation l'information, dans des

" catégories selon

d'analogie Let la

J

sous forme condensée

, ( 54) •

le critère

représentation par indexation

Notre analyse thématiqu~ consistera à repérer: ~

(

des «noyaux de sens» qui

la communication et_

présence ou la

d'apparition pourront

quelque chose pour

analytique choisi (55). composent dont la fréquence signifier l'objectif

Nous découperons donc les textes

~n f~

de types et

de thèmes pivots et nous regrouperons autour d'eux tout

ce que l'écrivaine exprime à le~r sujet. Nous en ferons

une analysè catégorielle, c' est~à-dire à partir d'une

\ grille établie en fonct~on des caractéristiques ou des

1

~

attributs des personnages qui ~ncluent le rôle, le statut

social et familial et, enf in ~3) perception qu'ils ont

d'eux-mêmes et de leurs rôles.

Nous tenons à signaler que classer les héroInes

dans des cat,égories précises est un~ affaire délicate,

car elles peuv.ent appartenir à plus d'une catégorie. Ainsi, par exemple, certaines héroInes sont classées à la fois dans la rUbrique des mères et dans celle des

(31)

\ . /

(.

18

épouses •. puisqu'il est possible de soumettre un

personnage à upe ou même plusieurs dimensions d'analyse,

(

nous avons inclus ces personnages dans plusieurs

catégories et l'hétérodoxie de notre démarche est tout à

fait justifiable dans la perspective où

On peut, dans certains cas,

remettre en ,question cette règle

[celle de l'exclusion mutuelle], à

condi tion d'aménager le codage de

façon à ce qu'il n'y ait pas

d'ambiguïté (56).

~

C'est ce que nous ferons tout au long de notre étude.

Dans l' opér.;ltion de découpage des catégories,

~nous nous retrouvons face à trois têtes de chapitres qui se subdivisent en sous-chapitres. La première catégorie, de loin la plus importante, porte sur l'image de la femme

dans la famille. Cette catégorie se subdivise à son tour

en 'trois sous-catégories, à 0 savoir celle ",des mères, des

épouses et des filles. La del.lxlème catégorie, moins

représentative, comprend l' !mage de la femme seule dans la société et regroupe les célibataires," les veuves et les reliqi~uses. Ces dernières constituent une catégorie

à part puisqu" elles ne sont pas isolées' comme les

célibataires et les veuves et vivent en communauté. Nous

les r-éunirons sous une mêmè rubrique parce que leur vie

;

(32)

,-•

19

de femmes sans époux nous a semblé leur conférer le même

sta~ut social dans les milieux où elles apparaissent. Les deux catégories se fondent par la suite dans la rubrique

.,

de l'identité des héroïnes. Dans cette troisième et dernière partie de

opérerons une synthèse qui permettra

notre thèse.

~

le regroupement de toutes les héroïnes dans. leur interrogation sur leur identité .

A chaque étape de notre analyse, nous ne

manquerons pas de nous référer aux ouvrages que des femmes ont écrits sur la condition féminine et qui constituent un important élément d'appréciation de l'image de la femme. dans les romans étudiés. Nous sommes consciente.. du fait que notre démarche présente certainf? inconvénients:. présentations successives d'images d'héroInes, énumérations des oeuvres et des personnages

"-féminins, classement complexe de femmes f icti ves dans plusieurs catégories. Cependant, vu l'étendue du corpus et le nombre impressionnant de personnages répertoriés, c'est la méthode qui nous parait la plus sûre.

soulignons les forces fondamentales du type de ,

prat~querons dans notre recherche.

cribâque que nous

Tout d" abord, l'analyse de contenu nous permet de

}

fJ

,

/

(33)

"

,

~ -' .... -.- .... -1 --~ -~ ~- ;,,~ -"f. -i ... r ... -.1!t! .. -:-·1O ---,-~ ~ > ~ ~ 'A~"!~.---.'."'~. ,,-;'-: ... ~Pi'-7!~,~.:\=-"'--:.f '"-'i.l'''--~---''---''-:O~~ ~ ~ ... '! i ~: ~ ~ p~~ J{ t :'!. '~

.-

.~

20

respécter la primauté des textes en les éclairant surtout

t de l'intérieur par voie d'une critique interne. Elle

nous amène, par ailleurs, à proposer une lecture fidèle . et objective des 'diverses images de fermnes qui se

.

dégagent ~notre corpus, car elle-nous oblige à faire un inventaire méthodique des types de femmes qui peuplent l'univers imaginaire de nos romancières et à' isoler les caractéristiques que nos héroInes ont en conunun afin de pouvoir les classer dans des catégories pr~cises.

Celles-ci offrent une voie d'accès privilégiée à la

perception qu 1 ont nos auteures de la femme et de ses

images.

Toute oeuvre littéraire jpuit aussi

êi

'un,e sorte

~

-de transcendance, c'est-à-dire qu'~lle n'existe pas dans un en-~oi abstrait. Comme -le signale Jean-Charles Falardeau,

(

le romancier invente des êtres et les lanoe dans des aventures humaines. Il pousse jusqu'àoleurs limi tes des destinées dont il a trouvé des indices dans son expérience. Il rend expl.icite ce qu'il a vu de latent; il décrit comme vraisemblable ce qu'il a pressenti comme possible; il offre comme organisé ce qu'il a observé comme diffus (57).

\

(34)

o

o

21

Cette dialectiqu~ constante de l'écrivain et de la vie,

nous

~

conduit à aj outer à notre cri tique interne une

cr i tique externe en nous référant à des textes

philosophiques et sociologiques qui analysent l'image de

la femme dans la société. A partir de ces deux

perspectives~-la fréquence d'apparitions de certains types de personnages féminins et les idées qui circulent

sur le sujet dans la société--nous déga~erons des

constantes significatives de ces images de femmes

répertoriées dans notre corpus. Il s'agira enfin de voir

si nos romanciêres véhiculent seulement des mythes

anciens ou si, au contraire, elles sont en train de créer une image nouvelle de ,la femme fictive.

.

"

(35)

" 1 22

~'

(

( 1) ( 2 ) NOTES ~ INTRODUCTION

Gilles Marcotte, Ulle .tittéM.:t.wt.e qui -6e

.o.aA.:t.

(Montréal: H.M.H., 1968), p.- 16. ,

Laure Conan, AngUille de Mott.tbllUlt (Montréal et Paris: Fides, «Collection Bi~liothèque Canadienne-Française», 1967).

( 3) Suzanne Paradis, ~ Femme. -Iric..ti.ve, .o.enune 1Lée.U.e (Québec: Garneau, 1966), p. 101.

( 4 ) Germaine Guèvremont, Le ~LVr..ve.t1ant (Montréal et Paris: Fides, «Collection Bibliothèque Canadienne-Française», 1969).

( 5 ) Marcotte, Une U.:ttéJt.a.tUJte qui. -6e -6a).j:., p. 37 .

( 6 ) Gabrielle

..

Roy, Bonhe.Wt d' OC.C.a.6.{.OIl (Montréal:

Librairie Beauchemin( 1967J.

( 7 ) Gérard Bessette et al., Hi6to4e de la ~ tLttéJt.a.:twr.e

c.attacUe.nlle-tYtall~e. (Montréal: Centre. éducatif et culturel, 1968), p; 471.

( 8 ) Françoise Loranger, Mn.tIU.e.u (Montœal: Le Cércle du Livre de France, 1949).

(9) Marcotte, Une R.lttéJt.atUJte qui -6e. -6al;t, ,p. 43. (10) Anne Hébert, Le

'Beauchemin, 1950).

tOMent (Montréal: Édi tions

"

(11) Albert Le Grand, «Une parole enfin libérée», Ma.lttte.n4tlt, nO 68-69, septembre 1967, p. 268.

(12) En effet, s~uls cinq romans féminins ont été publiés en 1945. Voir là-dessus de Màxime (Marie-Caroline Taschereau-fortier), ~ l , L' aubeJr.ge. Bottac.itta

(36)

o

o

(Montréal: Beauchemin, 1945); de Marie-Nille Pintal, ~4iOtl de .o.emffle4 (Montréal: Les S;di tions

Lumen, 1945); de Gabrielle Roy, BOllheLVL d'occcuioll

(J'1ontréal: Société des tditions, Pascal, 1945), 2 v'bl. ; de Afirienne .Maillet, AmoW,l. te.tlace. (Montreal et lOttawa: Les t:ditions du Lévrier, 1945), et enfin dé Jacquelllie· Dupuy, Il

ut

Wl

1

aJLd..i

tl

'Montréal: Les Éditions Variétés, Dussault et Péladeau, 1945).

(13) André Renaud, «Les personnages féminins dans

quelques romans québécois»" Le. Jtoman

canacU.e.n-~iat'_ Tfme II! (Montréal et Paris: Fides, 1977) 1

.

~C'est

nous quL·souliqnons.J

(14) L1expressi,\n est de Roland Giquère.

(h5) L'expression est de

G~rard

Bessette.

o

(16) Jacques Pelletier, «Nationalisme et rOman: une

inévi table conj oncture,., Le.c.:tuJr..e potLUque du - Jtomatl

Québécoi4 c.ot1.te.mpoJto.in (Montréal: Université du

Québec à Montréal, p. 2, «Collection Les cahiers d'études littéraires», n° 1,1984).

(17) Simàne Landry-Guillet, L'~néJtaiJte. (Montréal: Le

Cercle du Livre de-France, 1967).

( 18) Anne-Marie, Maintenant

e:t

:toujOI.1/W (Montréal: Le Cercle . du Livre de France, 1967.

( 19) Pelletier, «Nationalisme et roman: une inévitable

conjoncture», p.\2.

(20) 8ermine Beauregard, «De Maria Chapdelaine à

:E:laine Bédard», Li.beJLté, VII, n° 4-5, jui:llet"'août

1965, p. 353. (C'est nous qui soulignons.) ~

,

(21) Michel Mercier, Le Itomo.n -6é.mi.nbt (France: P.U.F., 1976), p. 20.

(22) Jacques Cotnam, «Le roman québécois à l'heur~ de la Révolution tranquille», Le

Itoman c.attaêüe.n 6Itança.i.4, Tome.

111 (Montréal et Paris: . rides, 1972), p. 293. (C'est nouS qui soulignons.)

(37)

( 23)

( 24)

,l'··

24

Beauregard, «De Maria Chapdelaine à ~laine Bédard»,

p. 353.

v---r

Claude Racine, L' anti.c1é1ti.c.a.f.,U,me dat1.6 le ",oman québéc.o..i.4

(Montréal: Hurtubise H.M.H., 1972), p. 17. (C'est \ nous qui sou1ignbns:)

l ~

(~5) Reine Malouin, c.hattte la. 'vie? (Montréal: E:ditions de l'Action Catholique, 1962).

Q

(26) Michèle Ma V\hot--, Le

.o.ou

de la Itune (Montréal: S!ditions du Jour, '1969) •

( 27J Anne Bernard, çanceJt

de F~ance, 196~).

1

~Montréal: Le'Cercle du Livre

, 1 ~

( 28) Claire France, :AutoUJt de toi IILl.6.tan. (Paris: Flanunarion,' 1962).

(29) Marie-Claire Blais, Vav.w. Stelttl,e

du'Jour,1969.)

(Montréal: Jtditions

(30) Lucile Vallières, La ~g.éLi;té d~ .i.dole.6 (Ottawa: Ëditions du Lys, 1964). .

.~

, ., "l '"

(31), Marie-Aqne Guy, Toi. et moi. v~ lJàJnoWL (Québec: Les . S!ditions de l' Action sociale catholique, 1963).

,

( 32 ( Reine Malouin, La pJrA1M.e au -6oleÂL (Québec: [ s.é. ] , 1960). '

(33) Yvette Naubert, L'étt de la. c..igal~ '(Montréal: Le ,;Cercle du Livre de France, 1968).

\,

( 34) Suzanne Paradis, Le.6 COJUnO~ (Québeé: !ditions

Garneau, 1967). (35) ,

o( 36)

Claudetté ':l:rawrence, Lu -6o.titud.e.6 d'automne 0 (Québec,:

!ditions Garrteau, 1967).

Laurence Bardin, L'anaLY.6e de' con.te.nu (Paris: Presses Universitairès de France, 1977), p. 51. ,(C'est nous, qui soulignons.)

(38)

o

o

25

(37) Gabrielle Roy, La' mOt~tagtte. .6eCJl.Ue (Québec: !dîtions

internationales Alain Stanké~ 1961).

(38) Charlotte Savary, Le député (Montréal: tditions du Jour, 196_1). ..

(39) Marguerite Primeau, Va.It.6 'te MlUkeg (Montréal et Paris:

Fide~ 1 1960).

(40) Antonine Maillet, On a mangé .la dune.

tditions Beauchemin, 1962). (Montréal:

(41) Alice "Parizeau,

1963) •

(Montréal: Librairie Déom,

(42) Alice Parizeau, Rue SheJtblt.ooke Ouut

Cercle du Livre de France, 196J).

(43 ) Alice J;larizeau, Swr..v..Lvlt.e (Montréal: Livre de France, 1964).

(Montréal: Le

Le Cercle du

( 44 ) Minou Petrowskic' Le pa..6.oage

du Livre de France, 1966).

(Montréal: Le Cercle

(45) Minou Petrowskl, «Un été comme les autres», (~~ du Canada F 1Ultt~, vo 1. X:V, 1963, pp. 217 - 319 •

( 46 ) Nathalie FOntaine,' Le kép..L et

ta

CJLavache

(Montréal: Le Cercle du Livre de France, ,1962).

(47) Natnalie Fontaine; Ma~·Flt.anç~1

~ditions de l'Homme, 1~64). Montréal: Les

(48) ~onique Bosco, Un amoWl ma!adJtoft (Paris: Gallimard"

1961) • c

(49) Monique Bosco,

Le.o

.ln6u4o.ur.e.o

(Montréal: H. M. H. , 1965, «Collection l'Arbre»). .

( 50 ) ~annette Urbas, 'Le pe'V6otttta.ge. 6émLtUt1. daM le Iloman

c.attadien--6Jtaru;.a.W. Ph~D., Toronto, 1966.

..

(39)

( 52 )

\

( 54 )

)551

( 56 ) (57 ) l '

(,

o 26

\

Marie-Thérése Laforest (soeur Sainte-Marie-Eleuthére),

La mèJLe dall-6 le Itomatt catta.!Üell--6Jtanç.a,<.-6 c.ottt«mpoJta,ùl, 1930-1960.

Ph.D., Montréal, 1961. En volume: Québec, Les Presses

de ~'Université Laval, 1964.

"

Janine Boynard-Frot, Un maVUaJtcat en pltOCM ~ AttalY-6e

6y-6témaUque de lLomatt-6 canacUet1-6--6Aança.i-6 1f60-1960 (Montréal: Les Presses de l'Univers~~é de Montréal, 1982).

Sardin, L'analY-6e de contenu, p. 47. Ibid. , p. 105 .•

Ibid. , p. 121.

Jean-Charles Falardeau, «Les milieux sociaux dans le roman canadien-français contemporain», Ut.téltatUlLe

et -6ociUé c.atuuüelUte6-~at1çlU6e6 (Québec: Les Presses de ~'universit~ Laval, 1964), p. 123.

)

(40)

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L' IMAGE

DE LÀ

FE~ME

DANS

LA

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1

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(41)

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î 1 CHAPITRE l

L'IMAGE DE LA MÈRE CHEZ LES ROMANCIÈRES QUÉBÉCOISES

DE 1960

À

1970

(42)

'J

o

de la

mère

avant

1960

Avant d' entame,r l'analyse l ltteralre de notre ' ;. . corpus f",> qans la perspective du personnage de la mère,

penchons-nous brièvement SUl> le portrait que l ' histoire

~

nous, lègue de la mère réelle en revenant aux premier s

temps de la Nouvellè - France. Bien qu'il existe une

«pénur ie de documents (o •• ) sur les femmes du Québe\:::»

ü(l), plusieurs historiens mentionnent que le rôle de la

~ ,

mère dans cette jeune société apparai t corrone mul tiforme

et d'une importance- capitale~ A en croire' Jacques

Boucher f la division entre le travail féminin et le

t,ravail masculin n'étai t pas encore, à cette epoque, ,

rigidement définie (2). Cette thèse est rcprl.se par

Marie Lavigne et Yolande Pinard. Ces dernières précisent

que la iiberté dont disposaien.t les épouses et ~es mères

en matière de travail est ~mpréhensible si l'on songe

que la société dans laquelle elles évoluaient avai t

«nesoin de tout son potentlel humain f quel que soit le

sexe, pour se d~velopper» Epouses et mères

s'acharnal.ent donc, -" au mème tltre que le mari, à

(43)

·~

29

«défricher. , bJ;ûler, piocher, construire, récolter

,-écorcher des 0 :peaux, calfeutrer» (4). Or, si la mère

travaillai t comme son mari dans la broussaille et aux

'~ champs, elle n'en restait pas moins seule responstble des

.,.

..

«tâches de ménage, de couture et de cuisine» (5). Le

chevauchement des rôles restant fatalement à sens unique,

fIes .... efforts de ces femmes de Pionn1iers ne se limitèrent

~ à assurer uniquement ce qu'on a appelé la revanche

des berceaux, mais elles collaborèrent à toutes les

tâches matérielles

li~

processus de colonisation._

Plus tard, quand le glas de la conquête sonna la fin du Régime français, les Canadiens, privés du lien

\

avec la France, s'isolèrent sur leurs terres. Ils

chargèrent alors les mères d'une nouvelle mission:

conserver la langue et la religion héritées de la France.

Assurément, elles re.levèrent ce défi: c'est bien grâce

aux efforts d'une frp.ncisation fermement maintenue dans

..

/

les familles que nos ancê~res purent résister à la double

• influence anglaise et protestante qui caractérisait le gouvernement central dont ils relevaient désormais.

,

Chose intéressante, cette réalité

socio-historique se reflète ~dans la littérature

canadienne-française d' avant 1960 comme si le mythe de la mère ,/ né

,de notre histoire et nourri pari la religion catholique,

1

1

_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ ~_~_L

(44)

c • ...

o

30

avait encore beaucoup de force \ dans l'inconscient

collectif jI En effet, presque toutes les héroïnes de

fiction ressemblent à l'aleule de Beauchemin qui, dans Ma Lointaine Aïeule, se déplace touj ours le «chapelet dans la poc~e» (6) et la prière aux lèvres. Et ce qui domine dans ces images de femmes, Cf est qu'elles sont toujours

représentées dans le rôle de la mère. Le roman de

~abrielle_Roy, Bonheur dJoccasion (7), off~e une synthèse

\

particulièrement réussie de ce type dans le personnage de

Rose-A~na Lacasse. Celle-ci est décri te comme une mère

"-féconde,\ robuste, besogneuse, protectrice,

1

infatigabl~ment soumise à la volonté de Dieu (8). Cette image est d'ailleurs particulièrement développée dans

If oeuvre de Gabrielle Roy, mais on la retrouve, quoique moins élaborée, dans tous les romans de cette époque. Ce phénomène permet de vérifier l~ principe de Goldmann selon lequel la forme romanesque. serai t, entre autres, une «transposition sur le plan littéraire de la vie

quotidienne~ (9).

A partir de 1960 toutefois, le Québec vit une remise en question de toutes ses valeurs. A ce mouvement d f idées on a donné le nom de «Révolution tranquille"

( 10) . Après aVOl.r vécu quelque peu repliée sur

elle-1

même, notre province, qui se trouve en pleine expansion Qéconomique, cherche à s' aligner sur les autres sociétés

(45)

31

t

technologiques. La mort de Duplessis en 1959 libère ce

besoin de changements qui est ressenti à tous les

niveaux. Après vingt ans d'ex~l, le Parti libéral lance

sa campagne électorale avec le slogan suivant: «Il faut que ça change" 1 (11). Pour la plupart des sociologues,

son élection se distingue en ce qu'elle représente «un

phénoméne social total» (12). Le Québec vient à peine de

.

\

couper ses liens avec l'esprit conservateur de l'Union nationale.

Le' triomphe libéral entraîne un écroulement des

valeurs anciennes.

.,

A l'isolationnisme préconisé pendant

si longtemps par le clergé, on substitue une exigence de

laicisation: c'est une rupture totale avec le passé qui

~ransforme radicalement ,la société canadienne-française.

Désormais, le «temps

~riviléqié

'[c:rssel d'être le

passé pour devenir celui des autres sociétés

industrielles: l'avenir» (13). Dès lors un nouveau

,modèle de société est proposé et son cri de ralliement est «~gali té ou indépendance» (14). Car ce peuple qui semblai t être «né pour un petit pain» (15), se découvre unè conscience nationale dans laquelle i l croit trouver,

à un degré ou à un autfe, une nouvelle fierté. La

révolution artistique tant\ souhaitée par le Borduas, de

Figure

tableau  très  réaliste.  Les  tensions  objectives  qui  résul te nt  de  cette  situation  ne  sont  cependant  jamais  représentées  par  les  écrivaines  de  notre  corpus  ~ui

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